La Ville Aquatique ne fait jamais dans la dentelle en ce qui concerne les festivités. Tout doit être luxueux, fastueux, plein de panache et de paillettes. C’est la raison pour laquelle la soirée d’inauguration du festival de saison chaude se déroule au grand théâtre des Tritons. En manque d’acteurs, le metteur en scène a dépêché la Guilde d’envoyer deux membres pour combler les trous, et vous avez été tout naturellement désignés.
La pièce reprend une légende populaire de l’Archipel, sur une sirène amoureuse d’un humain et voulant quitter la mer pour vivre à ses côtés, forcée de faire un pacte avec une sorcière des mers.
Sia, tu joues le prince. Sileas, tu joues la sirène.
Tâchez de faire passer à l’aristocratie une soirée inoubliable !
Participants : @Sia Zmeï & @Sileas Endalar
Thème actuel : Festival d'été
Hélas, a partir de la, tout part à l'eau, presque littéralement. La ville et le théâtre étant la seule chose qui ne se retrouve pas ainsi maculé... Alors même qu'ils se trouvent au fond de la mer. L'organisateur était ravi d'avoir deux aventuriers disponibles pour combler sa soirée et ainsi pouvoir livrer la performance artistique de l'année. Et, pour s'assurer de marquer les esprits, il décide même d'inverser les rôles. Une histoire classique et en même temps renouvelée, le classique mélangé à l'impertinence. C'est donc tout sourire qu'il se tourne vers Sileas en déclarant.
-"Vous ferez une sirène par-faite. PAR-FAITE je vous dis ! Cela fait des années que je souhaitais expérimenter quelque chose de nouveau, et vous êtes fait pour ce rôle !"
Et alors que le blond cligne de l’œil en arquant un sourcil, espérant avoir mal entendu le mot "sirène", et qu'il l'a simplement mélangé avec le mot "prince", leur commanditaire pivote ensuite vers la forgeronne, scellant leur destin.
-"Et vous très chère, vous serez le prince ! Laissez parler cette masculinité que je sens bouillir en vous, montrez au monde entier la performance qu'il souhaite voir depuis si longtemps ! Vous allez faire tourner toutes les têtes de ces demoiselles... Et damoiseaux ! Oh, et la salle pour vous préparer se trouve à droite, tout a déjà été prévu pour vous maquiller et vous habiller. J'ai hâte de vous voir sur scène !"
L'aventurier est dépité, la lassitude se lisant sur ses traits et au fond de son regard d'acier qui semble prêt à plier pour fuir. Sa pupille se dirige vers ce qui ressemble à une sortie de service, semblant très fortement hésiter alors qu'il souffle.
-"Moi jouer la sirène et toi le prince ? Déjà que je ne sais pas jouer au théâtre, alors en plus incarner un tel rôle... Sia, dis moi que tu as un plan pour cette fois. Je crains que je viens de tomber sur la première mission que je ne saurais pas réaliser en de telles conditions..."
Hélas pour lui, un groupe de maquilleuses ouvre déjà les portes pour les surveiller du coin de l’œil, pinceaux et poudres en main. Le banc de prédateurs a senti l'odeur du sang, et il est aisé de voir qu'elles se délectent d'avance d'ainsi préparer un aventurier à son rôle de sirène, tout comme transformer la forgeronne en le parfait prince. Avec un soupir, le blond baisse la tête vers son amie avant de souffler.
-"Et je crains que nous n'y échapperons pas. Bon courage Sia, nous en aurons tous les deux besoin. On se revoit très vite sur la scène. Mais essayons de voir le coté positif des choses, j'aurais enfin l'occasion de te faire officiellement la cour."
Un maigre sourire vient naître sur les traits de l'homme à cette idée, après tout, un pièce romantique, n'est-ce pas l'idée parfaite pour essayer de faire comprendre à la demoiselle certaines choses ?
Le metteur en scène et celui qui vient nous récupérer et nous inspecte sous toutes les coutures. Si imaginer mon ami borgne en sirène est déjà surprenant, devoir jouer son prince charmant en devient gênant. Je hoche timidement de la tête à la déclaration de l’homme qui me demande de faire ressortir ma masculinité pour ce rôle. Laissés seuls, je sens bien que mon ami veut fuir et je suis presque tentée de le suivre. Malheureusement, les maquilleuses nous interceptent et nous attendent déjà. J’ai à peine le temps de rougir à la dernière déclaration du blond que déjà deux femmes s’empressent de venir me récupérer.
« Désolée, mais nous avons beaucoup de travail et peu de temps. »
Je me fais trainer alors que je lance un dernier regard de supplice vers un Sileas qui se fait également embarquer par des demoiselles surexcitées. On me fait entrer dans la pièce, placée derrière un paravent pour me faire déshabiller, prendre mes mesures et me placer le script entre les mains. Une version revisitée du conte même si la trame originale reste similaire. La méchante sorcière sera d’ailleurs aussi jouée par un homme. Un soupir m’échappe alors qu’on finit de mesurer mon tour de taille et que l’on essaye désormais d’aplatir ma poitrine sans me blesser pour autant.
Pendant qu’une couturière adapte mon costume, on me place sur une chaise pour s’attaquer à ma chevelure d’un côté et nettoyer mon visage de l’autre. À partir de ce moment, je préfère fermer l’œil et attendre qu’on me parle pour suivre les différentes directives que l’on me donne. Quand la première couche de maquillage est appliquée, on m’indique que je peux à nouveau me concentrer sur le script que je dois mémoriser.
« Hmm… Cette fleur, on peut la retirer ? »
Mon regard las se redresse un instant sur la blonde qui semble bien embêtée par cet élément coquet de mon visage. Je porte une main au végétal, mes doigts s’attardant sur les pétales pour les arracher délicatement. La jeune femme m’observe de manière stupéfaite, me laissant faire jusqu’à ce qu’il ne reste que les pistils du végétal.
« Comme ceci, cela vous ira ?
- Oui, c’est parfait ! On pourra vous mettre un cache-œil ou quelque chose du genre ? Ça ne va pas vous gêner ?
- Faites comme bon vous semble. Vous pouvez utiliser les pétales si vous voulez. »
Face à la maquilleuse enthousiaste, j’affiche un visage las qui se concentre à nouveau sur le texte que je dois mémoriser. Nous aurons sur scène des souffleurs pour les trous de mémoire, mais nous devons connaître autant que possible le texte. Connaître le conte m’y aide beaucoup, même l’auteur a pris de réelles libertés de ce côté. S’ensuivent alors d’autres couches de maquillage, l’essayage du costume avec ses derniers ajustements, le fait de me trainer à travers différentes pièces tout en me faisant lire mon script pour m’équiper de divers accessoires.
Quand sonne enfin les trois coups pour annoncer le début de la pièce, je me trouve derrière les rideaux à entendre le silence s’installer dans le public. Un coup d’œil m’indique que l’endroit est bondé et que tous tourne le regard vers le narrateur qui commence à décrire la première scène. La sirène s’ennuyant, se décide à remonter à la surface pour découvrir le monde. Évidemment, son père lui a interdit de telles choses, mais cette dernière a bien décidé de lui tenir tête. J’attends avec une certaine impatience de voir Sileas entrer sur scène dans son costume de sirène, mais je ne tarderais pas à le suivre…
- HRP:
- Dans ce RP, Sia ne possède pas encore sa dernière amélioration rendant sa fleur sensible.
-"Arrêtez de soupirer un peu par Lucy, vous allez être magnifique ! Vous n'avez jamais voulu explorer votre part de féminité ? Ca vous fera du bien de sortir un peu de cette grosse armure, et tâchez de ne pas vous couvrir de ridicule, vous n'imaginez pas le travail que cela représente de vous rendre présentable !"
La remontrance fait cligner de l’œil au blond, qui baisse les feuilles qu'il tenait en main pour dévisager la femme venant de lui faire un tel reproche. Ses lèvres s'étirent en un sourire narquois alors qu'il allait lui offrir une répartie cinglante, qui finit simplement en un petit "aie" tandis qu'il sent une aiguille s'enfoncer dans la peau en plein dans les ajustements de sa tenue, suivi d'un petit.
-"Oh je suis vraiment désolé, je ne voulais pas... Vous vouliez ajouter quelque chose ?"
Le sourire goguenard de la maquilleuse agace sérieusement l'aventurier qui se verrait bien repeindre le mur du contenu de son crane. Hélas, le meurtre n'est pas autorisé, encore moins dans un théâtre. Et encore, encore moins en pleine mission de la Guilde. Finalement, gagné par le dépit, tant de ses lignes que du personnel avec lequel il doit interagir, l'homme secoue la tête.
-"Non, rien. La prochaine fois je lirais juste mieux les petites lignes du contrat."
Enfin les retouches prennent fin, et le fier aventurier se retrouve désormais dans une longue robe imitant particulièrement bien les écailles d'un poisson, brillant en de douces ondulations sous la lumière. Une fausse poitrine rembourrée, modeste mais présente lui chatouille le torse, alors qu'il s'observe dans une glace. Heureusement qu'il est glabre et se rase particulièrement près, autrement, Sileas est sur qu'il aurait eut droit à une bonne dose de cire étalée sur son visage pour le mettre en des conditions favorables. Un dernier tour sur lui même, dernier coup d'aiguille et le voici propulsé à attendre la fin du discours d'introduction du narrateur. Le scénario est posé, et on lui fait enfin signe de monter sur scène pour jouer sa partition.
Et c'est à cet instant que le combattant se rend compte que l'entrainement à l'armure l'a rudement aidé. Certes son costume est handicapant, mais il est habitué à se déplacer en étant limité dans ses mouvements. Avoir une robe et une traine derrière lui est plus compliqué que de juste marcher dans des jambières, mais il arrive à imiter un déplacement relativement gracile tandis qu'il débarque sur scène, sous le feu des projecteurs -et le murmure des spectateurs surpris de voir un homme à ce rôle, la surprise étant aussi totale pour eux que pour Sileas un moment auparavant-. Mais point le temps de s'attarder sur la stupéfaction générale, ses lignes commencent déjà à s'enchainer tandis que le souffleur essaye de lui donner le tempo alors que le blond prends une voix qui se veut mélancolique.
-"J’erre depuis trop longtemps au gré des marées et des courants, si seulement je pouvais sentir la brise du vent me caresser comme le toucher d'un amant..."
Fort heureusement pour la sirène, cet amant semble s'annoncer bien rapidement tandis que le décor commence à changer pour laisser place à cette fameuse tempête censée lancer le cœur de cette histoire.
« Alors que la tempête fait rage et que notre pauvre sirène profite de son exploration, un courant vient se saisir d’elle. La malheureuse se retrouve emportée, ballotée au gré des vagues sans réussir à s’échapper. Comble de son malheur, une affreuse fabrication humaine vient s’enrouler autour d’elle, l’empêchant de nager comme elle en a l’habitude. La jolie sirène se retrouve emportée bien loin de chez elle, perdant connaissance après des heures d’un combat acharné. »
Je me retiens à nouveau de rire en voyant le borgne essayer d’imiter une sirène emportée par le courant, se déplaçant d’un bout à l’autre de la scène avant de recevoir un filet de pêche qu’un accessoiriste lance sur lui. Le malheureux doit s’enrouler dedans et continuer ce cinéma avant de se laisser tomber. La scène change à nouveau, une plage au petit matin remplaçant l’océan déchainé et le narrateur reprend la suite.
« Notre héroïne se retrouve abandonnée au bord du monde des hommes. Échouée tel un calamar sur le sable blanc, la jeune femme semble avoir perdu la vie. C’est alors qu’un humain apparait et la repère. »
Mon moment est là. On ajuste une dernière fois ma cape et ma coupe avant d’entrer sur scène. Sous le regard médusé du public, un prince charmant en costume blanc, une longue chevelure blanche relevée en une queue de cheval et un bandeau sur l'œil, entre, l’épée à la taille et le torse bombé. Un air froid sur les traits, je joue le jeu de l’homme qui profite du lever du jour au bord de la mer pour se promener. Sans un mot, je m’avance vers le pauvre Sileas qui est piégé avant de sortir mon script.
« Par tous les cieux, il semblerait que le déluge de cette nuit m’ait apporté une bien belle créature… Ne t’en fais pas mon enfant, je vais te libérer. »
Sortant mon épée qui est loin d’être un accessoire, mais bien une vraie arme, j’exécute un élégant mouvement de poignet et fait voleter ma cape pour donner un air héroïque à mon personnage. Dans l’assistance, j’entends des souffles se couper et certaines femmes s’émerveiller par ce prince charmant. Je libère la pauvre sirène d’un geste agile, coupant le filet qui ne rencontre étrangement aucune résistance avant de rengainer l’arme avec la même élégance. J’entends depuis les coulisses l’émerveillement du metteur en scène ainsi que les maquilleuses qui attendent avec impatience la scène suivante.
Mettant un genou à terre dans un mouvement particulièrement galant, je pose une main au niveau de ma poitrine aplatie et de mon cœur, avant de tendre l’autre en direction de la malheureuse créature échouée. Mes doigts gantés viennent repousser la chevelure blonde du borgne et faire semblant de vérifier pouls et respiration.
« Remercions Lucy, la belle est en vie. Malheureusement, j’ai bien peur qu’elle ne survive longtemps ici… Je dois l’aider à regagner le large au plus vite. »
Me retroussant les manches et prenant une longue inspiration, je me penche pour placer une main sous la nuque de l’aventurier, penchant la tête pour m’approcher de son visage et lui chuchoter le plus discrètement possible.
« Il va falloir que tu m’aides un peu… »
Je viens ensuite placer l’autre main sous la queue de la sirène, m’apprêtant à la porter comme une princesse. Les accessoiristes se rendant compte que je ne vais pouvoir porte ma bien aimée longtemps ainsi, s’activent pour changer la scène au plus vite. Sileas utilisant ses jambes pour m’aider à le soulever le plus discrètement possible, je feins le porter ainsi avant que les rideaux ne se referment avant que je ne termine le geste. De l’autre côté, le narrateur dépeint la scène dans laquelle le prince ramène sa douce à l’eau. Cette dernière se réveillant alors que son sauveur s’éloigne, ne se rappelant que le parfum boisé qu’il dégageait, une odeur inconnue à la créature.
De notre côté, je repose l’aventurier qui se redresse. Bien que j’aie l’habitude de porter de lourdes charges, ce n’est rien comparé à un homme de la carrure de mon ami. Avant que ce dernier ne s’inquiète de mon état, je le rassure en chuchotant.
« Je vais bien, ne t’inquiète pas. Au moins, je sais que je dois pouvoir te trainer si un jour tu viens à être blessé… »
Relevant un regard amusé sur la sirène, nous sommes vites interrompus par les assistants nous récupérant et séparent pour préparer les scènes suivantes. Et des scènes, il y en a encore un grand nombre…
La suite est écrite d'avance, et le prince charmant est aux petits soins pour cette sirène fort maladroite. Dur de ne pas rire alors qu'elle s'occupe ainsi de quelqu'un avec une fausse poitrine alors que le blond remarque les efforts fait pour que celle naturelle de la forgeronne n'apparaisse pas. Non, vraiment, ce conte veut jouer sur les codes et faire tout ce qu'il est possible de faire dans le pire. Vient néanmoins un soucis. Si Sileas peut soulever Sia sans soucis, l'inverse n'est pas totalement vrai. Un très léger hochement de la tête sera la seule réponse de la demoiselle, et il vient l'aider comme il peut à se hisser dans ses bras. Le plus dur n'est pas de jouer, c'est réellement de ne pas rire du ridicule des situations présentées. Heureusement, le rideau se referme rapidement leur laissant quelques secondes pour échanger.
-"Et dire que c'est le début... Je sens qu'on va avoir besoin de boire après ça."
De nouveau ils sont séparés tandis que les assistants et techniciens préparent la scène suivante. Le scénariste décrit comment, intriguée de cette odeur qu'elle n'avait jamais sentie auparavant et cette silhouette dont elle ne garde presque nul souvenir, la sirène décide de revenir quelques jours plus tard sur la plage, une fois remise de sa blessure à la recherche de son mystérieux bienfaiteur. Une nouvelle fois, Sileas doit entrer le premier sur scène, l'allure bien plus assurée. Quelques tours de la scène dans son costume sont nécessaires alors qu'il imite la belle à la recherche de ses rêves et de ses souvenirs perdus dans le choc. Peu à peu, la sirène se rapproche de la plage sans voir son sauveur, tandis qu'elle commence à se lamenter sur son triste destin.
-"Je ne sais qui m'a sauvé, mais de mes mots j'aimerais pouvoir le remercier. Et que de cette fragrance inconnue je me suis éperdue."
Vraiment, le texte laisse à désirer. Mais il doit jouer les éplorées sur scène pour maintenir le décorum. Passant une main sur son front en feignant une expression de tristesse teintée de détresse, la sirène commence à replonger de nouveau dans la mer, désespérée de découvrir qui l'a ainsi gardée en vie. Mais alors qu'elle va pour plonger dans les profondeurs de la mer, une créature marine jouée par un autre acteur s'approche, tendant des tentacules menaçantes et ouvrant un grand bec garni de dents pour dévorer la "belle" demoiselle ainsi sans défense. Sa retraite ainsi coupée par ce monstre, Sileas se retrouve à jouer la sirène terrifiée qui recule peu à peu vers la plage, sans défense. Après tout, sans jambes, il lui est impossible de faire plus que ramper sur le sable. Et le monstre qui la suit, lui, ne semble clairement pas avoir ce soucis alors qu'il gagne du terrain. Et c'est de sa voix la plus perçante et aiguë possible que Sileas appelle à l'aide.
-"Aidez moi, aidez moi ! Que quelqu'un me vienne en aide ou je vais me faire dévorer ! Pitié, vous qui m'avez sauvée, puissiez-vous apparaître une nouvelle fois pour me protéger !"
Et bien sur, reprise du texte et de l'histoire oblige, c'est le moment ou, épuisée de ses efforts physiques à ramper sur la plage pour éloigner à son assaillant que la sirène s'évanouit de nouveau, alors même qu'elle aperçoit au loin une forme humanoïde se rapprocher... Feignant de nouveau l'évanouissement, le blond soupire mentalement, se préparant à se "réveiller" au moment opportun, un léger sourire étirant le coin de ses lèvres. Après tout, pour une fois, il sera amusant de voir Sia essayer de le séduire et non l'inverse, même si c'est uniquement dans le cadre d'une pièce de théâtre...
Montant une sorte d’étrange sculpture devant rappeler un cheval qui se déplace, je fais mon apparition avec que j’entends les mots « sur son destrier blanc ». J’exécute les mouvements que je viens de relire, descendant de l’étrange monture qui s’est arrêtée non loin de la sirène évanouie. Sortant l’épée factice, je menace la monstruosité avant de sortir mes lignes.
« Monstre, comment oses-tu t’en prendre à une si belle créature ? Tu vas devoir goûter au fil de ma lame pour un tel affront ! »
S’enchaine ensuite un épique combat, exagérant mes mouvements pour captiver le public -dont certaines demoiselles retiennent leur souffle-, et surtout masquer le subterfuge pour les blessures apparaissant sur le costume du monstre. Quand ce dernier est vaincu, retournant à la mer et disparaissant du plateau, la lumière se concentre à nouveau sur notre duo qui va devoir signer un autre moment émouvant. Serrant la mâchoire, je m’efforce de suivre les indications du souffleur qui attend avec une certaine impatience la suite. D’ici, je peux même voir son petit sourire moqueur, me tournant vers une sirène évanouie.
Posant à nouveau le genou dans le faux sable, je viens me saisir de la main du blond pour m’assurer une nouvelle fois que celle que j’ai sauvée va bien. Cette fois, la belle émerge alors que le prince est à ces côtés et vient ensuite le moment que je redoutais. Un léger rougissement s’empare de moi tandis que je cite mon script.
« Je suis heureux de voir, qu’encore une fois, vous allez bien, ma chère… J’aurais été bien embêté de voir qu’une si belle créature vienne à mourir ici. »
Malheureusement pour moi, la sirène doit faire sa timide et dans cette pièce revisitée, c’est le prince qui cherche à séduire la belle. Commençant à légèrement bégayer, mon rougissement s’accentuant, mais peu visible sous la couche de maquillage, je récite le moment où je dois essayer de charmer Sileas.
« Je suis également des plus… plus heureux de vous revoir. Sachez que j’ai arpenté quot… quotidiennement ces lieux pour espérer vous… vous recroiser. »
Je me racle la gorge, fermant l’œil pour me concentrer sur mon texte et éviter de fondre de honte devant mon ami.
« Je vais vous aider à regagner votre royaume, mais je vous en prie, ma chère, ne cherchez plus à revenir ici. Cet endroit n’est pas votre, il ne sera point bon pour votre constitution. Si vous souhaitez me revoir, utilisez ce coquillage magique pour m’appeler. Je viendrais toujours à votre secours et ferais tout pour vous protéger, même si vous vous trouvez par de là les mers. »
Complètement rouge, mais fière d’avoir pu sortir mon texte sans une hésitation, je dois maintenant faire un acte bien plus intime. La main légèrement tremblante, je soulève celle du borgne dans ma main, pour y déposer un baiser de mes lèvres tremblantes. Le rideau se ferme à nouveau pendant que le narrateur dépeint la suite et sur comment la sirène regagne à nouveau la mer, le cœur fendu de ne pouvoir rester auprès de son beau prince charmant.
Je profite de ce moment pour pousser un long soupir et m’effondrer de honte devant mon ami, qui lui, doit être dans l’hilarité.
« Oui, allons boire après… J’aurais besoin d’oublier cette pièce… »
Je sais surtout que nous aurons encore bien des scènes comme celle-ci, jusqu’à finir au clou du spectacle qui doit être des plus grandiose.
-"Moi aussi mon beau prince je suis heureux de vous revoir. Je portais en mon cœur l'espoir de recroiser celui qui m'a sauvé la dernière fois. Et a l'odeur que je perçois, je sais désormais que vous êtes celui ayant pris soin de moi."
Mais la sirène est timide, et elle se recule bien rapidement sans pour autant repartir. C'est au Prince de conquérir son cœur, tandis qu'elle ne sait comment réagir à ces avances charmantes mais surprenantes.
-"Je saurais chérir soigneusement ce cadeau cher à mon cœur et je tâcherais de ne jamais vous oublier. Soyez assuré que vous entendrez bien rapidement sonner cet objet enchanté, car je ne saurais me passer de votre compagnie fort longtemps."
Le baise main est censé le faire rougir, mais il n'arrive à simuler cela. A la place, il vient pudiquement poser une main sur ses lèvres et ses joues, imitant la gêne alors que la sirène est touchée de l'attention. Et cela permet surtout à Sileas d'éviter de rire. Il est amusant de la voir essayer de le séduire, même au travers d'une pièce de théâtre. Bien sur il aimerait que la demoiselle en fasse de même hors de leurs rôles, mais il ne faut pas trop lui en demander, elle est réservée sur ces questions après tout.
Et enfin le rideau tombe de nouveau, leur laissant quelques secondes de répit avant la suite. Un soupir suivi d'un rire étouffé échappe a l'aventurier aux paroles de son amie alors qu'il pose une main sur son épaule pour la frotter un peu, se rapprochant pour lui souffler à l'oreille pour ne pas distraire les membres de la scène qui s'attaquent à préparer l'acte suivant.
-"Voyons Sia, cela est censé finir par un baiser passionné, veux-tu vraiment oublier cela si rapidement ? Je vais finir par être blessé de voir que mon prince charmant veut si rapidement oublier l'étreinte de nos corps enivrés."
Est-ce une simple pique ou avec un fond de vérité ? Dur à dire alors que l'homme frotte encore quelques instants l'épaule de la demoiselle avant de la relâcher tandis qu'ils se séparent de nouveau. Le premier acte est fini, maintenant les deux protagonistes se connaissent et peuvent se parler. Maintenant, il est l'heure à l'histoire d'amour impossible entre cette sirène timide mais charmée, et ce prince amoureux mais ne pouvant l'accompagner au fond des océans. Le fameux coquillage magique en main, la nouvelle scène se déroule cette fois en des eaux moins profondes, ou les deux sont censés pouvoir se retrouver, entre terre et mer. La sirène lutte pour arriver à rejoindre un petit lagon, dont l'eau lui arrive à la taille. La créature affronte les éléments, et arrive finalement à sa destination avant de souffler dans son coquillage pour appeler son prince charmant.
Ce dernier finit par arriver alors que la sirène s'allonge dans l'eau peu profonde, lui permettant ainsi de rester plus longtemps sans trop de risques. Quand enfin son preux chevalier arrive, Sileas redresse la tête en réprimant au mieux le sourire qui étire ses traits en voyant Sia dans une telle tenue alors qu'il repense à ses lignes, ne pouvant s'empêcher qu'il peut peut être y insuffler un peu plus de véracité dedans.
-"Enfin vous voici, je me suis languie de votre présence que trop longtemps. En ces lieux au moins, nous pouvons nous permettre de rester sans que l'un de nous ne soit accablé par sa nature. Mais venez mon beau prince, approchez vous, j'ai un cadeau à vous offrir..."
Et alors que le prince s'approche, la sirène tend ce qu'elle tenait précieusement entre ses mains et contre sa "poitrine", objet qui ressemble fort à une combinaison de plongée enchantée, même si cette dernière possède au lieu de jambes une belle nageoire comme celle que l'ondine arbore.
« Je vous en remercie, ma chère. Avec un tel objet, je vais pouvoir vous suivre par delà les eaux. Souhaitez-vous qu’on l’essaye maintenant ? Je ne peux m’empêcher d’être impatient de partager plus de temps en votre compagnie… »
Nouveaux mouvements très galants, récupérant la main du blond pour y déposer le front. Ce dernier pourra sûrement sentir la rougeur qui me prend à travers le maquillage. Je redresse le regard vers lui, le narrateur reprenant la parole alors que j’active l’accessoire. L’étrange combinaison vient m’envelopper dans une tenue des plus ridicules, me faisant arborer une queue similaire à celle de mon ami. Nous devons ensuite exécuter plusieurs pas pour expliquer que les deux protagonistes partent explorer les eaux ensemble. Bien que le prince puisse désormais se mouvoir sans problème sous l’eau, pouvant même y respirer, cette magie n’est que temporaire. Bien vite, il doit regagner la surface avant que le charme ne se rompe.
Les deux amants devant se quitter dans ces conditions, chacun va chercher un moyen pour qu’ils puissent partager leur vie ensemble. Les rideaux se ferment et une fois de plus nous sommes séparés pendant que l’histoire se poursuit. Les scènes suivantes se font séparément. D’un côté, je joue le prince qui passe nuits et jours à arpenter les côtes pour essayer de retrouver son aimée, mais aussi consulter différents spécialistes pour savoir s’il peut faire gagner la terre ferme à la sirène. De l’autre côté, la sirène se fait avoir par une étrange sorcière qui lui propose une solution bien trop facile. Complètement éprise et naïve, la jeune femme se laisse avoir.
J’observe Sileas jouer avec sa maladresse et son manque évident de grâce, même s’il s’efforce autant qu’il peut. Pour dire que nous jouons une pièce que nous avons apprise le jour-même, nous nous en sortons bien. Je me surprends à le regarder avec un petit sourire et une chaleur de la poitrine. C’est une maquilleuse qui surprend mon regard et interrompt le fil de mes pensées.
« Il vous plait ?
- Pardon ?
- Cet aventurier, il vous plait, non ? Ça se voit dans votre regard. C’est bien plus qu’un collègue ou ami. Je me trompe ? »
Je ne sais trop comment répondre à cette question, rougissant et ne sachant plus où me mettre. Je me mets à jouer avec mes doigts alors que la jeune femme ricane avant de reprendre ma coiffure.
« Je pense que vous devriez profiter de cette pièce pour laisser vos sentiments s’exprimer. Ils sont plutôt évidents et je ne pense pas que vous soyez rejetée. »
Je ne réponds rien, la laissant ajuster mes cheveux sans réussir à détacher mon regard de l’homme déguisé en sirène qui se débrouille plutôt bien. J’ignore si cette femme a raison, mais ses paroles tournent en boucle dans mon esprit quand on m’appelle pour la scène suivante. Va venir le moment où la sirène offre à nouveau un objet au prince, mais cette fois les effets sont plus dévastateurs. Si le prince peut désormais revêtir cette queue de poisson de manière permanente, sa belle oublie qui il est. Même s’il est particulièrement beau, sa pudeur la fait fuir et elle se met à éviter le beau prince. La sorcière ayant donné l’objet à la sirène apparait alors, se moquant du prince ayant accepté cet objet ridicule. Il a trois jours pour pouvoir échanger un baiser passionné avec sa belle, sinon il perdra sa queue à jamais et risquera de se noyer s’il n’est pas à la surface à ce moment-là. Autre effet, il ne diffuse maintenant plus cette odeur particulière qui a pu charmer la belle dès le premier jour. Le prince se retrouve donc à devoir utiliser tous ses charmes pour s’en sortir.
Les scènes changent et on nous prépare pour la suite. Alors que j’interprète un prince coursant une sirène qui l’évite, je dois aussi faire des efforts pour la charmer à nouveau. Évidemment, cette dernière particulièrement maladroite se retrouve toujours dans des situations dans lesquelles elle doit être sauvée. Une sorte de bien étrange danse commence entre les deux amants, l’un évitant l’autre qui cherche à absolument la conquérir. Même si les sentiments de la sirène reviennent progressivement, le temps s’écoule bien plus rapidement. Et c’est au terme du dernier jour que le prince se présente devant sa bien aimée dans une dernière tentative de la conquérir.
Les rideaux se lèvent et le narrateur annonce le dernier acte de cette pièce bien trop longue pour mes émotions qui n’ont pas arrêtées d’aller en tous sens. Je repère la maquilleuse de plus tôt qui s’occupe de me retoucher une dernière fois avant le grand final.
« C’est le grand moment, alors essayez d’y mettre vos propres sentiments. »
Même si je ne réponds rien, je réfléchis à ces mots tout en relisant le script. Même s’il est particulièrement cliché, je sens que ces quelques mots vont me mettre mal à l’aise une fois sur scène. La sirène arrive et il est temps pour moi de me lancer et d’aller l’attraper. Comme plus tôt, cette dernière cherche à fuir, mais le prince commence alors une déclaration qui doit être le moment le plus émouvant de la pièce.
« Je vous en prie, ma chère, écoutez mes plaintes jusqu’au bout et je vous promets ensuite de ne plus venir vous importuner. Voyez-vous, j’ai été touché d’un terrible maléfice. Je dois aujourd’hui goûter vos délicieuses lèvres sous peine de perdre ma nageoire et ma capacité à respirer sous l’eau. Si je ne regagne pas la surface rapidement, je ne noierais ici présent. Ma chère, je ne veux pas regagner la surface. Si j’ai accepté ce sortilège, c’est pour pouvoir être à vos côtés. Si je ne peux avoir votre amour, alors je préfère me donner la mort que devoir endurer une vie sans vous. Je vous le déclare le plus sincèrement du monde, je vous… »
Je m’arrête dans ma réplique, sentant le rouge me monter au visage. Ce petit mot est tout simple, et pourtant je peine à la faire sortir, coincé dans ma gorge. Je prends une grande inspiration, le public pendu à mes lèvres tremblantes. J’essaye de ne pas me défiler, plantant mon regard dans celui d’acier du blond ainsi que l’air le plus sérieux qu’il soit. Je prends mon courage à deux mains puis décide de légèrement adapter ma réplique pour la rendre bien plus juste.
« Je vous aime. Il n’y a rien de plus simple. Je vous aime et vous avez su conquérir mon cœur. Je n’arrive plus à vous retirer de mes pensées, vous y êtes nuits et jours. Je vous demande alors, acceptez-vous mon amour ?… »
Tandis que dans le public les femmes sont prises d’une pointe d’excitation à l’idée de voir cette romance intense naitre, le moment fatidique approchant à grands pas, mon regard ne quitte plus celui du blond. Tous attendant sa réponse, mon cœur battant à tout rompre, me demandant s’il va comprendre la raison de pourquoi j’ai adapté mon script et s’il va réussir à voir au-delà de mon jeu d’acteur.
Réfléchissant à cela, il ne peut s'empêcher d'observer plus en détail la forgeronne et ses charmes, invisibles à cause de sa tenue, mais bel et bien présents. Sans s'en rendre compte, son sourire se fait plus grand, plus large et plus sincère. Pendant un instant, il est presque heureux de cette comédie qui leur permet d'avancer leurs sentiments à pas feutrés. Lui du moins essaye d'en profiter pour glisser dans son texte des petits bouts de sincérité, même si il ne sait pas réellement si l'Edelweiss arrive à les comprendre. Aucun des deux n'a nu les lignes de l'autre, après tout, et peut être se dit-elle tout simplement qu'il suit à la trace son texte et qu'il est juste particulièrement passionné.
Ses rêveries sentimentales sont néanmoins coupées par ce dernier acte émouvant. Depuis deux jours la sirène fuit son tendre promis car elle ne sait plus qui il est. Elle est de nouveau charmée, mais encore craintive. Cet homme est un inconnu usant de magie pour la rejoindre après tout, qui peut s'assurer que ses intentions sont pures ? C'est justement tout le but du texte déclamé par la jeune femme sous les traits du Prince, qui se veut assez convainquant. Et si la première partie est particulièrement redondante, déjà vue et revue des milliers de fois, la pause qui s'ensuit et cette déclaration bien plus intime fait s'interroger Sileas. Est-ce réellement son texte qui est si passionné, ou quelque chose d'autre se cache-il en dessous ? Profitant de la réaction de la Sirène qui est de porter les mains à son cœur avant de reculer pour lentement tourner autour du prince sans quitter son regard, cherchant à vérifier la véracité de son propos, l'homme en fait de même. Il plonge son œil d'acier dans celui de son amie, cherchant à y voir une flamme, un éclat pouvant lui prouver que ce n'était pas qu'un jeu d'acteur. Il croit déceler cette étincelle, mais n'en est pas sur alors que son tour vient de répondre après ce silence volontairement long.
-"Oh beau prince, vous qui n'avez cesse de me suivre et de me déclamer vos doux sentiments, comment puis-je m'assurer de la véracité de vos propos aimants ? Pensez-vous mériter mon cœur, et le chérir précieusement ? Je ne demande qu'a vous croire, car votre présence fait battre ma poitrine un peu plus fort à chaque instant, et la chaleur de vos mains embrase mon esprit, mais dites moi..."
Nouveau silence alors que les demoiselles de la salle retiennent leur souffle, ne sachant de quel coté la balance va pencher. La Sirène se rapproche de son prétendant, et Sileas vient attraper les mains de Sia dans les siennes, les serrant légèrement plus qu'il ne le devrait alors qu'il vient la regarder droit dans les yeux, lui soufflant d'une voix vibrante d'une émotion qui n'est clairement pas entièrement jouée alors qu'il se jette, assez ironiquement, à l'eau, écoutant son instinct et cette flamme qu'il a cru percevoir en sa comparse.
-"Dites moi sincèrement, vos belles paroles sont elles placées la où votre cœur l'est ? Promettez-vous que ce n'est point une ruse pour me blesser, et que vous en pensez chaque mot ainsi soufflé ? Vous aussi vous peuplez mes jours comme mes nuits, et je n'ai d'envie que de m'oublier dans votre étreinte jusqu'au bout de nos vies..."
C'est dit. Lui même a légèrement adapté son texte. Impossible de savoir si la demoiselle comprendra son sous texte, mais il est possible de voir le léger rougissement qui prend les joues et le front de l'homme, qui n'est clairement pas joué. Il ne sait pas imiter de telles émotions de toute façon. Son regard d'acier cherche celui de son amie pour s'y prendre, alors que peu à peu ils se rapprochent. Sileas retient autant son souffle que le public, alors que peu à peu il approche ses lèvres. La scène inclut un baiser, censé être passionné. Mais au fond du regard du blond, une question muette se lit, qu'il finit par souffler en un murmure tandis qu'ils sont pratiquement entrelacés.
-"Sia, tes mots m'étaient-ils adressés ? Puis-je t'embrasser comme je souhaiterais réellement le faire et non comme nous devrions le faire ?"
Bien sur qu'il meurt d'envie de découvrir pour la première fois la chaleur de ses lèvres et d'une première étreinte, surement bien plus que la sirène elle même dans cette scène... Mais pour autant il n'a pas envie de la forcer, il n'a pas envie de la blesser si il a mal interprété ses propos, alors que ses lèvres se perdent à quelques centimètres à peine de celles de son amie, son souffle caressant pratiquement son visage, son regard ne la quittant plus un seul instant, figé dans ce moment.
Vient la suite de la scène, celle où le prince doit embrasser la sirène pour lui prouver la sincérité de ses paroles. En cet instant, c’est plutôt le blond qui semble vouloir m’embrasser et les paroles qu’il me souffle viennent me le confirmer. Mon rougissement s’intensifie et je n’arrive pas à répondre quoique ce soit. Mon cœur bat la chamade et j’ai l’impression de l’avoir dans les oreilles tellement je l’entends fort. Je prends une inspiration, glisse mes mains à son visage et l’approche pour lui donner le baiser comme dans le script. Toutefois, je viens y mettre mes sentiments et ce baiser qui ne devait être sur le bout des lèvres devient bien plus passionné.
Autant dans le public que dans les coulisses, l’émerveillement est de mise, certains commençant même à applaudir alors que les rideaux se ferment. Si le narrateur reprend la fin de son histoire, de notre côté, nous continuons ce tendre baiser jusqu’à en avoir le souffle presque coupé. Quand enfin j’arrive à libérer mes lèvres, il me faut quelques secondes pour pouvoir à nouveau respirer normalement. L’équipe autour de nous s’affaire, se préparant à saluer le public dès que le rideau se lève. Je me penche alors vers le blond pour lui murmurer pour qu’il soit le seul à m’entendre.
« Il faudra que l’on en discute une fois cette pièce terminée je crois… »
Sans pouvoir perdre le sourire qui illumine mon visage, je viens me saisir de la main du borgne, entrelaçant nos doigts et récupère de l’autre la main d’un membre de l’équipe. Quand le rideau se lève, nous sommes applaudis et quelques sifflements se font entendre. Nous nous inclinons tous, des fleurs étant lancées pour saluer notre prestation. En me relevant, je repère un groupe de demoiselles, les larmes aux yeux, visiblement ayant été très émues par cette histoire. Nous continuons de saluer le public plusieurs fois avant que le rideau ne se baisse à nouveau. Quand c’est fait, je me retrouve embarquée par mon équipe de maquilleuse, me séparant à contrecœur de Sileas.
Ma loge regagnée, les discussions vont bon train sur le succès de la pièce, la prestation que les deux aventuriers engagés ont pu faire ou encore sur la possibilité d’une augmentation, la pièce a eu tant de succès. La jeune maquilleuse revient s’occuper de ma coiffure, un large sourire étirant ses traits.
« Alors, j’avais raison, non ? »
Je souffle de manière amusée sans répondre. Autour de moi, les demoiselles se presse pour poser un millier de questions sur mes capacités d’actrice, mais aussi mon couple avec le « bel aventurier blond ». Elles sont rappelées à l’ordre par l’ainée du groupe qui leur rappelle qu’elles doivent s’occuper de moi pour me retirer mon costume et maquillage afin de ne pas être trop importunée par les spectateurs à la sortie. Les couches de mon rôle sont progressivement retirées, retrouvant mon apparence d’origine bien que ma fleur soit toujours absente de mon visage. Je viens récupérer le cache œil qui m’appartient dans mes affaires, pour le mettre dès que l’on a terminé de nettoyer le maquillage qui m’embellissait. Je ne peux retenir un soupir de soulagement quand tout le costume est retiré.
Je suis enfin libre de ce rôle ridicule que j’ai dû incarner. Mes affaires récupérées, je salue l’ensemble de l’équipe qui s’est occupée de moi. Toutes sont heureuses d’avoir pu participer à un tel succès et certaines ne cachent pas leur curiosité quant à mon couple avec l’aventurier m’ayant accompagné. Si aucune d’entre elles n’auront la réponse à ces questions, l’une sait très bien qu’elle a encouragé cet échange passionné sur scène.
Je finis par quitter la loge, soupirant de soulagement. Je me dirige vers la sortie arrière avant de croiser le metteur en scène qui échange avec une tête blonde que je reconnais au loin. Ce dernier a, semble-t-il, eu plus de faciliter à retirer son costume puisqu’il portait moins de maquillage que moi. Il récupère la preuve de la réalisation de notre quête avant de me repérer et me rejoindre. Je note qu’il ne porte étrangement pas son armure intégrale comme à notre arrivée. Après tout, il est déjà tard et nous allons certainement passer la nuit à la Ville Aquatique avant de pouvoir prendre une navette.
Nous quittons le théâtre, commençant à nous promener silencieusement sans qu’aucun d’entre nous n’entame la conversation. Même si je n’ose pas parler, je viens lentement glisser ma main à celle du blond et attend qu’ils viennent s’en saisir. Qui aurait pu penser qu’une quête aussi absurde aurait de telles répercussions ?