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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Coeur d'encre
    Le royaume d'Aryon  » Le royaume d'Aryon » La grande forêt
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    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
    Informations
    Coeur d'encre
    Mer 10 Fév 2021 - 18:28 #
    Le poignet d’Aord le faisait horriblement souffrir. Voilà des heures qu’il était penché sur son pupitre à recopier lettre après lettre un livre assez volumineux pour le temple de la capitale. Il avait dû renflouer un peu sa bourse en travaillant pour le culte avant de repartir sur la route. C’est donc pourquoi il se retrouvait dans l’une des nombreuses salles de copiste qui jouxtait le lieu de culte et de prière. Il entendait parfois des voix résonner dans les longs couloirs, apportant avec elles des brides de prières et de sermon. Il appréciait ces moments de tranquillité, bercé par le frottement de la plume sur les pages. C’était une activité qui enseignait la patience, car le moindre ouvrage pouvait prendre des années avant d’être correctement copié et calligraphié, sans parler des enluminures ! Avec le progrès en matière de magie, cela serait peut-être bientôt bien plus facile allez savoir …

    Il finit par poser sa plume sur le devant du bureau, relâchant par la même occasion toute la tension qu’il avait accumulée en se concentrant sur son œuvre. Il ne lui restait plus qu’une dizaine de pages à retranscrire et on pourrait passer à l’enluminure. Le jeune frère se leva pour jeter un œil aux réserves d’encres, rangées dans un coffre au fond de la pièce. En ouvrant, le lourd couvercle en bois, il ne put s’empêcher de remarquer que le coffre était bien vide. Une telle quantité ne suffirait pas à achever son travail. Le jeune homme décida qu’il valait mieux s’enquérir des stocks auprès du frère supérieur avant de continuer en sachant qu’il devrait laisser son travail en plan. Le pauvre garçon ne savait pas encore dans quelle galère il s’engageait.

    Après avoir poursuivi le frère supérieur dans toute la bâtisse, il finit par apprendre que les stocks d’encre ne seraient pas renouvelés avant un mois. Les livraisons de pigments en provenance de l’archipel avaient pris un retard monstre. Aord insista pour trouver une autre solution, le temple avait peut-être des réserves ou peut-être qu’un autre temple pourrait les réapprovisionner. Après d’intenses réflexions, le frère supérieur avait fini par trouver une solution :

    Je crois me souvenir que le domaine de Hvit possède un temple qui dispose d’une réserve d’encre généreuse. Vous pourriez y terminer votre travail. Le responsable du domaine est un féru d’art, paraît-il. Je vais envoyer un message pour annoncer votre venue.

    Aord remercia le frère de lui faire gagner autant de temps. Le domaine dont il parlait ne semblait pas être trop éloigné de la capitale et le temple se proposait de lui payer le voyage, que demander de plus ? Il lui avait cependant donné des parchemins supplémentaires à achever pour rentabiliser l’expédition.

    C’est donc dans un chariot que notre jeune frère arriva quelques jours après aux portes du domaine. Il s’assura qu’on décharge bien la grande malle qui contenait toutes ces pages de parchemins comme de papiers. Il remercia et paya pour le transport avec l’argent qu’on lui avait donné, puis laissa le cocher reprendre la route en sens inverse. Ce n’est que quand il fut seul devant les grilles qu’il se rendit compte qu’il n’arriverait jamais à porte cette énorme malle tout seul ! Il ne voulait pas non plus la laisser en plan, son contenu était trop précieux pour rester sans surveillance. Soudain, il aperçut quelqu’un au loin au-delà des grilles. Béni soit la déesse, il n’allait pas avoir à attendre trop longtemps. Il s’empressa de lever la main pour lui faire signe, puis, il mis ses mains en porte-voix pour lui crier :

    OHEE ! Bonjour, je suis le frère Svenn au service du temple de la capitale ! Je suis ici pour utiliser vos réserves d’encres ! Vous avez dû recevoir un message du frère supérieur pour prévenir de mon arrivée !
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Coeur d'encre
    Jeu 11 Fév 2021 - 14:45 #
    A proximité de l’entrée un homme appelle et regarde d’un air navré un énorme coffre. Le fameux Frère ! mais pourquoi n’a-t-il pas demandé à son chauffeur de le déposer devant le manoir, ou au pire devant le petit temple dédié à Lucy ? Camille pose sa bêche, celle-là même qu’il s’évertuait à enfoncer dans le sol gelé pour évacuer la tension crée par l’indisposition d’Arthas, l’arrivée de l’équipe de chasseurs de moloch et simplement ce temps pourri qui risquait de saper la croissance des végétaux et déséquilibrer la nature. La preuve, cette femelle moloch qui s’était tant rapprochée des implantations humaines…

    Bêche posée, il se dit qu’il n’y reviendrait pas de sitôt, l’invité arrivé devrait être accueilli comme il se doit. Il nettoya rapidement son outil avant de le ranger tout aussi vite. Il marcha ensuite d’un pas vif vers l’arrivant, retirant ses gants poussiéreux et sales pour lui tendre une main assez curieusement longue, fine et soignée.

    - C’est très lourd ? -son élocution si elle n’était pas hésitante comme souvent, n’était pas non plus celle du jardinier qu’il paraissait être, ses vêtements tâchés de sueur malgré le froid, usés et modérément sales juraient clairement avec la voix posée et éduquée qui était la sienne, s’en rendant compte il sourit- Je suis Camille Hvit, excusez mon accoutrement, j’aime à me dépenser physiquement. Si nous pouvons le porter à deux je vais vous aider, sinon venez, il n’y a pas de voleurs sur le domaine, nous allons aller ensemble chercher de l’aide, les quartiers des jardiniers sont proches, ils trouveront bien une brouette pour déplacer vos possessions.

    Il marqua un arrêt pour observer l’autre homme. Un frère de Lucy ? Au moins n’était-ce pas un rat de bibliothèque issu de la noblesse qui pincerait du nez en voyant l’état du temple… Camille stoppa de nouveau, encore que… avoir l’air « vivant » ne veut pas dire qu’on est plus tolérant ni plus ouvert que certains qui semblent s’être drapés dans le linceul des convenances… En tout cas, l’homme semblait sympathique et accessible.

    - Vous venez pour notre encre ? J’espère qu’elle est encore en bon état, le dernier Frère à avoir occupé le temple était un vieux monsieur très âgé, et très sage qui nous a malheureusement quitté l’année dernière.

    Il se retint de dire : un fourbe cérémonieux et creux, faisant preuve d’obscurantisme et de mépris pour tout ce qui n’est pas noble… Pourtant volontiers généreux et tolérant, il abominait ce personnage falot et hypocrite qui à n’en pas douter ne pouvait représenter les valeurs de la déesse. Cependant, sa mort à un âge vénérable avait privé le domaine d’officiant, Arthas se retrouvant en charge du culte. Il sourit. Si Arthas était un vrai croyant, sincère et plein d’entrain, il n’avait aucune des qualités qui font un bon serviteur de Lucy ni un prêtre fédérateur. Le petit autel s’était vu déserté, les villageois préférant s’en remettre à des frères itinérants pour tout ce qui touchait à la religion. Camille ne pouvait leur en vouloir, après tout, son mentor avait choisi la carrière des armes, il n’avait jamais prétendu autre chose.

    Il revint à des préoccupations plus terre à terre.

    - Si les encres ne sont plus utilisables, nous avons -eux bien à l’abri- des pigments qui vous permettront sans doute d’en fabriquer, en quantité à ce qu’il me semble. Je suppose qu’un copiste sait faire son encre ?

    En marchant ils étaient arrivés devant une bâtisse en bon état, proprette et malgré la saison ornée de végétaux divers. Un homme âgé en sortit aussitôt, regardant son jeune maître d’un air mécontent.

    - Camille vous allez prendre froid à traîner ainsi fagoté ! Que deviendra le domaine sans maître ?

    Mais il partit chercher deux jeunes gars costauds qui s’attelèrent à une charrette à bras en plaisantant et riant comme deux jeunes chiots.
    Sans répondre, le maître du domaine donna une accolade -affectueuse ?- au vieux jardinier et s’adressa au Frère :

    - Voulez-vous vous rafraîchir avant le déjeuner ? Souhaiterez-vous séjourner au manoir ou au temple ? J’ai peur que ce dernier n’ait été un peu laissé à l’abandon… En l’absence d’officiant notre priorité est allée ailleurs.

    Il se mordit les lèvres en ajoutant :

    - Et en dernier notre Frère Aeron avait des idées étranges… Il refusait que des maçons réparent un mur par exemple, disant que la déesse serait troublée par le vacarme. Il ne voulait pas non plus de servante dans les lieux, exigeant des hommes et uniquement des hommes d’âge… Les hommes âgés font ce qu’ils peuvent, mais ils n’ont ni la vivacité ni la vigueur de gens plus jeunes… Je peux toutefois vous montrer l’endroit, dans l’ignorance de vos désirs nous avons nettoyé les locaux et allumé du feu pour réchauffer les pièces, aussi bien les appartements du desservant que le temple proprement dit.

    Faisant un geste d’invite, il montra le chemin qui montait vers une grande demeure en briques rouges.
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
    Informations
    Re: Coeur d'encre
    Jeu 11 Fév 2021 - 22:20 #
    Aord ne savait pas comment s’adresser aux nobles. Devait-il donner dans le messire ? Le monseigneur ? Il avait préféré s’arrêter à l’entrée du domaine afin d’être sûr de ne pas tomber sur quelqu’un de trop important. Il avait simplement besoin d’un serviteur pour lui expliquer l’étiquette. Il fut donc ravi de voir le jardinier s’approcher pour l’accueillir. Cela le détendit instantanément. Il décrocha son plus beau sourire à son sauveur et échangea une poignée de main assurée avec lui. Le jeune jardinier lui désigna la malle en lui demandant si elle était lourde à porter.  

    Non du tout ! Avec un peu d’huile …

    Il s’interrompit quand le jeune homme lui donna son nom. Il avait bien entendu Hvit ? Depuis quand les nobles jardinaient ? Le jeune frère resta confus un instant se rendant compte qu’il avait failli demander à son hôte de porter ses papiers de la manière la plus familière qu’il soit. Louée soit Lucy, il avait enchaîné sans attendre. Aord en profita pour se corriger.

    Euh … je-je crois me souvenir que le frère supérieur a fait rajouter quelques manuscrits en fait. Il vaudrait mieux laisser cela à vos serviteurs, une brouette sera sûrement d’un grand secours !

    Il avait dit cette phrase sur un ton peu confiant tout en décochant un sourire gêné à son hôte. Le jeune noble l’inspecta de la tête au pied et Aord pria Lucy pour ne pas avoir déjà fait une grosse erreur. Cependant, aucune remarque acerbe ne vint et ils se dirigèrent sans plus de cérémonie vers le quartier des jardiniers au grand soulagement du jeune frère. Le maître des lieux continua de lui faire la conversation à mesure qu’ils marchaient. Aord fut attristé d’apprendre la mort de son frère. Il prit un petit temps pour prier en sa mémoire.

    Puisse la déesse rendre grâce à son dévouement et à sa foi.

    Il ferma les yeux en joignant les mains pour accompagner sa prière. Il ne garda pas très longtemps cette position, car marcher les yeux fermés n’était pas très conseillé pour garder son équilibre. Une fois cela fait, il put répondre à son interlocuteur :

    Préparation des encres, confection du papier, je peux tout faire moi-même, à part la confection du parchemin. Je sais en prendre soin, mais delà à en faire à partir de peau …

    Il se tut, se disant que ce n’était pas le genre de sujet qu’on abordait avec un noble, dépecer des animaux n’était pas très fleuri. Ils arrivèrent enfin au quartier des jardiniers, où le jeune frère rencontra enfin un vrai jardinier. Il se méfiait encore un peu et le salua avec le plus grand respect au cas où. Son guide marqua un arrêt avant de distribuer ses ordres pour faire remonter ses outils et productions littéraires jusqu’au temple. Ayant fini, il reporta son attention sur son invité.

    - Voulez-vous vous rafraîchir avant le déjeuner ? Souhaiterez-vous séjourner au manoir ou au temple ? J’ai peur que ce dernier n’ait été un peu laissé à l’abandon… En l’absence d’officiant notre priorité est allée ailleurs. Et en dernier, notre Frère Aeron avait des idées étranges… Il refusait que des maçons réparent un mur par exemple, disant que la déesse serait troublée par le vacarme. Il ne voulait pas non plus de servante dans les lieux, exigeant des hommes et uniquement des hommes d’âge… Les hommes âgés font ce qu’ils peuvent, mais ils n’ont ni la vivacité ni la vigueur de gens plus jeunes… Je peux toutefois vous montrer l’endroit, dans l’ignorance de vos désirs nous avons nettoyé les locaux et allumé du feu pour réchauffer les pièces, aussi bien les appartements du desservant que le temple proprement dit.

    Je vous remercie, mais je ne souhaite que de commencer mon travail afin d’avancer au maximum avant le déjeuner.

    Aord était déçu par le tableau que lui dressait le seigneur Hvit. Il ne jugeait en aucune façon qu’on ait pu laisser le temple se détériorer. Non, il savait que le temple ne pourrait pas faire un lieu de travail approprié pour la calligraphie si les murs étaient percés de trous. L’humidité, le froid, le vent, autant d’obstacles qui risquaient de lui compliquer la tâche.

    Je souhaiterai d’abord vérifier l’état du temple pour pouvoir décider si je peux y installer un atelier de copiste. Je crains qu’un bâtiment trop endommagé puisse permettre à l’humidité de s’installer ce qui serait très gênant pour le séchage de l’encre et la conservation du papier.

    Il suivit Camille dans la direction qu’il avait montrée. Une grande demeure en brique rouge les surplombait. Aord était impressionné par sa taille bien éloignée de sa petite maison creusée dans la paroi des montagnes à la Forteresse. Et dire que ce parc n’en était que le jardin … Il sortit de ses pensées pour dire :

    Pour ce qui est de mon logement, je ne veux pas m’imposer dans votre demeure. Je pourrais très bien loger au temple. Monsieur m’offre déjà bien assez en me laissant travailler sur sa propriété. Que la déesse vous en remercie.

    Il laissa un peu de temps s’écouler à marcher, écoutant une possible réponse de la part de Camille. Puis il enchaîna sur une question simple :

    Puis-je vous demander comment vous organisez tout ce qui touche à la religion sur votre domaine en l’absence d’officiant ?
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Coeur d'encre
    Jeu 11 Fév 2021 - 23:56 #
    Camille observait le prêtre, un peu surpris, se trompait-il ou intimidait-il le Frère ?

    « Pour ce qui est de mon logement, je ne veux pas m’imposer dans votre demeure. Je pourrais très bien loger au temple. Monsieur m’offre déjà bien assez en me laissant travailler sur sa propriété. Que la déesse vous en remercie. »

    « Mon Cher, lorsque j’accepte la présence de quelqu’un sur ces terres ce n’est pas pour le dissimuler ou l’ignorer… Si le temple ne vous paraît pas convenir, vous aurez bien sûr votre chambre et les pièces nécessaires pour poursuivre votre labeur. Nous avons dans une des tours un endroit qui vous conviendrait parfaitement, très clair, suffisamment chaud mais pas trop… Mon grand-oncle y peignait, il lui fallait de la lumière.

    Et je vous en prie -il souriait de toutes ses dents- ne m’appelez pas « Monsieur » je n’ai jamais imposé cela à mes valets, ce n’est pas pour le demander à un Frère de la déesse…

    Et pour ce qui est des offices…
    »

    Il soupira.

    « Notre intendant, Arthas Homestuck, a pris en main ce qui touche au culte, c’est un homme pieux et sincère, mais j’en ai peur trop rigide pour donner satisfaction aux fidèles. Aussi faisons-nous appel à ceux de vos frères qui vont de la capitale au Village Perché, il en passe assez souvent et nous les accueillons avec plaisir et reconnaissance. Je pense que votre présence plaira infiniment aux villageois et au personnel du domaine, autant qu’à moi naturellement.
    Peut-être même vous dérangeront-ils dans vos travaux, si c’est le cas, dites-le moi, j’expliquerai aux maires et doyens que vous souhaitez avoir un peu plus de temps pour vous. Vous verrez, les gens sont pieux par ici, et reconnaissants.
    »

    Le jeune homme s’arrêta, il était stupéfait d’avoir pu parler autant sans bafouiller. Revenant aux préoccupations du Frère, il le guida jusqu’au petit temple, noyé dans la verdure et bordé par une petite pièce d’eau dotée d’une fontaine. Le tout était calme et reposant, l’exposition permettait de recevoir le soleil même en hiver, et l’été, le rideau de verdure le conservait au frais autant que possible.

    Loin d’être une ruine, le bâtiment n’était que défraichi, un mur présentait une lézarde mais qui avait été bouchée à la mort de Frère Aeron, les peintures intérieures si elles manquaient d’éclat étaient encore colorées et des fresques presque parfaites célébraient Lucy et la piété des fidèles.

    Le tout aurait certes eu besoin d’être ravivé, mais les jeunes servantes du manoir, ravies de servir la déesse avaient chassé toute poussière ou saleté, elles avaient pillé les serres avec l’accord de Camille pour disposer de superbes arrangements floraux devant l’autel, les chambres réservées au prêtre avait été ornées de fleurs aussi, des corbeilles de fruits frais posées, un feu chaleureux allumé dans la chambre comme dans les deux petites pièces attenantes. Une impressionnante quantité de bougies attendait sur les étagères et des lampes constituées de cristaux de lumière étaient posées, des bouteilles d’encre et des boîtes scellées contenant des pigments étaient à la disposition du copiste.

    « si l’endroit ne vous convient pas, nous ferons transporter encre et pigments au manoir »
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
    Informations
    Re: Coeur d'encre
    Ven 12 Fév 2021 - 17:15 #
    Aord fut assez surpris de la réaction de Camille. Ce qu’il ne pensait qu’être politesse avait l’air de lui tenir bien plus à cœur. Avait-il commis un impair ? Le jeune homme préféra rester silencieux, ne voulant pas vexer son hôte de quelques que façons que ce soit. L’idée de la tour que proposait le jeune noble sembla être un bon compromis. Un endroit tranquille à l’écart des villageois. La calligraphie prenait beaucoup de temps et de concentration et il était difficile de corriger une bévue. Rester au temple serait alors prendre le risque d’être dérangé par la populace à la recherche d’un officiant de secours. Camille était bien gentil, mais il ne pouvait pas certifier que personne ne passerait le déranger, même un tout petit peu. Il devait dire que la jeune noble le mettait un peu mal à l’aise. Quand on propose l’hospitalité à quelqu’un, on ne lui laisse pas trente-six choix, sinon il finit immanquablement par soit faire ce qu’il veut chez vous, soit avoir l’impression de réclamer et Aord avait cette impression. Peut-être devrait-il en faire part à son hôte de manière détournée ?

    Ils arrivèrent en vue du temple qui était bien moins délabré que ce qu’il avait pu imaginer. À part un mur légèrement fendu, le reste était en très bon état. Le jeune frère avait pu voir bien pire au cours de ses voyages. Au moins, ce bâtiment donnait vraiment l’impression de contenir la foi des fidèles. Il s’arrêta un instant pour observer les fresques légèrement ternes qui couchaient sur le mur des histoires qu’il connaissait bien. Il remarqua la présence de toutes ces plantes, fraîchement apportée de surcroît. Aord commençait à se demander pourquoi Camille lui portait autant d’attention, il n’était qu’un copiste qui allait passer quelques jours sur sa propriété, pas besoin d’en faire toute une cérémonie ou peut-être essayait-il de cacher des trous de souris ?

    Ils arrivèrent enfin dans les quartiers du temple, les pièces étaient assez chaudes et la lumière acceptable pour y installer un pupitre et s’atteler à sa tâche. Aord jeta un coup d’œil aux réserves d’encre et de pigment, vérifiant un à un les flacons. Il délaissa un moment son hôte pour inspecter leur contenu. L’encre était sèche et grasse, le solvant s’étant évaporé depuis longtemps. Un peu d’eau ou d’alcool devraient faire l’affaire. La quantité d’ingrédients était assez impressionnante et fournie. Rien de moins quand on en a les moyens, pensa-t-il. Il commença à réfléchir à ceux qu’il allait devoir utiliser au vu de la quantité de documents à recopier. Il était maintenant sûr qu’il pourrait terminer son travail sans avoir besoin d’en commander plus.

    Si l’endroit ne vous convient pas, nous ferons transporter encre et pigments au manoir.

    Décidément, Camille commençait à devenir redondant avec son : si le temple ne vous plaît pas, venez chez moi ! Oh, mais je vous ai dit que vous pouviez venir chez moi ? Il lui avait peint un tableau un peu sombre de son temple, mais il était tout à fait correct à vrai dire. Le jeune frère resta pensif, il avait besoin de relâcher la pression, ne serait-ce qu’un peu. Le noble lui avait expressément demandé de ne pas perdre de temps en mondanité, alors pourquoi ne pas essayer un peu d’humour.

    Si vous tenez tant que ça à m’avoir chez vous …

    Il prit un air faussement gêné, imitant la jeune fille qu’on complimentait. Cela ne dura qu’un instant de façon à faire passer son sous-entendu un peu osé. Il taquinait simplement le noble en retournant ses hésitations contre lui.

    Je plaisante ahah … Je pense qu’un compromis serait le bienvenu. Je m’installe au temple, de cette manière je pourrai éventuellement officier pour vous et les villageois. Je suis certain que votre intendant sera ravi d’avoir ce souci de moins sur la conscience. À côté de ça, nous pourrions installer mon atelier de travail dans la tour dont vous m’avez parlé. De cette manière, je pourrais séparer travaux solitaires et travaux publiques. Qu’en pensez-vous ?
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    Re: Coeur d'encre
    Ven 12 Fév 2021 - 18:42 #
    Le jeune homme opina du chef, la répartie de son interlocuteur l'avait surpris, il craignait qu'ils ne se méprennent l'un comme l'autre.

    - A votre convenance, si vous avez besoin d’aide pour vous installer, n’hésitez pas à en demander. Voulez-vous qu'on vous mène à la tour ?

    Il le regarda encore un moment avant d’ajouter, d’un ton légèrement différent.

    - Lorsqu'il m'a contacté, j’avais proposé à votre Frère supérieur de vous faire livrer encres et pigments. A vrai dire, je n’ai pas compris pourquoi il a refusé ? Y a-t-il des problèmes au temple ?

    Il se dit que le jeune Frère allait se méprendre.

    - Non pas que votre présence nous dérange, au contraire, comme je vous l’ai dit, elle nous honore mais j’étais prêt à lui faire parvenir nos réserves, nous n’avons plus personne ici qui pourrait un jour s’en servir.

    Passant à un autre sujet, il reprit

    - Avez-vous encore besoin de moi ? sinon je vous laisse à votre installation. Lorsque vous le souhaiterez, vous pourrez voir avec le majordome comment vous organiser pour les repas, mon intendant étant souffrant nous n’avons que peu de vie sociale en ce moment. J’ai tendance à me restaurer là où je me trouve à l’heure dite pour gagner du temps.

    Il attendit un moment la réponse puis tourna les talons, un peu décontenancé par cet étrange Frère si différent du vieil Aeron. Un instant, il se reprocha d’en avoir voulu au défunt pour ses réactions typiques d’un noble d’excellente famille, et d’être… dérangé par les manières franches et directes du nouvel arrivant.

    Il avait cru que l’insistance du Frère supérieur à faire venir un de ses acolytes était due à une volonté de reprendre en main le culte au domaine, mais le jeune officiant n’avait pas du tout l’air d’être venu dans ce but, ou alors ne l’avait-on pas mis au courant ?  Si ça n’était pas le cas, pourquoi avoir obligé cet homme à faire le voyage alors qu’il aurait pu continuer à travailler dans son environnement habituel ?

    Camille haussa imperceptiblement les épaules. Un supérieur de temple sait ce qu’il fait, et lui avait bien d’autres choses en cours pour s’occuper longtemps des raisons qui lui valaient cette visite. Il espérait juste que le copiste lui permettrait de voir son travail, certaines enluminures étaient de véritables œuvres d’art et il lui avait été présenté comme talentueux.

    Etait-ce pour cela qu’il était là ? Le Temple avait-il besoin de subventions ? Il aurait été plus simple de faire carrément appel à la générosité des fidèles si tel était le cas, sans doute se trompait-il. Comme souvent, il eut l'impression fugace d'être totalement inadapté à la politique... Car il s'agissait bien là de stratégie politique, le Frère supérieur avait une raison de lui dépêcher un artiste talentueux plutôt que de passer commande de fournitures... N'était-il que fier de l'expertise de ce jeune Frère ? Ou avait-il derrière la tête une autre idée ? Arthas aurait certainement décrypté la chose, mais lui en était juste agacé.

    Il pressa le pas, laissant Aord à ses préparatifs.
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    Re: Coeur d'encre
    Ven 12 Fév 2021 - 22:07 #
    Sa petite plaisanterie n’avait pas l’air d’avoir eu beaucoup d’effet. Les nobles savaient se maîtriser en toute circonstance, semble-t-il. Aord était un peu déçu que son hôte ne soit pas un peu plus porté sur l’humour. Il ne devait pas être trop sérieux, mais pas non plus trop badin. Il commençait à se demander ce qui pouvait bien réussir à faire vibrer le cœur du jeune seigneur de Hvit. Son interlocuteur continua de lui parler comme si de rien n’était donc il n’eut pas trop l’occasion de faire des suppositions maladroites. D’autant plus que ses sourcils venaient de se froncer d’étonnement en écoutant ce que le blond lui racontait. Le frère supérieur l’avait envoyé ici alors qu’on lui avait proposé de livrer l’encre directement au temple ? Aord n’y comprenait plus rien. On l’avait envoyé loin du temple parce qu’il dérangeait. Cette simple idée qu’on le déteste en cachette ébranla un peu notre jeune frère. Non, non, il devait y avoir une meilleure raison, pas besoin d’imaginer le pire. Le visage toujours contrarié, il répondit tout de même d’une voix ferme :

    Demandé à quelqu’un de passer me montrer la route de la tour dans 30 minutes à peu près le temps que je réhydrate les encres et que je rassemble tout ça, merci.


    Il marqua une pause, submergé par des pensées intrusives, s’interrogeant sur les raisons réelles de sa présence ici. Le seigneur du domaine sembla tourner des talons prêts à le laisser à son travail. Aord eut juste le temps de lui lancer :

    Merci à vous … Camille.


    Sa voix était assez faible quand il avait dit ces mots. Il se mordit la lèvre pour essayer de se ressaisir. Cela ne servait à rien de ruminer ce qu’il venait d’apprendre, autant se mettre au travail ! Le jeune copiste rassembla les fournitures de son prédécesseur pour pouvoir les transporter jusqu’à la tour. Il fit un tour à la fontaine pour y récupérer un peu d’eau qu’il mélangea aux encres qui en avaient besoin. En remuant un peu et en les faisant chauffer, il devrait pouvoir les rendre liquides à nouveau. Certains étaient malheureusement bons à jeter et il nota donc qu’il devrait en préparer de nouveau.

    Il avait fini ses préparatifs quand un serviteur vint le chercher. Ils prirent tous deux le matériel de calligraphie et allèrent en direction de la fameuse tour. Sur le chemin, Aord essaya d’en apprendre plus sur son hôte auprès de son serviteur. Il se demandait quel genre d’homme il était. Il écouta attentivement la réponse tout en marchant d’un pas assurer. Ils finirent par traverser le manoir qui fit forte impression au jeune homme. Il n’était pas du tout habitué à pareil espace ! La route se termina par une longue volée d’escaliers en colimaçon qui les menèrent jusqu’à l’atelier de peinture. L’espace avait été aménagé pour lui et son coffre l’attendait dans un coin. Un pupitre se tenait près de la fenêtre près à l’accueillir.

    Il remercia le serviteur et commença tranquillement à s’installer, posant les encres sur le pupitre et sortant sa plume du coffre. Il choisit un texte dans sa collection et le plaça de façon à pouvoir le voir clairement à la lumière du jour. Il s’installa enfin et commença son travail d’écriture. La calligraphie avait le don de lui vider la tête, principalement parce qu’elle lui demandait une intense concentration. Il prit soin de tracer chaque lettre en contrôlant finement la pression de sa plume. Tantôt forte pour un trait gras, tantôt légère pour la courbe d’un G.

    Il travailla pendant des heures sans trop se rendre compte du temps qui passait. Il avait même dû oublier le fameux déjeuner. N’ayant pas spécialement faim, il préféra faire une petite pause pendant laquelle il commença à préparer ses encres. Il lui fallait broyer les pigments nécessaires puis les mélanger avec un liant et enfin ajouter un solvant. Il prépara machinalement ses mélanges et cela lui demandait si peu de concentration qu’il en en revenait à penser à Camille et ce qu’il lui avait dit tout à l’heure. Maintenant qu’il y réfléchissait, peut-être l’avait-on envoyé ici dans l’espoir qu’il remplace le frère décédé. Malheureusement, Aord ne souhaitait pas s’installer pour l’instant, la route lui convenait très bien. Il ne faisait ce travail pour le temple de la capitale que pour pouvoir mieux repartir justement.

    Aord soupira devant l’avalanche de pensée qui l’assaillait. Il avait vraiment besoin de se changer les idées et d’en finir avec cette journée. Il prit donc le temps de prier devant la fenêtre pour trouver la paix, avant de retourner à son travail qu’il comptait bien poursuivre jusqu’à la fin de journée. Descendre pour le déjeuner ne le tentait guère à moins qu’on vienne le chercher. Il retournerait ensuite au temple pour y dormir.
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    Re: Coeur d'encre
    Sam 13 Fév 2021 - 12:19 #
    Camille s’en voulait, à cause d’une remarque dont il n’avait pas saisi la teneur et qu’il aurait bien été incapable de retrouver dans sa mémoire, il avait pris la mouche… Mauvais, à continuer sur cette voix il ressemblerait bientôt à Arthas qui tout compétent, instruit, au fait des usages et des convenances qu'il soit, n’en était pas moins coincé, mais coincé…

    Bref, il aurait du au moins sourire, ce jeune homme devait être intimidé et n’avait visiblement pas les codes en main pour décrypter les sous-entendus et les non-dits dont sa caste entourait la moindre phrase.

    Ayant rendu visite à ce même Arthas, encore faible mais décidé à reprendre son activité illico de crainte que « tout aille à vaut l’eau », il avait ensuite longuement discuté avec Maïa, de la moloch mais surtout de cette stupide agression menée contre l’enclave réservée aux familiers rares et aux animaux « exotiques ».

    Sa journée bien occupée, il s’en voulait désormais, estimant qu’il avait manqué à son devoir le plus élémentaire qui était de recevoir dignement l’arrivant, un artiste, mais surtout un frère de la déesse… Le laisser en plan revenait à dire à Lucy : j’ai à faire, patientez voulez-vous… Il sourit, osant un blasphème, Lucy à vrai dire ne se gênait pas pour souvent « différer » ses réponses aux demandes de ses fidèles après tout… Quand vous la priiez et que rien ne se passait, les frères vous disaient qu’elle sauvait probablement une vie et donc vous mettait au second plan. En fait, les dieux n’étaient que des hommes qui s’ignorent… Il rougit violement, aborder ce genre de sujet avec son intendant-mentor l’aurait fait vouer aux gémonies, et le jeune prêtre copiste le prendrait probablement pour un impie total.

    Il se secoua, passa par ses appartements pour se rafraîchir, laissant pour une fois son valet personnel démêler et brosser sa tignasse, le déshabiller et le bouchonner au sortir d’une douche chaude… Il savait que le brave homme vivait ce jeune maître qui faisait tout seul comme une brimade et cédait donc parfois aux convenances, bien que jugeant qu’il allait beaucoup plus vite à retirer ses bottes seul sans obliger un quelconque individu à s’agenouiller devant lui pour le faire…

    Lavé, coiffé, changé, il demanda un repas pour quatre « juste un encas, dis bien au cuisinier qu’il s’agit d’un pique-nique improvisé dans la bibliothèque ! et demande au seigneur Arthas s’il se sent de descendre pour faire la connaissance de notre hôte ». Il manderait Maïa lui-même en allant chercher le prêtre dont on venait de lui dire qu’il était à la tour, elle devait se trouver dans la cour intérieure à torturer de malheureux mannequins d’entraînement… A moins qu’un des palefreniers ait eu la malchance d’être désigné comme adversaire. Il sourit, voyant la haute silhouette hardie et fougueuse de la maître des écuries se profiler sous ses yeux, comme d’habitude une épée au côté et un arc léger dans le dos…

    Il entra donc dans la tour, déjà un peu refroidi mais confiant et d’un coup d’œil circulaire vit que l’occupant n’avait pas traîné à s’installer.

    - Je vous dérange ? Vous avez fait diligence à ce que je vois.

    Il passa curieux entre les différentes encres et jeta un œil aux ouvrages sortis de la malle.

    - Si vous le souhaitez voici la clé pour fermer en votre absence, il y en a deux autres exemplaires sous la garde d’Arthas mon intendant, je doute qu’on essaye d’entrer si vous n’êtes pas présent sauf peut-être par curiosité, mais si vous pensez être plus tranquille en sachant votre travail à l'abri personne ne s’en offusquera.

    Il guetta une réponse puis enchaîna sur le but de sa visite.

    - Je comptais vous convier à un repas rapide et vous présenter ainsi la maisonnée ?

    Il profita de ce qu’il reprenait son souffle pour admirer le travail déjà commencé et ses yeux brillèrent de plaisir,

    - Nous ne sommes pas nombreux, je suis célibataire, mais vous pourrez rencontrer Arthas Homestuck, maître de ce domaine après moi, l’intendant. Il m’a connu très jeune et j’en ai peur se fait de la famille une idée totalement surannée. Également Maïa Skyggeulv, maîtresse des écuries qui a en charge le parc et les animaux qui s’y trouvent. Tout deux sont nés nobles, et si Maïa a miraculeusement échappé au sort de toute jeune dame de la noblesse en réclamant haut et fort son indépendance, j’ai peur qu’Arthas soit très… collet monté ? Mais il a un cœur d’or et vous secondera de son mieux.

    Joignant le geste à la parole, il indiqua la porte, ajoutant toutefois

    - Si vous n’êtes pas encore prêt, il vous suffit de sonner pour qu’on vous mène à la bibliothèque, j’ai choisi cette pièce car je suis sûr que certains des ouvrages vous intéresseront, mon grand-oncle voyageait beaucoup et était épris de beauté et de curiosités. Nous avons des manuscrits fort anciens qu’il nous faut conserver dans une petite salle fermée à la lumière et autant que possible à l’air. S’il vous sied de les examiner, je vous l’ouvrirai après dîner ?

    Il se dirigea vers la porte, non sans avoir encore regardé d’un œil enthousiaste et curieux l’ouvrage ouvert sur le pupitre…
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    Re: Coeur d'encre
    Sam 13 Fév 2021 - 23:28 #
    Le grattement de la plume sur le papier était le seul son qui accompagnait Aord durant son travail. Il commençait à comprendre pourquoi le grand-oncle de Camille utilisait cette tour pour peindre. C’était vraiment un endroit propice à l’inspiration et à la concentration. Il avait bien fait de ne pas choisir le temple pour y installer son atelier de travail. Bien sûr, la situation particulière de la tour ajoutait un petit côté asocial à sa personne. Tout ce qu’il était en train de produire était caché entre ces murs, loin de tous ceux qui pourraient l’apprécier.

    Il était en train de dessiner une esquisse de la déesse pour une future enluminure. Le faire sur toute une page était un énorme travail et c’était la seule de cette taille qu’il allait réaliser durant son séjour. Les autres étant des lettrines un peu travaillées ou des bordures de page. Il avait commencé à tracer un visage sur un brouillon pour bien s’imprégner des formes. Quand il serait satisfait, il le reproduirait sur la page cible et pourrait ensuite passer à la couleur, mais pour l’instant il patinait avec le décor de fond. Le texte évoquait la miséricorde de la déesse, mais le jeune frère ne voulait pas la représenter de manière banale, aidant les pauvres et les orphelins. Non, il voulait faire passer une autre idée. Il avait donc représenté la déesse comme une présence plus floue qui poussait un personnage à aller vers d’autres personnes pour les aider. La miséricorde de la déesse se manifestait ainsi à travers celle des hommes, car chaque homme était son messager.

    Aord réfléchissait si intensément à la signification de ses écrits qu’il sursauta quand la porte s’ouvrit pour laisser entrer Camille. La soudaine interruption le sortit complètement de cet état autotélique dans lequel il était plongé depuis qu’il avait commencé son œuvre. Il se rendit compte que le soleil avait parcouru un petit bout de chemin par la fenêtre et qu’il commençait à se faire tard. Il sourit à Camille, content de le voir. Ils s’étaient quittés sur une note amère tout à l’heure sans trop savoir pourquoi. Voilà une occasion de repartir sur de meilleures bases. Il posa sa plume et s’étira à s’en décrocher les articulations. Il ne mesurait que maintenant à quel point il avait passé son temps immobile.

    Non, vous ne me dérangez pas. J’avais bien besoin que quelqu’un me fasse revenir à la réalité sinon je ne serais sorti qu’à la nuit tombée tellement j’étais pris dans mon travail !

    Il suivit le regard de son hôte quand il balaya la pièce.

    Cet endroit est vraiment parfait pour ce que j’ai à faire. Je vous remercie de le mettre à ma disposition.

    Il accepta la clé qu’on lui tendait. Par simple habitude, il fermerait la pièce à clé. Les parchemins qu’elle contenait étaient la propriété du temple et bien qu’il fasse confiance à Camille, celui-ci ne pouvait pas avoir de contrôle sur autre chose que son personnel. On n’était jamais trop prudent. Il finit d’écouter l’invitation qu’on lui faisait. La promesse était alléchante, Aord adorait rencontrer de nouvelles personnes et l’entourage du jeune noble semblait plein de promesses. Un fervent croyant à cheval sur les principes et une noble rebelle maîtresse de son destin ? Il n’en fallait pas plus pour piquer sa curiosité. Toutefois, son regard ne s’illumina que quand Camille évoqua les anciens manuscrits. La perspective de poser l’œil sur une perle littéraire lui donnait encore plus envie d’accepter l’invitation.

    Avec joie !

    Sa voix marquait un enthousiasme sincère. Il n’en fallait pas beaucoup pour qu’ils partent du bon pied tous les deux, alors quand Camille fit mine de le laisser, il s’empressa de ranger son matériel avec une précipitation à peine feinte.

    Attendez ! Attendez ! Je dois juste ranger quelques feuilles et je vous suis !

    Il se dépêcha de tout ranger avant de rejoindre Camille qui l’attendait sur le pas de la porte. Il referma la pièce derrière lui et le suivit là où il désirait l’emmener. Différentes images traversaient l’imagination du jeune frère, tandis qu’il essayait de s’imaginer la fameuse bibliothèque. D’ailleurs, Camille n’avait pas dit que son grand-oncle avait participé à la fournir en documents de valeurs ?

    Votre grand-oncle semblait toucher à beaucoup de domaines, la peinture, la littérature … Vous touchez à l’art vous aussi ?

    Une question simple pour faire la conversation et casser un peu la glace qu’ils avaient érigée malgré eux lors de leur premier échange. Aord n’était pas vraiment du genre à se laisser abattre pour si peu. Il avait également remarqué les regards intéressés du jeune noble quand il contemplait son travail. Peut-être se trouveraient-ils un point commun ?
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    Re: Coeur d'encre
    Dim 14 Fév 2021 - 9:53 #
    Votre grand-oncle semblait toucher à beaucoup de domaines, la peinture, la littérature … Vous touchez à l’art vous aussi ?

    Camille sourit.

    Mon grand-oncle était le cadet de deux fils, il n’aurait pas du devenir seigneur de ce domaine si son frère aîné n’avait été emporté par une maladie stupide…  Il a eu la chance de pouvoir faire ce qui lui plaisait, du moins pendant sa jeunesse et une grande partie de sa vie d’adulte. Nos fils aînés j’en ai peur disparaissent jeunes, c’est peut-être pour cela qu’Arthas veut me marier si vite…

    Il sourit à nouveau.

    Adalbert je crois a même eu sa plaque d’aventurier, je n’en ai jamais eu la certitude car si vous abordez le sujet avec Arthas, vous verrez qu’il ne porte pas ces gens-là dans son cœur, il les accuse de minimiser le rôle de la Garde et sa contribution au maintien de l'ordre dans le royaume. Mais mon grand-oncle lui aimait partir en expédition, ramener des merveilles de toutes les régions d’Aryon. Certains disent même qu’il avait passé la frontière mais j’en doute.

    Toujours est-il qu’il a sa vie durant collectionné les œuvres d’art : sculptures, livres rares, peintures, dessins anciens, bijoux extraordinaires, bibelots de toutes origines, artéfacts magiques… Je crois qu’il aimait la beauté pour elle-même et avait à cœur de sauvegarder le plus possible de créations humaines pour garder la mémoire du savoir-faire et de l’ingéniosité de nos semblables. Loin de conserver jalousement ses trouvailles, il les ouvrait à des connaisseurs.

    Lui et moi avons des points communs, mais je n’ai ni l’ardeur nécessaire pour partir faire des recherches dans le monde entier, ni ses connaissances dans de trop nombreux domaines. Ma contribution à l’art est mineure, je dessine, pas trop mal paraît-il -à moins qu’on n’ait voulu me flatter- et ne riez pas… je brode.


    Il n’ajouta pas que de son point de vue, leur principal point commun était leur volonté de ne pas convoler… Si le défunt avait pris femme, il n’aurait pas ajouté à ses possessions l’héritage de sa mère, transmis par le dernier représentant de cette branche familiale… Le dernier, sauf si ce fameux cousin disparu existait quelque part… Auquel cas il partagerait, voire céderait ses droits au garçon qui bien que plus jeune n’avait pas, lui, de père noble pour faire sa fortune.

    Tout en devisant, ils étaient parvenus à la bibliothèque, logée dans une autre tour. La pièce circulaire était bordée sur toute la surface de ses murs d’ouvrages de toutes sortes, les plus courants dans les rayons inférieurs, les plus rares à mi-hauteur, pour ne souffrir ni du passage, ni du froid ni d’une chaleur trop importante du fait de la verrière opaque qui lui donnait de la lumière. Un petit escalier en spirale montait au centre de la tour, des passerelles menant à des balcons assez étroits qui remplaçaient le plancher sur les quatre étages de la structure. Des pupitres étaient disposés de façon pensée, afin que les lecteurs puissent poser leurs ouvrages et lire sans avoir à redescendre. Au troisième étage, une partie de la surface était close, une petite porte s’ouvrant sur la fameuse « réserve » à livres rares.

    L’étage inférieur était garni de sofas et de petites tables permettant de poser les livres, des lampes intimes éclairaient sans exagération. Sur une large console, un buffet était servi, comme l’avait demandé le maître des lieux « un pique-nique improvisé » qui comprenait quand même une douzaine de plats différents de viandes, salaisons, poissons et accompagnements divers. Des carafes d’eau et de vins étaient disposées ainsi qu’un tonnelet de bière.

    Assis sur un fauteuils crapaud un homme âgé dont la taille rendait surprenant le siège choisi se leva avec difficulté pour accueillir les arrivants, debout devant le buffet, une coupe à la main, une grande jeune femme brune sirotait son vin pétillant, sans avoir attendu quiconque. Elle eut à l’arrivée des deux hommes un sourire éclatant de malice et de gentillesse.

    « Arthas m’a traité de soiffarde parce que je n’ai attendu personne ! » lança-t-elle, apparemment pas du tout confuse « Bonjour, vous êtes Frère Aord ? Voulez-vous un verre ? Il est excellent »

    Camille leva les yeux au ciel, retenant un rire joyeux tandis que l’intendant fustigeait la rebelle d’un regard acerbe. Cérémonieusement, il se présenta en s’inclinant légèrement mais se retint devant un étranger de commenter le manque d’éducation de Maïa, elle-même présentée par le jeune seigneur.

    Invitant le Frère à se servir puis à s’asseoir, Camille porta la conversation sur les ouvrages présents dans les rayons et son intendant se fit un plaisir d’apporter de nombreuses précisions sur leur provenance, leur éventuelle rareté, et leur… moralité.

    « Adalbert avait même rapporté des ouvrages… » le vieil homme s’empourpra ce qui fit immédiatement s’inquiéter le jeune noble, il relevait quand même d’un malaise cardiaque ! « Enfin des ouvrages… »

    « IMPIES »


    « Ils figurent en bonne place dans la réserve, il avait dégotté je ne sais où des livres sur des pratiques oubliées je l’espère, une sorte de religion ancienne très portée sur les pratiques nécromantiques à ce qu’il semble » ajouta Camille « ils sont peut-être impies mais témoignent d’une époque passée et sont rarissimes »

    « Les brûler ! il aurait fallu les brûler ! » Arthas se calma et se rassit, essoufflé et cramoisi.

    Le repas suivit son cours, les entrées, viandes et légumes furent suivis de plateaux de fromage et de desserts : fruits et entremets, puis le majordome proposa café, infusions ou autres digestifs.

    Arthas s’excusa, promettant une conversation plus longue en journée si le jeune prêtre le souhaitait. Maïa disparut aussi arguant que les livres la faisaient bailler, du moins ceux qu’Adalbert avait emprisonnés dans la réserve. Elle aussi promit de revoir le Frère et de lui faire visiter le domaine et les villages, s’il en manifestait le désir.

    Camille, une tasse de café en main, montra l’étage semi-fermé.

    « Vous sentez vous d’attaque ? Malgré les mises en garde d’Arthas ? Il n’y a pas que des ouvrages « impies », il y a même de magnifiques recueils de prières… »
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    Re: Coeur d'encre
    Dim 14 Fév 2021 - 18:18 #
    Maintenant qu’il avait mis fin à son travail, Aord se rendait compte qu’il avait faim, et pas qu’un peu. Il aurait dû prendre une collation comme on lui avait suggéré tout à l’heure. Ses besoins primaires faisaient divaguer ses pensées avec insistance. L’empêchant de suivre correctement la conversation. Il arriva cependant à en comprendre le principal. Il ne se moqua pas du tout à la mention du passe-temps pour le moins singulier du jeune homme. Ces principes l’empêchaient de juger quelqu’un pour ses passations et ses croyances le poussaient à admirer cette singularité. C’était elle qui faisait de Camille une personne unique, une possibilité qu’on ne rencontre qu’une fois. Il ne dit rien, se contentant de lui adresser un sourire bienveillant. Le noble semblait assez gêné en évoquant ce point, le frère n’allait donc pas le torturer davantage. Les compétences en dessin qu’il évoquait lui soufflèrent soudain une idée.

    Seriez-vous intéressé de participer à la réalisation de l’une de mes enluminures ? Je travaille actuellement sur certains croquis, vous pourriez en faire quelques-uns ensemble et nous verrons si ce que vous disent les autres est vrai ? Qu’en pensez-vous ?


    Il écouta sa réponse et réagirait chaleureusement si son hôte acceptait la proposition. La discussion les mena enfin jusqu’à la tour qui abritait la bibliothèque. Le jeune frère resta sans voix pendant un instant. Il avait déjà vu des bibliothèques bien plus grandes, notamment celle du grand temple. Cependant, il ne se tenait pas dans un lieu public, mais chez quelqu’un. Avoir un tel espace dans sa propre demeure, cela dépassait la conception du jeune homme d’origine modeste. Pour lui, une bibliothèque personnelle se résumait à une étagère supportant un livre de comptes et peut-être un ou deux ouvrages. C’est en tout cas à ça que sa bibliothèque ressemblait quand il était enfant. Sa famille n’avait jamais eu ni l’intérêt ni les moyens pour se fournir une telle collection.

    Le regard du jeune homme finit par se détacher de la pièce pour se concentrer sur les autres protagonistes en présence. Il remarqua d’abord l’intendant qui semblait revenir de loin. Son regard se teinta d’inquiétude et alla spontanément chercher celui de Camille qui ne sembla pas vouloir le remarquer. Il salua le vieil homme aussi respectueusement qu’il le put pour ne pas le faire forcer davantage. Il se tourna ensuite vers la jeune femme qui lui proposait un verre. Son regard loucha sur la coupe. Aord se demandait ce que valait du vin servi à la table d’un noble. Ce n’était ni pendant son enfance ni pendant ses années au temple et encore moins sur les routes qu’il avait pu goûter ce genre de boisson. Son intérêt était piqué au vif.

    Appelez-moi simplement Aord ou Frère Svenn si vous voulez garder le cérémoniel, je ne suis pas regardant là-dessus.

    Il accepta volontiers de goûter à ce vin qu’on lui proposait. Il faillit presque se mettre à pleurer en le portant à ses lèvres. Il avait fait vœu de ne pas chercher la richesse en se mettant au service de la déesse, mais bordel être riche c’était un tout autre monde ! Il ne se rendit même pas compte qu’il avait fini son verre d’une traite tellement il avait été captivé par l’expérience. Un regard en direction de Maïa lui confirma qu’elle avait bien vu son empressement. Son regard malicieux lui transmettait bien plus d’informations qu’une simple parole. C’est sans un mot qu’elle proposa qu’on le réserve et qu’il accepta sans protester. Elle n’était pas la seule soiffarde présente aujourd’hui. Si on n’y faisait pas vraiment attention, on pourrait presque croire que le frère ne buvait rien tellement son verre se remplissait rapidement.

    Tout en enfilant de grandes rasées de vin, le jeune ecclésiastique écoutait la conversation qui se déroulait devant lui. Arthas semblait très réfractaire sur certains ouvrages. Ne sachant pas de quoi il s’agissait, le jeune homme s’empêcha de poser tout jugement, ça et le fait que le vin commençait à lui monter à la tête pour le plus grand plaisir de sa camarade.

    Ils figurent en bonne place dans la réserve, il avait dégotté je ne sais où des livres sur des pratiques oubliées je l’espère, une sorte de religion ancienne très portée sur les pratiques nécromantiques à ce qu’il semble. Ils sont peut-être impies, mais témoignent d’une époque passée et sont rarissimes.

    Aord se figea en entendant le jeune noble parler des possessions de son oncle. Cette fameuse religion piquait son intérêt au plus haut point. Ce n’était même plus de la curiosité, il se DEVAIT de lire ces textes. Sa magie était un tabou beaucoup trop grand pour qu’il résiste à l’envie d’en apprendre davantage sur des personnes possédant un pouvoir semblable. Il s’enfila une autre coupe en restant totalement silencieux, se gardant bien d’exprimer les pensées qui lui traversaient l’esprit malgré la barrière de l’alcool.

    Le repas se termina par un frère de Lucy un peu trop alcoolisé et repu pour les 100 prochaines années. Il remercia la déesse de toute son âme pour cette chance inestimable qu’elle lui offrait. Habitué des quignons de pain, du fromage et de la viande séchée, ce repas avait été pour lui une expérience divine. Il s’était bien tenu, ne se goinfrant pas, mais un œil exercé remarquerait sans peine qu’il consommait bien plus que le reste des convives. Le frère supérieur pouvait bien machiner ce qu’il veut, Aord lui était infiniment reconnaissant de l’avoir envoyé ici. Leurs deux compagnons finirent enfin par les laisser seuls. Il salua l’intendant de la manière la plus polie qu’il puisse exécuter dans son état. Maïa le salua également, lui faisant un clin d’œil discret pour lui signifier qu’elles lui montreraient certainement les meilleurs coins du village et notamment la taverne. Ils furent enfin seuls et Aord put se rendre compte que la pièce tanguait quelque peu. Il essaya de ne rien en laisser paraître.

    Vous sentez-vous d’attaque ? Malgré les mises en garde d’Arthas ? Il n’y a pas que des ouvrages « impies », il y a même de magnifiques recueils de prières …

    Je crains que lire des documents anciens soit hors de mes capacités pour l’instant, le monde est si flou, pensa-t-il. Bien sûr, il ne le dit pas à haute voix. Il voulait vraiment découvrir ses textes impies et l’occasion ne se représenterait peut-être pas.

    Au contraire, je crois que mon intérêt pour eux est encore plus grand maintenant ! De plus, ces … recueils pourront m’inspirer dans mon travail s’ils sont illustrés.


    Woh ! Il avait réussi à dire tout ça sans bégayer ? Ou peut-être ne s’en rendait-il pas compte à cause de l’alcool ? Il entreprit de se lever quand Camille en fit de même. Le petit problème c’est que la pièce bougeait un peu trop et son équilibre n’était pas des plus stables. Il trébucha donc ne se rattrapant que grâce à Camille. Le jeune frère partit dans un petit rire nerveux.

    Je suis désolé, votre Maïa c’est une sacrée … Elle remplissait mon verre à une vitesse … Par la déesse, mais qu’est-ce que vous devez penser de moi.

    Il se redressa maladroitement, peut-être avec l’aide du jeune noble. Ils étaient maintenant un peu trop proches vu qu’Aord lui était rentré dedans. Ce dernier essaya de reculer, mais son équilibre aléatoire laissait présager une autre chute sous peu.

    Je … ne sais pas si … je serai capable de déchiffrer des textes aussi anciens … vous pourriez le faire pour moi ?

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    Re: Coeur d'encre
    Dim 14 Fév 2021 - 22:32 #
    Voyant l’état dans lequel se trouvait le jeune Frère, Camille se sentit monstrueusement coupable ! Tout à son observation d’Arthas et à la conversation, il ne s’était pas avisé du manège de Maïa… Ce n’était pourtant pas son premier exploit du genre, lui-même en avait fait les frais plusieurs fois, ne se rendant pas compte lors de réceptions qu’elle faisait le service à la place des domestiques…

    - Mon pauvre ami je suis confus ! Maïa est … Je peux vous assurer toutefois qu’elle ne l’a pas fait pour vous nuire ou vous ridiculiser, mais elle devrait savoir avec le temps que tous n’ont pas son incroyable résistance à l’alcool.

    Aidant le jeune religieux à se rasseoir il proposa « je vais aller chercher quelques ouvrages voulez-vous ? les moins fragiles, les autres attendront demain, ils sont là depuis plusieurs dizaines d’années pour certains et ne s’envoleront pas. Nous les examinerons pendant que vous m'indiquerez ce que je dois dessiner, voulez-vous ? Installez-vous bien, tout au fond d’un fauteuil, je reviens au plus vite. »

    Il vérifia avant de gravir d’un pas leste les escaliers que la pauvre victime ne basculait pas, maudite peste ! Il lui en toucherait deux mots quand même, elle ne pouvait pas jouer ainsi avec la santé et la dignité des gens.

    Arrivé devant la porte verrouillée, il l’ouvrit, saisit une lampe qui éclairait faiblement et se dirigea vers la section des livres « interdits » par l’intendant lorsqu’il était adolescent. D’une main sûre il en saisit deux, lourds registres au parchemin gonflé par le temps et aux dorures patinées. Il hésita devant quelques autres mais craignit que leur grand âge ne les fragilise trop, de toute façon, ce pauvre Aord était de son aveu même fort empêché de lire et apprécier les illustrations.

    Ses deux ouvrages en mains, il traîna un peu dans les rayons, caressant un livre par ci par là, vérifiant si en plus de ceux auxquels il pensait déjà, il n’y en aurait pas d’autres à montrer au Frère…

    L’inconvénient de cet endroit était que le temps y passait, différemment d’ailleurs… S’avisant tout à coup qu’il tardait beaucoup, il récupéra les deux recueils qu’il avait finalement posés et sortit de la pièce, refermant la porte à clé.

    Il descendit beaucoup plus lentement, n’ayant pas bu beaucoup pourtant, mais commençant à sentir l’effet de la journée.

    - Voilà, veuillez m’excuser, j’ai un peu tardé.

    Surpris de ne pas entendre de réponse il alla jusqu’au fauteuil où il avait laissé Aord Svenn. Le jeune homme s’était assoupi, la tête posée sur le torse, ronflant très légèrement…

    Camille sonna, puis prélevant la clé à la ceinture du prêtre accompagna le domestique en l’aidant à porter l’endormi.

    Précautionneusement, il le déposèrent dans l’alcôve de la tour de l’oncle Adalbert, dissimulée derrière une lourde tenture de velours et où -dans l’ignorance des préférences de l'hôte un lit avait été préparé-. Déposant les livres précieux sur une console près du lit, il aida le valet à dévêtir le Frère de Lucy et à le glisser dans les draps, remontant la courtepointe d'un geste amical il déposa sur le front du Frère un baiser fraternel dans un élan de solidarité masculine !

    L’un et l’autre se retirèrent, Camille ferma la porte à clé et d’un geste vif propulsa celle-ci sous la porte de façon à ce qu’elle arrive à un mètre environ à l’intérieur de la pièce, puis s'autorisa à sourire pour ne pas céder à une réelle hilarité. Il repartit dans ses appartements en se promettant de sermonner Maïa à la première heure.
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    Re: Coeur d'encre
    Lun 15 Fév 2021 - 19:14 #
    Le jeune frère se cogna la tête contre Camille. Il voyait bien qu’il n’arrivait pas vraiment à tenir debout et l’idée de monter toutes ces marches jusqu’à la réserve lui semblait être impossible. Il se laissa donc faire quand Camille l’aida à se rasseoir. Il ferma les yeux pour que le monde arrête de tourner et pour se concentrer sur ce que lui disait Camille. Il semblait contrarié des actions de Maïa, ce que le frère ne comprenait pas.

    Nul besoin de lui en ... tenir … rigueur. J’étais consentant !

    Il commençait sérieusement à se désinhiber et heureusement pour notre alcoolique, son hôte finit par le laisser seul pour aller chercher les fameux documents. Aord le regarda partir, remarquant sa démarche gracieuse. Quel étrange personnage, pensa-t-il, mais finalement, je l’aime bien. Il imaginait comment allait se passer sa journée du lendemain avec Camille pendant que celui-ci était parti. Lentement, un sommeil lourd s’installait dans son esprit sans qu’il ne s’en rende compte et il finit par s’endormir la tête remplie de rêve brumeux.

    Aord sentit qu’on le soulevait. Un parfum qui ne lui était pas étranger vint lui chatouiller les narines, éveillant un sentiment étrange en lui. Son cœur s’accélérait tandis qu’il sentait la chaleur d’un autre corps contre le sien. Il ouvrit un œil pour voir une cascade blonde penchée au-dessus de lui. Camille le regardait, plongeant son regard turquoise dans le sien. Aord était fasciné par cette couleur qu’il ne voyait normalement que chez les morts. Qu’est-ce que le jeune noble faisait là ? Et pourquoi son cœur s’emballait-il comme ça en le regardant ? Il ressentait une quiétude incroyable en la présence de Camille et aussi une attraction étrange. Aord fit glisser sa main le long de son visage et de son dos, appréciant la douceur de sa peau et la chaleur douce qu’elle diffusait. D’un mouvement sec, il attrapa le jeune homme par la taille et le renversa doucement à côté de lui. Il voulait se rapprocher, augmenter cette sensation dans sa poitrine. Il dégagea les cheveux qui cachaient son visage, dévoilant un sourire radieux. Aord lui rendit son sourire se sentant tout à coup bien plus léger. Il prit le jeune homme dans ses bras collant son visage contre sa poitrine. Il se sentait tellement bien et apaisé dans cette étreinte. Camille se pencha sur lui, il pouvait sentir son souffle dans ses cheveux. Doucement et tendrement, il déposa un baiser sur le front du frère. Aord ferma les yeux, s’abandonnant à cette sensation de bien-être et de sécurité qui le parcourait. Il pourrait rester là pour l’éternité ou plutôt, jusqu’à ce que le poing de Camille s’écrase sur son visage.

    Le jeune frère tomba du lit dans un bruit. Sa rencontre avec le sol le sortit de son sommeil comateux. Sa tête hurlait sous l’impact et ses sens étaient encore perturbés par ce réveil brutal. Il resta dans cette position, étalé sur le sol grommelant que la déesse le torturait bien trop et qu’elle devrait aller voir ailleurs s’il y était. Il se releva tant bien que mal, la tête toujours assaillie de migraines. Un rapide coup d’œil autour de lui indiqua qu’il était de retour dans la tour. Comment était-il arrivé là ? Il se souvenait du repas dans la bibliothèque, d’avoir bu et oh misère … Sa gueule parlait d’elle-même. Il avait trop bu, cette sournoise Maïa l’avait saoulé jusqu’à plus soif. Il rit un bon coup avant de s’arrêter brusquement à cause de la douleur qui lui tiraillait la tête. Camille lui offrait de lire sa collection privée et lui il lui sifflait sa cave à vin à la place. Tu parles d’un frère de Lucy … vertu et foi mon cul !

    Aord entreprit de se rhabiller trouvant par la même occasion la clé de la porte au milieu de la pièce. Il descendit lentement, agressé par la lumière intense. La matinée était déjà bien avancée. C’est avec une tête d’enterrement qu’il déboucha dans la cour. Maïa s’y trouvait, entrain de démolir quelques mannequins d’entraînement. Elle avisa le jeune frère et se dépêcha de le rattraper.

    Alors Aord, j’ai reçu la visite de Camille ce matin qui m’a expliqué que vous ne teniez pas vraiment le vin. J’avais pourtant tant d’espoir en vous.

    Il la regarda droit dans les yeux d’un air faussement blasé avant d’éclater de rire. Elle le suivit dans son hilarité, jusqu’à ce que le frère s’arrête en se tenant la tête.

    Ouf … j’espère que Camille ne m’a pris pas pour un soiffard … il manquerait plus qu’on me compare à vous ! Je devrais peut-être écrire une mise en garde à tous les frères du temple, les prévenant qu’une vile tentatrice sévit sur ces terres.

    Je suis sûr qu’Arthas saurait vous donner de l’inspiration !


    Elle rit à sa blague. Avant de lui lancer ce regard malicieux dont elle avait le secret. Elle alla chercher une épée d’entraînement sur un râtelier à l’ombre et lui tendis l’arme d’un air de défi.  

    On m’a dit que les frères et sœurs de la déesse s’entraînaient également au maniement des armes. Un petit échange amical, ça vous dit ? L’exercice vous remettra la tête d’aplomb.

    Elle avait accompagné sa déclaration d’un clin d’œil.

    Humm … guérir le mal interne par une avalanche de coups, c’est une méthode originale ….


    Dois-je en conclure que vous refusez ?

    Absolument pas, j’aime la médecine traditionnelle !

    Il attrapa l’arme et se mit en garde. Sa gueule de bois le tiraillait beaucoup moins durant le combat. L’adrénaline et la tension gommaient un peu sa migraine. Il n’était pas du niveau de sa partenaire, mais il se défendait quand même. Ils enchaînèrent les attaques et les parades comme deux gamins qui se battent dans la cour jusqu’à l’heure du déjeuner.
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    Re: Coeur d'encre
    Mar 16 Fév 2021 - 2:25 #
    Assis sur une des marches de l’escalier extérieur, Camille regardait avec intérêt le prêtre tenir tête à Maïa. C’est qu’il ne s’en sortait pas mal !

    - Camille ! Debout ! Tu me dois un combat à mains nues !

    Il refusa en riant, faisant non de la tête. Montrant le Frère en nage, il cria depuis son perchoir

    - Jamais, je ne frappe pas les dames ! -Elle éclata de rire à son tour- L’as-tu au moins fait déjeuner avant de le tuer ? Ou tu ne nourris que les morts restés sur le carreau ?

    Descendant, il alla serrer la main d’Aord.

    - Remis ? un café, une tisane ? ou une coupe de pétillant ?

    Retenant son sourire il tendit au prêtre un bloc sur lequel il avait croqué leurs combats, saisissant la scène dans son ensemble sur certains dessins, une attitude en particulier d’un des protagonistes sur d’autres.

    - Je vous les offre, cela vous fera un souvenir plus pérenne que la gueule de bois, encore que vous résistiez étonnamment bien. Avez-vous ouvert les ouvrages ou voulez-vous qu’on y aille ensemble après le déjeuner ?

    Maïa le regarda très sérieusement.

    - Ne devions-nous pas lui montrer la crypte avant ?
    - La crypte, avant déjeuner ?
    - Ça ne lui coupera pas l’appétit, si ?

    Elle regarda le jeune Frère « êtes-vous claustrophobe ? Non ? Alors la crypte avant déjeuner !»

    Prenant Camille par les épaules comme elle l’aurait fait d’un compagnon d’arme, elle lui chuchota quelque chose dans l’oreille, regardant Aord Svenn d’un air grave. Camille fit un mouvement de la tête pour cacher ses yeux pétillants derrière sa longue chevelure détachée.

    - Bien, allons-y, ça ne sera pas très long et ensuite nous déjeunerons, puis au choix je vous montre mes talents de dessinateur dans la tour -où vous avez peut-être trouvé les deux ouvrages que j’ai laissé hier soir- ou nous allons directement à la bibliothèque ?

    Maïa lui tendit une serviette pour qu’il éponge la sueur de son visage et tendit la main, lui indiquant une petite porte à laquelle on accédait en descendant une volée de marches de l’autre côté de la cour d’entraînement.

    Tirant une clé de sa poche, elle l’ouvrit et ils pénétrèrent dans une sorte de cave voutée qu’ils traversèrent sous le regard de deux rangées d’armures anciennes au garde à vous. Ouvrant une seconde porte, plus basse encore qui la força, et plus encore le Frère à se plier, elle descendit silencieusement un escalier en colimaçon sombre et froid. Parvenue sur un palier, elle montra une inscription au-dessus d’une troisième porte, plus basse encore…

    « Mortels passez votre chemin, vous pénétrez ici à vos risques et périls ! »

    Poussant la porte, elle se mit de côté pour laisser passer Camille qui lui-même céda le passage à Aord. Une vaste salle basse de plafond rengorgeait de coffres, meubles anciens, miroirs, chandeliers posés sur des consoles, plateaux portant de la vaisselle ouvragées, armoires anciennes, et même s’échappant de coffrets des bijoux qui paraissaient authentiques.

    - Vous êtes ici dans l’antre d’Adalbert. Il aimait à amener certains visiteurs curieux jusque dans cette salle pour leur montrer ses curiosités les moins fragiles.

    Il n’ajouta pas « et les moins sérieuses ». Montrant un verre isolé à côté d’une carafe de facture identique il allait parler quand Maïa lui coupa la parole.

    - Celui-ci est pour vous, c’est un verre qui change l’eau en vin…

    Camille pris une aiguière et la remplit à une fontaine toute proche, il fit couler une goulée d’eau dans sa bouche « c’est incontestablement de l’eau, voulez-vous vérifier ? » il la tendit au jeune prêtre qui se prêta au jeu. Maïa déclina l’offre d’un geste.

    - Maintenant, essayons ? Je vous préviens tout de suite que l’artifice n’est que mineur, le vin n’aura ni la robe, ni la texture d’un millésime titré, mais malgré sa couleur d’eau il aura l’odeur et la saveur d’une honnête piquette…

    Versant l’eau dans le verre il le tendit à son hôte.

    - Alors ? votre verdict.

    Aord ne put s’empêcher de sourire. Maïa prit la parole, grandiloquente.

    - Maintenant un objet qui ne saurait être inutile à un Frère de Lucy : le miroir reflet de l’âme ! Si vous vous mirez dedans, vous verrez votre âme apparaitre blanche ou noire, c’est selon. Il faut parfois l’orienter pour que la lumière soit suffisante.

    Elle lui tendit un miroir circulaire aux anses finement travaillées et au cadre en argent vieilli orné d’un bestiaire fantastique. Après l’avoir un peu manipulé, le jeune prêtre reçu en plein visage une giclée de poudre noire qui d’après Maïa témoignait de la noirceur de son âme, ce qu’on n’aurait jamais soupçonné chez un ecclésiastique !

    Camille lui tendit de quoi se nettoyer en s’excusant, sans toutefois paraître bien marri de la farce…

    - Lors de mon arrivée ici mon grand-oncle me fit subir le test… Il portait un habit de soirée en satin blanc et contrairement à vous, loin d’en rire, je me mis à pleurer… Je pense que la mort récente de mes parents avait influencé ma réaction et que me voir une âme si noire a fait remonter un sentiment de culpabilité dont je ne me suis jamais défait… La blanchisseuse a dû me maudire car Adalbert n’écoutant que son grand cœur m’a serré contre lui… me laissant pleurer tout mon saoul. Quand j’ai été calmé, mon visage était plus clair mais son habit était perdu…

    Il l’entraîna vers le fond de la salle devant un grand miroir sur pied. L’objet, de plus de sept pieds de haut était entouré d’un cadre aussi massif sur lequel dansaient des morts os apparents, des créatures étranges cornues à queue pointue semblaient les poursuivre et les maltraiter…

    - Celui-ci a la réputation d’apprendre aux personnes dont la vie va se terminer bientôt de quelle mort elles partiront… J’avoue que je ne m’y suis jamais miré. C’est probablement comme les autres un canular sans quoi il ne serait pas dans cette salle, mais le sujet me glace. Comme toutefois les ouvrages nécromantiques ont eu l’air de vous intéresser je voulais vous le signaler. Allons-nous déjeuner ? Nous verrons ensuite comment nous organisons notre journée ?

    Le trio sortit de la salle, Maïa ne pouvant s’empêcher de jeter un coup d’œil dans l’immense miroir elle se retourna comme déçue.
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Coeur d'encre
    Mar 16 Fév 2021 - 18:46 #
    Par la déesse, qu’est-ce qu’elle était rapide ! Aord peinait à parer ses assauts qui s’enchaînaient comme une volée de flèches. Elle se fendait avec grâce et repoussait ses actes avec forces, pas de toute, elle avait bien plus d’expérience que lui. Cependant, il n’avait pas séché les cours du temple quand il était initié et son père l’avait formé très jeune. Bien que manquant d’expérience, il résistait tant bien que mal. Il prit pas mal de coups cependant, mais cet exercice le ressourçait agréablement. Il ne pensait pas vivre tout ça en arrivant ici. C’était incroyablement grisant.

    Leur passe d’armes dura une bonne demi-heure avant que Maïa y mette fin pour apostropher Camille perché sur les marches. Aord n’avait pas vu le jeune noble arrivé, son attention totalement capturée par le combat. Il appuya ses mains sur ses genoux pour retrouver le cours normal de sa respiration. La vue du jeune homme réveilla un sentiment étrange en lui, un souvenir flou de la nuit dernière, mais impossible de retrouver quoi. Il avait fini par l’apprécier ainsi que sa maisonnée. Cela devait être réciproque, parce que le jeune noble ne put s’empêcher de le taquiner sur son petit problème d’alcool. Il répondit du tac au tac :

    Non merci, il ne faut pas trop abuser des bonnes choses …

    Il lança un regard en coin à Maïa pour lui signifier qu’il comptait au contraire en abuser autant que possible. Cependant, ça ne se faisait pas d’être saoule deux fois devant son hôte. Il allait se tenir pour l’instant. Son visage afficha un air surpris quand Camille lui tendit son carnet de croquis. Il se souvenait qu’il lui avait parlé de son talent de dessinateur. Aord le remercia, puis ouvrit le carnet et explora avec attention les productions de son hôte. On ne lui avait pas menti, il avait un certain talent. Les mouvements étaient bien retranscrits, bien qu’à peine esquissés. Ses visages étaient bien proportionnés et retranscrivaient d’une manière tout à fait naturelle la tension des combattants. Il releva la tête quand il comprit qu’on lui parlait. Il n’avait pas prêté attention à ce qu’il se passait autour de lui et se contenta d’acquiescer sans savoir à quoi il consentait. Il attrapa la serviette qu’on lui proposait et s’essuya de façon a paraître un peu moins en nage.

    Il suivit ses deux guides tout en discutant avec Camille. Quels ouvrages ? Il n’avait absolument rien vu en se réveillant. En même temps, il avait marché à l’aveuglette tellement la lumière lui agressait les yeux. Il allait falloir trouver une excuse valable pour ne pas froisser Camille.

    Je n’ai pas encore pris le temps de les consulter. Ce matin, mes préoccupations étaient plutôt tournées vers la recherche dune forme de soulagement, si vous voyez ce que je veux dire. Si vous voulez, vous pourrez me rejoindre dans la tour après le déjeuner. Je pense que vos talents de dessinateur seraient parfaits pour mon enluminure. Qu’en pensez-vous ? Cela vous dirait de laisser une trace de votre art dans un ouvrage du temple ?

    Sur ces mots, ils arrivèrent à ce qui ressemblait à une crypte. Aord se demandait bien ce qu’il y avait de si intéressant là-dessous. Il entra dans la petite pièce et comprit que ce n’était pas une crypte pour les morts, mais plus une cave où on entreposait tout le bazar qui prenait de la place dans la demeure. L’inscription au-dessus de la troisième porte ne lui fit ni chaud ni froid. Il leva même un sourcil interrogateur.

    Charmant.


    Ses deux compères décidèrent de lui faire découvrir les « merveilleux » objets que contenait cette pièce. Il se prêta au jeu de bonne grâce, testant l’eau, puis le contenu du verre magique. Il sourit en sentant le goût du vin sur sa langue. Le goût était bien loin de celui qu’il avait pu déguster la veille. Cependant, il trouvait cela impressionnant. Il vida la coupe, avant d’inspecter le verre plus en détail.

    C’est assez bluffant je l’avoue !

    On lui tendit ensuite un miroir assez banal. Il le tourna et le retourna dans tous les sens avant d’y plonger son regard d’un air curieux. Soudain, un nuage noir sortit de l’objet, le prenant par surprise. Il semblerait que son âme ne soit pas des plus pure, même s’il imaginait que le miroir devait réserver ce traitement à tout le monde. Il ne put s’empêcher d’ironiser.

    Voyez ce que vous avez fait Maïa. Corrompre ainsi un serviteur de la déesse au point que son âme soit aussi noire.

    Il ouvrit grand les yeux pour se donner un air machiavélique. Son expression était renforcée par les coulées de poudre noire et de sueurs qui traversaient son visage. Il accepta le mouchoir de Camille et s’essuya comme il put. Il restait cependant encore de la poudre qui avait coulé sur ses habits et sous ses vêtements. Un bain devenait encore plus nécessaire.

    Enfin, on lui montra le joyau de l’exposition. Un miroir sinistre se dressait dans un coin de la pièce. Aord s’en approcha, son intérêt piqué au vif. Il admira d’abord les décorations de l’objet qui aurait pu en impressionner certains, mais pas le frère. Puis, il entreprit de regarder dans la glace. Il ne savait pas s’il devait être rassuré ou déçu de ne rien y voir. Toutefois, il lui semblait apercevoir quelque chose. Il se rapprocha plissant les yeux. C’était sûrement encore une farce de la part des deux autres, mais une énergie étrange semblait l’attirer. En se rapprochant, il put distinguer une couleur turquoise apparaître dans le reflet de la pièce. Cette lueur devint de plus en plus nette et finit par prendre la forme d’une paire d’yeux. Ses propres yeux le regardaient dans le miroir imprégné de l’énergie qui lui permettait de réveiller les morts. Cette fois, le frère blêmit avant de se retirer très rapidement de l’espace devant le miroir. Cet objet n’était pas qu’une farce, il était véritablement relié à la mort, il en avait la certitude.

    Il ne se fit pas prier quand on lui proposa de sortir d’ici. Son visage n’avait pas pris plus de couleur quand ils arrivèrent à la lumière du jour. Il avait besoin de s’éloigner un moment, cette rencontre avec son reflet le travaillait encore. Il répondit donc par la négative quand Camille proposa d’aller manger.

    Je vais rentrer au temple afin de me laver. Il ne faudrait pas que de la poudre se retrouve sur mes feuilles. Une seule trace et c’est des journées de travail aux oubliettes. Si vous voulez bien m’excuser, rejoignez-moi dans la tour après le déjeuner.

    Il s’inclina cérémonieusement et tourna les talons, l’air sévère. Il fit exactement ce qu’il avait dit. De retour au temple, il se remplit un plein bac avec de l’eau et entreprit d’éliminer toute trace de poudre de ses cheveux et de son visage. Une fois cela fait, il lava ses vêtements trempés de sueur et les laissa sécher. Il prit ensuite une tenue de rechange et nettoya son espace de bain. Une fois complètement propre, il attrapa quelques fruits qu’on avait laissés pour lui à son arrivée dans les innombrables corbeilles. Il prit ensuite la direction de la tour où devait le rejoindre Camille. Là-bas, il trouva enfin les fameux ouvrages que Camille avait montés pour lui. Il fut très impressionné par la qualité de l’enluminure et de la calligraphie. Le détail des dessins était très fin et la couleur leur donnait presque vie sur le parchemin. Aord essaya de reconnaître les différentes encres que le copiste avait dû utiliser. La facture avait sûrement été salée.

    Il libéra un espace sur son plan de travail pour accueillir Camille, laissant une feuille blanche et des fusains. Il y laissa également l’esquisse qu’il avait commencé la veille qui pourrait lui servir de modèle pour plus tard. Enfin, il se posa dans un coin de l’alcôve en attendant son hôte, feuilletant les ouvrages qu’il avait laissés pour lui.
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    Re: Coeur d'encre
    Mar 16 Fév 2021 - 21:37 #
    Camille grignota, il n’avait pas à proprement parler « faim » et détestait par-dessus tout se goinfrer quand son estomac prétendait se contenter de peu. Par principe, il haïssait les être égoïstes qui voyaient dans la nourriture plus qu’un moyen de subsistance et par leur gâchis pouvaient priver de plus pauvres qu’eux du nécessaire ; ensuite, ses besoins de noble bien nourri étaient moindres, n’ayant jamais manqué de rien, il n’avait pas le réflexe de « stocker » pour les jours maigres…

    Il expédia donc son déjeuner, Maïa prête à partir il fit un geste en sa direction et s’arrêta net, il était attendu, le reste pourrait patienter. Jetant un œil à un petit objet étrange ramené de la Forteresse en son temps par grand-oncle Adalbert dont chaque pièce du manoir conservait une trace, il enregistra qu’il avait le temps avant de rejoindre le prêtre de passer à la bibliothèque et de sortir de leurs rayons quelques ouvrages choisis.

    Il pressa donc le pas en direction de la grande tour, montant l’escalier prestement, ouvrit la porte et disposa une douzaine d’ouvrages en quatre tas :

    - Les « merveilles », enluminures riches et colorées, techniques uniques ou expérimentales, raretés inestimables, quel que soit le sujet dont ils traitaient. Il pensait que le copiste y trouverait un agrément en tant que spécialiste et prendrait plaisir plus qu’un profane à en admirer les couleurs, le parchemin choisi, la finesse de la calligraphie, il n’y avait que trois manuscrits pouvant figurer dans ce lot,

    - Les ouvrages religieux rarissimes, il y en avait deux que seul Adalbert avait eu la chance de posséder, d’autres que le grand temple dans le sud détenait également mais qui n’existaient qu’en deux ou trois versions. Il ajouta un ouvrage étrange, sorte de « déviance » d’un livre commun que le Frère en charge de le copier avait agrémenté de nombreux passages inexistants dans le modèle… Plus nombreux, ils étaient cinq. Un court instant, il se demanda si la présence physique d’Aord Svenn n’était pas liée à ces ouvrages… De nombreux religieux et temples avaient approché le défunt, et continuaient à le pressentir de façon régulière, pour qu’il s’en sépare et les « restitue » à la déesse…

    - Les ouvrages traitant de la nécromancie et les rapports concernant des pratiques nécromantiques, des faits divers, des enquêtes sur des faits ou phénomènes inexpliqués, ainsi que les rapprochements que leurs auteurs avaient effectué avec d’autres livres traitant de religions anciennes, ou des légendes les mettant en scène. Il n’y en avait que deux,

    - Sur le dernier tas, deux manuscrits également, en fait, un manuscrit de taille et de poids assez impressionnants et un ensemble de rouleaux reliés entre eux… Camille avait eu le sentiment de se brûler la peau en posant le plus gros, il restait comme groggy, sans doute une substance délétère recouvrait-elle la couverture en peau d’un grain dont il ne parvenait à situer l’origine. Ecrit dans une langue inconnue, les illustrations parlaient d’elles-mêmes, il s’agissait à n’en pas douter de rituels nécromantiques d’une rare précision…


    Ceci fait, il referma la porte à clé et redescendit l’escalier en colimaçon le plus rapidement possible, faisant un crochet par les cuisines, il obtint en un clin d’œil une bouteille de pétillant dans un récipient qui le maintiendrait à une température correcte, et courut presque jusqu’à la tour du Frère.

    Frappant grâce au heurtoir doré, il posa la main sur la poignée et le battant s’ouvrit sans qu’Aord ait à se déranger. Il le salua à nouveau, posa sa bouteille sur une petite table et alla chercher dans un meuble deux coupes puis vint s’asseoir à côté du Frère, perdu dans sa contemplation des enluminures déposées la veille au soir.

    « Je suis prêt ! Dites-moi » prononça-t-il avec enthousiasme.

    Avisant l’esquisse posée et laissée de côté par le Frère, il prit une large feuille et s’en inspira, le visage de la déesse comme suggéré, apparaîssait en filigrane de scènes de la vie quotidienne juxtaposées, comme… une galerie dans laquelle différents marchands auraient déposé un étalage. S’il avait bien compris ce qu’Aord voulait faire passer, il devait faire en sorte que Lucy paraisse inspirer les acteurs par sa présence dans chaque cœur… il représenta donc un couple âgé se tenant la main, des enfants aidant un infirme, une mère donnant le sein, des adolescentes disposant des fleurs devant un autel, un frère mendiant sur la route, auréolé de la lumière de la foi, des gardes défendant la veuve et l’orphelin… Et bien d’autres personnages dans une foule aux expressions enthousiastes et nettes… Toute une petite foule de croyants qui tenaient de la déesse leur force pour franchir chaque jour, aider leur prochain et construire un avenir…

    Tout à son « œuvre » il imagina des couleurs pimpantes qui mettraient en valeur la simplicité de la déesse omniprésente en arrière-plan… Il ne s’avisa pas que le Frère, sortit des manuscrits qu’il avait refermé doucement, le regardait dessiner.

    Rougissant quand il en prit conscience, il lui tendit la page et lui dit

    - Si vous le souhaitez, j’ai sorti quelques autres ouvrages dans la bibliothèque ? Ou voulez-vous que nous continuions ici ? Ou d’ailleurs que je vous laisse seul à votre labeur ?
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Coeur d'encre
    Mer 17 Fév 2021 - 15:03 #
    Le frère était plongé corps et âme dans la contemplation des enluminures que Camille avait laissées pour lui. La finesse avec laquelle le copiste avait tracé ses lettrines, le choix des couleurs qui rendait superbement encore aujourd’hui, il admirait ce travail d’un œil expert. Son oncle Adalbert avait fait l’acquisition d’ouvrages de très grande valeur. Il fut tiré de ses pensées par le grincement de la porte qui laissa entrer un Camille très enjoué. Sa joie manifeste arracha un sourire au serviteur de la déesse. Cela crevait les yeux qu’il voulait se mettre au travail au plus vite. Aord avisa la bouteille que Camille avait apportée et se pinça les lèvres à sa vue. Il convenait qu’il avait un petit penchant pour le bon vin, et même plus qu’un penchant, mais il était hors de question qu’il boive la moindre goutte d’alcool avant son travail. Il n’était pas toujours le plus sérieux des frères de la déesse, mais quand il s’agissait de son travail de copiste ou de thanatopracteur, il s’interdisait de se laisser aller.

    Il se leva donc avant que Camille ne prenne place pour ranger les deux coupes qu’il avait sorties. Il lui jeta un regard tout à fait sérieux, un peu comme ceux que devait lui jeter Arthas.

    Je suis navré, mais notre travail nous demande d’être au meilleur de nos capacités. Nous badinerons avec l’alcool après l’avoir terminé et peut-être même après avoir jeté un œil à vos fameux manuscrits cette fois !

    Il sourit à Camille, car il se rappelait très bien leur soirée de la veille. Il lui indiqua ensuite de prendre place pour lui expliquer ce qu’il devait faire. Le frère se plaça devant son « apprenti » et lui montra l’esquisse qu’il avait réalisée la veille. Il laissa Camille s’en imprégner avant de sortir une autre esquisse plus détaillée qui représentait tout autre chose.

    Prenez bien note de la taille du trait et de sa forme. Pour pouvoir apporter de la couleur, il ne faut pas qu’il soit trop épais sauf aux endroits où il démarque profondément deux formes. Vous devez créer la forme en utilisant des traits fins et en économisant au maximum le nombre de traits que vous utilisez.

    Il montrait différents endroits du dessin tout en lui donnant son explication. Camille semblait captivé par ce qu’il disait et il ne put s’empêcher de partager son enthousiasme. Enfin , il le laissa à son œuvre. Sans se faire prier, le jeune noble s’attela à sa tâche avec une certaine passion. Aord se plaça derrière lui et le regarda dessiner. Il s’émerveilla de voir les personnages apparaître petit à petit à mesure que les traits se connectaient pour former leur visage. Il avait du talent c’était certains, cela manquait quelque peu de précision et malgré ses avertissements, son dessin n’était pas plus adapté à une enluminure. Le frère allait devoir y apporter quelques retouches mineures avant de s’attaquer à la couleur. Il resta à côté de lui pendant toute la durée de son travail, veillant au grain afin de le guider du mieux possible. Ils étaient proches l’un de l’autre et ce n’est que quand Camille termina son œuvre qu’il sembla s’en rendre compte. Aord remarqua le rougissement qui teintait ses joues. Il n’était pas habitué à se montrer ainsi on dirait. Devait-il se sentir privilégié ? Il attrapa le croquis qu’on lui tendait et l’observa sous toutes les coutures, fronçant les sourcils et grimaçant pour torturer un peu le noble. Ce n’était qu’une petite vengeance pour les farces et attrapes de tout à l’heure.
    Il finit cependant par briser le silence en lui faisant un clin d’œil moqueur.

    C’est parfait, vous avez parfaitement retranscrit le message que je voulais faire passer.


    Il observa la réaction du jeune homme pour s’assurer que sa petite torture avait eu l’effet escompté. Il réfléchit ensuite à sa proposition. Que faire ensuite ? Aord avait bien envie d’aller fouiner dans la réserve, mais il ne devait pas oublier qu’il était là pour le travail et pas pour passer du bon temps avec le noble. Il allait encore falloir faire un compromis.

    Vous ne voulez pas voir votre œuvre prendre de la couleur ? Restez donc pendant que j’applique une première série de couleurs. Pendant qu’elle séchera, nous pourrons descendre à la bibliothèque.

    Il lui fit signe de bien vouloir libérer la place, lui proposant de se servir un verre maintenant que sa tâche était terminée, lui devait rester sobre. Il sortit de la grande malle les encres colorées qu’il avait préparées la veille. Il commencerait par une encre vert plante et une couleur chair. Vu le nombre de personnages, c’était la meilleure façon de commencer. Il travaillerait quelques éléments de la végétation au passage. Il s’installa au pupitre invitant Camille à le rejoindre. Quand il attrapa sa plume, son regard changea du tout au tout devenant intense et concentré. Il commença par repasser sur le croquis de Camille avec une encre noire. Une fois le dessin entièrement fait à l’encre, il commença l’application des premières couleurs. Elles semblaient très foncées par rapport à ce qu’on s’imaginait, mais en séchant elle prendrait une autre teinte. De plus, le frère rajouterait des couleurs plus claires pour donner de la profondeur à la représentation plus tard. Il exécutait ses gestes avec une extrême lenteur, gagnant ainsi une précision presque chirurgicale. C’était une concentration fragile et intense. Camille avait intérêt à ne pas le déranger et à se tenir tranquille. Les personnages commencèrent à prendre des couleurs, la végétation prenait vie également. Aord marquait de petites pauses pour expliquer à son « apprenti » d’un jour ce qu’il était en train de faire.

    Au bout de 45 minutes de dur labeur , le frère avait terminé de colorier tous les espaces possibles avec ses couleurs. Il reposa sa plume et ferma ses pots d’encre, puis s’étira sur sa chaise, son corps était tout engourdi.

    Et voilà, nous reviendrons voir ce que ça donne quand ce sera sec.


    Il se leva et ressortit les coupes qu’il avait rangées. Si Camille s’en était sorti une pour lui, il n’en prendrait qu’une. Il se servit une coupe et proposa de servir Camille. Une fois cela fait, il leva son verre devant lui.

    À notre œuvre.


    Le goût du vin lui ravit le gosier, comme hier. Il ne se lâcha pas sur la bouteille cependant. Une fois son verre vide, il regarda le noble droit dans les yeux.

    Bon, il temps d’aller voir ces manuscrits vous ne pensez pas ?

    Ils partirent donc rejoindre la grande tour de la bibliothèque pour procéder à cette inspection tant attendue. Son hôte le conduisit à la fameuse réserve où il avait déjà rassemblé les ouvrages par groupe. Aord se laissa guider par le blond. Il ne prit pas l’initiative et porta son attention sur ce qu’on lui présentait. Ils commencèrent par les fameuses merveilles de la collection. Les yeux du jeune frère s’écarquillèrent d’admiration. Il reconnaissait cette matière.

    Du vélin.


    De la peau de veau mort-né, extrêmement délicate et précieuse. Les enluminures étaient serties de feuille d’or. La couleur éclatante de l’encre provenait de produit d’une grande qualité et le traitement appliqué avait permis de garder leur éclat.

    Ces manuscrits sont absolument sublimes, ne les sortez jamais de cette pièce. La chaleur, l’humidité pourraient agresser l’encre et détruire ce fragile équilibre. Leur valeur est absolument inestimable !

    Les yeux d’Aord brûlaient d’envie. L’envie qu’un jour, il puisse participer à la rédaction d’un chef-d’œuvre de ce genre. Il doutait que ce soit encore possible, on ne balançait pas autant d’argent pour un ouvrage plus fragile que le verre le plus fin, personne ne paierait pour ça ! Il était vraiment heureux d’avoir la chance de pouvoir les voir et regrettait amèrement son état d’hier soir. Quand il pense qu’il avait manqué ça pour du vin ! Soudain son regard fut attiré par la dernière pile. Il e oublia les textes religieux et tout le reste. Un livre étrange d’une matière qu’il n’avait jamais vu dans une bibliothèque trônait sur la table. Aord s’approcha fasciné, ses doigts caressèrent doucement la couverture. Une vague de froid glaçant lui parcourut la main à ce contact. Il écarta sa main d’un mouvement brusque, ses doigts étaient comme endormis. Il ferma sa main plusieurs fois pour leur permettre de reprendre un peu de vie.  

    Le fameux texte impie n’est-ce pas ? Je me demande qu’elle est cette matière étrange …


    Il reprit son inspection du texte, utilisant cette fois un chiffon pour toucher la couverture. Cette sensation de froid, on dirait presque le froid de la mort. Il avait manipulé bon nombre de cadavres et leur froideur finissait par s’insinuer dans vos propres os si vous n’y preniez pas garde. Il ouvrit l’ouvrage contemplant les illustrations horrifiques qu’il contenait. La langue utilisée ne lui disait absolument rien, mais les illustrations renseignaient bien trop sur son contenu. Aord était fasciné, mais en même temps il sentait son estomac se nouer. Ce livre était une horreur et pourtant, il ne pouvait s’en détacher. Il ressentait cette même impression qu’avec l’étrange miroir. La texture du parchemin lui était inconnue. Il n’avait jamais vu ça dans un ouvrage. Soudain un doute lui traversa l’esprit. Il prit une grande inspiration et souffla sur l’ouvrage. Un nuage bleuté se répandit hors de sa bouche et recouvrit entièrement le texte et sa couverture. L’énergie tenta de s’accrocher à l’ouvrage, mais ce n’était plus vraiment un corps qu’on pouvait réanimer. La brume se dissipa n’ayant pas pu réaliser son œuvre. Cependant, Aord venait d’obtenir une information cruciale en observant la manière dont elle s’était accrochée aux pages.

    Le frère leva les yeux reprenant conscience de la présence de Camille. Son air était grave, on aurait dit qu’il s’apprêtait à annoncer le décès de quelqu’un.

    Arthas avait raison Camille, ce livre … non cette chose devrait être brûlé dans l’heure. Le parchemin sur lequel il est écrit c’est … c’est …

    Ses yeux s’écarquillèrent d’horreur, tandis que la fin de sa phrase tentait de sortir de sa bouche :

    De la peau humaine !
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    Re: Coeur d'encre
    Jeu 18 Fév 2021 - 9:14 #
    De la peau humaine !

    Camille recula manquant faire tomber d’autres ouvrages en heurtant un présentoir où figurait de petits livres « coquins », une autre marotte d’Adalbert qu’Arthas aurait voulu lui faire ouvrir à tout force…

    De la peau humaine ! Etes-vous certain ? C’est monstrueux !

    Il sentait à nouveau cette impression déplaisante qu’il avait eu en manipulant l’objet, pourtant jamais il ne s’était avisé d’être sensible à ce type de choses. Montrant les quelques rouleaux, sept, il les compta en dénouant le lien qui les tenait ensemble, il dit

    Il est toujours présenté avec ceci… Je ne l’avais jamais ouvert, mon grand-oncle me l’avait montré, en vous voyant faire il m’est revenu qu’il le touchait toujours ganté et souvent avec un mouchoir devant la bouche… Il disposait toujours le « livre » et les rouleaux à côté, comme s’ils étaient la clé.

    Se plaçant à la droite du Frère, il déplia le premier rouleau… Les mêmes signes qui composaient l’écriture du gros ouvrage étaient tracés mais d’autres phrases étaient intelligibles, une version ancienne certes de la langue parlée aujourd’hui, et peut-être « littéraire » mais compréhensible sans le moindre souci. Le texte en langue étrangère était émaillé de dessins…

    « Le compte de la vie ouvre les portes des ténèbres, mortel, contemple l’à venir de toute chair… »

    Lut-il.

    C’est grandiloquent et peu clair non ?

    Ouvrant le second rouleau il vit bien en évidence au milieu d’autres signes cabalistiques et dessins une phrase similaire :

    « La peur est mort de chaque instant, passe la peur et ouvre la porte qui mène au-delà de toutes vies… »

    Sur celui-là quelqu’un avait entouré certaines lettres et certains signes, et pris des notes d’une écriture nerveuse mais minuscule et presque effacée par le temps…

    Le troisième était fait sur le même modèle, mais le texte en langue commune plus long à défaut d’être plus explicite.

    « D’un pied tu passeras la tombe, de deux tu franchiras la porte… Que la tête du spectre te guide en deçà de toute espérance, compte tes pas et recule de deux pour avancer de six… Chaque être vivant est un mort qui attend son heure… Mais ne tiendra son rang que par l’obéissance… Guette les signes et obéis ! »

    Camille ouvrit de grands yeux indécis… La même écriture minuscule et pâle avait semble-t-il mis côte à côte certains signes et des lettres, le texte en clair semblait ponctué par des traits tracés par l'inconnu qui l'avait annoté.

    C’est totalement sibyllin non ?

    Renonçant à comprendre, il tendit les quatre rouleaux de parchemin -était-ce du parchemin ? il déglutit en imaginant qu’il touchait peut-être les restes d’un malheureux- au Frère.

    Croyez-vous qu’Arthas savait ? Après tout il a bien connu Adalbert, ils étaient amis et je crois bien qu’il lui a fourni des escortes pour ses recherches ?

    Il avait peine à imaginer son intendant, si probe, si strict, dans le secret d’une pareille horreur…

    Pris d’une curiosité malsaine, il reprit toutefois le dernier rouleau et l'ouvrit, était-ce le dernier ou le premier après tout ? ils étaient enroulés les uns avec les autres, il avait considéré celui qui maintenait les autres comme le premier ?

    « Doigt de sang commet crime de rage… Rage de sang écrit cœur de peur… Peur du sang mène à mort de vie… Vide sang offre vie de mort… Disciple ! Meurs pour vivre et offre ton sang à Celui qui Voit et Sait… Offre ! Remplis l’aiguière de la mort pour vivre dans l’éternité de l’ombre et de la ténèbre… »

    Le texte était écrit avec une encre brunâtre et certains mots semblaient s’être effrités… un étrange dessin le concluait, formé d’empreintes de doigts trempés dans l’encre, une sorte de main ouverte… De la taille d’une main de jeune enfant.

    Camille lâcha le parchemin pris de nausée et dut sortir. Le Frère l’entendit descendre les escaliers à toute vitesse et claquer la porte de la tour… Parvenu dehors, il vida ses tripes, plié en deux et hoquetant. Il revint doucement pour ne pas abandonner le religieux dans la réserve avec de telles horreurs…

    Remontant l’escalier qu’il avait dévalé avec une lenteur ponctuée de soupirs, il franchit le seuil à regret…
    Aord SvennLe plus cursed d'entre tous
    Aord Svenn
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    Re: Coeur d'encre
    Jeu 18 Fév 2021 - 22:10 #
    Aord n’avait jamais vu ça. Un texte entier écrit sur de la peau humaine, c’était inimaginable. Camille se recula violemment quand le frère lui expliqua ce que son grand-oncle avait trouvé. Il était certains de ce qu’il affirmait. Son pouvoir ne le trompait pas, il avait redonné la vie à bien des cadavres, la brume se comportait toujours ainsi en présence de dépouilles humaines. Il se demandait si l’encre était aussi fabriquée dans une matière macabre. Le sang contrairement à ce qu’on croyait faisait une très mauvaise encre, trop diluée.

    J’en suis sur Camille aussi horrible que cela puisse être.

    Il baissa les yeux comprenant que cette nouvelle devait l’atteindre. Il ne connaissait pas sa relation avec son oncle, mais il était sûr que cette découverte devait affecter l’image qu’il avait de lui. Le jeune noble sembla finalement se ressaisir. Il commença à rassembler les rouleaux qui accompagnaient l’ouvrage. Curieux, mais réservé, Aord se pencha pour observer avec lui les étranges inscriptions qui figuraient dessus. Une phrase en alphabet moderne accompagnait les étranges inscriptions tirées du livre. Quelqu’un aurait tenté de le décoder auparavant ? Aord ne s’intéressa pas à la traduction dont le sens lui échappait totalement. Dans son esprit, Aord essayait de relier les lettres aux symboles. Cependant, le code utilisé ne semblait pas aussi simple. Il n’y avait pas autant de lettre dans la phrase que de symbole dans le texte original. Une simple association lettre à lettre ne semblait pas être la solution pour comprendre c code.

    C’est grandiloquent et peu clair non ?

    Si on prend en compte la matière sur laquelle ce message était écrit, j’imagine que cela veut dire quelque chose comme : vous allez tous finir en parchemin, mouahaha !


    Le frère n’avait rien trouvé de mieux pour détendre l’atmosphère que de faire un peu d’humour. Il n’eut pas l’impression que cela calma Camille qui continuait à dérouler les autres rouleaux dévoilant d’autres tentatives pour percer le code du codex. Le reste des textes n’avaient pas plus de sens. Le frère se demandait si la traduction était la bonne. Davantage de symboles semblaient y être transcrits. Le code se composait donc de lettre, mais pas seulement. Il voyait comment l’inconnu avait essayé de découper la phrase à l’aide de ses lignes. Un symbole correspondait à une syllabe peut-être ? Ou un morphème ? Malgré la teneur impie du texte, l’esprit d’Aord ne pouvait s’empêcher d’essayer de le décoder. Sa curiosité malsaine l’entraînait sur cette voie peu ragoûtante. Et si ce livre contenait des informations sur les personnes aux facultés semblables aux siennes ?

    Croyez-vous qu’Arthas savait ? Après tout, il a bien connu Adalbert, ils étaient amis et je crois bien qu’il lui a fourni des escortes pour ses recherches ?

    Si votre intendant connaissait la nature de cet ouvrage, je pense qu’il se serait passé de votre permission pour y mettre le feu. Je ne sais rien de votre grand-oncle, mais si j’étais à sa place, je ne serais pas allé crier sur tous les toits que je possédais un traité de nécromancie en peau humaine. Vous pensez que nous pourrions l’interroger à ce sujet, malgré ces soucis de santé ?


    Pourquoi demandait-il ça ? Pourquoi cherchait-il à en savoir plus ? Il était frère de Lucy et respectait la vie par-dessus tout, alors pourquoi chercher à décrypter ce savoir ignoble ? Était-ce un désir égoïste ? Une épreuve de la déesse ? Elle l’avait conduit ici et lui avait fait rencontrer Camille et son odieux ouvrage. Devait-il l’aider à tirer les choses au clair ? Les doutes l’assaillaient quand Camille ouvrit le dernier rouleau par curiosité. Celui-ci était le parfait exemple de pourquoi on n’utilisait pas d’encre à base de sang. Les lettres s’étaient effritées avec le temps et les symboles étaient devenus presque illisibles. Camille ne sembla pas supporter d’avantage d’horreur et couru à l’extérieur le visage blême. Le frère connaissait cet empressement y ayant déjà assisté au sein d’une morgue. Il ne le poursuivit pas, préférant lui laisser le temps de se ressaisir.

    Aord se retrouva seul avec l’ouvrage. Il regardait les parchemins ouverts sur la table essayant de prendre une décision quant à ce qu’il devait en faire. Ils semblaient prendre vie sous ses yeux, essayant de lui souffler leurs secrets. Il était tentant de leur prêter l’oreille et de recueillir ce savoir ancien et pervers. Le jeune homme finit par céder. Il récupéra une feuille blanche et de quoi écrire et s’attela à rassembler les informations contenues dans les quatre rouleaux. Il essaya de créer un glossaire des symboles commençant par écrire soigneusement chacun d’entre eux en colonne afin de leur associer une traduction. Ils étaient nombreux et Aord se rendit compte qu’il y en avait plus que de lettres dans l’alphabet officiel d’Aryon. Cela confirmait son intuition que le code utilisé ne pouvait pas se résumer à une simple association lettre à lettre.

    Il entreprit ensuite de donner la traduction des symboles déjà traduits par le mystérieux inconnu. Le frère se demandait si ce n’était pas Adalbert lui-même qui avait fait cette première tentative de traduction. Aord éprouvait une certaine excitation à mesure qu’il poursuivait son travail. Il ressentait un peu de ce qu’Adalbert avait dû ressentir en découvrant cet ouvrage. Il fut cependant distrait par le retour de Camille. Le jeune homme semblait incroyablement pâle et Aord comprit qu’il allait avoir besoin d’un soutien. Il continuerait sa tâche plus tard. Il se leva de son poste et s’approcha de Camille pour lui offrir un appui en cas de besoin. Il plongea son regard bienveillant dans celui du jeune homme.

    Vous vous sentez mieux ? La première fois qu’on fait face à la mort est toujours difficile. Nous devrions peut-être aller nous asseoir en bas. Je n’aime pas rester dans cette pièce.

    Il entraîna le jeune homme un peu par la force dans les escaliers. Il l’aida au besoin à descendre les marches, car celui-ci semblait si faible. Il le fit s’asseoir avant de sonner la cloche qu’il l’avait vu sonner la veille pour appeler un serviteur. Il lui demanda d’aller chercher de quoi revigorer son maître, une tisane ou du thé, peu importe, et d’aller chercher l’intendant Arthas. Le serviteur sembla chercher l’approbation de son maître qui la lui donnerait s’il avait envie.

    Peu importe ce qu’il déciderait, Aord le rejoignit et s’assit à ses côtés. Il posa sa main sur le bras du jeune homme pour attirer son attention et lui parla d’une voix déterminée.

    Écoutez Camille. Ce qu’il y a là-haut est une horreur sans nom. Il va falloir décider de ce que vous allez en faire. Pendant, votre absence, j’ai entrepris de traduire le code à l’aide des indices laissez dans les rouleaux, mais je pense qu’il reste encore beaucoup de travail. Le contenu de cet ouvrage n’est pas un sujet qu’on aborde au repas. Malgré tout le dégoût que j’ai pour sa fabrication, je ne peux que me demander si son contenu est aussi affreux que les pages sur lesquels il est écrit. Il faut que vous décidiez ce que vous voulez en faire. Voulez-vous continuer l’œuvre de votre oncle ou faire disparaître ce texte dans l’ignorance ?
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    Re: Coeur d'encre
    Ven 19 Fév 2021 - 7:25 #
    « Écoutez Camille. Ce qu’il y a là-haut est une horreur sans nom. Il va falloir décider de ce que vous allez en faire. Pendant, votre absence, j’ai entrepris de traduire le code à l’aide des indices laissés dans les rouleaux, mais je pense qu’il reste encore beaucoup de travail. Le contenu de cet ouvrage n’est pas un sujet qu’on aborde au repas. Malgré tout le dégoût que j’ai pour sa fabrication, je ne peux que me demander si son contenu est aussi affreux que les pages sur lesquels il est écrit. Il faut que vous décidiez ce que vous voulez en faire. Voulez-vous continuer l’œuvre de votre oncle ou faire disparaître ce texte dans l’ignorance ? »

    D’une pâleur de mort, le terme convenait à merveille non ? Camille regarda le Frère. Il avait avant de prendre la fuite, remis soigneusement le livre et les rouleaux dans leur coffre et fermé celui-ci au moyen de sa serrure à combinaison.

    « S’il ne tenait qu’à moi, je brûlerais ce livre, les rouleaux qui l’accompagnent et le coffret qui le contient… Mais je vais vous dire avant ce que j’en sais, soit fort peu de choses. Mon oncle je vous l’ai peut-être dit était très malade, une étrange maladie à vrai dire qui divisait et déstabilisait la plupart des médecins qui se sont penchés sur son cas… Il nous a fait mander, mes parents, mes oncle et tante, et toute la famille qui lui restait lorsqu’il a pensé sa fin proche. Ce voyage a été pour tous le dernier… A l’exception d’un jeune cousin qu’on n’a jamais pu retrouver, je suis le seul à avoir survécu. Adalbert en a été bien sûr très affecté et son état de santé s’en est trouvé d’autant plus fragilisé.

    Il m’a montré cet ouvrage environ six mois après m’avoir recueilli, je pense que s’il l’avait pu, il aurait différé mais il était de moins en moins parmi nous, en proie à des faiblesses physiques mais surtout à des délires cauchemardesques et à des terreurs sans nom… Je vous laisse imaginer l’effet qu’a eu cet ouvrage sur un garçon de quinze ans, rescapé d’une tuerie après laquelle il a trouvé une douzaine de personnes, dont ses parents et ses proches, baignant dans leur sang…

    J’ai quitté la pièce en hurlant et j’ai vomi deux heures durant, en sueur, pris d’une peur atroce. Mon grand-oncle a refermé le livre et ne me l’a plus montré, mais il m’en a parlé « parce qu’il le fallait absolument, sinon je t’épargnerais ça crois-le bien ».

    Ce qu’il m’a dit tient en peu de mots :
    - Ne jamais séparer le livre des rouleaux,
    - Ne pas tenter de le conserver plus de quelques heures hors du coffret,
    - Ne pas essayer de le détruire,
    - Trouver un « gardien » qui accepte de veiller dessus, même si « veiller » ne signifie que l’écarter de la vue des autres…

    Je ne sais sur cette chose que cela. Et ce qu’Arthas m’a dit par la suite… Adalbert semblait croire le livre responsable de la mort de tous ceux de son sang, prématurément… Il est vrai que l’ayant ramené, il a vu son père, son frère ainé, sa sœur, ses deux nièces et leurs époux décéder de causes diverses, tous très jeunes… C’est comme cela que le domaine de Hvit que je tiens de mon père est revenu à la famille de ma mère, puisque j’étais l’unique héritier des deux. Et je pense que c’est pour cela qu’Arthas veut me marier jeune, à tout prix.

    Arthas m’a aussi dit que cet ouvrage, et plus tard le miroir que nous vous avons montré, pas celui qui vous a valu de vous laver mais celui qui paraît-il vous avertit de votre mort prochaine ont été tout deux rapportés d’une espèce de temple en ruine à l’est de La Forteresse.

    Adalbert y était retourné semble-t-il pour trouver des indices… Sur quoi je l’ignore et Arthas également à moins qu’il ne veuille pas en parler. Je pense qu’Arthas a dû être pressenti comme « gardien » car il a manifestement feuilleté l’ouvrage et refuse désormais d’en entendre parler. C’est probablement son refus qui me doit d’être -avec vous maintenant- le seul à en connaître l’existence.
    »

    Il eut un pauvre sourire,

    « Je ne suis ni superstitieux ni crédule. La nécromancie ne m’intéresse en rien et je trouve que ceux qui s’y adonnent devraient être sévèrement punis. Notre famille a toujours respecté la vie comme la mort et accepté cette dernière comme une chose naturelle qui participe au cycle de la première.

    Mais mon grand-oncle n’avait rien non plus d’un exalté… S’il a insisté sur ces quatre points, c’est qu’il avait une raison que je n’ai pas eu le temps d’apprendre. J’ignore quelles conséquences aurait la destruction de cette abomination mais ne suis pas prêt à en faire prendre le risque à ceux qui m’entourent.

    Adalbert est mort en délirant, il discourait avec mon père et mon oncle à ce que nous avons pu comprendre, leur demandant pardon de les avoir mêlés à cette « tragédie », rien n’était clair dans ce qu’il disait, mais à plusieurs reprises il a parlé de portails à prendre et à fermer… Il ajoutait aussi : ils ont échoué les dieux en soient loués

    Vous en savez désormais autant que moi, si en tant que Frère de Lucy vous pensez qu’il se trompait et que l’on peut faire disparaître cette horreur, j’y mettrai le feu moi-même
    »

    Il regarda le prêtre, attendant sa décision.
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    Re: Coeur d'encre
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