Loooovis !
C’était une Anh qui entrait en trombe dans le cabinet du médecin, sans prendre garde aux petits détails du style “Est-ce qu’il est déjà avec des clients ?” Non, la demoiselle n’avait aucune bonnes manières et elle ne se préoccupait pas de si peu.
Elle connaissait le médecin depuis quelques années déjà, quelques temps après qu’elle se soit inscrite à la guilde ai soit revenue couvertes de blessures. Elle savait qu’au pire des cas… elle se ferait sermonner. Mais il ne refuserait jamais de la soigner : surtout dans l’état dans lequel elle déboula dans la pièce.
Anh avait les cheveux poisseux de sang, ses habits portaient les traces du combat acharné qu’elle avait mené, le sang séché avait fait durcir le tissu mais elle avait tout de même pensé à retirer son armure légère -à défaut de se laver- avant d’arriver.
J’ai mal ! Aide moi !
La demande était simple, comme toutes les fois où elle venait ici : elle était blessée. Il était médecin. Elle voulait des soins… Quant à la manière dont elle s’est faîte ça… C’est encore une autre histoire, qu’elle s’empressera de vous la raconter si vous la lui demander.
Boitillant jusqu’au tabouret le plus proche en faisant traîner sa jambe derrière elle et un bras pendant. Elle avait probablement la cheville foulée, un bras cassé ainsi que quelques côtes peut-être ? Sans oublier les hématomes qu’elle avait par ci par là… Pourtant, aucune plaie saignante.
Elle ferma les yeux en s’asseyant, prenant une grande respiration suivi d’un soupire de plaisir. Qu’est-ce qui lui procurait tout cela ? Le soulagement de ses blessures ou la douleur engendrée par celles-ci ? Une personne normale aurait répondu la première mais dans le cas de notre petite masochiste, les deux réponses étaient valables.
Les résultats d'une splendide épopée...
Être docteur venait avec beaucoup de responsabilités. Pour être docteur, il fallait être capable de rester calme devant toute situation. Après tout, un docteur ne peut pas paniquer lors des opérations importantes. Il faut aussi être capable de se concentrer et faire attention aux moindres détails. Enfin, c’est le minimum pour être un médecin. Pour être un bon médecin, il est aussi important de faire preuve d’empathie et avoir de bonnes compétences communicationnelles. Après tout, ce n’est pas comme si c'était possible de lire dans les pensées des autres. Enfin, si, mais tu ne pouvais pas. Tu étais toutefois un bon médecin. Car non seulement, tu avais ces qualités, mais tu étudiais tout ce qui pouvait être utile au bien-être des gens. Peu importe qui tu devais soigner.
Pourtant, ton air calme se transforma en un air irrité lorsque tu entendis une voix familière dire ton nom. Anh. Tu n’avais pas besoin de te tourner pour savoir que l’aventurière était entrée sans même cogner à la porte. C’était devenu presqu’une habitude d’entendre ton nom et voir la jeune femme blesser par ses aventures. Tu n’avais rien contre ses aventures, mais tu aurais bien aimé qu’Anh fasse au moins l’effort de faire attention.
« Mais enfin, qu’as-tu fait cette fois ? »
Avec elle, le vouvoiement était lancé par la fenêtre. Tu n’avais jamais rencontré quelqu’un qui semblait autant se faire blesser. Dans le fond de tes pensées, tu pourrais croire qu’elle appréciait cela. Tu tiras ta chaise plus près pour l’observer. Il y avait tellement de sang sur elle, tu n’étais pas sûre si c’était le sien ou celui d’une quelconque créature.
« Tu ne t’es pas fait blesser à la tête tout de même ? »
Tu te levas faisant très attention lorsque tu déplaçais ses cheveux pour chercher une plaie. Tu soupiras lorsque tu n’en remarquas aucune. Une fois la tête examinée, tu passes à son bras visiblement cassé. Tu vas avoir besoin de beaucoup de bandage.
« Je ne peux rien voir avec ce chandail tacher de sang. Je vais t’aider à l’enlever. »
Ce n’était pas une question. Ce chandail allait être enlevé. Ou couper. Tu voulais simplement lui laisser le choix entre le garder ou non. Quoi que… Avec la quantité de sang, tu ne savais pas si le tissu pouvait être sauvé. La quantité était d’ailleurs préoccupante. Surtout si c’était le sien. Tu avais besoin de savoir quel genre de blessure pouvait se cacher sous le tissu.
A la première question de Lovis, c’est un air malicieux qui s’afficha sur le visage de l’aventurière. Son air semblait dire “tu veux savoir? Hein Hein Hein Hein?” pourtant elle se contenta de hausser les épaules, satisfaite. Mais rien que ce petit mouvement la fit grimacer…
Ma tête ? Elle va très bien comme d’habitude !
Laissant le médecin faire son travail, elle observa le cabinet du regard. Quelques éléments avaient changés depuis la dernière fois qu’elle était venue, mais il y avait toujours la même odeur et la même ambiance… ennuyante à mourir pour la jeune femme.
S’appuyant le dos sur le jeune homme, elle releva la tête vers lui en marmonnant :
Dis… tu aurais pas un truc à manger ? J’ai faim… j’ai pas encore eu le temps de passer à la taverne…
Levant péniblement le bras, avec un petit air faussement désolée au visage, elle rajouta :
Puis avec ça… ça ne sera pas facile de boire et de manger… Donc tu me prépares ?
Elle afficha un grand sourire avant de se redresser.
Je ne peux rien voir avec ce chandail tacher de sang. Je vais t’aider à l’enlever.
Ouiiiiiii !
Comme une enfant, elle se laissa défaire, sans aucune pudeur face au médecin qui connaissait le moindre recoin de son corps pour l’avoir tartiné de pommade et recouvertes de bandages sous tous les angles.
De toute façon ils sont fichus dans cet état…
Elle grimaça plus de dégoût que de douleur en voyant l’état de ses propres vêtements.
C’est chiant à nettoyer le sang, en plus ça pue et c’est tout raide maintenant ! Rha si j’avais su… j’aurais tué ses bêtes plus proprement !
A chaque mission elle rentrait dans le même état… et à chaque mission elle se disait la même chose pour au final, ne rien changer. En tout cas, une chose était sûre, le plus gros du sang séchée ne lui appartenait pas, le plus douloureux dans l’opération était de retirer ses vêtements, qui même en les découpant lui demandaient de se remuer un peu pour retirer bras et jambes.
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Évidemment, tu voulais savoir comment une personne pouvait se blesser autant. Si c’était quelque chose qui n’arrivait pas souvent, tu aurais pu comprendre. Ça arrive des jours ou on manque de chance et que les missions ne vont pas dans le sens espérer. Tu aurais compris aussi si tu avais à faire à une aventurière débutante. Toutefois, ce n’était pas le cas. Anh avait de l’expérience. Même si son expérience se résumait à toujours répéter la même chose. Tu ignoras son commentaire sur la nourriture. Elle avait besoin de soin en premier. Son ventre pouvait attendre un peu.
Tu commenças à lever le chandail, mais tu remarquas sa grimace. Tu préférais ne pas bouger son bras plus que nécessaire alors tu retournas à ton bureau un instant. Tu sortis une paire de ciseaux, des bandages et un seau ainsi qu’un linge. Heureusement que tu avais un évier sur le mur adjacent. Tu n’aurais pas voulu la laisser seule dans le bureau. Tu n’avais pas envie qu’elle commence à jouer avec quoi que ce soit. Une fois le seau rempli, tu reviens près de ta cliente et déposes l’équipement.
« Bon, alors si tu n’es pas triste de perdre ce chandail, je vais le couper. Je t’en achèterais un autre pour remplacer celui-ci… Et je ne veux pas voir la nouvelle chemise pleine de sang ! »
Tu poussas les cheveux hors de la portée des ciseaux et commenças à révéler le corps de la jeune femme. Rapidement, tu ne voyais pas de coupure, mais c’était difficile de confirmer. Bien qu’une douche ne lui aurait pas fait de mal, tu commenças à essuyer la peau avec le linge que tu trempas dans le seau au préalable. Les ecchymoses n’étaient pas belles à voir, mais au moins, il n’y avait aucune plaie ouverte. Toutefois, durant le nettoyage, tu as pu constater qu’il y avait trois côtes qui étaient fragiles.
« As-tu de la difficulté à respirer ? »
Des côtes fracturer étaient toujours emmerdant. En général, il n’y avait pas grand-chose à faire, autre que se reposer et laisser les os se replacer par eux même.
« Tu vas devoir te reposer longtemps. Et par reposer, je veux dire rester au lit. »
Tu étiras ton bras pour attraper un baume à base de plante que tu avais fait toi-même spécialement pour les bleus. Il y en avait tellement, tu considéras étendre la pommade sur le corps en entier. Mais à la grosseur du pot, tu n’en avais pas assez.
« Ça va être un peu froid, mais après, je m’occupe de ton bras. »
Tes mains travaillaient rapidement et minutieusement pour couvrir les ecchymoses. Cela fait, tu pouvais passer au bras. Tu savais déjà qu’il était brisé, n’importe qui avec un peu de bon sens l’aurait su. Mais il pendait de façon un peu étrange. Doucement, tu examinas son bras pour confirmer ton hypothèse. Les os étaient brisés à plusieurs endroits. Tu commenças donc à entourer son bras dans plusieurs couches de bandage.
« Quelle bête as-tu donc décider de combattre ? Dans tous les cas, dans cet état, tu ne pourras pas t’aventurer pour plusieurs jours. »
La jeune fille voulut hausser les épaules en guise de réponse lorsque Lovis lui proposa de couper sa chemise, ayant déjà oublié la douleur qui lui lançait… Finalement, trouvant cette solution moins douloureuse, elle ouvrit la bouche pour répondre :
Oui oui vas y !
D’un sourire malicieux, elle rajouta :
D’accord j’ai compris ! La prochaine fois je me battrais torse nue c’est noté !
Bien évidemment, c’était une petite plaisanterie face à la situation.. mais avec elle rien n’était certain. Si l’idée ne lui viendrait pas à l’esprit naturellement -quoi que- en revanche elle serait tout à fait capable de le faire si on le lui défiait. Aucunement pudique et n’ayant que faire des protections -elle n’en portait seulement parce que Draarsus la tannait pour cela- elle n’aurait aucun mal à se battre à poils s’il le fallait.
HIIIII ! C’est froid !
Rajouta-t-elle en sentant le tissu mouillé dans son dos.
Hm… quand je prends des grandes inspirations ou quand je cours surtout. Tu veux que je te montre ?
En effet, le pouvoir de la jeune femme consistait à partager la douleur qu’elle pouvait ressentir a autrui. Très spécifique, elle ne se privait pas pour l’utiliser sur son ami d’enfance et elle prenait un malin plaisir à le voir se tordre de douleur sans avoir rien demandé… Mais elle ne voulait pas se mettre à dos son médecin en l’utilisant sans son avis, surtout alors qu’il était en train de s’occuper de ses blessures.
Heiiiin !? Maiiis…
C’était en réponse à la consigne “rester au lit” même si Lovis lui avait dit ça et qu’Anh n’avait pas émis de commentaire, tous deux savaient que l’idée déplaisait à la jeune femme et qu’elle n’allait pas suivre ses instructions très longtemps…
Oui j’ai compris… hiii ! C’est encore froid !
Frissonnant lorsqu’il appliqua le baume sur ses bleus la jeune femme se laissa doucement faire en papotant.
C’était… juste quelques loups qui s’attaquaient aux champs ?
Elle afficha une mine penaude. Elle ne mentait pas, sa mission était simplement de se débarrasser de ses prédateurs et c’est effectivement ce qu’elle avait fait. Tout l’histoire venait après mais elle se dit alors qu’elle allait se faire d’autant plus rouspété si il connaissait le fin mot. D’autant qu’elle avait été d’une stupidité sans nom et elle en avait un peu honte…
Alors elle tenta de changer de sujet :
D’ailleurs tu m’as toujours pas répondu ! Tu aurais pas à manger ? J’ai rien avalé depuis ce matin… c’est pas bon pour le rétablissement n’est-ce pas ?
Elle afficha un grand sourire pour accompagner ses propos.
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Se battre à torse-nu… Parfois, elle avait les idées les plus idiotes que tu pouvais entendre… Bon, tu exagérais un peu. Tu avais déjà entendu pire, après tout, tu as déjà entendu quelqu’un te proposer de te trouver un assistant ! Jamais de la vie. Tu aimais tes choses d’une façon très précise et tes documents classer selon un ordre que seul toi comprenait. Alphabétique, par domaine, par sujet, par auteur et longueur. Enfin, peut-être, tu aurais le temps de mieux classer le tout si une certaine aventurière cessait de revenir recouverte de sang dans ton bureau…
« Allons, ce n’est pas le temps de plaisanter. »
Tu es inquiet à la fois pour ses côtes, mais aussi pour ta santé. Tu hésites. Tu voudrais comprendre la douleur et la chance se présentait. Après tout, vivre la douleur de tes patients était une idée merveilleuse pour mieux comprendre les blessures et donc mieux les soigner. Il s’agissait cependant d'Anh. Elle était une explication en elle seule. Tu avais peur de la douleur que tu pouvais ressentir, mais tu avais aussi peur que ces douleurs t’empêchent de bien travailler. Alors tu réfléchis un instant. Tu avais encore 5 entretiens, dont un qui devrait arriver dans les heures suivantes. Cinq… Tu te dis que ça ne devrait pas être trop difficile de survivre à cinq entretiens.
« Si tu veux bien partager ce que tu ressens, je suis prêt à recevoir la douleur. »
Avant que le partage ne débute, tu prends place sur ton tabouret. Tu n’avais tout de même pas oublié sa cheville qui était peut-être foulée ou brisée. Oh. Soudainement, tu regrettes. Tu grinces des dents alors que ton corps complet est endolori. Tu n’as pas vraiment envie de tester la respiration, mais pour le bien de ta patiente, tu prends une grande respiration. Ouf. Oui, ça fait mal. Mais ce sont les cotes qui ne font mal, pas les poumons.
« Je crois que j’en ai ressenti assez. Lorsque j’aurais terminé, je te prescrirais quelque chose pour la douleur. Il y a un apothicaire non loin qui pourra te fournir la médecine nécessaire pour un rétablissement rapide. »
Le haut du corps fait, il est temps de s’attaquer aux jambes. Elle allait devoir faire attention à ne pas mettre du poids sur sa cheville. Pendant que tu t’occupes de ses jambes, tu écoutes la raison pour laquelle elle était venue te voir.
« On ne répond pas à une question par une autre question. Et puis, quelques pièges autour des champs n’auraient pas pu régler le problème ? »
Pourquoi se mettre volontairement face au danger ou plutôt, face aux loups, s’il y avait des moyens plus efficaces ?
« Je crois avoir un muffin, mais tu ne l’auras que si tu me racontes réellement ce que tu as fait pour recevoir autant de blessure. »
À vrai dire, ce muffin était censé être son déjeuner, mais il avait été trop occupé pour manger. Tu te dis que tu iras à la cuisine après avoir terminé avec Anh. Au moins pour prendre un café.
Si Lovis trouvait ses idées idiotes, c’est qu’il ne savait pas encore ce qu’il était arrivé à la demoiselle… Au moment où il lui proposa de partager sa douleur, son visage s’éclaira de joie : Anh n’avait pas tellement l’habitude qu’on lui autorise à utiliser son pouvoir et c’était son petit côté sadique qui fut ravie. Sans attendre un mot de plus, elle l’activa et regarda avec amusement l’expression du visage de son médecin au moment où il recevait les sensations de la demoiselle… Elle aurait voulu profiter encore de cette expression mais elle le désactiva au moment où il lui demanda. Il ne faudrait pas se mettre son médecin à dos tout de même… elle avait déjà dû changer deux trois fois avant de trouver Lovis et le jeune homme faisait un travail remarquable : elle le laissa ensuite s’occuper de son corp endoloris sans emmettre la moindre protestation.
Jusqu’à ce qu’il remit l’histoire de ses blessures sur le tapis.
C’est avec un air fier et boudeur qu’elle rétorqua :
Hé ! Tu me prends pour une aventurière de pacotille ? Y’a pas moyen que des loups puissent me blesser à ce point !
Tournant la tête comme une enfant, elle rajouta en marmonnant quelque chose d’incompréhensible. Puis ce fut le muffin qui fut mentionné et Lovis récupéra toute l’attention d’Anh qui se tourna de nouveau vers lui en réprimant une grimace pour avoir bougé trop vite :
Promis ?
Elle haussa un sourcil et soupira :
Bon… mais tu te moques pas hein…
Enfin, pas plus qu'elle-même. Elle n’était absolument pas fière de sa connerie et si elle même en avait honte et avait trouvée son action stupide, elle ne voulait pas imaginer ce que son médecin penserait-elle après ça… il pensait peut être avoir imaginé le pire, il était encore loin de la réalité…
Et bien.. je suis partie hier pour un petit village en bordure de la grande forêt. Pas trop trop loin donc je suis arrivée le soir. Bref, une mission toute simple : des loups s’attaquant au bétail. Je me suis directement mise en route et bon, ce ne fut pas trop difficile de les trouver et de m’en débarrasser, une fois le couple alpha tué, la meute est partie. Bref, assez simple, même si ces bêtes attaquent les vaches ils ont relativement peur des humains donc je m’en suis sortie sans une égratignure !
Un petit air fier s’afficha sur son visage à la fin de ce premier récit. Bien sur, cela n’expliquait toujours pas comment la demoiselle était rentrée dans un tel état alors elle reprit :
Du coup, je suis restée le soir à l’auberge du village. Ils servent d’ailleurs une excellente soupe aux orties, pas très ragoutante à première vue mais très bonne ! Je pensais pas que j’aimerais ça mais ça a un goût assez unique et particulier, c’est à gouter au moins une fois dans ta vie ! Je te donnerais l’adresse ! Bref ! Une bonne nuit, une bonne matinée… Et là, il y avait un marché sur la place, j’ai un peu trainé avant de rentrer : je me suis acheté du coup un peu de viande séchée pour le retour, il m’ont même donné un bocal de soupe ! Ils sont vraiment super sympa la bas !
Croisant le regard de Lovis, elle comprit qu’elle était encore en train de s’égarer dans son histoire…
Ah.. oui les blessures. Bon, ce qui est important là c’est que j’ai trouvé un petit objet magique qui s’appelle une “ Cape de Rud’Olph ” et la grand-mère me l’ayant vendue m’a dit qu’elle permettait de planer doucement.
Elle hésita à raconter la suite et, de peur qu’on l’entende de trop fort, elle baissa le volume pour continuer son récit, détournant le regarde son interlocuteur avec un air un peu gênée au visage.
Et.. sur le chemin du retour… j’ai voulu l’essayer… Y’avait une falaise… Du coup je l’ai enfilé et j’ai sauté…
Puis toujours en baissant encore plus le volume de sa voix, presque inaudible, elle rajouta :
Sauf que je me suis trompée de cape…
Elle attendit encore quelques secondes, le regard fuyant.
Je me suis écrasée en bas…
Anh ne savait pas s’il allait en rire, se moquer, ou bien l’engueuler pour sa stupidité… Elle leva alors les yeux avec un regard suppliant, attendant avec inquiétude sa réaction.
Les résultats d'une splendide épopée...
Tu n’oserais jamais penser ou dire que ta patiente était une mauvaise aventurière. Tout le monde avait leur force et leur faiblesse. Il n’y avait personne de parfait. Même toi, tu n’étais pas parfait. Même si tu te poussais à être toujours meilleur. Pour ce qui est d’Anh, elle semblait toujours trouver de nouvelles raisons pour le visiter. Tu ne te plaindrais pas de la voir moins souvent. Pas parce que ce n’était pas une bonne personne. Simplement parce que les gens qui ne sont pas malades ni blesser, ne venait pas te voir. Tu as envie de soupirer lorsque tu réussis à ramener l’attention de ta patiente vers toi.
« Promis. Je ne me moquerais pas et tu auras le muffin ensuite. Mais seulement si tu me dis la vérité. »
Et simplement lui dire qu’elle s’était battue contre des loups n’allait pas être assez. Lorsqu’elle commence son récit, tu tends une oreille attentive sans arrêter de panser ses jambes. Cependant, ce qu’elle t’explique ne répond pas à ta question. Tu lèves un sourcil. Si elle avait réussi à chasser la meute, d’où provenait donc ce bras briser et cette cheville foulée. Sentant ta question arrivée, elle continue. Tu écoutes sans manquer un seul mot alors que tu termines d’appliquer la pommade sur la première jambe. Tu entoures le membre avec un bandage et fait un nœud bien solide avant de passer au second membre. Tes yeux restent quelques secondes sur sa cheville. Elle est enflée. Il va falloir de la glace pour faire disparaître l’enflure. Anh continue de parler et pendant un moment, tu te demandes en quoi la soupe et la viande sèche peuvent bien être la cause de ses blessures.
« Et les blessures… ? »
Bien que de la soupe, ou un café, serait bien apprécié, tu préférais ne pas tourner autour du sujet trop longtemps. Puis, les pièces du casse-tête commencent à se placer. Au moment où elle mentionne la cape, tes lèvres se pincent. Tu sais où cette histoire s’en va. Et tu n’es pas content. Tu relâches doucement sa cheville que tu as terminé de panser et t’assoie sur ta chaise. Tu aurais bien croisé tes bras, mais en le bougeant un peu trop vite une douleur vive te fait figer.
« Je ne me moquerais jamais de tes blessures. Mais ! Une falaise ! Tu t’es jeté en bas d’une falaise ! Et je suis sûre que tu t’es donné un élan avant de sauter. »
Tu avais déjà en tête l’image de l’aventurière, un grand sourire aux lèvres, prendre quelques pas de recul et sauter en bas de la falaise. Tu n’étais pas sûre si tu devais être impressionné ou non.
« Comment peux-tu te tromper de cape ? C’est une cape rouge flamboyante. Et tu n’as pas pensé à tester la cape avant de sauter de la falaise ? »
Tu avais toi-même reçu cette cape en cadeau. Elle était arrivée quelques jours après le festival avec une lettre signé de ta mère. Le rouge était tellement flamboyant, tu pourrais jurer que la cape brillait.
« Tu as de la chance de n’avoir reçu que quelques blessures. Tu aurais pu briser tes deux jambes. Pire ! Tu aurais pu tomber sur la tête. Tu aurais pu briser tes côtes et elles auraient pu percer tes poumons. »
La liste des blessures possible continue jusqu’à ce que tu manques de souffle. Lorsque tu prends le temps de respirer, tu te calmes un peu.
« J’espère que tu as appris ta leçon et que tu ne te jetteras plus en bas des falaises. Cela dit, je t’ai promis un muffin. »
Tu te lèves et te rends à ton bureau. Un muffin aux bananes et des morceaux de chocolat intact t’attendent. Tu le prends et reviens l’offrir. Pendant qu’elle prend la nourriture dans ses mains, tu écris quelques notes sur un papier.
« J’ai noté la médecine qui aidera à apaiser la douleur. Pour la cheville, je conseil de mettre de la glace pour les prochains 48 heures, ou jusqu’à ce que l’enflure subsiste. Évidemment, il faut aussi éviter de mettre du poids dessus… L’idéal serait que tu restes au lit pour les prochains jours. »
Cela ne doit pas faire le bonheur de la jeune femme, mais il s’agit du prix à payer lorsque l’on se jette en bas d’une falaise.
« Je viendrais te visiter pour m’assurer que le rétablissement se passe bien. »
Il avait l’étrange pressentiment qu’elle n’allait pas rester au lit. Alors il préférait s’en assurer personnellement.
Anh attendait la réaction du médecin… Si elle avait été une hybride avec de petites oreilles, elles se seraient plaquées contre sa nuque devant les réprimandes de Lovis, comme une enfant qui est grondée.
Elle baissa la tête n’osant pas affronter son regard, consciente de sa connerie :
Oui… j’ai pas d’excuses…
La jeune femme n’était pas dans sa tête mais il l’imaginait très bien. Elle se remémora la scène : toute contente de son achat, elle avait voulu le tester à la première falaise, elle avait enfilée sa cape, avait reculé de quelques mètres et un grand sourire aux lèvres, avait couru se jeter d’une dizaine de mètre -fort heureusement que la falaise n’était pas plus haute, elle aurait pu se tuer… La jeune femme avait envie de flotter dans le vide. Mais c’était seulement pendant les quelques instants de chute libre qu’elle se rendit compte que quelque chose clochait : puis c’est arrivé au sol qu’elle se dit que, dans l’excitation et la précipitation, elle n’avait pas enfilé l’objet magique mais sa simple cape de voyage… C’était d’une stupidité sans nom.
Heureusement, même si son corps était douloureux, elle s’en sortait sans graves blessures. Il parait que les idiots sont plus solides ? Anh confirmait la règle, il fallait un corps robuste pour survivre à toutes les conneries qu’elle pouvait faire ou inventer. Elle espérait juste que cette histoire n’arrive jamais aux oreilles de Draarsus, sinon elle était prête à subir un sacré savon.
Prenant timidement le muffin en main pour le porter à sa bouche. Ravissant son ventre grognant depuis déjà quelques heures, elle n’osait rien ajouter après son récit, penaude. C’est la bouche pleine qu’elle écouta les recommandations de son médecin : de la glace, OK, ne pas mettre de poids dessus… ça va être difficile si elle marche… rester au lit les prochains jours ? Impossible !
Elle ouvrit la bouche, pleine de miettes de muffins pour s’apprêter à rouspéter quand le médecin la coupa pour rajouter qu’il passera. Elle ferma la bouche et réfléchit quelques instants… Se disant que peu importe ce qu’elle pourrait répondre, elle n'échappera pas à la visite de Lovis. Alors elle soupira :
D’accord…
Elle leva les yeux doucement :
Je peux y aller maintenant ?
Attendant la réponse du médecin, elle se redressa sur ses jambes et grimaça. Tant que la blessure était encore chaude, la douleur était moins présente, mais le fait d’être resté un petit moment assise rendait la pression encore plus douloureuse..
Tu… aurais des béquilles ?
Si elle ne devait pas mettre de poids sur sa jambe, elle ne pouvait clairement pas rentrer chez elle à cloche-pied, bien qu'elle n'habitait pas très loin… Quoi qu’elle devait d’abord passer à la guilde pour terminer sa quête, elle devait faire des courses pour manger chez elle, peut-être aller à la librairie acheter un peu de lecture si elle ne devait pas sortir de chez elle… Ah non, elle n’aimait pas lire. Alors elle irait chercher une quelconque occupation sur le marché ! Que de choses à faire alors qu’elle était censée ne pas bouger ! Quelle vie injuste !
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L’important, c’est qu'Anh ait compris la leçon. Vu son air, tu te dis que la prochaine fois, elle fera plus attention lorsqu’elle souhaite profiter de sa cape. Peut-être si les blessures ne venaient pas d’une erreur ridicule, tu n’aurais pas été aussi fâché. Tu aurais pu comprendre si elle t’avait raconté que les blessures provenaient d’un monstre. Ça arrive que les monstres sont plus fort que nous. Cependant, il s’agissait d’une erreur qui aurait pu lui coûter la vie. Ce n’était pas pour être méchant que tu l’avais sermonné, mais parce que tu étais inquiet. Elle aurait pu mourir. En tant que son docteur, tu refusais qu’elle meure. Lorsque tes patients mourraient sous tes soins, tu avais toujours du mal en t’en remettre. Lorsque tu remarquas à quel point elle avait l’air penaude, tu soupiras. Doucement, tu posas ta main sur sa tête pour caresser ses cheveux quelques secondes.
« Tu vas voir, le temps passera bien assez vite et tu pourras tester ta cape bientôt. »
Le temps de guérison allait être long pour ta patiente. Tu savais qu’elle n’était pas une personne aimant rester au lit à ne rien faire. Tu savais aussi qu’elle pouvait prendre une potion pour guérir toutes les blessures. Tu pouvais même en faire une. Seulement, il te faudrait les ingrédients et du temps pour faire la potion. Et honnêtement, tu te dis que la forcer au lit lui apprendra à faire plus attention. Alors tu ne mentionnes pas la potion.
« Oui, j’ai des béquilles. Laisse-moi un instant. »
Tu marches en direction d’une grande armoire et observes l’équipement qui s’y trouve. Tu examines chaque béquille et jettes un coup d’œil à Anh. Lorsque tu en trouves une de la bonne hauteur, tu reviens vers elle pour lui donner.
« Voilà. Elles devraient être à la bonne hauteur. »
Pendant une seconde, tu la fixes dans les yeux. Tu avais ce pressentiment qu’elle n’avait pas en tête de rentrer directement chez elle.
« Tu devrais prendre une calèche pour te rendre chez toi et évitée de bouger. »
Bien que ce fût formulé comme une suggestion, c’était plus un ordre. Il n’avait pas envie d’apprendre qu’elle avait décidé de faire le tour de la capitale au lieu de se reposer.
« Peut-être un familier pourrait être utile pour toi. De cette façon, la prochaine fois, celui-ci pourra te traîner jusqu’ici. »
Tu ricanes un peu, mais au fond de cette blague, tu es sérieux. Au moins, si elle avait un familier, celui-ci pourrait aller chercher de l’aide. Tu t’imagines un instant Anh seul en bas de la falaise sans personne pour l’aider. Tu te dis un familier serait bien pour elle. Tant que ce n’était pas un rat géant. Il lui arrivait de temps en temps de voir des gens se promener avec ce qui semblait un rat beaucoup trop gros et chaque fois, il pensait perdre connaissance.
Anh le remercia encore une fois lorsque Lovis lui apporta ses béquilles.
Parfait merci ! Avec ça je pourrais marcher ! Enfin, juste marcher pour rentrer me reposer chez moi bien sur !
Et elle afficha un grand sourire. Bien sûr qu’elle ne comptait pas rester immobile et alité pendant des jours à cause d’une toute petite chute. Elle allait s’en remettre, il n’y avait pas de quoi dramatiser.
S’approchant de l’entrée en claudiquant, elle déposa quelques cristaux sur le petit meuble à l’entrée et se retourna vers son médecin :
T’en fait pas pour la calèche, j’habite pas loin tu sais bien ! Puis j’ai bien marché jusqu’ici pour venir, je ne suis plus à quelques mètres près ! Je te laisse quelques cristaux ici, c’est tout ce que j’ai sur moi pour l’instant, je te donnerais le reste quand tu passeras promis !
Puis elle passa la porte d’entrée et cligna doucement des yeux. Le soleil était aveuglant. Encore haut dans le ciel, la journée ne faisait que commencer. Elle songea un instant à la proposition du médecin de prendre un familier… Ce n’était pas une mauvaise idée. Mais pour l’instant ces finances ne lui permettaient pas. Peut-être un peu plus tard ? Elle garda l’idée dans le coin de sa tête…
Et se dirigea vers la guilde. Pensiez-vous vraiment qu’elle allait se reposer ? Non elle avait plein de choses de prévues et de trucs a acheter mais tout d’abord, il fallait qu’elle récupère sa récompense !