La discussion avec ton père s’était éternisée. Une heure. Deux heures. Et puis bientôt trois. Tu ne savais pas trop pourquoi tu avais subitement eu l’envie de tout lui dire, de lui expliquer tes projets ; mais tu l’avais fait. Alors évidemment, tu avais longtemps cherché tes mots avant de parvenir à tenir un discours relativement cohérent. Tu avais commencé par le début, par tes envies, tes aspirations, tu avais aussi évoqué certaines des raisons qui te motivaient aujourd’hui à franchir le cap. Et puis évidemment, tu avais exposé tes craintes. Ton manque d’envie de le laisser se débrouiller seul. La peur de le décevoir ou de le voir s’inquiéter à outrance … Et il avait compris. Il avait, avec une parfaite clarté exposer son point de vue sur la question, précisant bien évidemment qu’il était au courant de tout, depuis bien des années et surtout, surtout oui, qu’il n’avait jamais au grand jamais souhaiter que tu mènes le même genre de vie que lui.
Ton père – justement parce que c’était ton père – avait tendance à voir de grandes choses en toi, dont des qualités que tu n’étais pas vraiment certaine de réellement posséder. Evidemment, tu ne t’étais pas lancée sur ce débat-là. Surtout qu’à un moment, il s’était mis à te parler de ta mère, chose qu’il n’avait plus faite depuis bien des années. Il avait confiance. C’était ses propres mots. Il s’inquiéterait sans doute toujours pour son unique fille, évidemment, mais il était tout à fait pour ton entrée à la Guilde et il avait précisé qu’il pouvait parfaitement se débrouiller à la taverne, avec Esther, la cuisinière, ajoutant même que si nécessaire, il songerait à prendre un apprenti pour soulager la charge de travail.
Et toi. Toi, tu t’étais finalement lancée. Du moins : tu étais maintenant résolue à le faire.
Plutôt fière de ta décision, tu avais voulu te rendre à la Guilde dés le lendemain. Tu voulais pouvoir afficher ton choix aux yeux de tous et s’il y avait évidement bien des gens auxquels tu souhaitais annoncer ça, il y avait une personne en particulier que tu voulais près de toi au moment où tu signerais ton entrée dans la Guilde et que tu endosserais le statut d’aventurière de façon officielle. Tu avais donc décidé de te montrer un peu patiente, et au lieu de faire ça dés la première heure, tu avais attendu la fin de journée pour quitter la taverne direction la caserne. Là, tu t’étais appuyée, dos contre un mur, attendant de voir la personne que tu cherchais pointer le bout de son nez.
Après avoir passée une journée entière à discuter d’obscurs détails avec d’obscures personnes, Marc-Antoine rejoignit la caserne. Il avait fait le choix de vivre dans l’internat afin d’échapper à son frère Shir et son pouvoir. Vivre avec un homme pouvant lire vos pensées quand votre unique priorité dans la vie est de décimer votre famille … Avouez que cela a un petit quelque chose de dérangeant.
Une fois sur place, la surprise gagna Marc-Antoine puisque sa bien-aimée l’attendait, adossée au mur. Un tantinet paranoïaque, l’épéiste songea d’abord au pire. Son sang ne fit qu’un tour mais, rapidement, il parvint à se calmer. En apparences en tout cas, il paraissait tout à fait serein. Mieux, il fit mine d’être agréablement surpris. Pour cause, il avait rapidement compris en voyant le visage de la dame qu’elle n’était pas là pour le confronter. Terry rayonnait et cette expression sur son visage ne pouvait être que le signe d’une bonne nouvelle, bien loin des inquiétudes de Marc-Antoine.
▬ Bonsoir. Que me vaut ta visite ? Nous n’étions pas censés nous voir demain ?
Demain au lac, précisément. Sa phrase en tout cas ne sonnait absolument pas comme un reproche. Son ton se voulait léger et chaleureux. Il ne voulait pas paraître agacé par la venue de sa douce. En un sens, il ne l’était pas. Passer du temps avec Terry était pour lui un plaisir. Néanmoins, au vu de ses activités, il se passerait volontiers de ce type de « surprise » …
Si tu n’étais pas forcément très à l’aise avec l’idée de venir ici totalement à l’improviste … tu n’avais pas su résister. Tu avais conscience que le jeune garde avait du travail, notamment et sans doute à cause de l’examen qui approchait maintenant à grands pas. Tu t’étais d’ailleurs mise à penser que c’était pour cette raison qu’il s’arrangeait toujours pour fixer une date fixe ainsi qu’un lieu donné quand il s’agissait de te voir … ce n’était pas dérangeant pour toi, même si tu étais sans doute plus spontanée que ça habituellement – la preuve en ce moment même – tu avais accepté ça en songeant que son temps était tout de même assez limité. D’autant que vous vous étiez revus de nombreuses fois depuis votre fameuse discussion. Normalement, tu n’aurais dû le revoir que demain. Seulement, la conversation avec ton père avait accéléré les choses et en grande impatiente, tu n’avais pas su attendre demain, autant pour lui annoncer la nouvelle que pour lui demander de potentiellement t’accompagner à la Guilde. Il n’avait pas manqué de te faire la remarque. Une simple remarque. Rien de plus. Une remarque qui avait tout de même eu pour effet de te faire détourner légèrement le regard, visiblement un peu gênée par ta propre attitude …
▬ J’ai du temps, je t’accompagne.
Il ne lui avait pas fallu longtemps pour se décider. Marc-Antoine n’était certes pas très doué en psychologie humaine néanmoins il comprit bien vite que sa présence était importante aux yeux de Terry. Elle le voulait à ses côtés, lui et personne d’autre, d’où son attente, d’où sa venue ici. En un sens, le chevalier se sentait flatté, presque honoré de voir à quel point il comptait pour elle. D’humeur taquine, il affirma, comme pour confirmer son désir de l’accompagner :
▬ Et puis, je ne raterai pour rien au monde l’entrée dans la guilde de la future plus grande aventurière de tous les temps.
Rien que ça. Si l’ironie dans sa phrase était palpable, Marc-Antoine n’en restait pas moins confiant quant aux aptitudes de la jeune femme à réussir. Il l’avait vu s’entraîner et connaissait des aventuriers bien moins compétent qu’elle. Suite à ce petit trait d’humour, le de l’Épée reprit son sérieux habituel et poursuivit.
▬ En tout cas je suis content de voir que tu t’es décidée … Et que tu m’aies attendu.
Il prit la main de la jeune femme, l’amena lentement à lui avant de se baisser et de l’embrasser. Un baiser bref – de gratitude en un sens –, comme pour lui témoigner son affection, lui faire comprendre qu'elle était sa priorité et lui dire qu'il était heureux de suivre son parcours. Puis il demanda, tout en faisant signe de la tête :
▬ On y va ?
La guilde n’était pas loin. Il n’y en avait pas pour des heures et des heures de marche toutefois, impatient, Marc-Antoine souhaitait savoir comment son inscription allait se dérouler.
▬ Il te suffit de te présenter puis de signer, c’est ça ? Aucun test ? Aucune obligation de prendre une mission dès ton arrivée ?
Marc-Antoine ne savait absolument pas comment fonctionnait cet organisme. Terry lui avait expliqué l’autre jour – qu’à sa connaissance – il n’y avait aucun test à passer néanmoins le grand dadais restait sceptique. Soit dit en passant, si obligation il y avait de se saisir d’une mission dès son premier jour, Marc-Antoine pouvait conseiller Terry. Ces dernières semaines, il avait enchaîné les escortes et les quêtes. Ainsi, il savait quels étaient les endroits, les monstres et surtout les jobs à éviter.
Il n’avait pas fallu longtemps pour que tu obtiennes une réponse. Tu t’attendais au moins à un temps de réflexion, voir possiblement à ce qu’il te propose de repousser ça étant donné la surprise de ta visite … et pourtant, il avait accepté en quelques secondes à peine, et ce dès la fin de ton petit discours. Du coup, tu te sentais aussi heureuse que soulagée de voir que ta présence n’était pas dérangeante, et encore plus de constater qu’il consentait sans problème à t’accorder un peu de son temps pour quelque chose qui était réellement important à tes yeux. Tu ne savais pas trop pourquoi, mais tu n’avais vu personne d’autre pour ça. Bien sûr, s’il avait refusé, tu aurais posé la question à ton père, ton oncle, voir même peut-être Esther, juste histoire d’avoir une présence rassurante à tes côtés … mais pour lui, c’était différent. Tu n’aurais d’ailleurs pas su l’expliquer. Il était important, tu le voulais pour les choses importantes, ça paraissait logique.
Un simple hochement de tête en guise de réponse, et puis tu fais un pas en avant direction la guilde. Tu as l’estomac noué. Sans doute autant à cause de la peur, de l’appréhension que de l’impatience que tu ressens et des mille questions, environ, que tu ne cesses de poser.
Terry n’était pas à l’aise et Marc-Antoine ne fit rien pour l’aider, bien au contraire. Les questions de du grand blond avaient beau angoisser la jeune femme, le garde poursuivit :
▬ Oui, je pense que tu auras le temps. Je crois savoir que, sauf cas de force majeure, ce sont les aventuriers eux-mêmes qui décident des quêtes qu’ils vont accomplir. En somme, tu gères ton emploi du temps comme bon te semble.
Il lui semblait avoir entendu des histoires à propos de tableaux à consulter, d’annonces et de réservations. N’étant pas aventurier lui-même et ne sachant finalement que très peu de choses sur cette catégorie de personne, les propos du de l’Épée étaient à prendre avec des pincettes.
▬ En tout cas si tu veux choisir une mission dès aujourd’hui, je peux probablement t’aider. Je travaille beaucoup avec des aventuriers ces derniers temps. Alors bon … Si tu veux … Je peux donner des conseils.
Ça, des conseils, il en avait à la pelle. Tout d’abord : Éviter les quêtes impliquant les Rapidoos. Ensuite, ne pas prendre part à une mission où Arya Evergarden est le commanditaire. Enfin, ne pas participer aux chasses aux béhémoths et autres créatures dangereuses.
Une fois sur place, Marc-Antoine fit profil bas et laissa Terry se présenter. Après tout, s’il était là pour l’épauler et lui servir de soutien, il n’avait ni pour ambition ni pour rôle de faire le « travail » à sa place. Après lui avoir adressé un sourire, il laissa sa bien aimée le quitter. L’ex serveuse échangea quelques mots avec une vieille dame puis revint vers Marc-Antoine, un papier en main.
▬ …
Un formulaire ? C’était ça leur mode de recrutement. Marc-Antoine ne dit rien. L’homme ne pipa mot et s’efforça de rester le plus neutre possible. C’était un moment important pour Terry. De fait, il se fit torture pour ne pas rire ou être désobligeant. Il restait là, droit comme un pique avant de demander :
▬ C’est bon ?
Il jeta un œil par-dessus l’épaule de Terry et tâcha de lire ce qui était écrit. Qui sait, il y avait peut-être des questions techniques nécessitant une forme de réflexion intense.
Maintenant, tu as environ … deux mille questions, environ. Et puis, surtout, tu as perdu une bonne partie de ta détermination du moment rien qu’en l’écoutant évoquer les détails techniques de l’inscription à la Guilde. Soyons honnête, c’est totalement de ta faute, tu n’as même pas pris le temps de poser de questions, de te renseigner vraiment. Tu es en effet pratiquement certaine qu’il n’y a ni test, ni examen, ni même de quelconque sélection. Beaucoup d’hommes et de femmes étaient en effet entrés dans la Guilde pour mieux échouer dés le lendemain sur le terrain … ça, c’était un fait connu et avéré. Il n’y avait plus qu’à espérer que ça ne t’arrive pas.
La guilde n’étant pas bien loin, le chemin jusqu’à cette dernière ne fut pas particulièrement long. Une fois sur place, tu prends le temps d’observer l’endroit – finalement bien moins impressionnant que tu l’avais imaginé, mais c’était un détail – et puis, au bout d’un moment, tu te détaches du jeune garde pour t’adresser à cette vieille dame au teint pâle. Tu te présentes rapidement, tâchant d’être claire, concise, et souriante, et lui explique brièvement l’objet de ta visite … ce à quoi elle répond en te donnant un formulaire, un crayon, te demandant de remplir ça et de le lui rendre juste après. En tout et pour tout, votre « discussion » n’aura durer que deux minutes et quelques secondes. Tu reviens donc vers Marc-Antoine, le papier en main, le parcourant des yeux avant de te poser appuyé contre un bout de table pour le lire plus en profondeur. Il n’y a rien de particulier. Nom. Prénom. Age. Date et lieu de naissance. Le reste n’est que détails à cocher concernant l’expérience, les capacités. Rien de réellement précis. Alors tu remplis soigneusement chaque ligne de la feuille, t’arrêtant en bas pour finalement tout relire au moins une fois.
Terry revint vers le garde et lui montra ce qu’il présumait être sa licence d’aventurière. Tout avait l’air en ordre pour le garçon et – plus par principe qu’autre chose – il annonça avec un engouement tout à fait factice.
▬ Félicitations.
Elle n’avait pas fait grand-chose en soi mais le fait est que, désormais, elle était officiellement une aventurière de la guilde. Marc-Antoine s’attendait à ce que son passage ici se termine, à ce qu’ils rentrent tout deux dans leur foyer respectif pourtant il n’en était rien. Terry saisit le bras de notre héros avant de le traîner jusqu’au grand panneau sur lequel étaient épinglées les différentes missions disponibles. Il y avait en effet du choix. Beaucoup de choix. Peut-être même trop pour nos deux tourtereaux qui ne savaient plus où donner de la tête. Un poil intimidée par l’intitulé de certaines quêtes, Terry fit savoir à l’apprenti chevalier qu’il était préférable pour elle de démarrer en douceur.
▬ Oui, ne t’en fais pas.
Il avait compris et n’envisageait de toute façon pas de l’envoyer à une mort certaine. Exit donc les chasses aux monstres et les quêtes où il était explicitement indiqué que le combat ferait rage. D’un autre côté, Marc-Antoine ne voulait ni paraître surprotecteur ni lui donner la sensation de la sous-estimer. Il lui fallait par conséquent trouver un juste milieu, une mission adaptée, ni trop difficile, ni trop simple.
▬ Ça, c’est intéressant, non ?
Il pointa du doigt une affiche qu’il décolla du mur afin de la présenter à Terry. Le travail était simple en apparence et consistait à dénicher une pierre rare. Marc-Antoine n’était pas expert en joaillerie mais il imaginait aisément que ce type d’artefact pouvait être trouvé dans la nature, dans les grottes notamment.
▬ La paie n’est pas incroyable mais ce n’est pas trop mal pour un premier boulot.
L’argent n’était pas ce qui motivait la jeune femme mais pour Marc-Antoine ce type de détail ne pouvait être ignoré. En l’occurrence, il estimait que le rapport risque sur paie était convenable. Bien sûr, il existait toujours une infime chance de se faire attaquer sur les routes par un brigand ou des monstres néanmoins, compte-tenu de l’intitulé de la quête, rien ne laissait présager cela. De plus, elle allait être assistée car, comme le précisait la fiche, il fallait être au moins deux pour réaliser ce travail. Le chevalier en devenir aurait volontiers accompagné Terry malheureusement il était demandé ailleurs.
Au final, accéder à la guilde en tant qu’aventurière aura été … chose particulièrement aisée. Ça l’était peut-être même un peu trop, même pour toi, mais tu savais bien que te lancer sur le terrain ensuite n’allait probablement pas être si facile. Tes quelques formalités effectuées – qui ne sont en fait qu’administratives – tu reviens vers Marc-Antoine, le papier en main, tout de même assez fière du pas de géant que tu avais fais aujourd’hui et ce en quelques minutes seulement.
C’est finalement vers le tableau des missions que tu concentres ensuite toute ton attention. Même si tu ne ressentais ni l’envie, ni même le besoin de te lancer tout de suite, maintenant, dans une mission, tu voulais tout de même prendre la température, voir ce que la guilde proposait comme travail histoire de voir dans quoi tu pourrais éventuellement te lancer pour une première. Il y avait là tous les genres de quêtes possibles et imaginables. Pas mal de chasses aux monstres, de capture de monstre, d’escorte. Il y avait même quelques quêtes proposant de ramener un criminel, un fugitif. Et puis, parmi tout ça, des quêtes de récolte, de récupération qui traînaient par-ci, par-là. Tu te perds non sans mal à travers toutes les petites affiches qui sont accrochées devant toi. Il y a du travail, ça c’est certain, mais toi … tu ne parviens pas à arrêter ton regard sur quoi que soit qui te paraisses réellement adapté à ton faible niveau. Heureusement, tu n’es pas seule. Après quelques minutes, le jeune garde lui semble avoir trouver quelque chose. Il décroche alors la petite affiche – une note rédigée à la main en réalité – et tu la prends entre tes doigts pour en lire le contenu. Il s’agit là de récupérer une pierre précieuse pour un noble qui souhaite demander sa belle en mariage. La guilde exige deux aventuriers pour cette dernière, et offre une prime qui certes n’est pas très élevée mais qui te parais tout de même relativement correcte pour un tel travail.
Visiblement convaincue, après avoir relu l’affiche au moins trois fois, tu finis par t’éloigner du tableau, les yeux toujours rivés sur le papier. Sans un mot, tu retournes voir la vieille dame pour la questionner sommairement au sujet de la mission et tu finis par demander à l’obtenir. Elle t’informe alors qu’elle s’arrangera pour dénicher quelqu’un pour t’y accompagner et que tu n’auras qu’à repasser d’ici un jour ou deux maximums pour prendre des nouvelles. Elle semblait plutôt confiante quant au fait de trouver quelqu’un du coup … tu lui avais laissé l’affiche avant de rejoindre Marc-Antoine pour quitter le bâtiment quelques secondes plus tard. Ce n’est qu’une fois dehors que tu laisses retomber la pression, soupirant de soulagement, tu te remets à sourire et puis, tu te tournes vers le jeune garde pour venir te coller tout contre lui, passant tes mains derrière sa nuque afin de le tirer un peu à toi, assez pour te permettre de venir déposer un baiser rapide sur ses lèvres.
▬ Oui. Enfin, fais attention à toi quand même.
La jeune femme relu la fiche plusieurs fois avant de retourner voir la vieille dame. Elle discuta avec elle un moment tandis que Marc-Antoine pour sa part continua la lecture des différentes quêtes proposées. Ces derniers temps les chasses aux monstres se multipliaient. A croire que les griffes, dents de béhémoths et autres créatures dangereuses avaient la côte. Les yeux rivés vers le panneau, Marc-Antoine tourna par moment la tête en direction de Terry et de son interlocutrice. Leur conversation dura quelques bonnes minutes. Quand elle fut terminée, l’aventurière fraîchement promue rejoignit notre héros et ils quittèrent le bâtiment comme ils étaient venus ; ensemble.
Ça y est, c’était fait. Elle était devenue aventurière, possédait sa licence et avait même pris une mission. C’était beaucoup pour la petite Terry qui exultait dans les bras du chevalier avant de l’embrasser. Un baiser bref mais qui ne manqua pas de surprendre le jeune homme tout comme la suite de son propos. Bien que par le passé il ait tenté de lui montrer ce qu’elle représentait pour lui, Marc-Antoine n’avait jamais prononcé ces mots, peut-être par pudeur. Leur amour était jusqu’à présent tacite et c’est Terry qui, en première et de façon instinctive, brisa la glace. La timidité n’était pas un trait de caractère propre à Marc-Antoine néanmoins il se mit à rougir et ne sut réellement comment réagir. Il vit l’aventurière reculer avant de vriller sur un autre sujet. C’est vrai qu’il était occupé, qu’il était préférable pour lui de rentrer. Finalement cette petite escapade n’aura pas duré très longtemps. Il faut dire qu’elle comme lui ne s’attendaient pas à ce que cela soit aussi facile.
▬ Oui, en effet ; Je te raccompagne chez toi.
Marc-Antoine invita Terry à lui prendre la main et prit la direction de la taverne. Celle-ci n’était pas si loin. Si sur les premiers mètres, les deux tourtereaux restèrent silencieux, Marc-Antoine jugea bon d’engager la conversation une fois devant le domicile de la jeune femme.
▬ On se dit toujours à demain ?
Il n’y avait pas de raison que cela soit annulé. Certes il s’était vu aujourd’hui toutefois, pour Marc-Antoine, le rendez-vous au lac tenait toujours. Après s’en être assuré et dans le but de ne pas réitérer la même erreur que la dernière fois, il prit son courage à deux mains et ne laissa pas Terry rentrer de suite chez elle.
▬ Je t’aime aussi.
Si en apparence ce « je t’aime » était semblable à celui prononcé par Terry, il était en vérité un peu plus empreint de calcul et un peu moins pur. Durant le trajet, Marc-Antoine n’avait pu s’empêcher de songer à des détails futiles de leur histoire. Encore maintenant, il avait en tête des questions qui n’avaient pas lieu d’être. Dans le fond, le garde aimait tout chez cette jeune fille : Sa compagnie, sa présence, son sourire, sa façon de maladroite de faire part de sa gêne et de son agacement aussi. Pourtant, ces mots avaient eu un mal fou à quitter ses lèvres, si bien qu’il avait eu la désagréable sensation de mentir en les prononçant. Après l'avoir embrassé une dernière fois en guise d'au revoir, il laissa sa belle regagner sa demeure pour la nuit.
▬ A demain.
Pas de regrets. Ce n’est pas ça. Ces mots, tu les penses … c’est la stricte vérité, du moins, c’est ce que tu as l’impression de ressentir, malgré ton inexpérience totale dans ce domaine précis. Tu as parlé avec ta bouche, mais ce n’est pas venu de ton cerveau. Ça venait du cœur. Néanmoins, c’est peut-être bien trop tôt pour ça, et cette pensée te frappe aussitôt, si bien que préfères faire dévier le sujet, ne pas donner l’impression d’attendre la moindre réponse là-dessus. Bien plus simple. A croire qu’au fond, certaines choses t’effraient malgré toi en ce qui concerne cette relation nouvelle que tu entretiens avec le jeune garde.
Tu tâches de sourire. Il a effectivement d’autres choses à faire que de continuer de traîner à ne rien faire, tu le comprends, et tu le laisses donc te raccompagner tout simplement te saisissant de sa main pour avancer en silence jusqu’à la taverne qui n’est pas bien loin de la Guilde. Ce n’est qu’une fois à la porte de l’établissement de ton père que le blond se décide à rompre le silence. Tu hoches la tête.
Tu te serais attendue à ce qu’il parte, simplement. Tu n’aurais rien dis. Tu n’en aurais même rien pensé, pour être honnête. Tu te voyais mal forcer les choses. Et pourtant, alors que t’apprêtes à rentrer … voilà qu’il te répond tout de même. Baissant légèrement le regard, c’est un sourire que lui offre, juste un sourire.