La route s'ouvrait de nouveau devant eux. Pas une belle route bien délimitée et patrouillée régulièrement, mais une lande de jade qui s'étendait à perte de vue, entrecoupée ça et là par des bosquets touffus dans lesquels devaient s'abriter la faune locale.
Pas question de champs à perte de vue, simplement une terre balayée par les vents, dont les senteurs différentes selon les directions parvenaient à faire deviner leurs origines.
Au côté de Calcilia, Liory pouvait sentir un vent d'ouest apporter l'odeur du sel marin, bien que dilué par la distance alors que du nord soufflait un vent plus frais, apportant aussi quelques essences de bois robustes qui ne pouvaient que rappeler les meilleurs barils de vin du pays.
Comme s'ils étaient à un carrefour animé alors que leurs pas venaient brouiller le paysage sauvage.
L'argenté se sentait d'excellente humeur, sentant avec délice l'air dans ses cheveux, comme si une fée de la liberté lui murmurait à l'oreille
Loin des rumeurs plus civilisées, il se sentait en phase avec lui même, libre de danser avec les courants d'air, il aurait pu aller n'importe où, mais dans le cas présent la compagnie de Calcilia lui faisait dire que nuls autres endroits n'auraient été souhaitables
-Le Grand Port est par là
Annonça t'il en pointant l'ouest, ou de gros nuages commençaient à s'amonceler, gonflant à mesure que la distance se réduisait, et prenant une teinte plus sombre, annonçant le déluge prochain.
-Mais je crains que nous ne puissions esquiver les gouttes, peut être serait-il souhaitable de s'abriter avant que le ciel nous tombe sur la tête.
Et comme pour confirmer la déclaration, un éclair zébra le ciel, le tonnerre déchirant le silence soudain alors que le vent se mettait à redoubler, couchant les hautes herbes et faisant fuir les rongeurs dans leurs terriers.
Prenant la main de la barde, Liory l'emmena dans une course folle pour devancer le déluge qui commençait déjà à frapper les plaines et ce, jusque dans un petit bosquet qui n'était guère plus grand qu'un village, les arbres régulièrement espacés laissant apercevoir le ciel par endroit, mais possédaient un feuillage assez épais pour atténuer la pluie.
Cette fois ci, il n'y eut nul pièges ou bandits, simplement quelques animaux trop occupés par l'orage pour remarquer leurs présence, dont une colonie de gloot qui s'amoncelaient dans les racines d'un arbre, leurs grands yeux vides s'illuminait à chaque décharge céleste.
-L'orage risque de nous retenir quelques temps, autant se mettre à l'aise et tacher de rester au sec, j'avoue ne pas vraiment savoir à quelle distance nous sommes de la côte
Et au vu des derniers évènements, mieux vaut prendre un peu de temps pour se reposer.
D'ailleurs...
Il fixa la demoiselle avec intensité, réfrénant son envie de l'avoir dans les bras, l'inquiétude l'emportant sur le besoin omniprésent de l'avoir près de lui.
-Il est temps de changer tes bandages
Le noble sortit sa trousse du parfait maladroit, produisant un lot de compresses propres qu'il commença à défaire anticipant les protestations de son amie en dégrafant avec précaution l'avant de sa tenue pour découvrir les anciens pansements.
Son doigt se posa sur ses lèvres avant qu'il ne se mette à sourire
-Et pas de protestation belle amie, en l'absence de médecins, je me dois de prendre soin de toi, c'est le moins que je puisse faire.
Et si le corps de la demoiselle était plus qu'attrayant, il fut étrangement facile de se concentrer sur la tache. Sa santé lui important bien plus que quelques plaisirs interdits.
Retirant les anciens bandages avec précautions, il lava la cicatrices avec douceur, passant son doigt sur cette dernière pour en vérifier l'état, des yeux semi accusateurs, semi désolés se plongeant dans ceux de Calcilia
-Je suis navré, si j'avais été plus habile... tout cela ne serait pas arrivé
Un profond sentiment de culpabilité envahissait le noble quand il posait les yeux sur la plaie. Cette dernière rappelant douloureusement à l'argenté ce que la demoiselle avait été prête à faire pour lui.
-Promet moi de ne plus te remettre en danger pour moi, ça n'en vaut pas la peine
Liory ne voyant nulle gloire à survivre au détriment de son "amie"
Complainte d'un vent d'été
@Liory Alkh'eir Feat @Calcilia Dilys
La voûte céleste s’était marquée de zébrures lumineuses, plongeant le royaume dans l’obscurité des nuages. L’astre solaire avait légué sa place aux larmes acides des cieux, gardant sous ses ailes bienveillantes ce couple d’aventuriers qui écriaient leurs premiers émois.« Je te dis que c’est pas nécessaire, pesta la jeune femme en essayant de se soustraire aux mains malignes de son partenaire. »
Une grimace légèrement désapprobatrice déformait le visage de la belle lorsque le tissu s’écarta de sa peau blanche. Sans compter la plaie encore rougie mais en bonne voie de guérison, d’autres stigmates bien plus anciens sillonnaient le corps, dansantes au rythme des mouvements de la barde. Éternelles dans les chaires de la jeune femme qui ne put que détourner la tête avec honte alors que la vérité était dévoilée. Même si le réel problème ne venait pas des cicatrices en elles-mêmes. Non, ce qui semblait la dévastait, c’était les billes d’azur qui longeaient son corps, comme si après toutes ces années, elle se rendait enfin compte de ce que signifiait la présence des lames qui se dessinaient sur sa peau.
Lorsque le bandage se referma tel un étau autour de son buste, la barde referma d’un mouvement sec la tunique, la tête détournée, les joues légèrement enflées. La promesse restant tue à jamais sur ses lèvres. Calcilia ne dirait rien, ne promettrait rien, car autant de lames qui parcourront son corps, jamais n’atteindront son corps. Là était sa réellement promesse tacite au fond de son regard pourpre.
« C’était très discourtois de ta part, fit-elle avec véhémence, alors qu’aucun mot prononcé ne reflétait sa réelle pensée. »
Elle s’arrêta soudainement, absorbée par le décor, les serpents d’eau dévalant le ciel rageusement, leur maigre protection ne suffirait probablement pas à les tenir à l’abri longtemps de leur venin. La jeune femme tendit sa main entre les gouttes qui s’échouaient avant de ramper sur la peau. Pourtant, le paysage qui se dévoilait à travers le rideau de pluie n’offrait qu’un nouveau monde si peu connu. Apaisant, touchant, les notes apparaissaient dans la tête de la barde qui ne sut faire taire la muse du moment. Oubliant ses enfantillages du moment, Calcilia se retourna vers Liory, une expression douce sur le visage.
« Je pense que nous devrions trouver un autre abri, nous risquons rapidement de finir trempés. »
Mais aucun relief ne semblait s’extraire de ce paysage plat dans lequel ils voyageaient depuis plusieurs heures. Peut-être qu’avec un peu de chance, ils sauraient trouver une bâtisse isolée qui saurait recueillir le couple. Ils auraient tout autant le loisir de se sécher une fois au sec. Elle attira les mains de partenaire entre les siennes pour l’attirer dans le torrent démentielle des larmes célestes. En réalité, Calcilia appréciait la pluie, malgré sa répulsion pour les décors aquatiques. Et ce fut seuls, au milieu d’un paysage verdoyant qu’ils s’échappèrent jusqu’à une auberge qui recueillait les voyageurs à mi-chemin jusqu’à Grand Port.
La barde offrit un sourire victorieux au bel aventurier qui l’avait suivi dans sa folie. Le bandage précédemment fait avec soin était déjà à refaire, mais elle n’en dit aucun mot afin de ne pas attirer l’attention de son partenaire dessus. La jeune femme ouvrit la porte du petit bâtiment, rapidement accueillie par la bienveillance des hôtes. Un petit commerce de famille qui avait voulu s’éloigner de la ville pour profiter d’un brin de campagne bien plus relaxant.
« Nous avons fait une mauvaise rencontre avec la pluie, s’égaya la barde, ravie de rencontrer enfin des visages amicaux. »
Il n’en fallut pas plus que pour le jeune couple se retrouver dans une petite chambre confortable, dotée de sa propre cheminée. Dégoulinante, Calcilia se débarrassa du surplus d’eau dans sa chevelure, prenant soin de l’essorer dans une bassine mise à disposition. Dans une pièce séparée, la plupart de ses vêtements se retrouvèrent sur le sol. Elle ne ressortit de la salle d’eau qu’un peu plus tard, habillée d’une tunique blanche évasée, tombant jusqu’à ses genoux.
« C’est quand même plus confortable. »
Elle croisa ses doigts contre sa poitrine avec un air ingénu. Elle vint s’asseoir sur le lit, juste à côté de Liory, avant de poser sa tête contre son épaule.
« Je pense que c’est ce qu’il nous fallait après ce qu’on a vécu , murmura-t-elle en baissant les yeux.»
La chambre se voulait spacieuse, Liory ayant payé d'avance pour ce qui se faisait de mieux. Pas que le noble n'appréciait pas la rusticité, mais revenir quelque fois au confort qu'il avait connu avant. Ou du moins, s'approcher de ce dernier. Ne ferait pas de mal. Bien au contraire.
Se jetant sur le grand lit qui occupait une bonne partie de l'endroit, il se laissa à un soupir de contentement en sentant le matelas absorber ses formes.
Ses vêtements séchaient déjà dans son objet magique et en ressortiraient surement plus propre qu'ils ne l'avaient jamais été vu la motivation qu'avait eu l'argenté à frotter.
Et alors que son amie se lavait, il fit de même, dans une autre pièce ou il put constater les miracles de la magies et des cristaux d'eau, se débarrassant en quelques minutes de ses problèmes de la veille, comme un serpent se serait débarrassé de son ancienne peau.
Il en ressortit rayonnant, ses traits tirés par la fatigue mais un sourire réel sur le visage. Vêtu d'une version plus simple de sa tenue de chasse, son tissus vert forêt ne changeant guère de couleur, il prit plaisir à caresser la chevelure de son amie, savourant ce bref moment de repos
-Du repos, un peu de temps pour se remettre les idées en place oui, en espérant qu'une araignée ne vienne pas faire irruption dans la chambre une nouvelle fois
Mais au vu des alentours, il y a peu de risques.
Car l'auberge était bien entourée, jouxtée par un petit village disposant de son propre avant poste de la garde, chassant sans difficultés les velléités de pillage des bandes les plus faibles.
Et en cette période de chaleur, beaucoup d'aventuriers étaient de passage dans les alentours. Avec un peu de chance, ils allaient peut être pouvoir profiter d'une soirée rien qu'eux deux.
-J'espère que tu sais qu'il me faudra remplacer tes bandages avant de reprendre la route ?
Dit il en souriant, faisant fit de la moue de la belle en lui tirant doucement la joue, son rire cristallin montant dans la pièce sans difficultés.
Sa voix remplie des sonorités chantante de sa région natale tachant d'apaiser son amie.
-Ne prend pas ça comme une tentative maladroite pour contempler ton corps, mais si je sais bien une chose, c'est qu'une blessure bien soignée ne te fera pas de marques
Son regard n'avait pas manqué de remarquer les nombreuses cicatrices de la demoiselle, sans pour autant que ces dernières ne ternissent la beauté de la barde. Au contraire, cela lui donnait un petit côté sauvage qui ne pouvait qu'aider à la rendre désirable.
-Et même si chacune de tes marques racontent une histoire qu'il te faudra me raconter, j'aimerai éviter qu'une nouvelle vienne s'ajouter par ma faute.
Si je ne suis pas le meilleur des compagnons, j'espère pouvoir être un meilleur médecin.
Même si son talent en médecine venait majoritairement des livres empruntés à Luz. Livres qu'il parcourait à chaque fois qu'il lui en était laissé l'occasion.
Passant une main sur la joue de la demoiselle, plongeant son regard dans le sien, il la fit s'allonger contre lui, fermant les rideaux à l'aide de son pouvoir avant d'ajouter :
-Une marque de plus ou en moins ne te rendra pas moins belle à mes yeux, mais si je peux t'aider, je le ferais.
Ses bras enveloppèrent la jeune femme, l'argenté s'imprégnant du parfum de la demoiselle, sentant la simple présence de Calcilia apaiser les troubles de son cœur.
Rester ainsi à ses côtés le rendait étrangement serein, et son esprit semblait s'accorder à un instant de repos.
Et alors qu'ils s'endormaient ainsi, les yeux de Liory se fermant un peu plus rapidement que ceux de sa compagne, ses lèvres se mirent à s'agiter d'elle même, l'argenté marmonnant quelque chose alors que son inconscient lui faisait serrer la jeune femme dans ses bras
-Si tu ne m'abandonne pas, toi aussi...
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Liory était un homme touchant, sa douceur perçant la jeune femme en plein cœur. Elle avait protesté, mais face à ce regard si sincère, elle ne pourrait que défaillir. Calcilia enferma le bel endormi dans une étreinte chaleureuse, alors qu’elle ne put que sourire faiblement en saisissant les murmures qu’il avait égaré dans son sommeil. La barde repoussa délicatement les mèches immaculées en arrière pour dévoiler pleinement le beau visage de son partenaire. Ses lèvres, empreintes de bienveillance, rencontrèrent la peau de sa joue avant qu’elle ne lui glisse dans un souffle.« Je n’y compte pas mon bel ange. Chaque pas à tes côtés est une découverte qui gonfle mon cœur. »
Sans plus, elle se lova dans l’étau, bercée par la respiration de son compagnon, la barde ne tarda pas à le rejoindre dans le royaume des songes.
~
La sensation de sécurité dans laquelle était plongée la jeune femme lui offrit un sommeil réparateur. Ce furent quelques rayons farceurs qui traversaient l’épais rideau qui réveilla Calcilia. Elle papillonna des yeux faiblement, découvrant le torse de son partenaire. Une étrange sensation de déjà-vu l’assaillit, alors que le douloureux réveil du hamac lui revenait en mémoire. Doucement, pour ne pas réveiller le bel endormi, la barde se glissa hors de l’étreinte avant d’étirer longuement ses muscles engourdis. La jeune femme avait enfilé ses vêtements de la veille, maintenant secs avant de se faufiler hors de la chambre après avoir jeté un dernier regard sur son partenaire toujours endormir.
Ses pas l’entraînèrent à la petite réception où elle rencontra l’aubergiste. Calcilia était une femme joyeuse dont la bonne humeur était contagieuse, elle discuta brièvement avec la bonne femme qui accepta avec joie la requête de la jolie barde. Celle-ci déposa ses cristaux en bonus sur le comptoir alors que son mari passait dans le coin avec des viennoiseries plein les bras. L’odeur chaude du pain avait empli la pièce, faisant rêvasser la jeune femme.
« Oh parfait tu arrives juste à temps ! S'enquit la petite dame. »
Elle s’empressa de tout installer sur un plateau avant de le tendre à la barde qui attendait patiemment, avant de lui annoncer d’un ton fier.
« Vous êtes attentionnée comme compagne. »
De légères rougeurs apparurent sur les joues de Calcilia qui réfuta en secouant sa main.
« Nous ne sommes que des compagnons de voyage, s’empressa-t-elle de corriger. »
Un compagnon de voyage à qui elle avait dérobé un baiser éhonté. Son visage tourna alors à l’écarlate maintenant qu’elle y repensait. Puis se cachant derrière ses mèches d’azur, la barde les remercia brièvement avant de remonter dans la chambre. Marchant doucement sur les lattes de bois, elle se dirigea vers la table où elle déposa son plateau.
Calcilia s’assit sur le lit doucement, se penchant au-dessus de l’aventurier, venant chatouiller son visage du bout de sa chevelure. Sa main fut délicate contre sa joue, avant qu’elle ne vienne le réveiller d’un murmure chantant.
« Allez bel endormi, il va être temps d’ouvrir les yeux. »
Ce n’est que lorsqu’elle croisa les pupilles bleutées qu’elle se fendit d’un large sourire. La barde déposa son front contre le sien sans le quitter du regard.
« Dépêche-toi sinon je mange tout. »
La jeune femme déposa rapidement un baiser sur sa joue en se levant, le laissant émerger de son lourd sommeil. Calcilia eut tôt fait de réapparaître près du lit, un croissant en main.
« J’espère que tu aimes ça, dit-elle en réalisant soudain qu’elle ne connaissait pas vraiment les goûts de son partenaire. »
Ils n’avaient appris à se connaître que partiellement, elle connaissait quelques anecdotes de cet attachant personnage, mais au final, c’étaient les petits détails qui lui échappaient et que maintenant elle mourrait d’envie d’apprendre davantage. Et cette pensée ne la fit même pas tressaillir, alors qu’elle sentait cette envie de se rapprocher d’une autre personne et de le laisser pénétrer dans sa vie. Mais maintenant qu’elle était au bord du précipice, la jeune femme n’avait plus moyen de faire marche arrière.
On pouvait difficilement demander un meilleur réveil, et les pupilles azur du noble se posèrent sur le visage de son ami. Sans pouvoir s'empêcher de sourire, sa main chercha instinctivement celle de la belle alors qu'il s'étirait comme un félin resté trop longtemps assoupi.
-Que ce soit le repas ou me réveiller près de toi, j'adore ça. Même si l'un des deux à plus d'attrait que l'autre
Dit il en caressant la joue de la demoiselle, sentant son cœur reprendre son rythme anormal. S'asseyant en tailleur sur le matelas, il se frotta un œil encore gonflé de sommeil, peinant à croire que leurs rencontre n'était pas si lointaine.
La barde apeurée du lac s'étant transformé en petit ange à la chevelure azurée, une vision que même en rêve, il n'aurait pu égaler.
Les viennoiseries étaient encore chaudes et croustillantes, et de manière bien noble, Liory mit sa main sous sa bouche pour capturer les miettes motivées par la fuite.
-A avoir des réveils ainsi, je vais finir par y prendre goût tu sais ?
C'était un avertissement tout comme un compliment. Et si le noble n'était pas du genre à prendre des habitudes pareilles, quelque chose au fond de lui, lui disait que la chose pourrait être bien différente avec Calcilia.
Pour le moment ils n'avaient pas convenus de moment pour se séparer, et l'argenté comptait bien à ce que cela se fasse le plus tard possible.
La matinée s'écoula doucement, et Liory eut tout le loisir de parler avec la demoiselle, échangeant sur des sujets aussi divers que variés. Ils allaient d'ailleurs passer à table quand un grand bruit se fit entendre dans le couloir : celui de pas précipités et lourd qui se dirigeaient droit vers eux.
Le noble porta instinctivement la main à sa dague craignant une mauvaise surprise de plus. Et quand la source finit par ouvrir la porte, ce ne fut pas un bandit ou un monstre quelconque qui apparut devant eux, mais bien un aubergiste essoufflé, aux yeux paniqués
-Ah ! Je comptais bien vous trouvez avant votre départ
Ils furent si surpris qu'ils ne firent pas mention de leurs tenues légères, ou du lit encore défait de la nuit, s'asseillant pour écouter la requête de leur bailleur temporaire
-Je sais que vous avez de la route, mais... nous avons un problème de dernière minute, voyez vous... ma fille va bientôt se marier... Et le barde que nous avions engagé viens de m'envoyer une lettre pour me dire que de récents incidents dans la région l'avaient retenus dans la forêt proche
J'ai cru comprendre que madame jouait elle même d'un instrument
Les yeux de l'homme se posèrent sur la lyre de Calcilia, ses yeux se faisant suppliant, le père de famille faisant décidément tout pour sauver le mariage de sa chère enfant.
Ce fut presque touchant de le voir sautiller d'un pied sur l'autre, gêné de demander un tel service.
-Pensez vous qu'il vous serait possible de le remplacer ? Bien sur cela ne sera pas gratuit, et je m'engage à vous loger une nuit de plus gratuitement si vous acceptez !
Liory eut un regard complice vers son amie. L'appel de la musique était fort chez elle, et refuser à un père d'embellir le mariage de son enfant serait bien cruel.
Sortant son propre violon sous les yeux ébahi de l'aubergiste, le noble reprit la parole en souriant.
-Si vous acceptez un deuxième musicien, je serais plus qu'honoré d'égayer le mariage, et je suis sur que mon amie ici présente trépigne d'envie de montrer ses talents à tous
Un soulagement visible se fit jour sur les traits de l'aubergiste et ils eurent droit à un millier de merci, assurant que tout leur serait offert, une nuit à l'auberge et une place de choix au mariage.
Cela rallongeait leur voyage. Mais cherchaient ils à arriver en un point précis ? Ou simplement passer du temps ensemble ?
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La jeune femme baissa la tête incertaine, elle n’avait pas le cœur à refuser, tout comme elle n’était pas certaine de pouvoir assumer un tel rôle. Mais lorsque Liory affirma avec confiance qu’ils seraient ravis d’aider, Calcilia étira un léger sourire, gagnée par son assurance. Elle posa sa main sur sa poitrine en inclinant poliment son buste en avant.« Ce serait un plaisir de vous offrir ce service, vous vous êtes montrés si accueillants, ce serait un crime que de vous refuser cette faveur, affirma la barde. »
Soulagé, l’homme les remercia mille fois, ne pouvant que louer leur altruisme. Calcilia laissa échapper un doux rire avant de s’asseoir à la table pensive.
« Malheureusement, la lyre n’est pas un instrument de mariage, elle ne siéra pas à l’ambiance. Possédez-vous un piano ? »
L’aubergiste hocha vigoureusement la tête.
« L’église du village non loin, dispose même d’un orgue et d’une harpe. »
La jeune femme releva la tête avant d’acquiescer légèrement, mais il faudrait s’accorder avec son partenaire afin qu’ils puissent offrir un réel duo.
« Un piano restera plus mélodieux accompagné d’un violon. Essayez de négocier avec le prêtre pour que nous puissions un peu pratiquer. »
Elle sortit de sa sacoche une plume et une feuille.
« Veuillez également me trouver un coursier, mais rassurez-vous, nous serons prêts à temps, assura la barde avec un sourire. »
L’auberge se pressa d’accepter sa requête avant de les remercier à nouveau puis de disparaître de leur chambre. Lui-même devait terminer les préparatifs du mariage. Calcilia leva les yeux vers Liory, se marquant d’un sourire apaisant.
« J’ai hâte de pouvoir jouer à tes côtés. »
Elle l’observa un moment, une expression inquisitrice sur le visage.
« Bien, je pense savoir quoi dire. »
La jeune femme se mit à griffonner rapidement sur son papier, avant de refermer l’enveloppe. Elle se redressa ensuite.
« Allez, nous n’avons pas beaucoup de temps pour nous préparer. »
Calcilia le pressa de se lever, elle avait une petite appréhension. Il valait donc mieux qu’ils se préparent au mieux pour l’événement qui se préparait, elle laissait aux mains de son précieux Emerald les finitions, ainsi, ils pourraient profiter pleinement de la journée pour répéter.
Elle descendit de l’établissement, où une charrette les attendait à l’extérieur.
« Le village n’est pas très loin, mais ce sera plus rapide comme ça. »
Calcilia hocha la tête en lui donnant la lettre. Ils devaient se trouver à presque deux heures de Grand Port, elle espéra que son merveilleux ami se montrerait réactif. Avec un peu de chance, elle aurait sa réponse en fin de matinée. Confiante, elle s’installa dans leur véhicule, réfléchissant à une partition adaptée pour le mariage. Durant leur court trajet, elle fit part de son projet au bel aventurier, détaillant ce qu’elle avait prévu.
Il leur fallut approximativement une vingtaine de minutes pour arriver à destination, la charrette les arrêtant devant une charmante petite église, le couple posa pied à terre, avant de pénétrer la petite bâtisse. Un écho répondit aux talons de la barde qui déambula jusqu’à l’autel émerveillée. Une lumière blafarde pénétrait le bâtiment, colorée par les vitraux.
« C’est la première fois que je joue pour un mariage, confessa la jeune femme à son partenaire. »
Elle n’avait d’ailleurs eu que peu d’occasion d’assister à un tel événement, plutôt habituée à parcourir les routes sauvages d’Aryon.
« J’espère que nous saurons nous montrer à la hauteur de leurs attentes. »
Le curé vint les accueillir avant qu’ils ne puissent poursuivre leur conversation, présentant les instruments évoqués plus tôt. Calcilia le remercia aimablement avant de s’approcher du piano, touchant le bois de l’instrument avec nostalgie. C’était un piano à queue, le bois vernis d’un noir élégant.
« J’espère que tu ne m’en voudras pas, j’ai un peu perdu la main, il risque d’y avoir quelques fausses notes, déclara la barde avec un léger rire. »
Elle s’assit sur le tabouret, ouvrant le cache, elle dévoila les clés, y déposa délicatement ses doigts pour faire résonner quelques accords. Satisfaite, la jeune femme se tourna vers son partenaire avec un grand sourire.
« Je te propose que nous nous y mettions dès à présent. »
Le couple apprit à se connaître différemment, travaillant avec ardeur, se permettant quelques pauses pour accorder davantage leur art. Cela dura jusqu’en début d’après-midi avant que la grande porte de l’église ne s’ouvre en fracas. La jeune femme se redressa aussitôt, son regard s’illuminant soudainement.
« Je viens au nom de messire Aubeclair ! Dame Dilys est ici ? »
Calcilia arriva ravie, en se présentant devant l’homme.
« Oui, oui ! C’est moi ! Chantonna la jeune femme. Emerald est ici ? »
La réponse négative assombrit la mine de la jeune femme, déçue de ne pas voir son fier ami. Au moins, il s’était montré aussi efficace que ce qu’elle attendait de lui. La barde se pencha sur le côté pour voir derrière lui un carrosse immense, rempli d’accessoires et de tenues en tout genre. Un couturier et deux assistantes kidnappèrent le jeune couple, commençant à prendre leurs mesures.
Calcilia ne put s’empêcher de rire, ils n’étaient que les musiciens, et il avait réussi à lui faire venir un couturier. Il y avait déjà des vêtements prêts à porter, elle supposa qu’ils n’auraient qu’à faire les retouches une fois les tenues portées.
« Toujours à faire les choses en trop grand. »
Elle se tourna vers son partenaire de voyage, posant une main sur son épaule d’un air solennel.
« Tu dois avoir l’habitude, mais prépare-toi, nous en avons pour un bon moment. »
Pendant qu’ils se faisaient habiller, Calcilia en profita pour échauffer sa voix, habituée à l’exubérance de son vieil ami de toujours. Elle espéra que ce soit moins éprouvant pour Liory. Il ne leur restait plus beaucoup de temps avec le mariage.
Voilà qu'un nouveau type de cérémonie faisait son entrée. Sous la forme d'artisans particulièrement motivé, qui se jetèrent sur les deux musiciens les séparant de facto pour mieux les faire se retrouver.
Habitué à ce genre de traitement, bien que surpris, le noble se laissa embarquer, passant dans les mains expertes des personnes mandatées pour lui refaire une tenue appropriée.
Et commença un jeu de questions réponse auxquelles Liory se prêta sans rechigner, il ne fut guère compliqué de se refaire faire une tenue comme il en avait porté dans sa vie d'avant.
Nonobstant les froufrous et autre exubérances, il se laissa tenter par une tenue noire boutonnée sur le côté par quelques attaches argentés, qui savaient rehausser la tenue sans pour autant la rendre trop voyante.
Et devant l'enthousiasme des personnels, il dut les réfréner quelque peu, levant une main avant d'ajouter sur un ton léger
-Allons, allons, inutile de trop en faire, je ne suis pas le marié de la cérémonie, voler la vedette serait déplacé, pourquoi ne pas se contenter d'une élégance sobre ?
Il parvint à tourner les mots habillement pour ne pas offenser les spécialistes qui se reprirent rapidement, piquant et cousant à mesure que les indications et préférences de Liory étaient dictée une à une. Le tenue prenait forme à mesure du temps, et la sensation de légèreté typique des grandes tenues d'apparat le gagnait.
Une sensation étrange qu'il pensait avoir oublié depuis le temps, mais qui revint avec la force de l'habitude. Sa prestance naturelle refit également son apparition, et ainsi vêtu il n'était plus à douté que l'argenté était un noble.
Et au vu de sa façon de se tenir, surement ce qui se faisait de mieux en matière de haute société.
Ne manqua plus qu'une paire de gant blanc et un ceinturons rouge en travers de sa veste pour parfaire le tableau, le tout contribuant à mettre en valeur ses yeux azur et ses cheveux argenté. Un panorama qu'il contempla dans un miroir mobile, soupirant intérieurement pour lui même.
Calcilia le verrait il différemment ? Privé de sa tenue d'aventurier et rendu à son apparence d'origine, tout était encore à prévoir.
-Monsieur, c'est bon pour nous
Annonça fièrement le couturier en retirant la dernière aiguille, époussetant une épaule déjà bien trop propre. Le noble se tourna vers lui posant une main amicale sur son épaule avant de prendre son air habituel
-C'est parfait, tout simplement parfait, je ne manquerais pas de noter votre nom pour de futures commandes
Aimable jusqu'au bout, il retrouva la petite église et son violon sa amie n'étant pas encore sortie du véritable cocon qui s'agitait autour d'elle, cherchant à embellir une beauté déjà parfaite
L'argenté se cacha même les yeux quand elle finit par être libérée, souriant en tentant d'imaginer la tenue qu'ils avaient fait pour elle.
Aussi nerveux que s'il était lui même le marié, il finit par la découvrir, restant muet de stupeur devant la demoiselle se mettant à rougir alors que son cœur repartait de plus belle dans sa course folle
Complainte d'un vent d'été
@Liory Alkh'eir Feat @Calcilia Dilys
Calcilia sortit de l’amoncellement de vêtements, en faisant signe aux demoiselles que c’était bien assez. Loin d’être habituée à l’inconfort de l’aristocratie, elle tira un peu sur le corset pour en défaire les liens trop serrés tandis qu’elle poussa un soupir dépité.« Si je vomis mes tripes, faudra pas s’en demander la raison, se plaignit la demoiselle. »
Elle arriva dans l’église, visiblement son partenaire avait eu l’air de souffrir le même tourment qu’elle. La jeune femme repoussa une mèche rebelle qui s’était échappée de sa coiffure, tandis qu’elle se dirigeait vers son partenaire. Il avait tout du noble qu’elle voyait sommeiller en lui, et une légère pointe d’angoisse vint se loger dans le creux de sa poitrine. Il y avait un fossé qu’elle ne saurait jamais traverser maintenant que la dure réalité la rattrapait. La barde arriva à sa hauteur, un sourire joyeux sur les lèvres, ne laissant jamais ses émois apparaître.
« Nous y voilà, lâcha-t-elle avec amusement. »
Les pans de sa robe voletaient en arrière, décidément, Emerald savait choisir les bonnes personnes. Alors que le tissu aux allures d’un ciel étoilé s’accrochait la robe couleur crème. Elle fit une légère moue, la tenue n’était guère confortable, et les chaussures hautes lui donnaient l’impression de marcher sur des aiguilles.
« Je ne sais vraiment pas comment vous vous débrouillez pour tenir plus d’une journée dans vos tenues, rit doucement la jeune femme en s’installant devant son piano. »
Elle n’oubliera pas d’ajouter une petite note à son merveilleux ami, pour la prochaine. Plus confortable.
La cérémonie débuta tandis que le couple fit résonner son talent à travers l’église. Leur mélodie entraîna l’émotion, alors que le mariage se déroula comme dans un rêve.
Ce ne fut qu’à la fin que le couple put enfin se reposer. Un doux sourire étira les lèvres de la jeune femme qui s’était émerveillée devant le bonheur des deux mariés. Elle glissa son bras sous celui de Liory.
« Elle avait l’air si heureuse, dit-elle rêveuse. »
Calcilia entraîna son partenaire à l’extérieur, où tous les invités s’étaient rassemblés pour célébrer l’événement. Ils restèrent en retrait pour discuter davantage.
« Quand j’étais petite, ça m’était arrivé de me demander ce que ça faisait de se marier, les livres parlent beaucoup, mais tout semble si faux en même temps. »
Elle tourna son regard vers les jeunes mariés s’enlacer avec un sourire tendre.
« Et en même temps, si réel. Mais bon, ce n’est pas pour moi tout ça, conclut la jeune femme avec un air déterminé. »
Après tout, elle n’était pas une femme à s’enfermer sous les jougs d’un mariage. Seule la liberté serait sa plus grande amante. La barde releva la tête en voyant un groupe de femmes s’agiter en gloussant. Le bouquet allait être lancé visiblement, il fut envoyé en l’air, trop haut. Trop loin. Atterrissant dans les bras de Calcilia, complètement hébétée. Elle le lâcha aussitôt sous la surprise, alors que des regards envieux se tournèrent vers elle. La jeune femme se baissa pour ramasser le bouquet, un peu gênée.
« C’est à croire que Lucy souhaite se moquer de moi, grinça-t-elle entre ses dents. »
Elle repoussa sa mèche derrière son oreille en baissant les yeux, pour ne pas croiser les iris bleutés de son partenaire. Après sa tirade, c’était un peu gênant de se retrouver avec les fleurs dans les mains. Calcilia se détourna.
« Je pense qu’ils vont commencer le banquet, nous devrions nous remettre au travail, fit la jeune femme, pressée de quitter cette scène pesante. »
Lucy avait un certain sens de l'humour, il fallait lui avouer cela et en voyant le bouquet arriver dans les bras de la demoiselle, l'argenté ne put retenir un rire franc qui le fit poser sa main sur le crane azuré de la belle, sa robe lui donnant autant de prestance que la mariée, bien qu'elle ait été la principale actrice de tout cela.
Liory en avait suffisamment vu pour les connaitre par cœur et si cela semblait être le plus beau jour des jeunes amants, la donne changerait sans doute avec le temps.
Mais tout cela... ce serait une histoire qui se passerait loin des deux musiciens qui s'enfuyaient d'une scène sur laquelle ils attiraient bien trop l'attention, le noble attirant son ami dans la partie arrière de l'église, dans laquelle ils avaient laissés leurs affaires.
-Maintenant que nous somme tout les deux, avec ce merveilleux bouquet...
Oh bien sur, il n'était pas pour une demande ne mariage, mais voir Calcilia ainsi vêtu, un bouquet de mariée dans les mains lui donnaient des envies encore étrangère, et il déposa un langoureux baiser sur ses lèvres, savourant leurs douceurs comme une récompense pour tout les efforts qu'ils avaient fait, ses mains se glissant autour de ses hanches pour l'approcher une fois de plus de lui.
Un bien étrange ballet que dansait le couple, pas tout à fait ensemble, ni tout à fait séparé.
-Le mariage n'est qu'une cérémonie officialisant un accord marchand, une valeur grandement surestimée effectivement.
Les contrats de mariages étaient d'ailleurs souvent un vrai sac de nœud, que les deux partis essayaient le plus souvent de tourner à leur avantage et dans la noblesse, ils étaient de véritable batailles juridiques qui n'avaient rien de plaisant.
-Le décorum aide à préserver le mythe du mariage, mais j'avoue, comme toi, être assez désabusé par tout cela.
Même si, il fallait l'avouer, Liory n'aurait pas dit non à passer la bague au doigt de la demoiselle. Pas pour l'enchainer à un acte papier bien sur. Mais l'idée de voir le joli sourire de son amie était des plus plaisant.
Aussi plaisante que fut l'étreinte, il fallut néanmoins regagner la fête qui ne faisait que commencer. Dans un parc adjacent, de nombreuses tables avaient été dressées, des barriques percées et des plats installés.
L'alcool coulait à flot, une musique bien plus légère, assurée par les villageois eux même s'élevait doucement. Un air populaire, entaché de fausses notes que la volonté de bien faire gommait en partie.
-Il semble que les nobles instruments ne soient pas pour tout de suite
Dit il en souriant avant que l'aubergiste ne leur colle une choppe de bière dans les mains. Le liquide moussait abondamment et l'arôme typique du houblon s'échappait du contenant. Un grand cru à en entendre le patron qui, les yeux rougis par l'émotion les pris dans ses bras énormes avant de déclarer
-Parfait ! C'était parfait ! J'aurai pas pu rêver mieux pour ma fille ! Vous avez sauvés la cérémonie ! J'vous dois plus qu'une nuit et une bière, alors si vous avez bsoin de queque chose, hésitez pas !
Et ce furent là ses dernières paroles, l'homme s'échappant dans la foule qui l'acclamait déjà, risquant aussi quelques coups d'oeil, certains plus intéressés que d'autres au duo de musicien.
Pour bien des gens de ce village oublié, la beauté de Calcilia était une splendeur comme on le voyait une fois dans sa vie. Et pour les demoiselles, le charme de Liory n'était pas à prouvé.
Passant une main sur la joue de son amie, l'argenté se fendit d'un léger sourire avant de la laisser s'envoler vers son monde
-On dirait que la fête nous ouvre ses bras un peu plus tôt que prévu
Complainte d'un vent d'été
@Liory Alkh'eir Feat @Calcilia Dilys
Un sentiment tortueux étreignait le cœur de la barde depuis que le bouquet avait atterri dans ses mains. Calcilia sentait que quelque chose au fond d’elle changeait à mesure qu’elle passait ses jours aux côtés de Liory. Elle voyait son quotidien être bouleversé, et en même temps elle continuait d’ignorer cette voix qui lui disait de fuir avant qu’il ne soit trop tard.Il était de toute façon trop tard, la jeune femme était emprisonnée face aux billes d’azur qui lui faisaient face. Les chaînes s’étaient refermées sur la barde sans qu’elle n’y fasse quoique ce soit. Liory avait tout pour la chambouler, de son physique gracile jusqu’à sa trop grande bienveillance.
Aussi, Calcilia n’avait pu se soustraire aux lèvres de son ami lorsqu’il était venu les réclamer avec passion. Elle se laissa finalement aller dans le creux de ses bras, fermant les yeux. La sensation était agréable d’avoir ses bras autour de ses hanches. Elle quitta ses lèvres à regret avant de le suivre muette, acquiesçant aux dires de son ami, peu concentrée sur la conversation. La réalité de ses pensées semblait l’avoir sonnée, alors qu’elle resserrait ses doigts sur la tenue de son partenaire. Il était temps qu’elle se reprenne avant que Liory ne puisse se rendre compte de son état. Alors elle avait simplement souri, venant se masquer d’une joie factice, et faisant taire une bonne fois pour toute, ses tourments.
Comme un couple d’inséparables, les deux voyageurs regagnèrent la fête qui battait de son plein, rapidement alpagués par l’aubergiste. Une chope de bière dans la main chacun, Calcilia ne put que laisser échapper un léger rire dans sa main.
« Au moins, ils savent s’amuser. »
La jeune femme leva la tête vers son ami lorsqu’il posa sa main contre sa joue. Elle s’était mise à occulter l’extérieur pour ne voir que le sourire rayonnant du noble. Une douce chaleur emplit la poitrine de la barde qui referma sa propre main sur la sienne. Un légère lueur mutine apparut dans la regard de la barde.
« En effet, et il semblerait que nous soyons manquants à l’appel. »
Mais avant qu’elle ne puisse l’attirer à une table afin de profiter égoïstement de sa présence, une horde de jeunes femmes bonnes à marier s’attroupèrent autour du jeune noble. Celui rapidement bien entouré fut inondé de questions en tout genre.
Légèrement contrariée, Calcilia l’abandonna aux demoiselles, sans comprendre ce pincement de cœur qu’elle ressentait. La barde étira un large sourire.
« Je pense que ton succès n’est plus à prouver, tenta de plaisanter la jeune femme. On se retrouve plus tard ? »
Elle s’éloigna de la foule, et s’installa à un comptoir, les joues gonflées. Elle croisa ses longues jambes sur le tabouret, puis enfonça son menton dans le creux de sa main. Calcilia fixa sa choppe toujours en main et la vida d’une traite. Oui, c’était évident, Liory était un noble, aux traits élégants, n’importe qu’elle femme saine d’esprit serait attirée.
La barde la reposa face à elle, pas moins calmée pour autant, essayant de se convaincre que ce n’était rien. En vain. Sa main pianota sur le bois alors qu’elle continuait à se morfondre. Qu’est-ce qu’elle aurait dû faire ? Déclarer devant cette foule de harpies qu’il… Qu’il était quoi ? Simplement son compagnon de voyage. Calcilia enfonça son visage dans ses mains, ses joues devenant écarlates, cherchant à donner une explication de leur affection mutuelle.
Elle sursauta lorsqu’une main se posa sur son épaule. Ses orbes violines se plissèrent face au manque de tact de l’étranger qui vint s’installer sans gêne à ses côté. La jeune femme étira un léger sourire crispé.
« Oui ? Un souci ? Se risqua à dire la jolie barde. »
Malgré le mur de glace qu’avait instauré Calcilia, ce gros lourd continua d’insister.
« Rien rien, je trouvais ça dommage de laisser une ravissante demoiselle seule. »
Elle leva les yeux au ciel, alors qu’il s’essayait à un langage qui ne lui correspondait pas. La barde commença à se redresser pour laisser cet homme vivre dans ses fantasmes, mais il attrapa sa main impunément et lui intima de rester.
« Oh aller, tu peux bien rester un peu avec moi, c’est plus sympa de déguster une bière à deux. »
Calcilia arqua ses sourcils, encore plus sur la défensive. Mais elle finit par se rasseoir, sachant pertinemment qu’il ne la lâcherait pas. La barde ferait donc appel à un autre stratagème pour s’en débarrasser. Elle sourit joyeusement en croisant ses mains sur le comptoir.
« Quelle merveilleuse idée ! S’exclama-t-elle en surprenant le citoyen qui s'était attendu à un nouveau râteau. Pourquoi pas, c’est vrai que c’est toujours plus agréable de boire à deux. »
Et ça lui permettrait aussi de laisser de côté ses idées noires. Elle jaugea l’homme un instant, il ne tiendrait probablement pas bien longtemps. La barde fit alors signe à la personne qui gérait les tonneaux de boissons.
« Veuillez nous servir mon ami et moi ! »
Elle fit semblant de l’écouter déblatérer sa vie avec un sourire poli. Ses pensées allaient tout droit vers le noble qu’elle avait abandonné aux serres de ces harpies. Sa main se crispa légèrement sur la hanse de sa choppe, tandis qu’elle esquivait subtilement les tentatives d’approches que cet homme tentait. À la place, elle continuait de la faire boire innocemment, et en effet, au bout de la septième pinte, il commençait à tanguer.
« Tu veux pas qu’on s’arrête là ? Demanda-t-il nauséeux. »
Calcilia pencha la tête, un air triste se marquant sur son visage.
« Oh, déjà ? Fit-elle d’une voix déçue. Tu es sûr ? Juste une dernière ! »
Contraint de suivre son rythme, il commença à soulever sa pinte, mais un haut le cœur vint le saisir. L’homme se leva précipitamment, une main sur les lèvres avant qu’il ne s’excuse grossièrement en partant.
Calcilia lui fit un signe de la main avec un sourire.
« Ce fut plus difficile que ce que je croyais, constata-t-elle avec un soupir. Bon débarras. »
La jeune barde abandonna sa choppe vide, elle-même prise d’un sentiment de malaise. Elle aussi avait dû avoir la main un peu trop légère sur la boisson. Elle tituba légèrement mais réussi à rester droite sur ses longues gambettes. Son regard violine se plissa alors qu’un peu plus loin elle reconnut la silhouette de Liory toujours entouré par les vautours. Prise d’un courage inconnu, Calcilia se dirigea vers son partenaire en attrapant son bras entre les siens. Lorsqu’il baissa la tête vers elle, elle fronça les sourcils, son regard légèrement embrumé. Puis elle sourit devant l’armée de demoiselles offusquées.
« Navrée, mais je récupère mon ami. »
Elle lança des éclairs de ses pupilles pourpres, resserrant sa prise autour de son bras.La barde l’entraîna loin des regards, où ils pouvaient avoir un peu d’intimité. Pas tout à fait maîtresse d’elle, elle attrapa son col en le secouant doucement.
« En fait c’est nul si t’es pas là ! Ça m’énerve qu’elles te tournent autour ! Bougonna-t-elle.»
Calcilia vint se blottir dans ses bras, la tête posée contre sa poitrine, boudant comme une enfant, et exprimant son mécontentement.
« Toi aussi t’es nul… T’es trop gentil. »
Entouré comme il l'était, le noble ne put qu'à peine voir son amie se faire aborder, déclenchant par la même une moue insatisfaite qu'il ne s'expliqua pas, mais qu'il dissimula tout aussi rapidement, tachant de se concentrer sur la myriade de questions qui fusaient de toutes part. Il lui fut demandé s'il était lui même marié, ou il habitait et bien d'autres détails qu'il esquiva avec élégance, même si la somme folle d'informations demandées le dispensait de répondre, chaque personne se complaisant à couper l'autre sans lui permettre d'en placer une.
On le toucha, bien trop souvent, et il aperçu quelques regards masculins hostiles auxquels il répondit par un haussement d'épaule et un regard désespéré qui lui valu à chaque fois un sourire compatissant et une chope levée pour sa patience.
La jalousie pouvait parfois se transformer en sympathie quand on prouvait que l'on n'y était pour rien.
A vrai dire, son seul objectif était de garder un œil sur la barde qui levait les choppes qu'il aurait décoché de flèches, faisant fuir un prétendant avant que la vue ne lui soit une nouvelle fois ravie.
-Peut être que la mariée aimerait vous avoir à ses côtés...
Tenta t-il en fixant les demoiselles d'honneur, remarquant par la même que la belle en robe blanche était dans la foule, suivit de près par son mari. Visiblement son intérêt était tout autre, et à en juger par l'ourlet élaboré de sa robe, qui n'était rien d'autre que la marque de fabrique de sa compagnie, le noble devina très vite la teneur de ses prochaines paroles.
Néanmoins, comme un ange respirant l'alcool, Calcilia revint à la charge, bousculant les harpies qui l'entouraient pour l'emmener loin de l'agitation, ou il reçu une série de remontrance qui ne purent que lui tirer un sourire.
-Allons belle hirondelle pourquoi tant d'émoi, je suis là non ?
Sa main commença à se poser sur le sommet de sa chevelure, mais ne put parvenir à destination, une barde à moitié ivre s'étant déjà callée contre son torse.
Pour toute réponse, il l'enveloppa doucement, ignorant l'odeur d'alcool qui s'échappait d'elle pour venir la réconforter
-Il aurait été mal avisé de se refuser à notre publique et j'ai cru voir que tu t'étais fait un ami ?
Une question pas tout à fait désintéressée, le noble ayant eu une pointe d'angoisse quand elle était parti. Et alors que la demoiselle c'était mis à marteler sa poitrine avec autant d'intensité que de manque de force, Liory vint s'asseoir contre un mur l'entrainant avec elle alors qu'elle se perdait en reproche adorable
-Si cela peut te rassurer, je me sens bien mieux avec toi plutôt qu'une foule de demoiselle en liesse.
Et je suis plus rassuré de te savoir avec moi qu'avec n'importe qui d'autre
Concéda t'il en sentant ses joues rougir, le forçant à se concentrer un instant sur le ciel bleu au dessus de leur tête alors qu'un vent venu de l'ouest venait soulever les cheveux de la demoiselle, révélant des joues cramoisies par la bière, qu'il trouva étonnamment adorable
-Si je te promet de m'occuper de toi et rien que de toi jusqu'au levé du soleil de demain, arrêtera tu de me faire la tête ? Ou bien devrais-je te concéder d'autres privilèges pour retrouver une Calcilia souriante ?
Même si dans cette était, la jeune femme paraissait encore plus adorable, manquant de faire fondre le cœur déjà bien sollicité de l'argenté
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« Un ami ? »Calcilia plissa son regard prune, avant de venir tirer sa joue sans vergogne.
« Je crois que t’as les yeux en face des trous, ronchonna la demoiselle. C’était juste un imbécile trop lourd. »
Elle reposa sa tête contre son épaule, venant triturer le col de sa veste. À ce niveau, Liory devait être juste aveugle. Ou stupide. La jeune femme avait juste essayé de faire déguerpir un imbécile trop présomptueux, alors que lui avait été entouré de cruches sans essayer de s’en défaire. Pourtant, son étreinte n’aurait pas dû, mais elle se montra tellement réconfortante qu’elle en oublia presque immédiatement d’être en colère.
« Fallait pas me laisser partir, conclut la barde. »
Son visage vint s’enfouir dans son torse alors qu’elle imposait sa petite crise de jalousie. Sans savoir d’où ça lui venait, l’alcool faisait ressortir son honnêteté alors qu’elle-même se mentait de façon éhontée. Elle se redressa doucement, se mettant face à lui, à genoux, puis langoureusement, elle glissa ses bras sur ses épaules, s’approchant du noble, telle une vile tentatrice.
« Je sais pas si ça suffira. »
Comme affligée, la barde laissa sa tête rouler sur son épaule, le regard luisant.
« J’estime que tu me dois… »
Elle s’arrêta un instant, faisant mine de réfléchir, son visage affichant un air sérieux, avant qu’elle ne laisse échapper un doux rire.
« Non, en fait, je sais plus. »
Calcilia pencha la tête en arrière, joignant sa contemplation au ciel. Malgré l’alcool, le doute perdurait, mais elle n’osait pas plus se confier. Allait-elle le faire fuir en se montrant ainsi exigeante ? Elle ne savait plus vraiment, enfin, il y avait une chose dont elle était sûre, c’est qu’à l’heure actuelle, la barde souhaitait garder Liory jalousement pour elle seule. Et cette pensée la figea soudainement, pensée qu’elle repoussa en éventant sa main. Jusqu’à ce que son regard ne vienne croiser celui de son ami, sa poitrine se serra douloureusement sans qu’elle ne sache comment réagir. Ce mélange de pensées étranges lui fit monter les larmes aux yeux. Les perles roulèrent sur ses joues rosies par l’alcool, sa main se perdant sur sa poitrine qui tambourinait son rythme effréné.
« Qu’est-ce que tu m’as fait ? Finit par murmurer la jeune femme. »
Complètement chamboulée, elle était incapable de remettre de l’ordre dans ses pensées. Ses mains tremblaient, mais réalisant soudainement la situation, Calcilia se leva, en lui tournant le dos. L’alcool la rendait bien trop émotive et à ce rythme, le noble se rendrait compte de quelque chose. Il n’était pas encore temps de ruiner leur relation qui peinait tout juste à se construire.
« Je… Commença-t-elle doucement. »
Serrant ses poings, elle se maudit que sa voix se montre si incertaine dans un tel moment.
« Je retourne à l’auberge, termina-t-elle plus assurée. »
Il ne fallait pas qu’elle lui montre cet instant de faiblesse, ses pas l’entraînant presque en courant loin de cette scène qu’elle voulait oublier. Complètement effondrée, elle essuya le coin de ses yeux, pour effacer les larmes qui ne s’arrêtaient pas de rouler sur ses joues.
Pourquoi ? Pourquoi les choses se devaient elles d'être si compliquées ? Liory avait toujours fait les choses simplement, ses amantes s'étant toujours contentées d'une présence temporaire avant de reprendre leurs routes.
Tout cela avait toujours été un accord tacite, un baiser puis une nuit, et la vie reprenait son cours comme si de rien n'était.
Alors pourquoi ? Pourquoi voir Calcilia partir avec cet air, mi désespéré, mi ennuyé lui faisait t-il tant d'effet ? Pourquoi son cœur se pinçait à la voir s'en aller alors que comme à chaque fois, une demoiselle le quittait.
Une vision qu'il avait vu des dizaines de fois et qui pourtant, cette fois, ne le laissait pas de marbre
Sa main se leva, premier signe de ce sentiment qui jusque là, lui avait été inconnu.
Luz le lui avait déjà reprocher. Ne pas savoir aimer était son talon d'Achille.
-Attend...
Dit il de sa voix rendue claire par une émotion qu'il n'avait jamais connu jusque là. Et alors que la distance finissait une fois de plus par se creuser, quelque chose lui donna des ailes, le poussant à se lever et franchir la distance que la barde avait mis entre eux.
Ce fut presque naturellement qu'il la prit dans ses bras, l'enlaçant par derrière avant de plonger la tête dans son cou, son coeur battant à tout rompre sans que le noble ne s'en explique la raison.
-Je ne sais pas ce que j'ai pu te faire, mais, sache que je ne sais pas ce qu'il m'arrive non plus.
C'est comme... si te voir partir me perçait le cœur, comme si le fait de te voir avec quelqu'un d'autre me donnait des sueurs froides...
Tant de symptômes qu'il n'identifiait pas réellement que et qui n'empêchèrent pas la barde continuer à s'éloigner, comme s'il n'avait été qu'un ivrogne de plus à tenter de la courtiser
Et si l'auberge se faisait plus proche, Liory la voyait comme la fin annoncée de tout ce qu'ils avaient vécu jusque là. Une fin que l'argenté ne voulait voir arriver sous aucuns prétexte.
-Je ne veux pas te voir avec quelqu'un d'autre, ni même me tenir loin de toi...
Et alors que la porte s'ouvrait déjà, l'argenté s'immobilisa, saisissant une main devenue molle, avant de tenter une dernière fois de saisir le regard de son amie, la regardant comme il ne l'avait encore jamais fait.
-Et si je devais vivre encore des millions de jours j'aimerais que chacun d'entre eux soit avec toi. Pas une autre.
Plaquant les mains de chaque côté de la porte autour du visage de Calcilia, le noble se sentit presque défaillir, secouant la tête comme pour refuser une évidence pourtant manifeste.
-Quoiqu'il puisse arriver dans le futur, je veux que cela arrive avec toi !
Cria t'il presque en sentant une larme unique rouler sur sa joue
Complainte d'un vent d'été
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Il n’était même plus difficile de distinguer ce sentiment qui s’était logé dans sa poitrine. De plus en plus consciente de cette affection, et de ce que ça impliquait, Calcilia savait qu’elle devait fuir. S’éloigner à jamais de cet amour qu’elle sentait grandir, et qu’elle voulait éteindre à tout prix. Elle avait cette peur viscérale qui demeurait, où chaque seconde elle le vivrait avec la peur qu’un jour elle ne puisse plus se lever et accepter de perdre un être cher. Elle était femme de liberté qui avait voulu perdre toutes ses attaches afin de ne plus ressentir cette douleur.Aussi, elle dut faire tous les efforts du monde pour ne pas s’arrêter, et ne pas laisser les paroles la séduire. Ni de se tourner lorsque ses bras vinrent l’entourer, elle n’aurait pas dû ressentir cette sérénité. Pourtant, ce fut ce moment où elle réalisa que la présence de l’aventurier lui était devenue indispensable. Cet homme touchant avait saisi son cœur en un clin d’œil et elle n’avait rien vu venir. Surtout lorsqu’elle réalisa que l’écho de ses paroles résonnait en elle, comme si elle se reconnaissait dans sa tirade.
La jeune femme pressa le pas, il fallait qu’elle occulte. Que ses paroles sonnent comme du vent, et que ce voyage ne soit qu’un acte passager à travers les aiguilles du temps qui régnaient à travers Aryon.
Calcilia pressa le pas pour essayer de distancer son poursuivant, pour ne pas voir son visage dévasté. Son visage perdu dans le tourbillon des sentiments qui le torturait tout autant. Pourtant, ses paroles l’atteignaient, elles s’incrustaient en elle, qui n’arrivait plus à l’écouter sans que ses améthystes humides ne soient en proie d’un profond désarroi. S’il continuait à insister, Calcilia n’arriverait pas éternellement à le repousser, se maudissant d’être trop faible.
Et tandis qu’elle allait enfin atteindre ce qu’elle considérait son issue, son regard rencontra celui dévasté de son ami. L’incompréhension brillait dans ses iris bleutés, et ce fut trop pour la barde qui s’effondra sur le sol, incapable d’ignorer davantage ces émois qui leur crevaient le cœur. Et alors que Liory allait le rejoindre dans sa chute, elle l’arrêta d’un mouvement de la main.
« Tu ne comprends pas ! S’écria la jeune femme. »
Elle apporta ses mains tremblantes devant son visage, avant de lever la tête vers son partenaire, déchirée.
« Ça ne peut pas être possible… »
Elle secoua la tête, alors que sa voix se faisait de plus en plus inaudible, ses excuses se faisant de plus en plus grotesques. Une main se posa sur sa poitrine, alors qu’elle essayait de faire taire les douloureux battements de cœur.
« Dans un monde comme le nôtre, on ne peut pas Liory… Il est bien trop cruel. »
Elle avait déjà tant perdu. Mais n’était-ce pas déjà trop tard pour ces regrets, alors que l’idée même de voir le noble lui être arraché était insoutenable. La barde détourna la tête alors que son ami venait se mettre à sa hauteur, incapable de soutenir son regard profond, de supporter ses larmes. Si la bière n’avait pas fait taire sa jalousie, elle le regrettait amèrement à présent, n’ayant su faire taire ces sentiments qui la dévoraient. Elle aurait préféré continuer d’oublier leur existence, et de parcourir encore durant des lunes le royaume en compagnie de son précieux ami. Elle n’était qu’une idiote qui avait tout gâché. La jeune femme posa son visage contre ses genoux qu’elle avait remontés contre elle.
« Tu vas m’abandonner toi aussi. C’est tout ce que vous savez faire… Vous jeter à cœur perdu dans un conflit… Et ne jamais revenir… »
Si dans sa courte vie Liory avait connu un panel d'émotion variées, jamais encore le noble n'avait connu un tel désespoir. Comme si toute sa vie ne tenait qu'aux paroles de la jeune femme. Et ces dernières ne cessaient de morceler son cœur déjà bien éprouvé.
A tel point qu'il se trouva pour la première fois de sa vie, à court de sourire et de voix, ne pouvant qu'observer la barde se recroqueviller sur elle même.
Tombant à genoux à côté d'elle il hésita un moment avant de poser une main dans ses cheveux, cherchant un regard qui s'échappait à chaque fois.
Il comprenait chaque arguments, les reconnaissant pour en avoir souffert bien trop de fois.
-Le monde est cruel, mais je refuse de vivre selon ses règles
Sa voix se fit presque morne alors qu'il s'asseyait à côté de la demoiselle, maintenant un léger contact avec elle, s'appuyant contre le mur et attirant la barde près de lui, ne la forçant pas à se redresser pour autant.
L'argenté ne tenait pas à lui faire de promesses impossibles, même si elle se méprenait sur un point : la guilde n'était pas pour lui un moyen de mettre fin à sa vie, bien à l'inverse.
-Risquer sa vie, c'est un risque quotidien, tu cours autant de risques seule sur les routes ma belle hirondelle, la liberté est à ce prix.
Un prix qui pouvait paraitre élevé à bien des gens, mais que le noble considérait comme minime au vu de ce qu'il avait risqué auparavant. Petit à petit, il se rapprochait de la belle, tachant d'apaiser le flot de larme, retenant les siennes avec difficulté
-Après tout ce que j'ai vécu, je ne compte pas jeter ma vie pour quelques cristaux.
Se levant, soudainement, il prit la demoiselle dans les bras, la portant quelque peu contre son gré pour la faire remonter dans la chambre, peu désireux de la laisser se morfondre à même le sol, la déposant avec délicatesse sur le lit avant de se munir d'un petit mouchoir pour essuyer ses larmes, tachant de regagner un peu de contenance. Sans grand succès.
-Calcilia...
Même avec tous les efforts du monde, il ne parvenait pas à trouver la moindre parole qui résoudrait tout. Oui, il voulait lui promettre de ne pas gaspiller sa vie en quête d'une gloire futile. Lui promettre de ne pas la quitter plus que nécessaire.
Mais tout cela n'aurait été que des paroles en l'air, car dans cette nouvelle vie et sous ses airs de noble sur de lui, Liory ne savait pas ce qui l'attendait.
-Si c'est pour être sur de te retrouver, apprendre à faire attention à ma vie ne devrait pas être un soucis
Tenta t-il en caressant ses cheveux, ses yeux rendus tristes par l'état de son amie. Et alors qu'aux alentours la fête battait son plein, l'ambiance dans leur chambre se voulait bien plus lourde.
-Je... je ne sais pas quoi te dire... Tu me reproche des choses que je n'ai nullement l'intention de faire. Je ne veux pas mourir, pas plus que je ne veux t'abandonner. Peut être pour la première fois de ma vie, je n'aspire qu'à rester avec toi.
Même dans cette chambre, dans ce village reculé.
Si c'est avec toi, le sacrifice ne me parait pas si élevé.
Déposant un baiser sur le front de la belle, il se planta devant elle, passant son mouchoir au coin de ses yeux, tentant de lui sourire pour redonner un peu d'espoir à la jeune femme.
-Si le monde est cruel, il ne tiens qu'à nous de construire le notre, selon nos propres règles, et s'il faut mener une révolution pour pouvoir être heureux... Je veux bien le faire... pour toi
Complainte d'un vent d'été
@Liory Alkh'eir Feat @Calcilia Dilys
Elle n’eut pas la force de le repousser tandis qu’elle se retrouvait à nouveau dans ses bras. On fond d’elle, Calcilia espérait croire à ces paroles, s’y accrochant avec espoir. Le temps de leur court trajet, la jeune femme s’était accrochée aux épaules de son partenaire, la tête enfouie dans son cou. Elle ne voulait même plus y penser, et se laisser aller dans son étreinte pour que jamais le lendemain ne s’ouvre sous leur pas vers d’autres horizons où le danger serait présent.« Ma route n’est pas de me faire une gloire passagère. J’ai déjà vu assez d’aventuriers croire en leurs rêves avant de se faire balayer par la réalité. »
La barde se saisit de son col une fois qu’elle fut déposée sur le lit pour le rapprocher. Son regard s’était enflammé d’une fureur inconnue, maintenant qu’elle le regardait durement.
« Et toi ? Quel est ton but ? Qu’est-ce que tu cherches à accomplir en prenant les armes ? Qu’est-ce que tu veux prouver ? Demanda-t-elle avec hargne. »
Bientôt, sa deuxième main rejoignit la première, serrant avec force avant qu’elle ne secoue faiblement la tête pour la déposer contre son torse. La barde avait peur de ses réponses, car ce seraient celles qui briseraient ce lien qu’ils avaient tissé durant leur périple si elles ne se montraient pas aux goûts de la barde. Calcilia le relâcha avant de regarder ses propres mains.
« Liory… Mes routes sont semées d’embûches, mais aucune ne saurait se montrer aussi mortelle que la vie que vous menez. Je suis une voyageuse. Qu’une simple barde qui voyage de ville en ville pour vivre de son art. »
Elle releva la tête, alors que ses orbes violines brillaient d’une douleur du passé qu’elle n’arrivait pas à effacer malgré les nombreuses années. Sa main se posa délicatement sur sa joue.
« Personne ne souhaite sa propre mort… Mais l’orgueil fait faire des choses stupides. J’en ai été témoin que trop de fois. »
Juste imaginer qu’elle ne puisse peut-être jamais retrouver son bel aventurier. Qu’il ne revienne jamais d’une quête trop ambitieuse, que son tendre visage ne puisse plus exprimer ce sourire qu’elle aimait tant. Ces pensées atroces lui serraient douloureusement sa poitrine déjà meurtrie. Parfois, il valait mieux oublier que d’espérer.
« Vous êtes trop fiers pour fuir le danger. Pour accepter d’être raillés sur la place publique parce que vos armes ne sont pas assez affûtées. Et n’essaye pas de me prouver le contraire ! »
Les larmes s’étaient transformées en colère, jouant de la frustration d’une femme qui portait sur ses épaules le poids de ses morts. Si elle avait encore la chance de voir les astres à ce jour, ce n’était pas dû à la témérité stupide. Non, la barde n’avait sur le champ de bataille que son regard.
« Vous ne savez pas fuir ! »
Elle se rappelait encore traîner les cadavres amputés de leurs âmes, s’étant lancés à l’aveugle contre des créatures mortelles.
« Je ne veux pas être la spectatrice de ton spectacle sanglant, je ne pourrais pas l’accepter. »
Calcilia sentit les larmes lui monter à nouveau alors qu’elle le repoussa sur le lit, le surplombant de toute sa hauteur. La paume de sa main épousa la joue de son beau partenaire, ne pouvant plus détacher son regard du sien.
« Tu es trop gentil Liory, souffla-t-elle avec un sourire. Je suis certaine que tu ferais barrage de ton corps pour sauver des vies. Tu ne serais même plus là pour les entendre acclamer ta bravoure. »
Là était toute l’inquiétude d’une femme, d’une famille, d’un proche. De ne jamais pouvoir revoir la personne qu’ils attendent pendant des lunes avant de faire exploser les sanglots de plusieurs vies brisées.
Devant l'inquiétude sincère de son amie, Liory ne put que poser une main dans ses cheveux, les lui frottant affectueusement avant de reprendre un peu plus doucement, ses émotions se faisant légèrement plus nettes.
-Allons belle hirondelle, ne présage pas trop de mon courage, je suis bien loin des héros de saphir dont les histoires extraordinaires emplissent les tavernes.
Je n'ai ni leurs bravoure, ni leur talent. Je suis un modeste aventurier qui ne connait que trop bien sa place.
Là ou nombre d'entre eux fonçaient tête baissées vers les pires des dangers, l'argenté avait choisit de devenir chasseur, restant le plus loin du danger possible, sachant pertinemment que jamais il ne serait un de ces colosses musculeux, ou ces vipères assez agiles pour éviter n'importe quel coup.
-Je ne serais qu'un piètre bouclier et mis à part gêner quelqu'un de plus compétent je ne ferais pas grand chose
Le noble se voulait rassurant, même si la parole ne lui fut guère donnée alors qu'il était poussé sur le lit, la barde le surplombant avec quelques larmes au coin des yeux, sa main caressant sa joue avec pourtant bien trop de douceur.
L'attirant à lui, il la fit se lover dans les bras, accordant sa respiration avec la sienne dans l'espoir de lui trouver un peu d'apaisement.
-Les chants ne m'intéressent guère, et la vie est devenue bien trop belle depuis que je t'ai rencontré pour que je souhaite la voir s'interrompre si tôt.
Son regard plongea dans le sien alors qu'un léger baiser venait effleurer ses lèvres, le noble n'ayant guère de mots plus fort à lui proposer.
L'avenir était si incertain qu'il ne tenait pas à en dessiner les lignes préférant se laisser porter par ce dernier.
-Et si à l'avenir, je dois entendre la moindre chanson sur mes actes, je préférerais mille fois l'entendre de ta bouche plutôt que de l'endroit ou Lucy pourrait m'envoyer.
Si revenir de l'aventure suppose revoir ton beau sourire à chaque fois, je ne manquerai jamais le rendez vous, même si cela doit me couter ma fierté
Et alors qu'ils commençaient doucement à s'assoupir, Liory lui glissa quelques derniers mots dans l'oreille, chuchotant presque pour ne pas perturber le sommeil naissant.
-Je doute de toute façon pouvoir me passer de toi désormais
Un constat qui lui avait toujours fait peur, mais qui aujourd'hui semblait plus doux que le plus sucré des nectars, comme si une vie passée à craindre ses propres sentiments avait été balayée par un sourire désarmant de Calcilia.
Et si la boisson avait du libérer la parole de la jeune femme, Liory ne le regrettait aucunement, la serrant légèrement plus fort alors que le couple s'assoupissait finalement, rêvant déjà au lendemain
Complainte d'un vent d'été
@Liory Alkh'eir Feat @Calcilia Dilys
Calcilia était partagée entre divers sentiments. Mais une chose était certaine, elle voulait y croire. Croire en ces mots. La peur du regret s’estompant à mesure que ses paroles se faisaient rassurantes. Un léger sourire vint raviver les lèvres de la barde lorsqu’il évoqua son besoin d’être à ses côtés, car elle-même savait qu’elle ne pourrait pas le quitter sans en éprouver une certaine amertume. La jeune femme sentait son angoisse se dissiper peu à peu alors que Liory soupirait de tendres mots.Son visage se nicha contre son torse alors qu’il l’avait fait rejoindre à ses côtés. Calcilia ferma lentement les yeux laissant la respiration de son partenaire la calmer peu à peu.
« C’est étrange que tu dises ça, tu me fais plus penser à une tête brûlée qui se lancerait dans n’importe quel combat perdu d’avance si c’était pour sauver la vie de quelqu’un d’autre. »
Elle se garda bien de dire que c’était le type d’action dont elle était capable. Un long soupir fendit ses lèvres, avant que la barde ne reprenne d’une voix presque étouffée.
« Je suppose que je n’ai pas encore bien cerné le personnage, n’est-ce pas ? »
La jeune femme glissa une main entre ses mèches d’argent, dévoilant davantage son regard. Elle hésita une seconde avant d’accepter le baiser qu’il initia. Il fut bref, mais sembla sceller une promesse qui parut suffisante aux yeux de Calcilia. Du moins, pour le moment, tant qu’elle ne creusait pas davantage dans sa poitrine.
« Mes chants ne sont pas qu’aux morts. Chacun a son aventure, même pittoresque. Tout le monde a le droit à sa gloire, tant que quelque chose est accompli, fit-elle dans un léger soupir. »
Parfois, il valait mieux se contenter d'un glooby que d’un Fenrir.
Calcilia ne put s’empêcher de se fendre d’un sourire attendri alors que son ami tombait peu à peu dans le royaume des songes. Loin d’être fatiguée, elle se contenta de l'observer pendant que son souffle régulier s’était mis à emplir la pièce. Pendant un instant, elle songea à se libérer de son étreinte pour s’échapper, mais son cœur se serra en le voyant aussi paisible à ses côtés.
Ses lèvres se posèrent sur le front de Liory alors que ses bras vinrent l’enlacer. Si l’avenir venait à se montrer aussi cruel que ce à quoi, la barde le prévoyait, elle l’attendait de pieds fermes.
« Fais de beaux rêves… Murmura-t-elle doucement. »
~
Ce furent les rayons chauds du soleil qui éveillèrent la barde. Étant la première à se lever, elle s’extirpa des draps en soupirant, la route les attendait pour de nouvelles aventures.