Dame Tanner. Si vous saviez comme j’ai pu vomir ce nom. Je vous jure, j’ai tout fait pour ne pas me retrouver dans les emmerdes. Mais lorsqu’on déroule le tapis rouge, vous faites quoi ? Quand tout vous pousse, vous y aller, hein ?
Au début j’ai dit que je m’en foutais. Puis j’ai dit que ça me regardait pas. J’ai fini par écouter quelques infos puis à la fin je savais tout ce qu’il y avait à savoir. Et pourquoi je dis que TOUT m’invitait à agir ? Bah la maison Tanner, j’ai passé 3 ans devant à vendre mes bricoles, je la connais par cœur !
Et le pire… C’est que c’est même pas ce que vous croyez. Sauf que y’aura personne pour me faire confiance sur ce coup-là.. Alors... Faut SURTOUT PAS que je me fasse pincer…

Comment on en arrive à ça ? J’ai tout planifié. Je me suis installée devant, lorsque le crépuscule tombait, je comptais les ombres aux fenêtres pour avoir une idée des rondes et des relèves. Puis j’ai copiné avec quelques cuistots pour pouvoir me faire inviter en cuisine. Et de là, j’ai laissé trainer mes oreilles. Tous les midi, à 11h, avant le repas des nobles, les majordomes mangent en cuisine. Et ils parlent de tout, les majordomes ce sont eux les vrais maitres de la maison. Alors j’ai appris pour certains types de pièges, pour le collier, pour la dispositions et l’emplacement d’un grand nombre de choses. Puis j’ai préparé mes points de sortie. Le reste, c’était au talent.

Arrive le jour J. Je n’ai pas toutes les infos, je n’ai pas tous les plans, mais j’en sais bien assez pour éviter les risques les plus gros. J’attend que la nuit tombe. J’utilise mon premier cycle de téléportation pour monter sur le toit et j’use de ma taille menue pour me glisser dans la cheminé la plus grande -celle de la cuisine. La chose est simplement impossible sans un don de téléportation. Bien sûr, la cheminé est grillagée. Mais je laisse tomber une petite mèche enflammée jusqu’au bas… Et hop ! Je me transfère droit dans la crémaillère !

A cette heure-ci, les cuisines son vides, bien sûr. Je sors de là et je me faufile. C’est là que commence la vraie fête. Ce manoir est truffé de pièges et de gardes. Des fils tendus, des miroirs mettant en pleine lumière les intrus, des portes tellement mal délimitées que lorsqu’on les franchit, on est plus capable de les dissocier du mur. C’est un vrai parcours du combattant. Mais j’ai l’œil et le geste pour ça ! La Lily se déplace avec agilité et prudence. Elle pose à peine le pied par terre, ou parfois sur les murs. Ses mouvements ressemblent à ceux d’une biche : jamais d’arrêt, c’est un élan continu, une parfaite maitrise du déplacement qui s’adjoint à un esprit acéré. La puissance de l’intuition liée à ma philosophie martiale. Le tout me permettait d’avancer de façon plutôt fluide et rapide.

Mais sans pratique un don n’est rien qu’une sale manie. Je ne suis pas une cambrioleuse, je ne suis pas une criminelle. Je n’ai pas de vue d’ensemble. Deviner un piège tendu ? Jamais. Pas à un seul moment. Je ne réalisais pas qu’il se produisait exactement ce que je voulais éviter. Ce chemin de pièges factices n’avait pas pour but de m’emmener loin du collier mais au contraire, de m’y faire rendre. Et c’était pas du tout mon objectif.

… Quoi ? Vous en doutez ? Ce collier il ne m’intéresse pas ! Il pourrait me rendre assez riche pour vivre 1000 vies ? Non mais…. VOUS PENSEZ QUE JE PEUX REVENDRE UN TRUC COMME CA ?! Se balader avec un machin du genre c’est la promesse d’avoir tous les gardes sur le cul, tous les receleurs aussi et absolument aucun plan pour changer ce bijou d’emmerdements en cristaux sonnants et trébuchants ! C’est gravé dessus que c’est un objet rare.
Non. Au moment ou j’entrais dans la salle du collier, mon sac était plein de chandelier d’or ou d’argent, de sabliers ouvragés, de bibelots brillants… Une fortune pour moi à la revente, mais du presque rien pour la maison Tanner. Seulement voilà, en entrant dans cette salle que je voulais par tout éviter, j’eu une idée lumineuse : si le collier disparaissait, personne ne se concentrerait sur mes petits larcins de rien du tout ! Et s’il disparaissait pas longtemps, on oublierait tout le reste !

J’inspirais à fond. La chambre des Tanner. Personne dans le lit, tant mieux. Sans doute pour des raisons de sécurité. Je me mis lors à courir. La parfaite ligne droite, dans un élan continue. A la probable surprise de celle que je n’avais pas du tout vue, je passais même sur une trappe... Sans l’activer. Cette technique, en théorie, permettait de courir sur l’eau. Moi j’en étais loin. Mais ça suffisait à déjouer quelques ruses. Je passai à côté du présentoir, fauchai le collier, amorçai un virage sans même ralentir… Et c’était là toute la beauté de l’escamotage. Je pris appui sur le baldaquin du lit Tanner pour rebondir. Et laissais le collier là.
L’astuce ? Les baldaquins étaient éclairés de lustres à cristaux. Certains émettaient de la lumière, d’autre la réfléchissaient. En laissant là un collier de diamants et de rubis, j’étais sûre que personne ne le trouverait avant l’entretient des lustres, soit au matin minimum. Pourquoi sure ? Parce que les gemmes allaient refléter la lumière elles aussi ! Donc si quelqu’un avait l’idée farfelue de fixer un lustre, il ne verrait que la lumière diffractée ! La super cachette pour faire paniquer tout le monde et les rassurer au premier coup de plumeau ! Le mouvement avait été furtif, naturel, glissé dans cette démarche et surtout, conclu par un retour proche du coup. Pour tout spectateur présent, j’avais juste glissé l’objet dans mon sac !

Et là.. « AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH ! AAAH ! Aaah.. ! » UNE MAIN ! Surgie de nulle pars qui me chope le bras. Je sursaute si fort que je manque de tomber, faisant basculer en arrière ma capuche et mon cœur loupe quelque battement avant de battre si fort que j'en ai des vertiges. Je distingue alors vaguement mon agresseur, sa prise ferme.
A cet instant, tout s’écroule. Puis à la même vitesse, tout se réactive : fuir. Il faut s’échapper. Si je me fais pincer, je suis bonne pour la prison ! Voilà comment je me retrouve dans la merde pour un vol que j’ai (presque) pas commis mais si peut innocente que même moi j’avais du mal à croire à ma bon dieu d’histoire. Je lève la main, vive et tranche de biais. La prise est simple et en temps normal, je m’exposerais à tout un tas de contre-attaque. Voilà pourquoi « elle » me lâche, certaine de m’avoir. Mais à ce moment-là… POUF ! Je disparais dans cette aura bleutée puis réapparais à côté de la fenêtre. Sans un regard en arrière je saute sur les toits et me met à courir. Mais pas que ! Ma poursuivante verra vite que le terrain a été préparé. Une planche ici, une échelle là et bien sûr, je fais tout tomber derrière moi.

Il réside alors en mois un unique et grossier désavantage : rien ne s’est passé comme prévu. J’aurai pas dû arriver dans cette salle, j’aurai pas dû me faire pincer. J’aurai pas du me faire suivre sur les toits. J’aurai du balancer mon sac plein de ferraille riche.. Je suis maladroite, hésitante. Loin du calme et de la maitrise d’avant : je saute de toit en toit avec le ventre noué. Je suis morte de peur. Et voilà qu’il pleut, faisant glisser mes sandales si peu adaptée pour le chaume ou l’ardoise. Ou je glisse ou je sens les foins m’écorcher la peau. Mais je me ferai pas choper ! Fidèle au plan, je sens bientôt la cheminée du boulanger, déjà éveillé, qui prépare son pain. Il me faut l’atteindre, puis ce sera un angle à 90 pour arriver dans les bas quartiers, là ou le ruelles sont foules et les toits, inégaux et biscornus. Mon royaume... !