Y a intérêt à ce que ça en vaille la peine… pensa-t-elle tout en soufflant une fine volute de fumée turquoise.
Jetant son mégot d’une pichenette vers le pavé, Iris s’avança vers la porte de la taverne comme si elle marchait sur un tapis de défilé. Refusant de toucher la poignée crasseuse et rouillée, la demoiselle décida que la meilleure solution pour entrer était de frapper le bois avec son pied. La porte s’ouvrit à la volée et Iris eut un haut-le-cœur alors qu’une forte odeur de moisissure la heurta en pleine figure. L’intérieur de la taverne était mal éclairé, et certains coins demeuraient dans la pénombre. Grâce à son entrée fracassante, plusieurs clients s’étaient réveillés en catastrophe comme si le ciel leur tombait sur la tête. Le tenancier manqua de lâcher son verre mais laissa tomber sa moitié de cigare dans le bac qui lui servait à faire la plonge. Étouffant un juron en plongeant sa main dans l’eau froide, le gaillard cracha dans une chope à proximité en touillant le bac avec son avant-bras pour retrouver son bien. Faisant quelques pas à l’intérieur, Iris balaya la pièce du regard jusqu’à tomber sur une femme complètement couchée sur le comptoir, ronflant bruyamment.
Évidemment… soupira-t-elle en avançant droit vers sa cible.
Passant près de la table d’un homme gras avec au moins six doubles mentons, Iris attrapa une pinte sur la table alors que le type hagard roulait les billes qui lui servaient d’yeux le long ses de ses cuisses. Arrivant près de la femme assoupie, la belle intrigante écarta délicatement quelques mèches de cheveux blancs pour laisser apparaître un visage fatigué qui, la bouche grande ouverte, laissait tomber un filet de bave contre le bois du comptoir. Entre bras, Iris venait de retrouver un gobelet en étain dans lequel il ne restait que de la mousse et un ersatz de boisson dont la couleur ressemblait bien trop à de l’urine. Pinçant les lèvres et esquissant une moue écœurée, Iris vida le contenu de la pinte qu’elle avait chipée sur la joue de l’endormie jusqu’à ce qu’elle sorte du pays des songes.
- Salut grand-père, railla Iris en jetant la chope par-dessus son épaule, au grand dam du tenancier. Navrée de t’embêter alors que tu travailles, mais la petite fille détestée que je suis a de gros poissons à ferrer.
Passant sa main dans son corsage, Iris en ressortit une petite pierre irisée en forme d’étoile à quatre branches qu’elle posa sur le comptoir, devant les yeux de la femme qui était en réalité son grand-père. Edmond Delancy émergeait encore, toujours ensuqué, les cheveux tout collant et maculés de mousse ocre. Saisissant un long tabouret, Iris se percha dessus, posant ses coudes derrière elle sur le bar et croisant ses jambes en un mouvement de jambes mélodramatique.
- Ce truc, le Genshin appelle ça ses « primogemmes ». Ce n’est rien de plus que des jetons échangeables dans leur casino, mais on peut se faire un sacré paquet de cristaux si on en amasse plein. La crème des flambeurs y passe leurs soirées pour jouer pendant trois ou quatre heures. Leurs « quotidiennes », comme ils les appellent.
Le tenancier s’apprêtait à aborder Iris pour lui demander ce qu’elle comptait consommer, et lui intimer de partir si elle ne comptait pas boire ou manger. La demoiselle lui jeta nonchalamment un cristal pour qu’il leur fiche la paix et, une fois de plus, l’objet tomba dans le bac à vaisselle. Le tôlier n’eut d’autre choix que de replonger sous le savon et la graisse de vaisselle, grommelant dans sa barbe.
- Ils peuvent gagner des sommes astronomiques de monnaie, et la dépenser en cinq minutes pour des objets magiques tirés au sort. Ils me dégoûtent, ces cachalots. Mais y a moyen de se remplir bien les poches.
Dardant son grand-père droit dans les yeux, les prunelles d’Iris irradiaient d’un brasier qu’on ne pouvait éteindre. Un fin rictus se dessina sur ses lèvres et elle appuya sur le bout de nez de son interlocutrice à cheveux blancs.
- Prends tes affaires. Ce soir, on va détruire Genshin.
« Padoru padoru….. »…
Ce fut en sursautant qu'elle se réveilla, recouverte de sueurs froides. Le geste, brusque, faillit bien la faire tomber de son tabouret. Affolée, ne comprenant pas ce qui lui arrivait mis à part le sentiment d'un danger imminent, elle regarda autour d'elle avec un air confus avec de pousser un profond soupir de soulagement en reconnaissant l'endroit. Pfiou...Déjà, les souvenirs de ce cauchemar se dissipaient. Passant une main dans ses cheveux, elle se demanda un instant ce qu'elle faisait dans cette taverne. Ah oui.
Après l'effort, bien entendu, le réconfort. C'était la devise même d'Astrid Dalgaard qui respectait avec ferveur cet adage qu'elle tenait à cœur. Même si, il fallait se le dire, la plupart du temps, il y avait également le réconfort sans effort, mais ça, c'était une autre histoire. Cependant, il fallait bien que la citoyenne gagne des sous pour payer ses factures, la nourriture de ses familiers, et ses bières, et après avoir passé la journée à chasser des souris chez la vieille Brucinda – qui habitait un manoir à 3 étages au sein de la Capitale, 3 étages nom de Lucy – et après avoir cherché dans toute la ville le glooby de compagnie d'un gamin de noble, la femme à tout faire avait décidé comme à son habitude d'écumer les tavernes de la ville. Et c'était donc après son 6ème établissement qu'elle avait terminé dans le Cadeau de l'Ange avec des souvenirs plus qu'approximatifs.
L'esprit encore embrumé, elle reconnut toutefois Iris, l'une de ses petites-filles. Enfin, celles d'Edmond. Elle la salua comme tout grand-père, c'est-à-dire :
-Wesh Iris, comment ça booouuum ? Tu devineras jamais, j'ai fait un rêve qui m'a Irissé le poil ! Bwahahahaha !
Même la tête dans le cul, ça ne l'empêchait pas de faire des blagues et jeux de mots miteux. Cela étant, rire lui donna la migraine et elle s'arrêta bien vite pour se masser les tempes. Urgh.
Le Genshin, des priogemmes, des quotidiennes. Étrangement, cela ne sonnait pas totalement étranger à la blanche qui se gratta le menton où restait des traces de bave. Où est-ce qu'elle en avait entendu parler déjà ? Hmm. Oh !
-Oooh, je me souviens de certaines connaissances, des « Gachalots » comme tu dis...Euh, « cachalots » pardon, ayant perdu tous leurs sous au Genshin. Ça a eu un sacré impact sur leur vie du coup ils appellent ça l' « Impact Genshin » heh. Cela dit, le Genshin impact ça sonnerait mieux nah ? Haha.
Petit à petit, ça lui revenait. Certains avaient contracté des dettes, comme Iris ici présente. Et si sa petite-fille lui demandait de l'aide, elle ne pouvait bien entendu pas refuser et avait déjà participé une fois à une arnaque dans ce but avec elle et Dahlia.
Saisissant la primogemme entre ses doigts, la jeune femme l'observa de plus près et continua avec un sourire en coin en remarquant l'air de la cadette Delancy :
-T'as déjà un plan en tête donc j'imagine? Parfait. Allons-y, Alonzo alors ! Mais euh….elle montra ses cheveux collants à cause de l'alcool et ses vêtements avec des taches ci et là. J'vais prendre une douche et me changer avant, hein. Heh.
Petit tour chez elle, papouilles avec sa dizaine de familiers, et voilà que les deux jeunes femmes étaient devant le Genshin. Tout comme les autres casinos, le bâtiment était immense et puait la luxure par tous les pores. Malgré l'heure tardive, plusieurs clients richement habillés, ne cachant absolument pas leur fortune qu'ils portaient sur eux à travers les divers bijoux, entraient et sortaient.
Quant à Astrid, un coup de déguisement magie, un peigne et des lunettes magiques, du maquillage pour sa cicatrice et paf, voilà une belle jeune femme blonde aux cheveux un peu plus courts et aux yeux émeraudes. Pour la tenue, son choix s'était arrêté sur une robe rouge épaisse bordée de bandes de laine blanche et sur sa tête trônait un bonnet pointu rouge également bordé de blanc et muni d'un pompon de la même couleur à l'extrémité. Pourquoi cette tenue… ? Bonne question. Elle n'en avait aucune idée. Une simple envie. Comme celle de chantonner un air maudit….
Elle avait déjà prévu de se rendre au Genshin un jour ou l'autre, mais ce n'était pas pour l'argent mais une autre raison bien particulière. Tapant du coude sa camarade, elle dit à voix basse :
-On m'a dit que, si on met les pieds au Genshin, il faut surtout faire attention aux « waifus » et aux « husbandos », le terme spécial que le casino utilise pour ses serveurs et serveuses qui sont apparemment de toute beauté et qui peuvent se montrer très...persuasifs et manipulateurs, heh. J'ai déjà hâte de savoir si c'est vrai, hehe. *burp* Oops, les restes de bière, padoru. Euh, pardon plutôt. Haha.
Hmm. Bizarre.
Entrant dans le casino aux côtés de son grand-père, Iris était tant consternée que non surprise en le voyant dodeliner dans son immense robe bouffante, cramoisie et fort peu discrète. Plusieurs clients du casino ne se génèrent pas pour ricaner en voyant les deux femmes passer, et même les membres du personnels ne se privaient pas pour chuchoter des commentaires moqueurs. Arrivant dans le hall, ils se retrouvèrent face à un grand comptoir derrière lequel une petite femme scribouillait frénétiquement sur plusieurs registres, répondant à plusieurs cristaux de communication qui vibraient tout autour d’elle. Possédant de courts cheveux verts, la demoiselle était affublé d’un béret, la forçant à baisser ses deux oreilles vulpines. Remontant souvent ses grandes lunettes rondes glissant parfois sur le bout de son nez, la standardiste avait l’air manifestement débordée et ne semblait pas recevoir l’aide qu’elle méritait. Avant qu’Iris ne puisse aller l’aborder, deux gorilles en uniforme s’animèrent pour fouiller rapidement les deux femmes, mesure de précaution oblige. Ceci fait, la Méduse flambeuse fonça droit vers le comptoir d’accueil, faisant sursauter la petite hybride en posant la paume devant elle.
- Salut Sucrette, susurra Iris. On fait des heures supp’ ?
- Oh, bonjour Iris ! S’exclama-t-elle, manquant de faire tomber son béret en relevant la tête. Désolé, c’est la folie, tout le monde veut réserver les salons privés aujourd’hui…
- Barbra et Benêt ne sont pas là pour t’aider ?
- Ils devraient arriver mais ils ont été réquisitionnés en urgence dans les bureaux et… Oh ! Fit-elle soudainement en remarquant Astrid. Tu es accompagnée ?
Iris jeta un œil à Astrid, bien occupée à regarder un morceau d’on ne savait trop quoi entre ses dents, face à une vitre teintée. Laissant échapper un soupir las, la belle s’en retourna vers Sucrette.
- Oui et non, c’est compliqué. Bref, je vais pas t’embêter, ma mignonne. On peut entrer ?
- Normalement non, chuchota la standardiste en se baissant légèrement pour que les agents de sécurité ne l’entendent pas. Mais je fais une exception pour toi, vous pouvez y aller.
Iris lui accorda un clin d’œil complice en guise de réponse avant d’attraper son grand-père par le poignet et le tirer vers une grande porte blanche. Un cristal à peine visible s’illumina au sommet de la porte et elle s’ouvrit d'elle-même sans que la flambeuse n’eut à la toucher. Les deux femmes furent frappées par toute une symphonie de rires, de bruits de jetons, de bouteilles s’ouvrant dans tous les sens… D’imposants cristaux lumineux, taillés ou sculptés, rouge, bleu, turquoise, vert, or, violet, flottaient au-dessus de leurs têtes, glissant en un majestueux ballet aérien.
- Bienvenue au Genshin.
Partout autour d’eux, une multitude de tables et de salons s’alignaient, autour desquels les joueurs évoluaient en batifolant comme des papillons. Au bar, une sulfureuse sorcière, toute de violet vêtue, électrisait de la gelée de slime pour préparer toute une myriade de cocktails multicolores. Depuis le rez-de-chaussée, on pouvait distinguer les balcons des étages supérieurs du haut desquels d’autres personnes continuaient de festoyer dans les hauteurs, des traînées de bulles et de paillettes dans leur sillage. Tout en haut, une immense coupole trônait fièrement, son vitrail en forme d’étoile à quatre branches brillant grâce aux rayons du soleil. Alors qu’Astrid s'apprêtait à foncer sur un chariot rempli d’alcools et gâteaux crémeux, Iris la tira à nouveau vers elle, le pompon du chapeau pointu tintant comme un grelot.
- Le Genshin a des jeux un peu… spéciaux, commença à expliquer Iris en lui pinçant la joue. Poker abyssal, pachinkollinus, blob-jack, roulette d’hypostases, et j’en passe. Mais ça, c’est pas important. C’est la guerre ici. Le personnel et les clients s’allient pour une bataille d’argent et de pouvoirs, y a pas mal de petits clans par ici. Les Favonius, Sucrette à l’accueil en fait partie, les Adeptes, les Fatui, etc… Ils sont tous à la botte d’un leader, des célébrités du Genshin. Pour qu’on détruise le Genshin il va falloir qu’on sème le chaos entre ces clans et qu’on les force à s’autodétruire entre eux.
Un serveur passa à leur portée, Iris fut prompte et attrapa une coupe de champagne pour la fourrer dans les mains d’Astrid. Dans le champagne, des myrtilles et quelques fraises des bois flottaient à la surface du liquide doré.
- Je t’ai choisi parce que je ne connais personne capable de mieux semer le chaos que toi. Le plan est simple : semer la pagaille, embrouiller tout le monde, sans se faire virer évidemment… Tu es donc la petite pierre qui viendra coincer tout l’engrenage bien huilé du Genshin et de ses clans en guerre permanente. Et au final c’est… Oh non…
Fendant la foule, une sublime créature perchée sur d’immenses talons émergea, suivie par une foule d’admirateurs. Blonde, elle était drapée d’une longue robe noire et blanche ainsi qu’une cape à col de plumes qui traînait derrière elle. Sur son visage de porcelaine, elle portait un magnifique masque qui avait plus des allures de couronne, se mariant on ne pouvait mieux avec sa coiffe. Iris tordit la bouche en signe de mécontentement.
- Et moi qui pensais qu’on aurait plus de temps, on doit s’activer ! Cette grue là-bas, c’est la leader du clan des Fatui : la Señora…
Les formalités faites – Iris en avait des contacts ! Et une sacrément mignonne en prime - les deux jeunes femmes rentrèrent enfin dans le Genshin.
-Eh beeeehhh. Dit la citoyenne après un sifflement impressionné en regardant autour d'elle, ébahie.
Il n'y avait pas à le dire, le Genshin était loin d'être un petit casino. L'intérieur était immense et majestueux, et le monde y était impressionnant. Astrid avait fait deux ou trois casinos, notamment dans les archipels, mais celui-là était extraordinaire et tous ses sens étaient à l’affût. La senteur de l'alcool et de la nourriture mêlé aux différents parfums des gens ci et là, la température ambiante qui contrastait avec le froid à l'extérieur, et surtout, surtout ! Les femmes. Les serveuses étaient exquises. La sorcière au bar, l'une des maids avec un mélange d'armure, une brune avec un cache-oeil...C'était le paradis. Elle comprenait mieux pourquoi on l'avait mise en garde contre les waifus de Genshin, parce qu'elle les emportait bien toutes dans son lit.
-Mama mia ! Que des bonasses aux formes plantureuses ! S'exclama-t-elle avant de se rendre compte que sa petite-fille était à côté. Ahem. J'voulais dire, que de filles charmantes.
Les serveurs par contre ? Meh. Pas d’intérêt particulier. Cela étant, maintenant qu'elle était dans le casino, il serait étrange de ne pas s'intégrer convenablement non ? À Aryon fais comme les aryens ! Ou les aryonnais. Ou juste le peuple d'Aryon. Hmm. Bah !
Aussi, la bave aux lèvres, elle faillit se jeter sur l'alcool le plus proche en draguant en même temps la serveuse , une sorte de prêtresse aux cheveux roses et aux oreilles de lapine. Miam miam miam. Mais malheureusement pour elle, Iris était là pour garder un œil sur elle pour son grand plan.
Au fur et à mesure de son explications et de ses attentes, le sourire de la citoyenne s'étira de plus en plus. Semer le chaos ? La mort et la destruction ? C'était en effet dans ses cordes. Sans se faire virer et donc sans se faire remarquer compliquait les choses mais heureusement pour la blanche, la discrétion était aussi dans ses cordes….Plus ou moins.
-Tu sais comment me parler ma ptite, j'te fais ça en deux-deux !
Soudain, le silence se fit dans l'ensemble du casino. Comme un seul homme retenant sa respiration, la foule se tourna vers une beauté traversant la mer avec une grâce et une élégance à vous en couper le souffle.
Et après le silence, les murmures. « La Señora est là », « La Señora nous honore de sa présence », « La Señora est aussi magnifique que d'habitude », « La Señora...mais regarde moi ce boule, ces hanches et cette poitrine, j'aimerais bien me la taper. »
Ok. Ce dernier murmure venait peut-être d'Astrid.
-Euh...s'activer, ouais ouais. Répondit la blanche en ayant encore les yeux rivés sur la blonde, prête à tout lâcher pour se prosterner devant elle. Poh lala, vraiment. Qu'est-ce qu'elle est bonne.
Elle porta la coupe de champagne et en avala le contenu d'un seul coup avant de reprendre en faisant un clin d’œil à Iris avec un grand sourire :
-C'est parti pour la fête eh, trouve un endroit pour admirer tout ce bordel.
À la vitesse du son, la blanche observa les alentours qui ralentirent et se mit à concocter son plan pour créer le chaos que le Genshin méritait. Les différents groupes étaient reconnaissables par leurs habits ou couleurs similaires ou d'autres signes distinctifs tels que des masques ou des bijoux, les jeux avaient des noms étranges mais restaient des jeux similaires à tout ce qui se trouvait dans les casinos habituels avec des règles connus de tous…En deux secondes, le temps reprit son cours tandis qu'Astrid se mit en marche à travers la foule.
Usant de sa télékinésie, elle s'amusa à lacer les chaussures de certaines personnes pour faire en sorte qu'elles trébuchent ni vu ni connu, emportant parfois dans leur chute boissons ou nourriture, ou d'autres victimes. Et profitant du fait que cela attirait l'attention, elle usa de sa vitesse pour modifier les résultats de plusieurs tables où des groupes s'affrontaient, plaça des éléments en évidence pour que l'un puisse accuser l'autre de triche même s'il était tout à fait innocent. Elle donna des claques derrière la tête ou des coups d'épaule à la vitesse du son avant de disparaître, et s'osa même à peloter le derrière de certaines femmes avec des remarques comme « T'as un beau cul pour une fatui. » avant d'abuser de son pouvoir pour se volatiliser. Que Lucy soit louée pour l'avoir bénie à la naissance avec ce don ! Croche-pattes, boissons renversées, rumeurs soufflées dans le creux de l'oreille tel un fantôme à base de « Le voisin a dit », « Il est suspect lui non ? » ou « Il y a un imposteur...parmi nous », petite bombe puante, du poil à gratter dans le cou…. Très vite, alors que des accidents se passaient un peu partout dans le casino, l'ambiance festive commença à se dégrader avec des cris et des accusations. Astrid elle ? En un clin d’œil, elle était de retour à côté d'Iris, en train de boire un autre verre de champagne avec un pain d'épice des plus délicieux. Elle se délectait de tout ce remue-ménage et vit même une gamine habillée également en rouge avec un énorme sac à dos et des oreilles pointues se faire bousculer et tomber en pleurant. CHEH.
-Burp. Un petit rot satisfait alors qu'elle ricanait intérieurement, la satisfaction se lisant sur son visage. Et voilààà! Cadeau! C'est quoi la suite ? Et tu penses que j'ai une chance avec la Senora ?
Exaspérée par les commentaires graveleux de son grand-père, la Méduse tâchait de se concentrer du mieux qu’elle le pouvait. La Señora, fidèle à elle même, se pavanait devant sa cohorte d’admirateurs, agitant un éventail alors qu’on lui servait du champagne. Ses suiveurs avaient des yeux aussi obnubilés que ceux d’Astrid, et bavaient sans doute tout autant qu’elle. Cette grande grue aimait se donner en spectacle et était tellement égocentrique qu’elle n’avait remarqué ni Iris ni Astrid à quelques mètres, près du bar. Derrière les deux femmes, la sorcière en tenue violette s’affairait à préparer plusieurs cocktails multicolores aux allures quelque peu détonantes. L’un d’eux avait une texture crémeuse, comme de la chantilly, et avait été servi dans un grand verre en forme de crâne. Le suivant, à mi-chemin entre un liquide et une gélatine, trônait dans une longue flûte et semblait contenir des yeux de triton, et un troisième à la couleur indicible fumait sans discontinuer. Iris plissa les yeux l’espace d’un instant en fixant la barmaid, en pleine réflexion, la flambeuse décida alors d’attraper son grand-père par l’épaule et de le traîner jusqu’au bar.
- Bonjour Liz’, sourit Iris en s’asseyant sur une des grandes chaises du comptoir.
La sorcière ne quittait pas ses mélanges des yeux se contenta d’esquisser un petit sourire complice sur son visage de porcelaine. À la gauche d’Iris, le commandant réincarné peinait à grimper sur son siège à cause de son manteau bouffant, étouffant des jurons et tirant la langue pour se percher face au bar. Une fois que ce dernier eut réussi à s’asseoir, on ne pouvait même plus voir la chaise, entièrement recouverte par son gros manteau rouge. Iris soupira à nouveau, avant de s’en retourner vers la dénommée Liz.
- Encore venue pour faire tes quotis, ma belle ? Demanda doucement Liz.
- Tu connais d’autres choses à faire dans le Genshin, Liz ?
- Oh, tu aurais pu revenir juste pour mes beaux yeux, minauda-t-elle.
- Peut-être plus tard, j’ai à faire pour le moment. Oh, pendant que j’y suis Liz, voici Astrid, une… proche.
- Enchantée.
Les deux femmes ne comprirent pas vraiment si Astrid avait répondu à Liz. Tout ce qu’elles entendirent fut un bruit de rot semblable à celui d’un nourrisson repu. Iris poussa un verre face à son aïeul, une coupe avec des allures de saladier dans laquelle baignait une boisson orange comme une citrouille, avant de glisser une paille fantaisie et quelques fleurs de cerisier au milieu de la mixture.
- J’ai vu que Señora était ici, Sucrette débordée à l’accueil. Qu’est-ce qu’il se trame, Liz ?
- Hm… Je ne sais pas si je peux te faire confiance Iris, tu n’es pas des Favonius et…
- Je ne suis d’aucune faction, ma jolie. Mais c’est justement pour ça que tu peux te confier. Aucun intérêt à défendre, aucun modèle à soutenir. Et puis, ce n’est pas comme si j’allais répéter quoi que ce soit à l’autre pimbêche. Aller, Liz, pense à tout ce qu’on a vécu ensemble…
Iris jeta un regard de braise à la barmaid qui, cette fois, put s’empêcher de plonger son regard dans le sien. La Delancy avait croisé ses bras sous sa poitrine pour la bomber légèrement, s’appuyant contre le comptoir. Liz se mordit la lèvre, ses oreilles devenant légèrement cramoisies. La sorcière soupira avant de reprendre :
- Très bien… Mais tu ne l’as jamais appris de ma part. Il y a du beau monde qui arrive, Señora ne sera pas la seule à être là ce soir. Zhing Lo et Dee-Look vont aussi arriver d’ici peu. Et je doute qu’ils vont vouloir laisser aux autres le plaisir d’avoir le plus gros pactole de la soirée.
- Trois factions qui s’affrontent ce soir, leurs leaders avec eux… Une idée de la patronne ?
- Miss P est toujours dans son bureau, je ne sais pas si elle est au courant. Mais je n’ai pas hâte qu’ils arrivent, je vais être coincée ici toute la soirée…
- J’imagine… Merci beaucoup Liz, je te revaudrai ça.
Evidemment, Iris ne comptait pas repayer sa dette à Liz étant donné qu’elle était venue précisément pour couler le bâtiment. Descendant de son siège, elle attrapa Astrid et l’entraîna un peu plus loin, son siège coincé sous sa robe grinçant bruyamment sur le sol. Passant derrière deux gros pots de plantes grasses, Iris tourna le siège pour faire face à son grand-père, toujours en train de siroter bruyamment sa boisson.
- Bon, c’est maintenant que les choses sérieuses vont commencer. Les enfantillages et les blagues c’est fini. Pour détruire Genshin, il faut qu’on force une guerre ouverte entre les trois factions. Et je parle pas seulement au sens figuré, je veux dire une vraie rixe entre tous le monde. Paraît que les chefs ont des magies plutôt balaise en plus, on pourra s’asseoir et profiter du spectacle pendant qu’ils feront tout à notre place. Mais, avant, on va devoir agir avec subtilité.
Iris écarta quelques feuilles des plantes pour voir si on les avait remarquées. Tout le monde était affairé ça et là, Liz servait une bonne dose de whisky à la gamine qu’Astrid avait bousculé.
- Tu voulais t’approcher de Señora, tu vas être servi. Va la voir, baratine la, fait ce que tu veux, mais je veux que la reine des glaces prenne feu. Pendant ce temps, la Méduse va semer un peu de zizanie chez les Favonius. Je sais précisément comment entamer les hostilités…
-SLUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUURP. SLUUUUUUUUUUUURP.
Eh bien, contrairement à la citoyenne qui n'avait pas grand succès, sa petite avait l'air d'être une sacrée séductrice qui avait un beau palmarès. À se demander si elle et son grand-père (sa grand-mère?) étaient vraiment de la même famille. Peut-être même qu'elle devrait demander des conseils à la petite noble pour que son aïeul puisse aller choper de la donzelle en toute facilité et sans se faire recaler.
Mais ce serait pour une prochaine fois. Puis, en toute honnêteté, même avec le meilleur prof au monde, Astrid ne changerait probablement pas ses méthodes.
Satisfaite par les informations qu'elle avait reçu, la noble partagea son plan de génie avec la femme à tout faire : créer une rixe. Avec un sourire jusqu'aux oreilles, elle répondit :
-Oh, là tu me parles ma ptite !
Les bagarres, c'était son domaine. Les créer, encore plus. Et elle avait déjà semé les graines de la discorde un peu plus tôt, ce qui facilitait grandement le taf. Par contre la femme aux cheveux blancs était moins sûre de la notion « subtilité » et se demandait vraiment si Iris s'attendait de sa grand-mère à ce qu'elle soit… « subtile ».
-La reine des glaces ? Tu penses qu'elle va me faire une chanson sur le fait d'être libérée, délivrée ? Demanda-t-elle en ricanant avant de finir le reste de sa boisson en une gorgée, poussant par la suite un soupir des plus ravis alors qu'elle fixait ses yeux lubriques sur les formes parfaites et la démarche sensuelle de la Señora qui envoûtait toujours le monde. Sa mission était donc une fois de plus simple et danse ses cordes. Faire chier le monde. Je vais la faire fondre tu vas voir, et elle deviendra tout feu tout flamme devant mon charisme légendaire, hehe. Une confiance à toute épreuve. Il le fallait bien pour être Astrid Dalgaard.
Aussitôt dit aussitôt fait, la citoyenne disparut en un souffle et apparut devant la star de la soirée et du Genshin. Thèse antithèse, le contraste était là. Une jeune femme dans une robe blanche et noire moulante à souhait, digne et qui transpirait le style par tous les pores de sa peau, et en face d'elle, une autre jeune femme qui...transpirait tout court, à force de courir, en plus de sa tenue rouge hors-saison qui attirait les moqueries des autres clients.
Cela étant, il ne fallait pas oublier que Astrid, Edmond, avait été une noble d'une grande famille et commandant de la garde en prime. Aussi, elle pouvait tout à fait se conduire avec classe et c'est ce qu'elle démontra en se baissant à un angle parfait selon les règles de la haute-société.
-Bonsoir à vous, Ô divine Señora. C'est un immense honneur de pouvoir vous rencontrer pour la première fois en ce lieu si select qu'est le Genshin. M'accorderiez-vous un peu de votre précieux temps à une âme en peine ?
Avec maîtrise, la femme à tout faire fit un baisemain avant de se redresser de toute sa hauteur. Elle semblait avoir capté l'attention de la reine des glaces.
-Vous avez un étrange accoutrement qui ne sied guère à vos manières, ma chère. Toutefois, l'excentricité et l'extravagance peuvent être divertissants et même ouvrir à de nouvelles mœurs. Quel-est votre nom ?
-C'est trop d'honneur ! Tout comme vous êtes la Señora, moi on me nomme Le Voyageur...du Solstice. Et je me présente devant vous, la reine des glaces pour….briser la glace, heh. Et même pour vous proposer de vous réchauffer et de vous faire fondre dans un lieu plus intime, en fait, juqsu'à ce que vous brûliez de passion pour moi.
Les traits de son interlocutrice devinrent soudainement durs et froids, avec une pointe de haine.
-Il semblerait que je vous aie mal jugée. Êtes-vous une sbire ou une clown envoyée par Balle pour tenter de me ridiculiser ?
Balle ? Qui c'était ? Aucune idée. Mais si la Señora la connaissait, c'était donc probablement une autre bonasse. Décidément ! Mais assez de ce jeu. Toute rigidité quitta son corps et elle haussa alors les épaules, cette fois de manière totalement décontractée :
-Naaaaaaaah, je la connais pas mais j'aimerais bien ! Elle est jolie comme toi ? Nah en vrai, j'suis envoyée par personne. J'suis ici de mon plein gré pour prendre ta place, sale mioche, en tant que reine incontestée du Genshin ! Sans aucune grâce, Astrid plaça son visage dans le pli du coude tout en pointant vers le plafond ses deux bras. Et une fois que ce sera fait, je t'emmènerai dans la chambre la plus luxueuse de ce taudis jusqu'au petit matin en ne te laissant aucun répit ! Huéhuéhué ! Et pour appuyer ses propos et son rire gras, elle imita deux ciseaux avec ses mains qu'elle entrechoqua.
Sans surprise et très rapidement, l’audience la hua et insulta la femme à tout faire. D'autres, qui n'étaient pas du côté de la reine des glaces, trouvèrent cela amusant, créant une tension entre les différents clients. Mais la Señora elle, resta de marbre, fidèle à son titre.
-Faites la sortir.
Oops. C'était mauvais ça. Très mauvais.
-Par contre, lui il a l'air de connaître Balle là, je l'ai entendu murmurer qu'elle allait venir !
Elle pointa du doigt un grand homme à la peau mate, à l'air espiègle et avec un cache-oeil en plus d'une queue de chevale absolument horrible qui se figea, et bizarrement, étrangement même, cela donna des frissons de dégoût à l'alcoolique qui eut une mine écœurée l'espace d'un instant. Elle ne le connaissait pas, et vu sa tête, elle en avait pas vraiment envie. Brrr, elle lui donnait même froid dans le dos. Et la Señora eut la même réaction.
Mais cette diversion suffit à ce que la blanche se faufile derrière la blonde pour agripper ses fesses et les malaxer. Et cela, suffit en retour à ce que la reine des glaces devienne la reine de feu. L'air autour d'Astrid crépita et cette dernière prit rapidement ses distances avec un sourire narquois.
Un jet de flamme alla dans sa direction qu'elle esquiva rapidement en se jetant sur le côté, et un autre jet...alla engloutir l'homme au cache-oeil pour une raison X ou Y.
Eh.
Il fallait croire que même elle ne le supportait pas non plus hein ?
Avec la grâce féline d’une panthère, Iris s’avançait vers un homme à l’allure bien singulière. Bel éphèbe, il avait une crinière d’un rouge flamboyant, coiffée en un long catogan qu’il laissait cascader dans son dos. Grand, il était drapé d’un long manteau de cuir noir qui lui agrippait les bras et épaules si fort qu’on l’aurait cru incapable de se mouvoir. En plus de son manteau, Dee-Look était habillé d’un pantalon de cuir tout aussi moulant, lui serrant les cuisses comme des saucissons, au point que le moindre mouvement provoquait un couinement de ses atours, comme une chaise trop chaude sur laquelle on ferait glisser son postérieur. Il se tenait dans une position qui devait être bien inconfortable, arquant ses jambes tout en croisant les bras, lui donnant l’air plus ridicule qu’autre chose, comme s’il voulait éviter de coincer son entrejambe dans un pli de cuir. Il tourna la tête vers Iris, montrant un visage vide de toute émotion. Même ses prunelles de rubis qui rougeoyaient sous les reflets des lampes ne dégageaient absolument rien, le néant total.
- Oui. C’est parce que je suis tout en noir. Je suis mystérieux. Fit-il à voix basse.
- Tu as l’air plus heureux que d’habitude, je me trompe ?
- Oui. J’ai un nouveau shampoing.
- Je vois cela, tes cheveux sont toujours aussi… rouges.
Dee-Look n’avait jamais été bien loquace, cela faisait partie de son caractère, ou du moins de l’absence de ce dernier. Leader de la faction des Favonius, c’était un homme taciturne qui ne disait pas grand chose et qui laissait les fortes têtes de sa faction, principalement des femmes, gérer les affaires à sa place. Le plus souvent, il s’agissait de la grande Jeanne, une officier de la Garde avec un tempérament d’acier, ou Barbra, une prêtresse de Lucy portée sur la chanson. Malgré tout, Dee-Look était le plus fort d’entre eux, et avait donc reçu le titre de chef, couronne qu’il n’avait jamais voulu avoir et ne faisait rien pour l’entretenir. Tout ce qui l’animait, c’était le besoin compulsif de gagner et de combattre tout ce qui pouvait être combattu. Iris le voyait comme une page vierge, ou une histoire qu’on avait stoppé dès la première ligne. La Méduse ne l’avait jamais trouvé bien intéressant. Il n’avait aucun sujet de conversation, se montrait toujours aussi froid qu’une porte de prison et n’avait d’yeux que pour… une toute autre sorte de personne.
En effet, le jeu de séduction de la cadette Delancy n’avait jamais eu d’effet sur Dee-Look. Mais ceci était facilement explicable quand on savait qu’il vivait une relation secrète avec un certain jeune homme à la peau bistrée portant un cache-œil et une queue de cheval. Secrète, car c’est ainsi qu’ils voulaient demeurer. Mais, dans les faits, l’intégralité du casino était au courant, mais faisait mine de ne rien remarquer et s’amuser à les espionner. Leur romance relevait du miracle tant Dee-Look était un homme qui n’affichait aucune expression, et personne ne comprenait ce que Kaya pouvait bien lui trouver. D’aucun disait que leur relation était purement charnelle, et que c’était sans doute pour ça que le minet restait avec lui. D’autres estimaient que Kaya agissait par intérêt en raison de la position avantageuse de Dee-Look au sein du Genshin. Tout le monde savait que Kaya était juste bon à jouer les gigolos et qu’il s’était déjà baladé de bienfaiteur en bienfaiteur avant de se cacher dans les jupons du Favonius.
- Dis moi Dee-Look, est-ce que tu es au courant pour Señora… ?
- Elle est là, je sais. Je n’ai pas peur. Je suis fort.
- Ce n’est pas ce à quoi je fais référence. Mon pauvre, tu ne sais donc rien ?
- Parle.
- Hé bien… continuait Iris en redressant ses lunettes. J’ai entendu dire qu’elle brûlait pour lui…
À ces mots, les yeux de Dee-Look brillèrent l’espace d’un instant, Iris venait d’éveiller quelque chose en lui, et il commençait déjà à fixer la flambeuse avec un peu plus d’intérêt. Il décroisa les bras et se tourna pour lui faire parfaitement face. À quelques mètres d’eux, la gamine qu’Astrid avait fait tomber, et qui se soulait au comptoir, laissa échapper un rot monumental en commandant une nouvelle bouteille, du xérès cette fois. Elle jeta son verre de whisky vide en arrière, celui-ci volant au-dessus de la tête de Dee-Look pour mourir sur la tête d’un rouquin avec un masque rouge sur sa tignasse. Le verre se fracassant sur son crâne, ce dernier tomba à la renverse, renversant des piles de jetons entassés sur une table de roulette.
- C’est pas elle qui brûle pour lui. C’est moi, Dee-Look.
- Je le sais bien, je ne fais que te rapporter ce que j’ai entendu… Les rumeurs, après tout, tu sais comme moi que ça va et ça vient.
- Qui t’a dit ça ?
- La cuisinière, Chian-Lin, qui l’a appris de la petite Kiki, qui les a surpris ensemble dans des sources chaudes.
- Des sources chaudes.
- Hé oui, les sources chaudes, tu sais ce que c’est hein ? C’est là qu’on surprend toutes les adultères, les couples cachés…
Dee-Look, fait inédit, s’était à froncer des sourcils, manifestement atteint dans son amour propre. Iris s’apprêtait à continuer jusqu’à ce que des éclats de voix se mirent à retentir derrière elle. Señora venait de projeter une immense gerbe de flammes vers Kaya qui la recevait de plein fouet. Iris pinça les lèvres, c’était sans aucune équivoque l’œuvre de son grand-père. Elle soupira avant de s’en retourner vers Dee-Look.
- Oooh, mea culpa. Elle comptait le brûler lui, voilà c’est ce que j’ai entendu. Oups !
Dee-Look ne semblait même pas l’avoir écouté et s’avançait déjà vers Señora, matérialisant un espadon de feu entre ses mains…
Un autre jet de flamme alla droit dans sa direction et, sans surprise, la femme à tout faire esquiva sans mal, laissant ainsi une autre personne innocente se manger l'attaque. La foule elle s'agitait de plus en plus. Toutefois, la citoyenne ne se contenta pas de simplement éviter l'attaque, loin de là ! Elle alla chercher un glaçon à la vitesse du son, le plaça dans le dos de la Señora, et s'éloigna de nouveau, le tout en un clin d’œil. Et pour empirer les choses, elle montra son popotin qu'elle remua sans honte pour provoquer davantage.
Astrid était sans conteste une chieuse de première, et son pouvoir était utilisé à son plein potentiel dans le seul et unique but d'agacer.
-Ça va t'aider à refroidir… ! Ou pas, haha.
La Señora s'apprêta à l'insulter et l'attaquer de nouveau mais un soudain silence s’abattit dans le casino, remplaçant les cris liés à l'explosion de la sorcière. La dominant d'une tête, un homme aux cheveux rouge flamboyant aimant un peu trop le cuir se tint devant la reine de Genshin, espadon de feu à la main.
-Okamari no suzuki. Marmonna-t-il à lui même avant de dire à voix haute : Tu as brûlé Kaya. À mon tour de te réduire en cendre.
Le Kaya en question était toujours à terre. Maintenant que Astrid le regardait de plus près, il était probablement le genre de personne à venir vous proposer en privé de faire des choses douteuses par lettres
-Hors de mon chemin, abruti fini. Ce soir tu n'es pas ma cible, mais elle.
Elle indiqua d'un mouvement de tête la jeune femme aux cheveux blancs qui sirotait au même moment et le plus paisiblement du monde un autre cocktail et qui, faisant mine d'être surprise, regarda autour d'elle avant de se pointer elle-même du doigt avec un air interrogateur.
-Euh, moi ? Oh. Ah. Ouais. Je suis sa cible, elle vise mon cœur, tout le tralala. Continuez je vous prie….SLUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUURP.
La haine se lisait de plus en plus sur les traits de la Señora, et cet air sauvage doublait son charme meurtrier.
-Je m'en moque. Répondit Dee-Look. Ce soir, tu meurs pour ton affront. Rituel.
Sur ce dernier mot, il porta le premier coup en frappant avec son épée de feu la femme...qui contre-attaqua avec une autre gerbe de flamme.
-C'est ce qu'on appelle combattre le feu par le feu ! S'exclama la citoyenne fière de sa blague.
On pouvait clairement voir les deux énergumènes se lancer des éclairs tant ils se toisaient avec violence. Autour d'eux, le public s'était écarté, ne supportant pas la chaleur qui émanait d'eux, et le casino avait arrêté toute activité, tout le monde étant intrigué par le potentiel affrontement. De plus, la tension était palpable entre les différentes factions qui supportaient soit la Señora, soit Dee-Look. On pouvait même entendre le tonnerre frapper tellement...tellement…
Attendez, y'avait vraiment du tonnerre en fait. À l'intérieur même du casino.
-Qu'est-ce que c'est que ce bordel…. ?
Dee-Look claqua de la langue, la reine de feu grinça des dents. À côté d'Astrid, des clients murmurèrent à l'unisson un unique nom. « Balle, la reine de foudre ». Oh merde, la femme à tout faire avait eu raison ? Hommes, femmes, et enfants (amenés par des parents irresponsables… ?) s'écartèrent sur le chemin d'une magnifique jeune femme aux cheveux améthyste et en kimono, avec là encore des formes qui auraient fait baver n'importe qui, notamment Astrid qui ouvrit grand les yeux et qui la siffla. Elle rejoignit les deux ennemis et prit la parole, sans pression aucune :
-Je vois que les barbares sont de sortie ce soir. N'avez-vous pas honte de créer un tel spectacle au Genshin ? Vous en ruinez sa réputation.
Au même moment, le sol se mit à trembler.
-C'est qui cette fois-ci hein…. ?
Cette fois-ci, ce ne fut pas une bonasse mais un homme habillé avec soin et aux longs cheveux bruns rassemblés en une fine queue de chevale qui rejoignit le trio. Lui aussi, dégageait une certaine prestance. Un autre leader de l'une des factions du coin hein ?
-C'est qui lui ? Demanda Astrid à sa voisine, une jeune femme habillée en rose et qui semblait être une hybride baleine qui tremblait d’excitation en voyant un tel rassemblement. La chieuse se souvenait d'elle. Elle l'avait aperçue en train de se ruiner dans l'un des jeux quelconque et littéralement se coller aux bottes d'un rouquin avec un masque sur la tête en disant « JE TE VEUX JE TE VEUX, JE T'AURAI MEME SI JE DOIS METTRE TOUT MON SALAIRE DE CE MOIS ». Le genre de chose dont on se souvenait, quoi.
Remontant ses lunettes sur son visage telle une professionnelle expliquant à une nouvelle-venue ne sachant rien (ce qui était le cas), elle dit :
-C'est Zhing Lo, l'un des leaders de Genshin ! L'homme parfait après Chalde, et l'un de mes maris ! Huehuehuehue ! Qui aurait cru qu'on verrait toutes ces personnalités ce soir, c'est un rêve qui est devenu réalité !
-Hmmm ooooooooooooooooooook.
Petit à petit, Astrid s'éloigna d'elle comme si de rien n'était. Il y avait vraiment des personnes bien étrange dans le coin. Pas qu'elle était vraiment bien placée pour juger les autres cela dit.
Rapidement, elle rejoignit Iris.
-Ça pourrait exploser d'un moment à l'autre, heh. On rajoute encore de l'huile sur le feu? Ce qui serait doublement efficace vu que y'en a deux qui maîtrisent le feu, heh.
La tension était palpable dans l’atrium du casino. La foule commençait à se réunir atour des quatre leaders de faction, à la fois fascinée et inquiète, s’attendant à ce qu’à tout moment, l’un d’eux décide de donner le premier coup. Señora toisait les autres de son air d’impératrice des glaces tandis que Dee-Look la foudroyait d’un regard noir plein de furie. Balle et Zhing-Lo, arrivés après les premiers heurts, se tenaient prêts à dégainer leurs armes pour fondre sur leurs adversaires. Ces deux là n’avaient pas spécialement besoin de raison, ils attendaient cet instant depuis bien longtemps. Zhing-Lo voulait une bonne raison pour prendre sa retraite de flambeur, lassé de sa bonne position au sein du Genshin. Il voulait de la tranquillité, un certain apaisement loin de tout ce luxe, de ses partisans à qui il répondait de moins en moins. Quant à Balle, elle ne voulait qu’une chose : se débarrasser de toutes les autres factions pour que plus aucune n’existe et, par la même occasion, garder la mainmise sur tout ce petit monde.
Pour Iris, la venue des deux autres chefs était un problème. Il fallait qu’elle et Astrid provoquent le chaos, mais ils ne pouvaient pas intervenir concrètement au milieu des quatre belligérants, sous peine de se faire immédiatement démasquer. Astrid avait bien travaillé et semblait encore partante pour jouer les embrouilleuses, c’était bon signe. Iris se demandait ce que le reste de la famille pourrait bien penser de tout ceci en voyant un tableau pareil. Elle et son grand-père, œuvrant de concert pour détruire une maison de jeux. Lui, grand héros du royaume, elle, cadette fatale ; deux profils si différents et une mission qui ferait pâlir de honte et de sidération le reste des Delancy. Quoi qu’il en était, Iris ne pourrait leur en parler, et Dahlia était bien trop loin pour se préoccuper de pareilles cavalcades. Que devaient-elles faire à présent ? Intervenir auprès de Balle ou Zhing-Lo serait bien trop voyant. De plus, Señora avait déjà bien carbonisé Kaya qui, sans pour autant être mort, sentait la saucisse grillée étalé au sol.
Regardant autour d’elle, elle remarqua le jeune homme qui avait été heurté par le verre de la gamine au comptoir. Arborant un costume cintré d’un gris argenté, il portait un étrange masque pourpre ressemblant à un démon, mêlé dans des mèches d’un beau blond vénitien. Son veston, couvert de taches liquoreuses et d’éclats de verre, avait beau être dans un sale état, le bellâtre conservait néanmoins une certaine prestance. Iris vit là une parfaite occasion de jeter encore un peu d’huile sur le feu. La belle fit signe à Astrid de rester près d’elle et fit quelques pas vers le type qui semblait regarder autour de lui pour trouver le coupable du méfait dont il avait été la victime. Voyant Iris, il cessa toute recherche pour tenter de retrouver bonne figure, mais se lacéra malencontreusement un doigt en voulant passer la main dans ses cheveux. Il jura avant de retirer le morceau épineux et le jeter dans un pot de plantes :
- Peste ! Vraiment navré, mes beautés. Fit-il en adressant un clin d’œil aux deux femmes. Avez-vous vu qui a fait cela au beau Tartatatin ?
- À vrai dire, oui. C’est elle là, au comptoir, tout en rouge avec son béret et son sac à dos.
- Kli ? Cette gamine ?! Je vais lui en apprendre les bonnes manières à cette malpolie. Hé, petite !
L’intéressée, qui en était à son quatrième verre de xérès, laissa échapper un puissant rot que même Astrid aurait pu trouver impressionnant, avant de s’en retourner vers le Fatui.
- Qu’est-ce que t’as, le puceau ?
- C’est toi qui m’a jeté ton verre sur la tête ?
- Bah ouais, tu vas faire quoi ?
- Te montrer la sortie déjà, pour commencer, on va aller régler ça dehors et…
- J’crois pas non. AAAAAAAAAAAH !!!
Kli poussa un cri strident, causant encore plus de remue-ménage au sein de la vaste salle. Plusieurs joueurs renversèrent leur table, d’autres leurs consommations. Deux étoiles filèrent depuis les étages supérieurs pour tomber sur le sol du rez-de-chaussée, tombant derrière Tartatatin pour le prendre en tenaille. Toutes les deux étaient, comme Kli, de petite taille. La première, de bleu vêtue, avait un teint cadavérique et un air apathique. La seconde avait l’air d’être une hybride raton-laveur, ou portait un costume qui le suggérait, une feuille d’arbre flottant au-dessus de sa tête.
- T’as cru que tu pouvais venir me faire chier pénard ? Répéta Kli, sortant un cigare de sa poche pour commencer à le fumer devant le type.
- Tu ramènes tes copines de la cour de récré’ du coup ?
- J’suis pas une gamine, j’suis une naine, connard ! Fit la raton.
- On va tellement fracasser l’immondice qui te sert de face que même ta mère te reconnaîtra plus, ponctua la morte-vivante.
- Si tu tiens à ta virilité, reprit Kli, tu devrais te mettre à courir.
Une explosion retentit, Kli venait de faire sauter une petite bille d’énergie enchantée devant son adversaire, l’envoyant valser jusque dans un lustre au-dessus de tables de Black-Slime. Le lustre se décrochant, écrasant les tables en contrebas. Les trois petites se mirent à nouveau à hurler avant de se ruer vers le pauvre homme. Le chaos commençait à s’installer et Iris s’en retourna vers Astrid, elle avait une mission toute particulière pour elle…
- Bon, maintenant que ça commence à chauffer, la pire chose qui pourrait nous arriver, ça serait que la patronne débarque pour tout arrêter. Toi qui cours plus vite que la foudre, grimpe tout en haut du Genshin. Tu dois bloquer la directrice dans ses quartiers, qu’elle n’en sorte pas. Tu devrais vite savoir qui c’est. Elle s’appelle… Paimon.
…
Au sens figuré bien entendu. Pour le sens propre, c'était ses affaires personnelles et personne ne pourrait se permettre de juger ses goûts.
Dans tous les cas, elle se réjouissait de voir des naines terroristes….ou devrait-elle plutôt dire des « créatures magiques » terroristes refaire le portrait à ce Don Juan.
Sans plus d'explication, la petite-fille demanda à ce que la citoyenne monte en haut du Genshin pour bloquer la directrice.
-Oh, ça me dérange pas de rester bloquée avec la directrice dans son bureau, surtout si elle est aussi bien foutue que Balle et La Señora, et les autres serveuses du casino. Par contre si c'est le cas, faudra pas t'étonner si tu me revois pas avant demain matin, heh.
Comme d'habitude, elle ne ratait aucune occasion pour faire ses blagues graveleuses mais ne perdit pas plus de temps et disparut de la salle principale à toute vitesse, non sans prendre la naine appelée Kli par les pieds avant de tourner sur elle-même pour finalement la balancer sur les chefs de groupes avec un grand rire, rendant honneur à ce sport si particulier, si rare et si noble du « lancer de créature magique ». Cerise sur le gâteau, avec la vitesse à laquelle elle avait tourné et les verres que la naine avait bu, elle vomit directement une fois qu'Astrid la lâcha, créant alors un tourbillon des restes de son dîner et de sa consommation, éclaboussant les clients sur le passage.
Si Iris avait été touchée par ça ? Aucune idée, la blanche n'était déjà plus sur les lieux de son méfait et grimpait les escaliers aussi vite qu'elle le put.
Sauf que bon. Des escaliers, ça reste long et chiant à monter. Aussi…
-123...124..124..oh putain de merde, pourquoi y'a autant de marches ?
Ce fut essoufflée, en sueur, et en rampant qu'elle arriva au dernier étage de ce maudit casino bien trop haut. Elle ne l'avait absolument pas grimpé à la vitesse du son, mais plutôt à vitesse d'escargot. Si elle avait compté utiliser tout son charme pour séduire la directrice, elle pouvait tirer une croix sur ça sauf si la personne en question aimait bien la sueur. Par contre, quelle idée d'avoir mis son bureau tout en haut avec toutes ces marches à monter. Soit elle aimait faire du sport, soit elle avait un mécanisme magique ou de la téléportation, soit elle aimait tout simplement souffrir.
Iris avait insisté sur la rapidité, mais la femme à tout faire se permit de rester au sol pour souffler un bon coup avant de finalement se relever.
Traînant des pieds, elle traversa le long corridor et trouva finalement une grande porte en bois à double battant avec inscrit « Paimon ».
Bon. Il suffisait juste de bloquer la porte c'est ça ? Pas de souci, c'était facile. Mais un doute traversa soudainement l'esprit de la blanche. Est-ce qu'elle était dans son bureau au moins… ? Ou est-ce que Astrid avait fait tout ce chemin pour rien et Paimon était en bas en ce moment même ?
…
Torturée intérieurement par sa curiosité, elle plaça son oreille contre la porte. Rien.
Tch. Est-ce que ses craintes étaient fondées ?
…
Elle entrouvrit la porte et aperçut de la lumière. C'était déjà bon signe.
-Madame Paimooooon ?
Aucune réponse. Bordel de merde.
Sans crier gare, la citoyenne ouvrit cette fois la porte pour de bon et vit que personne n'était à l'intérieur.
-EH OH PAIMON ?
Toujours rien. Et ce fut les yeux grands ouverts qu'elle aperçut sur le bureau un petit panneau indiquant… « pause WC ».
Grosse surprise, il n'y avait pas de toilettes, à l'étage de ce casino mal foutu. Les seules qu'elle avait aperçu étaient….tout en bas.
-OH LA FILLE DE…
Sortant son vélo tout-terrain de son sac sans fond, la citoyenne dévala les escaliers en maudissant la directrice de tous les noms.
Fort heureusement, la descente fut plus rapide que la montée, surtout avec son véhicule – bien qu'elle faillit se casser la gueule avec une bonne dizaine de fois en l'espace de quelques secondes – et l'alcoolique s'arrêta pile devant les W.C VIP qui étaient non loin de l'entrée de la salle principale du Genshin. Au même moment, la porte s'ouvrit pour non laisser sortir une jolie jeune femme aux formes bien rondes comme l'aurait souhaité Astrid, mais une sorte de créature magique volante. 'fin, une naine volante quoi.
-Putain, je comprends mieux pourquoi elle s'en contre-balance de devoir monter ces marches. ELLE VOLE. S'exclama la femme à tout faire presque hystérique.
-Euh, pardon ?
-Oh. En un clin d’œil, le véhicule fut rangé dans le sac à dos sans fond. Vous-êtes madame Paimon c'ça ? Je suis… Vite. Trouver une excuse quelconque pour l'intéresser, la refaire monter dans son bureau, et l'y bloquer – quoique ça voudrait dire qu'Astrid allait devoir remonter et ça, elle en avait juste pas envie -. Astrid était douée pour mentir et trouver des excuses quelconque, aussi, ce fut sans difficulté qu'elle sortit un : Je suis envoyée par...vous savez qui.
Ah.
Ok.
Bien joué Astrid. Des années d'expérience pour ça. Comme si elle allait mordre à l'ha…
-Vous êtes l'envoyée de Madame Ping ?
-Ouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuiiiiiiiiiiii, c'est ça, elle-même. Madame Pong. Euh, Ping.
-Bien, mentons à mon bureau. Je ne vous attendais pas aujourd'hui, mais nous avons fort à discuter.
-Vous voulez pas plutôt qu'on...discute ici ? Ou dans les toilettes ? J'suis sûre qu'elles sont confortables. Regard suspicieux. Ouais non j'ai rien dit haha.
-Vous êtes bien excentrique….à l'image de Madame Ping. Cela dit je comptais tout d'abord jeter un coup d’œil à la salle principale. Il me semble y avoir plus de bruit et de grabuge que d'habitude. J'ai même entendu une….explosion ? Est-ce que Kli referait des siennes ?
Merde.
-Oh, nul besoin. J'y étais tout à l'heure, tout le monde s'amuse, les gens perdent leur argent, reluquent les serveuses, touchent les fesses à la Señora, tout va bien vraiment. Un autre regard lourd et suspicieux, puis un autre bruit d'explosion. Et comme si cela ne suffisait pas, Tartatatin – possiblement ? Sa face était trop défigurée - sortit de la salle principale en hurlant « ALEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEED » en étant poursuivi par les naines enragées qui lui promettaient encore de le castrer. ...euh... Astrid haussa les épaules. C'est normal au Genshin non ? Un peu d'animation, hahaha. Haha. Ha….Ahem….
- Hé bien, y a de l’agitation ce soir, soupira nonchalamment Liz alors que, derrière son comptoir, elle s’activait à ranger ses bouteilles d’alcools précieux. Je sens que je vais devoir bientôt fermer boutique.
- Tu as l’air sereine, répondit Iris en portant à sa bouche un verre de martini dans lequel flottait une olive verte.
- Je sais me défendre. Et il faudra bien qu’ils étanchent leur soif après leur bagarre.
- Vu les proportions que ça prend, je me demande s’il y aura encore un bar après leur affrontement. Sucrette a prévenu la Garde ?
- Elle essaye, mais elle vient d’être assaillie par un torrent de personnes en furie. Je viens de lui passer un petit coup de cristal de comm’. La pauvre fait venir une légion de fiacres pour qu’on mène tous ces bourges en lieu sûr.
Intérieurement, Iris exultait. Si la Garde n’avait toujours pas été prévenu, alors les factions du Genshin continueraient de se taper dessus à grands coups de sortilèges et de passes d’armes. Le chaos régnait autour des deux femmes, toutes les deux d’un côté du comptoir à siroter ce qui semblait être les derniers verres que l’on prendrait au sein du grand casino Genshin. Sur le champ de bataille, la naine raton fut propulsée sur un gros cristal rond à facettes suspendu entre deux lustres. L’orbe d’illuminations se décrocha de son socle pour s’écraser au sol, détruisant la table de poker juste en-dessous et entamant une course folle au milieu de la salle, la demoiselle toujours perchée dessus. Alors qu’Iris s’apprêtait à prendre une nouvelle lampée de son verre, une voix bien trop mielleuse pour être honnête vint soudainement l’alpaguer :
- Hmm… Qu’avons-nous là, hmmmm ?
Tournant leurs têtes, la flambeuse et la barmaid tombèrent sur une donzelle toute mince vêtue d’une tunique blanche à longs drapés rouges. Fixant les deux femmes de ses yeux d’un profond violet, l’inconnue possédait de longs cheveux roses au milieu desquels se distinguaient deux oreilles savamment dissimulées. Un diadème rutilant sur son crâne, elle minaudait en gigotant sur elle-même, comme si elle tentait d’imiter les manières de femme fatale que possédait Iris. Malheureusement pour cette midinette, elle ne parvenait pas à égaler la classe travaillée de la Méduse.
- Kanyae, qu’est-ce que tu veux ? Fit Liz d’un ton qui ne laissait aucune équivoque sur son inimitié envers l’arrivante.
- C’est Yae, maintenant. Juste YAE ! Répondit l’intéressée, agacée. Et, au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, Liz, c’est la guerre. Et toi et moi sommes dans des camps différents.
Iris jugea l’instant bon pour intervenir. Elle appréciait Liz et ne supportait pas le ton odieux de cette renarde.
- Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, c’est une conversation privée.
Yae se tourna enfin vers elle.
- J’ignore qui vous êtes, mais à vrai dire cela m’est égal. Vous pouvez nous laisser à présent. Bitto, à toi !
Avant même qu’Iris ne puisse réagir, un flot de fumée serpenta autour d’elle avant de tourbillonner en épaisses volutes. Se relevant brusquement, son tabouret tomba au sol et disparut au travers de l’épaisse vapeur. Quand la fumée se dissipa, la cadette Delancy constata qu’elle se trouvait dans une vaste pièce avec de grands drapés brun et or un peu partout sur les murs. De belles flammes ambrées crépitaient au milieu d’un âtre imposant en forme de gueule de dragon. Plusieurs breloques pendouillaient au plafond, tantôt des carillons, tantôt des pampilles et perles de bronze tandis que, sur le sol, s’étalait un grand tapis en fourrure d’ours des neiges. Elle sursauta lorsqu’elle entendit :
- Hey, salut ma torride.
Iris fit volte face pour se retrouver devant un colossal lit à baldaquins d’un rouge criard. Au milieu des tentures, un homme à demi nu trônait sur ce qui semblait être un matelas à eau. Une immense chevelure blanche tombait en cascade dans son dos, son corps huilé était parcouru par plusieurs tatouages rouges. Au sommet de son front, deux cornes perçaient à travers sa tignasse et il fixait Iris d’un air libidineux qui en disait long. Il avait l’air d’attendre qu’elle le rejoigne, allongé dans une position lascive sur le lit. Écœurée, elle pinça les lèvres avant d’arquer un sourcil.
- Où est-ce que tu m’as emporté ? Lui demanda-t-elle en le foudroyant du regard.
- C’mon boudoir, chéri, j’appelle ça ma Sexy-théière. C’est là où j’ramène mes conquêtes pour conclure.
- Elle n’a donc jamais servi, je suppose.
Iris connaissait la magie des théières du bonheur, ces artefacts fort prisés par les aventuriers fortunés afin de leur servir de chambre toute confort, et purement gratuite, durant leurs périples. Ce genre d’objet magique n’était pas à la portée du premier clampin venu, si bien que la jeune Delancy se doutait que ce misogyne devait l’avoir gagné aux jeux ou grâce à un jackpot bien investi.
- Allez, détends toi ma belle, insistait Bitto en lui tendant une bouteille de vin sortie de sous un oreiller. Tu veux pas laisser l’monde faire leurs affaires et v’nir te détendre un peu ? J’vais te montrer pourquoi on m’appelle Bitto l’Endurant. Aller, ouvre donc la bouteille.
- Et toi tu vas comprendre pourquoi on m’appelle la Méduse…
Émue par la colère face à cet homme déterminé à se vautrer dans la luxure, les cheveux d’Iris s’étendirent pour onduler autour de sa tête comme des serpents prêts à fondre sur leur proie. La jeune femme attrapa la bouteille de vin par le col et la brisa en frappant brutalement une des colonnes à baldaquins du lit. Iris enserra les poignets, genoux et le cou du cornu pour l’attirer avec force vers elle. Ci fait, Iris lui plaqua ensuite la bouteille brisée à quelques centimètres de son entrejambe.
- Si tu ne veux pas perdre ce qui te sert de fierté, t’as intérêt à me faire sortir de ta théière immédiatement.
- Relax poupée et… AH !
Iris en avait en assez et, d’un prompt mouvement de poignet, avait ouvert une petite entaille juste en dessous de son nombril exposé. Quelques gouttes de sang commençaient à entamer leur lente course sur la peau tressaillant de la brute.
- J’ai dit maintenant.
Bitto ne se fit pas prier et n’attendit même pas d’être relâché de l’étreinte de la Méduse pour renvoyer Iris hors de sa théière. Un ruban de fumée l’entoura comme lorsqu’elle était entrée, et Iris sentit que Bitto n’était plus entre ses mèches, resté à l’abri dans son boudoir. Lorsqu’elle fut enfin dehors, Iris se retrouva face à un tableau des plus étranges. Le chaos avait cessé mais la pièce principale du Genshin était dans un état de destruction tel que plus rien n'était intact. Les tables de jeux avaient été détruites, les ornements en lambeaux et le bar n’avait plus de comptoir, et les carafes avaient été transformées en mille éclats de verre. Dans un coin de la salle, Liz était au sol, s’appuyant contre un pilier. À ses côtés, Sucrette appliquait ce qui semblait être des bandages. Yae était introuvable, Liz avait dû gagner leur duel. Les trois naines étaient perchées sur un lustre et Kli lâchait des rots bruyants à intervalles réguliers. Et les quatre leaders étaient chacun postés dans un coin de la vaste salle. Au milieu, se tenait une bien étrange figure. C’était une petite dame, âgée, habillée d’une robe verte comme du jade, ses cheveux grisonnants coiffés en chignon serré. L’air impérial, elle marchait avec une canne dorée incrustée de pierreries qui lui donnait l’air d’une reine, des bijoux allongeant certains de ses ongles les faisant ressembler à des serres. Derrière elle se tenaient deux ombres, immenses comme des golems, à la carrure d’armoires à glace. Balayant l’assistance de son regard d’aigle, Madame Ping s’arrêta sur Iris.
- Paimon, amenez-moi jusqu’à elle. Il est l’heure.
Après, la femme à tout faire ne pouvait que se sentir soulagée que Paimon ait refusé, puisque cela l'avait épargnée de devoir remonter les marches de l'enfer, une expérience qui l'aurait sans doute tuée de fatigue. Il fallait qu'elle pense un peu aux pauvres personnes qui auraient dû monter ces même marches pour redescendre son corps sans vie, les pauvres méritaient mieux que ça !
Toujours volant au dessus du sol, la petite Paimon entra donc dans ce qui était autrefois la pièce maîtresse de son œuvre d'art, suivie de prêt par la blanche au sourire narquois.
À la vue du désastre qui s'était déroulé en ce lieu, la farceuse s'était attendue à ce que la propriétaire pète un plomb, fonde en larme, ou aille se pendre (quoique, avec son pouvoir, était-ce seulement réalisable?), mais contre toute attente, rien de tout cela. Elle examina en silence les tables brisées, les endroits brûlés, les lustres décrochés et en miettes ainsi que les traces de vomi tout en restant indifférente. Au mieux, elle avait tout simplement secoué légèrement la tête tout en marmonnant des chiffres à chaque fois que ses yeux passaient sur des dégâts. Son calme et son professionnalisme étaient sans doute ce qui lui valait le rôle de propriétaire du Genshin.
Du moins, c'était ce que Astrid pensa jusqu'à ce que la naine se mette soudainement à hurler au désespoir en voyant le buffet détruit et la nourriture gâchée.
-Noooooooooooooooooooooooooooon !
Ce cri là, cette colère et cette désolation, la citoyenne les partageaient, car elle était tout aussi peinée de voir tant de bouffe – et surtout tant d'alcool – finir à la poubelle. Avec toute la compassion du monde, elle tapota le dos de la naine et lui dit :
-Nous retrouverons les coupables et nous les ferons payer le prix fort. Sans aucune honte alors qu'elle était l'une des coupables en question, elle pointa du doigt les leaders qui s'étaient prosternés en la voyant et la vieille dame qui se tenait là. J'pense d'ailleurs que c'est eux là, z'ont une belle tête de personnes qui se reprochent d'avoir crée un chaos tel que la délicieuse nourriture est maintenant immangeable alors qu'elle aurait pu finir dans notre estomac.
Tiens ? Elle était nouvelle la vieille. Qu'est-ce qu'elle faisait ici avec ses deux gros gardes du corps ?
-Madame Ping….grogna la naine, visiblement agacée. Vous êtes donc venue plus tôt que prévu.
-Paimon, quel plaisir réellement. Cet endroit est aussi charmant que dans mes souvenirs.
Oh. Oooooooh. Merde.
Comme si de rien n'était, la citoyenne s'éloigna à petit pas et rejoignit sa petite-fille.
-On devrait pas se casser ? Je crois qu'on a fait notre job non ?
Surtout qu'à priori, des gardes ne devraient pas tarder à arriver d'un moment à l'autre. Cela étant, Astrid était aussi curieuse de voir le résultat final de son dur labeur. Il aurait été bête de ne pas connaître la fin mot de l'histoire qu'elle avait influencé.
Ping et Paimon se toisèrent longuement, à la même hauteur grâce à la magie. Une violente hostilité pouvait être ressentie, si bien que les autres naines dont Kli descendirent du lustre pour se placer aux côtés de ce qui semblaient être leur maîtresse pour faire face aux deux géants gardes du corps qui étaient d'ailleurs habillés fort étrangement. Comme s'ils portaient des sortes de combinaisons de protection avec une visière en verre. L'un était rouge, l'autre rose. Hmm. La scène était….un peu ridicule à vrai dire, surtout avec les naines qui s'étaient grimpées dessus pour paraître plus grandes et imposantes.
-Que me veut la traîtresse qui a abandonné le Genshin pour être la patronne du Amogus ? Êtes-vous la responsable de tous les dégâts causés ici ?
-Qui sait ? Répondit énigmatiquement Ping en remontant ses lunettes avec un air qui semblait vouloir dire « comme prévu ». Dans tous les cas ma chère Paimon, ma présence ici ne signifie qu'une chose et tu le sais. C'est l'heure.
-Oui, c'est l'heure d…
-DU DU-DU-DU-DU-DU….DUEEEEL ! Ne put s'empêcher de dire Astrid à voix haute avant de soudainement se mettre les mains devant la bouche. Ah. Euh. Oops. Euh, continuez j'vous prie, faites comme si j'avais rien dit heh. C'est un peu gênant tous ces regards meurtriers tournés vers moi tee-hee.
-TOI ! S'indigna la Señora. Tu vas me le payer !
L'un des gardes du corps pointa son doigt vers la citoyenne et dit :
-Sus.
-Eh oh, c'toi qui suce ! Il s'prend pour qui l'autre eh avec son vieux costume tout naze là ! Regarde toi dans un miroir avant de pointer ton gros doigt boudiné sur deux bombes sexuelles telles que nous ! S'exclama-t-elle avant de lancer à Iris un regard interrogateur sur la suite de son plan….que la femme à tout faire venait peut-être de faire capoter. Heh.
-Quelqu'un a dit bombe ? Burp. Réagit Kli en faisant tomber par inadvertance d'autres de ses billes d'énergie. Merde.
Kli partit comme un boulet de canon dans les airs et décrivit un parfait arc de cercle avant de retomber tête la première dans un aquarium plein d’aquafills luisants. Les petits familiers, terrifiés par l’arrivée brusque de la flamboyante petite, filèrent se dissimuler sous des brins d’algue ou dans des creux de décor. Plusieurs entrèrent dans la proue d’un petit navire miniature tandis que d’autres se réfugièrent dans le fond d’une amphore couverte de mousse et de bernacles. La blondinette faisait la planche, glissant sur l’eau au sommet de l’aquarium, s’adonnant à un concertos avec sa bouche et sa langue. Fixant le plafond, elle imitait des bruits de flatulences contemplant une série de morceaux de verre qui, pour Kli, ressemblait à la voûte céleste. Astrid avait rejoint Iris, toujours aux côtés de Liz. Un des golems de Madame Ping avait alpagué son grand-père dans un dialecte des plus particuliers. Sortant de l’ombre, le premier golem ressemblait à une énorme armure en scaphandre, son corps d’une couleur rouge intense. Le deuxième s’avança à son tour, révélant cette fois son corps d’un atroce rose bonbon.
Madame Ping fronça les sourcils avant de se tourner vers Astrid. La fixant de ses prunelles perçant au travers de lunettes en demi-lune, la vieille femme frappa sa canne sur le sol et sa cohorte se tint sans attendre au garde-à-vous. Pinçant les lèvres, elle se tourna vers chacune des personnes présentes dans la pièce, sauf Kli qui barbotait toujours dans son aquarium. Paimon essayait sans cesse de s’enfuir en lévitant mais se réfrénait à chaque fois que Ping reposait sur elle ses yeux de vautour. Il était bien clair que la patronne du Genshin était terrifiée et faisait tous les efforts du monde pour le dissimuler.
- Nous voilà dans une impasse, fit Madame Ping de sa voix inflexible. Il y a un IMPOSTEUR, parmi nous.
Madame Ping frappa à nouveau sur le sol à l’aide de sa canne. Un tonitruant son d’alarme se fit alors entendre. Soudain, tout le monde dans la pièce fut projeté en avant, comme aspirés par une force invisible. Une table ronde se dressa au milieu du chaos ainsi que plusieurs chaises. Tout le monde, Iris et Astrid compris, fut assis autour de la table. La vieille dame fit apparaître un luxueux fauteuil avec de gros coussins juste pour elle avant de poser son séant dessus, un siège digne pour présider leur assemblée.
- Quelqu’un ici est responsable de tout cela. Et avant que la Garde n’arrive nous devons le déterminer.
- Qu’avez-vous à en tirer, Ping ? Piailla rapidement Paimon.
- Il est évident que vous n’avez aucunement l’étoffe pour tenir ce casino. Je débusque l’imposteur, le livre à la Garde, votre réputation est ruinée et je rachète le terrain pour bâtir ma seconde antenne d’Amogus : l’Airship.
- Vieux pruneau, vous n’avez pas le droit !
- Le pouvoir de l’argent et du capitalisme m’en donne le droit. Mais cela vous innocente dans notre affaire, vous n’auriez pas détruit votre propre casino.
- P’tet pour toucher l’assurance ! Fit Kli toujours dans l’aquarium.
Madame Ping eut l’air subitement pensive, forçant Paimon à intervenir derechef.
- Ça suffit ! De toute façon, je n’ai pas de pouvoir pour tout casser ! Eux, ils en ont ! C’est l’un d’entre eux !
La directrice flottante avait pointé les leaders de faction d’un doigt vengeur, et à juste titre. Après tout, c’était effectivement eux qui avaient tout ravagé…
- J’ai été provoqué, éclata Señora, ce n’est pas moi, je me suis simplement défendue.
- J’ai vu Señora, elle ne faisait pas ses tâches, s’empressa d’enchaîner Dee-Look. Elle a brûlé mon partenaire.
- Mensonges éhontés, j’étais dans la salle de sécurité avant que la rixe ne démarre, déclara Balle.
- Et moi, j’étais à cafet’, dit simplement Zhing-Lo.
- Et, vous trois…?
Madame Ping fixait Iris, Astrid et Liz. Elle avait épargné Sucrette, tremblotante sur sa chaise, l’ayant sans doute croisé à l’accueil en entrant dans le casino. Iris sut tout de suite qu’elle devait intervenir bien vite avant qu’Astrid ne sorte une énième idiotie et ne les grille sur place.
- J’étais au bar, en compagnie de Liz. Quant à cette dame que je ne connais pas et qui se nomme sans doute Wib Laurde, je l’ai vu une bonne partie de la soirée en compagnie de Paimon.
- Oui, ponctua Liz bien vite. J’ai servi mademoiselle toute la soirée, elle s’est absentée quelques secondes pour saluer monsieur Dee-Look, mais elle est restée à mon comptoir depuis son arrivée. Je confirme tous ses dires.
- BURP ! Laissa échapper Kli depuis son perchoir. Z’êtes tous cons à vous défendre. Y a po de cafet’ au Genshin.
Un long silence s’installa alors parmi l’assistance, tous se retournèrent vers Zhing-Lo qui devenait peu à peu cramoisi.
- Seriez-vous donc… l’IMPOSTEUR ? Grinça Madame Ping.
- Je vote pour lui, se dépêcha de confirmer Iris.
- De même, fit Liz pour aider son amie.
D’autres mains se lèvèrent, deux, puis quatre, puis six, scellant le sort du pauvre leader des Adeptes… Dehors, on entendait des bruits de pas et de tintements d’armure se faire entendre dans l’antichambre du casino.
- La Garde, ils sont là ! S’écria Paimon.
- Vite ! Ejectez l’imposteur !
Et, sur ses mots, tout le monde se rua sur Zhing-Lo pour le couvrir de chaînes…
-Une bonne chose de faite ! L'imposteur a été arrêté, et tout va retourner dans l'ordre ! Parlant d'ordre….
Les forces de l'ordre rentrèrent en trombe dans la salle principale du Genshin, armes à la main, s'attendant visiblement à devoir en découdre pour calmer le chaos qui avait été sûrement décrit par les clients comme « apocalyptique ». Quelle ne fut pas leur surprise en constatant que le calme était revenu et que Madame Ping, dans toute sa splendeur et toute sa noblesse, présenta avec dignité l'imposteur aux gardes. L'un d'eux, un officier sûrement, s'avança.
-Baissez vos armes. Intima-t-il aux autres qui s'exécutèrent sur le champs. Madame Ping, quelle surprise de voir voir ici. Par respect, il retira son casque et s'inclina devant la vieille peau. Je présume que c'est lui le responsable de….tout ça ?
Il jeta de nouveau un regard à la salle en fronçant les sourcils, se demandant probablement comment une seule personne avait réussi à faire ça, ou à créer une telle réaction en chaîne.
-Eh bien, si ce n'est pas mon petit loup-garou. Cela fait longtemps que je ne t'ai pas vu à l'Amogus.
Le garde toussa soudainement, assez fort pour tenter d'étouffer le dernier mot de Madame Ping.
-Madame, j'ai été...occupé disons. Mais je saurai retourner à votre établissement tout à fait respectable.
Hmm, tout cela se déroulait mieux qu'Astrid ne l'aurait prévu. Ils allaient probablement embarquer l'imposteur et laisser le reste tranquille, surtout si l'officier connaissait la patronne de l'Amogus.
Mais bien sûr, il fallait que quelqu'un gâche tout.
-Il y en a un deuxième. Lança la Señora en jetant un regard accusateur sur l'alcoolique qui détourna ses yeux vers le plafond tout en sifflotant comme si de rien n'était.
-Un deuxième quoi ? Demanda Balle.
-Un deuxième imposteur.
Toutes les personnes présentes eurent un véritable hoquet de surprise face à une affirmation aussi audacieuse que téméraire. Sauf Astrid, qui s'empressa rapidement de rattraper son erreur en faisant de même.
-C'est elle qui m'a provoquée. Continua la Señora. Cette garce m'a suivie de manière tout à fait suspicieuse.
-Moi ? S'exclama Astrid en ouvrant grand les yeux d'indignation. Moi ?! Mais c'est qui celle-là ?! J'étais avec madame Paimon moi ! J'ai dû monter ses escaliers de ses morts et ça m'a pris une éternité ! Jamais j'aurais pu avoir le temps de faire des conneries en ayant monté puis redescendu ces marches.
-Elle marque un point. Dit Balle, pensive. Les escaliers sont en effet bien trop long.
-Je confirme avoir rencontré cette jeune femme en bas des escaliers en sueur.
-Vous sortiez des toilettes même.
Silence général. Madame Ping demanda à la jeune citoyenne :
-Les toilettes normales ou les VIP ?
-Euh, les VIP ?
-Y'a des grilles de ventilation dans les toilettes VIP. Rajouta Kli qui était toujours sur son perchoir à fumer un cigarre.
Tous les regards convergèrent vers la naine volante, sauf Astrid qui haussa les sourcils. Elle ne comprenait plus vraiment ce qu'il se passait, mais ça avait l'air….bon signe pour elle ?
-Attrapez-là ! Hurla le garde.
Mais trop tard. Sans prévenir, les cristaux de lumières de la pièce, non, du casino entier s'éteignirent et des cris de surprise et de terreur s'emparèrent des personnes présentes.
-Vite, les lumières ! L'imposteur est….ARGH !
La femme à tout faire ne savait toujours pas ce qu'il se passait et si tout cela était dans les plans d'Iris, mais à ce moment-là, elle ne pensa qu'à une chose : prendre ses jambes à son cou. C'était le moment parfait pour, et à entendre les cris, il valait même mieux.
À la vitesse du son, la femme à tout faire sortit des lunettes de jour et les enfila.
-Allez, on file Iris ! Chuchota-t-elle en prenant la main de sa petite fille.
La technique ultime de la famille Dalgaard était un outil des plus pratiques et des plus puissants pour se sortir du pire des pétrins, et Astrid ne perdit pas de temps pour l'enseigner à Iris.
Elles se faufilèrent entre les gardes qui avaient de nouveau levés leurs armes pour se défendre de tout danger tout en cherchant dans leurs poches un cristal de lumière pour éclairer la salle principale. Toutefois trop tard, la grand-mère et la petite fille s'échappèrent de justesse et quittèrent ce lieu maudit afin de se mettre en sécurité avant que la lumière soit de nouveau opérationnel.
Une fois que Astrid jugea le danger assez loin, elle demanda à Iris, haletante :
-C'était...quoi ce bordel ? On a réussi ce que t'avais prévu ou… ?
Elle avait eu l'impression d'avoir participé à un événement qui la dépassait totalement, et ce par totale coïncidence.
Qui étaient les vrais imposteurs ? Astrid et Iris ? Ou Zhong-li et Paimon ? Ou quelqu'un d'autre encore ? Et qui était cet officier affectueusement nommé « loup-garou » par la propriétaire du Amogus ? Les questions étaient bien trop nombreuses, et la blanche n'était pas sûre de vouloir connaître les réponses.
Maaaaiiiis, au moins ça avait été drôle, heh.
- C’était pas exactement ce que j’avais prévu, répondit Iris en reprenant son souffle. Mais bon sang, ce que c’était grisant !
Iris n’était certes pas ressortie avec de l’argent plein les poches ni de quelconques parures précieuses subtilisées au Genshin, faire tomber le casino avait eu un effet tout particulier chez elle. Elle en ressortait certes toute essoufflée mais, une fois redressée, éprouvait un intense sentiment de puissance, comme une déesse qui pouvait balayer d’un revers villages et campagnes. La cadette Delancy avait réussi à faire dégringoler de son piédestal l’un des casinos les plus en vogue du moment, avec juste de l’ingéniosité et son grand-père en tenue bouffante. Le sentiment d’avoir eu dans le creux de sa main le destin d’une colossale pyramide financière, de l’avoir écrasé sans vergogne, était si délectable pour Iris, si excitant. Elle se sentait toute puissante, inarrêtable, et pouvoir fricoter autant avec cette sensation chaotique lui donnait l’impression que rien ne pourrait plus jamais l’arrêter. Désormais, Iris avait envie de continuer sur sa lancée, faire tourner cette roulette de fortune et voir ce qu’elle pourrait faire grandir ou basculer, gagner ou perdre, jouer à l’apprentie déité…
- Je ne me fais pas vraiment de soucis pour les employés, du moins quelques-uns. Liz est suffisamment futée, elle a toujours rêvé d’ouvrir son propre bar, elle pourrait bien y arriver avec son cachet de départ. Quant à Sucrette, elle pourrait la suivre, ou aller bosser pour la vieille Ping. Aller, on bouge.
Iris traîna Astrid en attrapant le col de son immense robe rouge pour descendre le long d’un grand escalier et changer ainsi de quartier. Il y avait déjà plus de monde en arrivant dans cette nouvelle rue. Plusieurs troquets et bistrots étaient encore ouverts et de nombreuses personnes étaient assises aux tables de leurs terrasses. La clameur des conversations devint de plus en plus forte au fur et à mesure que les deux femmes descendaient les marches. Elles retrouvèrent le chat qu’elles avaient surpris dans sa poubelle, grignotant son lard tout en bas, perché sur un banc en bois. À côté de lui, quelqu’un avait laissé un petit sachet duquel dépassait une bouteille de jus de pommes presque vide et un sandwich au saumon dépareillé. Il ne faisait nulle doute que le félin affamé l’avait complètement éventré pour en voler le poisson pour s’improviser un festin nocturne. Elles dépassèrent le chat pour se diriger droit vers une gargotte ambulante tenue par un bonhomme à plusieurs bras qui touillait en même temps dans plusieurs marmites. Deux mains géraient la caisse, deux autres découpaient les aliments, d’autres déplaçaient des assiettes ou faisaient la vaisselle, et son visage était tout sourire pour chaque client. Iris lui commanda des assortiments de brochettes avec du vin de prune et paya rapidement pour revenir vers son grand-père pour lui tendre sa boîte de nourriture.
- Je suppose qu’on aurait pu s’en sortir avec des sacs de cristaux pleins les bras, mais l’irruption de Madame Ping a un peu ruiné cette perspective. Tant pis ! Ceci dit, je ne connais pas vraiment l’Amogus, ça fait trop longtemps que je n’y suis pas retourné. Je pensais qu’il avait fermé, comme la Gare-Tic. Mais avec la fermeture précipitée du Genshin, je suppose qu’ils reviendront à la mode, grâce à nous !
Iris ouvrit sa boîte de brochettes pour en attraper une au canard, avec des morceaux de champignons et des pommes au miel. Attrapant le bâtonnet, la belle mordit dans un morceau de canard, la saveur sucrée du jus de viande glissant agréablement sur sa langue. À ses côtés, Astrid mastiquait un morceau de poulpe en se contorsionnant si fort la mâchoire que cela en était presque spectaculaire. C’est en ce moment que la jeune femme se disait que Dahlia aurait dû être là, les trois ensemble auraient pu passer un moment spécial à manger leur repas dans cette rue animée. Et qu’elle aurait été la position de sa sœur dans leur petite entreprise au casino ? Iris était sûre qu’elle aurait trouvé ça amusant, dans le fond. Que pouvait-elle bien faire, perdue sous la neige, dans les couloirs glacés de la Forteresse ? La prochaine fois, elle ferait un petit tour aux portails de téléportation pour aller chercher sa garde de sœur et la traîner sous le soleil.
- Bon. C’est bien joli, mais on remet ça la semaine prochaine.
Elle attendit qu’Astrid ait terminé son morceau de pieuvre avant de reprendre.
- Hé oui, on a détruit le Genshin. La semaine prochaine, on se fait le Fate.