Over and Over
Warren & Wolfram
Lieu inconnu, jour inconnu, lune inconnue, saison fraîche. ”N... No... Non... NON... NON...” Murmura une voix féminine faiblement au début, avant de finir dans un hurlement terrifié. Ses supplications avaient commencé dès que le grincement sinistre de la porte en métal avait annoncé ton arrivée. Elle savait que ce son était synonyme de douleur. ”j...J’ai to... tout... tout dit !” Elle s’agitait en tendant ses mains tremblantes devant elle. ”J...j’veux plus... plus ….” Elle pleurait pitoyablement et c’est avec douceur que tu attrapas sa main. Tu caressas sa peau abîmée, retraças l’absence de ses ongles pour finir par serrer avec force la zone amputée. En réponse, elle laissa échapper un glapissement douloureux et tente d’échapper à ta prise.
”Allons, allons ma chère Eve, tu me peines à agir ainsi.” Tu ronronnas presque sans la lâcher, réouvrant les cicatrices de la femme. ”je vais finir par croire que tu ne passes pas un bon moment, alors que je prends de mon temps pour venir te voir personnellement.” Soufflas-tu avec douceur, alors qu’elle continuait à se débattre bien que bien plus faiblement qu’au début de son séjour en ce triste lieu.
”N...non.”
Tu haussas un sourcil. ”Non ? Tu n’aimes pas ma compagnie Eve ? Alors que je me montre si généreux ? ” Le ton de ta voix s’était durci, mais ton ancienne subalterne ne semblait pas t’entendre alors qu’elle gémissait misérablement. ”Pauvre idiote.”
Enervé tu la laissas tomber au sol telle une poupée en chiffon. Elle n’avait plus rien de la femme aux formes appétissantes qui savaient retourner le cerveau de bien des hommes. Tu la regardas ramper sur le sol en pierre. Instinctivement, elle se dirigeait vers un coin de sa cellule. Tu te tournas vers la personne derrière toi. ”Regarde-moi ça... Tu ne la trouves pas pitoyable ? Elle n’est vraiment pas digne de toi, tu as bien fait de venir me voir directement.” Tu fis signe à ton autre invité d’avancer ce qu’il fit lentement comme s’il avait peur de voir l’état de la prisonnière. Cependant, il était bien obligé d’admirer cet horrible spectacle. Tu te rapprochas de lui, venant poser ta main souillée par le sang de l’ancienne beauté sur l’épaule de l’homme. ”Tu as vraiment bien fait, Fabrice. Sans toi je n’aurai jamais obtenu toutes ces informations, qui aurait cru que mon vieil, vieil ami avait un rôle si important dans l’ordre de Célantia ?” La fourbe en faisait partie, elle avait gardé des informations pour elle pour un stupide serment... et quand tu l’avais appris tu avais été pris d’un accès de rage si fort, qu’elle avait hurlé longtemps, très longtemps.
”... F... Fa...Brice ?” Hoqueta Eve en relevant sa tête, ses orbites vides dirigées vers vous. ”Fa... Fabrice? Po... Pour...quoi?” Ton sourire cruel s’agrandit en voyant la réaction de l’ancien duo. ”Oui, pourquoi Fabrice ? Tu l’aimais pourtant... Elle avait planté ses griffes dans ton pauvre cœur sans vouloir te donner le sien en retour. Pire, elle s’en moquait de tes sentiments... Tu devais chaque jour la regarder s’amuser dans les bras d’un autre... Et elle prenait plaisir à piétiner ton amour.” Du bout des doigts tu vins caresser la nuque de ton subordonné qui frissonna sous ton toucher. Celui-ci ne disait rien, se contentant de fixer la femme. Son visage affichait une expression indéchiffrable. Il la regardait sans vraiment la voir.
”V...Vous mentez!” Bégaya-t-elle en se recroquevillant. ”Mentez... Pas possible... Pas Fa... pas lui” Un petit soupir t’échappa. ”Dis-lui Fabrice, elle doit savoir, elle doit découvrir le goût âpre d’une trahison.” Susurras-tu à l’oreille de son ancien partenaire. Tu le vis déglutir. Tu le vis hésiter. Puis, enfin il prit la parole : ”C’est vrai... J’ai tout raconté.” Sa voix avait tremblé une seconde avant de devenir plus ferme. Il se redressa, regardant la blonde sans dévoiler la moindre émotion. Un léger rire te prit, alors que tu vins tapoter sa joue avec affection.
”Et tu as bien fait, très bien fait, je suis fier de toi.” Déclaras-tu sans le lâcher du regard, alors que les sanglots reprenaient de plus belle entre deux “impossible”. Tu te déplaças dans la cellule et attrapas ce qu’il restait de la tignasse d’Eve pour relever son visage. ”Qu’allons faire d’elle, Fabrice ? Est-ce que nous la gardons encore un peu avec nous ou désires-tu que je montre clément et que nous abrégions ses souffrances ?” Demandas-tu d’un ton joyeux. ”Tu as sa vie entre tes mains, tu peux faire ce que tu veux.”
***
Installé dans un fauteuil confortable, tu laissais échapper quelques ronds de fumée en attendant ce cher Warren. Ton regard se porta vers l’horloge, l’heure du rendez-vous approchait et tu te faisais de plus en plus impatient. Durant ces dernières semaines, tu avais préparé soigneusement cette rencontre. Tu lui avais envoyé quelques … cadeaux pour le prévenir de ton arrivée et tu avais même utilisé la compagnie Althaïr. Philippa avait soupiré en te voyant faire, ne trouvant pas utile de te voir “jouer ainsi avec ces gens” alors qu’il aurait été bien plus simple d’en finir rapidement. Pour d’autres personnes gênantes, tu aurais certainement suivi son avis... mais ça faisait longtemps que tu ne t’étais pas amusé ainsi. Puis, les amis de ton frère méritaient bien ça. Déjà, que tu les avais fait bien trop attendre en ne te manifestant pas auprès des deux depuis la mort du gamin. Tu retins une grimace en te souvenant du blondinet. Tu avais été si déçu en apprenant sa mort. Un autre t’avait devancé et tu ne connaîtrais jamais le plaisir de le voir rendre son dernier souffle. Tu chassas rapidement ces regrets, c’était trop tard maintenant et tu devais te concentrer sur le directeur de Lagoon.
A la base, tu pensais le retrouver chez lui, mais il n’était pas stupide, suite à tes “messages” il avait renforcé la sécurité de sa maison... et à moins de causer un véritable carnage tu n’aurais pu venir lui rendre visite. Or, un combat ne t’aurait pas permis de discuter tranquillement avec lui. Débarquer à son entreprise aurait été tout aussi problématique, tu t’étais donc décidé à choisir la troisième option : l’inviter sur un terrain neutre. L’établissement que tu avais proposé était assez célèbre pour accueillir divers groupes qui ne s’entendaient pas pour assurer “des négociations” sans que ça ne tourne au bain de sang. Certains venaient aussi y passer des contrats ou réaliser des réunions. Toute violence y était proscrite si on ne voulait pas voir les hommes demain du propriétaire venir s’occuper de vous. Les armes y étaient aussi interdites. Bref, un endroit parfait pour le rencontrer. Tu avais fait appel à un intermédiaire pour organiser ce rendez-vous “professionnel”, il avait même utilisé une offre que le requin n’aurait su refuser.
Quelqu’un toqua à la porte, puis entra avec ton accord. Il se courba légèrement avant de déclarer : ”Mr Richter est arrivé” Puis, il s’écarta pour laisser passer un homme qui t’était bien familier. Tu n’avais jamais oublié son visage. Un sourire se forma sur tes lèvres et tu te levas, écartant les bras dans un geste de bienvenue.
”Ah, Warren cela fait si longtemps depuis notre dernière rencontre.”
Remarquez, il est à la hauteur du personnage qui l'avait invité.
Un niveau au ras des pâquerettes ; non, en dessous de celui de la mer.
Tout le panthéon sait très bien à quel point Warren n'a pas envie de rencontrer cet homme. Sandro et Inaros en auraient aussi conscience, si l'Archonte de la capitale avait prit la peine de communiquer sur la résurrection des plus inopinées de ce reptile. Même sa chère et tendre n'en avait entendu parler, du moins, pas à sa propre connaissance, il n'est de ceux qui l’entraînerait dans les problèmes. Le fait qu'il ait de nouveau fait surface, dans ses eaux, montre à quel point le blond avait été négligeant, et ce, depuis de bien trop nombreux mois, bien trop occupé par l'approche de cette période de l'année, le Solstice, propice aux rassemblements et cadeaux en tous genre, qui fait qu'Althair tourne actuellement à plein régime. Aussi le moment de la saison froide, ou le spleen du mauvais temps et de la courte exposition au Soleil poussaient de nombreux commerçants dans des abîmes sans fonds de soucis financiers, le moment pour le squale de Lagoon de frapper.
L'endroit dans lequel il se rendait avait déjà sa propre réputation ; il l'avait prestement retiré de ses cibles, fait virevolter les papiers de la table de négociation.
Son expiration provoquait de la buée, même emmitouflé dans son long manteau noir, ce qui était dérangeant, avec ses lunettes, toujours vissées sur le nez. Mains dans les poches, c'est pensif qu'il traversa les derniers mètres le séparant de la porte d'entrée, qu'il poussa d'un geste las de sa dextre. Si Warren évoluait en eaux troubles, c'était également le cas de celui qui l'avait invité ; plus neutre, comme terrain, on peut pas faire. C'était prévu, depuis le début, de toutes façons. Décemment, Warren ne se jetterait pas dans la gueule du crocodile, tout comme Wolfram n'irait pas laisser traîner une main entre les mâchoires aux dents acérées du requin. Bien sur, qu'il avait quand même révisé sa sécurité personnelle, c'est un ancien militaire, pas un haut lieutenant de la garde, suffirait de le chopper dans une ruelle sombre, où en supériorité à son domicile, qu'il ne pourrait y faire grand chose. Aucun risque à Althair cependant ; véritable bastion, en plein cœur de la capitale, ce serait du suicide. Il n'eut pas à errer longtemps qu'un homme vint l'interpeller.
'' Monsieur Richter ? ''
Il le jaugea, de haut en bas. Un homme de main de Wolfram ? Non. Un simple employé, rien de plus. Peu de chances que l'endroit laisse les grands pontes débarquer avec leurs hommes, ça évite les esclandres.
'' Lui même. ''
'' Vous connaissez la politique ? Après tout, cet endroit et ses négociations ne vous sont pas inconnus. ''
Pas tort. Pas qu'il ait prospecté des masses, pas qu'il ait attiré les clients récalcitrants à le retrouver dans ses bureaux finement glauques de Lagoon, mais sa vision de la capitale était telle qu'il savait énormément de choses sur de nombreuses échoppes, de nombreux tenanciers et autres alchimistes. Léger mouvement de tête approbateur, le blond partit ensuite chercher dans sa poche de manteau droite, un fin manche sur lequel trônait un simple bouton, lame mécanique à cran. Puis, de sa ceinture, une poche avec ce qui ressemblait bien plus à un couteau de chasse. Les deux furent présentés à l'employé, qui acquiesça à son tour.
'' Bien. Suivez moi. ''
Totalement confiant en ses aptitudes physiques, s'il fallait coucher Wolfram, il pourrait le faire à mains nues. Ou d'un regard, pour ce que ça importe, même s'il doit bien avoir conscience de la nature du pouvoir du patron de Lagoon, et ferait logiquement tout pour l'éviter. Alors que l'autre homme frappa à la porte pour annoncer la venue de Warren, celui-ci ne pu s'empêcher quelques secondes d'appréhension, surtout au vu de comment on en était arrivés à cet entretien...Il passa le pas de la porte, seul, cette dernière se refermant derrière lui.
Un cri, strident, retentissant, venant du bout du couloir, si choqué et féminin que ça ne pouvait être que sa chère secrétaire. Sur le qui vive depuis de bien trop longues semaines, cette nuisance sonore de si petit matin le fit décoller de son siège, se ruant vers la porte. Quelques heures qu'il avait quitté la douceur de ses draps, quelques jours qu'il revenait régulièrement au bureau, après les incidents de l'archipel, après les événements du Grand Port, lors de leur réunion au sommet, après l'intervention salvatrice de Luz sur les appréhensions du blond.
Enfin devant Pam, elle tremblait, les yeux fixés sur le contenu d'un petit colis. Alors, normalement, elle ouvre pas le courrier qui est destiné à son patron. Sauf quand celui ci vient d'Althair même. Le fourbe s'était octroyé le luxe de se foutre de Warren en utilisant sa propre société. A l'intérieur ? Oh, un paire d'yeux. Qu'il n'avait pas reconnus, d'ailleurs. Alors que les larmes venaient à ceux de la secrétaire, Warren sourit en rajustant ses lunettes.
'' Voyons, ma chère. Ce n'est que le début des hostilités. On est encore au stade du mignon, ça va aller crescendo. On peut pas lui retirer ça, il est audacieux le bougre. Bon, par contre, plus vieux jeu, tu meurs. Envoyer des parties de corps ; c'est tellement 999, ou 998, je sais plus. '' Tel un chat un peu joueur, il fit rouler les globes oculaires du bout des doigts, récupérant une lettre tâchée de sang dans le fond, et la lecture pu commencer. '' Eh bien, le vieillard a finit de faire mumuse visiblement, et se décide enfin à passer à l'action, en déambulateur ou non. '' Il ricana.
Les jours qui suivirent n'étaient pas non plus de tout repos. Régulièrement, d'autres petits paquets. Oh, il les auraient bien tracés, si cela avait été possible. Visiblement, il tamponnait les ''colis surprises'' du sceau d'Althair, sans que ça provienne de personne. Jusqu'au bout, le type le chahutait. Parfois, Pam ne disait rien. Parfois, elle était en pleurs, alors que doigts et autres parties s'accumulaient. Warren, lui, ça le faisait délirer.
'' Non mais rends toi compte, Pam. Si ça se trouve, on aura assez de pièces d'ici quelques semaines pour la reconstituer ! ''
Crise de larmes. Incompréhensible ; c'était pourtant très drôle.
Arriva enfin ce moment où la rousse débarqua dans son bureau, un air grave, avec cette fois, juste une lettre, qu'elle tendit à son patron. Intrigué, il la lut avec la plus grande attention de tout le continent, et encore une fois, les attitudes des deux âmes présentes dans cette pièce étaient en contraste total, puisque un rire ironique s'échappa des lèvres de Warren, grand sourire carnassier, expression un peu folle sur le visage.
'' C'est...Si parfait. Il veut qu'on se rencontre donc ? Directement ? Oh...Les frissons. ''
Plus que quelques dodos à patienter, et il se retrouverait enfin devant celui qui le hante depuis cette sale histoire de vente aux enchères.
'' Ferme ta gueule. ''
Une agressivité directe et franche, la seule manière de faire comprendre à cet individu que non, Warren aussi n'est pas là pour enfiler des perles. De sa poche intérieure gauche, il sortit sa petite boite de cigares, une allumette, et la suite se devine d'elle même. Il cracha un épais nuage de fumée avant de daigner commencer à s'avancer, s'asseoir laconiquement sur un fauteuil, croiser les jambes de manière désinvolte, n'ayant même pas prit la peine de se séparer de son manteau ; il ne s'éterniserait pas.
'' Donc, après toutes ces années, tu daignes enfin sortir de ton trou ? Et pour quoi ? Une vulgaire œuvre d'art ? '' On aurait presque tendance à oublier que c'est à cause de ce maudit orbe, qu'ils en sont là, tout de suite. '' Tellement longtemps que t'as l'air d'avoir prit un sacré coup de vieux. ''
Un autre nuage de fumée. Le blond prendrait bien autant son temps qu'il avait prit ses aises, approprié l'espace, l'ambiance et la parole pendant au moins quelques instants.
'' Accouche, à force de rester dans la même pièce que toi, je vais tomber malade. A part m'envoyer des parties d'Eve – enfin, j'imagine – façon puzzle, t'avais autre chose à faire ? A quoi tu t'attends, bordel ? A une réponse du genre ''Oh bien sur cher Wolfram, ce serait un plaisir ! De surcroît, as-tu déjà des choses de prévues pour les festivités du Solstice qui s'approchent ? Tu voudrais qu'on y aille ensemble ?'' ? T'as déjà assez emmerdé l'Ordre et mes proches comme ça. ''
Le lieu dans lequel ils étaient ne pouvait que refréner les envies de Warren de juste se jeter sur le reptile comme un animal enragé, puisqu'au moindre bruit suspect, les videurs de l'établissement n'ont aucunement peur d'entrer, même en pleine négociations, et de rapidement mettre fin aux débats manu militari. Pourtant, seule Lucy sait à quel point il en a envie. Qui sera probablement bientôt partagée par Wolfram. Eh, pardon, Luz. Il est pas sur de revenir complètement intact, cette fois encore.
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