Quand ses parents l'avaient appelé dans leurs appartements pour lui proposer la mission, Aeron n'avait pas pu s'empêcher, de prime abord, de trépigner d'impatience. Ensuite, c'était l'anxiété qui était venue, bien naturelle au regard des enjeux à affronter. C'était la première fois qu'Aryon se retrouvait à faire face à une autre nation, de l'autre côté de la Frontière qui plus est. Il n'y avait pas de recherche sur le sujet, à part quelques élucubrations peu sérieuses qui avaient été ressorties du fin fond des archives, envisageant la possibilité d'un autre Royaume par-delà l'Océan.

Un peu plus loin, donc, qu'Empyrée.

Bien entendu, l'objectif était de continuer à vivre paisiblement et de façon prospère, donc la guerre était véritablement ce que les parents Renmyrth souhaitaient éviter. Ils avaient même fait appel à Grand-Mère pour avoir son opinion sur la question, eu égard à la situation exceptionnelle. Mais, indubitablement, ils en savaient trop peu sur Empyrée, et le possible monde par-delà ce territoire à leurs portes. Il ne semblait pas s'agir d'une nation conquérante, d'après leurs premiers échanges, mais il convenait dans tous les cas, d'une part de se préparer au pire pour s'assurer du meilleur, et d'autre part de nouer et tisser des liens permettant l'essor des deux pays.

Ces deux raisons mêlées justifiaient amplement la présence de l'héritier du trône à Empyrée, au lieu de celle de Mère ou de Père, qui restaient à Aryon pour tout organiser. De plus, à terme, il serait celui qui aurait à vivre à Empyrée à sa porte, comme l'avait expliqué Père. Par conséquent, s'il parvenait à tisser des liens forts, personnels peut-être même, avec les dirigeants empyréens, cela ne serait que profitable.


Au poste-frontière, où tous les échanges entre les deux nations faisaient l'objet de vérifications de part et d'autres, le Prince, accompagné des ministres Furi et Lehnsherr, fut introduit dans un salon privatif en compagnie d'un ambassadeur, et de chercheurs empyréens. Les diplomates étaient bien entendu soumis aux mêmes contraintes que le tout-venant, et si l'objectif était de rapprocher les deux nations, la méfiance envers la magie d'Aryon restait un facteur immanquable de leurs échanges. Aeron se nota mentalement de se renseigner sur les raisons d'un rejet aussi violent, quand, manifestement, Empyrée semblait tout de même utiliser quelques procédés magiques qualifiés de naturels.

Comme si leur magie à eux ne l'était pas.

"... Comme évoqué par lettres, donc, nous demandons également de savoir quelles magies vous allez introduire sur notre territoire. Dans l'esprit d'Empyrée..."

Le Prince écouta d'une oreille distraite la suite du discours, qui ne faisait qu'enrober les échanges écrits qu'ils avaient eus plus tôt. Le Gouvernement avait décidé de jouer franc-jeu autant que faire se pouvait, dans la mesure où l'objectif n'était pas de se mettre les dirigeants d'Empyrée à dos, surtout avec de la mauvaise foi. Dans tous les cas, ils étaient accompagnés par un contingent de gardes qui assurerait leur protection, et qui étaient eux-mêmes bien équipés en pouvoirs magiques et moyens de les joindre si nécessaire.

Le jeune homme posa le contenu de sa valise sur la table et en sortit les éléments un par un, en détaillant ce qu'ils faisaient. Il montra également son tatouage, et démontra autant qu'il l'était possible qu'il était vide. Puis, saisissant un petit couteau, il s'entailla sans hésiter la chair du pouce, pour démontrer ses pouvoirs de régénération accrue. Conjointement avec ses parents, ils avaient décidé de ne pas expliquer que l'effet était décuplé en cas de contact avec le sol naturel, afin de garder un atout mineur dans la manche en cas de problème.

Evidemment, aucun d'eux ne pensait qu'Empyrée allait le prendre en otage ou tenter de l'assassiner. Mais cela valait pour la classe dirigeante, avec laquelle ils étaient en contact, et pas forcément pour l'habitant moyen qui pouvait voir d'un mauvais oeil l'héritier d'une puissance étrangère, et vouloir en tirer partie. Et c'était sans même parler d'autres courants politiques ou de groupes rebelles qui pourraient exister et sur lesquels ils n'avait pas la moindre information.

"... et ceci est une clé dimensionnelle, reliée à une pièce du Palais Royal, à la Capitale. Elle contient une paillasse, des rations de survie, du matériel de premiers secours, et cetera.
- Comment cela ?"

L'ambassadeur fronça visiblement les sourcils, ennuyé.

"La clé ouvre n'importe quelle porte, par exemple celle au bout de cette pièce, et permet d'accéder à la salle sus-citée.
- Est-il nécessaire d'emporter cet objet ? Je ne pense pas m'avancer en supputant que cela vous permettrait de transporter d'autres objets dans Empyrée.
- Cela serait effectivement possible. Toutefois, je peux vous montrer le contenu actuel de la pièce.
- Faites donc, je vous en prie."

Aeron se leva et activa la clé dimensionnelle sur la porte de la salle d'eau, puis l'ouvrit pour dévoiler une salle sécurisée du palais, remplie comme il l'avait annoncé.

"Est-ce obligatoire de prendre cet objet ? Je vous assure que vous n'en aurez nul besoin.
- Cette clé constitue une sécurité supplémentaire en ca s de problème. Vous n'êtes pas sans savoir que je suis l'héritier du trône, et que s'il venait à m'arriver quelque chose, la situation deviendrait... plus complexe que nécessaire.
- Vous avez pourtant une soeur qui...
- Je suis navré, mais ce point ne nous semble pas négociable. Moi, Aeron Renmyrth, Prince d'Aryon, m'engage solennellement à ne pas utiliser la clé dimensionnelle pour transporter des biens magiques illégaux entre nos deux territoires et à ne l'utiliser que pour son objectif annoncé, à savoir assurer ma survie lors de notre voyage. Cette assurance, c'est tout ce que je peux transmettre, et je ne fais pas ce serment à la légère."

Les yeux plantés dans ceux de l'ambassadeur, il tenta de jauger l'homme, qui finalement hocha la tête en signe d'assentiment.


De l'autre côté du tunnel, la lumière éclatante du jour mêlée à l'air frais de l'été éblouit brièvement Aeron, puis ce fut le bal de l'accueil. Le Prince hésita à tout mémoriser à l'aide de son tableau croisé dynamique, mais décida de plutôt le garder pour plus tard, pour un moment critique. Les bâtiments à la surface, s'ils n'était clairement pas aryonnais au vu de leur architecture, semblaient en tout cas suffisamment luxueux pour appartenir aux membres de leur escorte, et seraient parfaitement à leur place à côté des manoirs de la Capitale, ou même du Palais.

Peut-être les techniques de construction étaient plus avancées.

Leurs hôtes principaux seraient la famille Ashryn, les descendants des fondateurs d'Empyrée, et la dynamique de la famille semblait parfaitement rôdée alors que les trois diplomates hochaient poliment la tête. Le grand ascenseur central, qui constituait d'après les premiers rapports l'artère principale reliant tous les étages souterrains entre eux, trônait fièrement en plein centre, à proximité de la demeure des Ashryn, et menait à des endroits sur lesquels les rapports étaient encore fragmentaires, peu fournis.

Aeron espérait que les échanges progressifs permettraient d'en savoir davantage, ne serait-ce que par curiosité. Dans tous les cas, pour l'instant, il ne savait pas trop quoi faire de Simaris, Alaena et Pietro. Le dernier semblait un peu plus effacé, dénotant sans doute d'une forme de hiérarchie au sein de la famille, avec le pouvoir probablement concentré dans les mains du frère et de la soeur. Peut-être encore s'agissait-il de la branche principale, et les autres branches voyaient leur présence d'un moins bon oeil.

Etrangement, le Prince se nota à lui-même qu'il ne détestait pas avoir des égaux, dans le sens où il était habituellement dans le très haut de la hiérarchie aryonnaise, avec ses royaux géniteurs. Ici, qu'il s'agisse du chef local, des Ashryn ou des autres diplomates, il y avait tout un ensemble de jeux de pouvoir et d'équilibre à trouver, et s'il était à nouveau au top, c'était moins incontestable que chez lui.

Une fois à l'écart de Pietro, et avant de rentrer dans leurs appartements respectifs, le Prince se tourna vers ses deux ministres. Armes et Culture, il y avait sans doute une métaphore à y trouver, mais le message était relativement transparent : il s'agissait de partager tout ce qui pouvait l'être, et se préparer si nécessaire et sans que personne n'y tienne, au pire. En bref, montrer qu'Aryon n'était pas forcément un fruit à cueillir en tendant le bras.

"Messieurs, avant d'aller nous débarbouiller, qu'avez-vous pensé de notre arrivée ? Je dois avouer que je ne m'attendais pas à une telle richesse à la surface. Quant à nos hôtes... nous en apprendrons davantage tout à l'heure.".

Inventaire:

Pouvoirs:

Quelle déchéance, quelle arnaque, quelle injustice. Aurélius lisait la demande royale qu’il venait de recevoir par missive. La lettre, frappée du sceau de la royauté, l’enjoignait à prendre part à la première congrégation diplomatique d’Aryon en Empyrée. Tout le monde se serait senti immensément fier de recevoir une telle confiance de la part du royaume. C’était aussi le cas d’Aurélius, mais il ressentait également un certain regret. Il allait y aller avec le prince et le ministre des armes. Deux hommes qu’il tenait en haute estime, mais qui ne partageaient pas vraiment les mêmes aspirations que lui pour ce voyage. Aeron allait probablement être le prince parfait qu’il avait toujours voulu être et Nicholodéon serait très certainement fidèle à lui-même. Pragmatique à en crever. En réalité, le ministre de la Culture aurait voulu visiter le pays de manière beaucoup moins formelle. Visiter les étages, s’imprégner de cette nouvelle culture dont il dévorait les récits dans les journaux. Il n’avait qu’une hâte c’était d’écrire le récite de ses découvertes à ses connaissances, de leur faire goûter et apprécier tout ce qu’il allait découvrir de nouveau là-bas. Mais quand on est avec le prince, ce genre de petites escapades n’étaient pas vraiment possibles. Tant pis, s’il arrivait à nouer des échanges culturels avec Empyrée, il y avait encore moyen qu’il revienne avec suffisamment de découvertes pour éveiller la curiosité des artistes de son pays. Et la sienne au passage !

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Aurélius montra la contenu de sa valise à la douane. Il n’y avait absolument rien de magique. Il avait laissé chez lui les boîtes de couleur et autre gadget magiques qu’il s’amusait à employer pour se donner cette apparence si singulière où aucune couleur, aucun vêtement, ne se mariait avec les autres. Il était le ministre de la Culture et il était de son devoir de se fondre dans celle du pays invité pour créer un climat diplomatique des plus propices à la discussion. Il crut voir dans les yeux des douaniers que son cas était un soulagement pour eux. Ils devaient avoir bien du mal à gérer leur frontière avec tous les habitants d’Aryon et leurs 1000 objets magiques planqués dans des poches, des bagues ou encore dans leur peau. Du coin de l’œil, le ministre observa le même manège du côté du prince et de Nicholodéon. Là-bas, on souriait moins. Rien d’étonnant.

« Hum ma magie ? Elle est entièrement passive et augmente l’un de mes cinq sens au détriment d’un autre. Je suis donc particulièrement handicapé à certains moments. J’aurais donc besoin d’emmener mon familier dont les sens me servent de béquille quand j’en ai besoin. Nous sommes liés sensitivement voyez-vous ? »

Cette fois-ci, le douanier fit la grimace. Aurélius arracha Tango, son petit lolori, de sa poche et le posa sur la table. L’animal gronda, mais cela ne réussit qu’à le rendre plus mignon encore. Il arborait une fine couche de rubis sur ses poiles. Une pierre précieuse qu’il avait grignotée avant de partir lorsque son maître l’avait laissé sans surveillance au palais. Heureusement que personne ne l’avait vu. Le petit chat eu l’air de faire son impression et son aspect totalement inoffensif finit de convaincre les douaniers qu’on pouvait bien laisser un ministre prendre cet animal, d’autant qu’il avait montré patte blanche et n'avait pas fait d’histoire pour des clés magiques ou des tatouages sans fond.

Une fois ce dur moment passé, Aurélius prit place dans leur moyen de transport. Il dut rabattre le bas de son manteau pour qu’il ne se fasse pas happer à la fermeture des portes. Pour l’occasion, le ministre était méconnaissable. La reine avait expressément demandé qu’il fasse un tour chez Belmont, à son plus grand damne. Confier son habillement à la couturière royale était sa hantise, lui qui aimait tant son originalité. Originalité qui ne plaisait à personne. Il ne comptait plus le nombre de « out » qu’il avait pu entendre à chacune de ses entrées. Mais pour cette occasion unique, il se laisserait déguisé comme il convenait. C’était donc un ministre Lehnsherr totalement transformé, qui s’était présenté à l’ambassade. Cheveux tiré en arrière , impeccablement organisés, laissant transparaître sa mèche blanche lui donnant un air beaucoup plus sérieux et sage que son sac de nœuds habituel. On avait souligné ses yeux d’un trait d’eye-liner, appuyant son regard déjà perçant au milieu de son visage anguleux. Les vêtements de dame Belmont venaient rajouter encore plus de sérieux. Un long manteau noir recouvrait un costume des plus classique parmi la noblesse. Ajouré au niveau des manches, il remontait jusqu’à un col gris et plongeait jusqu’à son bassin en deux bandes blanches. Quelques motifs brodés d’or venaient rehausser le tout. Lorsqu’il s’était découvert dans le miroir, il avait failli arracher sa tenue. Elle n’était pas du tout faite pour lui. Tellement sérieuse, pompeuse, dans les codes. Mais on n'en demandait pas plus pour un ministre en voyage diplomatique. La différence était si saisissante qu’on ne l’avait pas reconnu immédiatement lorsqu’il s’était présenté tout à l’heure. Même ses collègues avaient louché pendant une fraction de seconde, trop habitués qu’ils étaient à le voir en orange ou jaune canari.

Le voyage fut long et assez oppressant. Se retrouver comme ça dans un tunnel en profondeur n’était en rien une idée rassurante. Aussi, Aurélius fut-il soulagé de sentir des odeurs nouvelles à l’approche de la sortie. Il se leva pour regarder devant eux alors que l’ombre du tunnel était encore bien présente, s’attirant des regards curieux de son entourage. Il l’avait senti bien avant tout le monde, l’odeur de la ville, l’odeur des hommes. Comme pour lui donner raison, le tunnel s’inonda de lumière et la ville leur apparut. Instantanément, Aurélius ressentit une vague de contentement en découvrant cette ville gigantesque. Si on le ramenait immédiatement en Aryon, il ne serait pas déçu. Rien que cette vue avait dépassé toutes ses attentes. Tango sortit sa tête de la poche d’Aurélius et miaula de surprise en observant l’immensité qui les entourait écarquillant ses petits yeux de chat. Le maître et le familier sentaient au plus profond d’eux qu’ils avaient bien fait de venir.

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Aurélius inspectait les colonnes de la demeure avec un intérêt tout particulier. L’architecture ne lui rappelait rien qu’il ne connaisse, bien que ce ne soit guère son domaine de prédilection. Il dessina discrètement quelques croquis dans un carnet emmené pour l’occasion. Cela pourrait donner une bonne matière à des peintures à l’avenir. Et il serait le premier à peindre Empyrée d’un point de vue Aryonnais. Il y avait déjà tellement de choses incroyables. La richesse de la demeure Ashyrn était au-dessus de tout ce qu’il avait pu voir. Il y en avait tellement qu’un seul regard ne suffisait pas à tout englober. Au loin on voyait un gigantesque palais et plus on se rapprochait, plus les détails, les gravures, les mosaïques se détaillaient et embellissaient l’ensemble. Malgré son émerveillement, Aurélius ne pouvait s’empêcher de rester interdit devant une telle demeure. Peu importe les origines de cette famille, un tel déballage de richesse était indécent. Il se garda bien d’exprimer son opinion, faisant mine d’écouter leurs interlocuteurs dont la fierté était visible dans chacun de leurs mots. Il était évident que ce n’était pas ici qu’Aurélius découvrirait la culture Empyréenne telle qu’elle est vraiment.

Arrivés à leurs appartements, le prince les enjoint à se réunir avant d’aller se préparer pour le dîner. Le ministre était fatigué, mais il écouta le jeune garçon d’une oreille attentive.

« Une entrée impressionnante, Votre Altesse. La ville est absolument splendide vu de la surface et ma curiosité s’en est retrouvée encore plus attisée quand je pense aux nombreux étages qui s’enfoncent sous nos pieds. Toutefois, si vous me permettez d’exprimer mon humble vie, je n’ai pas eu un seul moment le sentiment d’être sorti de ce tunnel. Je ne sais pas vous cher collègue, mais j’ai eu l’impression d’être emmené et guidé par la main tout du long. La famille Ashirn semble décidément bien préparée à notre arrivée et je sens que l’intégralité de notre voyage est écrite quelque part sur une feuille. Ce que nous mangerons, ce que nous boirons et surtout qui nous rencontrera. Il ne m’étonnerait guère que nos chers hôtes profitent de leur place au pouvoir pour nous introduire à tous leurs plus proches alliés et utiliser leur main mise sur notre emploi du temps pour servir leur agenda politique. »

Le ministre fit une pause, car Tango s’était échappé de sa poche pour découvrir l’endroit en reniflant à peu près tout ce qui se trouvait dans la suite des invités.

« Cela étant dit, je suis impatient de découvrir leur cuisine. Je m’attends évidemment à ce qu’elle soit au niveau de cette demeure, mais j’ai entendu dire de mon ami Regina Skeeter, qu’ils utilisaient des ingrédients des plus insolites pour la préparation de leurs repas. Il me tarde de la découvrir. »

Familier:

Pouvoir:

Inventaire:

-Je suis assez circonspect quant à la sélection de nos hôtes. Que le Ministre du Génie est l’honneur de nous recevoir, c’est d’un poids conséquent pour la vie politique locale, c’est certain. Il est étonnant que nous n’ayons pas été reçus par l’ensemble du Gouvernement. En sens inverse, il serait très étrange que les hauts-représentants d’Empyrée soient accueillis uniquement par votre ministère, Aurélius.Je m’attends à ce que cette situation soit la conséquence de tractation politique complexes et que, oui, notre agenda doit être élaboré pour apporter le plus de crédits à la famille Ashryn.

Ces mots sont prononcés dans un souffle, le ministre des armes s’étant approché pour mieux être entendus. Si on leur a accordé un peu d’intimité, Nicholodéon se méfie et ce n’est guère étonnant, il faut en convenir. Il serait très profitable pour leurs hôtes d’en apprendre davantage sur eux en brisant le secret de leurs discussions privées. ça ne serait pas très diplomate, mais encore faut-il le savoir. La délégation a déjà pu contempler leur maîtrise technologique avec ces “golems” dont le Royaume ne sait rien. D’autres groupes en apprendront peut-être davantage. Mais pour un peuple bénéficiant d’une technologie, non magique qui plus est, aussi avancée, il ne serait guère étonnant qu’ils soient aussi dotés de matériels leur permettant d’écouter aux portes sans qu’ils en sachent le moindre mot.

Furi est vigilant et invite volontiers son homologue à la Culture et sa Majesté à la plus grande prudence. Invitation déjà maintes fois répétés avant le départ. On pourrait dire que le vieil homme radote et il vous donnerait raison. Pendant des décennies, il a été biberonné à l’idée d’une puissance étrangère avec laquelle Aryon entrerait en contact, un jour, potentiellement par les armes. Mettre les pieds même au sein de cette chimère qu’il ne pensait pas voir de son vivant, cela réveille toutes les fibres de son corps. Là où il pensait protéger son pays en préparant l’avenir, sa fibre patriotique s’en retrouve décuplée car il est en première ligne pour en assurer sa protection.

Au jeu de montrer patte blanche, Nick a joué plutôt franc jeu. Il utilise assez rarement son pouvoir et ses rares objets magiques sont plus utiles pour son travail administratif. L’homme a juste menti concernant les pastilles synébrales et la potion miracle qu’il a emporté avec lui, prétextant des cachets et une potion indispensable en cas de malaise, à cause de quelques pépins de santé. Il n’est pas tout jeune, même si ces deux heures d'entraînements quotidien l’ont maintenu dans une forme impeccable transparant à travers son uniforme qu’il a porté lors de la traversée. Mélange subtil entre différents courants de tenues officiels qu’elles soient de la garde ou des fonctions ministérielles. Gilet noir sur une chemise blanche, Veste bleu marine, pantalon garance droit, collet au cou épinglé d’une cocarde frappée des emblèmes de la Couronne et de larges épaulettes décorés des emblèmes des régiments aux travers desquels il est passé au cours de ces années. Enfin, il porte un képi bleu azur. L’objectif est de paraître plus martial que simple ministre.

Pourquoi ? Parce que plusieurs jours plus tôt, il a été discuté du sort du Commandant Höls. Et en ces temps incertains où l’on ne se connait pas encore trop entre puissances voisines, il est nécessaire de ne pas paraître faible sur le plan militaire. L'institution a besoin de soutien en cette époque trouble et Furi répond à l’appel.

En attendant, le ministre ouvre sa suite, laissant Aurélius et sa Majesté ouvrir la leur, la suite du Prince étant à l’opposé de celle du Ministre. L’intérieur est tout bonnement somptueux. Des meubles anciens. Un grand lit à la couche moelleuse. Une salle d’eau tout en mosaïque et en porcelaine. Une double porte vitrée équipée de rideau d’un blanc impeccable donnant sur un balcon. On ne se moque pas d’eux. Ses affaires sont déjà montées. Furi a une pensée pour Stock, son responsable de la sécurité qui a tellement de casquette en réalité qu’il est indissociable de Nicholodéon. Lui et l’escorte royale ont été dirigés vers une autre aile du domaine. Privé de son fidèle aide de camp, le ministre se sent affaibli et c’est pourquoi il doit redoubler de vigilance. Furi procède rapidement à une tournée de la suite, à la recherche du moindre dispositif permettant de l’espionner, certains que malgré sa vigilance, il passerait quand même à côté de ce qu’il cherche. Sans surprise, il ne trouve rien, mais le fait d’avoir pris un peu de temps pour chercher le rassure un peu. Il finit par ouvrir la double porte, faisant quelques pas sur le balcon dont la vue donne sur les jardins par lesquels ils sont passés. Devant, plus loin, il peut contempler l’ascenseur d’Empyrée. Un ouvrage à couper le souffle qui annonce bien des merveilles et des secrets. La présence de la famille Ashryn à la surface veut aussi en dire beaucoup sur leur influence. Se permettre de respirer l’air frais et profiter du soleil. Dire que la majorité de ces gens vivent sous terre, cela paraît être tellement incroyable. Même lui, acharner de travail, ne saurait vivre sans la lumière du jour au milieu d’heures de réunion. Qu’est  ce qu’on peut attendre de gens qui ne l'ont peut-être jamais vu de leur vie ? Rien. C’est le hasard complet.

Profitant de salle d’eau pour se rafraîchir un instant, et du miroir pour éliminer un faux-pli, Nicholodéon ressort, ayant délaissé son équipement magique pour son unique étui à cigarette, se demandant si les locaux ont aussi succombé à ce petit plaisir de la vie. L’un des rares qu’il s’autorise.

Pouvoir:

Inventaire:

La grande suite qui lui était réservée ne dépareillerait certainement pas dans le Palais, qu'elle soit destinée à la Première Ministre ou un membre de la famille Royale plus ou moins proche du centre du pouvoir. Meublée avec un goût trahissant l'attachement aux traditions, à voir l'usure patinée du bois et la nouveauté relative des tissus, qu'il s'agisse de rideaux, des amples fauteuils ou des tapis posés régulièrement au sol pour réchauffer les pièce, les Ashryn ne se sont manifestement pas moqués d'eux, en tout cas de ce point de vue.

Le Prince aurait été prêt à dormir en cellule si cela avait pu faciliter les échanges à venir.

Aeron nota la présence d'une excroissance sur le mur, et se rappela que les précédents voyageurs avaient indiqué que c'était le système utilisé par Empyrée pour les commodités, bien loin heureusement des flammes sur les bougies et dans les lampes-tempêtes. D'une simple pression suivie d'un "clic", une lampe s'alluma au plafond et éclaira la pièce de sa lumière chaude. Laissant ses affaires en vrac dans le salon -un serviteur se chargera du rangement, il alla dans la première salle d'eau qui se présenta à lui, et actionna l'arrivée du liquide, en jouant avec la chaleur.

Fascinant, tout bonnement fascinant. Et pas la moindre trace de magie, apparemment, ou en tout cas c'était ce qu'Empyrée maintenait depuis le début, et il voulait bien le croire.

Ouvrant la fenêtre de la véranda, il ne put s'empêcher de noter le paysage qui s'offrait à lui, un immense jardin qui tenait davantage du domaine que du simple manoir. La verrière abritait des plantes qui ne lui disaient pour la plupart pa s grand-chose, encore qu'il ne soit pas expert. Il en était de même pour ce qui venait ensuite, un endroit un peu plus sauvage mais toujours entretenu, peut-être pour donner une illusion de profondeur et un lieu de promenade plus isolé. Si c'était le cas, il s'agissait d'une excellente décision à son sens.

Comme d'habitude, il vérifia que son pouvoir restait inactif, aussi bien pour ne pas froisser les empyréens que pour s'assurer ne pas être sous le coup d'une tentative de meurtre au long cours. Le jeune homme se changea rapidement et se débarbouilla pour faire partir la poussière et la lassitude du voyage, replaçant les mèches sombres savamment décoiffées le matin-même.

Vêtu d'une chemise blanche avec un collier de chaînes sur un pantalon noir, muni d'une bague portant le symbole des Renmyrth et de ses lunettes, il décida d'être sobre pour la première soirée avec les Ashryn. Il convenait, après tout, de se présenter calmement dans un contexte plus resserré que les mondanités à venir.

Dans le couloir, il retrouva Furi et Lehnsherr en compagnie de Pietro, qui leur proposa de les guider jusqu'à la salle de réception. Le vieux ministre des Armes annonça sa volonté de parler un peu avec le jeune homme avant de les rejoindre, et Aeron se dit que c'était une des meilleures façons possible de récolter davantage d'informations hors du cadre très formalisé de leurs entrevues. Ils n'allaient de toute façon pas se promener ailleurs. Alaena et Ulia firent les présentations puis s'installèrent, puis ce fut la jeune femme qui leur servit le thé, avec une élégance et une noblesse discrète avant de s'asseoir face à Aeron.

Il était difficile de ne pas remarquer les oeillades qu'elle lui lançait fréquemment, et il dut se retenir de lever les yeux au ciel ou d'avoir un commentaire un peu acerbe. Il n'était pas à Aryon, et si la noblesse de son pays avait tout à gagner à l'épouser, c'était sans doute moins le cas ici. La vérité, c'est que le mariage serait une option éminemment intéressante pour rapprocher les deux pays, et les lier.

Même sans aller jusque-là, Ulia serait, avec un peu de chance, une politicienne moins aguerrie que ses aînés, donc il devrait être possible d'obtenir de sa part des informations moins filtrées et triées sur le volet. Aeron se mit donc à répondre à ses coups d'oeils par les siens, laissant son regard glisser sur sa robe, les plumes blanches qu'elle a dans les cheveux et qui pourraient être ceux de n'importe quel oiseau, pour ce qu'il en sait...

"Dame Ashryn, merci pour les appartemants, ils sont tout à fait luxueux. Et le thé est délicieux, je serais très curieux d'en avoir la composition, Dame Ulia, si vous pouviez me la transmettre ou me montrer, même, comment vous le composez..."

Aeron se racla la gorge. Ensuite, que devait-il dire ou faire ? Force était de constater qu'il était loin d'être un expert sur ce genre de problématiques, et qu'il lui faudrait peut-être remédier à cela rapidement. Il se nota de lire quelques ouvrages sur le sujet en rentrant chez lui.

"Je n'ai pas pu m'empêcher que nos accompagnateurs sont logés ailleurs mais il serait souhaitable qu'un ou deux par personne logent dans les suites avec nous. Ce sont davantage des assistants et des seconds que de simples serviteurs, après tout. Est-ce possible de s'arranger en ce sens ?
- Oui nous devrions pouvoir arranger ça sans trop de problèmes, nous allons mettre à votre dispositions quelques chambres de plus dans votre aile, nous n'avons pas prévu de recevoir d'autres invités de marque pendant votre séjour, après tout !"

Cela soulagea le Prince. Aussi bien pour ses deux ministres, plus si jeunes et qui auraient tous les deux besoin d'aide pour les tâches du quotidien, que pour lui-même. Certains de ses habits, créés pour l'occasion par Dame Belmont, n'étaient en réalité pas vraiment adaptés pour être mis seul. Pour enlever, il restait toujours la lame d'un couteau, mais c'était prendre le risque dee se faire planter une longue aiguille de couture la prochaine fois qu'il irait voir la femme d'âge mûr.

Goûtant à nouveau le thé, Aeron essaya d'en deviner les saveurs, mais si certaines lui semblaient familières, la majorité et, surtout, leur mélange, rendaient délicat l'identification des plantes exactes. Ramenant son esprit à des questions plus prosaïques, il se rappela son admiration des mécanismes empyréens, ainsi que la curiosité qu'ils suscitaient au pays.

"Le mécanisme d'acheminement de l'eau et de la lumière est différent de celui d'Aryon, pouvons-nous consulter des traités de plomberie et d'éclairage ? Il y aurait sans doute beaucoup à y apprendre.
- Oh vous vous intéressez à la résonance ! C'est assez simple en réalité, mais sans ça notre ville ne serait pas aussi autonome. Je vous fournirai volontiers de quoi comprendre le système, évidemment."

Il n'y avait pas de petit profit, et si cela ne représentait pas grand-chose pour Empyrée, cela pouvait ouvrir un nouveau mode de pensée pour Aryon. Si la magie permettait actuellement de tout faire sans effort, un courant de pensée et de recherche différent permettrait des ouvertures et des rapprochements avec Empyrée. Par ailleurs, rien n'indiquait qu'il serait impossible de mêler magie et technologie, ou appliquer des paradigmes d'ingénierie à la magie. Un sujet pour leur Génie à eux, et le ministre de la Magie, à n'en point douter.

"Le domaine Ashryn semble impressionnant, et continue beaucoup plus loin qu'anticipé. Les autres ministres ont-ils également d'aussi grandes demeures à la surface ?"

La réponse fut cette fois un peu plus longue à venir, mais s'avéra suffisamment détaillée et vague pour vouloir dire tout et n'importe quoi. Considérant le mode de gouvernance d'Empyrée, l'organisation par un conseil aux attributions précises fonctionnant de façon collégiale devait faire le jeu de manoeuvres politiques complexes pour se maintenir au pouvoir, ou proche de son centre dans tous les cas.

"De part l'historique de notre famille, nous avons l'un des plus grands domaines privés de la surface, mais les étages souterrains offrent suffisamment de place à tout le monde pour être logé correctement, notre demeure n'est dont pas la plus étendue... léger sourire Ceci dit, je ne saurais dire si notre domaine est le plus grand de la surface... d'autres familles avec des histoires presque aussi vieilles que la notre, ou de grandes fortunes leur ayant permis d'annexer différents bâtiments, doivent avoir des domaines de taille équivalente. Quand on a autant de place - grâce aux étages -, il est naturel d'en profiter, après tout."

Ce n'était pas par hasard que les Ashryn étaient encore là, avec leur statut de fondateur. Peut-être que les élections étaient davantage verrouillées par les grandes familles qu'il n'y semblait, mais Aeron se dit qu'il ne parviendrait pas à obtenir des informations là-dessus, eu égard à sa position.

La chambre d’Aurélius était bien différente de celles de ses collègues. Il avait jeté un coup d’œil lorsqu’ils s’étaient séparés devant la suite du prince. L’étrange impression que ce lieu avait été préparé uniquement pur lui le taraudait. Ces tableaux, cette disposition, cette vue sur le jardin, tout était si bien agencé. Leurs hôtes avaient réussi à faire impression. Ils avaient su se renseigner sur leurs invités. Aurélius ne savait pas s’il devait s’en réjouir ou s’en inquiéter. Après tout il était une personnalité publique assez connue d’Aryon, donc il n’aurait pas été difficile d’apprendre ses goûts en matière de déco. L’artiste s’arrêta un instant devant une des toiles représentant sous un angle différent la grande tour centrale d’Empyrée. Était-ce là un étage différent des autres ? Ou simplement le même point de vue représenté sous différents angles ? En son for intérieur, Aurélius devait avouer qu’il était très excité à l’idée de visiter cette incroyable ville. Si ce qu’il avait devant les yeux était un avant-goût d’Empyrée, il n’arriverait pas à dormir cette nuit en pensant à leur voyage de demain s’il y en avait un de prévu. S’il n’était pas ministre, il aurait aimé finir ses jours ici à peindre et composer sur cet endroit.

Mais pour l’instant, il devait se préparer. Se libérant de la carapace étouffant de ses vêtements signés Belmont, il opta pour une tenue plus légère et agréable, parfaite pour une soirée privée. De toute façon, il n’avait pas le choix. Sa valise était rangée par catégorie, chaque tenue bien alignée et composée en avance. Ou était donc la fantaisie dans tout ça ? Il soupira et enfila la tenue « soirée privée ». Elle était sensiblement identique à la première si ce n’est que la veste était bien plus légère et agréable et qu’elle se portait ouverte. Tandis qu’il s’ajustait dans le miroir, il réfléchissait à leur arrivée. Le ministre des Armes avait soulevé un point important tout à l’heure. Se faire accueillir comme cela par une seule et unique famille était assez étrange. Les coutumes des Empyréens leur étaient étrangers, mais cela ne semblait pas logique pour autant, même dans une culture totalement différente. Le prince en tirerait probablement ses propres conclusions. Il n’avait jamais été stupide, pas comme sa sœur et il tendait souvent l’oreille à ce que lui chuchotait le ministre des Armes, que ce soit une bonne chose ou non.

Fin prêt, Aurélius sortit de sa chambre pour découvrir qu’il était le dernier à sortir. Tango se précipita dehors pour aller renifler chaque recoin et chaque pied qui se présentaient devant lui jusqu’à ce que son maître le rappel à l’ordre et qu’il feule d’agacement avant de revenir vers lui. Ils se laissèrent conduire jusqu’au salon. En passant devant la salle à manger, Aurélius vacilla légèrement, frapper par un cocktail d’odeurs inédites qui vinrent titiller son odorat surdéveloppé. Il ne put s’empêcher de s’arrêter un instant pour décomposer cette fragrance unique. Des épices. Tellement d’épices qu’il ne pouvait reconnaître. Le repas de ce soir allait être une véritable expérience à n’en pas douter.

« Je crois que notre dîner n’aura rien de connu ce soir, souffla-t-il au prince en reprenant la marche un air mystérieux sur le visage. »

Aussitôt furent-ils assis, aussitôt Aurélius laissa son pouvoir se propager jusqu’à son goût au détriment de sa vue. Il plongea dans le noir sans aucune retenu pour pouvoir profiter des saveurs de ce qu’on allait lui servir. Posant Tango sur ses genoux, il utilisa les yeux du lolori pour voir ce qu’il se passait autour de lui. C’était assez facile puisque le chat était très curieux de ce qu’il se passait et aussi très intéressé par les pierreries qui ornaient certains meubles. Aurélius savait que s’il détournait les yeux une seconde, le lolori irait essayer de les grignoter. Le prince semblait avoir ouvert la conversation et en bon ministre qu’il était il se garda bien de l’interrompre. Il préféra s’emparer de sa tasse pour goûter ce thé venu d’une autre contrée. L’explosion de plante qu’il ressenti lui rappela les arômes qu’il avait capté du jardin, là où il avait repéré des plantes inconnues en ouvrant sa fenêtre. Un léger sourire se dessina sur son visage.

« Hum ce parfum me rappelle les différents plans que j’ai pu apercevoir dans votre jardin, faîtes-vous votre thé vous-mêmes ? »

Il écouta patiemment la réponse avant de reposer sa tasse et de laisser le prince continuer son interrogatoire. Il échangeait beaucoup avec Alaena au grand damne de la plus jeune qui ne pouvait s’empêcher de papillonner des paupières en direction du prince. Le ministre finit par avoir pitié d’elle et, laissant les deux autres à leurs échanges, se tourna vers elle en prenant Tango dans ses mains.

« Dites-moi, mademoiselle Ulia. J’ai cru comprendre que vous vous intéressiez de près à notre Royaume. Je peux peut-être vous apprendre deux trois choses si vous avez des questions. Après tout, je suis venu ici pour créer un échange culturel. »

La jeune fille se désintéressa du prince et s’empressa de la harceler d equestion.

« Est-ce que c'est vrai que vous avez des véhicules qui volent par magie ? Que vous pouvez créer de la nourriture et des boissons à partir de rien ? Que le Palais Royal *elle jette une œillade à Aeron* est protégé contre toute intrusion magique ? Est-ce c'est vrai que certaines personnes ne peuvent pas vivre sans magie chez vous ? Et... que vous tissez des liens spéciaux et magiques avec vos animaux de compagnie ? »

Elle regarde ta bestiole, fascinée. Aurélius manqua de s’étouffer avec son thé tellement le flot de question le surprirent. Un mince sourire se dessina sur ses traits. Il venait d’ouvrir une boîte trop longtemps fermée on dirait.

« Eh bien, je ne vous imaginais pas si curieuse. Par où commencer ? La magie permet à de nombreux objets de voler en effet. Elle nous permet également d’apporter nourriture et boisson, mais cela est toujours limité. Je ne suis pas enchanteur, alors j’aurais bien du mal à vous expliquer comme cela se peut ! Le palais royal est en effet l’endroit le plus protégé d’Aryon, même contre la magie. Tout le monde vit avec la magie, mais elle n’est pas indispensable. Disons qu’elle est un confort dont on se passera très difficilement, surtout s’il n’y a rien pour la remplacer. »

Aurélius avait esquivé les questions les plus sensibles, rien sur la bulle du palais et encore moins sur les engins volants du désert. Il n’était pas là pour divulguer des informations sur les capacités d’Aryon à la première gamine venue, bien qu’elle semble aussi ingénue qu’une pâquerette. Il prit le petit lolori et le posa sur le sol pour qu’il aille voir la demoiselle.

« Nous ne les appelons pas des animaux de compagnie, mais des familiers. La différence tient dans le lien magique qui nous lie à eux. Nous avons aussi des animaux de compagnie comme vous, mais ce n’est pas pareil. C’est plus … intense. »

Voyant qu’elle ne comprenait pas, il lui donna un exemple :

« Par exemple, avez-vous remarqué que je suis présentement aveugle ? Non ? Et bien c’est parce que j’utilise les yeux de ce petit lolori pour combler mon handicap. Je vous vois actuellement par ses yeux. »

Tango miaula comme pour lui donner raison.

« Ce genre de partage de sens, mais aussi d’émotions ou de pensées, sont très courants par chez nous. Cela ne peut conduire qu’à tisser un lien unique et bien plus puissant avec l’animal. Voilà comment cela se passe en Aryon. »

Une fois dehors, Furi avise Pietro qui les attend. Le membre de la famille Ashryn, cousin comme il a été présenté, en est retenu à un simple fonction de serviteur à guider les représentants d’Aryon tandis que les vrais membres influents attendent dans des salons privatifs, se pouponnant pour leur faire impression. Ce peut être un honneur pour le jeune homme, mais celui-ci ne semble pas déborder de joie d’avoir cette responsabilité. Des obligations familiales contre lesquelles il ne peut rien, sûrement. User d’un membre de la famille pour l’héritier de la Couronne d’Aryon, c’est le minimum pour ne pas insulter les visiteurs, peut-être. Furi envisage de parler un peu, d’hommes à hommes, avec Pietro, mais le Prince Aeron sort à son tour et Furi remet cette possibilité à plus tard. Un simple question à deux contre un, ça ressemble davantage à un interrogatoire qu’à une brève discussion informelle au milieu d’un couloir, surtout quand il y a un membre de la famille royale dans l’histoire. Le Prince s’est changé pour quelque chose de plus simple, mais toujours aussi élégant. Quand on est le joyau du Royaume, il faut soigner son écrin. Nicholodéon n’a pas ce genre de préoccupation. S’étant juste délester de sa cape de voyage.

Le trio attend donc peu de temps le Ministre de la Culture qui ne tarde pas. Réunies, Pietro les conduit à notre destination, passant devant la salle à manger qui éveille de sombres pensées d’empoisonnement dans l’esprit légèrement paranoïaque, pour l’occasion, du Ministre. inquiétude qui n’a pas lieu d’être, le Prince étant bien équipé contre ça. Arrivant devant le petit salon, Pietro introduit le prince et le Ministre de la Culture. Nick reste un peu en retrait, laissant les gens adeptes des mondanités faire ce qu’ils savent faire de mieux, cueillant le regard de Pietro au passage lui faisant comprendre que j’aimerais échanger un mot. Ce n’est peut-être pas le protocole, mais quelle est la bonne solution ? Indisposer un membre de la délégation devant tout le monde ? De toute façon, ça ne dure pas longtemps, ça serait malvenu.

-Dites moi, j’aurais une unique question. J’imagine que recevoir le Prince Héritier du Royaume d’Aryon est l’un des plus suprêmes honneurs que notre Royaume puisse faire. Que ce soit votre famille qui est ce privilège, j’imagine que d’autres grandes familles doivent avoir quelque chose à redire de cet… Honneur ?

La question est difficile, mais l’homme, après un temps, se permet d’y répondre.

-La famille Ashryn est effectivement très honorée d'avoir la chance de pouvoir tisser les premiers liens d'amitié entre le gouvernement d'Empyrée et la famille royale d'Aryon. Notre héritage fait que nous étions les mieux placés pour recevoir le prince comme il se doit. Comme ma cousine vous l'a dit tout à l'heure, notre famille est la plus vieille d'Empyrée, notre fondateur est aussi celui de notre cité. Nous tenions à ce que vous soyez accueillis comme il se doit, et je n'ai nul doute que les représentants des autres familles et les autres Ministres ne se sont pas battus ouvertement contre mon cousin pour obtenir ce privilège.

Peu de surprise. Il s’agit d’une belle langue de bois. Furi incline la tête, remerciant pour sa franchise en se doutant bien qu’elle est totalement feinte, mais il s’agit de préserver les apparences, convaincu que Pietro sait bien qu’il n’est pas dupe. Ces ronds de jambes pour parler beaucoup sans ne rien dire, ça insupporte Furi. Et la suite n’est pas vraiment à son goût. Il salue les deux dames, étant arriver un peu en retard et reste ostensiblement en retrait, préférant rester debout non loin de Pietro, observant la pièce tout en faisant extrêmement attention aux moindres réactions et mots qui peuvent être prononcés, à la recherche d’une information cachée.

Furi ne passe pas du tout à côté du petit manège de la jeune Ulia qui se voit comme le nez au milieu de la figure. Le Ministre évite d’attirer son attention, la laissant se satisfaire de la vue du Prince. A peine arrivée et le Prince entre déjà dans le jeu des alliances. Soit, même si s’acoquiner avec une famille peut provoquer l’ire des autres. Mais du peu qu’il connaît du Prince, le Ministre n’a aucune crainte quant à sa capacité à ne pas aller trop vite. Il se méfie un peu plus d’Aurélius. les artistes. Toujours cette capacité à s’emporter un peu trop par la passion et la fantaisie. Mais le Ministre Lehnsherr n’est pas arrivé à son poste par hasard et il reste un fin politicien qui arrive à esquiver les questions gênantes. Puisqu’il est question d’apprendre des futilités, l’équilibre veut que l’on fasse de même. Et pour l’instant, les deux hommes politiques satisfont les velléités protectionnistes de Furi.

Toujours en retrait, le Ministre n’espère qu’une seule chose : Que l’on se préoccupe peu de lui et qu’on s’intéresse davantage à Aurélius et Aeron. Il adopte avec vigueur le masque rugueux du vieil homme acariâtre tandis que sa carrure et sa pose impeccable traduisent même au plus béotiens sa grande expérience martiale. Non. Il n’est pas un courtisan.

Faites que le destin ne l’invite pas dans le grand bain des tasses de thé. Ce n'est pas son petit plaisir. Et en l'occurence, il aimerait bien s'en griller une.

Par réflexe, Aeron stocka toutes les informations qu’il observait dans un coin de sa mémoire. Jalius avait tout du fils prodigue, peut-être moins soumis aux contraintes politiques qui pesaient sur le reste de sa famille, ou qui avait envie d’indépendance. Et il s’entendait visiblement assez mal avec Pietro. Il y avait peut-être même un axe à jouer de ce côté-là pour tisser des liens loin du regard acéré de sa tante et de Simaris Ashryn. Visiblement, la famille qui les accueillait pour l’instant souhaitait garder le plein contrôle des gens auxquels ils étaient confrontés, mais il ne faisait aucun doute qu’ils avaient dû consentir à quelques contreparties après des autres clans qui semblaient noyauter les hautes sphères d’Empyrée.

Car malgré ce qu’ils prétendaient sur l’égalité et la démocratie, le Prince ne voyait là qu’une aristocratie bourgeoise qui, forte de sa possession des richesses et des moyens de production, maintenait sa position au sommet de la chaîne alimentaire. Non qu’Aryon soit foncièrement différent, bien entendu : il s’agissait de trouver la personne la plus adaptée pour un poste, une tâche, afin qu’elle soit menée du mieux possible, pour la prospérité du Royaume.

La leçon rapide fournie par Alaena allait sans nul doute s’avérer rapidement critique, puisqu’ils venaient d’être introduits dans la salle du dîner, dans un espace tout d’abord qui sert à l’accueil et aux présentations. Les visages défilèrent trop vite pour que le jeune homme puisse tous les retenir, donc il se concentra sur les chefs des familles et les dignitaires. Et même là, il espérait qu’on ne lui poserait pas de questions trop précises, mais l’étiquette voulait que ses hôtes ne chercheraient pas à le mettre en mauvaise posture.

Ironiquement, et malgré la suggestion d’Alaena d’éloigner Aurélius des Grimmere, ils se retrouvèrent suffisamment proches pour pouvoir échanger, et Aeron espéra que le lolori ne viendrait pas mettre le bazar partout, au risque de créer un incident diplomatique. Par contre, le jeu de pouvoir entre les Ashryn et les Grimmere valait le coup d’être investigué, dans la mesure où il s’agissait de la seule jeune femme, à part Ulia, à être assise aussi proche de lui, et à voir les regards des autres invités, cela se paierait sans doute plus tard. Restait à savoir si les Grimmere étaient des alliés des Ashryn ou au contraire la principale famille rivale, et que la concession avait été nécessaire pour éviter de trop déséquilibrer les forces en présence.

De l’autre côté de la table, Nicholodeon allait pouvoir continuer à travailler Pietro au corps, avec Jalius, dans une ambiance pleine de virilité, à n’en point douter.

Quand tout le monde se tourna vers le Prince, dans l’attente d’un discours, il rassembla rapidement ses pensées, éparpillées autour de chacun des convives, et se remémora les instructions de ses parents. Faire preuve d’une force tranquille et ouverte, non pas agressive mais ferme, n’avoir l’air ni d’un prédateur, ni d’une proie, mais d’un ami avec lequel bâtir une relation équilibrée en vue de…

Aeron avala sa salive, puis leva son verre.

« Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, bonsoir. Au nom de notre délégation, et du Royaume d’Aryon, je tiens d’abord à tous vous remercier de nous accueillir, de manière générale pour procéder à des échanges culturelles, de façon spécifique pour nous permettre de tisser des liens entre nos gouvernements respectifs, et nos familles.

Bien évidemment, je me dois également d’adresser mes félicitations à Simaris Ashryn et toute sa famille pour l’organisation du festin qui nous attend, et vous assurer de la reconnaissance que nous, aryonnais, éprouvons par rapport au fait que vous vous soyiez déplacés pour l’occasion. Nous remercions également la famille Ashryn pour leur accueil, et ne manquerons pas d’éprouver la même gratitude lors de tout notre voyage.

J’espère enfin que cette visite diplomatique ne sera que la première d’une grande série entre nos deux nations, où Empyréens viendront également en Aryon et lors desquels nous apprendrons à nous connaître et… nous rapprocher. »

Le Prince leva son verre et, pour la première fois, arrêta son regard sur Ulia et Evaine, puis sur les autres jeunes femmes de l’assemblée, dans un appel du pied qui lui semblait assez grossier, mais ne devrait dans tous les cas pas être inefficace. Après tout, le poisson ne peut s’empêcher de gober l’appât quand bien même l’hameçon est bien visible.

Voilà bien une phrase de son père.

L’interruption de ce jeune Jalius ne semble pas être dans le programme et Nicholodéon le remarque, même s’il peut comprendre aisément les réactions des Empyréens. Lui-même n’aimerait pas voir débarquer un sergent crotté au milieu de son entrevue capitale avec des puissances étrangères, aussi prometteur soit-il. Si Alaena Ashryn semble réagir parfaitement sans hésiter, le ministre des Armes note mentalement que les relations semblent bonnes avec ces Meskos dont il a entendu parler à travers les rapports officiels et, comme les gens du commun, à travers les articles de Regina Skeeter. Cette famille fait partie des principales interrogations du Ministre vis à vis des questions de sécurité nationale. Si dans une première lecture, les Meskos semblent principalement concentrée à la traque et à la chasse, il suffit de pas grand chose pour qu’une caste de chasseurs de talents se transforment en troupe militarisée pour des hommes et des femmes habitués à affronter les dangers de leurs régions. Regina Skeeter rapportait que des Meskos étaient les descendants d’anciens guerriers. Rien ne dit que dans les faits, ils n’ont rien perdu de leur vocation guerrière. Ce genre de mission diplomatique sert parfaitement à confirmer ou infirmer ce propos. L’autre grande interrogation vis à vis de cette famille, c’est qu’ils sont probablement les plus capable de décrire les menaces actuels d’Empyrée et, par conséquent, les menaces qui pourraient déborder sur le Royaume d’Aryon maintenant que le Fenrir, Alpha du Nord, est parti, sans que l’on sache pourquoi et comment, faut-il le rappeler.

Après une explication bienvenue des nombreux et puissants invités au repas du soir, la délégation rejoint ladite table du banquet, le mot ne semble pas déplacé vu la quantité d’invité qui se presse autour de la délégation d’Aryon, en particulier du Prince qui est certainement le joyau le plus brillant du trio, il ne faut pas se mentir et qui convient certainement bien à Furi qui apprécie rester dans l’ombre. Le Ministre a le plaisir de retrouver son aide de camp, Stock, avec qui il s’entretient quelques instants pour lui rapporter brièvement le bulletin des invitations et les invités sur lesquels il souhaite avoir une deuxième paire d’yeux qui ne seront probablement fixé sur une chaise à devoir respecter un protocole sous peine de provoquer un incident diplomatique. Une fois encore, on ne peut constater que les familles influentes d’Empyrée n’ont d’yeux que pour le Prince et pour sa main dans celle de l’une de leurs filles. On remarquera l’absence de joli garçon qui aurait pu réaliser le tour de force charmer le cœur si énigmatique du Prince et de s’interroger dans le même temps sur l’état des mœurs ici-même. Peut-être qu’elles ne sont pas aussi libérées que dans le Royaume. Ce genre de détails peut revêtir une grande importance.

On passe assez rapidement sur ce moment de présentations et de beaucoup de temps pour ne pas dire grand chose, Nicholodéon serrant les mains qu’on lui offre et notant mentalement les noms, les fonctions et les liens éventuels qu’on pourrait lui fournir. Dans ce genre d'événement, il y a toujours un plan de table et celui-ci veut dire beaucoup. Ainsi, si les Ashryn occupent les plus belles places, parce que sont naturellement les hôtes, les Grimmere semblent tenir la dragée haute par rapport aux autres familles. Qui sont avec leurs cheveux blancs très caractéristiques ? Des juristes, des philosophes, des intellectuels. Le genre d’individus qui devraient plaire à Aurélius, même si d’après ce que les Ashryn ont décrits plutôt, s’ils savent manier les mots, ce n’est pas pour en faire des romans. ça ne concerne pas beaucoup le Ministère des Armes, mais il note l’information. Est-ce parce qu’ils sont alliés que les Grimmere sont si proches ? Ou parce qu’ils sont vraiment très influents ? Une question qui mérite d’être creuser.

Pour sa part, Nicholodéon peut profiter des présences proches de ce Jalius de tantôt et de Pietro. Il n’a pas échappé à Furi de la façon dont le jeune homme à appeler l’homme qui les accompagne depuis un moment. Pietrelle. Il aurait dû dédain, de ce genre qu’on met dans la bouche des jeunes fous qui ont toute la vie devant eux pour rentrer dans le droit chemin du devoir, mais qui s’accrochent de toutes leur force à cette indiscipline juvénile que n’ a pas connu Furi, ce qui ne doit pas trop vous étonner. En tout cas, peut-être qu’en prenant subtilement parti pour Pietro contre ce Jalius, il est possible de s’attirer sa sympathie et éventuellement sa franchise. Il a aussi l’opportunité de discuter davantage avec les Meskos, ce qui tombe bien. Quant au Cornaith, il ne sait quoi en penser. L’industrie minière peut vouloir dire beaucoup de choses, même si pour une ville qui croît dans les profondeurs de la terre, l’exploitation minière doit être particulièrement importante, de là à s’étonner qu’on mette si loin cette famille pour privilégier les grattes papiers. Peut-être une famille dont l’influence est plus récente.

Nicholodéon observe ses voisins avant et pendant le discours du Prince, de manière assez discrète. Ce qu’il pense observer, c’est qu’il ne semble pas avoir d'inimitiés claires entre les familles. Tout le monde parle beaucoup pour ne rien dire, expérimenté dans l’art de la politique et des jeux d’influence. Même ceux qui se tiennent un peu trop éloignés du Prince ne semblent pas s’offusquer. Au cours des ces observations, Nick passe un instant sur une dame d’âge pur qui semble le dévisager. Le Ministre détourne le regard pour n’offusquer personne, s’interrogeant bien sur ce comportement. Si tout le monde n’a de regard pour le Prince parce qu’il est le plus important ici, il ne faut jamais oublier les acolytes. C’est ce que Furi essaie notamment avec Pietro, en l'occurrence.

Une fois la parole redonnée aux convives, Furi engage la conversation, tentant de feinter l’innocence pour contourner la vigilance de ces vis à vis, sondant les Meskos.

-J’ai cru comprendre que vous protégez vos concitoyens d’Empyrée des menaces extérieures. Pardonnez-moi de vouloir faire un parallèle, mais êtes vous comme une sorte d’armée de protection comme l’est notre garde ?

Les Meskos présents répondent assez franchement tout en gardant leur calme et une dose certaine de langue de bois, expliquant que s’il fallait comparer, ils se rapprochaient davantage de la Guilde en chassant des monstres, même s’ils forment leur volontaires comme on pourrait s’y attendre d’un corps militaire. Tout ce qui a attrait à l’extérieur semble être de leur responsabilité. La nature est sauvage par ici et il faut protéger les exploitations agricoles et traquer les créatures autant pour assurer cette protection que pour s’en servir de sources de nourriture et de composants naturels pour les artisans. Eux-mêmes sont très talentueux pour l’exploitation des peaux.

Au détour d’une demande de précision, Furi tente d’enfoncer un peu le doigt dans les relations entre familles.

-Les Meskos sont tout de même très importants pour la sécurité d’Empyrée, autant pour les monstres que sur une question de sécurité alimentaire. Le Royaume d’Aryon n’a pas de telles familles qui contrôlent des pans entiers d’un pays. Pas de manière si systémique, en tout cas. Il est assez légitime de se demander si les interactions entre ces “monopoles” de familles se passent bien.

On lui répond, les Meskos en particulier, que les relations sont globalement bonnes. Chacun veille à rester dans son domaine de compétence pour le bien commun. Il n’y a que lors des périodes d'élections que les familles peuvent être davantage taquine entre elles.
Des élections pour le pouvoir, quelle idée saugrenue, tout de même.

Le repas se déroule sans accroc et les discussions plutôt informelles s'enchaînent. Si Nicholodéon tente des attaques très discrètes pour tenter de discerner des clans, des alliances et des inimitiés entre les familles, celles-ci sont sans effets. Si de telles relations sont très probables entre ces grandes familles, ici réunies, elles affichent toutes le visage d’un pays uni devant les représentants les plus importants d’un voisin fraîchement découvert. C’est en soi une information qu'il est important de notifier. Si les Empyréens sont capables de mettre leur différents de côtés pour faire front commun d’un point de vue politique, c’est assez admirable. Le Ministre des Armes n’est pas convaincu que les Nobles d’Aryon soient capables d’une telle prouesse, quoiqu’à situation exceptionnelle, comportement exceptionnelle. Il peut bien être surpris. Surpris, ses voisins le sont quand il décline simplement le vin qu’on lui propose, dissipant tout malentendu, que l’on ne croit pas qu’il ait peur qu’on l’empoisonne. C’est ainsi en toute circonstances, même dans la sphère privée. Il se tient éloigné de l’alcool. Durant ces jeunes années, il consommait, mais plus il a pris de l’âge et des responsabilités, moins il s’est abandonné à la saveur de l’alcool qui peut être dangereux. Et puis.

-Cela fait tellement longtemps que je n’ai pas bu une goutte d’alcool que je crains de mal le vivre.

Dit-il dans un sourire. Ses voisins s’en amusent. Il serait malavisé de laisser échapper sa pensée à cause du verre de trop. Il y a déjà fort à faire avec la nourriture très épicée qu’on leur sert. Du poisson et des viandes inconnues dont certaines qui viennent probablement d’espèces originaires de la forêt voisine. ça parle d’espèces insectoïdes. Nicholodéon n’est pas un grand connaisseur du bestiaire d’Aryon, mais il sait que ce genre de choses est assez rare dans le Royaume. En découle une explosion de saveurs nouvelles rehaussées d’épices dont certaines un peu fortes. Le lait est bienvenu, faisant bien attention à ne pas mouiller sa moustache. Avoir du lait dans la moustache, c’est perdre sensiblement en crédibilité. Il fait toutefois bonne figure, mangeant sans exprimer parfois le feu dans sa bouche, sous le regard amusé des ces voisins, surtout depuis que le Ministre les a informés sur le ton de la conversation que la cuisine d’Aryon n’est certainement pas aussi épicée que la cuisine locale.

Cette étape franchie et alors que les desserts s’annoncent moins épicé, quoiqu’un convive a tenté de faire croire que si à Nicholodéon qui a marché une seconde de trop dans le piège, le ministre s’aperçoit qu’il est toujours observé par cette dame d’âge mûr un peu plus loin. Discrètement, Nicholodéon tente de se renseigner auprès de l’un de ses voisins avant qu’il ne parte pour la piste de danse.

-Pouvez-vous me dire qui est cette dame, à gauche de ce messire du clans Meskos ?
-Ah. Il s’agit de Dame Velma Demidicus.

Demidicus. un nom qui ne lui dit rien. leur hôte n’en a pas parlé. Intrigué, Furi relance.

-Demidicus est-elle une famille un peu plus mineure que les Meskos et les Ashryn ? On ne nous les a pas présentés.
-Pas du tout. Ils ont beaucoup d’influence, au contraire, au même titre que ces autres familles. C’est juste que… Il y a quelques tensions avec la famille Demidicus concernant votre Royaume. Peut-être est-ce la raison pour laquelle on n’a pas voulu vous embêter avec cela.

Le ministre remercie l’invité, le libérant avant de boire un verre d’eau, notant mentalement cette information. Plutôt que de se voir embêter avec cela, ça l’intéresse, au contraire. Tous les désagréments créés dans Empyrée par la découverte du Royaume sont bons à être appris. C’est là l’occasion de fouiner davantage. Justement, est-ce peut-être le manque de discrétion ou la suite d’un plan tranquillement mené, mais Velma Demidicus s’approche grâce aux places libérées par les danseurs. Elle se présente, confirmant l’information obtenue un temps plus tôt. Nick se présente aussi, bien que ce soit surement inutile. Il s’interroge un instant sur quel terrain entamer une conversation pouvant lui être plus utile que futile quand soudain, Aurélius vient jeter le froid le plus terrible dans l’assistance. Nicholodéon n’a jamais vu un si soudain changement de comportement, le monde s’arrêtant de tourner à l’instant où la magie s’exprime dans cette assistance qui ne la jamais connu. Il faut le voir pour croire à cette absence totale d’utilisation de magie qui se ressent même dans les regards effrayés, voire choqués, des convives. Un instant, le masque de la bonne tenue se brise devant l'énormité de ce qu’il se passe. Un pet sonore n’aurait pas choqué davantage.

Furi lance des regards discrets en direction des convives, plutôt unanimement interloqués, s’intéressant en particulier à Pietro, qui semblent visiblement contrarié, pensant sûrement déjà aux conséquences. Velma Demidicus, à l’inverse, semble étrangement plus fasciné que choqué par cette démonstration de magie, ce qui dénote terriblement dans cette assemblée et ce qui ne fait que réhausser l’intérêt du ministre pour sa personne. Par contre, la nouvelle du départ d’Aurélius désarçonne un peu Furi. La présence des ministres sont autant là pour soutenir le Prince dans ce premier contact que de nouer des relations individuelles. Son départ affaiblit la puissance diplomatique de leur mission en plus d’affaiblir le Prince. Nick a une certaine confiance dans le discernement du ministre de la Culture a prendre une décision aussi difficile et importante pour la diplomatie entre les deux pays. il doit avoir des raisons suffisantes, mais c’est à eux de devoir gérer les conséquences. Alors que le Ministre s'éclipse en compagnie de membres du personnel de la famille Ashryn, le brouhaha des discussions reprend. Tout le monde y va de son commentaire.

Le Ministre des Armes échange un regard avec son Prince, hochant imperceptiblement de la tête comme pour bien signifier qu’il comprend que cette épisode fâcheux leur fait marcher sur des œufs et qu’il s’agit de ne pas faire empirer la situation. En face de lui, le Prince doit gérer une jeune femme évanouie. Un état de choc des plus surprenants, mais ce n’est sûrement pas feint. Ce qui implique que le niveau de dégoût chez les Grimmere est plutôt conséquent. C’est à ce moment que Velma se rapproche davantage de Furi, posant cette question qui a le don de lui faire hausser un sourcil. Il s’attendait davantage à ce qu’on s’inquiète du sort d’Aurélius et que l’on fasse écho à ces rumeurs désobligeantes à leur encontre. Mais non. Son intérêt semble sincère, voire avide. Nicholodéon choisit ses mots avec soins, parlant bas pour ne pas partager cette conversation avec d’autres qui pourraient se scandaliser d’en apprendre davantage.

-Cette objet est appelé “cristal de communication”. Il permet de rentrer en communication vocale avec un autre cristal de communication possédée par un autre individu, ceci qu’importe la distance, seulement si les deux cristaux de communications ont été mis en contact. C’est un objet très utile pour communiquer à longue distance. Ce bruit, c’était le signe que quelqu’un cherchait à entrer en contact avec lui.

-Vous en avez un ? Ce doit être indispensable pour vos fonctions ?
-Oui. Enfin non. Oui, c’est indispensable. Et non, je n’en ai pas. Mes services ont peut-être égaré mon cristal de fonction.

Une anecdote dont je ne suis pas très fier, mais qui n’arrête pas Velma dans ses questions.

-C’est quelque chose de rare ?
-Plutôt oui. Les exemplaires en vente sont rapidement preneurs.
-C’est fabuleux. Et vous avez d’autres cristaux qui servent à d’autres utilisations ?
-Effectivement. Et elles sont nombreuses. je ne pourrais pas toutes les citer. Faire de la lumière. générer de l’eau. de la chaleur. La magie domestique du Royaume se base énormément sur des cristaux de tous les types.

Furi s’attend éventuellement à ce que ce déballage d’explications magiques finissent par rebuter son interlocutrice, mais c’est tout l’inverse qui se produit. Elle semble véritablement fascinée, ce qui donne l’opportunité à Furi de s'interroger.

-Si je puis me permettre, votre curiosité est assez étonnante par rapport à vos concitoyens. Pourquoi cette curiosité ?

Elle a un sourire.

-Sachez, monsieur le ministre, que je suis une amie des Aryonnais. On me considère ici comme une excentrique, à cause de ma fascination pour la magie. Je respecte évidemment les mœurs de mon pays, et je ne saurais pas utiliser mes pouvoirs même si je le voulais, mais je suis très curieuse de l’utilisation que vous faites de vos pouvoirs…D’ailleurs, puis-je me permettre de vous demander.. si ce n’est pas tabou… ou trop osé… quel est le vôtre ?

Nicholodéon se fige un instant, son esprit tournant à cent à l’heure car au-delà de la question et des circonstances dans lesquelles elle est posée, il y a une information qui intriguent grandement le Ministre. Vis à vis de l’utilisation de ses pouvoirs. Elle ne saurait les utiliser si elle le voulait et pas si elle le pouvait. Un détail qui impliquerait qu’elle aurait d’une certaine façon un pouvoir magique. Peut-être que l'information était déjà connue de la Couronne, mais ce détail semble nouveau pour Nicholodéon. Dans tous les cas, il y a d’autres urgences. L’Empyréene a lâché une petite bombe quand on voit la réaction de nos voisins proches qui ont entendu ces propos. Certains semblent offusqués par la demande quand d’autres sont tout simplement intéressés, mais n'osent peut-être pas demander. Autant satisfaire leur curiosité.

-Ce n’est pas tabou par chez nous. Cela fait partie de la vie courante. J’ai la faculté de pouvoir séparer des parties de mon corps. Par exemple, je pourrais séparer ma main, sans douleur. A la place je peux y fixer des objets et de m’en servir comme s’ils étaient des extensions de mon corps. C’est très versatile, mais je pense qu’il vaut mieux restreindre une démonstration à un cadre plus privé. Je ne voudrais pas causer plus de désordre.

Car Nicholodéon aimerait pousser davantage Velma à en savoir plus quand on voit ses motivations et son entrain à demander des choses qui peuvent scandaliser ces concitoyens, elle n’a pas peur de la critique. Sauf qu’il devient difficile de ne pas ignorer les rumeurs concernant ce qu’il vient de se passer avec Aurélius et les critiques que les locaux produisent à l’encontre des représentants d’Empyrée. Le ministre ne peut pas laisser la situation pourrir davantage. Ainsi, il attire l’attention de ses autres voisins, notamment les Meskos.

-Messieurs. Je peux comprendre vos questions vis-à-vis du départ du Ministre Lehnsherr. J’ai toute confiance dans mon collègue pour juger que la gravité des nouvelles qu’on lui a apportées soient suffisantes pour ajourner sa présence à l’un des événements les plus importants de l’existence de nos nations. Je ne souhaite à personne de devoir faire un tel choix, car ça voudrait dire que les raisons sont terribles. Ce départ, pour l’homme de Culture qu’il est, devant l’opportunité de découvrir la votre, il n’y a pas plus difficile. Mais je peux vous assurer que pour ma part, car je ne saurais parler à la place du Prince bien que je ne doute pas un seul instant que nous partagions la même opinion, je suis tout à fait disposé à goûter et apprécier votre compagnie.

Peut-être est-ce le moment pour le Ministre de s’ouvrir un peu, pour donner un peu de grain à ses voisins proches, en signe de bonne foi, permettant peut-être de justifier des entrevues un peu moins officielles.

-Pardonnez-moi si, peut-être je vous ai donné une mauvaise image. Je ne suis pas des plus à l’aise pour les protocoles et les mondanités. J’ai commencé jeune dans la garde du Royaume, simple soldat et j’ai passé de trop nombreuses années loin du subtil environnement de la politique et du pouvoir. Je suis bien plus à l’aise loin des titres, dans des entretiens plus informels en comité plus réduit. Je suis tout à fait volontaire pour partager votre compagnie.

Furi balaie du regard son cercle proche. Les Meskos, les Cornaith encore présents, mais aussi Pietro et évidemment Velma. On a rien sans en donner un peu. Et la soirée étant passée bien rapidement à sa fin, il n’est peut-être pas impossible de se retrouver dans un environnement plus intimiste et partager des conversations avec moins de retenus.

Le Prince jaugea le contenu de son assiette. La présentation était magnifique, impossible d'en douter, quoique très différente de ce qu'on pouvait trouver à Aryon. Ici, davantage de verticalité était de mise, et il était difficile de savoir si c'était le propre de toute la cuisine locale, une spécialité du chef ou bien un agencement thématique de ce repas. En tout cas, Ulia détaillait précisément chacune des couches qui lui faisait face, toute plus ou moins soudée. Et dès qu'une occasion s'y prêtait, Evaine ne manquait pas d'ajouter une information complémentaire, un éclairage subtilement différent, une expression régionale qu'il fallait alors expliquer.

« ... rappelant le troisième étage d'Empyrée. Peut-être aurez-vous le temps de visiter ce lieu, et vous remarquerez que les couleurs évoquent justement les pierres qu'on y trouve de façon assez caractéristique.
- D'ailleurs, comment sont-elles obtenues, ces couleurs ? Nous avons également des épices et des colorants alimentaires plus ou moins goutus, mais rien que je ne reconnaisse.
- Oh, et bien... »

Il avait fallu insister quelque peu pour apprendre qu'il s'agissait d'espèces locales d'insectes, sans grand point commun avec ceux qu'on trouvait communément à Aryon.

« C'est que les diplomates et ambassadeurs, et autres visiteurs, venus précédemment avaient, pour être tout à fait honnête, quelque peu du mal avec notre alimentation, que ce soient les épices ou bien les produits dont nous partions...
- Je pense que c'est pour cela que la forme est moins évidente, davantage retravaillée, ajouta Evaine avec un petit rire.
- Hm, je comprends pourquoi vous avez procédé ainsi. »

Affichant un mince sourire, Aeron prit son courage à deux mains, et, au même titre qu'une invitation à une noble tablée de piètre qualité en son Royaume, enfourcha sans hésitation la première bouchée. C'est qu'il n'en était pas à son premier plat raté, après tout, et il devait s'agir de spécialités auxquelles il n'était pas habitué, mais de chefs-d'oeuvres tout de même.

Le premier goût était celui d'une explosion d'épices, puis de feu. Un début de larme lui monta aux yeux avant que son pouvoir n'entre directement en jeu, calmant la brûlure de sa langue, et préparant sans doute celle de son estomac à venir. La gorgée de lait qui suivit acheva de le remettre d'aplomb, ainsi que celle de vin, plus traditionnelle, qui l'accompagna.

« Finalement, ce n'est pas l'utilisation d'insectes qui est la plus surprenante, mais clairement les épices. Et si je n'en ai pas l'habitude pour l'instant, je suis toutefois ravi de pouvoir goûter la véritable gastronomie empyréenne. »

De fait, s'il était difficile d'apprécier en tant que tel les mets qui lui étaient proposés, tellement leur différence était prononcée, ce n'était pas immangeable pour autant, surtout en sachant que, silencieusement, son pouvoir oeuvrait à s'assurer qu'il n'en soit pas mal en point.

Le jeune homme manqua de se rendre compte qu'un cristal de communication avait sonné, habitué qu'il était d'entendre sa tonalité pendant les soirées auxquelles il était convié. Et, pourtant, le silence de mort qui y fit suite força le Prince à rembobiner les derniers événéments jusqu'à constater le départ paniqué d'Aurélius. Il fallut quelques instants de plus pour qu'un membre du staff ne lui apporter un morceau de parchemin sur lequel était indiqué les raisons de la disparition du ministre, qu'il empocha après l'avoir consulté, son esprit désormais préoccupé par la nécessité d'expliquer, voire de rattraper, les événements récents.

Suite à l'évanouissement d'Evaine, promptement prise en charge par sa famille, un médecin des Ashlyn, et des serviteurs délicats, Aeron reporta son attention sur Ulia, que ne quittait pas des yeux son chaperon.

« La situation est très délicate, à n'en point douter. Le son que nous avons entendu n'est que celui d'un cristal magique. Il s'agit d'un outil de communication dont certains d'entre nous sont munis.
- Sert-il à l'avertir d'un danger potentiel vis-à-vis de son pouvoir ? J'ai cru comprendre un peu plus tôt que la situation de Messire Lehnsherr était complexe. »

Aeron haussa légèrement les sourcils en entendant la question de la jeune femme. Il ne lui serait jamais venu à l'esprit que le cristal serait lié au handicap d'Aurélius, car à ses yeux, il n'y en avait pas : le pouvoir était là et faisait partie intégrante de l'homme d'âge mûr, tout comme un manchot avec le pouvoir de matérialiser son bras ne serait, par définition, pas manchot.

« Non, non, il ne s'agit que d'un cristal de communication. Je pense que nos diplomates en ont déjà fait la démonstration. Ils nous servent à parler directement avec une personne lointaine également munie de l'objet. Ils sont relativement rares, mais leur usage n'a rien de particulier ou spécifique.
- Donc le départ n'a rien à voir avec un environnement dénué de magie ou... ?
- Absolument pas. Il s'agit de raisons qui... »

A la table principale, désormais considérablement moins peuplée, entre les danseurs et l'absence soudaine d'Evaine Grimmere, il était difficile de ne pas entendre la voix d'Edwin Cornaith, un des rares dont le Prince était parvenu à retenir à la fois le visage et le nom, et leur association. Il s'agissait du représentant d'une des familles principales, spécialisée dans toutes les opérations de minage. Et, à voir la structure d'Empyrée et la façon dont cette dernière s'enfonçait dans les profondeurs, il ne faisait nul doute que cela avait son importance.

Aeron sentit qu'il lui fallait désamorcer au plus tôt cette situation, tout en préservant, par décence, compassion et respect, le droit à la vie privé du Ministre. Il se leva donc après avoir adressé un signe de la main à Ulia, attirant brusquement les regards. Cette annonce serait indubitablement plus courte que son discours précédent.

« Mesdames, Messires. Je tiens à vous rassurer personnellement. Le Ministre Lehnsherr se porte bien et ne souffre d'aucun problème personnel, lié à sa magie ou non, si ce n'est une brusque affliction qui a frappé l'un de ses proches. Le détail relève de la sphère privée, donc je ne m'étendrai pas davantage sur le sujet. Toutefois, dans le mot rapide qu'il a pu m'adresser avant de nous quitter prématurément, il a spécifiquement insisté sur l'émerveillement qu'il a ressenti dans le trop bref temps passé à vos côtés, et le regret qu'il éprouve à ne pas pouvoir rester. Il espère sincèrement que vous ne lui en tiendrez pas rigueur, et qu'il se tient prêt à tout pour vous prouver sa bonne foi, dès lors que son souci actuel sera résolu, et que vous accepterez, d'une part ses plus plates excuses d'avoir dû vous quitter ainsi, et d'autre part qu'il revienne à Empyrée si l'occasion se présente, afin de découvrir cette nation si fascinante.
Je vous remercie moi-même pour votre attention. »

Evidemment, il n'y avait qu'une phrase de six mots sur le papier qu'il avait reçu, mais Aeron pensait avoir retranscrit fidèlement ce qu'Aurélius éprouvait, en plus d'essayer d'empêcher la situation d'évoluer négativement. Il adressa un signe de la tête à Simaris avant de se rasseoir, signifiant qu'il était disponible, le cas échéant, pour continuer à clarifier le sujet dans un cadre plus restreint.