Vous vous réveillez dans une salle éclairée par plusieurs lampes flottantes. Partout autour de vous, vous pouvez remarquer que l’endroit est relativement bien meublé et décoré, comme si vous vous trouviez au beau milieu d’un cabinet de curiosités. Près de Zahria, Son'yuch est assoupi·e, un dard soporifique nettement visible entre ses omoplates. Vous ignorez comment vous avez atterri en ces lieux ; c’est alors que, émergeant d’un cornet posé sur une tablette non loin d’un fauteuil, une voix nasillarde tonne dans la pièce :
« Hahahaha ! Vous êtes enfin tombé dans le piège du GRAND Dr. Kab-Hale, moi ! Après des mois d’enquêtes, j’ai enfin réussi à percer à jour le secret du Maître-Espion ! Oui, mon pauvre aventurier blond, je sais que c’est VOUS ! Grâce à mes talents, mon fooooormidable réseau d’agents, et mon intellect génialissime, je vous ai enfermé dans mon donjon infernal !
Vous n’en sortirez jamais, JAMAIS. Et cette innocente inconnue et ce familier seront les témoins de votre échec ! Et mourront avec vous, mais ça on s’en FICHE.
Vos os joncheront le sol de mon donjon de l’impossible ; tout échappatoire me contraindrait à mettre fin à mes jours tant cela bafouerait mon honneur, ma vertu, et mon génie. Mais jamais cela n’arrivera, et sûrement pas rapidement. Et maintenant, je COUPE la communication, ce message ne s’autodétruira pas, vous pourrez le réécouter à LOISIR ! »
Participants : @Zahria Ahlysh & @Sileas Endalar
Thème actuel : Rentrée des classes
Et au vu de sa situation actuelle, l'aventurier aurait probablement aimé rester dans cet état de repos si profond qu'au réveil vous avez l'impression d'être remonté dans le temps, de vous penser des mois, voir des années auparavant, l'esprit vide de toute inquiétude, prêt à démarrer votre journée du meilleur des pieds et de conquérir le monde. Mais cette douce sensation rappelant le petit déjeuner du matin fait avec amour par une mère aimante durant l'espace d'une poignée de secondes qui s'étirent dans le temps en un agréable infini à la très finie chute se fait soudainement fracasser d'un coup de masse mental alors que les souvenirs reviennent à l'homme et s'enchainent. La mission auquel il pense remonte à des années, et ces milliers de jours défilent a vitesse accélérée dans son esprit, tel un train avec une seule destination atteinte avec fracas : ses derniers instants avant le réveil. Le blond marchait tranquillement à travers la Forteresse, d'un pas lent mais assuré en direction de la Guilde pour consulter les dernières offres et voir si quelque chose d'intéressant était proposé qu'il pourrait prendre, voir même réaliser en compagnie de sa forgeronne préférée pour qu'ils passent un peu plus de temps ensembles suite à son retour d'Empyrée. Puis une piqure dans sa nuque, et une étrange sensation d'engourdissement montant progressivement à travers les deux ou trois rues suivantes. Le temps qu'il passe la main dans sa nuque pour en retirer le petit dard soporifique, le noir qui s'abat progressivement sur lui. Ses muscles ne répondant plus, des bruits de personnes s'agitant autour de lui, et plus rien.
Jusqu'a cet instant précis, ou se rendant compte de tout cela, le combattant se redresse avec un grognement enragé sur les traits, analysant les alentours. Son second réflexe est de porter la main à son glaive et se préparer à le dégainer quoi qu'il se passe, avant d'apercevoir la femme assoupie qui émerge à son tour, possiblement par le bordel qu'il a produit avec son armure, ainsi... Qu'un animal. Essayant de faire sens du bordel dans lequel ils se trouvent, entre l'apparence de la pièce et tout ce qui y est entassé comme l'étrangeté de ce trio improbable. Fort heureusement pour eux, alors que Sileas salue d'un grognement indécis la femme dont il ne connait même pas le nom ni l'apparence, un étrange mécanisme se met en marche et vient déblatérer ses conneries. Et si le borgne est particulièrement inquiet de s'être fait enlever, un rire d'abord amusé puis particulièrement mauvais se fait entendre quand la machine se coupe, suivi d'un ton de voix qui est empli d'une haine sourde et débordante.
-"Je ne sais pas qui est ce con, mais je peux promettre qu'une fois sorti de sa petite expérience malsaine, je vais le retrouver et m'assurer de lui carrer mon arme si profondément dans le cul qu'il pourra chanter dans les aigus à son enterrement."
Dans sa colère de savoir qu'il a été suivi, colère née de la peur que cet être perverti puisse s'en prendre à Sia en la pensant liée à des activités d'espionnage et de contre-espionnage, l'homme a laissé sa rage parler. Et c'est justement née de cette dernière que son regard jauge la pièce dans laquelle ils se trouvent... Et qui ne semble pas posséder de porte. Il y'a bien dans le mur quelque chose qui pourrait ressembler à un panneau coulissant, mais sans aucune poignée ni serrure incrustée dedans. Tournant sur lui même comme un lion en cage, et avec un grognement continu qui est proche de celui de l'animal, l'aventurier se force à reprendre son calme et ne pas laisser ses émotions parler. Oh oui il prendra plaisir à étriper vivant ce fameux docteur Kab-Hale et l'entendre hurler de douleur, mais avant il doit se concentrer. Juger froidement la situation et s'en sortir. Sa respiration se calme, et son regard finit par se porter sur la seconde victime désignée de cette expérience. Avec un long soupir qui n'est pas sans rappeler ceux qu'il laisse échapper quand il entre en transe, Sileas arrive enfin à reprendre son sang froid pour reprendre.
-"Je suis désolé pour tout cela, je n'ai aucune idée de ce dont il parle. Je suis Sileas, aventurier... Et à vrai dire, je n'ai aucune idée de comment sortir de la pour l'instant. Mais au vu de l'égo surdimensionné de celui ayant construit ce piège, je présume qu'il va s'amuser à tester notre intelligence pour avoir le plaisir de se sentir supérieur à nous. Mauvais point, je suis loin d'être doué en énigme... Et vous êtes ?"
Car bon, ils sont tous deux en danger dans cette histoire à la con. Certes il a sa gourde fontaine ainsi que des rations, ils ne risquent donc pas de mourir ni de faim ni de soif dans l'immédiat... Mais cela pourrait tout de même être long. Si jamais ils comprennent ce qu'il est attendu d'eux.
HRP: Ce RP constitue un RP dressage pour mon familier Khal Salkhi nommé Son'yuch.
Quoi ? Cabale ? Maître-espion ?
J'ai à peine émergé, mais je me lève en sursaut, considérant la vaste pièce, Son'yuch endormi, le gars en face, tout me frappe en une seconde, je suis en alerte maximale, les muscles tendus, mon cerveau réfléchissant à toute vitesse, mes yeux cherchant le moindre indice, tous mes sens à l'affut. Il y a de la lumière partout, je peux m'en saisir pour mieux écout...
Hein ? Il a dit quoi ? Le blond est le maître-espion ? C'est quoi ce délire ?
Je suis tellement surprise que je manque de tomber à la renverse, cet ascenseur émotionnel vient de me fatiguer d'un seul coup. J'ai besoin de m'assoir. Ça tombe bien, le fauteuil a l'air super confortable. Après m'être assurée que Son'yuch va bien et qu'il ne fait que dormir, je m'assois au bureau, puis j'écoute le type en face, mais c'est comme s'il parlait dans le vide, je ne suis pas vraiment là. J'essaye de faire le point. On était dans le jardin avec Son'yuch, je faisais une pause entre deux lectures de rapport et il voulait jouer. Il est encore en phase de dressage, à chaque fois que j'essaye de le monter ça se finit en cascade dans la fontaine, à part notre première expérience dans l'urgence, on a jamais réussi à trouver notre équilibre tous les deux. Mais je me suis dit, allez, c'est la bonne, j'ai demandé à Son'yuch si je pouvais le monter, il avait l'air motiver, alors on s'est envolés au-dessus de la Volière, on a survolé la Luisante, quelques rues de la Capitale, ça se passait bien, on a pris un peu d'altitude, quitté la ville pour aller faire un tour dans les plaines alentour où c'était plus calme. Là on a vu un truc nous foncer dessus, Son'yuch a perdu l'équilibre, on a commencé à tomber à toute vitesse et puis... le noir.
Le blond se met à nouveau à parler, et cette fois faut que je quitte mon mutisme et ma réflexion pour lui répondre. Je défronce un peu les sourcils, et je me lève en faisant racler le fauteuil sur le tapis.
« Zahria Ahlysh, serg... euh... de la Commission. Pas l'habitude, je viens de changer de poste. »
De couverture, on dit, quand on est honnête. Ce que je ne suis pas.
« Oui, je crois que tu as raison Sileas, va falloir résoudre ses énigmes... On se tutoie, hein ? Vu qu'on est bloqués ici ensemble ? »
Je finis de repousser le fauteuil du bureau, et j'entends un truc tomber par terre. Je me retourne pour voir si j'ai fait tomber quelque chose de ma poche, mais c'est pas ça. Un coupe-papier était coincé entre le dessous du bureau et l'accoudoir du fauteuil, et en dégageant ce dernier ça a fait tomber l'outil doré. Je le ramasse avec précaution, pour m'apercevoir qu'il n'a aucun tranchant. Même pas bon à couper du papier. Je hausse les sourcils, suspicieuse. Je le montre à Sileas, avant de regarder s'il n'y a pas autre chose sous le bureau. Et oui, tiens, c'est quoi ces enveloppes ? Je lis les poèmes incompréhensibles que je trouve à l'intérieur avant de les filer à l'aventurier, puis part inspecter la porte, évidemment fermée, même si je n'arrive pas à comprendre par quel mécanisme, car il n'y a même pas de serrure que j'aurais pu crocheter.
On nous a visiblement enlevé nos affaires, armes et bijoux, compris, mais dommage pour le docteur Cabale, j'ai toujours mes tatouages, et ma magie. Ou pas, d'ailleurs. Je mets un moment avant de comprendre que ce n'est pas que je n'arrive pas à me concentrer pour attraper la lumière qui est en face de moi, mais que la magie est vraiment bloquée. Et merde. On va devoir jouer le jeu, ça veut dire ? Et répondre aux énigmes de ce détraqué ?
Mon Khal Salkhi commence alors à émerger de son sommeil, alors je me précipite vers lui. J'ai remarqué qu'il était plutôt nerveux dans les espaces fermés, et tout ce qu'on veut éviter, c'est une monture volante agitée qui foute encore plus le bordel dans la pièce. Alors je vais vers lui pour lui caresser l'encolure en lui soufflant des mots rassurants, et quand je vois sa queue commencer à se balancer tranquillement, je relâche un peu et me tourne vers l'aventurier.
« T'as trouvé quelque chose ? Tiens, t'avais remarqué ce tableau, là ? Il est pas comme les autres, non ? On dirait qu'il y a des lettres, regarde, dans les blancs... »
Allez, on va jouer.
Et c'est pas peu de le dire. C'est clairement une activité que le blond n'a jamais pratiqué et dans laquelle il n'est que peu performant. Son regard glisse à droite et à gauche, ses pas suivant le même rythme de métronome, cherchant des éléments qui peuvent sortir de l'ordinaire. Et quand l'on cherche sans savoir quoi trouver, tout semble étrange, le moindre bout de papier déplacé devient un signe que l'on suit. C'est ainsi que l'aventurier se retrouve à retourner la pièce tandis que Zahria elle fait un examen bien plus approfondi. Le borgne n'est toutefois pas totalement idiot, et plutôt que de tout laisser sens dessus dessous, il fait des piles pour rapidement pouvoir s'y retrouver. Les poèmes finissent justement sur l'un de ces tas organisés après un rapide coup d'oeil qui prouve à l'homme qu'il ne comprend vraiment rien à l'art, avant d'attraper le coupe papier doré pour se retourner sur le fameux tableau fautif pour l'examiner.
-"Je vois ri... Ah, si tu as raison... "Regardez le soleil", il se fout de notre gueule, y'a pas de soleil, on est enfermés..."
Avec un grognement, Sileas vérifie ensuite la poignée qu'il tient en main. Cet élément lui parle déjà plus, étant donné qu'il se doute bien que le but est de la glisser quelque part plus que de couper avec. Tout en la gardant en main il traverse la pièce, retourne tout. Essaye de plaquer la lame ou de la glisser derrière le tableau, les quelques cadres présents. Rien, nulle peinture ne révèle une boite secrète, nul mécanisme mural. Le blond commence à devenir de plus en plus frustré alors qu'il finit par prendre quelques instants pour souffler longuement, jetant un regard en coin à l'animal. Si ce dernier finit par s'énerver, sans armes il sera difficile de l'arrêter. Heureusement que pour le moment il est plutôt calme.
Finalement, c'est en saisissant une boite à musique que Sileas trouve la solution à ses misères. Sur les cotés de cette dernière, la poignée est manquante tandis qu'un orifice pile en forme de lame y est présent. L'aventurier enfonce le coupe-papier dans le mécanisme avant de commencer à le tourner, laissant résonner dans la pièce une douce berceuse pour enfant. Sans cesser de tourner le mécanisme, espérant que quelque chose se trouve à la fin de cette dernière, il finit par déclarer d'un ton de voix déjà las.
-"Je ne sais pas qui est cet homme, mais il va réussir à me tuer... D'ennui et d'agacement plus qu'autre chose, mais il va réussir. Zahria, tu seras la tête du groupe, je veux bien être les muscles si ça te dérange pas."
Après tout, entre les poèmes -qui sont une énigme ou non ?-, les foutues inscriptions sur le tableau et surement des dizaines d'autres éléments. Non, définitivement, le blond est meilleur pour retourner une pièce et la déménager qu'autre chose. Ne sachant pas si la boite à musique se moque de lui ou non, il force d'un coup sec sur le mécanisme alors qu'il petit déclic se laisse entendre, la petite poupée sur sa plateforme tournante qui accompagnait la mélodie se retrouvant éjectée par un étrange mécanisme, révélant une cavité contenant une petite clé en acier. Cette dernière est présentée à la vraie maître espionne -dont Sileas n'a absolument aucune idée de l'identité-, alors que l'homme reprend ses fouilles de la pièce, à la recherche de la serrure correspondante.
-"Je ne trouve pas la serrure qui correspond à la clé. Soit je suis aveugle, ce qui est fort possible, la moitié du travail à déjà été fait, soit... Je sais pas ? Je présume qu'il faut avancer sur une autre énigme ?"
Non, définitivement, l'homme n'est pas fait pour cela. Pourtant il y met de la bonne volonté. Mais entre son énervement et sa hargne de s'en sortir, et le fait de voir que son cristal de communication ne marche pas, et que cet homme a peut être fait du mal à sa forgeronne préférée, il est difficile de retenir entièrement ses sentiments, surtout dans un tel sentiment d'impuissance. Contrairement à un combat, cette fois il n'y a nulle adrénaline pour le stimuler, pour le purifier de ses peurs et de ses craintes. Nulle créature monstrueuse par sa taille ou son nombre pour titiller son instinct de survie et l'inciter à accélérer le rythme. Juste le froid vide des énigmes et d'une voix ponctuée des rires du savant fou qui les a enfermés ici. Et si cela continue, magie ou non, l'aventurier risque de commencer à briser les meubles plutôt qu'a chercher à les ouvrir de manière légitime.
Tout en calmant Son'yuch, je garde un oeil sur mon camarade borgne. Il a l'air tout aussi agité que mon familier, mais pour le coup, je peux pas lui caresser la tête en lui parlant doucement, ça serait étrange. Il a pas l'air à l'aise, ça doit être un aventurier de terrain, il a dit lui-même que les énigmes n'étaient pas son fort. Pas le moment de lui faire la morale en lui expliquant que parfois les quêtes regorgent d'énigmes anciennes et qu'il va falloir s'y atteler un peu, j'ai d'autres Khal Salkhi à fouetter. N'empêche, dans son agitation et son stress, il est assez méticuleux, et il sépare assez aisément les indices potentiels des éléments de décor juste là pour nous dérouter.
Son'yuch calmé, je m'approche du bureau après avoir entendu ce qu'il y avait sur le fameux tableau qui a retenu mon attention. Regardez le soleil... regardez le soleil... Il n'y a pas de fenêtre donnant sur l'extérieur, il faut peut-être trouver la représentation d'un soleil quelque part dans la pièce. Je fais le tour sans rien trouver, alors que Sileas me fait part de son ennui, et de son manque d'expertise dans la matière. Hé, même moi, maître-espion, je me retrouve pas tous les jours enfermée dans une pièce avec des énigmes étranges, hein. Mais je peux pas vraiment lui dire. Il me présente alors une clé, et on se met à fouiller à nouveau pour essayer de trouver une serrure, sans succès. Je profite de cette petite accalmie où on est tous les deux un peu perdus pour discuter avec mon binôme.
« Hé, Sileas. T'inquiète pas, on va sortir de là. Le gars qui a fait ça doit pas être un mauvais bougre. J'en ai pas mal vu dans ma vie, des illuminés avec des méthodes pas très conventionnelles, et c'est sûr qu'il aurait pu nous demander plutôt que de nous endormir et nous enfermer ici, mais on n'a rien trouvé de dangereux, jusqu'à maintenant. Je sais pas ce qui t'attends dehors, mais ne t'en inquiète pas, ça va aller. En tout cas, c'est pas ce type-là qui va faire du mal à qui que ce soit. S'il avait voulu nosu en faire, il nous donnerait pas des énigmes pour essayer de sortir d'ici, tu crois pas ? »
Je repasse à côté du même endroit pour la dixième fois, c'est un peu embêtant, l'un des cristaux de magie grésille, il doit être bientôt déchargé en magie, le gars qui a créé cet endroit aurait pu le changer avant de... Mais... non... il ne grésille pas, il clignote de façon cyclique ! Ça fait un code !
« Regarde, là ! Le soleil, c'est la lumière ! Regarde, ça fait... 4... 2... 5... 4 ! »
Je retourne vers les poèmes, mue d'une intuition. Si je prends la première lettre du quatrième vers du premier poème, la première lettre du deuxième vers du deuxième, la première lettre du cinquième vers du troisième poème et la première lettre du quatrième vers du dernier poème... mais oui, voilà !
« N-O-R-D. Nord ! »
Mais on a pas de boussole... La carte, la carte, il y avait une carte d'Aryon accrochée au mur avec une rose des vents en bas à gauche. Je m'y précipite avec la clé en main, et là je vois une petite encoche au niveau de la flèche indiquant le nord sur la rose des vents. J'y insère la clé, qui rentre parfaitement, et la fait tourner en sentant une serrure cachée derrière qui se débloque. Une porte cachée s'ouvre alors derrière le tableau, par laquelle on se dépêche de passer avec Sileas et Son'yuch. Pour se retrouver dans une nouvelle pièce fermée. Plus petite, plus sombre. Des fioles étranges sur une table, un grand chaudron. On se croirait dans l'antre d'un alchimiste névrosé. Et la voix qui résonne à nouveau d'un cornet sur la table.
« MOUAHAHAHAHA ! Bravo, Maître ! Vous avez réussi à trouver mon laboratoire ! Mais vous ne sortirez jamais d'ici vivant ! Impossible que vous soyez capables de retrouver la recette de ma fameuse potion de traverse-mur ! Vous allez forcément vous empoisonner avant ! MOUAHAHAHAHA ! »
Euh... d'accord. Je hausse les épaules, et me tourne vers Sileas.
« Bon bah je crois qu'on a plus qu'à fouiller jusqu'à trouver cette recette, hein ? »
J'entends un fracas de verre derrière nous, et me retourne pour vois Son'yuch, tout penaud, une fiole éclatée au sol dans un liquide verdâtre qu'elle devait contenir. Mon familier est trop grand et trop maladroit pour cette pièce, rien qu'avec le battement de sa queue ou en voulant s'étirer les ailes, il risque de casser l'intégralité du mobilier... Je lance un regard désolé à l'aventurier, avant de m'approcher de mon familier pour le pousser à se coucher au sol et à rester calme et immobile. Un exercice plus que difficile, pour lui...
-"Au fond tu as raison, il est soit mégalomaniaque, soit complètement con, soit pas totalement mauvais. Il parle après tout de laisser quelqu'un d'innocent se faire tuer juste pour prouver son "point". Qui est faux, mais on reviendra pas la dessus. C'est surtout que je m'inquiète qu'il puisse s'en prendre à des proches simplement pour assouvir ses idées détraquées... Mais tu as raison. Déjà, il faut sortir d'ici, on s'occupera ensuite de lui."
S'occuper d'une manière définitive, bien sur. mais ça, il faut rester poli. Le meurtre, c'est mal les enfants. C'est pour cela qu'il faut s'assurer de faire disparaître le cadavre et faire cela dans un lieu discret. Mais chaque chose en son temps. Une nouvelle pièce est débloquée, encore plus étrange que la précédente. Cette fois, impossible de retourner entièrement la pièce sous peine de briser les fioles fragiles et les différents outils. Et justement, le familier de Zahria vient de faire exactement cette erreur alors qu'un son cristallin se fait entendre. L'aventurier ne peut s'empêcher de souffler un léger rire amusé, avant de hocher du chef.
-"Bon, si j'essaye de suivre ton exemple, ça va forcément être quelque chose de tordu perdu entre plusieurs grimoires ou sur un jeu de couleurs."
C'est donc le cœur plein d'es... Non pas vraiment. Même si en observant la demoiselle de la Commission il comprend un peu mieux le fonctionnement, le blond lui même ne se fait pas vraiment d'illusions sur ses talents. Examinant les différents plans de travail et les étagères, il finit par faire plusieurs tas. L'un de fioles remplies, l'autre de poudre et le troisième d'objets censés permettre le mélange des deux premiers. A première vue, rien ne saute réellement aux yeux. Il ne faut probablement pas être chimiste pour réussir l'exercice, ce qui rassure un peu Sileas, mais cela ne lui donne pas pour autant la réponse. Finalement, l'homme commence à s'attaquer aux différents ouvrages présents dans la pièce. Certains sont massifs, traitant de mélanges alchimiques, mais sont bien trop longs pour être entièrement lus. L'un d'entre eux semble codé, étant donné que rien n'est compréhensible. C'est justement en poussant ce dernier vers sa comparse pour qu'elle puisse l'examiner que le borgne pose la main sur un carnet.
En tournant les pages de ce dernier, il est entièrement vide. Peut être est-il censé servir pour prendre des notes sur ce qui a été essayé, ou encore simplement était-il la pour être rempli et ce fameux "docteur" n'a simplement pas eut le temps de finir ses expérimentations. Au moins il pourra servir un moment ou l'autre. Avec un soupir, le grognon qui met toutefois de l'eau dans son vin pour essayer de garder son calme et sa contenance finit par siffler.
-"Je sais pas ce que tu en penses, mais quelque chose me dit qu'il va falloir trouver un moyen de déchiffrer ce livre... Ou de trouver des indices dans les autres ? Mais on est bons pour feuilleter quelques milliers de pages si c'est ça."
Réfléchir, essayer de faire parler sa cervelle. Peu à peu Sileas reprend le contrôle de ses émotions, même si cela ne rend pas plus aisé la chose. Autour de la piège, des porte-bougies sont visibles, certains remplis de cire fondus, d'autre avec des chandelles encore fraiches. Au moins ils ne manqueront pas de lumière si jamais celles magiques finissent par arriver à court de magie ou d'énergie. Un petit nécéssaire d'allumage est justement présent à coté de l'une de ces dernières, et pendant quelques instants, l'aventurier se demande si il ne serait pas nécéssaire de brûler les livres... Mais selon les indications de leur bourreau, un mauvais mélange pourrait être empoisonné et mortel, autant dire qu'il n'a guère d'envie de finir par vomir ses tripes au sol... A moins que cette potion passe muraille ne soit qu'un moyen de détourner l'attention et qu'il leur faille créer un acide ? Cela voudrait dire que l'un des murs serait moins épais que les autres, et peut être franchissable avec de la force brute. Beaucoup d'idées et peu de réponses pour l'homme qui se retrouve presque perdu dans trop de pensées, contrairement à peu auparavant.
Je garde une main sur Son'yuch, couché par terre mais prêt à se relever dès que je relâcherai mon attention une seconde, et de l'autre je feuillette les bouquins que me file Sileas, qui a l'air de plus en plus perdu. J'arrête pas de revenir sur ce carnet vide, j'ai l'impression qu'il y a plus que ça. Il y a bien une plume sur l'établi, mais pas d'encre, alors si on s'attend à ce qu'on prenne des notes, je ne vois pas comment... Je pourrais décoder le grimoire, c'est à ma portée, mais il me faudrait un peu plus de temps, ce serait beaucoup plus simple si on trouvait la clé. Il y a toujours un clé à un code, c'est quelque chose que l'on sait bien chez les espions. Car le code sert à transmettre un message d'une personne à une autre, sans que qui que ce soit d'autre ne puisse y avoir accès, et c'est donc la clé qui doit être transmise directement entre l'émetteur et le destinataire...
Assise en tailleur à côté de mon Khar Salkhi, je réfléchis et perd une seconde la concentration sur mon familier, qui se remet à s'agiter, pour aller laper au sol le liquide de la fiole qu'il a explosé.
« Son'yuch, non ! »
Le grand dadet me regarde avec ses yeux larmoyants, pour m'attendrir, et je repose ma main sur sa tête pour l'apaiser, avant de me pencher vers le liquide qu'il vient d'ingérer. A l'odeur, il semble un peu acide, mais pas empoisonné. Ça me rappelle quelque chose... Si j'avais mes pouvoirs, je pourrais l'identifier sans mal, mais là... Je me risque à poser le doigt dedans, et l'amener jusqu'à mon nez, puis ma langue, très doucement... Du citron !
« Sileas, dans la fiole qui est tombée, c'était du citron ! Enfin, probablement de l'acide citrique, mélangé à d'autres choses, peut-être de la menthe, pour la couleur verte... »
Je suis toute excitée, et évidemment, il ne comprend pas pourquoi. Chez nous, les espions, c'est pourtant le b-a.-ba du codage, le moyen le plus courant de transmettre un message (pour peu qu'il ne soit pas trop précieux, car c'est facile à décoder) quand on est à court de méthodes magiques. On écrit avec du citron sur un papier vierge, et le message est impossible à lire, à moins de passer une chandelle devant le papier, qui en faisant chauffer l'acide citrique, fait apparaître le message...
« Du feu, il faut du feu, Sileas ! Tu vas voir, regarde. »
Il allume une bougie et me l'approche, et en tendant le carnet vers lui pour qu'il voit, je passe la chandelle devant la feuille pour faire apparaître les lettres, tout doucement. Bingo. La clé du code.
« Avec ça, on doit pouvoir lire le grimoire maintenant. La recette de la potion passe-murailles, ou je ne sais pas quoi, doit se trouver dedans. Que je sache, une telle potion n'existe pas, mais ça doit être un stratagème pour nous faire avancer vers la sortie, peut-être que quand on aura mélangé les bons produits, une porte s'ouvrira, ou quelque chose dans le genre... »
Je reste au sol près de mon familier, le grimoire et le carnet dans les mains pour décoder en même temps que je lui donne des indications. La recette est simple, les ingrédients sont caractérisés par leurs couleurs, et très clairement, ça ne donnera pas une vraie potion. Sileas s'affaire, mélangeant un peu approximativement les liquides et les faisant chauffer comme je lui indique en suivant les indications à la lettre, et comme je le prévoyais, une trappe s'ouvre dans un mur quand on finit par réussir la "potion". On y passe à quatre pattes, Son'yuch galère un peu plus mais avec un peu d'aide il finit par réussir à traverser le petit tunnel.
Et là, on arrive dans une très grande pièce, très haute. On est d'un côté, sur une plateforme, et la porte se trouve de l'autre côté, sur une plateforme identique. Au milieu, une étendue d'eau. Avec une dizaine de requins saoulards, une intense quantité de Larissa, et une magnifique clé dorée, impossible à rater, en plein milieu des algues.
« Bon, je retire ce que j'ai dit, ce type nous veut du mal, en fait. »
-"Quand je te dis qu'il nous voulait pas du bien. J'espère au moins qu'il nous attend à la sortie avec un chocolat chaud, mais j'ai un doute. Quand à ces foutus requins, j'aurais mon arme je ne dirais pas, je pourrais m'en charger sans réel danger et en récupérant même de quoi nous préparer des filets pour le repas, étant donné que leur viande n'est pas désagréable de ce que j'ai entendu parler. Mais la..."
Le borgne tourne sur la plateforme en réfléchissant. C'est son dada les créatures, et il compte bien servir à quelque chose, au moins une fois dans cette foutue journée. Avec un peu d'imagination et assez de force brute, certains des quelques objets présents pourraient bien servir de lance, ou d'arme contondante. Mais plonger dans l'eau sans équipement et sans objet de pouvoir, et surtout face à des créatures protégeant leur diner... Ce n'est guère une bonne idée, et l'aventurier aimerait bien vivre une autre journée, et si possible avec ses deux bras et ses deux jambes. Il a déjà perdu un œil, c'est pas pour perdre d'autres morceaux auprès d'une créature aussi stupidement ridicule.
Puis l'épiphanie. L'éclair de génie, l'illumination de Lucy. Claquant des doigts il se rapproche de Zahria avant de l'attraper par le bras pour l'attirer avec lui pour retraverser le passage sinueux qu'ils viennent d'emprunter. Nul doute que son animal de compagnie ne sera peut être pas le plus ravi au monde, mais il y'a plus important en cet instant précis. Quand enfin ils arrivent au niveau du laboratoire, Sileas reprend la parole tout en attrapant le premier grimoire, le feuilletant rapidement à la recherche de quelque chose de précis.
-"Plutôt que de prendre des risques, si tu te souviens bien, ce fou parlait de s'empoisonner. Je propose de retourner la situation à notre avantage et de plutôt empoisonner ces foutus requins. Je compte pas réellement respirer ou boire l'eau présente la dedans, donc sauf si tu as envie de te faire une après midi plage intérieure improvisée, je ne pense pas que cela soit particulièrement gênant."
Bon, les pauvres animaux n'ont rien demandé... Mais Sileas commence à sérieusement avoir envie de sortir. Et parfois, un peu de vice ne fait pas de mal. Après tout, si il était réellement maître espion, il ne devrait pas hésiter à utiliser de méthodes aussi basses pour atteindre ses objectifs. Et finalement, en cherchant à deux ils obtiennent enfin une formule qui semble intéressante. Un poison soluble dans l'eau, et assez efficace pour rendre sévèrement malade en quelques gouttes. Plus qu'a espérer qu'ils pourront en préparer assez pour au moins ralentir et affaiblir les requins soulards pour leur permettre de passer cet obstacle gênant. Et c'est justement en fouinant la pièce à la recherche d'absolument tous les composantes qu'ils auraient pu rater pour préparer la plus grande dose de poison possible que quelque chose finit par remonter dans l'esprit de l'aventurier.
-"Par contre, vu la taille d'une telle étendue d'eau intérieure, tu penses que l'on peut être où ? Je doute que ce soit en ville, je doute même que ce soit en extérieur. J'ai l'impression qu'on est dans un complexe souterrain... J'espère simplement qu'il n'y a pas de centaines de pièges qui s'enchainent, sinon il pourrait bien nous tuer d'épuisement à force, et réussir son coup..."
« Probablement des souterrains effectivement. Je me fais la remarque depuis le début qu'il n'y a aucune fenêtre, ce n'est pas anodin. Même si c'est plus le côté anti-magie qui me fait me poser des questions. Personne n'a pu recréer la bulle du palais, et il va sans dire qu'on ne peut pas du tout se trouver en dessous... Il a dû nous droguer, mais j'aime pas vraiment ça. Encore une saleté qui vient du marché noir... Oh tiens, regarde, du diluant. Ça permettra d'augmenter les quantités en gardant plus ou moins la même concentration de poison. »
Mon compagnon d'infortunes a pris le commandement des opérations avec une idée surprenante mais efficace. En entrant dans le laboratoire je ne pensais pas que l'on puisse faire un véritable poison avec ce qu'il y avait là, toute cette histoire me semblait truquée, mais c'est vrai qu'après la piscine de requins saoulards ça remettait pas mal les choses en perspective. Et quand, une fois les pauvres bestioles éliminées, je regarde avec un oeil seulement à moitié lubrique l'aventurier se mettre torse nu pour sauter dans l'eau afin de récupérer la clé, je me dis que finalement, ce n'était pas si compliqué que ça. Le voyant ressortir pour prendre son souffle et replonger pour enfin ramener la clé, je ramasse les affaires qu'il a laissé de notre côté pour les mettre sur Son'yuch, alors que Sileas se met à nager vers l'autre rive sans lâcher l'outil de notre salvation.
« Allez mon grand, tu voles jusque là-bas, et moi je te rejoins à la nage, d'accord ? C'est pas trop le moment pour un exercice de vol, j'ai pas envie que tu tombes à l'eau et que tu boives le poison par erreur... Faut juste que tu ramènes les affaires de Sileas. »
Mon familier s'ébroue, il penche sa tête et ses grands yeux curieux me fixent d'un air perdu. Je lui réexplique tout doucement, mais il recule, sa queue battant violemment l'air.
« Il ne faut pas avoir peur, ça va aller, tu peux le faire Sony... »
Mais le voilà qui recule à nouveau, acculé contre le mur. Il me donne des coups de tête en me faisant signe de regarder son dos, mais je refuse de monter, c'est trop dangereux. C'est quand j'entend Sileas, sorti de l'eau de l'autre côté, m'annoncer que la porte est ouverte, que je décide de faire confiance à mon familier et monter sur son dos.
« Ça va aller, on ne va pas tomber, et tu vas réussir à atterrir... »
Une fois que je suis en place, Son'yuch s'élance et s'envole au-dessus de l'eau empoisonnée, se laissant simplement glisser en l'air. Un ou deux battements d'ailes sont tout ce dont il a besoin pour traverser la pièce, planant tranquillement jusqu'à l'autre bout, et je me détends quand ses pattes se posent délicatement au sol, tout près de Sileas.
« On a réussi ! On a volé ! »
On a surtout plané sur une courte distance, mais on va dire que pour l'instant, c'est pas mal. Peut-être que j'étais trop gourmande sur les exercices des dernières fois, avide de pouvoir voir le monde d'en haut... Je ne comprends que maintenant que le dressage de mon Khar Salkhi doit se faire en douceur et avec patience, malgré le fait qu'on soit tous les deux des casse-cous irrécupérables. Après une dernière gratouille entre les oreilles de Son'yuch, je descends et rends ses affaires à Sileas, avant de poser mon regard sur l'entrebaîllement de la porte. Un long corridor taillé à même la pierre, illuminé par quelques torches, qui remonte en pente douce. Voilà qui semble affirmer le fait que nous sommes dans un souterrain, en tout cas.
On s'engouffre dans le tunnel et on avance en silence, guettant le moindre bruit, mais ce n'est pas avant cinq bonnes minutes qu'on commence à entendre le son du vent et des gazouillis d'oiseaux. On arrive à la surface, c'est sûr. On finit par arriver devant une nouvelle porte, fermée mais pas bloquée, cette fois-ci, et après avoir actionné le levier on se retrouve dans une pièce qui pourrait être l'arrière-boutique d'une épicerie ayant été vidée de ses stocks. Les étagères poussiéreuses, le bureau avec un vieux boulier cassé, les gardes-mangers à grillage... Deux petites fenêtres de chaque côté nous donnent enfin un peu de lumière, et on trouve dans deux coffres l'intégralité des affaires qui nous manquaient. Sur le bureau, un nouveau cornet se met à grésiller, et la même voix que les deux précédentes fois se laisse entendre.
« Ha-ha-ha ! Vous avez vaincu toutes mes énigmes, Maître-Espion ! Vous n'êtes peut-être pas si nul que je le pensais ! Mais le Docteur Kab-hale ne se laissera pas attraper aussi vite ! Une chose est sûre, on se reverra, tous les deux ! Je sais où tu habites maintenant ! Vous pouvez désormais récupérer vos affaires, boire l'antidote à la potion anti-magie qui est dans la fiole posée sur le bureau, et me laisser un avis sur mes énigmes dans le livre d'or à la sortie ! Merci d'avoir participé à mon petit jeu, et à très bientôt ! »
Je laisse échapper un "Aaaah... Kab-hale, pas Cabale..." presque inaudible, et amusé. Ce type a dû lire le bouquin que ma cousine Pariza a publié il y a peu avec les informations que je lui ai données. Mais Sileas a pas du tout l'air rassuré par cette idée qu'un type un peu fou sache où il habite, et moi de mon côté je sais que je peux pas le laisser traîner dans la nature. J'avale l'antidote et j'ouvre la porte qui nous mène à une boutique désaffectée, et de là, à la sortie. On se trouve au beau milieu de nulle part, dans un de ces rades qui se trouvent sur les routes entre les villages. Il doit certainement y avoir une ou deux chambres à l'étage, cet endroit devait servir d'auberge et de lieu de réapprovisionnement pour les longs trajets. En regardant un peu alentour, je vois les contreforts des montagnes d'un côté, et la forêt de l'autre.
« On ne doit pas être loin de la Forteresse, Sileas. On devrait s'y rendre, tu as dit que tu étais de là-bas, non ? Si ce type sait vraiment où tu habites, et qu'il a l'intention de recommencer comme il l'a laissé entendre, il suffit de lui tendre une embuscade et le cueillir chez toi. Je m'occuperais de le ramener à la Garde. »
En tant que véritable Maître-Espion, je ne peux pas laisser ce genre d'énergumène traîner dans la nature, de toutes façons. On se met donc en route d'un pas affirmé. Rapidement mon cristal de communication se met à tinter furieusement, et je comprends que mon absence a inquiété pas mal de monde. Normal. Je m'éloigne un peu de Sileas pour rassurer qui de droit et assurer que je serais de retour le lendemain. Avec un prisonnier. Peut-être un peu optimiste, mais bon, on va essayer d'être efficaces, hein.
-"On semble pas loin, dès qu'on aura pris un peu de hauteur ou rejoint une route un peu plus conséquente je pourrais facilement nous repérer. Et oui il faut l'arrêter... Je n'arrive pas à comprendre si c'est un simple jeu, un moyen de s'entrainer pour essayer d'un jour capturer le vrai maître espion et perfectionner avant son piège sur des innocents, ou un vrai jeu pervers pour tuer, mais on ne peut pas droguer les gens pour leur faire faire ce qu'on souhaite."
En finissant de parler, l'aventurier peut jurer avoir la nuque qui lui gratte, la où le dard l'a frappé, du moins pense-il. Surement un simple effet de son esprit qui essaye de compenser pour la situation. La route du retour est tout ce qu'il y'a de plus ennuyeuse, si ce n'est les régulières communications de sa comparse. Sileas ne cherche pas à savoir ce qui l'occupe ainsi, après tout, elle ne s'isolerait pas si c'était public, et chacun à ses secrets. Et ils ne sont pas si loin de la Forteresse que cela. Trois bonnes heures de marche, mais au moins ils peuvent y arriver avant la tombée de la nuit. Après une rapide communication avec la forgeronne, l'aventurier apprend avec soulagement qu'elle est absente quelques jours de la Forge pour des affaires personnelles, un contrat il semblerait. Un soupir échappe de ses lèvres alors qu'il finit par observer sa partenaire de crime.
-"J'habite chez quelqu'un à une bonne heure de la Forteresse. Et si ma mémoire ne me fait pas défaut, j'ai été enlevé en étant... A la Forteresse justement. Donc je ne sais pas pour toi, mais je pense que je vais prendre une chambre dans une auberge, étant donné que celle qui possède l'habitation n'est justement pas la et ne craint rien."
La femme semble d'avis à le suivre. Quitte à dormir dans un lit, autant qu'il soit confortable. Rapidement le borgne les guide donc vers une belle petite taverne possédant une écurie -après tout il faut bien ranger ce gênant familier quelque part, et il risque pas de tenir sur un tapis-, avec des chambres confortables et un repas délicieux. Les deux derniers éléments sont importants alors que le borgne embarque cette pauvre Zahria pour manger histoire de se redonner du cœur, et essayer de passer un meilleur moment qu'après avoir été enlevé.
Bien sur, si l'aventurier essaye d'avoir une conversation légère, il ne peut s'empêcher de parfois la rapporter sur leur fameux Kab-hale. Sur comment le capturer, le retrouver. Après tout, lui même n'a aucune idée de ce qu'il s'est passé ni même de son apparence. Et se balader au hasard en espérant tomber sur quelqu'un qui drogue les gens pour les enlever n'est guère productif. Finalement, c'est bien l'espionne -pardon, la membre de la commission- qui avait raison quelques heures plus tôt. Si il a su les trouver une fois, il faut espérer qu'il veuille les retrouver une seconde pour leur poser quelques questions, si il n'est pas si mauvais. Autrement... Eh bien, il va réellement falloir traquer ce docteur génial ou quoi qu'il se dise encore, pour l'empêcher que les prochains ne finissent par réellement s'empoisonner ou se faire dévorer par des requins, ou ce qui deviendra leur remplacement.
-"En tout cas heureusement que tu étais la, j'aurais au moins appris des choses sur le fonctionnement d'une énigme. Même si j'espère sincèrement ne jamais finir dans une telle situation à nouveau. C'est clairement pas ma tasse de thé. Et quand même, j'aurais bien aimé pouvoir gouter à ces fameux requins soulards, je suis sur qu'ils ont bon gout."
Finalement, le ventre revient toujours dans la conversation, même après un bon repas. Repas qui mène peu à peu à la soirée et à leur besoin de prendre du repos. Enfin du moins pour l'aventurier, qui a clairement besoin de dormir un peu et de passer cela avec un oreiller moelleux. Demain arrivera bien assez vite, et avec un peu de chance, la capture de leur étrange hurluberlu suivra bien rapidement. Après tout, Sileas pourrait faire un excellent appât. Il se voit bien dans la foule, il est grognon, et si le Docteur veut se vanter de son génie et de ses bonnes trouvailles, il pourrait être parfait en victime un peu conne qui se laisse duper.
Il est sympa ce Sileas, c'est un bon gars. On passe une presque agréable soirée, et en d'autres temps, je l'aurais ouvertement dragué. Mais bon, il a l'air de beaucoup aimer sa compagne dont il parle à demi-mot, ça doit être le genre fidèle, et puis moi j'ai d'autres choses en tête là, tout de suite. Comme la suite des opérations. Parce que bon, il est bien gentil d'avoir accepté de servir d'appât, mais si je peux éviter de le mettre en danger pour rien, ou surtout, sans rien savoir, je préférerais. Tain, je deviens vachement raisonnable, avec l'âge. A la longue, je vais même finir par faire un bon Maître-Espion, si ça continue.
On monte dans nos chambres, et j'attends d'être bien sûre qu'il soit bien en train de dormir pour sortir de la mienne silencieusement, et descendre aux écuries. Je réveille Son'yuch en lui faisant signe de rester silencieux, et je vois sa queue s'agiter sous l'excitation alors qu'il me suit en sautillant gaiement vers la forêt. Je me saisis ensuite de mon cristal pour m'assurer que le plan suit son cours, et après avoir discuté calmement un moment avec mon familier, me décide à monter sur son dos pour le faire décoller.
Ce n'est pas comme les autres fois, on dirait qu'on a trouvé une forme d'équilibre dans la caverne avec la piscine, et on reproduit plus facilement nos positions et ces mouvements. Son'yuch évite de faire des pirouettes ou de vouloir aller trop vite, planant autant que possible, et ça permet de comprendre comment je peux me placer, le diriger, où positionner mes mains et mes jambes pour que notre coordination soit optimale sans que je le dérange dans ses mouvements. On vole une dizaine de minutes avant d'arriver à notre destination, l'épicerie abandonnée qu'on a quitté quelques heures plus tôt avec Sileas. Je ne pouvais décemment pas enquêter avec l'aventurier qui était là, et j'ai dû attendre de ne pas éveiller les soupçons pour le faire.
On atterrit tout en douceur avec Son'yuch, pour retrouver Plume qui nous attend sur place après avoir mené une première fouille de l'endroit. Je l'ai prévenu dès qu'on est sortis, et comme il se trouvait au manoir de la Forteresse avec deux recrues, il a pu les laisser pour la soirée et se dépêcher d'arriver ici alors qu'on faisait tranquillement la route avec Sileas. Il me fait un compte-rendu de ce qu'il a trouvé, et on redescend ensemble dans les cavernes pour chercher d'éventuels derniers indices qui nous auraient échappés. En tout cas, en passant d'autres coups de fils cristalliques vers le QG à la Capitale, Feuille faisant le relai avec nous depuis les Archives, on parvient à trouver à qui appartient le bâtiment, et on comprend même comment il a pu faire venir des requins saoulards dans leur eau de mer jusqu'ici.
Gertran Buchou, le gars qui a racheté cette ruine il y a quelques lunes, est un entrepreneur spécialisé dans l'import-export, il tient une petite société de charrette qui transportent à la demande toute sorte de matériel à travers le pays. Et il se trouve qu'il vient à la base d'une famille de circassiens maintenant fauchés, et Feuille découvre en fouillant un peu qu'il a essayé par plusieurs fois de ranimer le cirque mourant de sa famille, en utilisant des méthodes pas toujours très honnêtes pour attirer le chaland. C'est un homme visiblement passionné du milieu du divertissement, mais qui a raté sa vocation par manque de talent et en se liant à de mauvais contact. Est-ce qu'il a essayé ici de faire une nouvelle expérience d'amusement, c'est probable, mais c'est les méthodes encore une fois qui sont condamnables.
Un nom, un mobile, des méthodes, on obtient même une adresse. A la Forteresse. A la bonne heure. On a tôt fait de repartir, Plume et moi, sur le dos d'un Son'yuch tout excité de participer à sa première mission, pour aller frapper un peu violemment à la porte de Gertran Buchou. Qui avoue tout sur le moment. On trouve même un carnet de notes avec sa réflexion sur les énigmes, les fioles de potions endormissantes et anti-magie, et les dards utilisés pour les inoculer. Presque trop simple, mais bon, une affaire rondement menée, hein. Je dépose le bonhomme à la Capitale d'un coup de portail de téléportation, il est récupéré par Feuille qui va me le cuisiner pendant quelques heures, et Plume retourne s'occuper des recrues.
L'aube se lève tout juste quand Son'yuch et moi arrivons à l'auberge où on est censés avoir passé la nuit. Le Khar Salkhi s'endort immédiatement, épuisé, quand je ferme la porte de son box, et moi j'ai à peine le temps de passer à ma chambre pour me débarbouiller et me changer avant de descendre rejoindre Sileas au petit déjeuner. Je lui explique quand même que la veille, parmi les coups de fil que j'ai passé, j'ai fait un signalement à mes collègues de la Garde sur cet endroit où nous étions, et qu'ils m'avaient dit avoir déjà une piste sur un gars, et qu'on en saura probablement plus quand on arrivera à la Forteresse.
Et effectivement, mon balai parfaitement orchestré arrive à sa fin quand on passe les portes de la Forteresse et qu'on est alpagués par une escouade du Blizzard qui vient nous expliquer que Gertran Buchou a été appréhendé ce matin, et qu'il a tout avoué. Quelle aubaine. Je souris à Sileas, le rassure en lui disant que tout est bien qui finit bien, et là, mon cristal de communication se met à tinter. Je m'éloigne un peu pour prendre l'appel, si bien que Sileas ne doit pas entendre le "Ombre." qui commence ma communication avec Feuille. Par contre, je n'ai aucun doute que les mots suivants sont dit suffisamment fort, et que je ne suis pas assez loin, pour qu'il puisse bien les entendre.
« Buchou s'est échappé. »
Et merde.