Ces derniers temps les affaires de la trésorerie avaient un peu ralenti, les devis avaient cessé de pleuvoir et les histoires autour de la tour s’étaient enfin un peu calmés. La jeune Milan pouvait donc maintenant prendre un peu plus de temps pour se consacrer exclusivement à des dossiers non traités depuis longtemps et ça elle n’en manquait pas. Dans son bureau trônaient quantité des monticules de feuilles traitant tous de sujets différents. Ici une demande de près, là un devis pour une expédition à venir. Elle n’était pas du genre à laisser traîner les affaires qu’on lui confiait mais elle avait dû se rendre à l’évidence ces derniers mois avaient été terriblement chargé, sans compter l’agression que sa pauvre personne avait dû subir et les entraînements avec Owain qui en avait découlé. Bref elle avait dû faire par ordre de priorité et la demande de subvention de la dernière épicerie pour prolétaire n’était définitivement pas en tête de liste. Ainsi se passa la matinée de Queen, la tête entre sa tasse de café et les dossiers les plus prometteurs. Quand midi sonna enfin, elle abandonna toute cette paperasse et ne se fit pas prier pour quitter son bureau.
Une douce chaleur l’enveloppa une fois dehors, le soleil était bel et bien au zénith et ses quelques rayons réchauffaient délicieusement son visage parfaitement maquillé. La trésorière faillit remercier Lucy pour cette belle journée. Mais avant qu’elle en ait eu le temps, elle heurta quelqu’un de plein fouet. Enfin, quelqu’un la heurta de plein fouet. La tasse dans les mains de celui qui avait eu l’outrecuidance de ne pas se pousser se déversa au passage sur son généreux décolleté, manquant de l’ébouillanter.
- Par Lucy ! Êtes-vous donc complètement aveugle ou complètement stupide ! Probablement les deux ! Elle repoussa avec force la personne toujours sans relever le visage. - Vous venez de détruire complètement un chemisier en soie ! Savez-vous au moi ce qu’est la soie triple buse ?! Pas une fois elle ne pensa a relever la tête, une grosse erreur lorsque l'on est au sein du palais.
Une journée comme une autre, encore une énième réunion de conseil, des tonnes de dossiers en vue, toujours pas d’assistant pour moi, je devrais mettre ça en haut de ma liste, j’ai déjà trouvé le garde du corps, il me restait juste une tête pensante pour m’aider dans mes tâches et les bons assistants ça ne courraient pas les rues. Je regarde l’heure sur la grande horloge du Palais, il était déjà midi, il fallait que je passe au bureau déposé cette pile de dossiers et j’avais réussi à chaparder un thé chez une des assistantes d’un collègue, un thé noir fruité mélange de diverses fruits rouges et de vanille, je réfléchissais encore une énième fois si me poser quelques minutes au soleil ne serait pas une bonne idée au lieu de courir partout et prends l’initiative de regarder autour pour trouver un banc de libre.
Tournant la tête vers le sud, le soleil en plein dans les yeux, la tasse sur le dessus des documents, je frappe quelque chose de plein fouet, ne me dites pas que je me suis prise un arbre quand même, ça serait le comble et l’objet de moqueries pour le reste de la journée. Non au lieu de ça, le dit arbre commence à aboyer diverses paroles peu appréciables et quand je regarde mes bras, je vois que la tasse a disparu, je me vois dire m**** dans la tête quand je reconnus la tête de la demoiselle… Queen… la pire peste que le palais puisse connaître, j’étais limite heureuse que ma tasse se soit renversé dans son soi-disant chemisier en soie, j'ai entendu que du " bien " d'elle grâce à son assistante que j'ai pu connaître le temps de plusieurs nuits.
- Oui je sais très bien ce que c’est un chemisier en soie et vous, savez-vous d’où vient l’expression triple buse ?
Je me contente de lui sourire et observe l’ampleur des dégâts, j’avais visé en plein dans le mile et si je ne connaissais pas le caractère acerbe de la Trésorière, j’aurai bien voulu prendre un peu plus de temps pour la connaître mais c’était hors de question, je ne voyais que méchanceté chez elle et pas besoin d’activer mon pouvoir pour savoir ce qu’elle pensait.
- Il est dit que cet oiseau ne bougeait très peu la tête qu’on assimile cela à son manque de vivacité, donc j’en conclus que Mademoiselle Milan me trouve totalement stupide ou si je complète l’expression, d’une buse, on ne saurait faire d’un épervier.
Je m’arrête un instant, la toisant du regard de la jeune femme.
- Je vous trouve très poète aujourd’hui Mademoiselle Milan.
Peu de gens connaissait la réputation de cette jeune femme mais elle n’osait jamais s’opposer à quelqu’un qui était supérieur à elle, je suis bien curieuse de voir la réaction quand elle me reconnaîtra enfin, je verrai si elle mérite les excuses adéquates...
- Bien sur que je sais d’où vient l’expression triple buse ! Je n’ai absolument pas besoin qu’un ploucocrate vienne me l’expliquer ! Toujours sans jeter un regard à l’imbécile elle se tourna d’un quart pour exposer son vêtement à la lumière, échappant à l’ombre qui avait sali l’un de ses chemisiers favoris. - Il est fichu, complètement fichu ! Gémit-elle tout en essayant tant bien que mal d’essuyer la gigantesque tache marronnasse qui continuait bien malgré elle à s’étendre sur le tissu d’un blanc immaculé. D’un geste rageur elle fit volte-face, prête à assommer son assaillant d’une quantité de reproche et autres menaces. Pourtant, une fois tournée elle n’en fit rien. Au contraire, son visage se décomposa et son corps fut traversé par un courant électrique qui lui hérissa le poil. Bouche bée elle ne pouvait qu’observer la personne qui lui faisait maintenant face.
Au-delà du courage, Queen était perfide. Elle ne craignait pas vraiment les rangs au-dessus du sien, elle craignait surtout leur pouvoir. C’est pourquoi, depuis bien des années maintenant, elle ne les attaquait plus de front. Non, sa stratégie avait bien évolué depuis son arrivée à la capitale. Maintenant elle était devenue maîtresse dans l’art de l’hypocrisie. Un sourire de façade promettait à ses ennemis un couteau planté dans le dos et ils étaient peu nombreux à comprendre d’où venait la trahison. De plus lorsqu’ils le comprenaient, il était bien souvent trop tard. Aussi la jeune femme tomba des nues en découvrant le visage d’Haru, l’une des ministres du royaume. Elle n’avait pas souvenu d’avoir un jour échangé avec elle si ce n’est lors de réunions budgétaires et autres futiles mondanités où elles étaient toutes les deux amenés à collaborer. Mais la jeune femme n’en restait pas moins une ministre, inutile certes mais ministre quand même. Aussi, Queen comprit immédiatement qu’elle devrait s’écraser une fois de plus.
- Lady Du Lys ! Sa voix retentit de façon plus aiguë qu’elle ne l’aurait voulu, la surprise y perçant aisément. - Vous ici ? Ce n’est pas commun que de vous voir dans cette partie du palais. Elle passa une main sur son visage pour effacer les quelques traces de nervosité et d’exaspération qui marquaient et faisait encore tressauter ses nerfs faciaux, avant de laisser un sourire délicat étirer ses lippes. Elle relâcha aussi son chemisier, espérant détourner la conversation au passage. - Je peux vous aider ?
Je crois que voir la tête déconfite de Queen était le meilleur moment de ma semaine, je crois qu’elle s’attendait encore à un de ses conseillers ou autres personnels qui courent de bâtiment à bâtiment pour délivrer les précieux documents. La bouche ouverte qui permettait à divers insectes d’y rentrer si ils souhaitaient je voyais son petit jeu pour trouver une pirouette pour sortir de cette passade. Elle avait de la chance en soit, tombée sur une DU LYS était rare mais si elle avait Mère en face d’elle, je pense qu’elle aurait passé le plus mauvais quart d’heure de sa vie tant que ces deux femmes pouvaient se ressembler en soit, juste ma mère était un bulldozer qui ne connaissait pas la finesse alors que la situation l’exigeait.
- Oui c’est bien moi, je suis ravie de savoir que vous connaissiez mon nom Mademoiselle Milan.
Je n’allais pas la reprendre sur le Lady, je n’aimais pas qu’on m’appelle par ce titre mais vu que c’était elle, je prenais un malin plaisir de la laisser faire. Son corps trahissait son embarras, elle avait envie de fuir et oublier ce fâcheux contre-temps mais au lieu de ça, je vais éterniser un peu notre rencontre même si ma pause repas va en pâtir, c’est tellement plus sympa de la tyranniser.
- Il m’arrive de travailler et d’aller du palais à mon bâtiment qui se trouve là-bas.
Je le pointe du doigt, je ne doute pas qu’elle sait où je travaille mais elle n’avait jamais osé poser le pied à mon service.
- M’aider ? Oui je cherche un assistante mais vous avez déjà un emploi sinon ça serait un plaisir de recevoir votre candidature.
Je lui fis un sourire aussi faux-cul qu’elle pourrait faire, jamais au grand jamais je l’aurai voulu comme collaboratrice, j’aurai brûler son formulaire avant même que ça atteigne mon bureau, son assistante m’a dressé un tableau d’elle effroyable et je me demandais encore pourquoi elle travaillait pour cette peste mais bon.
Reprenant un ton plus sérieux, on allait parler un peu boulot.
- Sinon, cette année vous comptez encore réduire mon budget ou je vais devoir parler directement au ministre des Finances pour lui dire que sa Trésorière s’amuse à faire une loterie avec l’argent public ?
Je sais que c’était faux enfin du moins je l’espère que ça l’était sinon je vais vraiment croire qu’elle m’en voulait.
- Je sais où vous travailler, je suis ici depuis suffisamment longtemps pour le savoir n’en doutez pas. Elle laissa échapper un petit rire qui se voulait sympathique mais qui si l’on y regardait bien n’était qu’une parfait tissus de mutinerie. Les paroles de la ministre qui vinrent ensuite firent tressauter l’un de ses sourcils bien malgré elle. Elle ? Une assistante ? Dans le fond cela lui aurait permis de faire un pas de plus vers cette ascension qu’elle convoitait et d’un autre, elle se voyait mal obéir docilement aux ordres d’une personne comme elle. Beaucoup trop gentille, beaucoup trop pompeuse, beaucoup trop faible. La trésorière en était sure, si elle le voulait vraiment, faire tomber Haru de son piédestal ne serait pas la chose la plus compliquée qu’elle est eu à faire jusque-là.
- Malheureusement je doute que le royaume puisse se passer de sa trésorière, sans compter qu’aucun de mes assistants ne serait capable de prendre la relève à l’heure actuelle. Ça c’était certain. Et en même temps qui aurait pu ou voulut prendre la relève d’une acharnée du travail telle que Queen. On ne pouvait pas lui enlever cette chose. Sa ténacité au travail était exemplaire voir presque excessive, elle ne comptait pas ses heures et ne rechignait pas à passer des nuits blanches si cela était nécessaire. C’est aussi pour ça que sa considération a l’égard de ses assistants était minime. Au-delà du comportement détestable de Queen, ils faisaient sans cesse des erreurs et mettaient un point d’honneur à toujours partir à l’heure que le travail soit correctement exécuté ou pas. Et ceci avait le don de faire enrager la blonde.
- Pardon ? Elle manqua de s’étouffer avec sa propre salive. D'aucuns auraient dit qu’il était une mauvaise idée que d’attaquer la jeune Milan sur son propre terrain de jeu et c’était une vérité assourdissante. Peu importe le rang, la personne où tout autre facteur, Queen détestait que l’on remette en cause son travail. Si elle faisait quelques choses c’était pour une bonne raison et même si elle haïssait une personne, elle mettait un point d'honneur à respecter les devis, paiement ou tout autre chose. Aussi, elle se redressa de toute sa hauteur, posant une main sur sa hanche. Immédiatement son sourire de complaisance disparut laissant ses lèvres pulpeuses inanimées alors que son regard de givre se faisait tranchant. - Chaque budget alloué a été défini a l’avance et calculé par nul autre que moi-même. Aller donc voir le ministre des Finances. Elle fit un pas en avant. - Sachez Dame Du Lys, que je ne fais jamais d’erreur dans mon travail. Je pourrais même aller jusqu’à dire que je suis irréprochable et que c’est pour cette raison qu’il est impossible pour le royaume de se passer de moi. Son regard se planta dans celui d’Haru, l’assassinant intérieurement, sa façade étant tombé aussi vite qu’elle était arrivée. - N’insultez plus jamais… Mon travail et encore moins mes capacités Dame Du Lys. Aussi vite qu’elle s’était rapprochée, elle se recula et ses lèvres s’étirèrent en un sourire jovial.
- Disons que vous avez simplement fait une blague de mauvais goût, après tout, personne n’est parfait. Puis sans la lâcher du regard elle croisa les bras sur sa poitrine. Haru Du Lys était maintenant inscrite sur sa liste d’indésirable et c’était fort dommage pour elle.
Je commençais à voir clair dans son jeu, ce petit rire pour me faire comprendre qu’elle savait tout sur tout commençait à me mettre hors de moi que mon pouvoir s’active tout seul, je n’avais pas besoin de lui pour savoir le caractère de cette jeune femme qui se veut hautaine et un excès de confiance à en faire gonfler ses chevilles à une proportion inimaginable. Je pouvais voir peu à peu la haine contre mon personne s’intensifier de secondes en secondes et la seule réaction de mon corps à cet élan soudain fut un léger sourire en coin.
Lui proposer un poste d’assistante n’était pas du tout une bonne idée je le sais et elle n’oublie pas de me rappeler, nous rentrons dans une joute verbale digne des grands concours d’élocution, savoir rester polie et courtoise tout en lui passant un savon royal mais ce n’était pas un de mes jeux préférés, peut-être pour elle, allez savoir mais je sens que je ne vais pas gagner facilement et resserre ma prise sur mes dossiers dont l’envie de lui balancer était forte tentante.
Mais je prononce la phrase de trop, comme un cerberus enragé, la voilà qui contre-attaque avec une hargne dont je ne connaissais pas enfin je ne connaissais rien d’elle de base et ses assistantes ne m’ont jamais parlé de ces points-là, juste de son comportement intolérable avec ses collaborateurs mais la savoir acharnée de travail était tout autre, je fus même étonnée de l’entendre défendre son ministère d’une main de fer. La voilà maintenant qui me pointe du doigt, elle lance le défi, elle rentre dans mon espace vital, j’avais horreur de ça quand je ne l’autorise pas, j’étais de nature calme mais elle… je n’arrivais pas, on m’a tellement peint un portrait effroyable que mon jugement est clairement faussé mais ses quelques phrases n’arrangeaient rien.
Après ses quelques aboiement, elle retourne dans son coin de ring, pendant quelques secondes, on a pu voir la véritable Queen Milan, l’audacieuse, celle qui voudrait aller le plus haut possible dans sa carrière, pourquoi pas épouser un grand prince ou devenir la pupille du Roi si elle le pouvait.
- Je n’ai jamais dis que vous avez fait une erreur Mademoiselle Milan, juste que mon budget me paraissait ridicule comme si le Ministre ne se souciait pas de mon ministère m’amenant à penser que sa Trésorière s’amusait à m’allouer le montant le plus faible qu’elle pouvait.
Son regard toujours plongé dans le mien, je me demandais ce qu’elle attendait de moi encore, une bataille, une joute, mon énervement ? Les bras croisés ainsi, elle semblait s’impatienter, peut-être voulait-elle que je continue la philosophie et la prenant toujours de haut car je suis plus grande essentiellement, je continue.
- On dit que la perfection c’est être persuadé que les autres sont plus parfaits que soi mais je crois que nous n’avons pas la même définition de ce mot hélas.
J’essayais de fouiller dans ma mémoire pour retrouver une citation que j’avais pu lire dans mon enfance, ça venait du Frère Matthieu, dans un livre recueillant ses mémoires et finit par retrouver la citation qui m’avait marqué à l’époque. M’approchant tout doucement d’elle, disant d’un ton plus bas, gardant cette discussion plus intime, je voulais lui montrer que je ne connaissais son petit jeu, sa vanité et j’en passe.
- Si vous tenez à être si parfaite Mademoiselle Milan, vendez ce que vous avez et donnez-le à nos concitoyens et autres aventuriers et vous aurez un trésor de notre chère Lucy mais je crois que ce n’est pas la grâce de Lucy que vous cherchez si je ne me trompe.
Me penchant, un peu plus, un sourire narquois s’affiche sur mon visage.
- Vous ne m’aurez pas Mademoiselle Milan, la trésorière irréprochable, soyez en sûre.
Je finis par me redresser, peut-être il était temps de partir je ne savais pas mais je voulais savoir la réaction du Cerberus enragé avant d’entamer quelconque fuite.
- Vous osez donc accuser à tort notre cher ministre des Finances et vous insinuez par la même occasion ne pas avoir confiance en la trésorière royale ? Tutututu… Elle agita son index de droite à gauche avant de le poser sur sa lèvre inférieure. - En voilà une fâcheuse position Mademoiselle Du Lys. Ce sont des accusations qui j’en suis sure serait tristement accueilli par nos supérieurs respectifs ne croyez-vous pas ? Néanmoins je serais ravi de faire remonter vos accusations ainsi que le dossier des devis concernant le ministère de la culture, qu’en dites vous ? Peut-être vous offriront-ils un budget plus large… Ou peut-être pas… Si Haru n’était pas sotte elle devait se douter que ce ne serait pas le cas et pire encore que Queen n’hésiterait pas une seconde à dépeindre leur échange comme une altercation en défaveur de la jeune ministre. Aussi elle se contenta de lui sourire, espérant que cette idiote lui donne son aval.
Ensuite elle saisit du bout des doigts son chemisier pour mieux observer la tâche tout en reprenant la parole. - Nous n’avons pas la même définition de perfection tout simplement parce que les gens faibles d’esprit aiment à se convaincre que la perfection réside dans l’amour de son prochain et qu’elle est par conséquent chimérique et inaccessible. Elle éclata d’ailleurs d’un rire franc avant de mimer des guillemets avec ses doigts. - L’ennemi du bien est la perfection… Bla-bla-blabla. Foutaises ! S’exclama-t-elle en laissant ses bras retomber le long de son corps. - La perfection dans le détail mène à la perfection de la vie, la perfection mène à l’excellence. Elle est un labeur de chaque jour et est propre à chacun. Ce n’est pas en labourant des champs et en rêvant à plus grand que cela viendra. C’est en prenant sa vie en main et en travaillant pour arriver à cette excellence que vient la perfection. Peu importe la façon de le faire, si cela doit être fait. Il n’y a que les faibles et les trouillards pour ne voir la perfection qu’en donnant à autrui. Qu’y a-t-il de parfait à donner à ceux qui sont incapables ? Rien alors ne laissez donc mes biens là où ils sont.
Queen était bien placée pour savoir ça. Ses parents étaient certes on ne peut plus riches mais lorsqu’elle était arrivée à la capitale elle n’avait rien en poche si ce n’est de quoi se louer un appartement. Elle avait dû faire des pieds et des mains pour réussir à entrer dans le palais. Elle avait même dû laisser son corps en offrande plus d’une fois mais elle avait réussi à atteindre le poste premier qu’elle convoitait. Celui de trésorière du royaume. Cela ne c’était pas fait en un jour et il lui avait fallu trois longues années pour y parvenir. Néanmoins elle y était parvenue et était devenue une référence dans son domaine. Elle avait toujours été prête a tout et encore une fois elle était la preuve vivante que n’importe qui pouvait avoir ce qu’il voulait pour peu qu’il s’en donne les moyens. Sortir des chemins battus n’était en soi pas une option dans ce genre de cas mais une nécessité. Si elle s’en était tenu a la route conventionnelle, elle n’en serait certainement pas à la moitié du chemin parcouru à ce jour.
- Pour ce qui est de Lucy, veillez à ne pas blasphémer ma chère ministre. Elle a le regard posé sur chacun de nous, ne l’oubliez pas. Elle avança ensuite et posa un doigt sur les vêtements d’Haru. - Vous donc qui prônez la perfection altruiste. Pourquoi ne donnez-vous donc pas vos biens pour la charité ? J’ai ouï dire que votre domaine était vaste, trop vaste pour les quelques personnes qui y vivent. Vous n’êtes donc pas si parfaite ? Quel dommage. Elle lui lança un regard faussement contrit tout en relâchant son vêtement. - Loin de moi l’idée de vous avoir ma chère Dame, après tout je ne suis qu’une humble trésorière qui s’évertue à tenir se royaume à flot. Où allez-vous donc trouver ce genre d’idée saugrenue ? Ce faisant elle posa une main sur ses lèvres et rit doucement tout en fusillant ladite ministre du regard. Quelqu’un passant par là n’aurait sans doute pas pu se rendre compte de l’affrontement qui se jouait entre l’une et l’autre. Mais Queen elle en avait bien conscience et elle refusait de perdre du terrain. De toute façon Haru avait déjà cerné sa personnalité, le seul intérêt qu’elle avait été ici était de sauver les apparences afin que personne d’extérieur ne puisse se douter de ce qui se jouait à quelques mètres d’eux. Maintenant elle attendait. Qu’elle carte pouvait bien abattre Fragile maintenant que la blonde s’était échauffée ? En tout cas, une chose était sure, elle était plus que prête à rabattre le caquet de la ministre, plus que jamais.
"Votre rendez vous a été raccompagné Madame." Dis-je d'un ton solennel, puis me tournant vers Queen "Bonjour Madame Milan."
Je m'inclinais légèrement pour saluer cette dernière. Je me devais de rester impeccable dans ma façon d'être pour éviter de rentrer dans leur petit jeu de nobles. Je m'étais très légèrement incliné pour Queen, la saluer c'était une chose, la respecter en était une autre. Plus mon inclinaison est prononcé, plus je respectais la personne. Là, je n'avais incliné que ma tête. Le respect se gagne selon moi, et si Haru avait gagné le mien depuis le début, ce n'était pas le cas de Queen que je connaissais en sois que par des bruits de couloir. Mais il semblerait qu'elle ait un problème avec ma cheffe directe, du coup, je sens que cela risque de ne pas coller entre nous deux. J'avais pris soin de dire "rendez vous" au lieu de "mère", j'étais certains que la ministre ferait le rapprochement sans effort, alors que pour ce qui est de l'argentière je ne sais pas si elle est au courant de cette information. J'ajoutais à cela de ma voix calme et posée.
"Tout va bien Madame ?"
Plus qu'une phrase de bienséance pour m'enquérir de son état actuel, il s'agissait surtout d'un moyen détourner de lui demander si elle avait besoin d'aide avec ce personnage haut en couleur mais particulièrement désagréable qu'était l'argentière. Je sais qu'elle sait se défendre, mais parfois trouver une dérobade est aussi un moyen de ne pas perdre son temps inutilement, et connaissant la charge de travail de la ministre, il y avait peu de chance qu'elle ait du temps à perdre avec Queen, qui doit être aussi surbookée. Après avoir reçu la réponse de la Dame du Lys, je me mis en retrait pour les laisser parler, me faisant discret pour ne pas gêner leurs débats.
Cette joute verbale devient agaçante, chacune veut montrer qui est la plus forte, celle qui arrivera à faire plier l’autre avec quelques mots. Nous avançons chacune nos arguments mais j’avoue que Queen avait plus de facilité de retourner la situation à son avantage, j’essayais de garder la tête haute mais je pouvais facilement dire qu’elle avait gagné le point sur cet échange. Qui j’étais pour dire de partager richesse alors qu’effectivement mon domaine pour recueillir plusieurs famille si je le souhaitais. Mes actions d’aider autrui étaient peu visible, je ne vais pas brandir haut et fort ma petite Fräulein, lui montrer que j’aide cette jeune femme du mieux que je peux, lui offrant tout, une éducation et j’en passe puis j’ai Lancelot le garde royal qui voulait évoluer, je lui ai donné un poste pour évoluer, qu’est-ce que c’était sur l’échelle d’Aryon rien, peut-être j’ai aidé individuellement quelques personnes et ensuite ?
Ce qu’on retient c’est que la Famille DU LYS est riche, de grands domaines, de grands jardins en faisant pas grand chose, d’ailleurs peu de gens savent vraiment ce que l’on fait vraiment, nous sommes dans les instances politiques, nous avons des précepteurs, nous parcourant le monde, nous avons des commerces, nous travaillons dans l’export et l’importation, nous étions dans l’ombre mais on ne voyait que nos biens immobiliers et je ne pouvais blâmer personne.
- C’est vrai, je n’ai rien de parfait, ni ma famille d’ailleurs mais j’essaye de prouver que je peux faire des choses biens malgré mon statut de noble riche.
Puis voilà de nouveau son regard accusant sur ma personne, elle attends que je plie que je fasse quelque chose de répréhensible ainsi le public alentour verrait qu’une ministre s’énerve sur une tierce personne. Elle savait y faire et elle cachait bien son jeu, personne au palais ne connaissait le côté obscur de la jeune femme, je l’ai appris à mes dépens un soir avec une de ses assistantes, car excédée par sa responsable, elle finit par m’avouer à demi-mots le comportement de celle-ci mais elle était paniquée, elle risquait son poste, elle savait ce qu’il lui coûtait de m’avoir dit pareilles révélations et j’avais gardé cet aveu pour moi mais comment rester de marbre devant le comportement mielleux de la jeune femme en tant normal ?
-Rien j’ai dis cela comme ça, être trésorière vous prends déjà beaucoup de temps et vous êtes si parfaite à ce poste et aussi essentielle au royaume que vous ne comptez pas monter plus haut n’est-ce pas ? Ca serait dommage qu’on se passe de vos précieux services hélas.
Je comptais rajouter une couche quand j’entendis une voix familière derrière mon dos, c’était Lancelot, mon garde du corps en quelque sorte, je ne savais pas trop comment définir son poste, homme de main ? Trop extrémiste… Garde du corps ? On dirait que je vis dangereusement, non mon collaborateur, c’était un bon qualificatif.
-Merci bien Monsieur Steelhearth.
Il avait réussi à mettre ma mère dehors, c’était son nouveau jeu depuis quelques jours, me mettre la pression et chercher le point où Lancelot lui tomberait dessus pour l’accuser de coups et blessures mais je le savais assez intelligent pour qu’il ne tombe pas dans le panneau. Son apparition mis en quelque sorte à terme la discussion, je ne voulais pas renchérir et j’avais promis de ne rien dire au sujet de Queen, je devais donc garder bonne figure et montrer bonne figure.
-Oui ça va très bien, je parlais budget avec Mademoiselle Milan.
J’entendis Lancelot s’écarter un peu de notre duo explosif pour nous laisser le temps de dire nos dernières volontés.
- Vous pouvez adresser directement la facture pour le nettoyage de votre chemisier à ma secrétaire, je prendrais le soin de régler moi-même l’incident dont je tenais encore à m’excuser Madame la Trésorière.
Un sourire forcé plus tard, je fis signe à Lancelot de me rejoindre pour prendre la fuite et pourquoi pas discuter un peu avec lui sur le chemin du retour.
Au loin elle aperçue approchant dans leur direction aussi, Fragile eut-elle à peine fini de parler qu’elle surenchérit.
- De prouver ? Bien sur que les nobles riches comme vous dites peuvent faire les choses bien. Le statut n’a rien à voir la dedans. C’est la définition de bien qui change tout, Mademoiselle la ministre. Minauda-t-elle alors que son sourire s’élargissait de plus en plus. Queen ne voyait pas le bien et le mal comme deux entités distinctes. Non pour elle, l’un et l’autre pouvait être nuancées de gris. Pour le commun des mortels, tuer pouvait par exemple être vue comme une chose mal. Pour Queen ce n’était pas mal s'il y avait une bonne excuse. Du moins, elle ne s’y risquerait pas pour l’instant mais c’est ainsi qu’elle voyait le bien et le mal. Comme une palette de couleurs poivre et sel. Pas comme une palette monochrome. - Il serait fort dommage que le royaume perde sa trésorière en effet. Néanmoins, je suis sure qu’en trouvant un bon remplaçant formé par nul autre moi-même cela ne posera pas de problème. De plus je suis sure que nombreux sont les postes un peu plus haut placés ayant besoin d’un peu d’ordre. Ah l’ambition ma chère ministre, ainsi va-t-elle. Et une nouvelle fois elle planta ses prunelles dans les siennes et lui sourit. Si Haru n’était pas totalement sotte, elle comprendrait que d’ici un jour ou l’autre, Queen ferait partie de ses collègues ou pis encore. Mais ça elle le garda pour elle, faire une surprise pareille à Fragile serait des plus délectables.
Le temps de sa tirade la silhouette s’était tant rapprochée qu’elle en reconnaissait maintenant les traits. Aussi elle pencha légèrement la tête pour sortir de l’ombre d’Haru, offrant un sourire gourmand au jeune garde. - Oh, mais n’est-ce donc pas Lancelot, le garde royal ? Elle se déplaça légèrement sur le côté. - Si c’est bien vous. J’ai entendu dire que vous vous étiez également mis au service de notre chère ministre de la culture. Déposant une main sur ses lèvres elle laissa échapper un léger rire tout en lançant un regard à Haru. - Vous ne vous refusez donc rien, Dame Du Lys. Que le garde ne s’inclina pas plus bas, ne la dérangea pas. Si même elle avait pu l’exiger elle aurait choisi qu’il ne posa pas le regard sur elle. Elle voyait Lancelot plus comme une créature belliqueuse capable de se transformer en une maudite épée. Rien de plus. Un prolétaire qui avait réussi à monter l’échelle sociale grâce à ses capacités de bourrin. Rien de bien captivant en somme, bien qu’elle salua volontiers cette prouesse. En fait la seule chose qu’elle trouvait captivante chez lui était son physique. Il était bel homme c’était indéniable mais trop peu galant et utile pour qu’elle daigne lui accorder plus d’attention. Déjà acceptait-elle de lui adresser quelques mots.
Alors que les deux associés se mirent à échanger, Queen resta pour une fois en retrait se contentant de leur lancer quelques regards désintéressés. Elle ne releva la tête que lorsque Fragile s’adressa de nouveau à elle. Puis jetant un regard sur ses ongles, elle releva ses iris azur sur ses vis-à-vis.
- Je n’y manquerais pas. Passez donc une bonne journée chère Ministre. Elle la gratifia d’un signe de tête puis les dépassa. - Lancelot. Daigna-t-elle lui accorder sans plus de cérémonie. Après tout, elle n’avait que faire des marques de respect concernant ceux qui n’étaient pas de son rang ou au-dessus. Elle se surprit même à se trouver généreuse de l’avoir salué ainsi. Puis sans se retourner, elle laissa les deux indésirables dans son dos, retournant vaquer à ses occupations. Cette maudite ministre lui avait fait perdre un temps précieux.
"Madame Milan"
Ma tête n'était pas descendu plus bas que tout à l'heure. J'avais encore du mal à la jauger. Sous cette apparence presque mielleuse, elle cachait très bien son jeu. Les murs du palais ont des oreilles et heureusement d'ailleurs, sinon il y a de forte chance que je sois tombé dans le piège d'apparence de la belle trésorière. Mais revenons en à nos moutons. La Dame du Lys me fait signe de le suivre ce que je fis sans me faire prier. A mesure que nous nous éloignons de la trésorière, je sens Haru plus sereine, comme si elle était bien contente de pouvoir quitter ce genre d'affrontement. La pauvre ministre devait sans doute batailler fermement tout le temps, il serait temps qu'elle se repose un petit peu. Mais avec la tonne de travail qu'elle a, probablement qu'elle ne se sent pas le courage de prendre une pause de peur de crouler sur les demandes. Alors que nous marchions et après être à bonne distance de Queen et de toutes autres personnes susceptible d'entendre ma voix, je disais d'un ton décontracté à Lady Du Lys.
"Les joies des joutes verbales dissimulés sous de jolies mots. Ah, je suis bien content de ne pas faire partie de la haute sphère pour cette raison. Vous avez l'air de plutôt bien vous en sortir."
A mesure que nous approchions du bureau je me disais que la demoiselle devait être fatigué par tout cela, entre les dossiers à rendre, la pression d'être exemplaire dans tout ce qu'elle fait, la recherche d'un candidat pour être son assistante, les joutes verbales des requins de nobles, je peux comprendre qu'elle soit à saturation. Alors que nous entrions dans le bureau de la demoiselle du Lys, je saluais la secrétaire qui semblait déjà bien affairé avant de tirer la chaise en parfait gentleman à la ministre pour qu'elle puisse s'asseoir. La pauvre devait être exténuée, que faire ? Ah tiens j'ai une idée.
"Je vais vous faire bouillir de l'eau pour vous servir un thé. Je me demande s'il reste du thé de ce cher Monsieur Castalion. Je pense que cela vous ferais du bien Madame."
J'attendais son aval, droit comme un I. Toujours un pas de retrait par rapport à elle comme le veut la tradition. Un garde est toujours en retrait de la personne qu'il protège, cela lui donne une vision périphérique et il sert de rempart à cette même personne. Et pour Haru, je n'avais aucun problème à tenir ce rôle.
Ca avait l’air d’être une bonne journée ce matin quand je me suis levée mais pourtant malgré ce magnifique soleil, il a fallu que je croise la route de la Trésorière à mon plus grand désarroi pour ensuite renverser ce fichu thé sur elle… je le savais, ne jamais prendre de “ raccourci “ pour rentrer au bureau, plus jamais !
Notre joute verbale avec la jeune femme n’était pas finie et il fallait avouer que j’étais à court d’arguments et l’arrivée de Lancelot me fut une grande aide même si ça envenime encore plus la situation mais d’un coup, je me sentais protégée, rassurée, il avait cette aura réconfortante ce garde comme quand il prends un malin plaisir à mettre Mère dehors.
- Mon poste me permet d’avoir du personnel comme votre ministre à sa trésorière, j’ai donc embauché quelques collaborateurs pour mon ministère, ne croyez pas que la Culture est un service qui se tourne les pouces ma chère Mademoiselle Milan.
Je sentais son regard sur ma personne, elle ne m’appréciait pas ainsi que Lancelot, je me demandais si elle appréciait une quelconque personne dans ce monde mais là n’était pas la question, fallait qu’on s’éloigne d’ici et je reprenne contenance avant d’avoir envie de commettre un meurtre surtout quand je vois la manière dont elle regarde sa belle manucure… je soufflait intérieurement à cette attitude et fait les salutations d’usage, sourire faux-cul, la voix mielleuse et j’en passe.
- Bonne journée également Mademoiselle Milan.
On finit par s’éloigner, reprenant le chemin du bureau Lancelot et moi, mes épaules se détendent d’un coup quand mon garde prends enfin la parole, il semble avoir bien analyser la situation, un léger sourire apparaît sur mon visage.
- Je m’y passerai bien de ce genre d’affrontement, je crois que combattre à mains nues dans l’Arène est plus facile mais malheureusement pour moi, je viens de perdre ce match face à la Trésorière, elle a l’air d’avoir plus d’expérience.
Je m’arrête sur ce point, je n’aimais pas polémiquer sur certains points comme le commérage et autres, ce n’était pas du tout ma tasse de thé et mon éducation stricte n’a jamais permis ce genre de divertissement non plus. Nous arrivons enfin dans notre bureau, je salue Miranda avec joie, j’ai l’impression d’être à la maison, à nous trois, nous avons réussi à faire quelque chose de bien à ce service même si un assistant ne serait pas de trop ou peut-être former un conseiller, faut voir, j’ai bien fait mes armes de cette façon, il faudrait que je rende la pareille.
- Merci Miranda, des messages ?
Elle me tends la liste des messages dont je m’occuperai après une petite pause bien méritée. M’asseyant dans le petit salon dont Lancelot me tira une chaise, ce n’était pas son travail mais j’ai l’impression que ça l’amusait ou s’entraîne pour quelque chose d’autre, je me suis mise à imaginer le garde en plein rendez-vous galant mais même si ça fait quelques jours qu’il travaille avec moi, je ne pense pas qu’on soit encore assez proche pour parler de ce genre de choses, je reste toujours sa patronne.
- Merci bien Monsieur Steelhearth, oui il en reste effectivement dans la boîte en bois dans le buffet mais vous savez, ce n’est pas votre travail.
Je disais ça à titre informatif, il le fera quand même, je commence à le connaître maintenant, serviable, honnête, courageux, beaucoup de qualités, d’ailleurs je ne me rappelle pas d’avoir entendu des histoires sur sa personne. On dit que les gardes ont une libido plus que débridée que ça en venait même un soucis pour l’attribution des chambres, Lancelot était bel homme, c’est sûr mais en vue de sa personnalité, je le pense sincère en amour d’ailleurs quand je vois qu’il ramène le service à thé avec ma tasse habillement préparée, je n’ai pu m’empêcher de plaisanter légèrement.
- Vous prenez des cours avec Monsieur Castalion ses derniers temps car ce thé est parfaitement bien présenté, je pourrai presque croire que vous voulez me subjuguer Monsieur Steelhearth à moins que ce soit pour une autre femme ?
Je ne voyais pas mon beau garde avec un homme même si je pourrai me tromper mais je me commençais à me demander quel genre de fille pourrait lui plaire…
- HRP:
- Soit on finit en 1-2 tours sinon on décale, comme tu veux !
"Vous subjuguez ? Je pense qu'il faut bien plus qu'un simple thé pour y arriver. Disons que j'ai eu le loisir de voir Monsieur Castalion à l'oeuvre, et que servir un thé convenable doit faire partie de mes attributions de gentleman avant même de parler de mes fonctions de garde royal."
J'avais ajouté ça de ma voix enjouée. J'avais délibérément pas parlé de la demoiselle pour qui j'ai appris toutes ces formalités et astuces pour sublimer le goût du thé. Il est vrai que je n'imaginais pas cette dernière en boire souvent, mais dans le doute, je devais être prêt à toute éventualité. Je n'avais pas vraiment eu l'occasion de lui poser la question avant que nous ne passions deux nuits et un jour à ... enfin bref. Cette simple pensée accentua davantage mon sourire. Allez Lancelot ressaisit toi sinon elle va se douter de quelques choses. Bon, en vrai je sais qu'elle se doutait de quelques choses, mais tant que ce n'était pas officiel entre l'espionne et moi, je ne souhaitais pas en parler. C'est vrai, elle pourrait très bien rompre sur un coup de tête notre relation des plus étranges connaissant le comportement imprévisible de la belle demoiselle. Je soupirais intérieurement, pourquoi est ce que j'avais toujours le chic pour me compliquer la vie ? C'est vrai quoi, j'aurai préféré tombé amoureux d'Haru. Elle est belle, intelligente et n'a pas un soupçon de méchanceté à mon égard. Elle profite des plaisirs simples et n'est pas du tout porté vers la manipulation psychologique, pas envers moi en tout cas. Mais non, il a fallu que je tombe amoureux d'une sociopathe à tendance manipulatrice, mais à côté de ça, qu'est ce qu'elle est cool. Bref alors que je reprenais ma place au côté de la ministre, j'ajoutais d'une voix calme, sentant que je ne pourrais pas leurrer qui que ce soit, je changeais de sujet.
"Je sais que vous croulez sur le travail Madame, mais si je puis vous suggérez une pause pour vous reposez un peu plus, je pense que vous y gagnerez en efficacité. Vous avez l'air fatigué et à mon humble avis, je pense que cela jouera sur votre efficacité. Peut être devriez vous prendre votre journée pour récupérer ?"
Je sais que c'est une acharnée de travail, elle n'a pas eu ce poste pour rien. Cependant, le fait de se tuer au travail était contre-productif lui aussi. C'est un peu mon devoir en tant que garde de veiller à la santé de la ministre. Elle a tellement de travail qu'elle a tendance à s'oublier un peu elle même. Je suis sûr qu'en étant en pleine forme, elle aurais mis la pâtée à Queen dans ces joutes verbales, mais là je la sens tellement à bout de force. Si seulement je connaissais quelqu'un capable de remplir la fonction d'assistante ...
Un sourire apparaît sur mon beau garde, est-ce que j’avais visé juste ? Peut-être que maintenant qu’il a un emploi du temps allégé, il profite de ce temps libre pour aller batifoler ? C’était de son âge de toute façon, envie de fonder une famille, avoir une vie stable ou profiter simplement des plaisirs de la vie car en tant que garde il se demande si il reviendra demain, je ne connaissais pas cette mentalité ou manière de faire, j’ai accordé beaucoup de temps à ma carrière, peut-être beaucoup trop pour faire plaisir à Mère et voilà à trente cinq ans sans partenaire dans la vie, est-ce juste ? Je ne le savais pas mais on ne sait jamais, j’attends toujours un miracle…
Lancelot répondit comme toujours pour dissiper tout malentendu, il voulait être un gentleman, intéressant, je pourrai presque croire qu’il avait rencontré une jeune noble.
- Je vois… un gentleman…
Dis-je tout en souriant, j’attrape ma tasse de thé et continuer de l’observer.
- Il est vrai que prendre des leçons de la part de Monsieur Castalion est une bonne idée même si je pense que sa soeur en connaît encore plus sur ce sujet.
Vaha avait repris l’affaire familiale, j’ai passé de nombreuses après-midis à déguster du thé et voir les différentes compositions florales de sa famille, des journées intéressantes à mon goût. La boisson chaude endort légèrement ma vigilance quand je vois que le garde change subtilement de sujet, il ne voulait pas en parler, soit, je l’embêterais plus tard, il peut avoir une vie privée, je n’ai rien à savoir tout comme je ne connais que l’essentiel sur la vie familiale de Miranda, ça en sera de même pour Lancelot.
- Vous avez raison, le temps est magnifique et je pense que rejoindre mon domicile pour profiter de mon jardin serait une bonne idée.
Il n’avait part tort, Fräulein serait ravie de se promener, elle n’aimait pas sortir et encore moins si je n’étais pas là, j’avais encore du mal à s’exprimer mais je pense que d’ici quelques semaines, elle sera enfin acclimatée à moi et nous pourrons avoir des discussions convenables puis pourquoi pas lui faire découvrir la capitale.
Je finis alors mon thé rapidement, quelques gorgées suffisent et je me redresse avec la grâce de mon rang pour me tourner vers mon collaborateur. Je pose délicatement la main sur l’épaule du Garde.
- Allez je vous libère aussi, continuer à prendre vos leçons pour être un parfait gentleman puis je crois que votre nouvel uniforme sera prêt d’ici les prochains jours.
J’attrape la tasse de thé et la dépose dans la remise derrière pour la rincer et la ranger sur l’étagère, je dépose mes derniers dossiers sur mon bureau, attrape toutes mes affaires et me dirige vers la sortie.
- Ne tardez pas trop également Miranda, je pense que votre petite-fille serait ravie de vous voir après ses cours avec le précepteur.
Un dernier coup d’oeil en arrière, un sourire plus tard, j’adresse mes salutations au soldat.
- Monsieur Steelhearth, profitez bien de votre après-midi.
Un clin d’oeil et j’ouvre les portes pour retourner tranquillement chez moi, je passerai bien à la boulangerie récupérer les pâtisseries qu’apprécient tant ma protégée.
C'est ça que j'appréciais chez Haru, elle n'était pas aussi snobe que ses collaborateurs. Quand elle peut aider quelqu'un, elle le fait de bon cœur en règle générale. C'est sans doute ce qui l'a poussé à prendre Fraulein sous son aile. Elle avait gagné tout mon respect, si tous les nobles pouvaient être aussi préoccupé du peuple qu'elle, nous vivrions peut être un des âges d'or du royaume au lieu de sombrer dans une certaine décadence. Alors qu'elle se lève, je lui emboîte le pas en ajoutant de ma voix franche et calme.
"Je vous raccompagne Madame"
C'était plus une affirmation qu'une question avouons le, je voulais lui poser une question mais les murs du palais ont beaucoup trop d'oreilles. On ne peut pas espérer parler tranquillement. Je voulais lui poser tellement de question, elle qui était une des personnes les plus sages que je connaisse, mais j'étais encore trop intimidé pour oser réellement les lui poser. Je saluais Miranda en passant à son niveau et emboîtait le pas de la ministre. Je me lance où je ne me lance pas ? Non, ce serait stupide. Tu ne peux pas lui parler de Lotta, même elle connait sa réputation, et si elle t'interdisait de lui reparler ? Non, elle n'est pas du genre à juger.
Mais après, si elle faisait le rapprochement entre mon rendez vous avec Lotta et le lendemain le lieutenant qui se fait humilier sur le terrain d'entrainement. Non, c'est un risque que je ne pouvais tolérer. Il fallait que je parle à Lotta qu'à des personnes extérieures de la garde royale et des nobles. Peut être Yv, c'est une espionne après tout donc elle doit savoir tenir sa langue, en plus c'est ma coloc donc elle devrait être capable de comprendre. Mais je voulais vraiment dissocier travail et vie privée. C'est assez frustrant de savoir que la jeune ministre pouvait détenir les réponses que je cherchais et de ne pas être capable de lui en parler. Rhaa, fichu honneur à la con ...
Je l'accompagnais jusqu'à la boulangerie et demeurait silencieux durant le trajet, j'étais tellement face à un dilemme que je n'ai pas vu le temps passé. Quelques minutes après, nous étions arrivé devant le magnifique domaine Du Lys. Je me suis dis qu'à partir de là, elle ne devrait plus craindre grand chose. En plus, contrairement à d'autres personnes dans ce palais, la demoiselle était tellement adorable qu'elle n'avait pas ou très peu d'ennemi. La raccompagnant jusqu'à sa grille, je me suis mis à hésiter, c'était le moment où jamais. Je pesais le pour et le contre et finalement, je me suis abstenu. Je trouverais bien les réponses à mes questions en continuant à fréquenter la belle guerrière. Tant pis, cela prendra le temps qu'il faudra mais je la percerais à jour. Je m'inclinais légèrement, plus cependant qu'envers Queen tout à l'heure et ajoutais d'une voix calme et solennelle.
"Passez une agréable fin de journée Madame."
Je me redressais et après qu'elle m'ait rendu la salutation, je m'apprête à repartir. Tellement de questions en tête et si peu de réponse. Je verrais bien ce que l'avenir me réserve après tout.