Alors que la dame dépose les documents sur son bureau, je sens la présence de Valentino qui s’approche derrière moi afin de vérifier les nombreuses listes qui nous avaient été remises. Cette fois-ci, je laisse mon officier gérer l’affaire et observe calmement ce qu’il fait et écoute attentivement ses paroles. J’en fais un exemple après tout, je ne possède pas la même expérience que ce dernier et puisqu’il se déclare être un excellent détective autant profiter de sa sagesse non? Enfin, j’ai l’impression de parler de lui comme si c’était un vieux de la vieille, mais il n’a que trente-trois ans. Ce n’est que neuf ans de plus que moi. Ça va encore.

Il pose des questions pertinentes, demande des registres supplémentaires afin de faire des correspondances. Du coup, trois noms finissent par ressortirent du lot. Trois jeunes hommes qui ne pourraient jamais faire cela selon les dires de la femme, mais il a un mais. Depuis l’arrivée d’un petit nouveau au village voisin, le comportement des garçons semble avoir changé et qui plus est, ils n’ont jamais nettoyé sans avoir une bonne raison ce qui pourrait faire d’eux nos principaux suspects. Du coup, comment communiqué avec ces derniers sans qu’ils ne prennent la fuite.

« Ma Sœur, vous pourriez les faire demander à votre bureau. Ainsi, votre présence pourra peut-être les apaiser, après tout, parler à des gardes peut parfois être intimidant surtout s’ils ont fait de mauvais coups.
- Oui, oui bien sûr. »

Elle se lève et se dirige vers la porte afin de l’ouvrir et de demander à l’un de membre présent d’aller quérir la présence des trois initiés mentionnés. Pour notre part il nous restait plus qu’à attendre. Par quoi est-ce que je devais commencer, qu’est-ce que je devais dire. Si je me présentais à eux, suivi de Valentino, je suis sûre qu’ils ne m’écouteront pas. Après tout, pourquoi une simple soldate poserait-elle les questions? Alors je me lève de mon siège et prends l’officier à l’écart.

« Je ne suis pas très à l’aise pour la suite. J’ai peur de faire une bêtise ou une connerie.  Alors, s’il y a quoi que ce soit n’hésite pas à intervenir d’accord? »

Je me mets donc à marcher dans les quelques mètres d’espace que nous avions. Si je foire ici, c’est toute notre enquête qui tombe à l’eau et si nous ne pouvons pas les coincer avec des aveux, nous ne pourrons certainement pas les prendre sur les faits. Leur délit ne sera pas puni et ça je ne peux pas laisser aller. Quoiqu’ils auront peut-être la peur de leur vie et ils ne recommenceront plus, mais je serais très déçue si nous n’avions pas le mot final.

Après de longues minutes interminables, les garçons entrent à tour de rôle dans la pièce. Je me mets aussitôt droite bien que ces derniers me dépassent déjà d’au moins une tête. Bref, je dois m’imposer avec mon attitude, mais sans devenir déplaisante non plus. Je ne suis pas un tyran, mais je suis là pour arrêter le ou les coupables. Je joins mes mains dans mon dos et m’avance auprès de Agnès qui explique rapidement que nous sommes là pour leur parler.

« Bonjour les garçons, voici les gardes Khalie et Valentino. Comme vous le savez, ils sont ici pour enquêter puisque nous sommes victimes de vandalisme. Ils sont très gentils alors n’ayez pas peur de répondre à leurs questions.
- En effet, donc je suis Khalie et lui c’est Valentino. Si nous sommes ici, aujourd’hui, c’est pour retrouver notre très cher vandale et nous pensions que vous auriez peut-être des informations à nous fournir. Premièrement, avez-vous vu quelqu’un de suspect rôder dans les alentours lors des dernières nuits?
- Non, madame, dirent-ils à l’unisson.
- Très bien, très bien, et dites-moi, avez-vous noté des comportements étranges chez certains de vos camarades.  
- Non, madame. »

Je les regarde avec un léger sourire et je me mets alors à faire quelques pas derrière le bureau alors qu’Agnès s’était installée en arrière. Je leurs faits signe de prendre place devant moi et ils optèrent se trouvant chacun une chaise. Je les observe constamment du coin de l’œil. J’essaie de voir des signes de nervosités des tics qui pourront les trahir. Je sais qu’ils ne parleront pas d’eux-mêmes, alors je dois les pousser à agir.

« Très bien, je vais donc vous expliquer ce que nous avons trouvé jusqu’à présent. Nous avons confirmé avec Agnès que tous les soirs le ou les vendales reviennent saccager les murs du temple. Aucune garde n’a été prosté pour surveiller puisqu’on ne veut pas vous imposer plus que nécessaire. Nettoyer les murs est déjà une lourde tâche. Alors comment sait-il qu’il peut revenir sans problème toutes les nuits? Mis à part les membres du temple, personne ne devrait savoir qu’aucun membre ne surveille. Ce qui nous amène donc au point suivant. Le ou les vandales sont donc membres du clergé. »

Je marque une pause exprès déposant mon regard grisâtre sur celui du centre. Je le fixe sans parler sans broncher. Il soutient mon regard un moment, mais je le vois déglutir péniblement alors qu’une perle de sueur coule doucement sur sa tempe. Je me détourne alors de ce dernier reprend ma marche et jette un coup d’œil à Valentino.

« Nous avons par la suite, celui de gauche sursaute dès que je reprends parole sans avertissement, mais je n’y fais pas attention, chercher de potentiel suspect. Mais comment les trouver alors que nous n’avions peu d’indices. Alors c’est en regardant vos camarades frotter durement les murs que nous en sommes venus à penser à des possibles listes de tâches avec des noms. Nous avons donc interrogé une belle demoiselle qui a su nous répondre ce qui nous a mené jusqu’à Agnès ici présente qui a coopéré avec moi en fournissant tous les documents que nous avions demandé. Sur ces listes seuls quelques noms n’y figuraient pas et savez-vous desquels il s’agissait? »

Celui de gauche fait signe rapidement que non alors que celui de droite hausse les épaules d’une attitude nonchalante. Celui-ci du milieu ne parle pas, mais l’une de ses jambes sautillent rapidement sur place prise d’une pulsion qu’il ne semblait pas contrôler.

Je prends les documents en main et je lève les yeux de derrière ces derniers.

« Les vôtres; Jean, Will ainsi que Tuck. J’imagine que le ou les coupables ne souhaitent pas participer aux tâches de ménages parce qu’ils ont passé la nuit à peinturer et que ce serait le comble s’il devait nettoyer leurs propres méfaits, n’est-ce pas. Enfin, nous pensons fortement qu’il s’agit de l’un d’entre vous, sinon peut-être bien de votre nouvel ami…comment il s’appelle déjà? Ah oui, Robbin. »

Un grand sourire fend mon visage alors que leurs yeux s’ouvrent en grand.

- Ce n’est pas nous!
- Ouais!
-… (essuie nerveusement ses mains contre ses pantalons)

S’ils ne veulent pas avouer par eux-mêmes peut-être qu’une autre méthode pourrait nous aider non? Après tous, celui du centre semble être le plus nerveux et est très certainement sur le point de craquer, mais avec la présence de ses camarades cela lui donne peut-être le courage de garder le secret.

« Officier supérieur, Rivolti, je vous laisse la place. »

Ils étaient temps d’opter pour une seconde stratégie et si révéler le grade de Valentino pouvait aider à intimider ces derniers, je n’hésiterai pas.

Nous échangeons de place rapidement suite à mon interpellation de l’officier. Ce sera la première fois que je le verrai agir de la sorte et contrairement à lui, je ne m’efface pas. Non, je reste à ses côtés, plaçant mes mains dans mon dos alors que ma dextre serre le poignet de sa voisine. Je garde le dos droit, j’écoute et j’observe.

Mentionner aux trois initiés les conséquences qu’apportaient les délies commis était une bien bonne idée et je me maudis de ne pas y avoir pensé en premier. L’homme ne réfléchit pas toujours avant de poser ses actes et c’était très certainement pour cela que ces jeunes s’étaient laissés embobiner dans une combine quelconque. Valentino semble d’ailleurs connaître la vérité sur toute cette histoire et présente chacun des garçons de façon à bien définir qui ils sont réellement; le leader, le second et celui-ci qui est là malgré lui. Mais je dois dire que je n’attends pas du tout à ce qui se passe par après. Je suis même surprise, voire bouche bée! Je savais qu’il n’aimait pas user de son pouvoir, mais de là à en faire une démonstration. Il est méconnaissable et j’ai un petit pas de côté, non pas parce qu’il me fait peur ou me dégoûte, mais seulement parce que je veux voir à quoi il ressemble et je dois dire que c’est assez impressionnant.

Capable de ressentir les vibrations? Je ne sais pas comment cela fonctionne alors j’essaie de me calmer suite à ma surprise. Je ne voudrais pas que cela puisse nuire à sa lecture quelconque. Enfin, je ne veux pas non plus deviner le fonctionnement de cela. Je n’ai jamais étudié le scorpion, bien que je sache ce que certaines émotions font sur le corps de l’homme. Tuck était celui qui démontrait très bien la chose. Il était très nerveux, la sueur, les spasmes de sa jambe, son silence. Tout son corps parlait pour lui et démontrait qu’il était le maillon faible du trio.

Mais je ne sais pas si c’est l’apparence de Valentino qui les intimide plus qu’autre chose ou était-ce le fait qu’ils ne pouvaient lui mentir qui les poussa à parler. Le nom de Robbin ressort de nouveau alors qu’ils tentent de se défendre.

Et pendant que Valentino reprend son apparence originelle, je m’avance vers les initiés.

« Il y a bien des façons d’égayer les autres et ce n’est très certainement pas en leur donnant des corvées supplémentaires. Vous auriez pu demander à Sœur Agnès pour créer un projet. Faire une fresque sur une toile ou bien un mur qui aurait pu vous être attitré en toute légalité. »

Pendant ce temps Agnès et Val s’entretiennent et lorsque j’entends mon nom, je me détourne des trois garçons pour regarder vers mon officier et dès que nos yeux se rencontrent, ils me signalent qu’il est temps de reprendre la route. Nous avons appris de quel village provenait ce cher Robbin et nous nous dépêchons de nous y rendre. Il s’agissait d’un village voisin à peine une heure de cheval et lorsque nous faisons mention de Robbin aux gens du coin ceux-ci semblent être heureux de nous guider jusqu’à sa demeure.

Bien sûr, lorsque nous pénétrons sa demeure après avoir toqué à celle-ci, nous prenons le temps de lui expliquer la raison qui nous avait menés jusqu’à lui. Il ne cause pas de grabuge et accepte de nous suivre docilement. Après tout, il se savait coupable de son crime et ne le niait pas. Nous repartons alors vers le temple où nous attendaient les trois initiés qui s’étaient préparés à voyager.

***

Après les quelques jours de voyages à dos de monture, nous revoilà enfin à la capitale, non pas seulement avec un voyou, mais bien avec quatre d’entre eux. Le chef, Robbin, avait réussi à embobiner trois de ses amis initiés afin de décorer les façades du temple. Tous les quatre avaient parlé et avoué leur crime.

Nous avions, bien sûr, fait envoyer une missive dès notre arrivée afin d’aviser la conseillère qui nous avait remis notre mission que nous étions arrivés à la capitale expliquant ainsi les détails de notre enquête ainsi que de nos résultats obtenus.