Un soir où elle rentrait de l’Académie après une journée bien chargée, elle entendit des gémissements de douleurs sortir d’une ruelle. A l’heure qu’il était, entre chien et loup, Néréa se fia plus à son ouïe qu’à sa vue pour retrouver l’animal ou bien l’humain… Les gémissements aigus ne lui permettaient pas de faire la différence.
Malgré sa proximité, elle ne distinguait qu’une silhouette en boule dans un coin derrière un abri. Elle trouva de quoi l’éclairer à l’angle d’une maison voisine et découvrit avec horreur un bouflonnus blessé en de multiples endroits.
Elle marqua un temps d’arrêt pour essayer de répertorier les blessures sans toucher l’animal tout en se remémorant les connaissances qu’elle avait sur cette espèce. Elle en eut rapidement fait le tour pour la simple et bonne raison que c’était la première fois qu’elle voyait un bouflonnus en vrai. La jeune vétérinaire n’avait lu que quelques articles sur le sujet, la majorité traitant de la disparition d’une grande partie des spécimens. A cet instant Néréa se maudit pour n’avoir pas fait plus de recherches.
Ne sachant pas comment déplacer l’animal seule, elle courut chez elle pour récupérer du matériel pour réaliser les premiers soins ainsi que des anti-douleurs. Elle passa le reste de la nuit à veiller son patient, trop faible pour être déplacé, même avec de l’aide. Néréa n’osa pas non plus le laisser une nouvelle fois de peur qu’il ne survive pas pendant son absence. Elle l’embrassa de longues secondes sur le front pour tenter de le soigner avec son don mais en vain, certaines des blessures étaient trop graves. Après plusieurs heures d’agonie, Néréa fut impuissante à le sauver et dû regarder l’animal mourrir. Ce fut un choc pour la jeune femme. Le bouflonnus était le premier patient qu’elle perdait depuis son entrée à l’académie.
Après avoir passé deux jours à se morfondre, Néréa décida qu’il était temps d’agir. Elle ne pouvait pas rester là indéfiniment, à attendre que les choses bougent toutes seules. En bon rat de bibliothèque, Néréa commença par chercher plus d’informations dans les livres. Déçue du manque d’aide que lui apportaient les ouvrages, une idée lui vint à l’esprit : Ralia. Elle s’empara d’une feuille et d’un crayon et rédigea un billet à l’intention de la garde-chasse. Leur rencontre ne datait que du mois précédent mais elle espérait tout de même que celle-ci réponde favorablement à sa requête. Ralia avait fait forte impression à Néréa qui pensait que pour aider des animaux, la jeune femme ne la priverait pas de son aide.
Bonjour Ralia,
Je viens de voir mourir un bouflonnus parce que je ne savais pas comment le soigner. J’aimerais pouvoir en étudier un à l’état sauvage pour ne pas que cela se reproduise. Peux-tu m’aider à en trouver un ?
Je me mets en route dès aujourd’hui en direction de l’arbre sacré. J’espère que tu auras ce message avant mon arrivée et que tu accepteras de me voir. Je t’attendrais à l’endroit de notre rencontre.
Néréa inscrivit rapidement la date du jour avant de signer et glisser le papier dans son enveloppe. C’est à ce moment-là qu’elle s’aperçut qu’elle ne connaissait pas le nom de Ralia. Tant pis, elle n’écrirait que son prénom et l’adresse du seul lieu de rencontre des garde-chasse dont elle avait connaissance.
Quelques heures plus tard, le courrier était envoyé, ses bagages prêtes et d’un pas décidé, elle sortit de la capitale. Néréa refusait que le cas du malheureux ne se reproduise. Pour cela, elle devait acquérir les compétences nécessaires. Si la virtuose ne pouvait les acquérir depuis sa bibliothèque alors elle irait sur le terrain, au diable son inconfort. Et puis, finalement son précédent voyage s’était plutôt bien passé et Ralia lui avait été d’une grande aide.
Après avoir vécu le même périple de plusieurs jours qu’auparavant, Néréa arriva devant l’arbre sacré. Elle avait mieux dormi dans les auberges, qui ne lui paraissait plus aussi bruyantes et inconfortables, cependant elle était nerveuse. Elle avait peur de devoir se débrouiller seule pour trouver un spécimen à étudier. Elle se promena autour de l’arbre pour se focaliser sur autre chose, espérant voir à nouveau le dragon de cerisier qu’elle avait soigné, tout en attendant de voir si Ralia allait la rejoindre.
Alors, mise à part Agneta... D'un autre côté, il n'y avait aucune adresse sur le papier, qui lui avait d'ailleurs été remis en main propre. Enfin, en y repensant... Si, il semblait que quelque chose avait été inscrit à l'endroit destiné à recevoir l'adresse de destination. Qui avait probablement été effacée pendant le trajet. C'étaient des choses qui arrivaient... Son nom de famille non plus n'apparaissait pas, et ne semblait, lui, pas avoir été effacé, mais plutôt, il semblait qu'il n'avait jamais été là. Mais cela n'avait pas ralenti l'expédition: après tout, au Village Perché, presque tout le monde savait que Ralia était la femme un peu bizarre qui ne savait pas s'intégrer, semblait toujours avoir la tête ailleurs, et, surtout, vivait visiblement dans les arbres.
Enfin. Il était temps de s'intéresser au contenu de la lettre. À sa lecture, il était évident qu'elle en était bien la destinataire... Sa prise sur le papier se resserra un instant à la mention de la mort de l'animal. Pour elle, la mort d'un animal était synonyme d'échec. Et, visiblement, l'auteur de la lettre partageait son avis. Il s'agissait probablement de la vétérinaire avec qui elle avait récemment collaboré pour le bénéfice d'un dragon de cerisier tout sauf coopératif.
Enfin. Le lieu de rendez-vous était l'Arbre Sacré. Il fallait donc s'y rendre. Qui savait combien de temps durait le trajet depuis la Capitale ? Probablement autant de temps que celui qu'il avait fallu à la lettre pour trouver sa destinataire. Alors, si elle partait immédiatement, elle pourrait arriver en même temps que... Qu'était-ce, déjà ? Néréa ? Et si elle passait par les arbres ? Aucun doute que cela lui permettrait d'aller plus vite et de prendre le temps de l'observer un peu avant de se montrer.
Aussitôt pensé, aussitôt fait. Elle se saisit de la branche la plus proche de sa position, et, ainsi, sautant de branche en branche, tel un écureuil, elle mit peu de temps pour arriver au lieu de rendez-vous. Néanmoins, une clairière la séparait de sa destination. Elle dut donc regagner le sol... Où elle s'amusa à rester le moins longtemps possible, rejoignant les branches de l'Arbre Sacré dès qu'elle l'eut rejoint. Et non, quoi que puissent dire les plus religieux de ses sembables, elle ne le profanait pas ! Hors de question qu'elle laisse qui que ce soit le dire, ou même l'insinuer ! Après tout, c'était bien en s'adonnant à cette escalade qu'elle avait pu trouver le dragon, lui permettant ensuite d'être soigné, même si cela s'était fait contre la volonté du principal concerné. Et puis, même si elle ne connaissait pas grand-chose aux plantes, Ralia savait les respecter, et ne cassait jamais de branche lors de ses escapades dans les hauteurs.
Bientôt, un bruit en contrebas attira son attention. La demoiselle aux cheveux de feu était arrivée au rendez-vous. Ralia se félicita d'avoir choisi l'itinéraire semi-aérien, autrement, elle n'aurait probablement pas réussi à arriver la première. Elle observa donc son ancienne complice tourner autour de l'arbre, légèrement moqueuse. Après tout, elle devrait se souvenir des difficultés que lui avaient causé l'amour de l'accrobranche de Ralia... Mais non, visiblement, les humains ne savaient pas apprendre de leurs expériences passées.
Elle la laissa tourner un moment, puis, décidant de stopper là son calvaire, elle descendit pour arriver doucement devant elle :
- Bonjour ! Voyons, la dernière fois n'a pas été suffisante pour t'apprendre que quand on me cherche, il faut plutôt regarder là-haut ?
En disant ces mots, elle pointait les branches.
Rapidement, elle en vint au fait :
- Alors. Le bouflonnus. Honnêtement, je ne sais pas si on en trouvera. Tu en as vu un récemment, j'aurais tendance à penser que tu as eu ta chance, on n'en trouvera probablement pas. Mais je pense connaître quelqu'un...
Puis, sans prévenir, elle activa son pouvoir, fermant les yeux pour ne pas être perturbée par son environnement réel alors qu'elle se concentrait sur la vision... Qui n'apparut pas. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, on pouvait la voir perdue.
- Je ne comprends pas... Pourquoi ça ne marche pas ? Je pense bien le connaître, pourtant... Ou alors !
Soudain, elle eut une inspiration. Fen... Cela ressemblait quand même beaucoup à un surnom. Mais alors, quel serait son vrai nom ? Elle fit signe à sa comparse :
- Je vais réessayer, je pense vraiment que la personne que je cherche pourrait nous trouver le bouflonnus... S'il y en a un dans le coin. Mais il faut attendre une dizaine de minutes, donc je te propose de tenter dans une direction... De toutes façons, même si je tentais de pister quoi que ce soit, il y a trop de passage ici pour trouver quoi que ce soit. Sans compter que je n'ai que des bases... Mais ! Des bases...
Des bases... inculquées par quelqu'un qui semblait avoir un Fenrir dans sa famille. Alors... Peut-être...
Quoi qu'il en soit, elle entraîna la demoiselle dans une direction aléatoire, puisqu'elle devait de toutes façons attendre.
Et, lorsque le délai fut écoulé, elle réactiva son pouvoir, cette fois avec ce nom complet... Bingo ! Cette fois, ça marchait. Et... Sérieusement ? Il se croyait en vacances, ou quoi ? Avec le hamac, et tout... Enfin. Elle devait se concentrer sur l'environnement, ne sachant pas combien de secondes il lui restait, elle devait noter mentalement tout ce qu'elle pouvait voir.
Lorsque la vision se dissipa, elle savait à peu près où aller. Et elle devait éviter les arbres, pour que Néréa puisse la suivre. Alors, elle prit la direction qu'elle pensait être la bonne, tout en lançant à sa comparse :
- Je l'ai trouvé ! Et... Je crois que j'ai moyen de m'amuser un peu !
Dans la foulée, elle sortit sa lame, longue, fine et tranchante, qu'elle dissimulait en tous temps dans sa botte, puis l'observa d'un air espiègle. Puis, pendant le trajet, elle se mit à bavarder sans vraiment réfléchir :
- Lui, j'adore le faire tourner en bourrique, je suis sûre que tu le verras ! Et pour toi, ne t'en fais pas, je ne connais pas de meilleur pisteur... En fait, je n'en connais pas beaucoup, mais bref !
D'un coup, l'armure de froideur qu'elle s'était construite avait fondu. Alors... Etait-ce ça, avoir une amie ? D'abord, était-ce ça, juste une amie ? Quelqu'un avec qui plaisanter sans crainte ? Non, cela ne pouvait pas être aussi simple. Elle était simplement impatiente de torturer une fois de plus sa victime préférée. Et il se trouvait que cette humaine avait eu la malchance de se trouver là au pire moment. Voilà. Rien de plus.
Elle ne sut absolument pas combien de temps elles avaient marché lorsqu'elles finirent par retrouver le fameux Fenrir. Elle se retint de rire lorsqu'elle remarqua qu'il n'avait pas bougé depuis sa vision. Ou alors, il avait bougé entre-temps, mais avait repris exactement la même position avant qu'elles n'arrivent. Et, par chance, elles étaient arrivées du côté de sa tête. Ce qui signifiait qu'ainsi, restant oisif dans son hamac, il ne pouvait pas les voir... Faisant signe à Néréa de ne pas faire de bruit, elle s'approcha... Et, d'un coup sec, pour profiter de toute sa surprise, elle trancha le fil qui le retenait à l'arbre le plus proche.
Néanmoins, elle n'était pas un monstre. Aussi, après lui avoir juste laissé le temps d'avoir peur, elle vint soutenir sa tête avant qu'elle ne heurte le sol. Il ne manquerait plus qu'il s'assomme, elles avaient besoin de lui !
- La sieste est finie, Monsieur le cachottier ! Au boulot ! Quelqu'un ici a besoin d'aide.
L'espace d'un instant, elle hésita à l'embêter un peu plus, mais l'heure n'était pas à l'amusement. Plus tard, peut-être... Pour l'instant, c'était à ses deux compagnons de discuter et de s'arranger entre eux. Elle les avait mis en contact, et pensait que son rôle s'arrêtait plus ou moins là.
Tranquillement installé dans un hamac sur une terrasse, une jambe dans le vide si je me souviens bien. J’étais occupé à reprendre des croquis dans mon carnet tout en savourant le moment de détente avec un morceau de viande séchée que je mâchouillais à intervalle régulier. Plume ne pouvant m’accompagner dans le village, la Crinitus s’occupait donc dans les alentours sans trop se faire remarquer.
C’est ainsi que je comptais passer une partie de mon après-midi avant de reprendre les airs en soirée. Cependant, je n’avais pas prévu certains événements qui allaient quelque peu bousculer mon emploi du temps si chargé. Cela ne commença pas une sensation de chute… J’avoue que sur le moment, j’ai manqué de m’étouffer tant mon morceau de viande était directement partie dans le fond de ma gorge alors que mon cœur raté un battement et que je sentis une main retenir ma tête. Il ne m’en fallu pas pour comprendre qu’on avait coupé la corde qui retenait mon hamac. Une voix m’interpella alors que je me remettais de mes émotions et d’instinct, je comprenais alors de quoi il en retournait.
- Sérieux, un simple bonjour ça n’aurait pas suffi ?!
Lâchais-je non sans une pointe d’aigreur avant de me relever pour récupérer mon journal donc j’avais plié quelques pages dans la chute. J’observais ensuite les deux arrivantes avant de soupirer et de lâcher d’une voix plus détendue bien que je l’aie encore un peu mauvaise de la petite blague de Ralia.
- Et comment ça « Au boulot » ? Je ne suis pas à tes ordres que je sache et je ne travaille pas gratis non plus !
J’observais ensuite l’autre femme qui semblait accompagner Ralia avant de récupérer mes affaires qui étaient posées au sol pour ranger mon bien dans mon sac. Puis je demandais avec une curiosité difficilement masquée.
- Puis de quoi vous avez besoin d’ailleurs ? Si tant est que je veuille bien… Dans ma grande générosité... Accepter de vous aider.
Oui parce que « Au boulot » c’est bien joli, mais ça ne m’en disait pas forcément plus sur ce que j’allais devoir faire. Néanmoins, s’il y avait moyen de se faire un peu de cristaux, je ne dirais pas forcément non. Tout dépendrait de la demande et SURTOUT de l’offre !
Quand l’inconnu leur demanda plus de renseignements, la virtuose regarda furtivement Ralia avant de baisser la tête, intimidée à l’idée de parler au jeune homme. Tout d’un coup, admirer ses pieds était une activité beaucoup plus passionnante que d’envisager de regarder son interlocuteur pour lui expliquer le but de sa visite.
Parler avec Ralia la première fois avait été simple car le bien-être d’un animal était en jeu. Lui parler à lui, s’avérait tout de suite plus compliqué. Premièrement c’était un homme et deuxièmement, aucune urgence ne prenait le dessus sur ces angoisses.
Lorsqu’elle se rendit compte qu’un blanc s’était installé entre eux, Néréa prit son courage à deux mains avant de présenter ses motivations. Sa gorge se serra d’appréhension ce qui la fit bégayer.
- J’ai… j’ai demandé de l’aide à Ralia pour essayer de trouver un bouflonnus…
Elle releva doucement la tête pour voir la réaction de ses acolytes. Se rendant compte que cette simple phrase ne suffisait pas, la jeune femme reprit l’histoire depuis le début.
- Je suis une virtuose vétérinaire et je vis dans la capitale. Un soir en rentrant chez moi, j’ai trouvé un bouflonnus mal en point dans une ruelle à quelques rues de chez moi. Il avait sans doute été battu et jeté là pour s’en débarrasser. J’ai voulu le soigner mais je ne pouvais pas le déplacer. Il était trop faible et je n’ai pas assez de force pour porter un animal aussi gros. J’ai utilisé mon don et des médicaments pour le guérir et le soulager mais ça n’a pas suffit. Il a agonisé une partie de la nuit avant de mourir.
Néréa laissa échapper un reniflement trahissant sa douleur face à son impuissance ainsi que la présence de larmes qui s’accumulaient au bord des yeux et menaçaient de dégringoler le long de ses joues.
- Malgré tout ce que j’ai fait, il n’a pas survécu. Tout ça parce que je n’avais pas assez de connaissances pour le sauver. Dès le lendemain, j’ai fait des recherches à la bibliothèque mais je n’ai rien appris de plus que ce que je savais déjà et j’ai encore moins trouvé d’informations qui auraient pu m’être utiles cette nuit-là. C’est pour ça que je voudrais observer un bouflonnus dans son milieu naturel pour mieux connaitre cette espèce et éviter à tout prix qu’un malheur comme celui-là ne se reproduise.
Au final, elle avait peut-être donné trop d’informations dont celles qui concernaient le lieu, n’étaient pas vraiment nécessaires pour que le pisteur puisse juger la situation et prendre sa décision.
- Ralia m’a dit que tu es un très bon pisteur. Est-ce que tu veux bien nous aider ?
Néréa regarda la garde-chasse pour lui demander d’appuyer sa demande auprès du jeune homme. Elle le connaissait mieux qu’elle et aurait peut-être des arguments à avancer pour faire pencher la balance en leur faveur.
- Nan ! Trop facile, tout ça ! Et puis... Vous êtes bien placé pour savoir que les conventions et moi, ça ne fait pas bon ménage, voyons !
Alors oui, elle risquait d'aggraver sa situation en, disons les choses telles qu'elles sont, le maternant. Mais, quelque part, elle était curieuse de voir à quoi il ressemblerait si elle le poussait à bout... Alors, le tenterait-elle ? Attendrait-elle plutôt qu'ils soient seuls ? Ou trouverait-elle une autre expérience possible et bien plus intéressante ?
C'est ce moment qu'il choisit pour continuer de râler. Sérieusement ? Les cristaux, c'était si important que ça ? Haussant les épaules, elle sortit sa bourse qu'elle vint lui mettre d'autorité dans les mains :
- Si ce n'est que ça... Je ne sais pas exactement combien il y a là-dedans, mais ça devrait être suffisant pour ce service... Et un autre, que j'aimerais vous demander. Mais c'est très différent, et plus personnel. Alors... Plus tard. Seulement, soyez certain que je saurai me souvenir que j'aurai déjà payé, compris ?
Cette fois, elle avait abandonné ses airs taquins. Ce dont elle parlait, c'était simplement de son nom. S'il le cachait, elle se doutait qu'il devait y avoir une raison. Par conséquent, elle lui permettrait de lui faire ces confidences en privé, sans inconnue pour entendre ce qu'elle n'avait pas à savoir. Elle ne dirait rien de plus à ce sujet en ce jour. En effet, elle pensait déjà assez embêter l'homme en lui parlant sans détour d'un service qu'il devrait lui rendre sans négociation possible... Et sans même savoir de quoi il s'agissait. Mais elle se le promit, il le saurait. Plus tard. Quand le moment serait venu.
Puis ce fut au tour de la vétérinaire de prendre la parole. Mentalement, Ralia prit des notes. La demoiselle ne lui avait pas tout dit... Enfin, concrètement, elle ne lui avait rien dit, puisqu'elle avait écrit. Enfin. Là n'était pas la question. D'un autre côté, c'était normal qu'elle en dise plus à celui qui pouvait réellement l'aider, non ?
Lorsque Néréa lui demanda silencieusement son aide, elle ne put s'empêcher d'être un peu prise au dépourvu. Ainsi, son rôle n'était pas terminé ? Bien, elle servirait donc de lien.
- C'est vrai. Pour une fois, je voulais vous faire un compliment... Mais autant dire que je n'en ai plus vraiment envie, maintenant...
Oui, elle n'avait pas pu résister très longtemps. Une fois de plus, elle tentait de le provoquer. Chassez le naturel, il revient au galop...
Finalement, elle eut une autre idée. Se rapprochant pour entourer les épaules de Néréa, d'un geste protecteur, elle déclara, sans montrer clairement à qui elle parlait parmi ses deux comparses... Peut-être même s'adressait-elle aux deux ?
- Dans tous les cas, Néréa, tu n'as aucune raison de craindre quoi que ce soit. Il est un peu comme un chaton : il cherche à rugir, mais est incapable de mordre.
Puis, la relâchant, elle se permit d'avouer :
- Et puis, c'est vrai que je le cherche, aussi. Donc c'est ma faute... Mais je ne m'en veux absolument pas !