Cela faisait désormais quelques jours que Kasha était rentrée de sa dernière escapade à la Forteresse. Escapade haute en couleurs, se dit-elle en y repensant. Elle qui voulait simplement s'éloigner de sa vie, qui avait pris trop d'intensité dernièrement, s'était retrouvée aux prises avec un tavernier dont elle ne savait toujours pas que penser, pour finir par retrouver une fois de plus le conseiller royal dans une situation... plutôt gênante. Puis, alors qu'elle voulait rentrer, le même aubergiste avait réussi à faire en sorte qu'elle revienne avec un familier. Elle l'adorait, là n'était pas la question, mais... Elle qui fuyait les responsabilités était revenue avec encore plus de détails à gérer. Il y avait visiblement quelque chose qu'elle ne maîtrisait pas. Ou alors, Lucy voulait lui prouver certaines de ses propres capacités, dont elle n'avait pas conscience. Ce qui était également possible.

Un miaulement la tira de ses pensées. Avec un sourire, elle vint câliner Nox, qu'elle avait fini par faire dormir sur sa table de nuit, sur laquelle sa petite taille lui permettait de tenir sans problèmes. Et il était sage, elle n'avait jamais trouvé le moindre de ses objets renversés à son réveil. Repensant aux conseils de Sileas, elle se dit qu'en effet, elle devrait quand même lui trouver un panier, pour lorsqu'il aurait grandi.

Prenant le chaton dans sa main, elle remarqua qu'en effet, il n'était plus aussi minuscule qu'à sa naissance. À présent, il ne tenait plus dans sa main que lorsqu'il dormait, roulé en boule.

Néanmoins, il n'avait jamais utilisé ses ailes. Etait-ce normal ? Etait-il trop jeune pour en avoir la possibilité ? Ou y avait-il un problème ? Bien sûr, elle aurait pu tenter de recontacter Sileas pour lui poser la question, mais, mis à part le fait qu'elle n'était pas sûre de pouvoir le retrouver, elle ne pensait pas que cela vaudrait la peine de le déranger pour si peu. L'homme, contrairement à elle, semblait être un bourreau de travail.

- On ne va pas le déranger, hein ? Et on va considérer que tu es juste trop jeune... Mais un jour, il va falloir que tu me montres ces ailes !

Elle s'était adressée au familier, en l'observant. Et, alors qu'elle prononçait la dernière phrase, elle avait effleuré lesdites ailes du bout des doigts. Ne sachant pas si elles étaient fragiles, elle n'osait pas y toucher de manière aussi assurée que la tête de son compagnon, par exemple.

Compagnon qui, visiblement impatienté par cette inactivité, sauta soudain de sa main pour aller miauler près de la porte, provoquant une frayeur à Kasha lorsqu'il franchit la distance importante qui le séparait du sol. Visiblement, le chaton voulait sortir.

Dès qu'elle ouvrit la porte, il se mit à courir dans les couloirs du bâtiment, miaulant une salutation à chaque fois qu'il croisait un humain. Mine de rien, il courait vite, et Kasha ne cessait de s'excuser auprès de tout le monde alors qu'elle lui courait après, tentant de le rattraper.

Quand enfin elle y parvint, épuisée, elle le récupéra. Le chaton grimpa alors sur son épaule et s'adonna à son jeu préféré, à savoir : s'amuser avec les cheveux de sa maîtresse. Néanmoins, se souvenant du désastre qu'avait été la première fois qu'il s'était adonné à ce fameux jeu, la demoiselle attachait toujours sa tignasse. Ce qui fit qu'actuellement, il jouait avec sans risquer de s'y emmêler, surtout qu'elle prenait garde à le maintenir assez éloigné de sa tête pour qu'il n'ait pas accès à une quantité de cheveux suffisante pour provoquer ce désastre une nouvelle fois.

Le promenant comme un bébé, elle lui fit visiter les endroits de la Capitale qu'elle préférait, tout en sentant continuellement ses pattes sur ses cheveux, preuve qu'il ne faisait absolument pas attention à son environnement.

Finalement, elle s'arrêta dans un parc et, forçant le chaton à lâcher son amusement, le plaça sur ses genoux :

- Si je t'embête, dis-le !

Malgré l'agressivité des paroles, le ton était doux et affectueux. Après un "miaou" interrogatif, le Tenko finit par s'échapper de nouveau... Mais cette fois, il ne se mit pas à courir, il s'adonna plutôt à sa deuxième activité favorite après faire tourner Kasha en bourrique : l'exploration. Il se mit à parcourir les environs, reniflant chaque buisson, chaque touffe d'herbe. Attendrie, Kasha le laissa faire, tout en continuant évidemment à le surveiller. Il était encore très jeune, qui savait quand la fantaisie lui prendrait de faire une nouvelle bêtise...

... Elle n'aurait clairement pas dû avoir cette pensée. Alors que quelqu'un approchait, son petit compagnon abandonna immédiatement son exploration pour se précipiter vers la personne et lui miauler son bonjour habituel. Mais, cette fois, il resta près de la personne, ce qui changeait de son comportement habituel, qui était de poursuivre son chemin après sa salutation. Et cette fois, il bloquait le chemin de l'inconnue, qui se révéla être une jeune femme peut-être un peu plus âgée que Kasha... Qui, avec un énième soupir, alla récupérer son chaton, avant de s'excuser :

- Pardonnez-le, il est très sociable.

Alors, profitant du fait qu'il se trouvait à un endroit idéal pour se faire, à savoir les bras de Kasha, il prit son élan, puis sauta sur l'épaule de la femme. Après avoir pris un moment pour se stabiliser, il se tourna vers elle, puis... Lui asséna un coup de langue sur la joue, sous les yeux ahuris de Kasha, qui, pour la première fois, le voyait exprimer une sincère affection pour quelqu'un d'autre qu'elle. Néanmoins, elle retourna le chercher une fois de plus, avec de nouveaux mots d'excuse :

- Visiblement, il vous apprécie. Oui, sans vous connaître.

Le réflexe de la femme d'empêcher le Tenko de tomber la lui rendit rapidement sympathique. En effet, elle se revoyait elle-même, dans l'auberge où le chaton était né, placer sa main près du bord de la table sur laquelle il jouait, dans le même but, lui éviter une éventuelle chute. Visiblement, Nox savait choisir ses amis... Ou en tous cas, les personnes capables de lui rendre son affection.

Lorsque l'inconnue commença à lui poser des questions, Kasha eut à peine le temps de former une réponse dans sa tête que le flot de paroles continua. Affichant un sourire poli, elle la laissa terminer avant de dire quoi que ce soit, hochant la tête pour lui donner la permission de caresser le chaton lorsqu'elle lui posa silencieusement la question. Et elle se dépêcha de donner une précision avant qu'elle ne reprenne la parole :

- Si vous voulez, il aime particulièrement qu'on lui gratte la tête.

Enfin, lorsqu'il sembla que son interlocutrice avait terminé, elle commença à répondre aux questions :

- Il est tout jeune. Pour être honnête, vous êtes la première personne qu'il risque de rencontrer de manière prolongée, si on exclut l'homme qui m'a aidée à le faire éclore. Et pour son âge... Il n'a que quelques jours.

Elle prit un instant pour rassembler ses souvenirs, alors qu'elle devait raconter la naissance du garnement. Puis elle se lança, omettant volontairement la raison de son voyage :

- Je suis très récemment allée profiter des festivités d'été à la Forteresse, qui est pour ainsi dire la seule ville que je connais autre que la Capitale. Je vous épargne les détails, mais, au moment de partir, l'aubergiste chez qui j'avais séjourné m'a demandé d'aller voir... Et soutenir... Un marchand de familiers qui venait d'ouvrir sa boutique. Et j'en suis ressortie avec un oeuf.

Elle laissa échapper un rire incrédule. Elle n'arrivait toujours pas à croire qu'elle avait réussi à dépenser presque toute sa fortune pour adopter un animal dont elle ne savait presque rien à ce moment. Et elle n'en savait pas non plus énormément à ce moment précis, même si la discussion qui avait suivi l'avait beaucoup aidée. Puis elle reprit.

- Je ne savais pas trop quoi faire de mon oeuf... Alors, je me suis plus ou moins imposée au premier aventurier que j'ai croisé et il m'a guidée pendant mes premiers pas de propriétaire de familier. Franchement, je ne l'en remercierai jamais assez.

Puis elle se remémora la question qui avait suivi. Est-ce qu'il allait encore grandir ? Oui, évidemment, il était loin d'avoir atteint sa taille adulte. Mais elle prit le temps de rassembler ses souvenirs encore une fois. Sileas lui avait donné une information chiffrée à ce sujet...

- Pour ce qui est de la croissance... Si je me souviens bien, il devrait atteindre sa taille adulte dans quelques mois... D'un autre côté, celui qui m'a dit ça possède un familier bien plus petit, peut-être que ça prendra plus de temps dans mon cas. Enfin, pour vous répondre, oui, il va encore bien grandir ! Vous voyez un chat normal ? Je pense qu'il atteindra à peu près la même taille.

Ensuite, elle avait formulé le souhait d'avoir son propre familier, avec cependant certaines réserves.

- Missions ? Vous êtes... Une garde ? Une aventurière, peut-être ?

Dans les deux cas, sa réponse ne changerait pas beaucoup.

- Si vous voulez mon avis, ne cherchez pas forcément de familier. Si j'en crois ma propre expérience, si vous êtes destinée à en avoir un, quand ce sera le moment, vous le saurez. Et vous ne pourrez même pas avoir l'occasion de vous poser des questions, ce sera une évidence pour vous. Si vous fonctionnez comme moi, je ne sais pas comment ça s'est passé pour les autres.

Puis elle décida de la rassurer :

- Et pour ce qui est de vous accompagner... Si vous optez pour une monture, vous n'aurez probablement aucun problème de ce côté. Pour un autre type de familier... Je suppose que ça dépend de l'animal. Tenez, par exemple : je suis une aventurière, et ce que je fais le plus souvent est de m'introduire chez mes cibles pour vérifier dans leurs documents personnels s'ils ont quelque chose à se reprocher. Je suis sûre que ce Tenko pourrait m'aider à les distraire, lorsqu'il saura utiliser ses ailes. Et s'il est d'accord, ce qui n'est pas sûr.

Posant son regard sur son chaton, elle lui adressa une pique :

- Il ne s'agirait en effet pas que Monsieur aille faire ami-ami avec de potentiels criminels, n'est-ce pas ?

Elle soupira. Il en était parfaitement capable, elle le savait. Néanmoins, elle devait bien admettre que l'idée d'une collaboration avec son petit compagnon, même si elle venait de l'improviser, était séduisante.

Et soudain, une pensée la traversa :

- Oh, mais j'oublie les règles les plus élémentaires de politesse ! Je m'appelle Kasha, et Monsieur se nomme Nox !

Puis, remarquant que le chaton semblait intéressée par la brune, Kasha proposa :

- Si vous voulez, vous pouvez le prendre, il a l'air partant.

En effet, lorsqu'elle approcha le chaton pour permettre à la femme de venir le cueillir si elle le voulait, ce dernier posa une patte sur le bras de l'inconnue avec un miaulement que, cette fois, Kasha aurait été incapable de traduire. Et elle se sentit obligée de préciser :

- Par contre, si vous le prenez, ne le laissez pas jouer avec vos cheveux. Croyez-moi, ça vaut mieux pour vous deux.

Elle se souvenait encore du drame qui avait eu lieu, dans l'auberge de la Forteresse, quand elle avait eu toutes les peines du monde à libérer le chaton de la prison de mèches blondes qu'il s'était lui-même créée au cours de ses jeux...

À la remarque sur la maturité du chaton, Kasha ne put s'empêcher de rire doucement :

- Je pense surtout qu'il est déterminé... Je ne serais pas surprise si, un jour, j'obtiens le don de télépathie avec lui et qu'il m'annonce que son but ultime est de rencontrer tous les humains d'Aryon, vous l'auriez vu, ne serait-ce que ce matin, à saluer toutes les personnes qu'il croisait !

Puis vinrent les considérations sur le prix de l'oeuf. Kasha était mal placée pour nier, elle qui, n'ayant pas prévu de revenir avec un familier, n'avait pas emmené tous ses cristaux lors de sa dernière escapade... Et avait dépensé presque tout ce qu'elle avait pris. Alors, certes, il lui restait ce qu'elle avait laissé sur place, mais ce montant égalait à peine celui qu'elle avait dépensé. Heureusement d'ailleurs qu'elle n'avait pas tout pris, se dit-elle soudain. Cela aurait été une occasion de se retrouver vraiment dans la pauvreté à son retour et, même si la richesse n'avait jamais été son ambition, elle n'aimait pas l'idée de devoir partir en mission pour être capable de subsister. D'autant plus que, financièrement, elle s'en sortait bien : en effet, n'étant pas une combattante, elle n'avait pas à dépenser des fortunes en équipement ou entretien d'équipements. Ses outils de travail principaux étaient des vêtements et du maquillage... Le type d'articles qui n'étaient pas excessivement chers à l'achat, sauf lorsqu'il s'agissait de refaire la garde-robe de Victoria, évidemment, et, surtout, qui ne s'usaient pas rapidement. Elle avait donc peu d'entretien à effectuer, ce qui lui permettait de, peut-être, se retrouver à gagner autant que ses collègues qui travaillaient certes plus qu'elle, mais avaient également de plus gros investissements à assurer. La demoiselle pouvait se permettre une vie assez libre, même si, évidemment, elle finissait toujours par revenir à la Guilde, son seul foyer, peuplé de la seule famille dont elle avait accepté de se souvenir, avec qui elle ne partageait aucun lien de sang, mais pour elle, les liens du coeur étaient mille fois plus importants.

Kasha, quand est-ce que tu apprendras à respecter tes interlocuteurs, ce qui veut dire... LEUR REPONDRE AVANT DE REFLECHIR PENDANT DES HEURES ?
Oh, tiens, cela faisait longtemps que sa voix intérieure ne s'était pas manifestée... Mais, comme d'habitude, elle n'énonçait que la plus stricte vérité. Alors, Kasha répondit :

- Ah, bien sûr, je ne regrette absolument pas ! J'imaginais qu'en tant que spécialiste de la discrétion, j'étais vouée à rester seule, mais finalement... Je pense qu'on peut reconsidérer cette opinion.

Elle accompagna ces mots d'une expression rieuse. Ce n'était pas complètement vrai, se dit-elle. Après tout, elle commençait à avoir un certain nombre de relations plus ou moins proches, mais elle n'imaginait aucun des autres humains l'accompagner au point de mettre en péril sa discrétion. À présent qu'elle avait un compagnon à quatre pattes, une fois de plus, cet état de faits pouvait être remis en question. Lui ne la laisserait pas seule. D'un autre côté, il savait se montrer discret... Quand il le voulait. Ce qui était assez rare, mine de rien.

Elle observa la jeune femme, bienveillante, alors qu'elle jouait avec Nox. Aucun doute qu'il allait s'en faire une amie. Entre le chaton qui adorait les humains et l'humaine qui avait visiblement bien succombé au charme du petit diable, Kasha pouvait presque voir l'alchimie parfaite qui était en train de naître. Et elle ne pouvait s'empêcher d'en être heureuse, elle qui voulait que le chaton fasse ses propres rencontres... Cependant, par, "ses propres rencontres", elle entendait plutôt d'autres familiers, mais après tout... Qui était-elle pour décider avec qui il se liait ? D'autant plus que, c'était bien connu, les félins savaient arriver à leurs fins, qu'ils en aient ou non le droit. Et Kasha ne sentait aucune menace émaner de cette femme, qui lui déclara être également une aventurière... Donc une autre membre de cette immense famille que la blonde ne cessait de découvrir. Elle faisait donc partie du clan et avait par conséquent droit à l'entière confiance de l'illusionniste.

Puis vint la validation de l'idée qu'elle avait eue. Vraiment, il serait capable de l'aider ? Ce serait simplement parfait ! Cependant, elle ne dit rien, gardant ses pensées pour elle. Après tout, cette femme, même si elle avait sa confiance, ne travaillerait probablement jamais avec elle. En effet, Kasha ne connaissait pas sa spécialité, et ne la lui demanderait pas si elle n'en parlait pas d'elle-même, à en juger par ce qu'elle portait dans son dos. Une musicienne. Clairement pas le type de personne qui pourrait l'aider. Encore moins depuis qu'elle avait sa propre distraction vivante... Et son pouvoir, même si elle rechignait à l'utiliser si ce n'était pas nécessaire.

La sortant de ses pensées, elle répondit à ses présentations. Mor'g'han... Compliqué, comme nom. Avec un petit rire gêné, elle commenta :

- Je pense que je ne vais pas être originale et vous appeler Mo également.

Vraiment ? C'était une nouvelle recrue ? Cela invoqua immédiatement l'image d'Agneta devant ses yeux. Cette dernière incarnait réellement l'image de la nouvelle venue, une jeune femme un peu perdue mais volontaire, et avec du potentiel. Chassant l'image, elle se concentra de nouveau sur la femme devant elle. Elle semblait plus âgée qu'Agneta, même que Kasha elle-même. Et même si elle semblait innocente actuellement, elle se doutait que cela n'était dû qu'à la présence de Nox. Cette femme était mature, elle en était certaine. Dans tous les cas, Kasha avait du mal à l'imaginer comme une nouvelle. De toutes manières, elle-même avait rejoint la Guilde très jeune, sa vision à ce sujet était donc biaisée. Néanmoins, elle se prit, se surprenant un peu elle-même, à proposer :

- J'ai déjà officiellement la responsabilité de quelqu'un, mais... Si vous voulez, je peux peut-être vous guider dans vos premiers pas dans cette nouvelle vie. Officieusement, bien sûr.

Après une hésitation, elle reprit, malicieuse :

- Et même si on se fait surprendre, les hôtes de la Guilde ont l'habitude que je prenne des libertés avec les règles. Je prendrai toute la responsabilité !

C'était plus ou moins une plaisanterie. Mais elle savait que, si elle tombait sur le bon hôte, celui auquel elle rendait la plupart de ses rapports, il n'y aurait aucun problème. Si l'on devait garder l'image de la famille, cet hôte serait clairement son grand frère : il avait des responsabilités, en était conscient, mais avait aussi une certaine affection pour elle. Il était son meilleur moyen d'obtenir un compromis. Et puis, si elle avait l'autorisation d'un hôte, techniquement, elle ne faisait rien de mal, n'est-ce pas ?

D'un autre côté, il était très peu probable que ce scénario fantaisiste devienne réalité : en effet, elle ne serait pas surprise que la femme refuse d'être mentorée par quelqu'un de plus jeune qu'elle, et Kasha ne pourrait que comprendre...

Lorsque Mo fit un geste pour se saisir du chaton, Kasha se prépara à lui faciliter la tâche... Mais elle n'eut que le temps d'y penser. Le chaton lui-même effectua ce rapprochement. Il profita même du fait qu'elle semblait réceptive pour grimper le long de son bras pour remonter vers son épaule, qui semblait décidément être son lieu favori.

- Si jamais il vous dérange, n'hésitez pas à le repousser, ou carrément le déplacer. Il aime les humains, je ne pense pas qu'il vous fera le moindre mal, même si vous n'êtes pas d'accord.

Comme s'il avait compris, Nox approuva d'un miaulement sonore. Kasha se prit à rire. Comment un si petit corps pouvait-il contenir tant d'énergie ? Il n'avait pas arrêté depuis le matin, et ne semblait toujours pas fatigué... À sa place, elle se serait déjà effondrée depuis longtemps.

Et quand vint la possibilité qu'il soit volé, Kasha réfléchit. En effet, si quelqu'un voulait le lui dérober, la tâche serait très aisée, le chaton allant de lui-même vers le moindre humain qu'il croisait, avec une préférence pour ceux qu'il ne connaissait pas.

Pour la première fois, son expression se fit un instant inquiète, puis elle lança, incertaine :

- Mais un familier est lié à son maître, non ? Je... J'espère qu'il n'est pas aussi facile de les séparer.

Le chaton, semblant sentir son inquiétude, se calma un moment pour l'observer, puis lui adressa un miaulement interrogateur, l'air de demander : "ça va ?"

Kasha se força à sourire et vint le cajoler pendant un moment :

- Ne t'inquiète pas, je vis encore dans mes illusions.

Après tout, peut-être que son pouvoir était le reflet de sa tendance à rêver, pourquoi pas. Elle n'en avait aucune idée et n'était même pas sûre de vouloir connaître la vérité à ce sujet.

Elle préféra donc répondre à la question sur les cheveux :

- Au contraire, il les aime trop ! Il a bien failli me forcer à me couper les cheveux, quelques minutes avant sa naissance. Pour faire simple, à force de jouer avec, il s'est retrouvé emmêlé dedans. Je ne sais pas s'il le refera avec quelqu'un d'autre, mais j'ai préféré vous prévenir, par précaution.

D'un autre côté, il semblait avoir compris lorsqu'elle l'avait grondé après sa bêtise. Mais l'adage disait "mieux vaut prévenir que guérir", alors, elle prévenait.

- Oui, en effet. D'un autre côté, vous en conviendrez, en cette saison, c'est plutôt un avantage de pouvoir s'attacher les cheveux ! Et quand la saison froide sera de retour, Nox aura grandi, avec un peu de chance, il se sera assagi, donc je pense qu'il y a pire comme problème.

Lorsqu'elle parla des ailes, Kasha prit le temps de réfléchir. Les muscler ? En effet, cela pouvait être une bonne idée. Mais comment saurait-elle lorsqu'il serait seulement capable de s'en servir ? Dans leur état actuel, elle doutait en effet qu'elles puissent être d'une quelconque utilité...

- J'espère seulement qu'elles grandiront plus vite que lui, parce qu'à voir les proportions entre les ailes et le chaton, je ne pense pas qu'elles pourraient le porter, même si elles étaient musclées. Mais vous avez eu une bonne idée, il faudrait juste savoir quand je pourrai aller lui faire faire des sessions de vol.

Une fois de plus, elle se prit à rêver. Evidemment, Nox serait probablement encore plus intenable le jour où il découvrirait sa capacité à voler, mais l'idée d'avoir un compagnon qui lui volait autour d'elle ne déplaisait pas à Kasha. Et puis, si elle voulait qu'il l'aide en distrayant ses cibles, s'il pouvait leur voler autour, cet objectif serait atteint bien plus facilement. Elle ne voyait donc aucun réel inconvénient à cet évènement, qui ne tarderait probablement plus beaucoup de toutes manières.

Les bêtises...

- Dès qu'il le peut ! rit-elle. Mais je sais qu'il ne pense pas à mal. Exemple : lorsqu'il s'est pris dans mes cheveux, la dernière fois, dès que je lui ai demandé d'arrêter, il l'aurait fait s'il avait réussi à sortir sans aide. Il est plus adorable qu'énervant, vous vous en rendrez peut-être compte en passant un peu de temps avec lui.