Surprise ! Vous vous êtes inscrits à un concours pour tenter de remporter un séjour de rêve sur un bateau de plaisance, au large de l’Archipel. Pour l’occasion, vous vous êtes donc déplacées jusqu’au Grand Port, sur l’une de ses belles plages de sable blanc. Le soleil brille, l’eau est chaude et les gens ont tous l’air très sympathiques. Cependant, dans quelques minutes, ils deviendront vos plus terribles adversaires… Armés de bombes à eau, votre but est simple : marquer le plus de points possibles en arrosant les autres !
Oh, j’ai oublié de préciser. Vous avez été placés par équipe de deux, toutes tirées au sort. Et, comme le hasard fait bien les choses, vous êtes dans la même équipe. L’occasion parfaite pour apprendre à se connaître, non ? Entre deux bombes à eau sur l’une des plus belles plages du royaume.
Enfin, faites quand même attention à Mario et Luigi. Ce sont deux frères redoutables, hommes de ménage de profession, qui sont prêts à tous les coups-bas pour gagner avec leurs balais…
Participants : @Sofia Nox et @Agneta Lindahl
Thème actuel :Jeux aquatiques
Je n'avais rien dit à Eve, vu que je voulais lui faire la surprise. Je m’étais donc inscrite seule dans l'espoir d'être avec quelqu'un de balèze en équipe. Lorsque je découvris ma coéquipière, une certaine "Agneta", je me rendis rapidement compte qu'elle allait surement être un boulet. Frêle, l'air un peu intimidée, je m'approchai d'elle histoire de faire un peu connaissance avant le début des hostilités.
"Salut ! Moi c'est Sofia, on s'ra en équipe. J'espère que t'es motivée."
Pour le coup, je voulais avoir l'air un peu sympa et pas faire peur à ma collègue avec mon air habituelle de blasée colérique. Je me mis en place sur la future zone de bataille, derrière notre stock de bombes à eau de couleur rose.
"Bon, j'me suis renseignée un peu et faudra se méfier de ces deux-là Déclarai-je en désignant les Frères Brosse. Le truc, quand t'es un peu trop connu dans ce genre d'évén'ment, c'est qu'tu peux vite être pris pour cible par tous les autres."
Je ramassai une bombe d'eau, pour la sous-peser. Forcément, personne n'allait être blessé avec ça. Même si on tirait assez fort dans la tronche... Dommage, si on pouvait se débarrasser de concurrents comme ça...
"Du coup, le plan c'est soit on suit le mouvement et on les bombardes... Soit on profite du fait que les autres seront trop concentrés sur eux pour les viser. T'en penses quoi ?"
Je me tournai vers elle, on avait encore un peu de temps avant le début pour préparer un semblant de stratégie.
Les bombes à eau, finalement, ce n’étaient rien de plus qu’une bulle géante qu’il fallait éclater sur les autres, et pour ça, elle était capable de se montrer très compétitive : pas de risque de tuer l’adversaire par inadvertance. Au milieu de la foule qui avait coloré la sublime plage en mer humaine, il y avait ceux qui en profitaient pour se prélasser, ceux qui ne savaient pas trop pourquoi ils étaient là -comme Agneta-, les déterminés, et enfin, les serial killer des bombes à eau. Avant même d’arriver, elle savait qui ils étaient : des vieux parieurs s’étaient regroupés un peu à l’écart de la place et avaient lancé les paris sur le groupe victorieux, sans aucune surprise, les deux portraits dessinés des frères Brosse étaient en tête du classement.
Ils montraient leurs muscles, leurs balais aussi brillants que des diamants et frimaient avec leurs moustaches douteuses : Agneta les craignaient. Leur aura était si néfaste qu’elle aurait voulu partir en courant, mais une voix la retint.
Motivée. Oui. Apeurée. Encore plus. Son maillot rose et blanc sous une robe de lin beige, elle tira un coup franc sur cette dernière pour tenter de reprendre ses esprits et accorder une réponse à peu près correcte à ce qui semblait être sa coéquipière.
- Ouais… au top, dit-elle en accompagnant le tout d’un sourire tendu. Agneta.
Là, c’était sûr, elle avait tout réussi. C’était dans la poche. Jusqu’à ce qu’Agneta tourne la tête vers Sofia, dont le regard sombre faisait plus d’effet que les deux zigotos moustachus. Organisée, Sofia avait déjà amassé toutes les bombes à eau rose, assorties à son magnifique deux pièces de bain, et Agneta sentait déjà la fougue montée pour son acolyte pendant qu’elle proposait différentes stratégies d’attaque. Une vraie combattante. Au moins, avec un peu de chance, d’ici quelques jours elles feraient bronzette sur un bateau de luxe au large de l’Archipel.
Suivant la danse proposée par Sofia, Agneta cala dans sa paume une des bombes et leva le bras, le rebaissa et le tendit pour s’entrainer à lancer, sans vraiment le faire.
- J’ai vu des anciens parier sur les concurrents avant de venir… si les deux frères semblent en tête, il y avait deux autres paires qui avaient aussi une belle côte.
Elle s’arrêta un instant, tentant de distinguer les quatre personnes concernées au milieu de tous les combattants. Elle repéra l’une d’elle : rousse flamboyante, un bronzage de rêve, un maillot vert émeraude qui la mettait en valeur et plus loin, ce qui semblait être son grand-père. Un petit bonhomme sans un poil de graisse, dégaine d’un dieu avec le visage d’un mourant, les deux formaient « Les Flamboyants ». Elle les pointa du doigt sans aucune honte.
- Eux là.
Et d’un coup d’œil, elle vit deux hommes, petits, qui semblaient tout à fait normaux mais courraient à une vitesse incroyable : « Les Lumières », en référence à leur vitesse et non leur intelligence proche de celle d’une moule.
- Et ceux qui viennent de passer comme des furies. Elle reposa la bombe à eau délicatement pour attacher sa touffe brune en un chignon lâche. Je pense que les deux moustachus en auront après eux au début, ou inversement, ils savent que les autres concurrents vont se faire éliminer petit à petit entre eux. Le mieux serait peut-être de les laisser s’entretuer pour ne pas se faire avoir par des … faiblards… en tentant de les pourchasser.
Elle venait d’utiliser ce terme pour faire croire qu’elle était forte.
Sauf que dans la compétition, la faiblarde, c’était elle.
Hmhm. Bon, elle semblait un peu... intimidée. Peut-être à cause de mon bandeau, qui l'empêchait de voir mes yeux. Ca faisait souvent cet effet-là aux gens. Enfin, pour ceux qui en avaient quelque chose à faire. Je la regardai prendre une des bombes d'eau, qu'elle leva à hauteur de visage et s'apprêta à la lancer. Mais sans la lancer, en fait. Ah, elle... s'entraînait, ou un truc du genre. D'accord.
"J’ai vu des anciens parier sur les concurrents avant de venir… si les deux frères semblent en tête, il y avait deux autres paires qui avaient aussi une belle côte. "
Oh? Des paris ? On pouvait parier de l'argent ? Intéressant. Si j'avais su, j'aurais pris quelques cristaux avec moi pour aller parier aussi. Agneta et moi on devait avoir des côtes bien pourries, de quoi gagner pas mal si on arrivait à gagner. Ma collègue pointa du doigt sans aucune gêne une belle rousse au corps de fou furieux. Ah ouais, canon celle-là ! Je me ferais un plaisir de lui dégommer sa gueule et lui ruiner sa coupe de cheveux. Elle et le vieux débris qui trainait avec elle. Plutôt bien foutu aussi. D'après Agneta, on les appelait "les Flamboyants". Ah ouais carrément, ça se donnait des noms d'équipes... La vache tout le monde prenait ce truc super au sérieux.
"Et ceux qui viennent de passer comme des furies..."
Elle reposa la bombe d'eau, pendant que je suivais du regard "Les Lumières" (j'avais envie de rigoler tellement ce nom était ridicule).
"Je pense que les deux moustachus en auront après eux au début, ou inversement, ils savent que les autres concurrents vont se faire éliminer petit à petit entre eux. Le mieux serait peut-être de les laisser s’entretuer pour ne pas se faire avoir par des … faiblards… en tentant de les pourchasser."
Bon, au moins elle essayait de pas avoir l'air euh... Comment dire. ? Inoffensive ? En tout cas, son plan m'allait très bien, dans la mesure où on pouvait être considérées comme deux petites femmes qui ne représentaient aucun danger...
"D'acc, ça m'va, on fait comme ça."
L'arbitre arriva et se plaça au centre de notre future arène. Il avait un amplificateur de voir et demander notre attention.
"Merci à toutes et à tous d'être toujours aussi nombreux chaque année ! Même si je vois beaucoup d'habitués, il y a également des nouvelles têtes et il est toujours bon de rappeler les règles. L'équipe qui se fait toucher trois fois est éliminée ! L'utilisation de vos pouvoirs est autorisée tant que cela ne met pas en danger les participants ! L'équipe qui marque le plus de point en touchant les autres remporte le jeu !"
Parfait, j'avais le droit d'utiliser mon pouvoir, donc potentiellement nous donner deux bras supplémentaires, voire même une protection pour ne pas nous faire éclabousser. L'arbitre nous demander d'entrer dans la zone de jeu avant de donner le signal de départ. Autant rester discrète pour le moment, éviter de trop nous faire remarquer pour être prises pour cible. Si les autres pensaient qu'on était très nulles, ils allaient nous laisser tranquille pour plus tard en pensant qu'on serait facile à éliminer.
Une bombe dans chaque main, la jambe gauche en avant, prête à bondir, Agneta se savait déjà désavantagée par sa force, sa rapidité et son pouvoir inutile. À coup d’œil, elle aurait parié sur quatre cents paires participantes, soit huit cents fous prêts à tout pour se la couler douce. Le coup de sifflet retentit sur la plage et le son se propagea à travers les vagues.
Tous s’élancèrent, tous sauf deux ou trois équipes qui semblaient s’être disputés à propos du voyage et refusaient alors que leur coéquipier remporte le prix. Ils n’étaient plus que trois cent quatre-vingt-dix-sept, du moins de ce qu’indiquait un large compteur positionné en hauteur, accroché de manière douteuse à un poteau décoratif.
Les chiffres défilaient à toute allure, se rapprochant de plus en plus de trois cents. Agneta ne voyait plus sa comparse, mais trouvait qu’elle s’en sortait relativement bien, évitant les quelques bombes qui lui étaient jetées en se baissant, se cambrant et tombant. Ce qui s’avérait un peu plus compliqué, c’était cet aller-retour incessant qu’il fallait faire pour prendre des bombes et les lancer, certains en calaient dans leur maillot, mais celles-ci finissaient par exploser sur eux et comptaient alors comme un touché. Les orteils dans l’écume, elle arriva à cibler un ancien en canne et lui colla deux points, et un autre vint de derrière, laissant le vieil homme agonisant sur le sable chaud, éliminé.
Elle revint avec précaution près de sa pile et aperçut alors Sofia qui revenait, mais elle, sans l’once d’une goutte de transpiration ou de défaite. Elle lui sourit doucement.
- J’ai eu deux points déjà. J’y retourne.
Le compteur était désormais à deux cent soixante-huit équipes participantes. Les Flamboyants et Les Lumières, tout comme les frères au balai scintillants, semblaient rouler sur le jeu comme un cheval tout-terrain. Elle avait repris deux bombes et s’apprêtait à revenir d’un pied ferme dans le champ de bataille lorsqu’elle vit que pépé flamboyant était en réalité un maître né de la capoeira, et que sans aucun doute, le nombre de bombes ne lui posait pas de problème puisqu’il arrivait à en prendre quatre d’un seul coup : une sur chaque pied, et une sur chaque main, qu’il balançait rapidement lors de sa danse proche d'un art martial.
Agneta, plus que d’être défaitiste, n’avait point envie de transpirer pour prendre une nuée de bombes à eux et ainsi faire perdre son équipe. Les gouttes d’eau qui perlaient sur son front furent balayées de sa paume et alors que Sofia s’apprêtait à se battre, elle la retint par le bras.
- Et si on gagnait ... sans se fatiguer ?
Elle désigna du menton les piles de bombes qui jamais ne baissaient, puisque dès qu’une bombe était prise, une autre était remise pour assurer un amusement sans limite.
- Si les tas ne descendent jamais, alors on peut rester à proximité, voire se cacher derrière et attendre qu’ils reviennent pour les attaquer. Qu’est-ce que tu en penses ?
Avant que Sofia ne puisse répondre, Agneta aperçut une jeune femme déterminée se lancer vers elle, et mécaniquement ses bras se plièrent et s’étendirent pour lancer rapidement les deux bombes qu’elle portait, touchant la demoiselle sur le torse à deux reprises mais n’arrêtant pas sa course. La brune l’acheva d’une dernière bombe qu’elle réussit à attraper in extremis. Mécontente, l’adversaire se retira dans un juron.
- Pardon, on disait ?
"J’ai eu deux points déjà. J’y retourne" Déclara Agneta alors que nous nous croisions au point de réapprovisionnement.
Je souris doucement en coin et hochai simplement la tête, comme pour la féliciter. Elle ne semblait pas mouillée, donc avait probablement pu éviter pas mal de bombe d'eau. Inutile de chercher à me vanter en lui disant que j'avais surement cinq fois plus de point qu'elle. Elle montrait de la bonne volonté et c'était la seule chose qui comptait à mes yeux. Du moment qu'elle n'était pas un boulet, en tout cas.A mesure que la compétition avançait, on pouvait voir les trois favoris commencer à devancer les autres. Agneta et moi étions plutôt bien placées, mais il fallait redoubler d'effort avant de se faire distancer de manière trop importante.
"Et si on gagnait ... sans se fatiguer ?" Proposa la petite brune.
Elle désigna la pile de bombe du menton, je tournai la tête pour regarder.
"Si les tas ne descendent jamais, alors on peut rester à proximité, voire se cacher derrière et attendre qu’ils reviennent pour les attaquer. Qu’est-ce que tu en penses ?"
Ca pouvait fonctionner un temps, mais ensuite, on allait vite se faire remarquer. Et des cibles qui restaient sur place c'était du pain béni pour les autres. Une femme vint interrompe Agneta, cette dernière parvint à l'éliminer sans peine.
"Pardon, on disait ?"
"D'acc. J'te couvre. Vu l'avance que les autres commencent à prendre, j'vais devoir utiliser mon pouvoir. Reste ici, j'vais attaquer ceux qui viennent dans ton dos ou tes flancs. Occupes-toi de ceux qui viennent d'en face."
Et la couvrir ainsi, avec la portée de mes ombres, je pouvais le faire. Elle prit position derrière les bombes, je m'éloignai pour éviter d'éveiller les soupçons et fis appel à mes deux ombres. Ainsi, avec les dix mètres de longueur, je pouvais aller chercher des bombes d'eau sans avoir besoin de me déplacer jusqu'aux piles. Mes ombres tournaient un peu partout au dessus des participants pour les arroser sans arrêt. De quoi laisser le champ libre à Agneta pour piéger ceux qui voulaient s'éloigner de moi et aller se réapprovisionner. La stratégie semblait parfaitement fonctionner, nos points grimpaient en flèches, les équipes furent rapidement éliminées. De quoi attirer l'attention des "Flamboyants". La belle rousse à gros seins venait de me prendre pour cible. Elle jeta des bombes d'eau vers moi, que je devais dévier avec mes ombres, laissant Agneta sans protection pour le moment. Rapidement agacé par cette rouquine, je pris deux bombes, tenues par mes tentacules et lançai un assaut vers elle. Je pouvais maintenir la distance entre nous, pendant que mes ombres la pourchassaient. Finalement, épuisée, la rousse ralentit. Je saisis cette occasion pour lui tirer violemment, avec toutes mes forces disponibles, les deux bombes d'eau en plein poire. Sous le choc, elle s'effondra tête la première dans le sable. Elle se mit aussitôt à geindre, à pleurnicher, d'avoir du sable plein les cheveux. Une autre bombe d'eau dans les mains, je lui tirai à nouveau dessus, toujours dans la face, pour la faire taire. L'organisateur annonça ainsi l'élimination de la jeune femme, sous la surprise des parieurs.
A côté, une pluie de bombe rose s’abattit tel un orage. Incrédule, elle failli louper l’autre joueur venant sur son flanc. Une fois l’élimination faite dans les règles de l’art, elle revint à sa base, refit un stock et reparti tout droit pour se diriger vers l’autre base voisine. Elle ne saisissait pas qui, dans une folie meurtrière, balançait autant de bombes, mais la couleur lui donnait une sacrée indication : Sofia. Finalement, ça avait du bon d’être avec des gens compétents. Sans se soucier de sa coéquipière qui était plus qu’efficace, Agneta enchaîna cinq ou six bases proches de la leur pour éliminer les concurrents un à un. La dernière fut critique, le bonhomme restant de cette équipe avait compris sa stratégie, et aussi déloyal que ça en avait l’air, il passa par la rue pour se ruer sur la jeune aventurière qui esquiva de justesse la première bombe, mais se prit son poing à la place en plein dans le ventre. La douleur était si forte qu’elle se sentait tomber, le son devenait un brouhaha lointain et sa vision devenait trouble sur les bords, mais elle s’efforça de lancer au hasard ses munitions, qui arrivèrent à bon port, le bonhomme ayant abandonné les siennes pour s’excuser, excuses qu’elle n’entendit malheureusement pas.
S’essuyant le front, elle se redressa pour admirer la plage désormais presque vide, et pour admirer les fesses protubérantes qui sortaient du sable. La concernée sortit sa tête des grains, une chevelure rousse désormais parsemées d’ocre. La participante des « Flamboyants » ressemblait plus à une petite fille pourrie gâtée qu’à la lionne qu’elle était au début de la compétition. Subjugués, les parieurs de la rue se rassemblèrent et huèrent. Le présentateur, comprenant l’ampleur de la situation se délecta de son élimination et la proclama à tous.
Le panneau affichait désormais 27 équipes restantes, certaines à l’autre bout de la plage, d’autres plus proches.
Le compteur passa à 26.
La fin était désormais proche.
La tactique des piles s’avérait désormais compliquées : éloignées, Agneta démasquée, il fallait maintenant se retrousser les manches et y aller comme une guerrière, ou pas. D’un pas discret, longeant le mur qui la séparait de la rue, elle rejoint sa coéquipière. Sur le chemin, elle aperçut « Les Lumières » filer à toute vitesse, les pieds dans l’écume. Puis, la chute. Une jeune femme avait trébuché, et dans sa chute, avait entraîné l’un des Lumières, qui lui tomba dessus et écrasa les bombes à eau qu’elle portait sur elle, se faisant ainsi éclabousser. Il fut éliminé par un ultime coup d’un opportuniste, et la jeune femme, écrasée, resta en course puisque ses propres bombes ne pouvaient lui coûter la défaite.
Le présentateur reprit le microphone pour annoncer la nouvelle, sous le mécontentement des parieurs.
Au loin, les frères Brosse usaient de leur bâton de balai pour bloquer le passage, donner des coups derrière le genou ou encore pousser les bombes à eau hors des mains des participants. Ils étaient en tête, ils raflaient tout, « Les Flamboyants » et « Les Lumières » étant en deuil d’un membre, peinaient à remonter la pente.
Mario frappa un nième coup dans le genou d’un participant qui tomba au sol, mais se releva rapidement et voulu en venir aux mains. Effrayée, Agneta se gardait bien d’aller face à eux, ne voulant pas montrer ses piètres capacités de défense ou même d’attaque à ceux présents ici. Les frères remontaient la plage vers elle, doucement, et dans leur regard, elle put apercevoir les ténèbres.
Ils n'étaient pas là seulement pour gagner, mais aussi pour semer la terreur.
- On ferait mieux de s’éloigner.
Alors que je pensais être repérée par un adversaire, je fus soulagée de constater qu'il s'agissait en fait d'Agneta qui m'avait retrouvée. Maintenant qu'on était à nouveau réuni, on pouvait repasser à l'attaque et même espérer gagner des points. L'aventurière en avait marquée un bon nombre alors qu'elle était seule. Au loin, je pus voir une scène qui m'arracha un rire. Un petit bout de femme avait réussi à éliminer l'un des Frères Lumières en lui tombant dessus alors qu'elle avait les bras chargés de bombes d'eau. Comme elles avaient toutes éclatés dans la chute, c'était comptabilisé et il fut éliminé. Plus loin, les frères Brosse faisaient leur petit numéro, alors leur balais, et renvoyaient ou bloquaient toutes les bombes d'eau. On allait devoir les avoir avec un minimum de stratégie, ceux-là. Et comme il n'y avait plus personne autour d'eux, Agneta et moi fûmes prises pour cible.
"On ferait mieux de s’éloigner." Suggéra-t-elle.
"Nan, on va leur botter l'cul." Répondis-je, sûre de moi.
Car oui, j'avais justement un plan pour nous débarrasser d'eux.
"Rassemble un maximum de bombes d'eau et bouge pas. J'vais t'enfermer dans un cocon d'ombre et quand je te donnerai le signal, tu pourras."
Sans perdre davantage de temps, comme ils approchaient, j'aidai Agneta à rassembler un petit tas de bombe d'eau. Une fois fait, je l'entourai avec l'un de mes tentacules pour former un cocon autour d'elle, comme un serpent qui s'enroulait autour d'une proie. Entre les anneaux d'ombre, je laissai une petite ouverture pour lui permettre de ce qu'il se passait. Le but allait être simple : Ouvrir la voie pour Agneta qui pourra ainsi tirer sans avoir à craindre de se faire violenter. Ces deux sauvages moustachus n'hésitaient pas à frapper physiquement les autres, alors si c'était autorisé, j'allais me faire un plaisir de cogner sur leurs gros ventres gras. Le seul problème que j'avais, c'était que je ne pouvais pas m'éloigner de mon cocon, sinon il allait céder. Heureusement, j'avais mon second tentacule qui m'aidait.
Avec ce dernier, je récupérai un peu de sable et me mis en position pour esquiver leurs assauts. Celui-ci ne tarda pas. Ils comprirent rapidement qu'Agneta était intouchable avec les bombes d'eau. Et le cocon ne risquait pas se céder juste avec des attaques aussi faibles. Les frères Brosse se séparèrent pour essayer de m'attaquer à deux sur mes flancs. Mon bras d'ombre fonça à la poursuite de l'un d'eux, bien plus rapide. Le sable qu'il tenait fut projeté droit dans ses yeux, il s'arrêta aussitôt et se mit à geindre de colère.
"Agneta, il est pour toi celui-là ! Tire-lui dessus !"
J'ouvris davantage les anneaux du cocon pour permettre à ma collègue de tirer sur le frère Brosse immobilisé. Le second voulu profiter de cette ouverture et changea aussitôt de trajectoire pour foncer droit sur la petite brune. Je m'interposai entre elle et lui, il tira ses bombes d'eau droite sur moi. Si je les évitai, Agneta allait être touchée. Heureusement qu'il me restait encore un tentacule à disposition pour venir vers moi et bloqua de justesse les bombes.
"Fais chier celle-là !" Grogna le frère Brosse.
Sentant mon bras d'ombre proche de la fin, je l'envoyai frapper violemment dans les parties intimes de ce gros lard.
"Ouhat ! Ouhat ! hatatat ! Hawawawa !" Fit-il alors qu'il se tordait de douleur en se tenant l'entre-jambe.
Sans défense, je tirai les trois bombes d'eau sur lui pour l'éliminer. Je devais bien reconnaître qu'ils étaient forts et, sans mon pouvoir, j'aurais probablement pas pu faire grand chose. Mais c'était le jeu, on y avait droit. De son côté, Agneta avait aussi fait du très bon travail en éliminant le second frère. En regardant le tableau des scores, on était passées devant. L'air de rien, je m'approchai de ma camarade, plutôt satisfaite.
"Bon, on dégage les autres et ça devrait le faire. Faudra juste faire gaffe, j'peux plus utiliser mon pouvoir pendant quelques minutes. Si on gagne, ou même si on perd, on ira boire un coup, ça m'a donné soif tout ça."
Ils rentrèrent bredouilles, acclamés par les parieurs qui n’avaient pas misé pour eux, réconfortés par les autres. Le balai autrefois scintillant et resplendissant ne ressemblait désormais qu’à un vulgaire balai à chiottes mal lavé. Sofia en avait lessivé un, elle avait anéanti l’autre, finalement, elles formaient une bonne équipe.
Les équipes restantes, au nombre très élevé de quatre, formaient une brochette parfaite entre ceux qui voulaient à tout prix gagner et ceux qui s’étaient contenté de camper ou de se faire passer pour des touristes tout le long de la compétition. Le grésillement du microphone déchira les oreilles de l’assemblée, un toussotement se fit entendre.
- Mesdames et messieurs, j’invite les participants restants à se rendre au milieu de l’aire de jeux ! Vous n’avez désormais plus la possibilité de dépasser les filets jaunes, sinon vous serez E-L-I-M-I-N-E-S !
Agneta fixa le ciel à la recherche de spectateurs volants qui pouvaient expliquer l’entrain soudain du présentateur, mais elle dû se résigner à une explication simple : il avait raté sa vocation. Alors que toutes les équipes se rassemblaient, l’une d’elle en profite pour accabler deux participants de ses bombes, pour en recevoir en retour, s’éliminant ainsi l’une et l’autre.
Elles n’étaient plus que deux équipes.
Mais trois concurrents.
Agneta et Sofia arrivèrent au centre de l’arène et se confrontèrent à un adolescent aux cheveux de jais, les yeux comme des émeraudes. Frêle, grand, il tenait dans chaque main deux bombes à eaux de couleur beige. Les regards s’échangèrent furtivement, comme une sorte d’incompréhension. Les scores parlaient d’eux-mêmes, même éliminées, elles remportaient la partie, devant les frères balais qui s’étaient faits balayés à la vitesse d’une tornade, ou presque.
Le jeunot lâcha les bombes, qui atterrirent dans le sable comme de grosses gouttes d’eau, sans pour autant s’exploser. Il tomba, genoux aux sols, et avança les bras en avant comme un geste de prière. Quelques mots sortirent de sa bouche, étouffés par les grains ocre, visiblement il admettait sa défaite et capitulait. Agneta baissa les bras de soulagement, enfin elle allait pouvoir flâner et profiter de ce temps précieux qu’était le temps libre, à dormir et manger. Pourtant, l’adolescent était toujours là, et dans un élan soudain, il balança les bombes qui lui restaient sur Agneta qui par peur, cria, et se recula, évita de justesse la troisième. Sofia, agacée de ce tour de passe-passe minable, lui envoya la giclée en pleine poire (oui c’est fait exprès).
Le compteur passa finalement à un.
Elles avaient gagné.
Agneta s’écroula dans le sable, pleurant presque de joie, non pas d’avoir gagné mais d’avoir enfin fini de courir à droite et à gauche pour … un voyage. Cette pensée la fit se relever précipitamment, après tout, il ne fallait pas louper le gros lot. L’organisation arriva de nulle part et s’affaira à retirer les filets et à positionner une estrade, avec lumières clignotantes, microphone sur pied et banderoles en tout genre, ce qui laissa le temps aux jeunes femmes de se reposer durant une dizaine de minutes, avant d’être invitées à enfiler une robe de plage pour rejoindre la scène.
Heureusement, il n’y eu pas de discours, le présentateur réussit à le tenir à lui seul, Agneta et Sofia furent capturées à l'encre, où elles apparaissaient en grandes vainqueures, sourires gênés à l’appui. Elles signèrent le registre des victoires et chacune se vit remettre deux petits coupons dorés avec leur nom pour profiter d’un superbe voyage au soleil. Descendant les dernières marches de l’estrade, Agneta se permit une petite courbette dans son moment de gloire et couru vers la rue où les parieurs les huèrent avec ferveur.
Le doigt de la brune se dirigea vers une bâtisse colorée en fond de rue, front de mer, mais loin de cet endroit pour oublier la douleur de la course, et la future douleur des courbatures. Les néons rouges s’allumèrent sur le début de soirée, laissant apparaître « BUVETTE » sur la devanture. Suante mais souriante, Agneta s’engouffra dans la boutique pour accéder à la terrasse privée sur le toit. Tout avait été rangé en un temps record, et au loin, ce qui était une arène sans pitié était devenu un lieu paisible où les mouettes pouvaient s’accoupler en paix. Elle commanda un jus d’orange pressé, sans glaçon et laissa sa coéquipière choisir. Le serveur se retira et les félicita, comme si, tout le monde ici allait être au courant de leur exploit.
Ses yeux fixaient Sofia, et pour la première fois elle prit la peine de se sortir de la compétition. Elle posait la question comme si la réponse était évidente pour tout le monde, mais même pour elle, il n’y avait pas de réponse.
- Et du coup, tu penses y aller avec qui ?
Pour le coup, Agneta irait sûrement seule.
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