Depuis son retour au village perché Sören avait tout fait pour enfouir son passé dans les tréfonds de sa mémoire. Le cupidon avait tout balayé loin de lui. Ses responsabilités dans la garde, son arc, Prim... Il avais tout sorti de sa vie pour s'isoler même de sa famille qui habitait toujours dans cette cité aérienne. Le choix drastique de l'argenté, était rude, extrême, cependant il devait le faire. Ce jour là il comprit plus que jamais pourquoi Tala l'avais quitté il y a de cela dix ans pour s'isoler loin de tout. Il était jeune, insouciant, amoureux. Et dans toute la sincérité de son élan il n'était pas parvenu à apaiser la femme qui se pensait maudite. L'un des premiers échecs du Cupidon qui a vu s'éloigner l'amour, perdu dans les méandres du malheur et de la malchance. Ils s'étaient aimé sincèrement, et c'est le jour où il quitta Primrose qu'il compris le mal-être profond de Tala son ex-amante, c'est ce jour là qu'il s'effondra, comprenant pourquoi la sorcière l'avait écarté d'elle. Tout simplement car elle l'aimait. L'amour fait parfois faire des choses folles, complètement contradictoire. Comme repousser celui qu'on aime pour le préserver. Partir par amour !
Mais oublier n'est pas chose aisé, surtout quand notre corps souffrant nous ramène sans cesse à ce traumatisme. Surtout quand dans le noir on voit toujours briller les deux yeux jaunâtre de la mort. Sören entend toujours les cris de ceux qu'elle fauche, comme un terrible acouphène heurtant ses tympans, il sent ses muscles se tendre pour ne jamais plus avoir de répit, jamais plus de repos. Depuis que que l'ancien garde a vu la créature, l'image du faucheur le hante comme la mort personnifié. Depuis lors, le Rainsworth ne dort plus dans l'obscurité total, trop terrifié par la noirceur pour dormir sereinement. Alors il dort avec plusieurs cristaux de lumière allumé sur sa table de chevet. Ces talismans lumineux à porté de main, le baignant de leur douce et pale lumière, calment sa phobie des ténèbres et apaise sa paranoïa. Même après ces deux ans, passé sans encombre majeurs, depuis son traumatisme, il reste marqué par sa rencontre, mentalement brisé dans la pénombre. Il a trouvé une nouvelle lumière dans son coeur, un espoir en se plongeant corps et âme dans le culte de Lucy, priant chaque jour sous la supervision de la prêtresse du village perché.
Chaque jour, le fleuriste s'étalait en prière, demandant chance et bonheur pour ses parents, ses sœurs, Tala et Prim. Tout les jours oui, Sören priait pour la réussite de la blonde, espérant de tout son coeur qu'elle parvienne à concrétiser ses objectifs. Le cupidon avait éloigné son élève de lui notamment pour ça... Pour qu'elle vive ses rêves, qu'elle ne pouvait plus vivre auprès de lui. Pourtant il lui vouait un amour toujours aussi grand et il fixait tous les jours le petit portrait de toile de la demoiselle avec grande mélancolie. Il priait aussi pour Tala. Les dernières rumeurs que l'homme à la crinière d'argent avait entendu ne la mettait pas en valeurs, une diseuse de bonne aventure, une sorcière... Non ! Ce n'était pas la Tala qu'il avait côtoyé dans sa jeunesse ! Le fleuriste avait le souvenir d'une femme douce et attentionnée qui s'était écarté de lui par amour, une femme souriante et généreuse qui ne cherche qu'à s'intégrer dans ce monde et que le karma punit à chaque instant. Le karma ou Lucy ? Sören priait pour son bonheur, pour que son aura de malchance disparaisse.
Un jour que le fleuriste venait décorer le temple du village perché, la prêtresse, très heureuse du dévouement de Sören l'invita à faire entrer Lucy un peu plus dans sa vie. Elle lui proposa de devenir initié, pour cela il fallait simplement que notre brave citoyen fasse un petit pèlerinage jusqu'au temple principal du culte de la chance. Une étape obligatoire si il voulait que la déesse lui accorde bénédiction et chance. Une étape importante si il voulait avancer dans sa foi et dans sa vie. Ainsi pour la première fois il laissa la direction du magasin à sa sœur Euridice et parti en compagnie de quelques fidèle comme lui en direction du temple principale. Évidement, Sören avait énormément d'appréhension, cela faisait deux ans qu'il n'avait pas quitté la cité perché dans la cime des arbres, deux ans qu'il n'avait pas mis un pied dans un zone sauvage... Terrifiante !
Mais heureusement Lucy protégeait le convoi et le petit groupe arriva sans encombre devant le grand temple. D'autres groupe était là. Des voyageurs en escale venu prier la déesse pour rendre leur voyage propice. Des marchands venu demander prospérité, des gens venu quémander choses et autre, et cette femme que j'aurais reconnu entre mille. Tala.
Elle ne dirait pas qu’elle en avait peur. Juste qu’elle en ressentait une certaine aversion. Ses capacités n’étaient pas inconnues du monde, quelques initiés jusqu’à même s’amener à de potentiel Frère et Sœur, connaissait son existence. Telle était le châtiment qui existait dans sa vie, dans le choix de ses parents. D’ailleurs, le risque de pouvoir les croiser la rendait tout autant nauséeuse. Bien que le temple des plaines était assez grand, bien qu’il existait d’autre autel dans l’intérieur du royaume, un part d’elle savait que la malchance pouvait tourner. Non pas pour elle, de principe, mais bien pour ses géniteurs qui devaient se penser à l’abri des hontes de Lucy.
Ainsi, ce ne fut bien que sans envie qu’elle avait préparé ses affaires pour se rendre au temple. Une marche assez longue, du moins en tant normal. Elle avait eu cette fois-ci, la chance de tomber sur un marchand très agréable qui ne la connaissait pas. Accueillant au faciès le plus agréable malgré son vieil âge, Tala avait opté pour le mutisme couvert d’un sourire. Bien trop de peur que des mots mal placés pouvaient rependre de la malchance envers cet être accueillant. L’homme l’avait ainsi laissé sur le bas de la colline. D’ici, elle n’avait qu’à suivre la légère foule qui montait jusqu’au temple.
Son visage quant à lui, serait légèrement masqué grâce à la capuche de sa cape durant la montée histoire de ne pas se faire reconnaître dans l’immédiat. Peut-être aurait-elle du garder ce semblant de dissimulant jusqu’à ce que sa quête soit réalisée dans son intégralité. Tala qui n’avait sans doute pas très bien réfléchit sur ce côté pratique, la cible pouvait tout autant tenter de s’enfuir si elle savait à l’avance que la sorcière était à l’entrée du palais. Et pourtant, c’est en abandonnant cette capuche qu’elle le remarqua. Elle le remarqua tout autant qu’il semblait l’avoir remarqué. Que leur regard, c’était alors croisé.
« Sören ? »
Quelle ne fut pas la surprise pour la sorcière que d’apercevoir un ancien amour aux portes de sa pire ennemie.
-Tala... Que...
Sören n'a jamais réussi à terminer sa phrase, envahi par un flots de sentiments divergents. Le fleuriste était content de voir un visage connu dans cette mare informe d'inconnus, venu prier un dieu finalement tout aussi inconnu et flou. Pourtant, la raison qui avait fait venir ici l'homme à la crinière immaculée, aux portes du temple de la chance, et celle fatale qui se devait de le repousser de Tala. Il ne recherchait que chance et succès là où la sorcière ne pouvait lui offrir que malchance et échec. C'était étrange oui de vouloir l'enlacer et d'avoir peur de le faire au regard de leur passé commun, au regard de la trahison manifeste de l'antithèse de la déesse de la chance. Le fleuriste s'était simplement détaché du groupe en claudiquant, serrant dans sa main sa fidèle canne en bois, avec une rare intensité.
-Tu sais... J'ai compris maintenant pourquoi tu m'avais quitté... J'imagine que tu as dû souffrir plus encore que moi... Mais je ne pensais pas que tu te vengerais parce que j'avais refais ma vie... Parce que j'en aime une autre...
L'ancien garde savait que Tala l'avait maudit, que c'était elle qui avait rompu sa destiné avec le fil obscure du malheur. Il pensait que c'était l'amour changé en rancoeur et en frustration qui avait été le moteur de sa vengeance, il était loin de s'imaginer que c'était l'argent et le regard des gens qui avait corrompu sa douce et si gentille Tala. Finalement, l'archer renié, osa reprendre son pas, sa démarche unique le porte plus proche de la sorcière que quiconque voudrait l'être. Il posa alors sa main sur la joue droite de la femme pour lui murmurer à l'autre oreille :
-Je ne t'en veux pas. Tout le monde fait des erreurs... Je sais au fond, que tu restes la gentille et douce Tala que j'ai chéri...
Leur romance s'était effondré il y a déjà une décennie, mais si il ne se projetait pas avec elle, il espérait au moins qu'elle puisse trouver le bonheur, car Sören était bien placé pour savoir que la sorcière ne souhaitait qu'être aimé mais elle était maudite. Se détachant d'elle, le fleuriste la regarda avec un sourire doux-amer. Sa blessure physique n'était le reflet que d'une infime partie de la souffrance que devait ressentir son ancien amour, et penser à ça lui minait le moral. Pourtant il ne pouvait lui offrir qu'un sourire, promesse physique d'un pardon immuable que le culte prônait. Et il est vrai, parler, se confier, confronter et pardonner allégeait son fardeau... un peu.
-Que viens tu faire ici ? Tu viens quémander un peu de chance à Lucy ? J'espère qu'elle est aussi efficace que toi !
La sorcière n’était pas du genre vengeresse, bien au contraire. Tant, est-il qu’elle ne vengeait pas sa propre personne, mais plutôt les envies profondes de ses clients. Jamais l’adolescente ou bien même la jeune femme qu’elle était autrefois n’avait tenté de se venger de Sören, tant ses sentiments avaient été véritable. D’autant plus, qu’elle ne comprenait pas le sens de ses paroles, Tala ignorant totalement qu’il était amoureux d’une autre personne. À vrai dire, elle s’en moquait aujourd’hui. Tout comme elle s’en serait moqué une fois disparue, happée par les rumeurs qu’elle ne pouvait pas suivre, mais qu’accepter. Triste, face à cette nouvelle, la sorcière l’aurait été. Mais se venger ? Jamais cette appellation ne rentrait dans ses critères de vie. Pas dans l’immédiat, pas pour Sören. Car si Tala cherchait à se venger d’un être, il ne ferait aucun doute qu’elle s’attaquerait à ses géniteurs avant toute chose.
Tala restait silencieuse, comme pétrifiée face à ce fantôme du passé. Incapable de mouvoir ses lèvres, d’y répondre. Elle ne fait que sursauter d’un muscle lorsqu’il pose sa main sur sa joue pour lui chuchoter à l’oreille. Un frisson qui lui fit comprend où il venait en venir. Du moins, elle s’imaginait qu’il parlait de cette fois-là. Cette soirée, un genre de fait entre la garde où elle avait été conviée. Non pas pour faire acte de clown de service, mais bien parce que l’un des gardes l’avait gracieusement payé pour maudire son ancien amant. Malgré ses sentiments, ne pouvant refuser les moindres cristaux durant cette période, qui avait été des plus durs pour elle, Tala avait accepté. Bien que la malédiction n’eût pas été véritablement prononcée, simple source de malheur dont les faits n’avaient pas été évoqués. Alors, bien qu’elle en imaginait la source, la sorcière n’avait jamais connu la finalité de ses actes.
« Je… »
Finit-elle finalement à articuler.
« Tu te trompes, Sören. »
Et cela, sur tous les points. Que ce soit la vengeance, sur sa soi-disant douceur et gentillesse. -Car dans le fond, elle se persuader elle-même de cette capacité à jouer son rôle de sorcière, totalement détruite par la vie et les actions de ses gens qu’elle avait autrefois considéré comme des proches. Tout autant que pour sa présence ici. Elle ne croyait pas en Lucy et en ces imbécilités, la chance n’existait pas pour les gens comme elle, pour ceux qui n’existait que pour apporter malheureux aux existants. Poing serré, elle fit quelques pas en arrière pour s’éloigner de son premier amour.
« Si je suis ici, ce n’est pas pour Lucy. Bien au contraire. »
Elle laisse un court silence.
« Toi, que fais tu là ? »
-Ce que je fais ici ? Chasser ce regard qui... Quémander quelques bénédiction à la chance... Augurer mon futur de bonheur tout ça.... Un peu comme toi dans le fond j'imagine...
Le cupidon allait parler de ce souvenir qui hantait toujours ses rêves, du souffle chaud de la mort qu'il sentait toujours en une sueur froide sur sa nuque. Mais le fleuriste refusait de tourner le couteau dans la plaie. Il voyait bien que le teint de Tala était plus blafard que dans ses souvenirs, son immobilisme inquiétant. Néanmoins elle venait tout juste de reprendre contenance ce n'était clairement pas le moment de l'accabler et ça ne valait pas la peine que je m'accable tout seul en ressassant ces vieux souvenirs maudits. L'homme à la crinière d'argent leva un regard perdu vers les cieux, laissant se dessiner sur son visage angélique un sourire plein d'espoir. Dans le ciel, naviguaient milles formes, milles destins qui dans les yeux de chacun changait indubitablement. Les humains, les émotions et le karma, Sören voyait ça comme des nuages, sans cesse en mouvement et en perpétuelle transformation. Humains et nuages sont si similaire... Il suffit de changer de regard pour le voir se transformer. C'est ce que l'aîné des Rainsworth essayait de faire en rejoignant véritablement le culte de Lucy, changer son regard sur le monde, son regard sur lui-même. Changer pour muer son destin scellé par la peine et la malchance.
-Je me trompe c'est ça ?
L'ancien garde posait à nouveau son regard sur celle qui fut mon premier amour. Il savait bien qu'elle avait raison, quelque soit le sujet qui lui faisais sous entendre ça. Il était certainement bien trop égoïste pour que Lucy daigne le bénir, mais il n'était qu'un humain dont le désir est de vivre en paix, sans que la peur ne le prenne plus dans son sommeil, sans que ceux qui l'aime s'écarte de lui par les kilomètres ou la mort. Le fleuriste laisse alors son regard se perdre dans la forêt luxuriante s'érigeant dans le dos de la femme, laissant son âme vagabonder face à ses questions alors que ses yeux se brouillaient un instant. L'homme au manteau rouge et à la canne de bois et de diamant balbutia alors des bribes de paroles :
-C'est le propre de l'humain de se tromper non...je ne peux pas éviter ça, n'est-ce pas, Ta...
Le fleuriste avait bondit vers la sorcière, la serrant dans ses bras en une accolade douce et puissante qui avait surtout pour but de remonter sa capuche pour que son visage soit de nouveau dissimulé, même si là en l'occurrence le visage de L'ennemie de Lucy était enfouit dans l'épaule de Sören. Une voix grasse s'éleva de derrière toi Tala, apportant la réponse à ta question quand à la raison de cet élan soudain de ton locuteur. En tant que ton ex-amant, l'homme aux cheveux blanc savait des choses sur toi. Par exemple Sören savait que Tala avait une peur bleue d'approcher les lieux de représentation du culte de Lucy, non pas que la déesse est un quelconque impact sur elle, non ce qu'elle redouter c'était de croiser ses parents qui l'avaient abandonné très jeune. Abandonner une enfant à son sort... C'est tellement égoïste, le Rainsworth n'avait, aussi, jamais digéré cette confidence. Et il ne voulait pas que la sorcière se retrouve confronter à son pire cauchemars car elle s'était découverte pour lui faire face... Ça non, jamais !
-Bien le bonjour, frère...
Sören avait accueilli le religieux avec un grand sourire, sans lâcher Tala. Ce dernier ramassa la cane de l'infirme en rouge et lui tendit en saluant le duo. Un curieux ou quelqu'un ayant reconnue la sorcière ? Là était toute la question que le fêlé irisée voulait élucider avant de lâcher la femme.
« Pourquoi ? »
Finit-elle par susurrer malgré elle, incomprise. Du souvenir d’antan, Sören n’était pas le genre de personne à se tourner ainsi vers la déesse Lucy. Quand bien même son entité pouvait être adorée, se rendre dans l’un de ses temps était une étape bien supérieure. Beaucoup plus complète et pleine de sens. La sorcière se faisait à croire que ça n’avait aucun sens, aucun lien avec cette pseudo-vengeance. Certes, il y avait eu cette soirée de garde, celle où elle avait été invitée. Celle où le contrat avait stipulement indiqué son ancien bien-aimé. Mais elle ignorait tant de choses, tant d’histoire. Si incapable qu’elle était, ignorant la portée qu’exerçait l’actif de sa malédiction allié avec l’intensité du passif, qui s’était autrefois, confronté avec force.
Tant de réponses inexistante finalement. Pourquoi est-il vraiment ici. Pourquoi évoquait-il une vengeance. Pourquoi. Que lui était-il arrivé ? Car aussi violent son pouvoir aurait pu s’acharner sur sa personne, Tala était bien incapable de croire qu’il ne lui en voulait pas. Que ses mots puissent être ainsi sincère, aussi douleur puisse être son passé une fois leur chemin écarté. Ainsi, elle aurait pu se sentir misérable si la vie n’avait pas forcé son développement. L’évidence même était que cette rencontre n’avait strictement aucun sens. Que ce soit aujourd’hui, demain, dans un temple ou bien dans n’importe quel autre lieu. À croire que la vie, bien trop joueuse, Lucy s’en faisait un malin plaisir de les présenter en ce jour l’un à l’autre.
Alors elle récupère une grande brasée d’air, aspire tout ce que son corps lui permet. Elle était une femme occupée et désolée, même si ses mots ne s’y présenteraient jamais. La sorcière mourrait d’envie de comprendre, mais de toute évidence, Sören ne semblait pas enclin à de plus amples explications. Un pas ou du moins, un demi-pas. C’était ce que Tala avait exécuté pour ce rapproché de son ancien amour, pour lui toucher deux mots avant de continuer sa route. Mais prise de coup lorsque l’homme bondit vers elle, l’entourant de ses bras. Dans son geste, sa capuche avait été rehaussée sur le haut de sa tête.
Sa tête nichée au creux de son épaule, encapuchonnée et les cheveux tombant vers l’avant de son visage face à la vivacité du geste. D’un instant, les souvenirs qu’elle tentait d’oublier avaient refait surface, coupant totalement la sorcière de la moindre réalité.
« Qu’est-ce qu’il t’est arrivé après notre dernière rencontre. »
D’un faible murmure, un caprice d’enfant. Inconsciente des éléments qui les entouraient.