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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Ronces étrangleuses
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
    Informations
    Ronces étrangleuses
    Ven 30 Juil 2021 - 19:52 #
    Klarion ne s’était rarement senti aussi bien que depuis qu’il avait ouvert son cœur à Aord Svenn. Ce soir encore, ils se retrouvaient, cette fois dans l’une des cachettes du phytomancien, pour passer du temps ensemble et profiter mutuellement de leur compagnie. Le jeune homme s’épanouissait au travers de cette nouvelle complicité et attendait de retrouver l’homme qu’il aimait plus que n’importe quel autre moment de la journée. Il en venait à avoir besoin de son contact, d’être dans ses bras, ou de toucher sa peau au moins une fois pour ne pas dépérir. Aord redoublait d’efforts avec les plantes, mais il ne voulait pas non plus que Klarion le voit comme un poids dans sa lutte. L’éco-terroriste avait maintes fois rassuré son amoureux, lui déclarant que jamais il ne considérerait comme tel. Klarion voulait œuvrer avec lui, en tandem, tant dans son combat que dans ceux du prêtre. Mais il ne voulait pas brusquer ce dernier, et attendrait qu’Aord soit prêt avant de lui proposer des actions plus périlleuses. Mais Klarion avait le temps, il voulait faire les choses bien avec lui.

    - Bonsoir !

    Le visage de Klarion se mit à rayonner quand le religieux entra chez lui. Il marcha pieds nus sur le sol herbeux pour sauter au cou de son aimé et l’embrasser, prenant son visage entre ses mains. Comme à chaque fois qu’il lui donnait un baiser, le temps semblait s’arrêter pour le phytomancien, une vague chaleureuse envahissant son corps. Le bruit du bruissement des feuilles des plantes autour de lui en était décuplé, de même que le clapotis de l’eau tombant sur la gouttière, mais surtout les battements de son propre cœur qui tendait, à chaque fois, à s’accélérer. Le jeune homme détacha ses lèvres de celles d’Aord, lui attrapant délicatement la main pour l’accompagner vers le reste de la pièce, l’invitant à se mettre à l’aise. Le scrutant, Klarion ignorait s’il avait emmené son familier gluant, Naya. Cette petite slime, il ne la portait pas vraiment dans son cœur, mais il la tolérait pour ne pas faire de peine à Aord. Il lui défendait cependant de consommer des plantes et s’arrangeait toujours pour qu’elle grignote des minéraux ou des pelures et qu’elle reste dans un coin. Là, il ne la voyait pas, peut-être était-elle cachée dans une de ses poches ? Ou dormait-elle sa sacoche ? D’ordinaire, il entendait toujours ses gazouillis aigus.

    - J’espère que ta journée n’a pas été trop fatigante, dit-il en versant de l’eau dans un verre pour que le prêtre puisse se rafraîchir. J’ai de quoi boire, mais je n’ai plus beaucoup à manger, je vais devoir sortir pour aller prendre quelque chose dans une guinguette au bout de la rue

    Klarion s’assit aux côtés d’Aord sur un canapé de fortune fait à partir de plusieurs racines agencées en armatures et d’immenses coussins rembourrés. Il s’accouda contre le prêtre, réfléchissant à quel plat il allait bien pouvoir ramener. Le jeune homme réfléchissait également à quoi faire quand le religieux aurait sa prochaine journée de repos. Klarion n’avait jamais vraiment fait d’activité de couple auparavant et voulait considérer ses options. Les jardins botaniques étaient à proscrire compte tenu de sa réputation. Peut-être pouvaient-ils aller à la promenade de la rue du Cœur, admirer les ombralistes et leur spectacle sur toile. Ou se faufiler au grand opéra pour écouter la dernière pièce en vogue chez les nobles. On disait que celle qui détenait le premier rôle tentait tant bien que mal d’imiter le vibrato de l’ancienne diva Belmont, sans succès. Klarion n’avait jamais été féru d’opéra, mais appréciait écouter les chants. Il ignorait cependant si c’était la tasse de thé d’Aord, peut-être aurait-il lui aussi des suggestions…?

    - J’avais songé à du poulet mariné au miel et citron, ou des beignets de viande, les marchands ambulants en vendent des bons plus bas

    D’un geste rapide, Klarion attrapa ses chaussures et chaussettes avant de se les passer aux pieds et d’en nouer les lacets. Il songea à prendre quelques croustilles de pomme de terre au passage, au cas où la boule visqueuse finissait par montrer le bout de son nez. Il voulait se montrer le plus gentil possible, ce geste ferait peut-être plaisir ? Il allait essayer, Naya était toujours plus ou moins terrifiée par le criminel et n’osait pas le fixer trop longtemps par peur de croiser son regard.

    - Je verrai sur place, je suppose. Ne bouge pas, mets toi à l’aise, je reviens dans une dizaine de minutes !

    Il s’approcha d’Aord pour l’embrasser à nouveau avant de lui chuchoter à l’oreille :

    - Je t’aime.

    C’était la première fois qu’il lui disait, la première fois qu’il le disait tout court à n’importe qui. Sa formulation avait peut-être été bancale, ou fébrile, mais il l’avait pensé. Il ignorait s’il l’avait bien dit, ou bien fait. Mais quelque chose avait ému Klarion et motivé à le faire, lui donnant une bouffée de chaleur et empourprant légèrement ses joues. Il se redressa, tout sourire, et partir enfiler sa cape avant de disparaître au dehors.

    Peut-être aurait-il dû faire plus attention. Peut-être aurait-il dû être plus attentif, et moins distrait par ses pensées d'amoureux transi...

    Klarion n’avait pas vu, au loin derrière lui, les hommes du mains de Don Marcel, le Pingouin, le surveillant au coin de la rue…
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
    Informations
    Re: Ronces étrangleuses
    Mar 3 Aoû 2021 - 0:26 #
    Le cœur d’Aord battait dans sa poitrine à mesure qu’il s’approchait de la maison de Klarion. Ce sentiment intense qui le prenait jusqu’aux tripes le déboussolait. Tous les jours, il se demandait si ce qu’il faisait était la bonne chose à faire et s’il avait eu raison de d’ouvrir son cœur au criminel. Il ne fallait pas être un génie pour savoir que fréquente run criminel n’était pas très conseillé pour vivre une vie tranquille, mais Aord ne pouvait y résister. Il était plein de doute et dès qu’il sentait Klarion contre lui son esprit était emporté par ce sentiment profond qui le submergeait à chaque fois. Il l’embrassait et oubliait que la garde le cherchait partout. Il le serrait contre lui et instantanément il brûlait tout comme lui du besoin de sauver le monde végétal. Aord était perdu, mais il était sûr d’une chose, il n’avait pas été aussi heureux depuis des mois, peut-être même des années. Alors il retournait le voir encore et encore et cela lui faisait tellement de bien. Il apprenait tout ce que Klarion savait sur les plantes et déjà quelques idées germaient dans son esprit pour améliorer les préparations de la morgue afin de les rendre plus respectueuses des plantes.

    Le frère poussa la porte de la cachette et croisa le regard de son amant. Ils s’échangèrent milles émotions avant de tomber dans les bras l’un de l’autre. Encore une fois, Aord oublia toutes ses interrogations quand se lèvres touchèrent celle de Klarion. Aord glissa ses bras autour de sa taille pour le garder près de lui un instant de plus.

    Tu m’as manqué, dit-il en souriant jusqu’aux oreilles.

    Ce n’était pas peu dire, il était tellement distrait ces derniers temps. N’arrivant plus à penser à autre chose qu’au moment où il retrouverait Klarion une fois son travail terminé. Il en avait oublié ses problèmes, ses études, tout et cela le rendait infiniment plus heureux. Même Emilien l’avait trouvé changé lors de leur dernière rencontre.

    « Il semblerait qu’un soleil se soit allumé au-dessus de votre tête Aord, avait-il dit en plaisantant, tellement le frère semblait ailleurs. »

    Aord s’assit sur l’étrange canapé qu’il avait maintenant l’habitude de voir. La première fois qu’il était entré dans l’un des jardins de Klarion en étant invité, il avait surpris par les constructions végétales de ce dernier. Elles étaient vraiment magnifiques et Aord comprenait mieux l’idéal qu’il voulait tellement atteindre. Le phytomancien s’assit à côté de lui et Aord passa ses mains autour de lui tout en logeant sa tête dans son cou. La fatigue de la journée l’emporta et il ferma les yeux, ne prêtant plus attention qu’à la chaleur de son corps et le parfum fleurie qui entourait son amant. Tout son monde se résumait à lui pour l’instant et cela lui convenait. Il n’écoutait ses propositions que d’une oreille légèrement somnolent tellement il était bien installé.

    Mmmmmm … ça c’est une promesse alléchante, murmura le frère en souriant.

    Aord sentit Klarion bouger et grogna de protestation. Il aurait voulu rester comme ça encore un moment. Il sentit ses lèvres toucher les siennes, mais n’ouvrit les yeux que lorsqu’il lui fit sa déclaration. Aord en perdit un instant la parole. C’était la première fois qu’ils parlaient à haute voix de ce qu’ils se passaient entre eux. Aord savait que ce n’était pas une amitié, mais le mot amour ne lui était jamais venu à l’esprit. C’était sûrement un vestige de l’époque où il craignait le criminel plus que tout au monde. Jamais il n’aurait imaginé tomber amoureux de lui.

    Un sourire timide se dessina sur ses lèvres tandis qu’une joie bienfaitrice montait en lui. Malheureusement, Klarion s’envola comme une tornade, ayant trop hâte de s’acquitter de ses courses pour passer la soirée avec son amant. Aord n’eut donc pas le temps de lui répondre. Il s’allongea sur le canapé, déçu de ne pas avoir pu lui dire. Il regarda les roses qui décoraient le plafond quand il sentit un poids sautiller sur son ventre. Naya avait profité de la sortie de Klarion pour montrer le bout de son nez. La petite slime tomba sur le sol herbeux dans un plop sonore et commença à explorer son nouvel environnement avec des petits bruits adorables. Aord la regarda déambuler parmi les plantes. Il avait pris soin de la gaver jusqu’à plus faim pour ne pas risquer qu’elle grignote les plantes de Klarion, il se serait senti mal si cela avait été le cas. Naya se baladait gaiement et semblait adorer ce nouvel endroit. Aord sourit en la suivant des yeux, lentement, très lentement, il ferma ses paupières cédant à la fatigue de la journée.

    ~~~
    Un cri perçant retentit et sortit Aord de sa torpeur. Il cligna des yeux alors que Naya passait à toute vitesse dans son champ de vision poursuivie par un homme encapuchonné. Il lui fut un instant pour réaliser ce qu’il se passait, il se leva d’un bond, mais on l’attendait. Un violent coup leur heurta à l’arrière du crâne et le fit chanceler. Sa vue se troubla alors qu’il essayait de se rattraper à quelque chose, mais ne trouvât rien et s’effondra sur le sol. Un liquide chaud se répandit à l’arrière de son crâne et ses membres s’engourdirent. Sa dernière pensée alla à Klarion qui allait bientôt revenir et il s’évanouit.

    ~~~
    Aord émergea difficilement cette fois-ci. Il faisait noir et il sentait la froideur des dalles sur lesquels il était allongé. Il avait déjà vu ça, quand il avait été enlevé avec Nemue. Il essaya de bouger, mais tout son corps hurlait de douleur ne lui arrachant qu’un gémissement. Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ne pouvait-il pas simplement être heureux sans qu’une bande de criminels n’essayent d’avoir sa peau.
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
    Informations
    Re: Ronces étrangleuses
    Mar 3 Aoû 2021 - 16:24 #
    C’est le cœur léger que Klarion remontait la rue en transportant ses paniers repas, emballés dans une boîte hermétique pour faciliter le transport. Le jeune homme avait choisi d’investir dans des assortiments de brochettes de viande marinée avec un écrasé de pommes de terre simple. En dessert, le marchand vendait des grappes de raisin de table, moins fantaisiste que les autres, mais moins cher et plus rapide à distribuer. Le monde pleuvait sur les autres stands et il voulait pouvoir retrouver Aord rapidement, il avait donc choisi pour l’option la plus rapide possible. Néanmoins, l’aspect plus sobre du repas choisi ne reflétait en rien sa qualité, et Klarion savait que ces restaurateurs ambulants, aussi simple soit le dressage de leur assiette, savaient satisfaire n’importe quelle papille. Se frayant un chemin à travers la foule, Klarion put enfin sortir du flot de personnes attendant leur nourriture et reprit le chemin vers sa planque. Partout autour de lui flottaient des senteurs d’épices, de graisse ou de mouton grillé. Des garbes de couleur explosaient ça et là tant les desserts des restaurateurs avaient fière allure, comme si chacun avait décidé de pousser plus loin l’extravagance pour attirer le client. Une toute autre guerre se menait ici, celle du profit. Et Klarion n’avait vraiment pas envie d’y prendre part…

    Pressant le pas, il remonta le long de sa rue, moins peuplée que la place aux guinguettes, passant devant tout un tas de commerces en train de fermer. Le vieux pharmaciste abaissait ses stores de bois, la boulangère décrochait ses décorations de pâte cuite, seul le tout petit troquet restait bien ouvert et allumé pour accueillir les quelques habitués amateurs d’eau-de-vie venant chercher leur dose de courage pour se lever le lendemain. Tout le monde disparaissait on ne savait trop où, à l’intérieur de leurs demeures sans doute, ou rejoignant la masse dans les quartiers de loisir pour une soirée de détente. Au moins, Klarion serait tranquille, il n’y aurait pas de bruit dans la rue, et il pourrait profiter pleinement de sa soirée avec l’élu de son cœur.

    Ou, du moins, le pensait-il…

    Klarion ne s’attendait pas à retrouver son intérieur complètement chamboulé. Les tables avaient été renversées, la vaisselle brisée, les outils cassés, les meubles détruits. Et, par-dessus tout, aucune trace d’Aord. Le phytomancien en lâcha sa boîte, cette dernière s’ouvrant en heurtant le sol, libérant la nourriture au dehors. Il fit quelques pas en avant, scrutant de toutes parts en espérant trouver son aimé, mais sans aucun succès. Aord n’était pas là, nulle part. Une vision d’effroi se dressa alors sous ses yeux. Sur les coussins du canapé, une tache brunâtre se dessinait sur le tissu, à l’endroit même où Aord se tenait lorsqu’ils s’étaient quittés. La panique montait en lui alors qu’il cherchait une explication à ce chaos ainsi qu’à la disparition d’Aord. Il fut sorti de sa vague de pensées par un petit cri strident provenant de ses pieds.

    - Toi…?

    Entre ses chaussures, une petite boule translucide gesticulait avec virulence, faisant signe à Klarion pour attirer son attention. Ce dernier reconnut Naya, familier d’Aord. Elle était donc bien avec lui pendant tout ce temps… Mais que faisait-elle là toute seule sans son maître ? La gluante qui d’ordinaire avait peur de Klarion s’était précipitée dans ses pattes comme un navire perdu vers un phare. Malheureusement, il était tout aussi perdu qu’elle, ne sachant que faire ni que penser. Il s’accroupit pour attraper la petite visqueuse et la faire glisser dans sa paume gauche, ne faisant même pas attention au frisson que lui provoqua la froideur de son corps liquide. La pauvre continuait de piailler et de bouger ses bras minuscules tandis que Klarion ne savait que faire ni dire, ses lèvres tremblotant légèrement sans pouvoir sortir le moindre son. Il remarqua alors qu’elle essayait de lui montrer quelque chose...

    - Don Marcel te passe son bonjour.

    Se redressant brusquement, Klarion tomba nez à nez avec une silhouette dans la pénombre. Un homme émergea des ténèbres, une masse d'armes dans sa main, esquissant un large sourire narquois. L’éco-terroriste pouvait distinguer ses traits alors qu’il sortait de sa cachette. C’était un type bourru à la peau de bronze, très mal rasé, le cou et les joues couvertes de cicatrices et griffures. On pouvait clairement voir des sutures sur son crâne rasé et ses deux billes qui lui servaient d’yeux le scrutaient bizarrement. Il faisait le dur en moulinant des épaules, agrippant son arme en serrant le poing, comme s’il pensait que ça allait apeurer son interlocuteur. Il avait évoqué Don Marcel, un parrain mafieux que Klarion détestait, violent et cupide. L’éco-criminel avait déjà dû lui faire face quand le Commandant Arban, sous couverture, s’était aventuré avec lui.

    - Don Marcel, fit calmement Klarion en serrant les dents. C’est lui qui a fait ça ?

    - Il a pas trop aimé que tu lui coûte sa servante, ni que tu lui refuses tes services. Alors il a décidé de te prendre ton petit collabo, ça t’fera les pieds.

    - Le Pingouin ne doit pas vraiment t’aimer.

    - Hein ? Répondit le sbire, interloqué. Pourquoi tu dis ça ?

    - Parce qu’il t’a ordonné de rester ici, à m’attendre, au milieu de mes plantes.

    Soudain, plusieurs racines jaillirent de toutes parts pour enserrer le bandit. Celui-ci brandit sa massue mais ses poignets furent rapidement entravés par les végétaux. Les tentacules sylvestres tournoyaient autour de lui, passant autour de ses articulations comme les anneaux d’un serpent prêts à broyer leur proie. Une racine passa devant sa bouche, comme pour le museler, tandis que Klarion continuait de fixer l’infortuné qui risquait de connaître une fin prématurée.

    - Bon appétit, mes jolies.

    Les racines qui avaient agrippé le malfrat l’entrainèrent à nouveau dans les ténèbres, le faisant disparaître en un froissement de feuilles et de bois. Bientôt, les murmures terrorisés de sa voix s’estompèrent, plongeant Klarion et Naya dans un silence lourd. Don Marcel avait enlevé Aord, le trouvant ici à la place du terroriste. Ce dernier était ivre de fureur, il avait envie de détruire le mafieux. Non, il allait le faire. Il allait retrouver Aord, le sortir de ce pétrin, et réduire à néant ce Don qui avait osé lui faire du tort. Son cœur battait bien trop vite dans sa poitrine, il espérait plus que tout que le prêtre n’avait pas été blessé, ou pire. Il devait agir vite, mais il avait si peu de temps.

    - Nous allons libérer ton maître, fit Klarion en baissant ses yeux vers Naya. Je vais sauver Aord, mais je ne peux pas faire ça seul.

    Ce fut au tour de Klarion d’avoir son regard teinté d’une once de terreur et d’appréhension. Perdre Aord était la dernière chose qu’il voulait vivre. C’était la première fois qu’il vivait quelque chose d’aussi fort avec quelqu’un, qu’il aimait autant quelqu’un d’autre. Il ne voulait pas que tout soit gâché par ce qui se passait. Pire encore, il était terrorisé par ce qu’Aord pourrait faire ensuite. Partirait-il après avoir été sorti d’affaire ? Non, Klarion ne voulait pas penser à cela. Il aimait Aord, il voulait continuer de composer avec lui. Il ne voulait pas penser à autre chose. Ceci étant, il avait raison, il ne pouvait partir à l’assaut d’un parrain mafieux seul avec une slime peureuse.

    Il avait besoin d’aide, il n’avait pas le choix.

    Il ne voulait pas le faire, mais il n’avait pas le choix.

    Pour Aord, il n’avait pas le choix. Il devait aller les voir. Il devait aller les voir, eux.

    - Je dois demander audience à la Cour des Griffons.
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
    Informations
    Re: Ronces étrangleuses
    Mar 3 Aoû 2021 - 23:31 #
    Aord roula sur le dos en poussant un soupir de soulagement. Il étendit ses jambes maintenues collées par des liens passés autour de ses chevilles. Tout son corps n’était que douleur et il avait du mal à aligner deux pensées cohérentes. Il sentit un froid mordant à l’arrière de son crâne à cause de la marre de sang dans laquelle baignait sa tête. Il regarda le plafond, ou peut-être était-ce le sol, son oreille interne lui donnait l’impression de tourner et il n’y avait pas un seul rayon de lumière qui filtrait dans la pièce. Il ferma les yeux tandis qu’une sombre émotion montait en lui. Comment avait-il cru qu’il pourrait vivre heureux comme ça ? Le rêve était fini, bienvenu dans la réalité. Aord ne savait pas qui l’avait enlevé, mais cela n’avait pas d’importance. C’était simplement trop pour lui. Une larme roula sur ses joues. Il repensa à Klarion, il ne pensait qu’à lui, tout le temps. Il voulait qu’il soit là, il voulait qu’il calme sa peur comme il l’avait déjà fait. Il voulait qu’il lui die de tenir bon, de ne pas craquer, mais il n’était pas là. Il était seul encore. Mais il y avait quelqu’un qui était toujours avec lui.

    Lucy, pleine de grâce, pardonne-moi ma bêtise, car j’ai encore échoué. Malgré tes cadeaux, malgré ton amour, je me suis encore égaré. Je t’en supplie guide moi encore une fois, montre-moi ce que je dois faire …

    Sa voix se brisa transformant sa prière en une plainte. Peut-être même que Lucy l’avait abandonné ... Ni la foi ni l’amour n’arrivait à le rassurer à mesure qu’il se disait de plus en plus qu’il allait mourir ici.

    La porte s’ouvrit enfin éblouissant le frère dans un flash de lumière. Aord grogna en essayant de se cacher les yeux. Une douleur lancinante se propagea dans son crâne. Deux hommes le soulevèrent par les aisselles. Ses jambes ankylosées ne le soutinrent pas et le brusque changement de référentiel lui donna le tournis. Les deux hommes le maintinrent debout comme ils purent jusqu’à ce qu’il retrouve son équilibre. Il chancela quand ils commencèrent à le tirer avec eux, mais ne résista pas, incapable de réfléchir.

    Ils longèrent un couloir luxueux qu’Aord eut à peine le temps d’observer. Il croisa son regard dans une glace. Il était pathétique, un hématome grandissait sur son œil gauche et ses cheveux collaient à son crâne à cause du sang séché. Aord détourna les yeux de sa propre misère et continua sa route. Ils débarquèrent dans un salon richement décoré qui contrastait nettement avec le trou qui avait accueilli Aord à son arrivée. Le frère balaya la pièce du regard tandis qu’on l’obligeait à s’asseoir sur une chaise et qu’on l’attachait plus fermement pour qu’il n’en bouge pas. Le mobilier était en bois précieux et les tissus des canapés semblaient hors de prix. Celui qui possédait cet endroit devait certainement rouler sur l’or, pensa le religieux. Au mur, il put voir plusieurs tableaux. Sur le mur d’en face, Aord vit un bois de cerf particulièrement imposant accroché au mur. Personne ne dit rien et Aord se demandait bien ce qui allait se passer. Contrairement à la dernière fois, il semblait avoir été emmené dans une zone habitée et pas dans une sombre cabane au milieu des bois. Cela voulait peut-être dire qu’on n’allait pas essayer de se débarrasser de lui cette fois.

    Le frère jeta des regards terrorisés à la porte de droite derrière laquelle il pouvait entendre une grande agitation. Elle s’ouvrit en grand et un homme richement vêtu, portant un haut de forme entra dans la pièce d’un air désinvolte. Aord le fixa comme s’il annonçait la fin du monde. Le nouvel arrivant le regarda de la tête aux pieds avant de s’écrier :

    « Mais bordel, le tapis bande de crétin, vous avez ramené cette loque ensanglantée sur mes tapis en fil de tissenuit ! »

    Il fit un geste énervé en direction de l’un de ses sbires qui s’empressèrent de nettoyer la tête du frère pour ne pas que son sang ne coule sur la précieuse décoration. Aord papillonna des paupières sur le point de s’évanouir de nouveau. L’homme qui semblait être le chef vint le gifler pour le ramener à la réalité.

    « Hop hop on s’endort pas le prêtre »

    Aord gémit et sa tête tomba sur sa poitrine, épuisé.

    « Il est temps qu’on parle un peu de ton copain, ce fils de pute de Brando. Il t’a parlé de moi ? Don Marcel, ça te dit quelque chose ?
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: Ronces étrangleuses
    Mer 4 Aoû 2021 - 0:55 #
    - Reste cachée, si les Griffons te voient, ils risquent de jeter leur dévolu sur toi. Et tu n’as pas envie de finir dans le gosier du Gourmet.

    Naya perchée sur son épaule, sous sa cape, Klarion avançait dans la pénombre en activant le pas, sa capuche rabattue sur sa tête. Il existait bon nombre de groupuscules obscurs et de sociétés secrètes dans le monde souterrain du royaume, des gangs de racailles aux sectes interdites. Mais la Cour des Griffons était sans doute l’un des plus dangereux et sordides, si bien que son simple nom suffit à insuffler terreur et dégoût. Entièrement constitué d’hybrides oiseaux, la Cour accumulait énormément de connaissances occultes et ésotériques, s’accaparant régulièrement les artefacts les plus sombres échouant au Marché Noir. Nécromancie, spiritisme, mentalisme et asservissement mental, ils ont acquis, à juste titre, une réputation atroce, agissant comme des éminences grises pour leurs desseins abjects. Personne ne sait quand ils sont apparus, ni quel âge a la Cour, mais leur ombre plane toujours au-dessus des têtes, et tout le monde finit par en entendre parler parmi les criminels. Seuls les plus fous provoqueraient leur colère, car même les pires raclures comme Don Marcel n’osaient les contrarier. Ainsi, les membres de la Cour avaient chacun leur rôle, gravitant autour de leur leader : le Despote.

    Klarion marchait dans un cimetière, l’un des plus anciens de la Capitale, avec des tombes datant des premiers Renmyrth et certaines, aux noms effacés par les affres du temps, des derniers Cavendish. Le soir, la nécropole était désertée, plus personne ne la visitait. Et, même en temps normal, très peu d’âmes ne s’aventuraient aussi loin à l’intérieur, vers les tombes les plus lointaines de l’entrée, étant donné que personne ne connaissait les morts enfouis ici. Il savait où il devait se rendre, mais un nœud de plus en plus dense se formait dans son ventre à chaque pas accompli. Il scrutait de loin un grand mausolée à la façade bien triste. La pierre avait été rongée par la mousse et envahie de lierre. Vu comme ça, personne ne pouvait se douter ce qui se terrait derrière sa porte rouillée. Klarion, qui d’ordinaire n’avait cure de ses actes, plus que jamais, avait peur.

    Poussant la porte du mausolée qui fit un grincement assourdissant, Klarion se retrouva dans une salle vide. Les toiles d’araignées avaient envahi le plafond, mais il n’y avait aucune trace de leurs propriétaires. Les dalles au sol avaient perdu leur éclat d’antan et les murs s’effritaient pas endroits. Dans son dos, Naya ne pipait mot et s'agrippait à la peau de son cou, le faisant frissonner davantage. Le phytomancien prit soin de refermer la porte en un second grincement strident et s’avança de quelques pas. Il tapota le sol du talon, sans vraiment savoir à quoi s’attendre avant d’inspirer profondément. Il était allé si loin, il ne pouvait pas retourner en arrière. De toute façon, la Cour devait déjà être au courant de sa présence sur leur sol…

    « Gare à la Cour des Griffons, qui voit tout ici bas,
    Si vous aimez votre âme, ne l’évoquez même pas,
    Ils entendront à coup sûr votre voix fluette,
    Ils enverront leurs ergots pour prendre votre tête. »

    Klarion termina sa comptine et un bruit sourd retentit alors de sous ses pieds. Les dalles devant lui s’animaient pour s’ouvrir en coulissant de chaque côté, laissant place à un escalier descendant dans les ténèbres. Le phytomancien ne se fit pas prier et s’engouffra à l’intérieur, se tenant au mur pour ne pas glisser. Il descendait depuis plusieurs minutes dans le noir total, Naya grelotant depuis sa cachette. Il s’attendait à avoir froid dans ce tunnel secret, mais il faisait étrangement doux. La température singulière prit Klarion au dépourvu, si bien qu’il ne savait trop s’il devait être rassuré ou non, ne faisant qu’augmenter son appréhension. Il n’y avait également aucun son, si ce n’était celui de ses talons sur les marches. Comme s’il était perdu au milieu du néant, une abysse insondable hors du temps et de l’espace. Il se sentait scruté de toutes parts en descendant, sans doute une tentative de déstabilisation de la Cour. Mais il fallait avouer qu’elle marchait. Qui plus est, il ne pouvait se permettre de faire pousser quoi que ce soit ici, la Cour verrait cela comme un affront, une tentative d’espionnage, et il subirait leur courroux.

    Klarion arriva enfin en bas de l’escalier mais, pensant trouver une ouverture, il constata qu’il se trouvait face à un nouveau mur. Un impasse, on l’avait fait descendre jusqu’à une impasse ! Passant ses mains sur la surface, l’éco-terroriste cherchait une pierre à pivoter, un bouton sur lequel appuyer, n’importe quoi pour passer. Mais il n’y avait absolument rien, pas la moindre fissure sur ce mur de granit. Il s’apprêtait à réciter à nouveau la comptine, mais le mur s’anima sous ses doigts à la manière des dalles du mausolée et il fut par plusieurs lueurs. Des braseros suspendus par des chaînes éclairaient un couloir dallé d’or et de marbre. Les voûtes du plafond étaient sculptés d’arabesques dignes de la plus belle des cathédrales et, ça et là, on distinguait des gargouilles espionnant les visiteurs. Mais ce qui captait l’attention de Klarion n’était pas la beauté de ce couloir dans lequel il avait été invité, mais la silhouette qui l’accueillait à l’intérieur.

    - Bienvenue, Klarion Brando. Fit une voix mielleuse.

    - Chambellan.

    Le Chambellan avait la voix la plus hypocrite et condescendante que Klarion n’avait jamais entendu. C’était un hybride vautour au crâne chauve et constellé de rides. Tout comme les autres membres de la Cour, il passait le plus clair de son temps transformé, si bien qu’il dodelinait dans ses immenses drapés de velours pourpre. Sa peau violacée évoquait celle d’une prune fripée et, entre ses grandes manches tombantes, de longs doigts griffus égrenaient une chaîne dorée. Faisant claquer son bec crochu, il émettait un constant murmure aigu fort dérangeant en dévisageant Klarion de la tête au pied comme s’il était une marchandise. Il fulminait intérieurement, mais tâchait de garder contenance pour ne pas le froisser. Il avait besoin d’eux pour sauver Aord, il n’avait pas le choix…

    *Pour Aord, tout pour Aord.*

    - Chambellan, j’ai besoin de l’aide de la Cour pour

    - Pas ici, minauda le Chambellan, les murs ont des oreilles. Me suivre, on nous attend ailleurs. Sa Majesté n’a pas été informée de votre arrivée, c’est mon petit secret !

    - Le Despote ignore que je suis là ?!

    - Il l’apprendra, en temps voulu, le Chambellan le lui dira, quand il aura besoin de le savoir. Allons, vite, avant que l’on vous voit ici.

    La perfidie du Chambellan avait peu d’égales en ce bas monde. Et Klarion savait que tous les membres convoitaient secrètement la place de leur chef vénéré, mais n’osaient le contredire en public. Gravitant tous les uns entre les autres, leurs constantes luttes de pouvoir pouvaient parfois rendre service à ceux qui cherchaient leurs faveurs. Mais Klarion ne voulait pas attirer l’œil sur lui, surtout ceux du Despote. Ce vil aigle n’était pas réputé, comme son nom l’indique, pour sa patience et son indulgence. Le jeune homme suivait le Chambellan qui avançait d’un pas pressé. Ce dernier avait dit qu’on les attendait ailleurs qui d’autre était au courant de sa visite ? Il s’énumérait tous les courtisans qu’il connaissait mais chaque éventualité devenait de plus en plus horrible à chaque fois qu’un nom lui arrivait en tête.

    Il obtint rapidement sa réponse quand le Chambellan ouvrit une porte au détour d’un couloir, révélant un salon luxueux où tout croulait sous les pierreries, les drapés de soie et de satin, les plumes et les perles. Ce devait être l’œuvre de l'Embellisseur, un autre Griffon que Klarion ne voulait pas croiser. Fort heureusement pour lui, ce ne fut pas le cas. Entrant dans la pièce, le phytomancien se retrouva face à un hybride mainate, tout aussi décrépit que le Chambellan. Il portait une robe bien plus sobre que ce dernier, pleine de taches multicolores de produits dont Klarion ne voulait pas connaître l’origine. Ses mains étaient couvertes de gants tout aussi tachés que le reste de ses atours. Et ses yeux étaient dissimulés derrière d’étranges lunettes grossissantes. Le Chambellan l’avait conduit jusqu’à l’Ingénieur, un soulagement comparé au reste des Griffons. L’Ingénieur était suffisamment érudit pour moins tomber dans les travers sadiques de ses comparses, mais il n’en était pas moins retors.

    - Enfin vous voilà, le Chambellan s’est hâté de me faire part de votre venue quand vous avez pénétré dans le cimetière.

    - Trop aimable, fit Klarion en serrant les dents alors que le Chambellan s’avançait aux côtés de son confrère.

    - Que nous vaut votre venue ? Demanda le Chambellan.

    - Vous aviez l’air de bien vous débrouiller face à la Garde, ironisa l’Ingénieur. J’ai été le premier surpris de savoir que vous vouliez une audience.

    - J’ai besoin de votre aide pour anéantir Don Marcel.

    - Le Pingouin ?!

    - C’est tout ?!

    Les deux Griffons éclatèrent de rire, gigotant dans leurs amples robes.

    - C’est tout ce que je demande.

    - Vous auriez pu vous épargner tout ce voyage, grinça l’Ingénieur. Mais j’ai ce qu’il vous faut.

    Fouillant dans sa robe, il sortit un petit cristal violet qu’il tendit à Klarion. Celui-ci le prit entre ses doigts, inspectant l’objet comme s’il s’agissait d’une rare antiquité.

    - Vous n’aurez besoin que de ça, expliqua l’Ingénieur. Appliquez le sur le Don, et vous aurez ce que vous voulez.

    - Que fait ce cristal ?

    - Vous le comprendrez le moment venu, ricana le Chambellan.

    - Je vois, répondit Klarion sans poser de question, il ne voulait pas s’attarder ici, chaque seconde étant perdue dans sa rescousse d’Aord. Et votre paiement ? Que voulez-vous ?

    - Encore une fois, vous le comprendrez le moment venu, réitéra le Chambellan.

    Ils ricanèrent une nouvelle fois, avant de plonger à nouveau leurs yeux sur Klarion qui, lui, soutenait leur regard. Le phytomancien glissa le cristal dans sa poche, indiquant passivement qu’il acceptait les termes de leur marché.

    - Excellent, excellent ! Roucoula le Chambellan. Je vais vous raccompagner.

    Sans se faire prier, Klarion se hâta vers la porte que lui ouvrait déjà le vautour…

    *Aord, je me met en route. Je t’en supplie, ne me laisse pas… ! *
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Ronces étrangleuses
    Mer 4 Aoû 2021 - 18:18 #
    J’sais pas qui t’es, cracha Aord en même temps que le sang qui coulait de sa lèvre.

    Don Marcel lui attrapa le visage pour le regarder dans les yeux avant de rejeter sa tête sans ménagement.

    « Crache encore ton sang et j’te saignerai comme un cochon … »

    La tête d’Aord retomba mollement sur sa poitrine alors qu’il s’accrochait à la douleur qui irradiait à travers tout son visage pour ne pas s’évanouir. D’une certaine manière il était rassuré de savoir que cet enlèvement n’était pas à cause du livre, mais il n’en était pas rassuré pour autant. Il aurait dû le savoir. Savoir que fréquenter un criminel ne lui apporterait que des ennuis. Il aurait voulu … ne pas se faire emporter là-dedans, quel imbécile. Et pourtant, quand il pensait à lui, en sang sur sa chaise, il n’arrivait pas à le détester. Oh déesse, pourquoi n’arrivait-il pas à le repousser.

    « T’as de la chance, y a quelqu’un qui t’aime de notre côté, lâcha le pingouin »

    Aord leva la tête brusquement. De quoi parlait-il ? De Klarion ? Non, Klarion l’aimait, mais il avait le sentiment que le pingouin parlait d’une autre forme d’amour. Aord avait du mal à réfléchir, mais il arriva tout de même à parler.

    C-C-Comment ça ? bégaya-t-il.

    Le pingouin ne lui répondit pas, notant que son prisonnier n’avait aucune idée de ce qui se tramait dans son dos. Il claqua des doigts et on vint redresser le frère pour lui détacher les mains tout en le laissant bien ficelé à sa chaise. Aord ne regardait plus que le pingouin, pressé de connaître ce qu’il savait. Qui était cette personne qui lui voulait tellement de bien dans le monde du crime. On apporta deux tasses de thé et son « hôte » s’assit nonchalamment dans l’immense canapé qui lui faisait face. Don Marcel prit son temps, se délectant des yeux de chiens battus de son prisonnier. Il se fit allumer sa pipe par un de ses hommes avant de prendre une grande bouffée et de la souffler au visage du frère qui grimaça de dégoût.

    « Ton p’tit copain, car je crois qu’vous couchez ensemble si j’ai bien compris. »

    Il jaugea le frère comme pour chercher à comprendre comment ses deux-là avaient fini dans les bras l’un de l’autre.

    « Il s’est bien foutu d’ma gueule la dernière fois avec Ahlan. Alors tu vois j’avais
    Sacrément envie de retrouver cet enfoiré. Mais il s’cache bien, je lui concède ça. »

    L’homme prit une nouvelle bouffée de tabac avant de reprendre.

    « Et là y a c’type qui est venu me voir avec tout ce qu’il me fallait pour le trouver, un vrai espion. Mais ce que j’comprend pas … »

    Il s’arrêta au milieu de sa phrase pour se lever et se rapprocher du frère attrapant de nouveau son visage.

    « J’comprend pas pourquoi il voulait pas qu’on t’touche. Tu s’rais pas gigolo ou une connerie comme ça ? »

    Aord détourna les yeux, lui non plus ne comprenait pas pourquoi on avait demandé à l’épargner, au contraire, il aurait cru qu’on aurait posé un contrat sur sa tête, comme pour le dernier groupe de mercenaire.

    Je suis frère de Lucy …


    « T’es un putain prêtre ? Vous entendez ça les gars ? Brando s’tappe un prêtre. Oh tain c’est la meilleure ! »

    Le parrain s’esclaffa bruyamment, couvrant Aord de honte. Une colère sourde montait en lui, mais il serra les dents et ne répliqua rien. On avait peut-être demandé à ce qu’il soit restitué vivant, mais pas indemne. Il resta donc silencieux, essayant d’oublier l’haleine putride de son interlocuteur, mélange d’alcool de tabac.

    « Alors tu dis rien ? »

    P-p-p-pourquoi vous me gardez ici, si vous vous voulez pas de moi ?


    « Bonne question mon ami, peut-être parce que j’comptai sur toi pour m’dire qui était ce mystérieux informateur qui a réussi à retrouver Brando en un tour de main, mais t’a l’air complètement à la ramasse. Tu feras bien l’affaire en tant qu’appât, donc on va t’garder avec nous l’temps ton p’tit copain se montre et une fois qu’on s’en sera occupé et bah … On réfléchira à ce qu’on fera d’toi »

    Il parti dans un éclat de rire sordide avant d’aller se rasseoir et de complètement ignorer Aord. Le frère pria silencieusement pour que Klarion ne vienne pas et ne tombent pas de ce piège. Lentement, il glissa ses mains jusqu’à la tasse de thé pour en prendre une gorgée.

    Déesse protège le, je t’en supplie …
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: Ronces étrangleuses
    Jeu 5 Aoû 2021 - 0:41 #
    - Tiens toi tranquille, glisse toi dans ma chaussure. On va aller voir ton maître, mais il ne faut pas que Don Marcel te trouve. Les slimes, il les mange en gelée lui

    D’abord réticente, Naya se fit docile dès que Klarion évoqua le prêtre. La petite gluante se glissa entre le cuir et la chaussette du phytomancien, lui faisant tordre sa bouche en une moue gênée. Le corps visqueux et froid de la slime mouillait sa chaussette, ce qui était fort désagréable pour le jeune homme. Il la sentait gesticuler, compressant son corps malléable pour trouver une position confortable. Alors qu’il laissait le familier d’Aord se positionner convenablement, il s’accroupit pour glisser le cristal violet donné par les Griffons dans son autre chaussure, entre son talon et la cheville. Il se doutait qu’on allait le fouiller quand il arriverait chez le mafieux, et dans cette optique préférait éviter de garder l’artefact dans sa poche. Personne ne fouillait jamais les chaussures, un peu comme les brassières des dames qui pouvaient dissimuler autre chose que leurs poitrines. Il se questionnait encore sur ce cristal, pourquoi les Griffons ne lui avaient-ils donné qu’un simple cristal ? Allait-il déchaîner les éléments chez le Don ? Ou pouvait-il invoquer les redoutables ergots de la Cour ? L’Ingénieur lui avait dit de « l’appliquer » sur Marcel… Klarion allait devoir l’approcher d’assez près pour faire entrer le cristal en contact avec le parrain, ça n’allait pas être une mince affaire. Il venait à se demander si s’adresser à la Cour avait été la chose la plus judicieuse à faire, mais l’éco-terroriste n’en démordait pas. Même s’ils ne lui avaient donné qu’un morceau de minéral, il pouvait toujours se débrouiller.

    - On y est Naya… on y est… Aord, on est là.

    Klarion se chuchotait à lui-même comme pour se rassurer, il ignorait si la gluante l’avait entendu, tout en bas sur son pied. Il arrivait chez Don Marcel, le même endroit où il l’avait précédemment rencontré en compagnie d’Arban. De l’extérieur, rien n'avait changé, la façade avait toujours l’air aussi miteuse. Mais il savait que, à l’intérieur, le luxe devait suinter par tous les murs et, surtout, tout le monde devait être en effervescence. De plus, si Don Marcel avait enlevé Aord au lieu de le laisser pour mort dans sa planque, c’était qu’il avait envie d’attirer Klarion jusqu’à lui. Le phytomancien savait pertinemment que toute cette mise en scène était un piège, et il comptait donner au parrain ce qu’il voulait. Il allait juste corser un peu les choses et arroser l’arroseur.

    S’avançant devant la porte d’entrée du bâtiment, Klarion tapota nonchalamment sur le bois au vernis écaillé. Il tâchait de se recomposer et adopter une posture décontractée, croisant les bras et s’appuyant contre le mur encadrant le porche, attendant qu’on vienne lui ouvrir. Une ouverture coulissa au sommet de la porte pour laisser place une paire d’yeux vairons, un gris et un bleu. Le type fronça les sourcils en reniflant bruyamment avant de se mettre à scruter le visiteur. Il ne fallut pas longtemps pour qu’il reconnaisse Klarion et décontracte son front.

    - Salut Nerio, je reconnaîtrais tes yeux de biche à des kilomètres. Tu bosses pour le Pingouin maintenant ? Ça paye pas assez de cirer les pompes de John Doe ?

    - T’occupe. Le patron veut te voir, il a ton gigolo, et il est furax. Alors tu vas ravaler ta fierté et me suivre comme un caniche.

    - Fais attention à comment tu me parles Nerio, répliqua Klarion d’un ton plus glacial. Tu faisais pas autant le malin, y a dix ans, quand tu m’as supplié de soigner Gina. Comment va-t-elle, d’ailleurs ?

    - Morte, répondit l’intéressé en lui ouvrant la porte.

    - Mes condoléances, c’était une chic fille, répondit Klarion, sincèrement navré, en passant la porte.

    Jetant un œil, il sentit l'œillade fébrile que lui rendit son ancienne connaissance, visiblement touché. Nerio fit avancer Klarion le long d’un couloir où deux malabars se tenaient dans des positions qui se voulaient menaçantes, brandissant fièrement leurs sabres comme s’il s’agissait de leur plus chère possession. Le jeune homme s’avança sans leur accorder la moindre attention, ce qui sembla les courroucer farouchement. Ils firent quelques pas vers lui mais Nerio les arrêta d’un bref mouvement de la main avant de fouiller la cape et les poches du terroriste.

    - Le patron t'attend dans le grand salon, je t’accompagne.

    - Trop aimable.

    Klarion suivit Nerio jusqu’au bout du couloir, un silence pesant s’installant entre les deux. Il n’avait pas envie de lui faire du mal, mais pour sauver Aord il n’avait pas le choix que de s’opposer à son ancien camarade. Il se souvient des moments passés le long des canaux, sur les quais, avec les autres gamins des rues, Nerio en faisait partie, avec sa sœur Gina. Le décès de cette dernière avait dû sacrément l’ébranler s’il avait échoué à la botte d’un type comme Marcel. Klarion se souvient encore du bon gaillard qu’il était, toujours à défendre les plus fébriles, et surtout sa sœur, toute chétive. Pauvre Nerio, pauvre Gina… Ils arrivèrent face au rideau et, s’adressant un dernier regard navré, passèrent dans le salon. Klarion trouva Don Marcel en train de dévorer un homard, crachant occasionnellement un morceau de carcasse sur le sol. Entre chaque bouchée, il attrapait un verre de vin aussi grand qu’un saladier et engloutissait plusieurs gorgées de liquide bordeau. Lorsqu’il vit Klarion, ses yeux brillèrent d’un éclat narquois.

    - Bah tiens ! Éructa-t-il en brandissant une des pinces de son homard. Regardez qui pointe sa trogne ! On a perdu quelque chose, mon p’tit géranium ?

    - Il est toujours en vie ? Demanda Klarion sans aucune forme de cérémonie.

    - Tu me prends pour qui Brando ? Je traite bien mes invités, ton prince charmant est toujours en vie. On s’est bien occupé de lui en t’attendant, hein les gars ?

    La dizaine de malfrats présents dans la pièce ricanèrent en même temps que leur patron. Don Marcel jeta la pince derrière lui avant de se mettre à suçoter une des pattes du crustacé.

    - Tu sais ce qui va se passer maintenant, n’est-ce pas ? Grinça le Don en passant ses doigts sur le couteau posé à côté de son assiette.

    - J’ai pactisé avec la Cour des Griffons, lâcha Klarion solennellement.

    Don Marcel eut pour réflexe de recracher ce qu’il avait en bouche avant de plonger son regard dans celui de Klarion. Ils se jaugèrent mutuellement, sans briser leur contact visuel. Le jeune homme dardait méchamment les deux billes noires qui servaient d’yeux au Pingouin et, avant qu’il ne puisse battre des cils, vit le mafieux éclater d’un rire gras. Le Don avait l’air de penser qu’il s’agissait d’une blague, Klarion ne riait pas, son regard n’avait pas changé. Il continuait de fixer le parrain de ses yeux perçants, aussi froid que les terres d’au-delà la frontière. Don Marcel s’arrêta de rire et constata que Klarion ne changeait pas d’expression. Un silence de mort s’installa dans la pièce tandis que les deux criminels continuaient de se regarder, comme deux chats s’apprêtant à sauter l’un sur l’autre. Il sembla s’être écoulé une éternité quand le Don, d’un geste empli de fureur, envoya valser toute son assiette et se leva d’un bond, manquant de faire tomber son haut-de-forme.

    - Arrête de te payer ma gueule ! Sale merdeux !

    - Tu as enlevé quelqu’un qui m’est cher, Pingouin. Tu crois que je ferais dans la dentelle ? Tu crois que j’ai le cœur à m’amuser ? Dans peu de temps, leurs ergots seront là.

    Un murmure parcourut la pièce, la menace proférée par Klarion lorsqu’il avait mentionné les terribles assassins ergots avait semé la panique parmi les sbires de Marcel. Ils se fixaient entre eux, affolés. À sa gauche, Nerio avait tourné la tête vers lui, complètement stupéfait. Seul le Don continuait de le fixer défiguré par la colère, son poing serré autour de la patte de homard qu’il brisa dans sa paume.

    - La ferme ! Fermez la bande de déchets ! Brailla-t-il à l’attention de ses hommes. J’vais m’occuper de toi plus tard Brando, j’ai pas que ça à faire. Emmenez le dans la cellule du cureton, et fermez tout à double tour ! Personne rentre, personne sort ! Maintenant !

    Don Marcel sortit en trombe de la salle tandis que Nerio, empoignant Klarion par le bras, l’entraîna lui-même vers un autre couloir. Le phytomancien avait fait son petit effet. Il avait certes menti, mais il avait semé la panique dans la demeure du Pingouin et il allait pouvoir retrouver Aord. Après un enchaînement de couloirs et d’escaliers, Nerio le jeta dans la celulle d’Aord avant de refermer la porte derrière lui, s’excusant sincèrement au passage. Klarion n’en eut cure sur l’instant, tout ce qui lui importait était de retrouver son aimé. Dans la cellule sombre, il n’y avait qu’une seule personne.

    - A...Aord… ?

    Naya était sortie de sa chaussure et piailla gaiement sur le sol humide en glissant joyeusement vers son maître, elle l’avait reconnu. C’était bien lui. Klarion ne se fit pas prier et, avant même que le prêtre ne put dire quoi que ce soit, il s’élança vers lui pour l'agripper fermement dans ses bras. Aord avait beau être en vie, Klarion avait toujours peur. Il n’avait plus la force de réprimer ses larmes et il se mit à pleurer à chaudes larmes.

    - Ce… c’est de ma faute, tout est de ma faute. Si tu es là, si tu es dans cet état. Pardon, je t’en supplie pardonne moi. Je ne voulais pas… Je ne voulais pas

    Enfouissant sa tête contre le torse du prêtre, le phytomancien n’arrivait pas à étouffer son sanglot et continuait de pleurer, de s’excuser. La culpabilité lui déchirait le cœur, se fichant éperdument du piège qu’il avait réussi à délayer. Il était tétanisé par la peur, il se refusait de perdre Aord, il se refusait de lui parler de la Cour. Tout ce qu'il savait en ce moment précis, c'était qu'il l'aimait, quitte à se damner pour lui...
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    Re: Ronces étrangleuses
    Jeu 5 Aoû 2021 - 20:59 #
    Tout se troublait, tout se mélangeait … Son esprit n’était qu’un maelstrom de pensées et de sensations désagréables qui tourbillonnaient sans cesse. Aord ne savait plus depuis combien de temps il était prisonnier. Il se souvenait d’avoir bu le thé avec Don Marcel, d’avoir mangé quelque chose dont il ne se rappelait même plus la saveur. Puis, on l’avait jeté à nouveau dans ce cachot et il s’était cogné la tête contre le mur, le replongeant dans le noir total. Ce petit moment de répit était fini et son calvaire reprenait. Il se recroquevilla sur le sol froid et sombra dans le sommeil.

    ~~~
    Il entendit d’abord de l’agitation au loin. Don Marcel devait encore s’en prendre à un de ses sbires qui avait taché son précieux mobilier. Le frère l’ignora et préféra se laisser gagner par l’épuisement et sombrer de nouveau dans sa torpeur. Il n’avait rien d’autre à faire maintenant. Mais alors qu’il fermait les yeux, il entendit une porte s’ouvrir et des pas se rapprochèrent de sa cellule. Il ne bougea pas. Restant plié en deux au milieu de la poussière.

    La porte s’ouvrit violemment et il entendit quelqu’un se faire jeter dans la cellule. Cette fois, Aord leva les yeux pour voir ce qu’il se passait, mais vu immédiatement ébloui par la lampe que tenait le geôlier. Il s’assit et se massa les yeux frénétiquement tout en grimaçant de douleur.

    « A … Aord, dit le nouveau prisonnier »

    Le frère s’arrêta soudain de se frotter ses yeux endoloris, cette voix … Non, ce n’était pas possible. Un petit cri retentit et le religieux aveugle sentit le toucher froid d’un corps de slime contre sa cuisse.

    « K-Klarion, c’est toi ? »

    Sa voix était éclairée par l’espoir et la joie de le savoir en vie. Soudain, il se sentit étreindre avec une telle force qu’il hurla de douleur. Tout son corps était sensible, abîmé et Klarion ne faisait qu’appuyer sur ses hématomes. Aord tomba à la renverse, incapable de soutenir le phytomancien.

    « J’ai cru que je ne te reverrai jamais, s’étrangla le frère »

    Ses bras entourèrent Klarion et il le serra contre lui, absorbant les soubresauts de sa poitrine à mesure que ses sanglots fusaient. Il sécha chacune de ses larmes, ne disant absolument rien. Il ne voulait que ressentir sa présence à ses côtés, car au milieu de cet enfer, c’était la seule chose réelle à laquelle il pouvait s’accrocher. Des larmes roulèrent également sur ses joues, mais c’était des larmes de soulagement. Il était contre lui, ils étaient réunis et Aord ne lui en voulait pas, jamais il ne lui en aurait voulu. Il se souvint des mots que son amant avait prononcés avant qu’ils se quittent.

    « Klarion, arrête … ne pleure pas, l’implora-t-il. Arrête, s’il te plaît … »

    La voix du frère se brisa. Cela lui faisait tellement de mal de le voir dans cet état, mais Klarion ne s’arrêtait plus de pleurer et à chaque fois qu’une larme roulait sur son visage Aord se sentait un peu plus mal. Il le serra dans ses bras, malgré les blessures, malgré les ecchymoses. Sa main caressait l’arrière de son crâne pour le réconforter, jamais il ne lui en voudrait.

    « Klarion, je t’en supplie. »

    Aord obligea le jeune homme à le regarder dans les yeux.

    « Je te pardonne, Klarion, je te pardonne tout car … car … je t’aime »

    Aord l’embrassa pour stopper ses pleurs, il l’embrassa parce qu’il en avait envie, parce qu’il le voulait, parce qu’il l’aimait et qu’il ne voulait pas le voir se torturer ainsi. Il ne le laissa pas parler, capturant ses lèvres pour les empêcher de proférer d’autres mots assassins contre lui. Il l’étreignit pour l’empêcher de souffrir, pour lui apporter sa présence, pour le rassurer. Il attendit de longues minutes que ses pleurs se tarissent, l’embrassant encore et encore jusqu’à il les étouffe.

    « Je … je suis tellement heureux de te revoir Klarion, si tu savais comme j’ai eu peur … je. »

    Il se redressa, gardant Klarion contre lui.

    « Je … Tu … qu’est-ce qu’on va bien pouvoir faire maintenant qu’ils t(ont capturé également ? »

    Aord jeta un regard inquiet à son amant et glissa sa main au sol pour permettre à Naya de grimper sur son épaule. Ils étaient tous les deux coincés maintenant et le frère n’entrevoyait aucun espoir de fuite.

    Klarion BrandoSouverain de la flore
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    Re: Ronces étrangleuses
    Ven 6 Aoû 2021 - 15:41 #
    Klarion hoquetait contre Aord alors que ses sanglots prenaient fin. Les paroles du prêtre le rassuraient et le tiraient progressivement hors du fond au sein duquel il sentait être tombé. Les paroles d’Aord, se retrouver à nouveau dans ses bras, ses baisers, tout redonnait espoir à Klarion et arrivait à lui réchauffer le cœur. Il retrouvait cette euphorie, cette béatitude, qu’il avait ressenti lorsqu’il avait embrassé Aord pour la première fois. Les mots de son aimé lui procuraient la force dont il avait besoin, de cette lumière au milieu d’un brouillard noir. Retrouvant peu à peu sa respiration, Klarion passa ses mains sur ses joues pour balayer les larmes qui y perlaient toujours avant de renifler bruyamment. Il regarda Aord se baisser pour ramasser Naya, la petite slime s’agitant avec allégresse quand elle se retrouva dans la paume de son maître. La gluante semblait toute aussi heureuse que lui de retrouver son ami. Et, aussi agaçante Klarion pouvait la trouver, elle avait accepté de mettre leurs différends de côté et de coopérer pour le retrouver, l’aidant à ne pas se faire surprendre par le sbire de Marcel dans sa planque, restant cachée de la Cour.

    Klarion regardait Aord alors qu’il se redressait. Quelle était la suite du plan ? Il l’ignorait lui-même, tout ce qu’il voulait c’était retrouver le prêtre. Mais maintenant quoi ? Il savait qu’il s’était jeté dans la gueule du loup. Et même s’il avait coincé un bâton entre ses mâchoires, les crocs du loup pouvaient toujours se refermer brutalement, sans crier gare. Il n’avait plus le choix, il fallait qu’ils agissent dans l’urgence et la précipitation, mais qu’ils se battent pour survivre. Mais ce qui inquiétait véritablement Klarion ce n’était pas Marcel, ni de s’échapper de son quartier général, c’était de contenter la Cour. Il devait le faire, il n’avait pas non plus le choix. Soit il accomplissait ce pourquoi il les avait appelé, soit il mourrait. Toutefois, le phytomancien voulait absolument épargner tout cela à Aord.

    - Je les ai mis en déroute grâce à un mensonge, expliqua-t-il. Mais ça ne durera pas. On doit profiter de ça pour agir, et vite. Il y a juste un tout petit hic

    Klarion s’interdisait formellement de parler du marché qu’il avait passé avec la Cour. Il s’interdisait même de mentionner ne serait-ce que leur nom au prêtre. Il y avait mille et unes raisons d’être terrifié par la Cour des Griffons. On racontait qu’ils maintennaient leurs ergots grâce à des enchantements de nécromancie, qu’ils convoitaient les artefacts du passé pour accomplir les pire rituels possibles, et qu’ils étaient bien plus vieux qu’on le pensait. Mais ce qui angoissait Klarion par-dessus tout, c’était qu’ils décident de s’en prendre à Aord pour l’atteindre. Face à Marcel, il pouvait se battre, mais face à la Cour, il courrait à sa perte s’il y allait seul. Et à moins de fédérer l’ensemble des criminels, ou la Garde, ou une faction suffisamment forte pour leur faire face, il n’avait aucune chance. Il sortit le cristal violet et le montra à Aord, le gardant dans sa main pour qu’il ne le touche pas. Il ne voulait pas que le prêtre touche quoi que fut ce chose confiée par l’Ingénieur.

    - J’ai demandé de l’aide avant de venir ici, on m’a donné ce cristal et on m’a dit de l’appliquer sur Don Marcel. Je t’en supplie, je suis prêt à t’implorer à genoux s’il le faut, ne me demande pas qui me l’a donné, ni pourquoi je dois l’utiliser. Mais je dois le faire, je n’ai pas le choix. Je peux te sauver de Marcel, je peux te sauver de la Garde, mais face à ceux qui m’ont donné ce cristal, je ne peux rien. Alors, je t’en conjure, fais moi confiance.

    Il s’avança vers la porte en glissant le cristal dans une de ses poches intérieures, la boule au ventre. Aord ne lui avait toujours pas répondu, il avait l’air perdu dans ses pensées. Klarion espérait qu’il le laisse s’en tirer comme ça, mais rien n’était moins sûr. Le religieux allait peut-être insister pour savoir ce qui se tramait, et réitérer un refus pourrait peut-être le rebuter. Klarion se sentait sur la corde raide, une corde entourée de lames effilées et de pièges infernaux. Le jeune homme ne pouvait se permettre de tomber, il ne serait pas le seul à vaciller dans cette situation, et ça lui était insupportable. Il s’arrêta à mi-chemin, un soubresaut apeuré dans la voix :

    - Il a des forces en ce monde qui devraient demeurer dans l’ombre, et dont je veux te préserver.

    Finissant sa marche vers la porte, il posa sa main sur la serrure et, faisant pousser une racine, la brisa de l’intérieur. La porte s’entrebailla sans s’ouvrir totalement, poussée par le déverrouillage forcé du loquet. Passant un œil à l’extérieur, il ne vit personne dans le couloir du sous-sol menant à leur cellule. Les sbires de Marcel devaient toujours être en plein branle-bas de combat pour se préparer face à un assaut fantôme qui ne surviendrait jamais. Et où était Nerio dans tout ça ? Peut-être qu’ils se recroiseraient ? Klarion s’en retourna vers Aord, attendant qu’il ne réagisse.

    - On y va ? Tu es prêt ?
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    Re: Ronces étrangleuses
    Sam 7 Aoû 2021 - 19:01 #
    Les pleurs se tarirent et Aord put sentir que Klarion se détendait. Il l’entoura de ses bras, glissant ses mains dans son dos, posant son front contre le sien. Depuis tout le temps qu’il avait passé dans ce cachot, lui aussi avait besoin de réconfort. Il ne dit rien, se contentant d’écouter les malheureuses justifications du criminel. Le frère se sentait tellement mal qu’il ait dû se mettre en danger par sa faute.

    « Klarion, qu’est-ce que tu as fait … Je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose, pas à cause de moi. Dis-moi que tout va bien se passer … »

    Il le serra violemment contre lui, ses bras renforcés par sa peur de le perdre. Il le serra tellement fort, qu’il lui coupa le souffle un instant. Se rendant alors compte qu’il lui faisait mal, Aord s’écarta un peu honteux. Le ton de Klarion l’avait tellement inquiété et l’idée d’encore le perdre l’avait poussé à l’attraper comme si sa vie en dépendait. Il glissa sa main dans la sienne.

    « Je … je te fais confiance, mais s’il te plaît, ne fais rien de trop dangereux. Je ne veux pas te perdre. »

    Il tira sa main jusqu’à son visage, l’enveloppant entre ses deux mains avant d’y déposer un baiser. Son regard luisait de cette confiance toute particulière qu’il avait en lui. Sur son épaule, Naya émit un petit cri, la même lueur luisait dans ses yeux.

    « Tu vois Naya aussi est avec toi »

    Il passa ses doigts le long de sa joue avant de l’accompagner à la porte.

    « Je suis prêt, acquiesça-t-il sans l’ombre d’un doute ».

    Ils s’engouffrèrent dans le couloir. De nombreuses voix se réverbéraient sur les murs. On pouvait entendre au loin le brouhaha des salles de jeu. Ils avancèrent tous les deux sur la pointe des pieds, longeant le mur tel des voleurs. Aord suivait Klarion comme son ombre. Il glissa la petite Naya dans sa poche pour être sûr qu’elle ne les révèle pas aux yeux de tous en poussant un cri mal venu.

    Ils avancèrent à l’opposé du bruit pour ne pas risquer de croiser des hommes de main du Don. Aord attrapa la main de Klarion pour lui chuchoter à l’oreille.

    « Il nous faut des armes, sans ça on va se faire massacrer … »

    Son amant acquiesça et ils continuèrent leur route. Après quelques pas, une délicieuse odeur se fit sentir. Aord échangea un regard avec Klarion et ils comprirent out de suite de quoi il retournait : la cuisine. Il pourrait peut-être y trouver un couteau ou un outil qui pourrait faire office d’arme. Le nécromancien espérait aussi y trouver un animal mort sur lequel il pourrait utiliser sa magie. Soudain Klarion s’arrêta et Aord se plaqua immédiatement au mur. La cuisine était occupée par deux hommes de main armés d’épées. Ils ne les avaient pas encore remarqués.

    Aord s’agenouilla et sortit Naya de sa poche pour la déposer au sol. La petite slime tremblait, mais le frère lui jeta un regard sévère, s’ensuivit le plus étrange des jeux de regards dans le silence le plus complet. Naya tremblait comme une feuille, mais son maître la poussait vers la cuisine. Il finit par gagner et la petite slime sautilla jusque dans la pièce. Le religieux regarda Klarion et fit le même mouvement que lorsqu’il utilisait son pouvoir pour faire pousser des plantes.

    Naya grimpa sur une étagère, utilisant on corps collant pour gravir tous les obstacles. Quand elle fut en haut, elle sauta devant les deux criminels en les insultant dans la langue des slimes. Pour un humain, cela ressemblait plus à une cacophonie de couinement trop mignon, mais à n’en pas douter, elle venait d’insulter leur ancêtre ! Aord espérait qu’elle gagne assez de temps pour que Klarion fasse pousser des racines suffisamment solides pour entraver les deux hommes.
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: Ronces étrangleuses
    Dim 8 Aoû 2021 - 14:47 #
    Klarion observa Naya lancer son attaque surprise sur les deux sbires commis de cuisine avec la dextérité d’un lièvre, et tout autant de vivacité. Le jeune homme savait qu’elle était plutôt rapide, mais il ne s’attendait certainement pas à ce qu’elle soit capable d’accomplir une telle prouesse. Si bien qu’il fut tout aussi surpris que les deux gredins en admirant, de loin, la petite gluante faire son entrée fracassante en leur arrivant droit en pleine figure. Dès l’instant où Naya atterrit dans le visage du plus grand, ce dernier, un gaillard trapu sans un poil sur le caillou, étouffa un cri rauque et recula vivement, heurtant un grand buffet rempli de condiments et épices. Plusieurs pots dégringolèrent au sol, libérant leur contenu sur le carrelage poisseux. Poudres, pâtes, liquides et vinaigres, tout se libéra sur sur le sol pour former une flaque huileuse et informe. Naya sur son visage, le bandit surpris balaya devant lui avec sa lame, manquant de trancher en deux le nez de son comparse qui tentait de l’aider. Ce dernier, un malingre à l’air benêt, lâcha un juron avant de basculer en arrière pour esquiver le coup d’épée du gros sbire. Glissant sur la marre que son compère avait libéré au sol, il lâcha son épée qui partir mourir sous une table dans l’ombre de la cuisine.

    - Idiots

    Klarion comprit que c’était à lui d’intervenir. Naya avait été prompt, mais elle ne tiendrait pas éternellement sur la figure de ce rustre et le chétif sonné sur le carrelage finirait par se relever tôt ou tard. Sortant de sa cachette, il posa la main sur un des murs pour faire pousser tout un assortiment de racines avant de les animer et les faire fondre sur les deux hommes.Toujours aussi vive, Naya sauta du visage de sa victime pour se coller et le buffet et glisser tout doucement sur le sol, attrapant un brin de persil au passage  pour se le fourrer dans la bouche. Enroulant les deux sbires avec les racines, Klarion formait un véritable cocon végétal autour d’eux pour les empêcher de bouger ne serait-ce qu’un ongle. Entravés, les deux gigotaient comme des mouches prises dans les fibres d’une toile, sachant pertinemment que jamais ils ne pourraient se libérer seuls.

    - Et voilà, on peut récupérer leurs armes. Je ne savais pas que Naya était aussi… compétente.

    L’intéressée gazouilla joyeusement avant de s’en retourner vers Aord. Le phytomancien fit quelques pas dans la cuisine, évitant soigneusement la flaque nauséabonde au sol pour ne pas en maculer ses chausses. Puis, arrivant auprès d’une table, il prit une cruche d’eau avant d’en prendre une bonne rasade afin de se requinquer. Il n’avait pas vraiment besoin d’arme mais, par mesure de précaution, ramassa l’épée que le maigre avait envoyé valser sous les chaises. C’était une épée de taille moyenne à la lame ondulante, comme une vipère. Elle tenait plus d’une arme de cérémonie que de combat, le malfrat avait dû la dérober à un enchanteur ou un cultiste avant d’en faire son trésor personnel.

    - Je me souviens des souvenirs dans lesquels tu arrivais à ramener à la vie des carcasses d’animaux. Peut-être que tu peux trouver quelque chose d’utile à réanimer ? Sinon, il y a à manger si tu veux te restaurer. Tu dois mourir de faim depuis tout à l’heure, on va avoir besoin de forces pour la lutte à venir

    Klarion regardait Aord ramasser l’arme du loubard que Naya avait assaillit. Peut-être avait-il déjà une idée en tête ? Ou avait-il repéré des cadavres dans la pièce ? Don Marcel mangeait comme cinq hommes bien bâtis à lui seul, il devait bien y avoir des restes de ses repas quelque part, ne serait-ce qu’un assortiment d’os qu’ils pourraient peut-être assembler ensemble ? De plus, le parrain était un grand amateur de viande exotique. Le jeune homme ne serait pas surpris de trouver de la viande de jagras ou de harpie à la place des habituelles venaisons appréciées des plus fortunés. Laissant son bien aimé décider lui-même, Klarion réfléchissait à comment approcher Don Marcel. Il pouvait être n’importe où dans cette fourmilière, et seuls contre tous ils n’iraient pas loin. L’approche furtive était, de loin, la plus indiquée. Mais leur trio, Naya oblige, pouvait causer pas mal de remue-ménage avec leurs pouvoirs, il fallait juste qu’Aord trouve le bon corps pour en faire sa marionnette. Aussi, peut-être que leur trio pouvait se transformer en quatuor ?

    - En entrant, j’ai été accueilli par un homme que j’ai connu quand j’étais gamin des rues, Nerio. On était en bons termes, même si nos chemins ont fini par se séparer. Il y a plusieurs années, il m’a demandé des décoctions et potions pour sa sœur malade. Peut-être que l’on peut s’en faire un allié, ou avoir des réponses sur où trouver le Pingouin. Nerio n’avait pas l’air ravi de me voir au pied du mur, il doit être en plein dilemme moral.

    Voyant Naya engloutir son persil et attraper des pelures de pommes de terre sur un coin de table, Klarion en venait à se dire que, finalement, elle était une bonne petite. Aord était toujours là, plus calme qu’auparavant, l’écoutant simplement.

    - Il faudrait qu’on le trouve vite avant que les hommes de Marcel découvrent que je leur ai raconté n’importe quoi. Nerio est le type qui m’a escorté jusqu’à ma cellule, il ne devrait pas être bien loin. Dépêchons-nous de le retrouver !
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Ronces étrangleuses
    Dim 8 Aoû 2021 - 23:15 #
    Il y avait déjà assisté, il l’avait déjà subi, mais voir Klarion à l’œuvre était toujours aussi impressionnant. Auparavant il tremblait en le voyant utiliser son pouvoir, mais maintenant il était fasciné. Voir les racines pousser et s’enrouler autour des deux malabars … C’était incroyable et le regard d’Aord brillait quand il regarda Klarion. Il se leva et passa le seuil de la porte. Un léger frisson le parcourut quand il passa à côté des deux prisonniers. Un petit sourire contrit se dessina sur son visage.

    « Je sais ce que ça fait, ironisa-t-il. »

    Il se baissa pour récupérer l’épée. C’était une arme standard, mal équilibrée, du travail pas cher. Le frère saisit sa poignée à pleines mains et fit plusieurs moulinets et mouvements dans le vide. Ce n’était clairement pas le genre d’armes qu’il avait l’habitude de manier, mais elle ferait l’affaire. Il n’en aurait pas d’autres de toute façon. Celle de Klarion avait l’air bien trop légère pour lui, il n’aurait aucun impact avec.

    « Bon j’imagine que ça fera l’affaire, mais je ne cracherais pas sur quelque chose de mieux. »

    Aord se remémora ce qu’il avait dû faire la dernière fois qu’il avait tenu une épée. Il ne savait vraiment pas s’il serait capable de s’en servir pour attaquer les hommes du Don. Tout ce sang qu’il avait déjà versé … il ne voulait plus avoir à le faire. Si seulement Klarion pouvait immobiliser tout le monde avec ses racines … mais ça ne pourrait pas se passer aussi bien tout du long.

    La petite Naya vint sautiller sur son pied toute fier d’avoir réussi sa diversion. Aord se baissa pour la prendre et déposa un petit baiser sur son corps froid.

    « Mais oui Naya tu es la meilleure ! »

    Aord aurait juré l’avoir vu rougir, malgré son corps noir. Elle l’avait bien mérité. Il se tourna vers Klarion le sourire aux lèvres.

    « Toi aussi tu as été génial, je suis content de voir que vous vous entendez mieux tous les deux »

    Naya échangea un regard avec Klarion avant de lever ses petits bras en poussant un cri de victoire arrachant un rire à son maître. Un soupir de consternation sembla s’échapper de derrière le mur de racines, mais personne n’y prêta attention. Aord écouta la proposition de Klarion qui en soit était pas mauvaise, mais pour cela, il fallait encore qu’Aord trouve quelque chose à relever dans cette cuisine.

    « Je … oui c’est une bonne idée, mais je ne pourrai le faire qu’une seule fois avec un bout de corps, donc avec un steak, au risque de me tromper et de tomber sur un veau, ce qui ne nous aiderait pas vraiment … »

    Aord commença à fouiller les placards à la recherche d’un morceau de viande quelconque, mais étrangement il n’en trouva pas. Comment cela se faisait-il ?

    « Je ne trouve rien, il devrait au moins y avoir un jambon dans cette cuisine par la déesse ! »

    Il retourna tous les placards, mais ne trouva rien du tout à son grand étonnement. Aord réfléchit un instant …

    « Tu crois qu’ils seraient en train de la manger ? Si c’est le cas, cela veut dire que le Don a des invités … mais au moins on sait où le trouver. »

    Le frère se rapprocha de Klarion pour lui prendre la main et plonger son regard dans le sien.

    « Je ne connais pas ton ami, mais je te fais confiance si tu dis qu’il pourrait nous aider. Je te suivrais quoique tu décides ».

    Il caressa le dos de sa main de la pointe de son pouce.

    « Si tu veux que je t’aide, j’ai vu un énorme bois de cerf accroché comme un trophée dans le salon, avec lui je pourrai créer un mort-vivant assez imposant pour nous aider. Tu crois que ton ami se trouverait dans cette direction ? »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
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    Re: Ronces étrangleuses
    Mar 10 Aoû 2021 - 0:00 #
    Klarion et Aord sortaient de la cuisine à tâtons, jetant un œil dans le couloir pour s’assurer qu’il n’y avait personne. Les rideaux avaient été tirés devant les fenêtres bordant le grand corridor tandis que, sur celles où il n’y en avait pas, les volets avaient été fermement rabaissés. Il leur était impossible de voir quoi que ce soit à l’extérieur, ni le ciel nocturne, ni l’état de la rue. Mettant le pied hors de la cuisine, Klarion gardait la main d’Aord dans la sienne, ne voulant plus le lâcher depuis qu’il l’avait retrouvé. La peur qu’il avait éprouvé devant toute la soirée ne s’était pas encore envolée, la Cour des Griffons faisant toujours planer un couperet acéré au-dessus de sa tête. Néanmoins, Aord était là, avec lui. La séparation lui avait été insupportable, d’autant plus qu’il en avait été la cause, ne lui rendant la situation que plus atroce à endurer. Dorénavant, il n’avait plus envie de le quitter. Juste le garder dans ses bras, juste l’aimer.

    Naya gazouilla doucement pour alerter les deux hommes de la venue de bandits, derrière eux. Klarion fut entraîné par Aord derrière un rideau afin de se cacher de ces nouveaux venus. Plaqué contre le mur, couvert par son grand amour, le phytomancien observait au travers des tentures de velours pour voir ceux qui se dirigeaient dans leur couloir. C’était un groupe de cinq hommes, visiblement sortant d’une salle de stockage vu tout le barda qu’ils transportaient sur leurs bras. Même s’il voyait mal, Klarion ne reconnut pas la silhouette de Nerio parmi eux, quand bien même ils furent tout aussi bien bâtis. Leur attirail cliquetait, comme des lames que l’on fait tinter les unes contre les autres. Don Marcel semblait bien résolu à armer jusqu’aux dents tous ses sbires. Klarion ne serait pas surpris si même ses esclaves avaient été munis de moyens de défense, bien que ces derniers seraient plus susceptibles de se retourner contre leur maître qu’autre chose. Mais, on ne savait jamais avec le Pingouin…

    - Allons-y, chuchota Klarion lorsqu’ils furent bien passés.

    Aord tout contre lui, il sentait la chaleur de son souffle sur sa joue. S’ils n’avaient pas été au milieu d’un tel guêpier, Klarion aurait bien profité d’un moment de tendresse avec son cher et tendre. Malheureusement, il devrait remettre cela à plus tard et se concentrer sur leur survie avant toute chose. Se glissant hors des rideaux, le jeune homme tentait de se repérer au milieu de ces couloirs afin de retrouver le salon dont parlait Aord. Il devait sans doute s’agir de celui dans lequel il avait été accueilli par Marcel. Ceci étant, il n’avait pas remarqué de ramure accrochée au mur, il était suffisamment distrait par la gravité de la situation et l’attitude méprisable du parrain. Longeant les portes, il tentait d’écouter pour voir si des gens se trouvaient de l’autre côté, mais entendait difficilement quoi que ce soit. Il ne lâchait pas la main d’Aord et continuait de progresser en avant, tâchant de se rappeler tant bien que mal le chemin qui lui avait fait emprunter Nerio en l’emmenant en cellule.

    - Je crois que c’est ici

    Klarion semblait hésitant mais fut soulagé, en ouvrant prudemment la porte, de tomber sur le salon dans lequel il avait vu Don Marcel. Vide, la table n’avait même pas été débarrassée, la carcasse du homard jonchant le bois verni, également maculé de taches de vin. Par terre, la vaisselle avait été jetée, des restes de verre et de bouteilles complètement brisés au milieu de morceaux de chitine de crustacé. Une pestilentielle odeur de tabac flottait dans l’air, tout sentait le vieux cigare au point que ça marquait sans doute le mobilier. Klarion nota la présence d’un cendrier, également brisé, déversant des monceaux de cendres et de mégots écrasés derrière un pied de commode dont la peinture d’or s’écaillait déjà.

    - Je n’avais pas vu ces bois en entrant, tu avais raison. Ils étaient bien là !

    Le trophée de chasse dont le prêtre parlait était bien là, mais l’éco-terroriste n’avait pas été capable de le voir en entrant tout à l’heure, les bois se trouvant dans un angle qui était hors de son champ de vision. Les ramures étaient bien impressionnantes, typiquement le genre de bizarrerie que Don Marcel aimait collectionner. Klarion estima que même la Cour pourrait être intéressée par pareil objet pour leur obscurs rituels. Après tout, les vestiges de créatures étaient souvent utilisés pour tout un tas de potions et sortilèges.

    - Fais ce que tu as à faire, dit calmement Klarion à son amour. Mais ne nous attardons pas ici.

    Le soulagement de Klarion fut de courte durée. Au même moment où il acheva sa phrase, trois hommes entrèrent par la même porte qu’ils avaient passé. Parmi eux se tenait Nerio, sous le choc de voir les prisonniers hors de leur cellule. Jetant un regard abasourdi à Klarion, il ne savait trop quoi faire tandis que les deux autres s’avançaient déjà, menaçants.
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
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    Re: Ronces étrangleuses
    Mer 11 Aoû 2021 - 15:46 #
    Averti par Naya, Aord tire Klarion derrière les rideaux, le plaquant contre son torse pour que leurs corps prennent le moins d’espace possible. Le phytomancien semblait observer le groupe d’homme à travers le tissu, mais Aord ne pouvait les voir puisqu’il leur tournait le dos. Il ne voyait que son amour, lui aussi était apeuré. Il le sentait. Il n’avait pas peur de ce Don Marcel, Aord voyait bin qu’autre chose le préoccupait. Après un instant d’hésitation, il glissa sa main dans la sienne, serrant ses doigts avec vigueur. Tout cela dans le plus grand silence, seuls les battements de son cœur contre sa poitrine lui indiquaient ce que ressentait Klarion en ce moment. Oh Lucy, faites que ce cauchemar prenne fin, psalmodia-t-il intérieurement.

    Ils sortirent de leur cachet et Aord jeta un regard inquiet aux alentours. Personne à l’horizon, c’était rassurant. Qu’est-ce qu’il pouvait bien se passer ici pour qu’il y ait à la fois une telle agitation et si peu de personne dans les couloirs ? Etait-ce la faute de Klarion ? Ce fameux mensonge qui lui avait valu de garder la vie sauve ? Ils reprirent leur route, se glissant comme des chats le long des murs.

    « Tu … tu sais ce qu’il se passe ? Pourquoi toute cette agitation ? s’inquiéta Aord. »

    Mais Klarion ne lui répondit pas tout de suite, car ils étaient arrivés au salon. Aord se glissa à sa suite dans la pièce, ne regardant même pas le désordre qui gisait un peu partout. Il ne voyait que les fameux bois qu’il avait vus lors de son interrogatoire. Maintenant qu’il les regardait de plus près, il ne pouvait que s’étonner de leur taille inhabituelle. Il s’en approcha immédiatement et s’attela à les décrocher du mur. Chaque faisait presque sa taille, comment un cerf pouvait avoir une pareille ramure ? Son cou finirait par céder sous leur poids.

    « Je m’en occupe, attends un instant … Je risque d’être un peu étourdi après fais attention à moi. »

    Aord souleva les ramures au niveau de sa bouche et souffla une première fois dessus. La brume entoura les trophées, mais il ne se passa rien. Évidemment, vu la taille de la bête il faudrait un peu plus …

    Aord souffla une deuxième fois, ressentant presque immédiatement sa tête tourner légèrement, mais là encore il ne se passa rien, la brume resta autour des bois sans les régénérer. Son pouvoir était-il inopérant ? Il regarda sa cheville, mais son tatouage était toujours bien là, intact. Étaient-ce de faux bois alors ? Des morceaux de bois taillé pour ressembler à un trophée d’exception.

    « Je ne comprends pas, ça ne marche pas … »

    Aord souffla une troisième fois au moment où trois hommes de main entrèrent dans la pièce. La peur s’empara d’Aord quand il les vit. Il était incapable de tenir debout après cette troisième utilisation, ils ne pouvaient pas arriver à un plus mauvais moment.

    « Klarion ! cria Aord, terrifié alors qu’il chancelait se rattrapant de justesse à une table. »

    Les deux bois tombèrent sur le sol, toujours enveloppés de brume sans qu’il ne se passe rien. Les deux premiers hommes chargèrent, l’un sur le prêtre, l’autre sur Klarion. Le frère attrapa son épée et tenta de parer l’attaque qui le visait, mais il voyait flou. Sa lame sembla passer à travers celle de son adversaire. Il entendit un choc mécanique et une douleur fulgurante lui transperça l’épaule gauche. Il hurla de douleur et ses jambes chancelantes se dérobèrent sous ses pieds. Le criminel sorite sa lame de la plaie, tordant l’épaule d’Aord qui glapit de douleur. Il souffla alors une quatrième fois, car c’était la seule chose qui lui restait à faire. Immédiatement, il se vit à vomir du sang par à coup. Son adversaire avait dégagé son épée et les bois restaient inertes. Il la brandit au-dessus de lui, Aord n’arriverait pas à parer alors qu’il vomissait ses tripes sur le sol.

    « Putain de merde bougez saloperie ! hurla-t-il en poussant son dernier souffle. »

    Il s’étala sur le dos, sentant son esprit glisser lentement vers l’inconscience. Le reflet de l’épée au-dessus de sa tête lui annonçant qu’il ne se réveillerait pas. Il contempla le nuage de brume au-dessus de lui, résigné à mourir. Il n’eut qu’une seule pensée avant de s’évanouir : Lucy, protégez-le, faites qu’il ne meurt pas …

    Une giclée de sang lui aspergea le visage alors qu’il sombrait dans l’inconscience.

    ~~~
    « Eh le prêtre, reste avec nous, hurla Nerio en direction d’Aord qui venait de tourner de l’œil. »

    Il arracha son épée du torse de son ancien collègue qu’il avait attaqué en traître dans le dos pour l’empêcher d’achever le prêtre étendu sur le sol. Il se pencha pour prendre son pouls et soupira de soulagement. Il était encore en vie, mais son épaule saignait abondamment. L’homme s’agenouilla pour essayer de retenir l’écoulement de sang.

    « Merde, merde, merde, jurait-il en bandant la blessure n’importe comment ».

    Il chercha la personne pour laquelle il avait tout risqué.

    « Klarion bien m’aider, vite, ton ami il … OH BORDEL »

    Un crissement s’outre-tombe retentit et les bois ensorcelés glissèrent parmi les déchets emportés par un tourbillon de brume. Cette dernière se tordait et se gonflait dans tous les sens, essayant de prendre une forme, massive, monstrueuse. Deux yeux se formèrent puis une bouche, un crâne, un corps et tout le reste prirent une forme solide. La bête se leva, immense, 4m au bas mot. Le fielon mort-vivant se leva, cognant le lustre au plafond et détruisant une partie du plafond. Une fois debout, il hurla et son cri retentit dans toute la bâtisse révélant leur position à tout le monde.

    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: Ronces étrangleuses
    Mer 11 Aoû 2021 - 21:35 #
    - Qu’est-ce que tu

    Klarion poussa un cri de surprise lorsque, en se retournant, il vit un tourbillon de fumée bleutée tournoyer en spirale près d’Aord. Au sommet du tourbillon de brume, les imposantes ramures trônaient en couronne sur ces rubans ésotériques. Nerio, tout aussi sidéré, admirait le spectacle, figé par la peur. Même le sous-fifre qu’affrontait Klarion s’était arrêté dans leur passe d’arme, sidéré par ce qui était en train de se produire. Petit à petit, la brume devint une masse informe qui s’affinait doucement pour dessiner les traits d’un monstre cauchemardesque. Ce qui avait été un jeune fiellon se dressait à présent dans le salon, détruisant le plafond au-dessus de sa tête en le perçant de ses bois. Des morceaux de planches tombèrent de chaque côté de son crâne. Et, alors que l’horrible créature finissait de se former, Klarion nota la présence d’Aord, gisant au sol, baignant dans une mare de sang.

    - NON !

    Cette dernière vision emplit Klarion d’encore plus d’effroi que le cadavre titanesque se formant devant lui. Il avait fait tout ce chemin pour Aord, il était venu pour lui, s’était damné auprès de la Cour des Griffons pour lui, il refusait de le perdre, jamais ! D’un bref coup d’œil, il vit le cadavre du deuxième sbire aux pieds de Nerio, l’épée de cette dernière couverte de sang, ainsi que sa tunique. Alors comme ça, il avait décidé de les aider, la chance pointait enfin le bout de son nez pour immédiatement repartir, pensait le phytomancien en reposant son regard sur son bien-aimé blessé. Klarion fit quelques pas pour se diriger vers eux, mais Nerio le fit revenir à la réalité :

    - Klarion, attention !

    Il avait complètement oublié le deuxième malfrat toujours derrière lui. Ce dernier avait profité de l’invocation du fiellon et de l’inattention du phytomancien pour tenter de l’embrocher par derrière. Grâce à Nerio, Klarion eut la présence d’esprit de se retourner et reculer au dernier moment pour esquiver le coup d’estoc dont il avait été la cible. Titubant en arrière, il trébucha et s’étala sur le parquet, lâchant la lame ondulée qu’il avait récupéré aux cuisines. Le bandit leva à nouveau le bras, se préparant à asséner un nouveau coup. Cette fois, il ne pourrait pas le rater. Klarion ne pouvait pas rouler, ni à droite ni à gauche, à cause de la table à manger et du mur, il était fait comme un rat ! Le souffle de Klarion fut instantanément coupé. Au même instant, le fiellon mort-vivant s’anima comme une statue prenant vie. S’avançant vers Klarion, il détruisit la table et envoya valser plusieurs chaises aux quatre coins de la pièce. Tétanisé, Klarion n’arrivait pas à bouger, se demandant ce que la bête allait faire. Mais, contre toute attente, le monstre empoigna le sbire avec une de ses pattes. Klarion profita de la destruction de la table pour s’accroupir et rouler jusqu’aux pieds de Nerio, ce dernier aidant le jeune homme à se remettre sur pieds.

    - C’est pas vrai… Chuchota Nerio.

    Sous la patte du fiellon, le sbire hurlait et gesticulait, mais rien n'y faisait, le fiellon était plus fort. Il pressa simplement ses doigts et ôta la vie de l’infortuné prisonnier de ses griffes. Klarion et Nerio purent entendre un intense craquement, comme une feuille morte que l’on brise. Le monstre relâcha sa victime, cette dernière tombant inerte sur le sol, comme une poupée de chiffon désarticulée. Suite à cela, le fiellon reprit sa position initiale, tel un automate ayant terminé son cycle et ne bougea plus d’un pouce. On aurait dit une gargouille descendue de sa cathédrale et posée là, au milieu du salon dévasté. Klarion se rua vers Aord, les larmes lui montant aux yeux, arrachant un morceau de sa cape pour le nouer autour de son épaule dégoulinant de sang. Nerio arriva derrière lui, gardant toujours un œil sur le cadavre réanimé, il ne se sentait pas en confiance et ça se sentait.

    - Il faut se tailler. Don Marcel va débarquer avec tout ce raffut, et il sera pas seul.

    - J’espère bien qu’il va débarquer, je ne partirai pas avant de l’avoir réduit en charpie, répliqua Klarion d’un ton grave.

    - Alors c’est vrai ? T’es vraiment allé voir la…

    - Tais-toi, le coupa le phytomancien. Pas devant lui.

    - Il est inconscient, il nous entend pas.

    - Je m’en fiche. Pas devant lui, pas pour parler d’eux.

    - Je vois, obtempéra Nerio. Qu’est-ce qu’on fait ? On peut pas le laisser ici.

    - On ? Tu restes avec moi ?

    - Tu comptes buter Marcel, ça sent le roussi et j’ai pas envie d’être du mauvais côté. Surtout si t’es allé les voir. Ce fiellon là, on fait comment pour le contrôler ?

    - On peut pas. C’est une création d’Aord. Il est inconscient mais a dû lui donner une consigne par sa simple volonté avant de tomber dans les vapes, sinon il n’aurait pas bougé. Le truc, c’est que je ne sais pas ce qu’est cette consigne, ni ce qui l’a motivé à bouger.

    - Il s’est précipité sur l’autre débile quand t’es tombé par terre, doit y avoir un truc avec toi.

    - Si c’est le cas alors je ne dois pas bouger d’ici, Aord serait en danger en plus de ça, je refuse de laisser seul, surtout dans cet état, et d’autant plus si son invocation ne réagit qu’à ma mise en danger.

    - Bouge pas. J'vais dire à Marcel que je t’ai acculé ici et qu’il a plus qu’à venir t’achever, ça va le faire venir, la soif de sang.

    - On a pas de meilleur plan de toute façon. Nerio, merci.

    - T’étais là pour Gina.

    Sans un mot de plus, il quitta la pièce, laissant Klarion seul dans le salon. Il s’en retourna près d’Aord, l’entourant d’une barrière de ronces pour le protéger d’éventuels assaillants. L’éco-criminel avait perdu la trace de Naya, elle devait être avec son maître, cachée dans son vêtement. Le jeune homme espérait que l’escorte de Marcel ne serait pas trop grande, même s’ils avaient un jeune fiellon avec eux.

    Bientôt, il ferait face au Pingouin, pour la dernière fois.
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Ronces étrangleuses
    Ven 13 Aoû 2021 - 12:21 #
    Aord flottait au milieu de nulle part, totalement paralysé. Son corps n’était que douleur et souffrance. Au loin, il entendait des voix, des bruits, des sons, des cris, mais rien n’arrivait à l’atteindre. Il se sentait las, épuisé, pas physiquement, mais mentalement. Il repensa à Klarion, à sa chaleur, à son odeur, elles occupaient totalement son esprit. La situation échappait à tout contrôle et il se vidait de sa force. Allait-il le perdre ?

    Dans le silence du néant, il pleura.

    ~~~
    « Butez-moi ce fils de pute de Brando ! hurla Don Marcel depuis le couloir »

    Ses hommes de main entrèrent en force dans le salon ne sachant pas ce qui les y attendait. Réagissant à leur agressivité et à l’ordre du Don, la créature d’Aord les accueillit comme il se doit. D’un large mouvement de la tête, le fielon balaya les premiers arrivants comme des poupées de chiffons. Leurs os craquèrent sous l’impact alors qu’ils volaient pour se fracasser contre un mur. Certains essayèrent d’attaquer la bête, l’entourant de tous les côtés et perçant sa peau dure de toute leur force. L’un d’eux parvint même à lui trancher la gorge, revigorant l’esprit combatif de ses coéquipiers. La bête recula, percée comme un gruyère. Son sang bleu coulait de part et d’autre de son corps formant une fontaine illusoire qui se dissipait avant de toucher le sol.

    Le fielon regarda les hommes se féliciter de leur exploit, inconscient qu’ils n’avaient en réalité rien réussi du tout. Il baissa la tête et chargea dans le tas, écrasant ses adversaires et défonçant le mur du couloir sur plusieurs mètres.

    Don Marcel vit la bête arriver à toute allure, embrochant un à un les malheureux sur sa route. Le craquement assourdissant du bois brisé et les hurlements de ses sbires le pétrifièrent sur place. Par chance, l’élan du mort-vivant ne suffit pas à l’atteindre, malgré sa force, traverser tout le bâtiment était impossible pour la créature. Il s’arrêta à quelque centimètre de son visage et hurla pour dégager ses bois des murs. Le Don glapit et tomba à la renverse, terrifié par la mort elle-même qui venait le chercher. Ses sbires étaient étendus un peu partout, morts. Il n’avait plus personne pour le sauver. Le fielon se dégagea enfin, détruisant un pan du mur qui donnait sur la rue. De partout, on pouvait voir cette bête immense, luire d’une lumière bleutée dans la nuit. Le colosse attrapa le criminel, l’écrasant de tout son poids. De plus en plus, jusqu’à ce que ses os craq…

    Les bois retombèrent sur le sol, inertes, et la brume se dissipa soudainement, effaçant l’image de l’immense créature. Le Don roula par terre en toussant, il avait eu de la chance …

    ~~~
    Aord ouvrit lentement les yeux. Il avait mal, tellement mal, et il avait chaud … Très, très chaud … Tout son corps était fébrile et ankylosé, seul le long filet de sang qui coulait de son épaule était froid, froid comme la mort. Il était devenu bien pâle à mesure que sa blessure saignait. Ses paupières alourdies n’arrivaient plus à tenir ouvertes.

    « Klarion …, souffla-t-il. Où es-tu ? »

    Ses yeux roulèrent sur le côté pour découvrir le mur de ronce qui l'entourait. Sa vision était trouble et il lui fallut un instant pour comprendre ce que c’était. Derrière, des hurlements se faisaient entendre, tous plus affreux les uns que les autres. Par-dessus ceux des humains, un autre plus bestial glaçait le sang du frère.

    « ... il se passe ? Pourq … meurt ? arriva-t-il à articuler. »

    Son souffle s’accéléra et la panique commença à la gagner. Ses pensées étaient troubles à cause de sa fièvre grandissante et de sa perte de sang. Il leva un bras, frêle et dépourvu de force, pour attraper quelque chose, quelqu'un. Il tenta de s’aaccrocher vainement tournant la tête de tous les côtés, essayant d’articuler des mots qui restaient coincés au fond de sa gorge. De légers spasmes parcouraient son corps et le sang recommença à couler à travers le tissu de son bandage.

    « S’il … plaît, implora-t-il son amant »

    Fait que ce cauchemar cesse.
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: Ronces étrangleuses
    Ven 13 Aoû 2021 - 16:46 #
    Roulant au sol, Don Marcel toussait et crachotait un mélange de poussière, de sang et de sciure de bois. Gisant au sol, au centre de la pièce, il était couché sur ce qu’il restait de son luxueux mobilier et du petit bataillon d’hommes qu’il avait emmené avec lui. Certains d’entre eux vivaient encore, poussant de faibles gémissements à peine audibles, leurs membres tordus dans des angles improbables. Le reste avait sans doute été réduit au silence par l’invocation funèbre d’Aord, cette dernière renvoyée dans les limbes d’où elle était venue. Bien que salement amoché par le fiellon, le parrain vivait encore, mais avait l’air parfaitement incapable de se mouvoir. Klarion se souvint, au milieu du vacarme, d’avoir distingué le sinistre mastodonte rabattre sa patte décharnée sur le Pingouin, après avoir balayé la salle de ses bois et détruire ce qu’il en restait. Don Marcel avait l’air pathétique, gesticulant sur le parquet, comme un ver de terre sorti du sol. Couinant de temps en temps, sa mâchoire disloquée l’empêchait de prononcer le moindre mot, juste d’émettre des sons gutturaux qui, Klarion en était sûr, étaient une pluie d’insultes.

    - J’ai menti Marcel. Les ergots n’étaient pas en route. Mais, estimez-vous heureux, mieux vaut le fiellon, n’est-ce pas ?

    Le phytomancien toisait son ennemi d’un regard on ne pouvait plus glacial en avançant doucement vers lui. Nerio, dans un coin de la pièce, se remettait sur pieds, destabilisé à cause du fiellon mais à peine égratigné. Il avait déchiqueté l’une des manches de sa chemise et s’était légèrement éraflé l’épaule en tombant sur la barrière de ronces que Klarion avait fait pousser pour protéger Aord. Des morceaux de tissu teintés de rouge étaient d’ailleurs restés accrochés sur les épines. Les blessures de Nerio étaient superficielles, mais Klarion ne s’était même pas attardé sur lui pour savoir s’il allait bien. Il avait autre chose en tête, quelque chose qui n’impliquait ni Nerio, ni Aord. Le cristal dans la poche de Klarion semblait lui peser de plus en plus lourd, bien que son poids n’ait dans les faits pas bougé d’un pouce. C’était un poids imaginaire, quelque chose qui lui alourdissait le cœur ainsi que l’esprit. En voyant le Pingouin, au sol, aussi faible et sans défense qu’un nouveau né, le jeune homme en vint à se demander si c’était la bonne chose à faire. Non, ce n’était certainement pas la bonne chose à faire, mais il n’avait pas le choix.

    - Cependant, je n’ai pas totalement menti. Je suis bien allé les voir, ils m’ont donné ceci.

    L’éco-terroriste sortit le cristal de sa poche pour le montrer à Don Marcel. Respirant toujours avec difficulté, il s’agita un peu plus en voyant l’objet et en entendant de qui il provenait. Il avait suffit que Klarion jette un œil à Aord, toujours couché derrière la protection roncière pour qu’il se remette à bouillonner intérieurement. Tout ce que cette ordure lui avait fait subir, d’abord lors de leur partie de cartes, avec Arban, puis en capturant son bien-aimé. Il méritait ce qui lui arrivait. Il méritait de finir comme ça, sur le sol de sa propre demeure, comme un moins que rien. Il méritait ce qui était en train de se passer, et ce que Klarion allait lui infliger.

    - Je ne sais pas exactement ce que cela fait, mais je suppose que je vais bientôt le savoir. Don Marcel, vous avez eu tort de me sous-estimer. La nature gagne toujours.

    Se mettant à genoux près du mafieux, il déposa le cristal sur le front de ce dernier. À l’instant où la pierre entra en contact avec la peau du nabot, le minéral s’illumina et sa teinte pourpre s’éclaircissait doucement. Don Marcel cessa de pousser ses petits cris sourds et se mit à trembloter, ses yeux si écarquillés qu’on aurait dit qu’ils allaient sortir de leurs orbites. Se mettant à émettre un râle continu, il se tortillait de moins en moins fort, son ardeur semblant diminuer. Le cristal brillait de plus en plus, sa teinte étant à présent devenue presque lilas. Le jeune homme ignorait ce qu’il était en train de se passer, mais il sentait bien que la pierre agissait directement sur le parrain.

    - Qu’est-ce que c’est que ce brol ?! S’écria Nerio en constatant ce qui était en train de se passer.

    Klarion ne répondit pas, il ne regarda même pas son collègue. Il gardait ses yeux rivés sur Don Marcel qui vibrait toujours au contact du cristal. Sa peau était devenue complètement blème, aussi pâle que de la farine. Ses yeux paraissaient secs et vitreux, ses rides s’étaient creusées davantage, son sang et sa bave dégoulinaient de chaque côté de sa bouche, grande ouverte comme un trou béant au milieu de son visage. Le cristal luisait à présent aussi fort qu’une veilleuse, sa couleur étant désormais d’un bleu turquoise étincelant. Inerte, Don Marcel ne bougeait plus d’un millimètre. Le dernier éclair qui subsistait dans ses yeux venait de s’échapper, son dernier souffle avait été poussé, la seule étincelle de vie qui restait en lui était désormais éteinte. Klarion s’apprêtait à reprendre le cristal mais ce dernier fila dans les airs devant lui et disparut en un tourbillon de fumerolles violettes. Il entendit ensuite deux rires à glacer le sang et les fumerolles se stabilisèrent face à lui pour former une image, deux silhouettes familières. Nerio eut un haut le cœur et manqua de s’évanouir, retombant au sol. En voyant les figures de fumée du Chambellan et de l’Ingénieur, Klarion espérait plus que tout qu’Aord soit toujours inconscient.

    - Un grand merci pour votre collaboration, sieur Brando ! Caqueta le Chambellan en frottant ses doigts griffus.

    - Je vois que vous avez compris à quoi servait ceci, n’est-ce pas ? Fit l’Ingénieur en brandissant le cristal, réapparu dans ses serres.

    - Vous vouliez l’essence vitale de Don Marcel… Qu’allez-vous en faire ?

    - Les gens aiment déguster du bon vin, expliqua le Chambellan. Nous autres, nous préférons… l’essence.

    Klarion eut une moue de dégoût, réflexe qui ne passa pas inaperçu pour les deux hybrides oiseau.

    - Ne nous jugez pas avec autant d’ardeur, sieur Brando, articula doucement l’Ingénieur. Nous faisons tous ce qui doit être fait pour survivre, n’est-ce pas ?

    - Le loup dévore l’agneau, pourquoi en serait-il différent pour nous ? Compléta le Chambellan.

    - Je ne veux rien savoir, rien du tout. Vous avez eu ce que vous vouliez, moi aussi.

    - Ce fut un plaisir de faire affaire avec vous, minauda le Chambellan. Nous reviendrons sans doute vers vous, un jour.

    - On reste en contact, conclue l'Ingénieur de façon narquoise.

    Sur ces mots, ils éclatèrent à nouveau de rire et l’image de fumée se dissipa peu à peu, leurs cris stridents se perdant en un écho lointain. Klarion demeurait seul au milieu de la pièce, le regard perdu dans le vide là où se trouvait les deux oiseaux quelques secondes auparavant. Il avait beau en avoir fini, le nœud dans son ventre ne voulait pas se détendre. Aord avait été sauvé, Don Marcel anéanti. Mais, au fond de lui, le phytomancien savait que la Cour reviendrait collecter leur dette. La Cour reviendrait. Ce jour venant, il était terrifié qu’Aord soit de nouveau pris entre deux feux. Et, cette fois-ci, un feu contre lequel Klarion serait incapable de lutter tout seul …
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Ronces étrangleuses
    Lun 16 Aoû 2021 - 14:40 #
    À travers les interstices entre les ronces, Aord assista impuissant au funeste destin de Don Marcel, ses hurlements d’agonies résonnèrent dans son crâne alors qu’il sentait son esprit partir de nouveau dans les tréfonds de la conscience, vaincus par la fièvre.

    « Klarion … qu’as-tu fait, soupira-t-il avant de s’évanouir de nouveau »

    ~~~
    L’ingénieur coupa la communication et regarda son partenaire avec un regard curieux.

    « Tu as bien vu ce que j’ai vu ?

    - Oui, lui répondit le chambellan avec une lumière malsaine dans le regard. C’était prodigieux, une beauté comme je n’en ai pas vu depuis des lustres.

    - Ce Klarion nous a bien caché son jeu … Ce fielon était incroyable, si puissant et si résistant. Il va falloir que nous enquêtions et que nous nous en emparions … »

    Les deux volatiles ricanèrent en cœur, ravis de leurs nouvelles perspectives d’avenir tandis qu’il discutait l’essence de vie ce qu’ils avaient extrait du parrain.

    ~~~
    L’hôpital de l’Astre de l’Aube dormait profondément en cette chaude nuit. Il avait regorgé d’activité quand une demi-douzaine de patients étaient arrivés en catastrophe, souffrant des pires blessures qu’on puisse imaginer. Certains n’avaient d’ailleurs par survécu au voyage. On parlait d’une attaque de monstre dans une salle de jeu, d’autres parlaient d’une attaque terroriste menée par l’ennemi public numéro 1 : Klarion Brando. La garde essayait de récolter les témoignages comme elle le pouvait, mais le nom de Brando se répandit vite, contaminant les esprits et réveillant une peur soudaine. Par erreur ou par facilité, on considéra que cette attaque était un règlement de compte entre le criminel et un groupe apparenté à la mafia.

    Au milieu de tout ce capharnaüm, un jeune homme appelé Nerio apporta le corps d’un frère de Lucy gravement blessé qui fut immédiatement pris en charge. On reconnut assez rapidement le directeur de la morgue et il fut soigné avec d’autant plus de ferveur qu’il était un membre de l’Astre. Malgré les blessures, malgré le carnage que la garde découvrit, Klarion Brando restait introuvable.

    ~~~
    Émilien éclaira la chandelle de la table de chevet avec la bougie qu’on lui avait gentiment passée à l’accueil. La petite flammèche propagea une lumière douce dans toute la pièce éclairant le visage du patient endormi. Aord avait repris quelques couleurs grâce aux bons soins des médecins. Sa blessure était recousue et son pansement était propre. Le prêtre passa sa main sur son front et soupira de soulagement quand il sentit que la fièvre était enfin retombée.

    « Vous nous avez fait peur Aord, soupira-t-il. »

    Le frère ne réagit pas, complètement endormi par le cocktail de médicaments que lui avaient donné les médecins. Il allait dormir pour un bon moment. Le prêtre fit glisser sa main sur sa joue dans un geste paternel en réprimant un sourire en coin. Encore une fois, il le récupérait dans un sal état. Qui ne ferait qu’empirer lorsqu’il se réveillerait et qu’il se souviendrait de ce qu’il s’était passé.

    « Oh déesse, cesse donc de le tourmenter, il ne le mérite pas. »

    Emilien Albenet se perdit un instant dans la contemplation de la bougie comme s’il réfléchissait intensément à quelque chose. Il resta une bonne dizaine de minutes sans rien dire avant de lentement tourner ses yeux une armoire qui se situait derrière lui. Il soupira intensément et se leva.

    « Sortez de là monsieur Brando, il faut qu’on parle, tonna-t-il dans le silence de la pièce sans pour autant réveiller le frère endormi. »

    Rien ne se produisit et seuls les ronflements d’Aord lui répondirent.

    « Sortez de là tout de suite où je vais appeler la garde qui patrouille dans ces couloirs à votre recherche Klarion. »

    Le ton du quinquagénaire était monté d’un cran et cette fois-ci, il eut plus de succès. La porte s’entrouvrit et Klarion sortit sur ses gardes. Ignorant complètement son agressivité, Émilien se rassit au chevet d’Aord.

    « J’espère que vous êtes fier de vous … »

    Émilien montra Aord de la main pour lui faire comprendre de quoi il parlait.

    « Si vous saviez l’état dans lequel je l’ai récupéré la dernière fois … et par votre faute … il faut tout recommencer. »

    Émilien semblait abattu, épuisé. Il fut soudain pris d’une violente quinte de toux qui laissa quelques goûtes de sang sur sa main. Il releva alors des yeux fatigués vers Klarion.

    « La cour des Griffons … vous croyez que ça leur a échappé ? Qu’ils n’ont pas vu cette énorme bête morte-vivante massacrer tout le monde s’en jamais fatigué ? Ils vont lui tomber dessus dès qu’ils sauront d’où elle venait à cause de VOUS. »

    Il montra Klarion du doigt d’un air énervé.

    « Si je n’ai pas encore appelé la garde, c’est pour vous que vous entendiez une chose. Quoi que vous pensiez qu’il y ait entre vous, mettez-y fin tout de suite avant qu’il ne lui arrive bien pire ou qu’il finisse comme Don Marcel, en petit vin pour ces oiseaux de malheur. Vous ne lui apporterez jamais le bonheur Klarion, jamais … »

    Le prêtre s’interrompit pour tousser encore plus fort que la première fois, crachant du sang à n’en plus finir, mais son regard restait fixé sur l’écoterroriste, rempli de haine.

    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: Ronces étrangleuses
    Lun 16 Aoû 2021 - 16:26 #
    Toujours encapuchonné, Klarion avait les yeux rivés sur Aord allongé dans son lit d’hôpital, sain et sauf et prêt à entamer une bonne convalescence. Cela n’avait pas été simple de le transporter dans la rue jusqu’à l’Astre de l’Aube sans éveiller d’attention, mais Nerio lui avait donné un autre coup de main avant de repartir de son côté. Le phytomancien ignorait où ce dernier se rendait, mais il faisait nul doute qu’il avait ses propres plans. Ils s’étaient souhaité bonne chance avant de se quitter, la fortune pouvant les réunir à nouveau, peut-être plus tôt qu’ils ne le pensaient. Klarion ne pensait plus à tout ce qu’ils venaient de vivre, il était simplement soulagé que son bien-aimé soit en sécurité à présent. Il n’écoutait que d’une oreille le religieux, visiblement proche d’Aord, lui déverser tout un tas de remontrances sur ô combien il ne méritait pas les sentiments du prêtre. En entendant l’inconnu l’invectiver et lui dire que jamais il ne donnerait de bonheur à Aord, Klarion eut enfin le déclic qu’il fallait pour le faire réagir. Plus il l’écoutait, plus Klarion réalisait qu’il l’avait déjà croisé. Mais où ? D’ordinaire, il aurait fait apparaître un torrent de ronces pour étriper cet homme impudent. Mais par respect pour Aord, il n’en fit rien. Le jeune homme se contenta de pivoter doucement sa tête vers son interlocuteur, le dardant de ses yeux perçants.

    - Laissez-moi être clair sur un point’, commença Klarion d’une voix douce mais glaciale. Quoi que vous pensiez qu’il y ait entre nous, vous n’avez ni votre mot à dire, ni voix au chapitre. J’ai vu et ressenti ce qu’Aord a vécu. Les échanges de souvenirs sont très instructifs, sachez-le. Je sais qu’il n’était pas heureux avant même d’avoir croisé ma route. Alors épargnez-moi vos leçons de morale à deux sous, et contentez-vous de le soigner. Quand Aord organisera des présentations, on fera l’effort de bien se tenir à table, hm ?

    Esquissant un fin sourire narquois qui disparut une fraction de secondes plus tard, Klarion déporta à nouveau sa tête vers son amoureux endormi. Inspirant profondément, il nota la présence de Naya, ronflant tout doucement au creux de son cou, dans un coin du coussin. Si elle avait été éveillée, sans doute aurait-elle pris la défense du criminel, elle qui avait participé au sauvetage de son maître au même titre que Klarion, elle qui avait bien vu qu’il n’y avait rien à craindre du phytomancien. Qui que fut ce type, il avait l’air d’énormément tenir à Aord. Sans doute était-ce la raison de sa colère. Considérait-il Aord comme un fils ? L'instinct paternel pouvait déchainer d’immenses passions. Klarion ne comprenait cela, il le vivait on ne pouvait plus souvent avec ses plantes.

    - Quant à la Cour, si vous connaissez leur existence, alors vous savez autant que moi qu’il vaudrait mieux que vous gardiez votre clapet fermé et ne plus jamais le rouvrir à ce sujet. Nous nous sommes quittés en bons termes, et j’ai tout fait pour qu’ils ignorent l’existence d’Aord. Si vous le considérez au même titre que moi, vous ferez ce qui doit être fait : vous taire.

    L’épée de Damoclès que la Cour des Griffons continuait de faire miroiter au-dessus de la tête de Klarion était effectivement source de grande inquiétude. Ces immondes oiseaux de mauvais augure étaient toujours susceptibles de s’intéresser à la source magique à l’origine du fiellon que le religieux avait invoqué avant la chute de Don Marcel. Aord était loin d’être l’unique nécromancien d’Aryon. Mais Klarion savait que si les Griffons décidaient de se lancer à la poursuite d’un tel pouvoir, il devrait faire des pieds et des mains pour protéger son aimé. Et persuader ces horribles arcanistes que celui qu’ils cherchaient n’était pas Aord… Klarion espérait plus que tout que ce jour n’arrive pas, mais il ne pouvait malheureusement pas contrôler les aléas du destin.

    Faisant quelques pas, le jeune homme fit le tour du lit pour déposer un baiser sur le front d’Aord sans accorder la moindre attention au collègue d’Aord et ses regards désapprobateurs. Se redressant, il passa de longues secondes à le regarder, paisiblement endormi, le silence uniquement brisé par les mouvements mécaniques d’une horloge posée au mur non loin d’eux. L’homme d’âge mûr se mit à tousser grassement, suffisamment fort et longtemps pour que Klarion jette un coup d’œil vers sa direction, constatant d’épaisses taches écarlates se dessiner sur le mouchoir qu’il passait devant sa bouche. Le phytomancien continuait de le regarder, le toisant jusqu’à ce qu’il daigne cesser sa toux maladive.

    - Hé bien, hé bien... En voilà une drôle d’affliction

    Mouvant doucement sa main sur le plateau posé sur la table de chevet d’Aord, Klarion fit pousser un minuscule arbuste aux feuilles aussi brillantes et irisées que des diamants. Scintillant dans le noir, le petit arbre semblait tout droit sorti d’un rêve merveilleux. L’homme ne réagit même pas en voyant la plante, comme si sa beauté ne lui provoquait aucun émois.

    - Je ne sais pas si vous le méritez, mais le banzai diamantaire a bonne réputation en ce qui concerne les maladies… de votre calibre. Et si vos crachats sanguins sont le résultat d’un revers magique, je crois que j’ai une petite idée sur… qui… vous l’a infligé

    L’intéressé ne répondit pas, se contentant de lancer un regards noir à Klarion. S’éloignant du lit, ce dernier jeta un dernier regard vers Aord avant de répondre à nouveau à son interlocuteur :

    - Je reviendrai demain, à la même heure. Et les jours suivants, à la même heure aussi. Nous n’en avons pas terminé. Il y a des choses que vous ne me dites pas. Quant à Aord et moi, que ça vous plaise ou non, les choses sont ainsi. Supportez le, ou étouffez vous dans votre propre sang.

    Tournant les talons, l’éco-terroriste s’enfuit dans les ombres, laissant son bien-aimé entre les mains d’Emilien. Klarion ne vit pas son dernier coup d’œil concerné et ses lèvres pincées, baissant les yeux vers l’arbuste puis son mouchoir constellé de gouttes vermeil…
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Ronces étrangleuses
    Mar 17 Aoû 2021 - 19:17 #
    Le prêtre était plié en deux par ses quintes de toux. Il crachait de plus en plus de sang, n’arrivant pas à s’arrêter. Sa condition ne l’empêcha pas de jeter un regard assassin vers Klarion alors qu’il se fichait royalement de lui et d’Aord par la même occasion. Ne voyait-il pas à quel point il était dangereux.

    « Vous êtes fous *tousse* si vous l’aimiez vous partiriez. Un criminel … recherché par la garde … qu’est-ce que vous pouvez lui offrir ci ce n’est la prison ou la mort, voir pire … »

    Emilien s’écroula en avant, s’appuyant sur le lit pour ne pas tomber au sol. La toux l’avait scié en deux cette fois et il ne devait pas paraître très impressionnant aux yeux de Klarion. Ce dernier en avait même profité pour s’approcher d’Aord avant de s’en aller en le narguant. Il darda sur lui un regard mauvais, mais ne pouvait pas l’en empêcher dans sont état. Il lui fallut une bonne heure pour se ressaisir, une infusion de bonsai diamantaire l’aidant beaucoup malgré le dégoût qu’il avait de se savoir redevable auprès du terroriste.

    Une fois calmé le prêtre s’assit auprès d’Aord complètement vidé.

    « Inconscient … pourquoi est-ce que tu t’accroches à ce type Aord ? s’interrogea-t-il à haute voix ».

    Il n’eut bien entendu aucune réponse, l’intéressé ronflant toujours dans son lit, Naya au creux de son cou.

    « La prochaine fois, je trouverai quelqu’un de plus fiable que Don Marcel. »

    Il fouilla dans le sac d’Aord et en sortit le livre qu’il chérissait plus que tout au monde. Il l’avait toujours avec lui, c’était déjà bien. Il posa sa main sur la couverture et se laissa emporter dans les souvenirs de Klarion qui y était toujours stockés. Ainsi donc, le frère avait partagé autant de choses avec lui ? Emilien en fut profondément contrarié. Aord n’était pas prêt et ce Klarion était une distraction incroyablement gênante. Il allait falloir s’en débarrasser.

    « Par pitié Aord, ne finissez pas comme le frère Corvus … Je ne veux pas en arriver là … »

    Emilien se leva en titubant et s’approcha du miroir au fond de la pièce. Il déboutonna sa chemise et regarda la marque sur son corps qui le faisait atrocement souffrir. Elle pulsait d’une énergie noire, le narguant à travers son reflet.

    « Fais chier, jura le religieux. »

    Il retourna pour souffler la bougie et jeta un dernier regard au frère blessé.

    « Il va falloir accélérer les choses … »

    Il sortit pour retourner au temple, beaucoup de travail l’y attendait, à commencer par la suppression de Klarion Brando.
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    Re: Ronces étrangleuses
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