« Libérez Tetsuko, llibérez Tesuko, la dictature c’est fini »
Une foule compacte s’était regroupée devant les portes de la caserne. Des habitants de tous les âges et de toutes les tailles manifestaient en brandissant des pancartes au nez et à la barbe des gardes qui tentaient de calmer le jeu tout en les empêchant d’entrer à l’intérieur.
« Messieurs, dames, veuillez circuler, un travail de justice pour déterminer …
- Elle est innocente ! Sans elle personne n’aurait su que les services publics étaient aussi dysfonctionnels, cria une manifestante.
- C’est une héroïne, ajouta une autre. »
La foule reprit son slogan « Libérez Tetsuko » et la tension monta d’un cran. Pris de paniques, les gardes mirent la main à leur épée et tout aurait pu dégénérer si un homme n’avait pas fendu la foule pour se présenter devant la porte. Il portait un manteau des plus chics et un fedora assortit. Il avait dans la cinquantaine. Ses cheveux grisonnants dépassaient sous son chapeau et une petite moustache poivre et sel décorait son visage. Il en lissa les pointes avant de se tourner vers la foule en colère.
« Mes chers concitoyens, j’ai entendu votre colère et moi, Hercule Poitrot, avocat au barreau de la capitale, je vais m’assurer que justice soit faite ! »
Il fut accueilli par une volée de hourra et de soutiens de la part des protestataires. Avec l’appui de dizaine de regards, il tourna le sien vers le garde qui barrait la route :
« Avec l’accord de monsieur l’agent, je souhaiterai voir ma cliente sur le champ, dit-il sur un ton neutre.
- Non, elle est en cellule … commença le garde. »
Des huées accueillirent sa réponse et l’avocat jeta un regard de remerciement aux habitants.
« Ainsi donc vous privez ma cliente de son droit à une défense juste devant témoin ? Dois-je en référé au ministère des armes, dit-il Hercule avec un sourire mauvais. »
Le garde blêmit quand il comprit qu’une foule d’imbécile n’était rien devant un avocat un peu trop malin. Il soupira avant de le laisser entrer. Ce dernier décrocha son chapeau et le posa sur sa poitrine en s’inclinant pour le remercier avant de pénétrer dans le bâtiment.
On le fit entrer dans une salle d’interrogatoire pour qu’il puisse discuter avec sa cliente. Il n’eut pas à patienter longtemps, la foule bloquait toujours l’accès en attendant de savoir s’il allait réussir à faire sortir l’innocente détective de prison. La porte s’ouvrit et Hercule pu voir la jeune Tetsuko entrer dans la pièce, menottée. Elle avait l’air d’en avoir bavé. Pas physiquement, il n’y avait aucune trace de maltraitance, on était à la garde ici pas chez des mercenaires. Pourtant quelque chose dans ses yeux indiquait à l’avocat que quelque chose la travaillait de l’intérieur. On l’obligea à s’asseoir devant l’homme poivre et sel et les gardes quittèrent la pièce. Hercule se racla la gorge :
« Mademoiselle Alween, je me présente, Hercule Poitrot, avocat du barreau de la capitale. J’ai été engagé par une personne qui vous veut du bien, mais qui préfère restée anonyme. Sachez que mes honoraires ont déjà été réglé et que je me dédis donc totalement à votre défense, vous n’aurez rien à payer. J’ai étudié votre situation et je pense que nous allons pouvoir vous faire sortir d’ici en attendant votre procès dans une semaine. Votre détention est injustifiée, toutefois, je crains fort que nous ne tenions pas longtemps face au tribunal. Pourriez-vous me dire ce qu’il s’est passé exactement ? Ne mentez pas, je suis ici pour vous aider et je dois avoir toutes les cartes en main pour préparer votre défense. »
Il sortit une plume et un encrier et se prépara à prendre ce qu’elle dirait en note.
Minutes, heures, secondes, Tetsuko ne savait plus les reconnaître, était-elle ici depuis une heure, une semaine, plus, elle n'en savait rien. On lui avait enlevé toute affaire personnelle et donnée un pantalon et un long maillot beige. Elle n'avait pas eu le droit de conserver ses bâtons de cheveux et ceux-ci étaient emmêlés et détachés. La jeune prisonnière était dans un coin de la pièce, assise sur un tas de paille en attendant un signe de vie qui pourrait la sortir de son éternelle discussion avec sa voix intérieure.
Elle avait passé en tête tous les scénarios possible de pourquoi Vivianne l'avait trahi, mais aucun ne lui semblait être la réponse. Elle pensait aussi à sa meilleure amie, sa plante, personne ne pouvait s'en occuper en son absence, elle avait si peur de la perdre. Lumia devait elle aussi se sentir seule et abandonnée et, surtout, elle devait s'inquiéter pour Tetsuko. Son ventre criait famine et le bruit raisonnait contre les murs de la pièce vide.
Elle finit par entendre des bruits de pas qui la sortirent de ses pensées tumultueuses. Un garde ouvrit la porte et lui demanda de sortir, il lui expliqua que son avocat était là. La jeune femme ne dit pas un mot, mais on pouvait apercevoir ses deux yeux devenir rond de surprise dans l'obscurité. Elle se leva et suivit le garde silencieusement dans une pièce, certainement celle d'interrogatoire, un homme se tenait là, surement l'avocat dont avait parlé le garde. Il poussa Tetsuko pour qu'elle s'assoit en face de l'homme. Elle regarda le monsieur de ses yeux fatigués, entourés de cernes et l'écouta sans un mot.
- "Mademoiselle Alween, je me présente, Hercule Poitrot, avocat du barreau de la capitale. J’ai été engagé par une personne qui vous veut du bien, mais qui préfère restée anonyme. Sachez que mes honoraires ont déjà été réglé et que je me dédis donc totalement à votre défense, vous n’aurez rien à payer. J’ai étudié votre situation et je pense que nous allons pouvoir vous faire sortir d’ici en attendant votre procès dans une semaine. Votre détention est injustifiée, toutefois, je crains fort que nous ne tenions pas longtemps face au tribunal. Pourriez-vous me dire ce qu’il s’est passé exactement ? Ne mentez pas, je suis ici pour vous aider et je dois avoir toutes les cartes en main pour préparer votre défense. "
Plusieurs phrases résonnaient en elle : "quelqu'un qui lui veut du bien", "préfère rester anonyme", "honoraires ont déjà été réglé", "procès dans une semaine", "détention est injustifiée", "nous ne tenions pas longtemps face au tribunal". Elle prit un certains temps avant de lui répondre, il y avait en effet de nombreuses informations intéressante que la détective voulait dénouer avant de s'exprimer.
Quelqu'un qui me veut du bien en restant anonyme, tout en ayant assez d'argent pour me payer un avocat... Je ne vois qu'une seule personne qui me connaît dans la capitale pouvant m'aider. Serait-ce Haru ? Aurait-elle appris que je suis en prison et connaissant mon innocence elle a décidé de me donner un coup de pouce. Ou peut-être voudrait-elle éviter que mon cas fasse trop de vague afin que nous restions dans la discrétion. Mon procès est donc dans une semaine, est-ce que c'est assez pour que cet homme face un dossier pour me défendre ? Je ne connais pas son métier... j'imagine que je n'ai personne d'autre à qui me remettre. Il a l'air d'être de mon côté, je vais lui expliquer.
Sans un sourire et la voix tremblante la jeune femme expliqua à l'homme ce qui s'était passé; la tâche ingrate qu'on lui avait fournie et qui n'était pas justifiée, le fait qu'elle voulait premièrement faire cette tâche, mais que sa collègue qui était dans le même cas qu'elle, lui avait proposé une vengeance plutôt que de faire ce travail. Elle lui expliqua qu'elle était premièrement réticente à cette idée mais que la femme avait trouvé les mots pour la motiver, elle a donc feint une quinte de toux pour récupérer le matériel chez l'enchanteresse. C'est là où elles ont pris les cristaux afin de créer une inondation pour que la situation devienne ingérable pour deux personnes.
Elle continua en expliquant qu'elle n'était vraiment pas certaine de vouloir faire ça, que les habitants n'avaient pas à se prendre les contrecoups de leur plan mais que la dame continuait de la convaincre; personne n'était innocent et c'était pour éviter que d'autres personnes se retrouvent à devoir refaire ces tâches ingrates; que le système supérieur ne savait pas gérer ce point et que d'autres en pâtissaient. Elle finit par raconter comment elle avait posé tous les cristaux et que l'enchanteresse l'avait trahis en la dénonçant au garde.
- "Je ne comprends pas son geste. Elle m'a trahi alors qu'elle m'a poussé à faire cet acte. Que pouvez-vous faire pour moi ? Je ne suis pas innocente n'est-ce pas, j'ai participé au plan."
Tetsuko était vidée après avoir expliqué tous les récits, le sommeil lui manquant, ses yeux étaient petits, sa voix peu audible et tremblante et son esprit éreinté d'avoir autant travaillé. Même si le fait d'avoir un avocat était comme un souffle nouveau, un espoir vers une porte de sortir, on remarquait bien que la jeune femme ne tenait qu'à un fil.
« Je ne suis pas là pour vous juger, mais pour vous sortir d’ici. Cependant, nous allons avoir un problème … »
Il sortit une feuille de son dossier et la posa sur la table.
« Voici le rapport de la garde sur l’incident et il semble y avoir un gros problème. Il n’est fait mention nulle part de cette autre femme qui vous aurait trahi. »
L’avocat jeta un regard inquisiteur à la jeune fille pour déterminer si elle lui avait menti, mais ses cernes et son regard lourd lui indiquèrent qu’elle avait dit la vérité. Elle n’était pas bête au point de risquer de finir en prison pour un mensonge pareil.
« Il faudrait que nous déterminions quelles sont les raisons de ce blanc dans les informations de la garde. Je ne crois pas que nous arriverons à la faire accuser, même si elle a participé à ce sabotage. Toutefois, le fait qu’il ne soit fait mention nulle part de cette femme prouve qu’il y a eu un vice de procédure et nous pourrions utiliser cela lors du procès. »
L’avocat rangea ses notes dans le dossier et le remit dans sa valise. Puis il se leva et adressa un dernier regard à Tetsuko.
« Nous allons devoir lui rendre une petite visite j’en ai bien peur Madame Alween, mais avant cela je vais vous faire sortir d’ici. Ils n’ont pas le droit de vous garder pour un simple acte de vandalisme et de toute façon je vais leur mettre un petit coup de pression. »
Il s’inclina pour la saluer et passa la porte. Il lui fallut une bonne vingtaine de minute pour revenir. Des éclats de voix se faisaient entendre dans la caserne. On pouvait reconnaître celle de l’avocat qui avait haussé le ton avec un gradé de la garde. Hercules les menaçaient de contacter le ministère des armes pour faire vérifier le bien fondé de cette arrestation et de cette détention aux vues des différents éléments du dossier. Sa cliente n’était pas dangereuse et rien ne justifiait qu’on la garde enfermée de la sorte. Il menaça même de porter plainte pour sévices psychologiques graves.
La porte s’ouvrit et Hercules réapparut, accompagné de deux gardes qui vinrent détacher Tetsuko.
« Vous êtes libres Madame Alween ! »
Il raccompagna sa cliente pour qu’elle récupère ses effets personnels et ils sortirent tous les deux à l’extérieur. La foule de manifestants les accueillis avec de grands hourras et des applaudissements. Hercules leva délicatement la main et l’agita dans leur direction pour les remercier.
« Il semblerait que de nombreuses personnes soient venues protestées contre votre arrestation. »
Il s’avança face à la foule :
« Merci mes amis, votre soutient a été d’une grande aide, mais ce n’est pas encore fini ! Pour l’instant, ma cliente a besoin de repos, vous pouvez rentrer chez vous, je m’occupe du reste, scanda-t-il fièrement. »
Il posa son bras sur l’épaule de la détective et l’entraina avec lui dans la rue tout en la cachant du reste de la foule. La pauvre n’aurait pas la force de faire face à une armée de gens en colère, même s’ils étaient venus la soutenir.
« Bien maintenant que nous nous sommes éloignés, pourriez-vous m’indiquer le lieu où réside cette enchanteresse ? J’ai cru comprendre que vous aviez visité sa boutique. Nous n’avons pas une minute à perdre si nous voulons avoir un dossier de défense solide avant la semaine prochaine. Je vous suis. »
C'est avec de grands yeux ronds que Tetsuko bégaya en écoutant l'avocat expliquer qu'il n'y avait aucune mention de Vivianne dans le rapport. Son sang commençait à bouillir et elle passa de l'état de fatigue à énerver en l'espace de quelques secondes. Donc en plus de m'avoir mis dans cette situation, elle a réussi à disparaître des dossiers. Par Lucy qui est cette sorcière ! pensa Tetsuko en se mordant la joue.
- " Il faudrait que nous déterminions quelles sont les raisons de ce blanc dans les informations de la garde. Je ne crois pas que nous arriverons à la faire accuser, même si elle a participé à ce sabotage. Toutefois, le fait qu’il ne soit fait mention nulle part de cette femme prouve qu’il y a eu un vice de procédure et nous pourrions utiliser cela lors du procès."
- "Elle a l'air sacrément maligne..."
Tetsuko comprenait quelle n'était pas tombée sur n'importe qui et elle était déçue par le comportement de la femme. Elle ne comprenait toujours pas ses actes, pour elle tout cela n'avait été fait que par méchanceté gratuite, pour s'amuser, ou alors elle avait peur de se faire prendre et à assurer ses arrières.
- "Nous allons devoir lui rendre une petite visite j’en ai bien peur Madame Alween, mais avant cela je vais vous faire sortir d’ici. Ils n’ont pas le droit de vous garder pour un simple acte de vandalisme et de toute façon je vais leur mettre un petit coup de pression."
- "Je ne sais pas si je suis prête à revoir cette personne... j'ai peur qu'elle finisse par me faire bien pire. Mais je comprends, j'imagine que je n'ai pas le choix de vous suivre."
La jeune détective était trop fatiguée pour remettre en question les paroles de l'homme et était prête à le suivre comme un petit glooby. Elle ne savait plus vraiment à qui faire confiance après tout ses évènements, ses sens étaient perturbés. Elle attendit de longues minutes en pensant toujours à Vivianne et ses actes qu'elle ne démélait pas. Il y avait forcément une raison d'agir ainsi et il est vrai que le seul moyen pour en savoir plus était de la retrouver. Elle n'aurait surement pas quitté sa boutique, ce ne serait donc pas difficile de la retrouver.
Elle entendit des éclats de voix et des discussions houleuses, l'avocat semblait se défendre corps et âme pour faire sortir Tetsu, ce qui lui fit lâcher un timide sourire qui disparut bien vite. Elle était tout de même soulagée d'avoir une personne pour la défendre et la sortir de ce trou à rat.
L'avocat entra avec deux gardes et Tetsu fut libérée de son tour en prison. Elle sortit avec l'avocat, soulagée d'avoir passé cette étape plus facilement qu'elle ne l'avait imaginé. Elle fut alors surprise d'entendre son nom, des applaudissements et des hourras à sa sortie.
- "Par Lucy d'où viennent tous ces gens ? Ne me dites pas que cette affaire a fait du bruit..."
La jeune femme se mordait les joues et serrait fort ses mains, elle baissa la tête en suivant l'avocat qui la tenait par l'épaule. Pour plusieurs raisons cette situation lui provoquait une angoisse incontrôlable, elle détestait la foule et surtout elle avait maintenant conscience que sa présence discrète dans la capitale venait de voler en éclat. Elle avait peur de ce qu'a pu entendre la première ministre à son propos et espérait que cela n'aurait pas d'impact sur son travail avec elle. Elle avait conscience qu'elle devrait certainement s'expliquer avec elle lorsque cette affaire sera mis au clair.
- "Bien maintenant que nous nous sommes éloignés, pourriez-vous m’indiquer le lieu où réside cette enchanteresse ? J’ai cru comprendre que vous aviez visité sa boutique. Nous n’avons pas une minute à perdre si nous voulons avoir un dossier de défense solide avant la semaine prochaine. Je vous suis."
- "Merci.. Oui. Je ne connais pas très bien la capitale mais il me semble me souvenir où elle réside."
L'angoisse lui avait provoquée de fortes douleurs dans l'abdomen, Tetsuko avait du mal à marcher et à respirer. Elle avançait tout de même vers le lieu d'après ses quelques souvenirs. Heureusement ce n'était pas très loin et ils arrivèrent devant la fameuse boutique de l'enchanteresse. Celle-ci semblait fermée et on ne voyait pas un chat à travers les fenêtres. Tetsuko regarda l'avocat sans réellement savoir quoi faire pour la suite. Elle se laissait guider par l'homme qui avait l'air sûr de lui.
« Ce n’est rien, simplement mes articulations qui me font mal, je ne suis plus tout jeune vous savez, se justifiait-il pour ses pauses inopinées. »
Ils arrivèrent enfin devant la boutique de Vivianne qui semblait effectivement fermée pour la journée. Il n’y avait pas l’air d’y avoir de mouvements à l’intérieur. Hercule se frotta la moustache comme à son habitude.
« Eh bien, nous y sommes, mais j’ai bien l’impression que l’endroit est désert. J’espère pour nous que votre tortionnaire n’a pas quitté la ville pour nous échapper. La retrouver serait alors presque impossible, tout du moins avant le procès … »
L’avocat s’approcha des fenêtres pour inspecter l’intérieur. On ne voyait que des rayons sur lesquels étaient entreposés des objets magiques et des potions en tout genre.
« On dirait que cette Vivianne possède une sacrée boutique, je n’aime pas trop savoir que nous avons à faire à un adepte de la magie. Qui sait quels sales tours elle pourrait user contre nous … »
Il s’approcha de la porte et fit tourner la poignée qui ne résista pas. La porte d’entrée s’ouvrit dans un grincement macabre, laissant s’échapper l’air chargé de souffre et de cannelle qui stagnait à l’intérieur. Hercules passa la tête par l’entrebâillement pour inspecter la boutique. Il retourna ensuite voir Tetsuko.
« On dirait bien que c’est ouvert, mais je ne vois nuls traces de cette enchanteresse. Si vous le voulez bien je vais entrer et essayer de la trouver. Restez-ici pour l’instant c’est plus sûr. Si elle vous déteste autant que vous le pensez, je préfère d’abord m’entretenir avec elle pour m’assurer qu’elle ne nous filera pas entre les doigts. Ce serait une catastrophe qu’elle dépose plainte à votre encontre avant le procès ! s’exclame-t-il. Attendez-moi donc ici, je vous appellerai si j’ai besoin de vous, mais ne vous éloignez pas ! »
Il lui décocha son regard le plus sévère pour qu’elle comprenne que, dans son intérêt, elle ne devait pas commencer à faire n’importe quoi. C’était simplement son rôle d’avocats que de lui dire qu’agresser une commerçante ne donnait pas vraiment de bons points auprès d’un jury. Quand il fut certains qu’elle ne ferait rien de stupide et qu’elle suivrait ses conseils, il se glissa à l’intérieur de la boutique en laissant la porte légèrement entrouverte. Il traversa la salle principale et se dirigea vers l’escalier qui montait à l’atelier de l’alchimiste.
Hercule resta à l’étage un long moment, un très long moment. D’abord dix minutes, puis 20, puis 30. Il ne redescendait pas. Au bout de 40 minutes, un grand fracas retentit et des éclats de voix se firent entendre provenant du fameux atelier. Puis ce fut le silence, long et glaçant et Hercules ne revenait toujours pas.
L'avocat ne semblait pas en grande forme, il s'était arrêté plusieurs fois sur la route pour se reposer. Il expliqua qu'il souffrait de douleurs aux articulations; Tetsuko lui envoyait des sourires compatissants et les quelques pauses lui permettaient de reprendre ses forces.
- "Eh bien, nous y sommes, mais j’ai bien l’impression que l’endroit est désert. J’espère pour nous que votre tortionnaire n’a pas quitté la ville pour nous échapper. La retrouver serait alors presque impossible, tout du moins avant le procès …"
- "Je ne pense que cette personne serait prête à lâcher toute sa boutique pour cette histoire..." Répondit-elle.
- "On dirait que cette Vivianne possède une sacrée boutique, je n’aime pas trop savoir que nous avons à faire à un adepte de la magie. Qui sait quels sales tours elle pourrait user contre nous … "
- "Ah, je ne dirais pas le contraire... elle est bien bien maligne." Répondit Tetsuko d'une grimace. Elle n'avait aucun doute sur la créativité de l'enchanteresse pour rouler les personnes.
L'avocat commença à rentrer dans la pièce tout en laissant plusieurs directives à Tetsuko. Il lui conseilla de rester dehors, ce qui ne déplut pas à la jeune femme; elle n'était pas spécialement enchantée à l'idée de rentrer dans la boutique. Plus elle se tenait loin de Vivianne, mieux s'était pour elle. L'avocat avait l'air de savoir ce qu'il faisait et Tetsuko lui donna sa confiance pour retrouver Vivianne et discuter avec elle, pour le voir ressortir après avoir résolu cette affaire par magie. Après tout, il venait de la faire sortir rapidement de la caserne, il serait bien capable de négocier avec la sorcière.
Le regard de l'avocat appuyait le fait de ne pas rentrer dans la boutique et la jeune femme hocha la tête en signe d'approbation. Elle se posa alors sur le rebord d'une fenêtre et attendit avec patiente que l'avocat revienne. Elle s'occupa l'esprit comme elle pouvait pour que le temps passe un peu plus vite; elle observait la rue, les passants et écoutait leur discussion tout en pensant au moelleux de son lit. Elle fut sortie de sa rêverie lorsqu'elle entendit des éclats de voix provenir de la boutique, surement à l'étage où se trouvait l'avocat.
Premièrement, elle décida de ne rien faire et de suivre les conseils de l'avocat, son regard était assez clair sur ce point. Elle avait le cœur battant, l'adrénaline commençait à monter et le silence bien trop pesant rendait pénible l'attente. Il n'y avait toujours aucun signe de l'homme et la jeune femme commençait à s'inquiéter.
Vivianne aurait pu blesser l'avocat, si était-elle présente; mais aussi pourquoi est-ce que cela prenait autant de temps; toutes ses questions occupaient l'esprit de Tetsu; Elle se décida alors à entrouvrir la porte et à casser le silence en demandant si tout allait bien.
Tendant l'oreille, elle entendit des gémissements provenir de l'atelier, quelque chose n'allait pas et son corps décida de bouger par lui-même vers l'atelier. Elle ne pouvait pas laisser l'homme en danger si c'était le cas, il avait peut-être besoin de son aide. Elle toqua alors à la porte de l'atelier et demanda de nouveau si tout allait bien, elle s'excusa aussi de ne pas avoir tenu dehors et d'être rentré dans la boutique.
La seule chose qui troublait la tranquillité de l’endroit, c’était une petite voix misérable qui provenait de l’atelier. Un gémissement grave et profond, probablement un homme. Il gémissait par à coup, se plaignant et se taisant par phase sans réelle logique. La détective s’approcha de la porte et tiqua tout doucement. La porte s’ouvrit toutes seule, car elle n’était pas fermée dévoilant l’atelier que la jeune femme avait déjà pu visiter dans sa précédente visite. Les bocaux, l’établi, les poudres, les cristaux, les livres … tout était là bien à sa place, mais il y avait un élément en plus. Attaché à un pilier, gisait l’avocat qui était venu délivrer la détective de sa prison. Il était vêtu de haillons et solidement attaché par une corde qui lui liait les mains et les jambes. Sa tête pendait sur son torse, comme si toute la fatigue du monde lui était tombée sur les épaules.
Avant que Tetsuko ait pu réagir, elle sentit une sensation de froid contre sa gorge. La lame d’une dague venait de se déposer délicatement sur sa jugulaire. Un bras l’entoura par-derrière et la plaqua contre un torse d’homme. L’inconnu se pencha à son oreille.
« Alors ma cher enfin, vous semblez pleine de courage aujourd’hui. Ne vous avais-je pas dit que vous pouviez me faire confiance ? »
La voix était celle d’Hercules, mais elle avait des accents aigus par moment. L’homme se pencha pour entrer dans le champ de vision périphérique de sa proie et la détective put découvrir avec horreur son visage. Il s’agissait d’Hercule à n’en pas douter, mais sa peau avait comme fondu. Ses lèvres formaient un sourire macabre et son épiderme se contorsionnait dans tous les sens comme si des vers grouillaient sous la surface. Ses cheveux gris s’étaient allongés et des mèches bleues apparaissaient, d’abord parsemées, puis de plus en plus nombreuses. La structure osseuse de sa mâchoire changeait à vue d’œil passant d’un contour très masculin, à une courbure plus féminine. Finalement, tout son visage se transforma et le visage de Vivianne apparut rayonnant et carnassier. Un parfume de cannelle emplie la pièce.
Bordel, qu’est-ce que les transformations d’apparences étaient douloureuses. Je pouvais encaisser la douleur, mais celle-ci je ne m’y ferai jamais. C’était comme si on passait votre peau sous la lame d’un scalpel incandescent. Atroce … Il me fallut un instant pour raffermir ma prise sur la détective. J’espère pour elle qu’elle ne comptait pas s’échapper, j’avais maîtrisé bien des arts pendant ma longue vie et celui du couteau était l’un des premiers. Il serait dommage de tacher mon plancher avec son sang, d’autant que je voulais son aide à la base, d’où cette mise en scène.
« Eh bien ma chère, ne me jettes pas ce regard perdu, tu me cherchais me voici, bien que je fusse à tes côtés depuis le début ».
Je jetai un regard à mon prisonnier.
« Oui, oui, c’est bien le véritable Hercules Poitrot avocat du barreau et tout le tralala habituel. À la seule différence que lui veut te voir sous les verrous. »
Je laissai un silence mystérieux se poser après ma déclaration.
« Maintenant je vais doucement retirer ce couteau et nous allons sagement discuter toi et moi, car vois-tu ma petite Tetsuko tu es bien plus dans la merde que tu ne le crois. Cette petite histoire de nettoyage d’excrément, c’est beaucoup plus gros que tu ne le crois. »
Je serrai la lame sur sa gorge.
« Alors pas de bêtise. »
D’un violent coup de pied, je l’envoyai valdinguer un peu plus loin, me laissant un peu de temps pour fermer à clé la porte d’entrée de l’atelier, seul accès de la pièce. Puis, je me retournai vers mon invité.
« Alors comment c’était la prison ? Pas trop froid ? As-tu ressenti le toucher glacé de l’injustice, le goût salé de la rancœur, le désir brûlant de la vengeance ? Dis-moi je suis curieuse ? Toutes ces émotions sont importantes si tu veux survivre à ce qui va te tomber dessus maintenant qu’ils te tiennent. »
J’écartais les bras comme une oratrice faisant un discours grandiloquent. Elle était certainement furax ou terrorisée, alors je gardais bien ma dague entre nous pour la dissuader de faire quelque chose de stupide. En cas de pépin, j’avais toujours un peu de poudre tranquillisante à portée de main si jamais il me fallait l’attacher pour qu’elle m’écoute. Elle ne savait pas encore dans quel pétrin elle s’était fourrée, après quelques explications, je suis sûre qu’elle serait plus coopérative.
Tetsuko n'avait jamais été agressée de la sorte et surtout elle n'avait jamais ressenti la peur de mourir à ce point. Elle avait déjà frôlé la mort en tombant sur des horribles bêtes en se baladant un peu trop loin dans la forêt mais elle avait toujours réussi à s'en sortir sans trop de dégâts avec l'aide de son pouvoir et des chasseurs et gardes environnant.
Elle avait la peur paralysante et ne bougeait pas d'un pouce, seul son torse bougeait au rythme saccadé de sa respiration. Elle n'arrivait pas non plus à se concentrer sur les paroles de ce qui semblait être Vivianne. Elle eut besoin de plusieurs minutes avant de comprendre qui était l'homme sur la chaise, qui lui mettait le couteau sous la gorge et qu'elle était la situation.
Elle se retrouva poussée contre le mur en senti une vive douleur dans son dos qui s'était fracassé contre le mur. Le choc fit vibrer les étagères et les fioles vibrèrent, un livre tomba non loin de Tetsuko qui sursauta de surprise, une fiole vide suivit et se brisa en plusieurs morceaux.
- « Alors comment c’était la prison ? Pas trop froid ? As-tu ressenti le toucher glacé de l’injustice, le goût salé de la rancœur, le désir brûlant de la vengeance ? Dis-moi je suis curieuse ? Toutes ces émotions sont importantes si tu veux survivre à ce qui va te tomber dessus maintenant qu’ils te tiennent. »
- « J'étais mieux accueilli qu'ici. Avais-tu besoin de me faire tout ce mal ? Quelle est la raison ? Tu es sadomasochiste ? Tu avais peur pour ta peau alors tu m'as dénoncé ? Tout se passait plutôt bien et je ne comprends pas tes actes, pourtant j'ai eu le temps d'y réfléchir.»
Tetsuko restait au sol, massant le bas de son dos douloureux. Elle n'osait pas la regarder dans les yeux et avait peur qu'elle fasse une nouvelle folie et la blesse jusqu'à la mort. Elle ne comprenait pas comment elle avait pu en arriver là pour une histoire de rue à nettoyer; finalement écouter ses principes ne l'aurait pas foutu dans ce pétrin.
D'un coup d'œil elle regarda les morceaux de verre de la fiole brisée au sol, peut-être qu'ils lui seraient utile pour sa survie. Elle remarqua aussi plusieurs plantes dans la pièce, elles seraient surement de bons alliés, surtout pour vérifier les dires de Vivianne, ou peut-être pour apprendre des secrets gênants sur la femme et lui faire du chantage. Mais elle avait conscience que ses compétences étaient plutôt nulles pour les actes méchants, elle avait trois temps d'avance.
« Je me suis bien essayée à ces pratiques dans ma lointaine jeunesse, mais j’ai arrêté de fréquenter son milieu. Trop de personnes bizarres à mon goût. »
Un sourire glacial vint accompagner cette déclaration. Elle s’amusait de voir la jeune femme dans cette position, mais ne voulait pas non plus aller plus loin dans la torture. Il était de mettre les choses au point.
« Je dois t’avouer que j’espérai que ce séjour en cellule t’ait permis de trouver le fin mot de l’histoire, mais il semblerait que ton esprit n’ait pu s’évader assez pour prendre du recul. C’est le plus grand défaut de la jeunesse. Le manque d’expérience. Laisse-moi donc t’expliquer, Tetsuko, pourquoi tu es dans la merde et pourquoi tu as besoin de moi pour en sortir. »
Je n’avais pas chômé après son arrestation. Cette histoire d’excréments à ciel ouvert était vraiment suspecte et comme Tesuko l’avait fait, un manant se serait arrêté là. Heureusement, j’avais assez d’expérience pour reconnaître un manque criant d’organisation qui plus est venant d’un service public. Personne ne laissait un tel carnage s’accumuler sans raison. L’incompétence ? Probablement, mais le résultat était tellement énorme qu’il devait y avoir autre chose, car jusque là personne ne c’était rendu compte de l’absence totale de moyens mis dans le nettoyage des eaux usées. Ce qui voulait dire qu’on avait fermé les yeux. C’était à ce moment-là que j’avais vu la forêt que cachait un simple arbre.
« Comme je te l’ai dit, ma chère, je souhaite me venger de ceux qui nous ont pris pour leurs servantes. Je sais que je t’ai fait croire que notre petite farce était la finalité de cette vengeance, mais il n’en est rien, Tetsuko, ce n’était qu’une étape. »
Je tirai une chaise et la plaça devant la porte avant de m’y asseoir élégamment. Je l’invitai à en faire de même, le sol étant réservé à notre ami Hercule qui roulait toujours des yeux sous l’effet du sédatif.
« Je sais que tu n’as ni vu mon piège ni celui que d’autres nous avaient tendu. Sache tout d’abord que dans le droit civil, personne n‘a le droit de nous demander d’accéder à une zone de service public pour y travailler sans le moindre salaire et sans le moindre contrat de travail. C’est à ce moment-là que tu aurais dû commencer à t’inquiéter. »
Je suivis son regard baladeur et soupirai.
« Cesse donc de contempler ces bouts de verre et écoute plutôt ce que j’ai à te dire gamine. Toute la situation que nous avons vécue était parfaitement illégale et je doute qu’un membre des services publics se soit dit un matin qu’il allait risquer son job pour engager deux incompétentes dans notre genre afin de faire un travail qui d’ailleurs aurait dû être fait bien avant de prendre ces proportions. Tu vois ou je veux en venir ? »
Visiblement non, elle me regardait toujours comme si j’étais la méchante reine de son histoire. Je me pinçai le nez de dépit.
« On s’est servi de nous pour couvrir quelque chose de plus grand, gamine. Si on s’était exécuté on serait toutes les deux en cellules sans aucun espoir d'en sortir. »
Encore un regard inquisiteur.
« Tu ne me crois pas ? »
Vivianne se leva et sortit un dossier qui était bien rangé parmi ses livres de magie et d’herboristerie. Il détonnait avec le reste des ouvrages puisqu’il semblait être un amas de feuilles volantes plus qu’un livre. Elle le déposa devant Tetsuko l’invitant à l’ouvrir.
« Pendant que tu maudissais mon nom en cellule, j’ai rendu une petite visite à notre ami Hercules qui est attaché avec nous et j’ai découvert ce magnifique dossier qu’on lui avait demandé de monter contre nous. »
Le dossier contenait un amoncellement de preuves qui semblait dire que Tesuko et Vivianne étaient impliquées dans une vaste affaire de détournement de fonds public à destination des services d’assainissement de la ville. Plusieurs témoignages étaient compilés, des lettres de change à leur nom pour des sommes indécentes … Tout un dossier pour les faire inculper toutes les deux et leur jeter la faute d’avoir ponctionné les services publics au point de les paralyser. Il y avait même de fausses factures pour l’achat d’équipements magiques et d’enchantement au nom de Vivianne.
« Tu vois, notre petit Hercule n’a pas chômé pour nous faire couler. Tu comprends maintenant ce qui se trame ? Pourquoi je t’ai envoyé à la case prison avant de t’en faire sortir en prenant l’apparence de l’avocat qui cherchait à nous couler où faut-il encore que je te tienne la main ?
- " Je dois t’avouer que j’espérai que ce séjour en cellule t’ait permis de trouver le fin mot de l’histoire, mais il semblerait que ton esprit n’ait pu s’évader assez pour prendre du recul. C’est le plus grand défaut de la jeunesse. Le manque d’expérience. Laisse-moi donc t’expliquer, Tetsuko, pourquoi tu es dans la merde et pourquoi tu as besoin de moi pour en sortir."
- " Je t'écoute... "
Tetsuko ne se sentait pas spécialement plus jeune que Vivianne, mais elle sentait bien qu'elle n'avait pas la même expérience de vie. L'enchanteresse semblait être une femme ayant beaucoup de vécu; elle a du vivre plus d'évènement qu'elle et était bien plus adulte dans son comportement. Tetsu n'avait pas le choix et elle se tue en attendant les paroles de la femme.
- " Comme je te l’ai dit, ma chère, je souhaite me venger de ceux qui nous ont pris pour leurs servantes. Je sais que je t’ai fait croire que notre petite farce était la finalité de cette vengeance, mais il n’en est rien, Tetsuko, ce n’était qu’une étape. "
- " Une étape ? Nous allons donc continuer à aller plus loin ? Je vais devoir finir en prison une deuxième fois ? "
La jeune détective commençait à avoir plutôt peur de la situation; elle se demandait ce que Vivianne pouvait bien attendre encore d'elle, qu'elle genre de choses illégales allait-elle la pousser à faire de nouveau. Tetsu n'avait aucune confiance en cette sorcière et elle sentait que la situation était vraiment mauvaise, elle n'avait aussi aucune idée de comment se comporter, comment éviter le drame, ni des actions qu'elle devrait faire pour se sortir de cette situation. Elle se sentait tel un petit animal impuissant venant d'éclore dans le nid de son prédateur.
Elle s'assit sur la chaise que lui présentait Vivianne, c'était déjà plus réconfortant que le sol. Elle serra les genous et continua d'écouter les paroles de la femme en serrant les dents.
- " Je sais que tu n’as ni vu mon piège ni celui que d’autres nous avaient tendu. Sache tout d’abord que dans le droit civil, personne n‘a le droit de nous demander d’accéder à une zone de service public pour y travailler sans le moindre salaire et sans le moindre contrat de travail. C’est à ce moment-là que tu aurais dû commencer à t’inquiéter. "
- " Je ne suis visiblement pas une très bonne détective..."
Elle avait les larmes aux yeux mais se retenait de ne pas craquer sous la pression. Elle se sentait écrasée et impuissante par la situation. Elle commençait à remettre en question son métier et ses compétences. Il est vrai qu'elle n'a fait que des recherches sur des sujets assez tranquilles et qui demandaient peu de risques. Elle ne connaissait pas non plus les lois, ce n'était pas ce qui l'intéressait le plus. Tetsuko avait le regard dans le vide mais celui-ci était toujours diriger vers les morceaux de verre au sol.
- " Cesse donc de contempler ces bouts de verre et écoute plutôt ce que j’ai à te dire gamine. Toute la situation que nous avons vécue était parfaitement illégale et je doute qu’un membre des services publics se soit dit un matin qu’il allait risquer son job pour engager deux incompétentes dans notre genre afin de faire un travail qui d’ailleurs aurait dû être fait bien avant de prendre ces proportions. Tu vois ou je veux en venir ? "
- " D'accord... Oui je vois."
Tetsuko n'était toujours pas convaincu, elle avait les actes de Vivianne en travers de la gorge; elle était énervée de se rendre compte que ses compétences étaient nulles et qu'elle s'était laissé aveugler par la colère.
- " On s’est servi de nous pour couvrir quelque chose de plus grand, gamine. Si on s’était exécuté on serait toutes les deux en cellules sans aucun espoir d'en sortir. "
Pourquoi avoir choisi une personne comme VIvianne, pensa Tetsu. Mais elle ne pensait pas comme elle, si elles avaient fait le travail gentiment, il n'y aurait eu aucune raison pour les deux se retrouver en prison.
- " Tu ne me crois pas ?"
- " Difficile de faire confiance en quelqu'un qui vous met un couteau sous la gorge... "
La jeune femme suivit des yeux Vivianne qui se leva et quitta la chaise devant la porte; elle prit un dossier qui était rempli de feuilles volantes et le déposa devant Tetsuko qui fit les yeux ronds en voyant l'ampleur du dossier. Visiblement, Vivianne aurait beaucoup à lui apprendre sur son métier de détective, elle en était ébahie.
- " Pendant que tu maudissais mon nom en cellule, j’ai rendu une petite visite à notre ami Hercules qui est attaché avec nous et j’ai découvert ce magnifique dossier qu’on lui avait demandé de monter contre nous. "
- " Je..."
La détective ouvrit le dossier, regarda un à un les papiers et lu en diagonale les lettres et autres immondices à son sujet et celui de la femme aux cheveux bleus.
- " Mais ça ne fait que quelques lunes que je suis à la capitale et personne ne me connaît, comment... je ne comprends pas "
- " Tu vois, notre petit Hercule n’a pas chômé pour nous faire couler. Tu comprends maintenant ce qui se trame ? Pourquoi je t’ai envoyé à la case prison avant de t’en faire sortir en prenant l’apparence de l’avocat qui cherchait à nous couler où faut-il encore que je te tienne la main ?"
- " Je comprends... même si je pense que tu aurais pu faire ça de manière plus douce. Il est difficile de te faire confiance après ses actes, mais je ne peux pas nier que tu cherches à sauver ma peau non plus... alors je te suis... et il faudrait que tu m'apprennes à être une aussi bonne détective visiblement j'ai encore beaucoup à apprendre. Quel est ton plan ? Noyer les bâtiments administratifs ?"
Face à tous ces éléments Tetsuko n'avait pas le choix, elle devait suivre Vivianne avant d'aller refaire un tour en prison et ne plus pouvoir assurer son service à ses clients; et comment expliquer à ses mères ses allers et venu en prison; elles ne comprendraient pas comment leur douce fille pleine de vie et gentille comme un gloot pourrait se retrouver dans une telle situation.
« Inonder les bâtiments administratifs ? Quelle Idée ! me moquai-je avec un sourire narquois. Les gamineries sont terminées, Tetsuko, maintenant si nous voulons changer les choses, il va falloir agir de manière bien plus intelligente qu’en se contentant de déranger monsieur tout le monde avec un océan d’immondices. »
Gracieuse et sûre d’elle, Vivianne glissa jusqu’à la porte et récupéra la chaise, laissant un chemin à la détective pour s’échapper. Elle était confiante dans le fait qu’elle n’essaierait pas de s’échapper, maintenant qu’elle savait ce qui lui pendait au nez. Sa sortie de prison n’était que provisoire, bientôt des gens dans l’ombre iraient les faire arrêter et cette fois, Hercules ne serait pas de leur côté.
« Ce ne sont pas tes compétences de détective qui sont en faute Tetsuko. C’est hum … comment dire, hésita l’enchanteresse … C’est plutôt ton inexpérience. Tu vivais jusqu’à aujourd’hui dans un monde où les maris trompent leur femme, où les chats se perdent dans les rues, où les gens ont besoin d’aide pour retrouver leur amour de jeunesse. Tous ces petits boulots ne t’ont pas permis de voir la réalité du monde qui t’entoure. Si tu veux progresser en tant que détective, laisse-moi te dire qu’il va falloir élargir ton horizon. »
Elle s’assit confortablement et rangea son arme. Nul besoin de la menacer désormais. Elle déploya ses cheveux bleus, essayant de leur redonner un aspect convenable après sa transformation magique qui les avait tous emmêlés.
« J’avais lu une citation d’un philosophe une fois … Ça disait quelque chose comme … Un être humain possède trois vies, la première s’achève avec la perte de la naïveté, la deuxième avec la perte de l’innocence et enfin la troisième avec la perte de la vie elle-même. Bienvenue dans ta deuxième vie dans ce cas. »
Une vie douloureuse, dans un monde sans pitié. Pour y faire face, Vivianne était convaincue qu’il fallait sacrifier son innocence et passer à sa troisième vie. Bon, il était vrai qu’elle en était plutôt à sa cinquième ou sixième vie, elle avait perdu le compte à un moment.
« Ce que je te propose Tetsuko, c’est un travail. Une enquête pour être plus précise. Une investigation afin de savoir ce qui se trame au niveau des services publics. Qui tire les ficelles, pourquoi et comment. Nous devons rassembler tous ces éléments si nous voulons les livrer à la justice comme ils le méritent et t’éviter la case prison par la même occasion. »
Je plantais mon regard dans le sien, elle avait intérêt à sécher ses larmes rapidement, car je n’allais pas m’encombrer d’une chouineuse. Ma proposition n’était là que pour mon amusement personnel, j’aurais très bien pu me débrouiller sans elle. On peut dire qu’elle avait raison d’une certaine façon, j’adorai la torturer.
« À cause de notre petit coup d’éclat, les responsables doivent être en panique et avec mon tour de magie, ils doivent penser qu’Hercule les a trahis. Ils vont donc bouger et quand quelque chose bouge dans l’ombre il laisse une piste que nous pourrons suivre. Alors qu’en dis-tu ? Quoiqu’il arrive, ils essaieront de te mettre en prison. Acceptes-tu mon aide pour les y envoyer avant que cela ne t’arrive ? Je te montrerai des endroits et te ferai rencontrer des personnes qu’un vrai détective se doit de connaître. Mais attention, tu y perdras ta deuxième vie … »
Elle lui adressa un sourire mystérieux, mais Tetsuko n’était pas complètement stupide. Ce qu’elle lui proposait, c’était de l’initier au monde de la pègre et à tous ces atouts. C’était à elle de décider alors qu’elle n’avait justement pas le choix.
- "Ce ne sont pas tes compétences de détective qui sont en faute Tetsuko. C’est hum … comment dire, … C’est plutôt ton inexpérience. Tu vivais jusqu’à aujourd’hui dans un monde où les maris trompent leur femme, où les chats se perdent dans les rues, où les gens ont besoin d’aide pour retrouver leur amour de jeunesse. Tous ces petits boulots ne t’ont pas permis de voir la réalité du monde qui t’entoure. Si tu veux progresser en tant que détective, laisse-moi te dire qu’il va falloir élargir ton horizon."
- " Je devrais donc m'occuper d'affaires plus dangereuses pour être une meilleure détective ? J'ai bien du mal à te suivre... Pour moi ce n'était pas des petits boulots et je ne vois pas l'intérêt de me mettre en danger..."
Tetsuko ne voulait pas vivre dans le même monde que Vivianne. Celui-ci dont elle pense doit être dangereux, triste, stressant, pourquoi irait elle se mettre dans de telle situation, pensa-t-elle, elle qui aimait croquer la vie à pleine dent et être heureuse.
- " J’avais lu une citation d’un philosophe une fois … Ça disait quelque chose comme … Un être humain possède trois vies, la première s’achève avec la perte de la naïveté, la deuxième avec la perte de l’innocence et enfin la troisième avec la perte de la vie elle-même. Bienvenue dans ta deuxième vie dans ce cas."
- " Naïve..."
Ce mot provoqua en elle des tremblements. C'est bien la première fois qu'une personne est aussi dure avec elle et lui envoie des uppercuts. Elle était bien trop fatiguée et émotive pour comprendre les mots de la femme, qui demandaient un esprit plus clair. Tetsuko arrivera peut-être à comprendre et digérer ses mots, mais ça ne serait pas ce soir. Elle ne dit plus rien et continua d'écouter les paroles de Vivianne. Il était difficile pour elle de rester éveiller, mais elle ne pouvait clairement pas s'endormir près de cette femme, qui sait ce qu'elle pouvait bien lui faire.
- "Ce que je te propose Tetsuko, c’est un travail. Une enquête pour être plus précise. Une investigation afin de savoir ce qui se trame au niveau des services publics. Qui tire les ficelles, pourquoi et comment. Nous devons rassembler tous ces éléments si nous voulons les livrer à la justice comme ils le méritent et t’éviter la case prison par la même occasion."
- "Un travail pour moi-même et pour toi... Je n'ai pas vraiment le choix si je veux éviter la prison... "
Et non, elle n'avait vraiment pas le choix de rentrer dans cette dure réalité. De plus qu'elle avait un travail à finir avec Haru. Elle n'avait pas fini de compléter ses travaux pour elle, et ce n'était pas en prison qu'elle pourrait continuer.
- "À cause de notre petit coup d’éclat, les responsables doivent être en panique et avec mon tour de magie, ils doivent penser qu’Hercule les a trahis. Ils vont donc bouger et quand quelque chose bouge dans l’ombre il laisse une piste que nous pourrons suivre. Alors qu’en dis-tu ? Quoiqu’il arrive, ils essaieront de te mettre en prison. Acceptes-tu mon aide pour les y envoyer avant que cela ne t’arrive ? Je te montrerai des endroits et te ferai rencontrer des personnes qu’un vrai détective se doit de connaître. Mais attention, tu y perdras ta deuxième vie …"
- "Je te suis Vivianne et j'espère pouvoir te faire confiance cette fois. Ou alors fais-je encore preuve de naïveté ? Dans tous les cas je ne pourrais pas faire ce travail seul, je m'en remet à toi."
Tetsuko ne comprenait pas ce qu'elle voulait par perdre son innocence. Parlait-elle de choses pas très religieuses ? Se demandait-elle. Dans tous les cas, elle savait qu'elle était au pied du mur, elle ne pouvait pas refuser. Si elle refusait l'aide de Vivianne, elle n'arriverait pas à mener l'enquête seule pour ce sortir de ce merdier, et cette femme pourrait même se retourner contre elle. Elle ne voyait donc qu'une seule solution qui était de la suivre, même si sa confiance en elle avait un goût amer.
FIN.