Mais, revenons quelques instants en arrière pour expliquer la situation! Suite à mon partenariat avec Lyle, le maître forgeron vivant dans le nord du royaume, mes déplacement vers la région enneigée sont forcément plus fréquents. J'aime prendre des nouvelles de mes partenaires et, lorsque j'ai des matériaux particulièrement intéressants, j'aime les livrer en main propre c'est un fait. Suite à une chasse dans le sud du grand port, proche des archipels, l'un de mes hommes à trouvé quelques minerais qui, après recherches, semblent de grande valeur pour la confection de lame ou plus particulièrement de pièce d'armure en réalité. Rien qui soit anormal mais sans aucun doute un précieux élément que le jeune homme saura utilisé au mieux dans sa forge. J'ai donc prit la décision de le lui mener en personne! Vêtu de ma veste en tissu anti-climat et Orisha, mon Rarwük, m'accompagnant dans l'expédition! Après tout, mieux vaut rester sur ses gardes, je n'ai pas eu le moindre soucis pour trouver Lyle la première fois mais, vu l'emplacement de sa forge, prudence reste mère de sureté!
Après un passage par forteresse pour refaire le plein de provision et d'énergie, j'ai donc repris la route en sachant exactement où aller cette fois, pourtant, même le plus préparé des hommes peut parfois tomber sur une surprise sans nom! Comme lors de ma première visite, je signal à mon compagnon à quatre pattes d'attendre à l'extérieure et de m'avertir si quoi que ce soit d'étrange venait à apparaître dans les environs. On n'est pas forcément à l'abri d'une créature sauvage pouvant se montrer un peu trop curieuse, c'est que le feu de la forge laisse voir une belle fumée s'échapper de la cheminée. Poussant la porte d'entrée je m'apprête à saluer comme il se doit le jeune homme mais, mes mots se perdent au fond de ma gorge, refusant de sortir lorsque je vois la personne qui est présente : Ce n'est pas Lyle, loin de là, pourtant je la reconnais immédiatement! De longs cheveux blancs, un visage que je revois encore parfois, lorsque je ferme les yeux et les souvenirs d'un enfant rieur et heureux avec celle supposée être sa mère.
*Sia...* Me dis-je sans qu'aucun son ne passe le bord de mes lèvres. Après tout, elle a connu un jeune enfant du nom de Brent, en aucun cas elle ne connaît Aslander O'Sullivan! Voici une situation pour le moins désobligeante! Et pourtant, des discussions, des paroles me reviennent : la cuisine du forgeron! Alors ainsi il était question de Lyle? Elle vit avec? Voilà qui risque de rendre ce partenariat plus compliqué vu qu'il me semble difficile d'être moi-même en sa présence... Me reprenant cependant, je tousse légèrement. Je suis suffisamment resté tel un poisson hors de l'eau!
"Bonjour! Pardonnez-moi, Lyle est-il présent?" Voilà, demander Lyle et partir s'il n'est pas là, parfait, une solution de lâche incroyable mais qui semble la seule bonne actuellement.
Aujourd'hui, mon maître passe une autre journée complètement enfermée dans sa forge. Encore une de ces journées où il travaille sans s'arrêter et jusqu'à être satisfait de son travail. Depuis que je suis ici, je n'ai encore jamais eu besoin de l'interrompre lorsqu'il travaille ainsi, et j'espère que cela va continuer. Après m'être levée très tôt, j'ai fait ma séance d'entrainement au combat comme à mon habitude, mais cette fois, je l'ai terminé un peu plus tôt. J'ai ensuite ouvert la boutique et balayé devant l'entrée. Je ne tiens pas à louper un potentiel client qui peut passer tôt dans la matinée. Même si cela est rare, ce n'est pas impossible. J'ai ensuite passé une bonne partie de la matinée à nettoyer l'intérieur de la boutique. Mon maître est un peu maniaque, alors je fais attention à tout nettoyer correctement, à insister dans les coins et à tout replacer exactement à sa place.
Maintenant que la petite routine est terminée, il faut que je tue le temps pour le restant de la journée. Et j'espère quand même avoir la visite d'un client pour tuer l'ennui. Je m'installe au petit comptoir avec mon carnet et mon crayon. J'y griffonne mes dernières idées du moment. Évidemment, c'est un projet que je n'ai pas montré à Lyle. C'est un objet que je souhaite créer pour moi, puis faire enchanter. Je ne sais pas si cela sera possible ou même efficace, mais dans le pire des cas, je me retrouverai juste avec un joli bijou. Et au vu de l'utilisation que j'ai prévu pour cet objet, je sais déjà que mon maître ne l'approuvera pas du tout. Je dessine donc plusieurs formes sur mon carnet. Je me suis décidée pour un bracelet à la fois pour le côté esthétique et pratique de son utilisation. Je ne suis cependant pas certaine sur la forme de base à utiliser. J'étais au départ parti sur une fleur avec une sorte de lierre s'enroulant autour du bras, mais cela risque de s'accrocher aux vêtements malgré le côté très esthétique. J'ai ensuite essayé une forme plus simple, mais je ne trouve pas cela particulièrement esthétique. Finalement, je suis en train de travailler sur une forme de serpent. J'ai repris l'idée du fait qu'il s'entoure autour du bras, mais je ne suis pas certaine du côté pratique de la chose.
Et le tintement de la petite cloche de la porte d'entrée me sors de mes réflexions. Je n'ai pas vu le temps passer et je pense que nous sommes déjà en début d'après-midi. Je pose mon crayon et referme mon carnet. Je me redresse sur mon tabouret pour observer le nouveau venu. Un grand brun plutôt beau. Son gabarit montrer qu'il doit être un guerrier. Peut-être un aventurier ou un chasseur, quelque chose dans ce style. J'ai toutefois un peu de mal à lui donner un âge. Je dirais qu'il est plus âgé que Lyle, il a certainement dépassé la trentaine, mais je ne pense pas qu'il a la quarantaine nous plus.
Le client semble bloquer un instant en me voyant. J'ai aussi eu cette réaction avec le premier client dont je me suis occupée seule. Ce dernier s'attendait à voir un grand rouquin baraqué, mais se retrouve avec une jeune fille à la chevelure blanche et avec une fleur à la place de l'œil. Forcément, on peut se demander ce qu'il se passe. Après son moment de surprise, le client s'approche du comptoir sans un regard pour les articles. Il me salue et demande mon maître. Je vois. Un client particulier donc ! Lyle m'en a évidemment parlé, il lui arrive d'avoir des clients traitant directement avec lui pour certaines commandes. Cependant, il m'a dit que je pourrais traiter seule certains aspects de ces commandes. J'avais fait mes preuves ! J'offre donc mon plus beau sourire au client. J'ai appris à faire de gros efforts là-dessus. Je ne suis plus à la capitale et ce n'est pas ma boutique. Je dois donc soigner l'accueil des rares clients venant ici.
« Bonjour. Je suis Sia, l'apprentie de Lyle. Malheureusement, il est en train de travailler dans la forge. Mais je peux certainement vous renseigner. »
Je regarde le client dans les yeux en continuant de lui offrir un sourire très amical. J'espère sincèrement qu'il n'insistera pas pour traiter avec mon maître et que je vais pouvoir répondre à ses demandes.
"Excusez-moi Sia, il semble que j'ai été quelque peu distrait. Je suis Aslander O'Sullivan, propriétaire du Trône d'Amphitrite. Lyle et moi avons un partenariat et je venais lui apporter quelque chose en plus d'éventuellement faire une commande." Voilà une simple exposition des faits, une présentation sommaire et succincte et maintenant demander à voir le propriétaire de l'établissement pour la suite... Rien de plus simple. "Peut-être pourriez-vous... M'aider? Après tout, si Lyle vous laisse seule dans la boutique, je suppose que vous devez être plus qu'apte à voir avec moi pour cette commande n'est-ce pas?"
Et ce n'est absolument pas ce que je fais... À quoi suis-je en train de jouer exactement? Pourquoi ai-je envie de rester avec cette demoiselle? Ce n'est qu'une jeune fille, et pourtant j'aimerai pouvoir la connaître, j'ai vu une facette d'elle alors que j'étais redevenu un enfant, j'ignore pourtant tout de qui elle est! J'ignorais même qu'elle travaillait dans cette forge! Était-elle déjà l'apprentie de Lyle lorsque je suis venu pour le partenariat? L'ai-je aperçu ce jour là? Peut-être est-ce pour cela que j'ai eu l'impression de la connaître, la confondant avec ma mère - bien qu'elles ne se ressemblent pas le moins du monde - lors de cette transformation impromptue? Non, je me serai souvenu l'avoir vu, bien que jeune c'est une belle femme et je ne suis pas le genre d'homme à oublier ce genre de chose même si, pour respect pour mon partenaire, je n'aurais sans doute pas tenter de la séduire... Quoi qu'il en soit, cela fait bien assez de temps sans paroles encore une fois, prenant mon sac sans fond, j'en sors le minerai que je dépose sur le comptoir devant la jeune femme, un léger sourire séducteur - plus par habitude qu'autre chose - au coin des lèvres alors que je plonge mon regard dans le sien.
"De l'Obidium, un minerai que l'on ne trouve que dans les fonds marins. Plus solide et plus maniable que l'acier, également bien plus cher! Il n'est pas recommandé pour les lames mais sa grande résistance permet d'en faire d'excellentes armes contendante ou, et c'est ce qui m'intéresse aujourd'hui, des armures. Pensez-vous pouvoir le travailler? Bien-entendu, vous ne pourrez pas faire une armure complète avec ce simple morceau mais je suis intéressé par ce que vous et Lyle pourriez en faire si j'en ramenais disons... Cinq fois plus?"
Finalement, l'homme finit par se décider. Il se présente même après s'être excusé d'avoir été distrait. C'est une personne très polie, déjà cela me plait ! Il n'a pas de jugement dans sa voix ou son regard, et il semble savoir à qui il a affaire ici. Ce type me plait bien. D'ailleurs, son nom me dit vaguement quelque chose. Et c'est quand il parle de partenariat que le lien se fait dans ma tête. Oui ! Lyle m'en a vaguement parlé et m'avait prévenu qu'il pouvait y avoir des clients « spéciaux » à qui faire des tarifs spécifiques. Je m'en souviens maintenant. Il semble être un peu hésitant, mais se décide. Quand il me demande si je suis apte à prendre commande, je hoche de la tête toujours aussi souriante.
« Effectivement, monsieur O'Sullivan, je peux me charger de prendre vos commandes. Si vous avez des demandes spécifiques, il faudra certainement voir certains détails avec Lyle, mais je peux déjà faire le plus gros. »
L'homme semble encore hésitant. Est-ce que j'ai quelque chose d'étrange sur le visage pour qu'il me fixe ainsi ? Ma fleur le dérange peut-être, mais il ne semble pas la regarder spécifiquement. C'est plutôt mon visage dans son ensemble qu'il fixe. Il semble même un peu perdu dans ses pensées. Finalement, il se décide et sors quelque chose de son sac. Il vient poser l'objet sur le comptoir et me fait un petit sourire charmant. Il a un côté un peu séducteur qui lui va bien, mais il n'est pas vraiment mon genre d'homme. Et puis, on ne drague pas les clients, c'est élémentaire ! Je hausse simplement un sourcil quand il me présente le minerai.
Je prends la roche dans mes mains alors qu'il commence à me parler des propriétés du minéral et de ce qu'il aimerait en faire. Je réfléchis un peu. Il faut dire qu'il me pose un peu une colle là, c'est un minéral que je ne connais pas et que je n'ai jamais travaillé. Je ne sais pas non plus si Lyle l'a déjà travaillé. Au vu des origines de cette matière et si elle est réellement plus chère, j'en doute un peu. Je réfléchis également aux propriétés du minerai. Tout ceci est un peu vague et ne m'aide pas beaucoup. S’il est effectivement plus malléable et plus résistant, une armure serait effectivement intéressante, mais il y a plein de zones d'ombres. Est-ce qu'il peut être refondu facilement en cas d'échec ? Est-ce qu'il vaut mieux le mélanger à d'autres métaux ou l'utiliser pur ? Est-ce que c'est un minéral couramment utiliser pour faire certaines pièces spécifiques ? Je réfléchis à tout ceci et reprends mon crayon. J'ouvre mon carnet à une page vierge et commence à réfléchir. J'ai encore beaucoup à apprendre, mais déjà je peux récupérer les renseignements essentiels sans l'aide de Lyle.
« Cinq fois plus, donc je suppose cinq morceaux de cette taille ? Nous n'avons pas vraiment l'habitude de travailler l'Obidium, mais rien n'est impossible. »
Lyle peut vraiment faire des miracles quand il s'agit de forger, alors je n'ai aucun doute là-dessus.
« Voyons plutôt... Qu'est-ce que vous pouvez me dire de plus ? Vous êtes déjà venu avec une idée précise de ce que vous voulez, ou pas du tout ? Ou vous souhaitez récupérer des propriétés spécifiques de ce minéral ? Selon ce que vous souhaitez, cela change beaucoup de choses. »
Je souris doucement en me penchant légèrement vers la jeune femme, comme pour lui faire une confidence et, c'est en effet le cas d'un certain point de vue. "Très chère, si vous m'aviez dit que vous aviez l'habitude de travailler l'Obidium, j'aurais été sceptique ou tout du moins surpris..." Dis-je avant de me reculer doucement, riant toujours ce qui me permet d'évacuer un certain malaise que je ressentais jusque là, mon rire ressemble encore à celui que j'avais étant enfant, juste plus grave... Espérons que cela, elle ne le remarque pas. "Cinq morceaux de cette taille oui, plus si je parviens à en trouver en réalité mais partons sur cinq au départ... Les propriétés de ce minerai sont... Simple en réalité : plus solide que l'acier, plus léger cependant! Un peu comme on pourrait l'attendre du mythril mais en moins solide et moins rare tout de même! Je veux une armure mais une armure spécifique en réalité, elle n'est pas réellement pour moi! Si vous voulez bien vous donner la peine, le véritable client attend dehors..."
Dis-je avec ce même sourire charmeur alors que je tourne les talons, l'invitant sans mot à me suivre vers l'extérieur de la bâtisse. Je n'ai nul besoin d'une armure, cela serait ridicule pour moi, mon pouvoir me permet déjà de revêtir une protection plus solide que l'acier, peut-être même plus que l'Obidium en réalité? Non, si je pars au-delà de la frontière avec Arya, je ne serais pas seul et j'ai un précieux ami qui ne doit pas courir le moindre risque! Arrivé dehors, j'appelle mon compagnon télépathiquement et le voici qui me rejoins de quelques bonds.
"Voici Orisha, mon Rarwük. C'est lui votre client! Orisha est un chasseur et un grand fauve, je veux le doter d'une protection qui ne gênera pas ses mouvements et ne sera pas trop lourde, évitant ainsi de l'épuiser plus que de raison! L'Obidium est donc naturellement un choix logique dans la mesure où je doute que l'on puisse trouver du mythril de ce côté de la frontière, du moins en quantité suffisante..."
Monsieur Sullivan continue sur les quantités et propriétés de son minerai. Il espère avoir plus que cinq morceaux ? Ce n'est pas donné, mais cela serait intéressant. En fonction de ce que nous avons à faire, il peut être bien d'avoir un ou deux morceaux en plus pour des corrections, ajouts ou en cas d'échecs. Il me donne aussi les caractéristiques plus précises de l'Obidium. C'est donc similaire au mythril. Déjà ça me parle plus. Même si je n'ai jamais eu la chance de le travailler, je connais la théorie. J'ai donc déjà un point de repère. Il manquera plus qu'à déterminer les réelles différences par rapport au mythril et aux métaux plus communs.
Maintenant, la question de l'armure. Il dit souhaiter quelque chose de spécifique, mais qui ne sera pas pour lui. Je penche un peu la tête de côté, me demandant ce qu'il me prépare. Il semble être du genre à aimer être mystérieux et impatienter les gens. Il me redonne d'ailleurs ce sourire qui à côté très charmeur. Je lui rends son sourire et le suit alors qu'il se dirige à l'extérieur, mon carnet et mon crayon toujours en main. Je ne vois personne à l'extérieur et ne comprend pas trop ce qu'il attend de moi. Et puis une créature nous rejoint en quelques bonds. J'avoue être un peu surprise d'une telle rencontre. Il me présente alors Orisha. Les Rarwüks sont plutôt rares, et il est encore plus rare d'en croiser qui sont apprivoisés. Je dois donc dire que je suis plutôt impressionnée par une telle rencontre.
J'observe un peu le fauve qui me toise. Inconsciemment je pense à Weissium, la louve dafresk de Rid. Qu'est-ce que j'aimerais avoir un tel compagnon moi aussi... J'écoute mon client parler tout en observant la majestueuse créature. Je dois avouer que je n'ai encore jamais eu l'occasion de faire une armure pour un familier et l'idée m'emballe beaucoup. Travailler sur un tel projet pourrait me permettre de débloquer des idées d'armures à offrir à Rid pour sa louve, ou même m'aider à avancer sur mon idée d'armure pour Sio. J'espère que Lyle me laissera l'assister sur ce projet, parce que là ma curiosité est réellement piquée. Je sens déjà que mon regard pétille et la petite étincelle de la passion qui est en moi se transforme en petite flamme.
Je commence à griffonner dans mon carnet et à dessiner la silhouette de l'animal. Je suis plutôt silencieuse que je suis concentrée ainsi. Mon sourire s'est effacé pour laisser place uniquement à la concentration. Je note déjà les caractéristiques auxquelles faire attention pour ne pas gêner les mouvements de la bête et les quelques idées qui me viennent de façon spontanée. Je m'approche un peu de la créature et tourne autour d'elle pour continuer de noter les éléments que je remarque. Je lance alors un regard à Sulli et pointe Orisha pour lui signifier que j'aurais besoin de le toucher.
« Je peux ? »
J'attends sa confirmation avant de m'approcher doucement et en faisant attention à la créature. Je viens placer mes mains sur son poitrail, puis sur son dos et son garrot. Je touche aussi rapidement ses flancs et termine en regardant à nouveau l'animal de face. J'ai maintenant une idée de la taille de la créature et note tout ceci. Il reste encore des informations qu'il me manque, mais déjà les idées traversent mon esprit.
« Je comprends mieux le choix de l'Obidium. Pour quelque chose qui protégera réellement votre compagnon sans trop l'alourdir, c'est le bon compromis entre résistance et légèreté. Le détail important maintenant, est-ce que cette armure doit permettre de le monter ou uniquement pour vous accompagner en combat ? En fonction du choix, cela change beaucoup... Et des demandes particulières peut-être ? »
Je parle sans vraiment regarder mon client, je suis bien trop concentrée sur la créature à imaginer les différentes possibilités au niveau de l'armure qu'il serait faisable. Je suis aussi en train de calculer la quantité de d'Obidium nécessaire à réaliser cela. Il ne me manque que les réponses à ces questions pour faire le choix de la meilleure option.
Je lui présente rapidement mon compagnon avant de lui expliquer plus en détail ce que j'attends d'elle et de son maître, l'apprentie forgeronne ne perd pas un instant et je souris doucement en contemplant son visage : plus réellement de sourire, juste une intense concentration alors qu'elle griffonne des informations sur son carnet. Au moins, elle semble appliquée ce qui n'est pas pour me déplaire. Non pas que j'attendais autre chose en venant ici, après tout c'est l'apprentie de Lyle et ce n'est pas pour rien que j'ai voulu ce partenariat avec le jeune homme. S'il n'y avait pas ce sérieux, cette entente n'aurait aucun intérêt! Certes je veux le meilleur forgeron possible avec lequel travailler mais parfois, les meilleurs ont tendances à se reposer sur leurs lauriers! Je suis heureux de voir que ce n'est pas le cas de mon partenaire et de son apprentie.
"Faites, il ne risque pas d'attaquer si je ne lui en donne pas l'ordre et que vous n'êtes pas menaçante." Dis-je avec un léger sourire alors qu'elle me demande la permission de le toucher. Après tout, mon compagnon a l'habitude, après s'être vu confier la tâche de protéger Nemue ou encore Faolan et le petit Melta, il a l'habitude d'être doux avec ceux qui sont importants pour moi. Sans dire que ce soit le cas de la jeune femme - même si je l'apprécie et la respecte suite à notre rencontre passée - je sais que mon compagnon n'est pas dangereux excepté lorsqu'il a besoin de l'être. Pour l'heure, il reste immobile, surveillant tout de même les gestes de la jeune femme, après tout il ne la connait pas, mais il est assez intelligent pour savoir qu'elle ne nous veut aucun mal donc, il se montre docile et patient. Un hochement de tête pour lui montrer ma satisfaction alors que la belle demoiselle termine de prendre ses mesures - du moins je le suppose - pour enfin me refaire face. Je pense que c'est la première fois qu'elle détourne réellement le regard de mon compagnon depuis qu'elle l'a vu.
"Uniquement pour m'accompagner au combat! Je sais que les Rarwüks peuvent servir comme monture - bien que ce soit apparemment très inconfortable - mais Orisha est mon compagnon, mon partenaire et mon ami! Ce n'est pas juste un familier donc je ne lui fait pas l'affront de le monter. Pour les demandes particulières, pas réellement non! Je veux juste qu'il soit intégralement protégé sans que cela ne le gêne! J'attends un travail minutieux et disons le clairement : parfait! J'ignore si Lyle vous en a parlé mais, je fais également partie d'une organisation et nous avons l'intention de passer de l'autre côté de la frontière. Un environnement plus dangereux que tout ce qui a déjà été exploré, des créatures qui font maintenant office de légendes, de mythe, plus qu'autre chose... C'est cela que je m'attends à rencontrer et évidemment, je ne veux pas prendre le risque d'y amener mon compagnon si sa protection laisse à désirer..."
Dis-je en caressant machinalement la tête de mon partenaire du bout des doigts. "Je me moque de l'esthétique! Que l'armure soit hideuse si cela est nécessaire! Je veux de la solidité et de la précision! J'avais promis à Lyle des défis, que j'étais un client exigeant... Voici le premier défi que je vous offre! Vous avez une quantité limité de matériaux et je veux un résultat parfait... Le reste, c'est votre travail n'est-ce pas?"
Il continue en disant qu'il a promis à Lyle des défis. Cela me fait légèrement sourire. C'est bien son genre. Un travail pour une créature rare, avec un métal encore plus rare, pour des conditions particulières et le tout avec des quantités limitées. Oui, un véritable défi. C'est clairement une mission pour laquelle je ne suis pas taillée, elle est réservée à mon maître. D'ailleurs, en pensant à ce dernier, je regarde le soleil dans le ciel. Au vu de l'heure qu'il est, il devrait certainement ne pas tarder à sortir de sa forge. Il me semble qu'il a déjà travaillé une bonne partie de la nuit, mais aussi toute la matinée. Il devrait donc bientôt poindre le bout de son nez pour voir si je m'en suis sortie avec la boutique. Je ferme mon carnet et vient tapoter mon crayon contre mes lèvres tout en réfléchissant. Que faire maintenant de ce client particulier ? Je ne me sens pas de le renvoyer comme ça. Je ne peux pas non plus terminer d'évaluer sa commande seule. Elle est réalisable, je n'ai pas de doutes là-dessus. Mais accepter un tel défi sans l'avis de mon maître risque de m'attirer de l'exaspération de sa part. Il n'est pas du genre à s'énerver, mais râler il sait faire ! Il faut donc que j'occupe ce client jusqu'à ce que Lyle ait terminé de travailler. Je reviens donc à ma question : que faire maintenant ?
« Je pense avoir bien cerné les besoins pour cette commande. Comme vous l'avez dit, c'est un défi et je n'ai pas de doute sur le fait que cela va plaire à Lyle. Par contre, je suppose que vous aimeriez voir cela avec le principal intéressé, non ? »
Je regarde le client dans les yeux avec un beau sourire.
« Il ne devrait pas tarder à finir sa journée de travail. Vous voulez bien patienter en ma compagnie ? »
Je pense que je peux lui préparer du thé et faire la conversation suffisamment longtemps pour laisser le temps à mon maître de revenir à la boutique. Mais est-ce que ce client en a envie ?
Pourtant, alors que je me voyais déjà faire marche arrière, passer éventuellement quelques jours à Forteresse jusqu'à avoir des nouvelles du jeune homme et de sa douce apprentie, voici qu'elle me prend quelque peu au dépourvu, me proposant d'attendre avec elle le retour de Lyle qu'elle affirme comme proche... Je la regarde un instant, en ai-je envie? Certainement mais est-ce une bonne idée? Elle connait un enfant du nom de Brent, jusque là il n'y a aucun risque me concernant, après tout ce n'est pas forcément un nom si rare que cela - du moins je le suppose - mais si par malheur quelque chose lui permettait de faire le lien entre un enfant nommé Brent et un homme de mon âge? Non, je m'inquiète trop! Comment pourrait-elle seulement faire un tel lien? Ce n'est pas comme si j'allais le lui dire ou me comporter de sorte qu'elle puisse en tirer la conclusion. Il suffit d'être moi-même : un charmant gentilhomme, légèrement séducteur - juste dans l'attitude du moins - et de profiter de la compagnie de la demoiselle! Si elle travaille réellement avec Lyle, je vais sans doute la côtoyer de plus en plus souvent, évitons de rendre cela étrange en me montrant plus fermé avec elle qu'avec d'autres.
"Patienter en si charmante compagnie? Ma foi, j'ai reçu offres bien pires par le passé... J'accepte donc, cela m'arrange également de ne pas devoir refaire route vers Forteresse sans réponse définitive quant à ma demande je dois bien l'avouer."
Un sourire en coin, toujours le même, et me voici qui suit la belle en signalant à Orisha de m'attendre encore un peu - ce que le fauve fait en se couchant docilement au sol - je me souviens que Lyle refusait la présence de mon compagnon dans sa boutique, je n'ai pas l'intention d'aller contre sa volonté parce qu'il n'est pas là! Après tout, je respecte mes partenaires et leurs volontés, c'est le secret d'une entendre durable. "J'espère que vous accepterez de me parler de vous? J'aime savoir avec qui je travaille et, étant l'apprentie de Lyle, cela fait de vous l'une des partenaires de mon entreprise également..." Dis-je en repénétrant dans la boutique.
« Si vous acceptez de me parler de vous en retour, je ne vois pas de problème ! Après tout, je n'ai pas vraiment demandé de détails sur vous à Lyle, je préfère que l'on me raconte les choses soit même. »
Je prends la direction de la cuisine et salle à manger qui se trouvent directement à droite. J'indique au client la petite table où il peut s'installer pendant que je vais à la cuisine pour préparer du thé.
« J'espère que du thé vous convient, nous n'avons pas grand-chose d'autre si ce n'est de l'eau. »
Je fais donc chauffer de l'eau et prépare la théière ainsi que des tasses. Je reviens vers mon client en attendant que l'eau chauffe. Je m'installe en face de lui et croise mes bras devant moi en regardant dans le vide, je réfléchis par où commencer.
« Que dire de moi ? Je n'ai pas grand-chose à raconter. Je suis fille de forgeron à la Capitale, j'ai donc connu la forge très tôt et m'y suis intéressée rapidement. J'étais le genre de petite fille à préférer regarder son père travailler que d'aller jouer dehors avec les autres enfants. Et puis, avec ma sœur, nous n'étions pas vraiment populaires, trop différentes physiquement des autres... »
Je désigne du doigt mon œil pour ponctuer ce que je veux dire. Je ne vais pas faire de détails sur Sio, ma phrase sous-entend déjà assez qu'elle a aussi une particularité physique.
« Dès que j'ai eu la taille et la force nécessaire, j'ai commencé à apprendre à la forge. J'ai appris toutes les bases avec mon père et j'y passais mes journées, et même parfois mes nuits. Ma petite sœur m'a rapidement rejoint avec pour objectif de devenir mon assistante. Nous avons grandi en aidant notre père à la forge et à gérer sa boutique. Et puis finalement, je suis devenue une véritable forgeronne à force de travailler et pour moi, c'est devenu une évidence que c'est mon avenir. »
J'entends l'eau du thé bouillir, et je retourne à la cuisine. Je viens mettre l'eau dans la théière et termine la préparation. Je prends le plateau où est posé la théière et les deux tasses. Je reviens vers mon invité, et tout en posant le set devant nous je continue de parler.
« Et puis il y a quelques lunes, ma sœur a eu 16 ans. Nous nous sommes toutes les deux inscrites en tant qu'aventurières. Elle pour réaliser son rêve de voyage et moi pour découvrir de nouvelles techniques et personnes à travers le royaume pour perfectionner mon art. Je ne suis qu'une jeune forgeronne très moyenne après tout, et il faut dire que rejoindre la Guilde m'a ouvert beaucoup de portes. J'ai reçu des offres commerciales et beaucoup d'informations auxquelles je n'aurai jamais pu avoir accès autrement. Et puis, au détour des missions et conversations, j'ai commencé à entendre parler de Lyle et de son travail. Alors à la fin de la saison douce, quand j'ai eu les moyens de faire le voyage jusqu'ici, je suis venue le rencontrer. J'avais déjà dans l'idée de lui demander de m'apprendre en ayant vu son travail, mais le rencontrer a confirmé mon envie. Il a accepté de me prendre en tant qu'apprentie, et voilà où j'en suis aujourd'hui. Je vis maintenant ici et apprend au quotidien à ses côtés. »
Le thé ayant maintenant bien infusé, je le sers et tend une tasse à Aslander.
« Maintenant, à vous de m'en dire un peu plus. »
"Mais bien-entendu, après tout l'échange équivalent est essentiel pour un partenariat efficace n'est-ce pas?"
C'est cela un partenariat, une équivalence et une justesse pour les deux parties... M'installant
à la table désignée par la belle dame, j'hoche la tête pour toute réponse, un thé sera absolument parfait! J'observe ses traits lorsqu'elle revient, alors qu'elle semble perdue dans ses pensées, réfléchissant à ce qu'elle peut - veut?- me dire d'elle! Après tout, une femme doit garder certains secrets je suppose? Quoi que, je ne puis l'affirmer alors qu'elle n'a pas encore prit la parole.
Fille de forgeron donc? La pomme ne tombe jamais très loin de l'arbre je suppose? C'est naturellement que je repense à mon père, cela me conforte dans ma manière de vivre ma vie : je ne veux pas être comme lui alors autant continuer à ne pas suivre ses pas! Un léger haussement de sourcils alors qu'elle me parle de sa soeur et d'elle-même comme "différentes physiquement" tout en désignant la fleur sur son visage. Je me souviens tout de même du visage de celle que je nommais tatie Sio il y a quelques temps encore, de la même manière que j'ai observé ses propres traits précédemment, je dois dire que c'est malheureux qu'une différence physique puisse rendre impopulaires deux charmantes demoiselle telles qu'elles... Elles ne sont guères vilaines après tout! Mais puis-je réellement me permettre de dire cela? Moi? Alors que je suis un homme particulièrement superficiel en réalité? Il suffit de voir mes conquêtes, aucune d'elles n'a réellement de particularité physique que l'on dirait disgracieuse, que du contraire même...
Elle se lève alors que l'eau se met à bouillir pour revenir ensuite avec le service à thé et reprendre son exposition de son existence alors que je l'écoute calme, patient, presque religieusement même...
Forgeronne dans l'âme et dans le sang donc, cela explique sa présence dans la forge de celui qui est, sans nul doute, le meilleur forgeron que je connaisse. Une information plus intéressante cependant : elles se sont inscrites à la guilde des aventuriers toutes les deux? Intéressant, il faudra que je reste à l'affut, il n'est pas si difficile de s'arranger pour que, comme par hasard, on se retrouve sur la même quête que ce soit avec Sia ou avec sa jeune soeur... Ce n'est pas réellement une mauvaise chose, disons qu'elles se sont bien occupée de moi lorsque j'étais un enfant perdu, si je peux m'assurer qu'il ne leur arrive rien en quête, autant le faire non?
"Merci" Lui dis-je simplement alors qu'elle me tend une tasse et je regarde un instant cette-dernière avant de soupirer doucement. "Il est heureux que vous ayez trouvé si vite votre voie. Je n'ai aucun doute que vous serez une excellente forgeronne une fois votre apprentissage avec Lyle terminé - non pas que vous ne le soyez pas maintenant bien-sûr - votre sérieux durant ma demande me permet de l'affirmer." Dis-je dans un premier temps avant de reprendre.
"Pour ma part, je suis né sur une petite île des archipels, dans une famille pauvre. Alors que j'étais encore un enfant, mon père a prit la mer et je ne l'ai jamais revu - comme nombre d'enfants dans les archipels à cette époque je suppose - mon père nous ayant laissé quelques dettes, à l'âge de seize ans je me suis engagé sur un navire marchand afin d'apporter un maigre pécule à ma mère tout en économisant sur le côté. Quelques années plus tard, j'ai fais l'acquisition de mon propre navire, une petite chaloupe plus qu'un réel bateau en réalité pour me lancer dans le commerce... Je me suis rendu compte qu'il y avait plus de demande pour les matériaux issu des monstres que pour les marchandises "classiques", je me suis donc inscrit à la guilde des aventuriers, jugeant que je pouvais joindre ainsi les deux bout de mon affaire : j'étais payé pour chasser des monstres et payé pour revendre les matériaux que je récupéré dessus... Le reste, c'est l'ascension : j'ai lancé ma compagnie, le Trône d'Amphitrite, les affaires ont parfaitement fonctionné, m'enrichissant jour après jour jusqu'à ce que la reine s'intéresse à ce succès fulgurant m'élevant même au rang de noble et me voici, parcourant le royaume pour chasser des monstres toujours plus redoutables en faisant toujours plus de partenariats... Dis-je en riant doucement...
Il commence maintenant à me parler de lui. Je prends une gorgée de mon thé tout en écoutant le début de son récit. Je me stoppe dans mon mouvement quand il me parle de son père disparu en mer. Tout de suite, petit Brent me revient en tête en entendant cela. Je me souviens que lorsqu'on le questionnait avec ma sœur, il nous avait parlé de son père parti en mer depuis plus d'un an. Nous avions facilement compris que son père ne reviendrait pas, mais le petit garçon n'en avait sûrement pas conscience. Je pose ma tasse devant moi tout en pensant à nouveau à ce petit garçon. J'essaye de me concentrer à nouveau sur ce que me raconte ce client. Sa vie semble plutôt intéressante, il a évolué grâce à ses efforts, il a eu beaucoup de chance et il a été plutôt bien récompensé. Je note quand même qu'il est aussi aventurier et qu'il gagne maintenant sa vie avec ce métier.
« Une vie plutôt honorable je dirais... Et vous êtes donc aussi aventurier, le royaume est bien petit. Je comprends aussi mieux ce qui vous a amené à faire ce partenariat avec Lyle. »
Je sirote encore doucement mon thé et l'image de Brent me revient en tête. J'avais réussi à ne plus trop penser à lui et à me concentrer sur mon travail, mais maintenant je ne peux plus enlever son visage de mon esprit.
« Dites-moi... Vous avez perdu votre père en mer, et je me demandais... »
Je suis hésitante, je ne sais comment formuler ma demande. Je vais sûrement paraître étrange à vouloir ainsi retrouver un enfant qui n'est pas le mien. Je ne gratte un peu la tête.
« Non, oubliez ma demande. Elle va paraître bien trop étrange. »
Je finis ma tasse et me relève.
« Je vais aller voir où en est mon maître. Je ne tiens pas vraiment à trop vous faire attendre. On peut toujours vous héberger si nécessaire, mais je ne veux pas vous forcer et je ne suis pas certaine que l'endroit est adapté à votre compagnon. »
Je pose ma tasse sur le plateau et attend de voir si Aslander a encore autre chose à me demander avant d'aller chercher Lyle.
Une vie honorable... Je prends une gorgée de thé, préférant ne rien dire à cette affirmation en réalité. C'est ce que beaucoup de monde pense, c'est surtout ce que je fais croire! Il est vrai que mon histoire a de quoi inspirer, n'est-ce pas ce que la reine me disait lors de notre face à face après tout? Dit ainsi, j'ai l'air d'un homme qui a vaincu honnêtement l'adversité, c'est ce que j'aurais aimé en réalité! Lorsque je me suis engagé sur un navire marchand avec pour seul motivation d'aider ma pauvre mère malade à rembourser les dettes laissé par mon égoïste de père, j'espérais également laisser derrière moi mes erreur de jeunesse, mes mauvais coups, cette bande de voyous avec laquelle je restait alors étant plus jeune. Je voulais devenir quelqu'un d'honnête, de travailleur qui aurait de quoi être fier de ses réussite... Oui, c'est cette histoire que je racontes, passant sous silence mes années de piraterie, le meurtre du capitaine pour prendre sa place, ma fuite, mes nombreux et inavouables crimes qui font encore de moi un homme recherché bien que disparu depuis longtemps...
Un léger sourire cependant, je ne laisse rien paraître de cela! Après tout, mentir est une chose que j'ai l'habitude de faire, je maîtrise le sujet si l'on peut dire! Que ce soit l'intonation, les sentiments véhiculés, les mots prononcés sans le moindre doute apparent... Je maîtrise sans aucun doute mon parlé aussi bien qu'un forgeron son marteau, il faut dire que le bagout, c'est quelque chose que je connais! On ne devient pas homme d'affaire sans cela n'est-ce pas? "Effectivement, qui sait? Peut-être aurons-nous un jour l'occasion de collaborer ailleurs que dans la forge de votre maître? Je suis toujours heureux d'accompagner de jeunes aventuriers, j'aime croire qu'à mon âge et, avec mon expérience, je peux apprendre des choses aux plus jeunes de nos confrères..." Dis-je le même sourire plaqué sur le visage.
Nouvelle gorgée de thé alors que je regarde son visage, elle semble... Soucieuse? Je ne suis pas certain mais clairement, quelque chose parcours son esprit. Il ne faut pas longtemps pour qu'elle me parle de mon père perdu en mer, cela me revient également! Comment ai-je pu oublier la question - habillement amenée - de Sio alors que j'avais l'apparence et l'esprit d'un enfant? Le jeune Brent lui a révélé la disparition de son père en mer! Ce serait cela qui la tourmente? J'avoue que je me demandais si cela allait pour elle, je suppose que voir un enfant disparaître - même s'il n'est pas le sien - n'avait rien d'agréable, je m'en suis voulu de partir ainsi mais je ne pouvais réellement faire plus, elle se serait réveillé aux côtés d'un homme de trente-sept années, cela n'aurait guère était une bonne idée! Pourtant, alors qu'elle se lève, et même si c'est une mauvaise idée, je me dis que je ne peux laisser les choses se passer ainsi. Me levant, je la regarde dans l'oeil. C'est sans doute une mauvaise idée mais...
"Vous savez, je chasses les monstres en fonction des demandes de mes partenaire ou client... Très peu de choses arrivent encore à me paraître étranges! Vous semblez perturbée par cette chose que vous vouliez demander... Si je peux vous aider, n'hésitez pas un seul instant! Comme je vous l'ai dis, j'aime croire que je peux aider mes jeunes confrères ou, dans le cas présent, consœur."
« Qui sait ? Ce serait un plaisir de pouvoir profiter de votre expérience. »
Il n'arrête pas de me sourire et je le vois m'observer. Quand je commence à parler de son père mort en mer, j'ai l'impression d'avoir touché un point. Je choisis plutôt d'annuler ma demande. Une femme cherchant un enfant qui n'est même pas le sien, c'est plutôt étrange. Je ne sais pas grand-chose de Brent. Je sais qu'il a perdu son père en mer, il n'a peut-être pas de mère puisqu'il ne semblait pas s'en rappeler, je connais son apparence et son âge. Rien de plus. Évidemment, je l'ai cherché avant de rentrer à la Capitale, mais cette rencontre est venue dans mes derniers jours de congés. J'ai donc du partir en sachant que cet enfant a disparu et que je n'arriverai peut-être jamais à la retrouver.
Aslander semble vouloir m'empêcher de fuir. Je pense que si j'étais partie chercher Lyle, il m'aurait sûrement intercepté. Mon inquiétude se voit donc sur mon visage. Je ne suis pas vraiment douée pour masquer mes émotions, et cela m'a plus d'une fois jouer des tours. Je me gratte un peu la joue, hésitante. Il a l'air d'être un homme honnête et serviable, mais je le connais à peine. Je n'ose pas vraiment lui parler de cette rencontre étrange. Même à Lyle je n'ai rien dit de tout ceci. Seule Sio connait l'existence de Brent. De toute façon, qui croirait à l'apparition si soudaine d'un petit garçon de six ans m'appelant maman et disparaissant durant la nuit ? Je ne l'ai connu que quelques heures, mais pourtant je me suis attachée à ce petit garçon. S'il n'avait pas disparu, je pense que je n'aurai pas refusé l'idée de le prendre sous mon aile et de le ramener avec moi. Je pousse un soupir. Je n'ai pas grand-chose à perdre à tenter d'au moins partager une partie de l'histoire. Si cela peut m'aider à m'assurer que ce petit garçon est en sécurité.
« Durant mes congés, j'ai rencontré un petit garçon qui c'était visiblement perdu. Je ne connais malheureusement pas grand-chose de lui. Je sais que son père a disparu en mer depuis environ un an, et je pense qu'il a certainement perdu sa mère récemment. »
Je viens m'appuyer sur la table derrière moi. Je baisse le regard, fixant un point au sol tout en pesant mes mots.
« Malheureusement, il s'est volatilisé comme il est apparu. Un garçon de six ans ça ne disparait pas comme ça... J'ai essayé de le chercher, mais je l'ai rencontré à la fin de mes congés. Avec le travail, je n'ai pas vraiment eu l'occasion de poursuivre mes recherches, sans parler du fait que je suis un peu loin pour cela... »
Je relève le visage et vient regarder l'aventurier droit dans les yeux.
« J'aimerais au moins savoir qu'il est en vie et en sécurité. Rien de plus. Mais avec le peu d'informations que j'ai sur lui, il a été difficile de signaler sa disparition à la Garde. Alors... » Je suis un peu hésitante. « Vous connaissez sûrement mieux l'endroit que moi. Peut-être qu'il y a un orphelinat non loin qui pourrait recueillir les enfants ayant perdus un parent en mer ? Ou quelque chose du genre ? »
Je me redresse un peu et croise mes bras.
« C'est un peu bête de m'inquiéter comme ça pour un enfant que je n'ai connu que quelques heures et qui m'a sûrement joué un mauvais tour, mais j'aimerais vraiment m'assurer qu'il est en sécurité. Alors, vous auriez une idée d’où je pourrais porter mes recherches ? »
Je sais que c'est stupide, si effectivement cette inquiétude que je lis dans son visage concerne le jeune Brent, et donc moi, la pousser à m'en parler n'a rien de bien raisonnable ou habile! Moi qui me targue d'être un homme intelligent suis sans aucun doute en train de faire une belle erreur! Pourtant, je me décris aussi comme un gentilhomme séducteur, j'agis comme tel également! Ne serait-ce pas alors totalement en dehors de ce rôle que de laisser une jeune femme visiblement soucieuse partir sans même marquer mon inquiétude pour la situation? Il y a des situations ainsi durant lesquelles il n'y a guère de bon choix c'est un fait, cependant il faut parfois faire preuve d'intelligence et choisir celui des deux qui sera le moins mauvais! La normalité veut que je m'inquiète concernant les tracas de la belle demoiselle, c'est donc ce que je fais! L'invitant simplement à partager avec moi la question qui brûlait ses lèvres.
Visiblement elle voulait en parler malgré tout, la preuve étant que je ne dois pas réellement pousser pour qu'elle prenne la parole! Effectivement elle me parle de ses congés, ceci explique que j'ai croisé la demoiselle au grand port pour finalement la retrouver au fin fond des montagnes du nord, elle était donc en vacance. Très vite, elle me parle de moi sans même le savoir, un jeune garçon dont le père a disparu en mer il y a un an et qui aurait perdu sa mère depuis peu... Au moins, rien ne le relis à moi! Mon père a disparu il y a bien plus longtemps et ma mère est encore vivante aux dernière nouvelles... Certes, je ne peux pas réellement la voir vu mon changement d'identité mais je m'assure de lui envoyer des cristaux et j'ai remboursé ses dettes - enfin, celles que mon père nous avait laissé - depuis longtemps maintenant. Je ne dis rien présentement, me levant de ma chaise pour m'approcher de la jeune femme. Après tout, vu la conversation, il serait bien malvenu de rester simplement assit n'est-il pas?
Elle continue son récit, la pauvre... Alors elle m'a cherché? Quel tourment cela a dû être pour elle, comment ne pas me sentir coupable? Certes, je ne suis pas réellement responsable, malheureusement je n'avais même pas conscience de la situation et, une fois de plus, la fuite était la seule possibilité mais tout de même! Pour un homme tel que moi, causer pareil désarroi à une si douce demoiselle est forcément cause de culpabilité! Peut-être même plus qu'ôter une vie c'est dire... Je finis par venir me poser à ses côtés alors qu'elle m'affirme que c'est stupide, s'inquiéter ainsi pour un enfant qui lui a sans doute jouer un mauvais tour? Diantre, que j'aimerai que cela soit juste ça! Ce serait tellement moins compliqué! Je secoue doucement la tête, souriant non pas séducteur mais plus, un air réconfortant sur le visage.
"Je ne trouve pas cela stupide... Vous faites preuve de bien du coeur de vous inquiéter pour ce petit et vous démontrez une humanité tout ce qu'il y a de plus respectable et honorable... Concernant l'enfant, je doute qu'il se soit joué de vous, les enfants sont encore trop innocents pour cela, j'ose y croire du moins, peut-être a-t-il disparu pour une autre raison? Je connais un orphelinat, je pourrais aller jeter un coup d'oeil en espérant qu'il ne s'agisse pas d'un enfant des rues bien-sûr..." Peut-être même pourrais-je faire plus? Retrouver un cadre magique de moi alors que j'étais enfant avec ma mère? Le faire parvenir à la jeune femme en inventant une histoire disant que le garçon qu'elle a rencontré à retrouver sa mère et que tout va pour le mieux? "N'ayez crainte... J'ai l'habitude de trouver des matériaux rares, je dois pouvoir retrouver un enfant!" Dis-je avec un petit clin d'oeil, espérant que cette petite plaisanterie pourra alléger sa peine et ce fardeau que j'ai involontairement mit sur ses épaules.
L'homme continue de me rassurer en me disant qu'il doute qu'il m'ait joué un mauvais tour. Il pense les enfants trop innocents et qu'il a dû disparaitre pour une autre raison. Il est vrai que le petit m'a dit qu'il n'avait que six ans. Un âge où l'on est encore particulièrement innocent et foncièrement bon. La méchanceté commence à surgir plus tard, souvent influencée par l'entourage ou l'effet de groupe. Une méchanceté que j'ai pu connaître plus jeune, mais qui m'a appris à renforcer mon cœur. J'ose espérer que l'aventurier a raison sur ce point. J'espère que Brent a disparu pour une bonne raison ou qu'il a simplement été libéré du sort qui lui faisait penser que j'étais sa mère pour retrouver la sienne.
Le brun aurait pu s'arrêter là, mais il continue et semble vouloir m'aider. Je lui offre un regard à la fois triste et gratifiant. J'ai rarement rencontré une personne m'offrant ainsi son aide. Certes, il est un partenaire commercial de Lyle et il est logique qu'il cherche à entretenir une bonne relation avec l'apprentie de son partenaire. Il aurait simplement pu me réconforter et me donner quelques pistes à explorer, mais il semble plutôt vouloir s'impliquer et m'aider à retrouver cet enfant. Quand il m'adresse un petit clin d'œil avec ses paroles réconfortantes, je ne peux que lui offrir un sourire avec un regard plein d'espoir. Si j'étais une personne à peine plus tactile, je pense que j'aurais pu faire un câlin à Aslander et le remercier infiniment. Mais je ne suis pas comme ça, et je tiens à garder une attitude un minimum professionnels. Je me redresse et plonge mon regard dans le sien.
« Merci... Vous êtes incroyablement gentil à vouloir m'aider autant... Je sais que je suis l'apprentie de Lyle, mais rien ne vous oblige à m'aider autant. Je ne sais pas quoi faire pour vous remercier... »
Je sens mon regard se brouiller un peu alors que je parle. Les larmes ont commencé à monter toutes seules. Je prends une inspiration et me force à les retenir. Il n'est pas du tout professionnel de me mettre à pleurer devant un client ou un partenaire. Je fais signe à Aslander de m'attendre ici et je file dans le couloir à toute vitesse. J'essuie les larmes qui ont commencé à se former et les chasse rapidement. Je rejoins ma chambre et fouille dans mes affaires à la recherche du cristal de souvenir que Sio m'a offert. Depuis que je suis rentrée de vacances, je n'y ai pas touché et l'ai laissé dans un tiroir. Une fois le cristal retrouvé, je reviens à la cuisine où le brun m'attend. Je m'approche de lui, un peu hésitante.
« Si vous voulez m'aider à le retrouver... Je me suis dit que le plus simple, c’est de vous montrer à quoi il ressemble. Il se nomme Brent et il a six ans. J'ai enregistré un souvenir avec lui juste après sa disparition... »
Je tends le cristal, mais me ravise avant que l'homme ne le prenne de mes mains.
« Je ne vous demanderai qu'une chose. Ne parlez pas de cet enfant à mon maître... Cette affaire doit rester entre nous. S'il doit apprendre l'existence de cet enfant, j'aimerais que ce soit de ma bouche et de personne d'autre. Et sachez que je vous serais éternellement reconnaissante de votre aide même si vous ne le retrouvez pas. Considérez que je vous dois un service. »
Je lui tends à nouveau le cristal de souvenir. Je ne l'ai pas regardé à nouveau depuis longtemps, mais pourtant dans mon esprit, je le vois à nouveau. Je revois Brent souriant et s'amusant avec l'eau en compagnie de Sio. Tous les deux rigolant et profitant de ce moment de joie passager. Mon cœur se pince un peu et je me sens un peu gênée de partager un souvenir si personnel, mais je me dis que c'est nécessaire si je veux un jour avoir des nouvelles de ce petit garçon.
Ce regard... Tant d'émotions, de voix tues, de non-dits qui ne sont même pas murmurés mais qui sont pourtant bien vivants en son sein... J'y lis une véritable gratitude, autant pour mes mots que pour ma proposition d'aide, mais aussi une tristesse, une détresse qui me pousse à vouloir faire plus tant je me sens mal d'en être la cause... Car oui, je sais que je le suis, c'est malheureux, une situation, un sentiment de culpabilité sur lequel je n'ai aucune emprise, aucun contrôle! Je n'étais qu'un enfant... Une phrase pour s'excuser d'actes passés, d'erreur commises à une lointaine époque, moi j'ai envie de le clamer avec force pour excuser ce coeur visiblement brisé il y a peu de temps pourtant... Je ne peux cependant m'excuser pour cette douleur provoquée alors je me contente d'un clin d'oeil, un sourire, une promesse d'aide et quelques paroles réconfortantes... De la poudre aux yeux, des entourloupes de bonimenteur pour tenter de m'absoudre un peu de mon "crime" involontaire même si, pour le coup, cela signifie mentir un peu plus encore...
Elle sourit, à nouveau ce regard qui affiche maintenant un espoir, je sais qu'elle ne reverra jamais l'enfant, pas en chair et en os tout du moins, mais je peux sans aucun doute lui amener un peu de réconfort d'une manière ou d'une autre... Je secoue doucement la tête. Gentil? Non, je ne le suis pas, je suis juste égoïste, c'est moi que je veux libérer de ce fardeau, comment un homme tel que moi pourrait supporter d'être responsable de la détresse d'une femme? C'est moi que je veux aider en réalité, elle aussi sans doute mais surtout moi! C'est ce que j'ai toujours fais après tout : me sauver au détriment des autres! Si cela permet de la faire sourire en même temps, je suppose que c'est mieux? Quoi que, est-ce vrai? Je l'ai poussé à parler, à me raconter notre rencontre même si elle l'ignore... J'aurais pu ignorer sa peine sans cette demande alors, peut-être que cette fois je n'agis pas uniquement pour moi? Un nouveau sourire, ne rien montrer de ma situation, c'est facile! Il suffit d'endosse ma seconde peau, celle de ce menteur habile qui séduit la plupart du temps par ses gestes et sa voix.
"Je ne fais pas cela parce que vous êtes l'apprentie de Lyle très chère, je le fais car il est du devoir de tout gentilhomme d'aider une demoiselle."
Pas de tentative de séduction, pas se voix suave ou de sourire enjôleur, juste l'évocation d'une réalité, une ligne de conduite que je me suis moi-même imposé en devenant Aslander O'Sullivan! Oui, je suis un salaud, ce genre d'homme qui va de conquête en conquête sans caresser l'envie d'avoir une relation stable ou unique... Pourquoi se priver des merveilles du monde? Mais malgré tout, un homme galant qui ne reste pas aveugle lorsqu'une demoiselle est dans le besoin! J'ai mes tares mais je refuse que celle-là en soit une! Sia prend une grande inspiration et s'écarte, me demandant de l'attendre et je soupire en la voyant partir... Elle le cache bien dans ses gestes mais son regard ne ment pas, des larmes couleront bientôt...
Je retourne vers la table pour finir la tasse de thé qui m'a été offerte, espérons que Lyle ne reviendra pas maintenant, sans doute se questionnera-t-il sur ma présence ici seul, plus encore s'il voit les yeux rougis de larme de son apprentie lorsqu'elle reviendra... Il y a des choses que je ne suis pas prêt à expliquer. La belle revient finalement avec un objet : un cristal de souvenir? J'ignorais qu'elle possédait pareil merveille : me montrer le garçon? Alors elle a conservé comme un moment précieux le moment de notre rencontre? Voilà qui a de quoi me faire sentir plus coupable encore... Tendant la main pour m'en saisir, elle se ravise et je la regarde, attendant d'entendre ce qu'elle a à dire. Un léger hochement de tête, pas de sourire cependant, voici un moment durant lequel je suis on ne peut plus sérieux.
"Sia vous avez ma parole d'honneur, jamais je n'en dirai mot! Et non... Vous ne me devrez aucun service! Je fais cela de mon propre chef, de ma propre envie. Je refuse que vous vous sentiez redevable..." Dis-je fermement. Comment effacerais-je ma culpabilité sinon? Prenant le cristal, je le pose contre ma poitrine pour l'activé et la scène se joue devant mes yeux... C'est étrange de me revoir si jeune : six ans, bien avant que je ne prennes cette potion de changement d'apparence, une chance plus rien ne me relie à ce moi passé, impossible de reconnaître ne fut-ce que des traits du bambin chez moi... Je regarde la scène et un petit sourire se dessine sur mes lèvres. Oui, alors que je jouais au niveau de cette fontaine avec Sio, le grand sourire illuminant mon visage ne peut mentir : l'espace d'une soirée, j'ai été réellement heureux! Il est temps que ce soit également le cas de la jeune femme. Le souvenir s'estompe et je rend son cristal à la demoiselle en hochant la tête.
"Il avait l'air vraiment heureux... Je vous promet de tout mettre en oeuvre pour le retrouver et vous apporter des nouvelles de ce petit Brent, vous avez ma parole et croyez-moi, c'est ce qui a le plus de valeur à mes yeux!"
Quand je lui fais ma demande, l'homme me donne sa parole d'honneur. Je ne sais pas trop ce qu'elle vaut, après tout je ne le connais pas. Puisqu'il s'agit d'un partenaire commercial de mon maître, je me doute que ce dernier a une certaine confiance en Aslander. J'aimerais en apprendre plus sur cet homme avant de lui confier de telles choses, mais je me suis retrouvée emmenée par le cours des choses. J'ai beau me forcer à ne pas penser à cette soirée, je sais qu'elle me reste graver dans l'esprit. La fin de mes vacances n'a pas vraiment été reposante en partie à cause de cela. J'étais même plutôt déprimée et je suis revenue ici plus fatiguée qu'à mon départ. Évidemment j'ai tenu la tête haute pour ne pas montrer mes problèmes à Lyle, il n'a pas besoin de cela. Je peux en discuter avec lui, mais je ne me sentais juste pas de le faire.
Il ajoute que je n'ai pas à me sentir redevable, qu'il fait cela simplement parce qu'il en a envie. Je le fixe un instant dans les yeux. Il est sincère là-dessus, il n'y a pas de doute. Je ne comprends tout de même pas ce qui le pousse à m'aider autant. Ai-je l'air si désespérée ? Ou est-ce qu'il y a une raison de je ne peux imaginer. Je hoche la tête en lui tendant à nouveau le cristal. J'observe les traits du brun alors qu'il pose le cristal contre sa poitrine. La scène est assez courte alors la vision n'est pas longue d'un point de vue extérieur. Mais cela me permet de détailler un peu plus le visage de l'homme qui me fait face. Il a un certain charme, on ne peut pas lui retirer cela. Il est bel homme et je pense qu'il a déjà volé le cœur de plus d'une femme.
Je vois le léger sourire étirer les lèvres d'Aslander avant qu'il ne s'estompe quand le souvenir se termine. Il me rend le cristal et me parle donc du souvenir. Heureux ? Je l'espère. J’espère sincèrement avoir apporté un peu de joie à cet enfant durant cette soirée. En tout cas, moi je m'étais réellement amusée. Cette rencontre complètement par hasard dont je ne voulais pas à l'origine est rapidement devenue un petit moment de joie pure. Le brun réitère sa promesse de tout mettre en œuvre pour retrouver ce petit garçon et m'apporter des nouvelles. Mes doigts jouent avec le cristal et je le fixe tout en l'écoutant. Malgré moi, une larme coule le long de ma joue. Cette fois, je n'arrive pas à retenir mes larmes. C'est comme si ces sentiments que j'ai retenus tout ce temps décident de ressortir d'un coup. Je me sens nulle de craquer ainsi devant un client aussi important. Je me sens faible et absolument pas professionnelle. Je me retourne pour cacher mes larmes.
« Excusez-moi... Ce n'est pas professionnel de ma part... » Ma voix tremble malgré moi et les larmes ne veulent plus s'arrêter de couler. Il faut que je sorte, je ne peux pas rester ainsi devant un client. Et je ne parle même pas du fait si Lyle me surprend ainsi. J'essuie autant que possible les larmes qui coulent et essaye de calmer le tremblement de ma voix. Je dois essayer de rester professionnelle autant que possible. « Je vous remercie... Je... Je vais chercher Lyle maintenant. Je reviens tout de suite. »
Je me suis engagé, j'ai donné ma parole... N'est-ce pas honteux de ma part? Ne suis-je pas en train d'apporter de faux espoirs à cette demoiselle? lui faire croire qu'elle pourra peut-être, un jour, revoir cet enfant? Non, c'est plus une conclusion logique, la fin de cette affaire, de cette aventure, de cette soirée qui n'aurait jamais dû avoir lieu! Elle a besoin de tourner la page, cela se voit, cela se ressent! Sans doute est-ce ma faute cependant? Parce que j'ai eu le malheur de raconter cette histoire que je répète comme un automatisme quand on me le demande, que j'ai répété encore et encore pour m'assurer que la version soit toujours la même : naissance dans les archipels, disparition du père, dettes, travail honnête et sincère, ascension... Chaque petits points doit être évoqué, répété pour s'assurer que l'ensemble ne souffre d'aucune incohérence, c'est d'autant plus important que le début est totalement vrai... Le problème c'est que cela lui a rappeler Brent! Je suis responsable, je prends mes responsabilités...
Je lui rend le cristal en lui affirmant une nouvelle fois mes engagements et cette fois, sa carapace si solide jusqu'à présent se fissure, la belle ne peut retenir les océans de lui monter aux cils, une larme suivie d'une autre et bientôt se déchaine la plus terribles des tempêtes dans son doux regard... Elle se tourne, s'excuse, ce n'est pas professionnel? Je soupire doucement, qu'importe le professionnalisme en ce moment? Je pourrais sans doute lui offrir au minimum un mouchoir, au mieux une épaule sur laquelle pleurer quoi que, j'ignore la nature de sa relation avec Lyle, je ne désire pas non plus que son partenaire pense que je tente de séduire sa conjointe - et apprentie - après avoir embrumé ses yeux! Je sais que lorsqu'il est question de femme et, plus encore, de cœur... Il est difficile de raisonner un homme! Rien n'est plus stupide ni dangereux qu'un homme amoureux! Ainsi, elle s'éloigne et je la regarde s'enfuir pour aller chercher Lyle visiblement, je suppose que ma retrouvaille et mon tête à tête avec Sia se termine ici... C'est lorsque je suis certain qu'elle n'est plus à portée de voix qu'enfin, je peux dire ce que je veux dire depuis plusieurs minutes maintenant...
"Je suis désolé Sia..."
Puisqu'elle est partie chercher Lyle, autant ne pas m'attarder ici! Elle devra de toute manière repasser par l'extérieur de la boutique et puis, je me souviens que Lyle m'avait demandé de ne pas passer derrière le comptoir, certes c'est la demoiselle qui m'y a invité mais qu'importe? Après tout, c'est pour Orisha que je suis venu à la base, autant que Lyle le voit directement et je n'ai pas besoin de rester dans la boutique pour cela. Je sors donc de l'établissement et m'assoit dans la neige, le froid m'apaise et Orisha vient immédiatement me voir alors que je caresse calmement son museau. "Ne t'en fais pas mon ami, cela ne devrait plus être long..."
J'essuie rageusement les larmes qui coulent de mon œil gauche. Je dois avoir la peau rougie maintenant. Et merde. Lyle va sûrement se poser des questions en me voyant dans cet état. Je ne sais pas s'il va me les adresser directement, mais il est clair que je ne pourrais pas cacher le fait que j'ai pleuré. Il n'insistera sûrement pas si je lui dis que je ne veux pas en parler, mais on ne sait jamais. Je suis trop mauvaise menteuse pour inventer un bobard de toute façon. Je me dirige vers la forge en profitant de l'air frais pour me calmer. Je m'arrête un moment devant la porte. À l'intérieur, j’entends mon maître travailler et frapper le métal. Je range le cristal de souvenir que j'ai encore dans les mains dans une poche de mon short. Je prends une grande inspiration en fermant l'œil et ouvre la porte de la forge.
Mon maître est là. Il me tourne le dos et travaille de façon très concentrée. Je n'aime jamais l'interrompre dans son travail. L'interrompre c'est une chance qu'il gâche son travail toujours si proche de la perfection. J'observe un instant ce sur quoi il travaille. C'est presque terminé, mais il y en a encore pour un moment. Je ne peux pas laisser Aslander attendre plus longtemps, je dois donc l'interrompre. Je m'approche doucement du forgeron en faisant attention à ne pas le gêner. Il a sûrement senti ma présence, mais quand il est dans sa bulle comme maintenant il ignore volontairement tout ce qui l'entoure. Je l'observe et attend le bon moment pour venir poser ma main sur son épaule.
« Lyle. Un client veut te voir. » Le forgeron interrompt son travail. Avant qu'il ne se retourne ou ne dise quoique ce soit, je continue. « C'est Aslander O'Sullivan. Il attend dans la boutique. »
Je retire ma main de son épaule et sort de la forge avant qu'il ne voit mon visage. Je vais le laisser ranger et prendre le temps de sortir. Je m'assois sur l'herbe devant la forge et attend patiemment que mon maître sorte. Ce petit laps de temps me permet de me vider un peu la tête et laisse encore un peu de temps à la rougeur autour de mon œil de se calmer. Je ne pourrais pas cacher le fait que j'ai pleuré, mais si je peux éviter des questions, c'est mieux. L'air frais de la montagne me fait du bien et déjà je me sens bien plus calme que plus tôt. Mes idées sont plus claires. Quand j'entends Lyle sortir, je me lève et époussette un peu mon short. Je laisse mon maître me rejoindre et de façon machinale mon regard se tourne vers le sien pour que je commence à lui donner un peu plus d'informations sur la commande en question.
« Il aimerait une armure en Obidium pour son Rarwük. Il a apporté un exemple du minerai qu'il peut fournir pour l'armure en question et compte en fournir en tout cinq morceaux. J'ai déjà récupéré et noté la majorité des détails dont tu auras besoin, mais il souhaite tout de même discuter avec toi. »
Je me détourne vivement pour éviter que le rouquin ne me fixe plus longtemps et ne se rende compte de mon état si ce n'est pas déjà fait. Je n'attends pas vraiment une réponse alors je me dirige déjà vers la maison. Je vais aller ranger la cuisine et laisser mon maître discuter avec son partenaire commercial. Je me rappelle avoir laissé Aslander sur place et être partie de façon plutôt impolie. J'espère qu'il ne m'en tiendra pas trop rigueur et qu'il a rejoint à nouveau la boutique pendant mon absence.