LE DESERT VOLANT - Escouade 5

L’écœurant bruit de succion de la plante carnivore est ponctué par le son d’une épée qu’on abat avec force, lui-même suivi par un disgracieux juron du nécrophile barbu. Primus n’a pas besoin de se retourner pour comprendre qu’il a achevé la bête agonisante. Le mastodonte passe donc dans la catégorie des cadavres. Primus à a peine le temps de songer que cet état pourrait être moins définitif qu’à l’accoutumée en présence du frère de Lucie que déjà, un nouveau danger surgit à l’horizon.

Des croassements se font entendre, et les trois compagnons peuvent constater, médusés, qu’une nuée noirâtre se rapproche d’eux à toute vitesse. Des corbeaux. Mais des corbeaux de taille bien supérieure à ceux que l’on peut voir habituellement. Dès qu’ils fondent vers eux, Primus, une nouvelle fois, se jette au sol, le visage rentré au creux de ses bras dans une vaine tentative de protection.

Vaine, tant par sa probable inefficacité que son manque de mise à l’épreuve : il semble que les funestes volatiles aient concentrés tous leurs efforts sur le garde royal. En effet quand l’aristocrate relève la tête il aperçoit à peine un vif tourbillon de plume, puis plus rien. S’il ne n’avait pas vu, quelques instants auparavant, il aurait presque pu jurer que tout ça n’était qu’un mirage et qu’ils n’avaient jamais été que deux. Le soldat a disparu sans laisser aucune trace.

Le moine a beau s’époumoner, cela ne changera rien. Cette île maudite finira par tous les emporter, c’est certain. Ce qui est moins sûr c’est dans quel ordre ? De toute façon, Primus ne saurait dire s’il préfèrerait être neutralisé dès maintient pour abréger ce calvaire où s’il préfère survivre le plus longtemps possible mais risquant de se trouver seul en pleins désert… Aucune des deux perspectives n’est bien réjouissante.

« Ne pas paniquer, ne pas paniquer, surtout, NE PAS PANIQUER ! » s’admoneste-t-il intérieurement. Ce n’est pas le moment de craquer.  Il se relève en s’époussetant… ça devient une habitude. Quand le nécrophile barbu lui propose de rejoindre le campement, Primus retient une réplique acerbe. Si seulement c’était si simple. C’est bien ce qu’ils essaient de faire depuis le début... « Ne pas paniquer, et ne pas se mettre à dos son seul et unique compagnon » ajoute-t-il mentalement. Le désert va surement finir par les achever tous les deux, mais inutile de lui faciliter la tâche en se disputant au lieu de chercher à s’en sortir.

De plus fidèle de Lucie ne semble pas en mener large. La peur se lit sur son visage. De son côté, le faciès de Primus, rougi par l’effort et la chaleur il n’y a pas si longtemps, arbore probablement une teinte oscillant entre le blanchâtre et le verdâtre à présent. S’ils ne se serrent pas les coudes, autant ramasser la plante violacée et la glisser dans son pantalon maintenant pour en finir plus vite !  

D’une voix loin d’être aussi assurée qu’à l’accoutumée, Primus répond en désignant le sable derrière lui :

- Oui, on aurait dit une trappe qu’on referme. Ce qui me parait, au mieux, totalement fantaisiste. Mais vu ce que nous avons enduré jusqu’à présent…

Les deux rescapés ne tardent pas à repérer des traces rouges au sol, qui mènent à ce qui ressemble effectivement à une trappe. Des traces de sang si Primus en croit ses yeux… mais une fois de plus cela lui semble complètement incongrue.

- Attendez un instant , lance-t-il à son dernier camarade alors que celui-ci fait mine de s’approcher de la trappe. Primus ferme les yeux et fait appel à sa magie. Il prend une inspiration un peu brusque mais parvient à ne pas gémir lorsque la métamorphose s’opère avec une douleur familière.

Au bout d’un peu plus d’une minute, lorsque la peine reflue et qu’il sent ses glandes à venin commencer à s’activer, il entrouvre ses lèvres et laisse sa langue bifide, bien plus efficace que son nez humain, gouter l’air ambiant. En revanche, il se garde bien d’ouvrir ses yeux. Vu la luminosité, il serait bien incapable de distinguer quoique ce soit.

Il laisse son sens olfactif prendre le dessus. Le sable, les cadavres, sa sueur et celle du Nécrophile barbu… Désormais tout son environnement se traduit en odeur. Il s’accroupi pour se rapprocher des traces de sang et darde une nouvelle fois sa langue de serpent.

- C’est bien du sang, et du sang humain qui plus est…

Primus avance, tâtonnant jusqu’à la mystérieuse trappe. Le moine le suit, silencieux pour le moment. Précautionneusement, il saisit les bords et commence par soulever légèrement la plaque de pierre qui n’est pas trop lourde. De nouvelles odeurs se manifestent. Le renfermé… Le sang… Comme rien ne semble se déclencher il ouvre complètement cette fois et se tourne vers le moine, ses yeux toujours clos :

- Si je me fie à mon odorat, le sang vient de là. Vous pouvez me dire ce que vous voyez ? Je peux sentir, mais il y a trop lumière pour mes yeux.

Le nécrophile Barbu hésite un instant, surement pour se faire une idée avant de lui répondre qu’il se tient devant un trou qui conduit à ce qui ressemble à des souterrains. D’où l’odeur de renfermé surement. Il ajoute que les traces de sang continuent.

- Je vais passer devant, sinon votre odeur risque de masquer les autres… Mais je veux bien que vous vous teniez sur vos gardes, mes compétences d’escrimeurs risquent fort de se révéler… d’une efficacité limitée, si nous rencontrons d’autres créatures comme celles que nous avons croisées jusqu’ici…

Avant d’avoir le temps de changer d’avis, Primus s’avance, sans se précipiter, dans qui semble être une sorte de souterrain si les indications de son compagnon sont justes. Le moine le suit de près et dégaine son épée. Effectivement au bout de quelques pas, il ne sent plus la brulure des rayons de l’âtre solaire et il s’autorise donc à ouvrir les yeux…

LE DESERT VOLANT - Escouade 5

Ignorant résolument les protestations de son compagnon d’infortune, Primus laisse ses yeux s’acclimater au sombre boyau dans lequel ils se trouvent. Alors qu’auparavant, c’est l’intensité du soleil qui l’aurait surement aveuglé, cette fois, c’est à l’inverse l’absence  de luminosité qui impacte sa vision.

L’odeur de sang est toujours aussi présente et semble même se renforcer… Mais il doute qu’il s’agisse de celui de Cynan. Ils n’ont pas pu voir grand-chose lorsque les corbeaux ont ait leurs petit numéro, mais il serait tout de même très improbable qu’ils aient emmenés le garde royal dans un souterrain aussi proche. Improbable mais pas impossible. Après tout, le Désert a déjà prouvé qu’ici, rien n’est impossible, pour le plus grand malheur de Primus.

Derrière lui, le barbu proteste encore. Bien qu’il ne soit pas tout à fait dans le faux, Primus ne fait pas demi-tour pour autant, et marmonne dans sa barbe inexistante :

- Franchement, pour ce que ça nous a réussi jusque-là. Autant essayer de marcher vers notre fin sans cuire en plein cagnard.

Finalement, il entend le nécrophile de Lucie qui finit par le rejoindre, discrètement.  Ils avancent prudemment, en faisant le moins de bruit possible. Toutefois, à part eux, le tunnel est totalement silencieux… Si quelque chose les attend dans un recoin du souterrain, Primus craint que toutes leurs précautions soient bien vaines, et qu’on les entende toute même arriver.

A part le sang, aucune senteur ne ressort, si ce n’est sa propre odeur et celle du moine. Néanmoins l’effluve sanguine semble se faire de plus en plus forte. Sa langue bifide goute une énième fois l’air sec de la grotte dans laquelle ils évoluent. Le fort arrière-goût métallique qui s’accroche à son palais ne laisse plus aucun doute, il s’agit de sang frais. Primus s’apprête à alerter le religieux mais un son rauque suivi d’une quinte de toux le coupe dans son élan. A priori plus besoin de prévenir le moine, il est évident qu’ils ne sont pas seuls dans ce souterrain.

Le nécrophile barbu, qui, il y a moins de cinq minutes, ne demandait qu’à ignorer la trappe et poursuivre dans le désert; décide de prendre les devants et lui intime d’un murmure, de prendre la fuite si les choses tournaient mal… Comme si Primus avait la moindre chance de survivre seul, sans l’aide du moine songe-t-il anxieux.

Néanmoins il acquiesce silencieusement, ignorant si son camarade peut vraiment distinguer le mouvement. Il répond, en chuchotant :

- Très bien mais faites attention à vous, j’aimerais autant ne pas me retrouver seul survivant de cette exploration si ça ne vous dérange pas.

Dans leurs circonstances actuelles, Primus ne peux pas faire plus chaleureux…

Toujours aussi discrètement que possible, il s’arrête et laisse l’autre lui passer devant. A main sur sa rapière, il s’engage à la suite du moine, laissant tout de même un bon mètre entre eux pour lui permettre de reculer en cas de besoin.

LE DESERT VOLANT - Escouade 5

C’est bien le moment de se montrer sarcastique, songe Primus lorsque qu’il sent son compagnon lui passer devant pour s’approcher de l’être qui pousse ces inquiétants gémissements.

Il sort sa rapière, conformément aux instructions du nécrophile mais demeure dubitatif quand il aperçoit la forme sanguinolente et gémissante gisant au sol. Primus se demande si l’inconnu ne rentrera pas bientôt dans l’une des catégories de cadavres qu’il avait établi intérieurement lors de leur rencontre avec le mastodonte cornu.

Il n’y voit toujours pas grand-chose, mais l’odeur de sang est assez forte pour lui indiquer que l’homme n’est pas en grande forme. Est-il mourant ? Si non, que vont-ils bien pouvoir en faire ? Le trainer avec eux ? Ils ne survivraient pas cinq minutes dans le désert s’ils devaient se trimballer un éclopé. Pas sûr que le moine et lui aient survécus cinq minutes de plus dans cette fournaise dans tous les cas.    

L’ecclésiastique est tout proche du blessé maintenant, et tente de le rassurer. Primus n’a qu’une confiance très limitée en ses propres capacités à rassurer une tierce personne en ce moment. De plus il est toujours à moitié serpent. L’homme à l’air de délirer assez comme ça sans en rajouter. S’il voit sa langue de reptile il risque fort de se croire entrain de rêver… ou pire.  

Primus hésite, les avantages de sa conditions pourraient encore être nécessaire… toutefois à part l’odeur du sang il ne sent rien de particulier alors autant récupérer sa vue et ne pas effrayer le blessé encore plus.

Pour s’occuper pendant que son corps redevient normal et pour faire passer la douleur, il fouille dans son sac en bandoulière. Le moine est toujours auprès du blessé qui prétend que tout ici est mirage, eux inclus. Primus aurait bien aimé que les corbeaux n’aient été qu’un mirage…

Lorsqu’il trouve enfin ce qu’il voulait, il s’approche et tapote discrètement l’épaule du nécrophile et lui tend sa gourde sans fond. A priori boire de l’eau ne pourra pas faire de mal à leur nouveau camarade.

En revanche, Primus se garde bien d’ouvrir la bouche… Il trop peur de gâcher les efforts entrepris par le moine pour ça.

LE DESERT VOLANT - Escouade 5

Aucune émotion ne filtre sur le visage de Primus alors qu’il écoute avec attention et appréhension les paroles saccadées du blessé. Inutile de montrer au pauvre homme à quel point ses révélations sonnent comme une sentence fatale à ses oreilles.

Ce n’était pas surprenant, mais apprendre que les autres équipes avaient probablement souffert autant qu’eux, si ce n’est plus n’était guère réjouissant. Depuis le début de cette aventure, Primus avait la désagréable impression que sa dernière heure approchait de plus en plus vite.

Rick, puisque c’était son nom, paraissait bien mal en point. Il rejoindrait surement bientôt la catégorie des cadavres, une catégorie dans laquelle l’aristocrate avait rangé bien trop d’êtres depuis qu’il était sur cette île de malheur !

Dubitatif, il jette un regard en coin au nécrophile barbu lorsqu’il évoque la miséricorde de la déesse. Honnêtement, Primus aurait bien deux ou trois mots à lui dire à celle-là. Mais ce n’est pas le moment, et les paroles de l’ecclésiastique semblent faire effet puisque Rick poursuit son discours saccadé. De plus en plus saccadé d’ailleurs… En voilà un qui ne va pas tarder à la rejoindre, cette fameuse déesse.

Sans surprises, les compagnons du futur-cadavre, semblent tous morts. Narta ? Kirk ? A cet instant, Primus regrette vraiment de ne pas s’être plus intéressé aux autres personnes qui viendraient sur l’Ile, car ces noms ne lui disent rien du tout.

Mais quand Rick mentionne la présence d’une bête, le sang de Primus se glace, et contrairement à ce qu’on pourrait imaginer vu les températures auxquelles il a été confronté, cela reste fort déplaisant. Encore une créature monstrueuse sortie du pire des cauchemars, et décidée à les mettre en pièce ? Non, il refuse d’envisager une nouvelle lutte à mort, ils ont déjà trop perdu.

Il se frotte le visage et tente de se recoiffer, dans une vaine tentative de se montrer sous un jour présentable et rassurant, puis s’accroupi auprès de Rick et s’adresse à lui avec la voix la plus douce possible :

- Rick, Rick, écoutez- nous, il n’y a plus de bête vous ne risquez plus rien. Nos gardes, l’ont terrassée..

Des mensonges il en a dit beaucoup, mais celui-ci est surement l’un des plus gros qu’il ait jamais raconté ! Cependant pour le moment il faut que leur futur cadavre reste calme et cesse de s’agiter.

- Il faut que vous vous concentriez, c’est important. Vous avez dit que vous étiez quatre, n’est-ce pas ? Alors où est votre quatrième compagnon ? Nous pouvons peut-être l’aider.  Rick, restez avec nous, dites-nous comment rejoindre le campement du capitaine, nous pourront vous ramener de l’aide et des soins !

Nouveau mensonge… Primus n’est pas spécialiste, mais il doute que Rick survive assez longtemps pour recevoir le moindre soin…

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Primus entend Aord saisir et examiner la sacoche mais il en distingue à peine le contenu. Il est encore en train de prier pour que quelque chose d’utile s’y trouve quand un claquement retentit derrière eux et le fait se retourner brusquement, plissant ses yeux, comme si ça pouvait l’aider à percer l’obscurité.

Encore une créature sanguinaire qui vient leur régler leur compte ? S’il obtenait un cristal pour chaque nouvelle découverte macabre, il aurait surement de quoi faire tripler sa fortune !

Les options possibles ne sont pas longues à passer en revue. Ils peuvent affronter le danger ou fuir vers l’inconnu… qui peut également être un danger. D’ailleurs, vu leurs précédentes expériences, c’est plutôt l’absence de risques létal qui serait étonnante.

Et que faire de Rick ? Le laisser à la merci de la chose qui s’approche semble trop cruel, même pour Primus. Mais le simple fait de déplacer pourrait lui faire trouver la mort avant même qu’ils  n’aient pu tenter de s’échapper…

De toute façon, le nécrophile barbu prend les devants et, sous les supplications du blessé, le relève pour l’emmener avec eux. Il invective Primus au passage, pour le faire réagir plus vite.

L’aristocrate sort de ses pensées paniquées, attrape l’autre bras de Rick, le passe autour de ses épaules, et se glisse tant bien que mal à ses côtés pour le porter. Il espère ne pas aggraver les blessures du pauvre homme, mais  immédiatement, il sent le fluide carmin dont l’odeur était si forte lorsqu’il était reptile, imbiber ses propres vêtements… Le sang semble encore chaud ou alors est-ce sa propre perception des températures qui est perturbée par les sueurs froides provoquées par le sinistre claquement ? Quoiqu’il en soit, Primus ne voit pas comment ils vont réussir à survivre tous les trois. De toute façon il ne voit rien du tout dans ce tunnel noirâtre.

- Je le tiens, allons-y ! Mais je crains qu’on ne puisse pas aller bien loin…

Et Primus se relève péniblement, puis avance. D’une main il maintient, avec une efficacité toute relative, Rick et de l’autre il tâtonne devant lui, à la recherche d’une issue à cette situation qui ne cesse de se dégrader.

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Si leur situation n’était pas aussi critique, Primus ferait certainement remarquer à ce brave Rick qu’il est loin d’être un poids plume. En à peine quelques pas, l’aristocrate s’essouffle  et se retrouve haletant. Il faut dire qu’il n’a jamais été bien porté sur les travaux physiques.

Malheureusement, à peine quelques instants après que leur fuite désespérée ait commencé, le blessé s’évanouit, probablement incapable d’en supporter d’avantage. Enfin, Primus espère qu’il s’est simplement évanouit et qu’il n’est pas en train de leur mourir sur les bras.

Quoique cela ne fera peut pas une grande différence, car inexorablement le claquement se rapproche, avec une régularité pressante, angoissante. Ils ignorent de qui ou quoi peut venir ce son, mais ça ne peut pas être une bonne chose !

Primus à l’impression qu’ils se trainent avec Rick de cette façon depuis des heures mais la course poursuite pourrait n’avoir durée que quelques minutes. Avec cette l’obscurité, l’aristocrate n’a plus aucun repère temporel et n’arrive pas à savoir depuis combien de temps ils fuient ainsi. Toutefois s’il en croit des muscles endoloris, cela fait au minimum trois ans qu’il ne s’est pas reposé convenablement !

Puis enfin comme un miracle, une lueur apparait au bout du tunnel, ils vont pouvoir bientôt sortir de cet enfer ! Sauf si le claquement les rattrape d’abord, ce qui ne saurait tarder.

-  Si vous avez une brillante idée, c’est maintenant ou ja… MMmphf !

Primus s’interrompt au milieu de sa phrase, et gémit en manquant de trébucher dans l’ombre, alors que Rick semble subitement prendre plusieurs dizaines de kilos d’un coup. Le nécrophile barbu vient de lancer quelque chose derrière eux, lâchant un peu le blessé, d’où sa surcharge pondérale soudaine.

Mais Primus n’a pas le temps de reprendre son souffle pour s’enquérir de ce qu’il se passe que l’ecclésiastique a déjà repris la fuite.

Préférant lui faire confiance plutôt de gaspiller son souffle en vaines questions, Il se concentre sur le chemin qu’il leur reste à parcourir. Impossible de savoir à quelle distance se trouve la sortie, mais la simple visualisation de cette dernière suffit à booster le noble qui redouble d’effort pour arriver au bout du tunnel, puisant dans ses dernières forces.    

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Il ignore ce que l’ecclésiastique a jeté  mais cela n’aura pas eu grand effet. Une fois de plus, ils buttent dans le sombre tunnel, et Rick se met à hurler de douleur. Et c’est là que toute l’horreur de la situation laisse Primus muet de stupeur et de terreur.

C’est un ver, immense, visqueux et répugnant qui les poursuit. L’obscurité du tunnel ne permet pas de tout distinguer de cette nouvelle monstruosité, mais Primus en voit assez pour se retrouver figé, comme si tout se passait au ralenti. Rick arraché à leurs bras et entrainé dans les ténèbres, les jurons du nécrophile barbu et leur course, bien plus rapide désormais, jusqu’à la lumière salvatrice.

Rien de tout cela n’est réel, tout se passe comme dans un rêve. Enfin un cauchemar plutôt. Un affreux cauchemar qui n’en finit plus d’empirer et dont il est impossible de se réveiller.

Les remontrances de son compagnon d’infortunes ne le font pas réagir. Ce n’est que lorsqu’il se remet en marche que Primus sort de sa stupeur et avise le lieu où ils se trouvent désormais.

Une immense caverne dont le haut semble parsemé de cristaux, d’où la lumière qui les a guidé jusqu’ici. Un lac à la flore étonnement similaire à ce qu’on trouve dans le royaume, et plus loin ce qui ressemble à des maisonnettes.

Primus ferme les yeux un instant, tentant de chasser de son esprit les cris et les images de Rick, engloutis par un ver géant. Lorsqu’il les rouvre, il réalise que des larmes coulent sur son visage… Si ça continue, il va finir par craquer et par perdre la raison avant d’avoir été achevé par une des créatures de malheur qui peuplent cet endroit. D’ailleurs en parlant de créatures, malgré les nombreuses plantes qui ornant l’endroit, il ne voit pas un animal.

Le noble, sous le choc, sort sa gourde d’une main tremblotante et avale goulument plusieurs gorgées d’eau avant de suivre le moine, et de déclarer, avec une voix dont il ne parvient pas à cacher le chevrotement :

-  Il y avait une trappe ! Une trappe ! Comment vouliez-vous que j’imagine autre chose que des humains pour l’avoir installée là ? Je ne pouvais pas prévoir un vers géant !  

Il continue alors qu’il rejoint Aord :

-  Vous apprenez quelque chose dans le carnet ? Parce qu’en attendant cet endroit ne m’inspire pas confiance… enfin comme tous les endroits de cette île jusqu’à présent. Mais je veux dire que la présence de plantes normales, a priori, mais l’absence des animaux qui vont avec me parait au mieux suspecte…

Et au pire, franchement inquiétante. Mais il est tellement inquiet depuis le début de cette aventure qu’il ne se rappelle même plus ce qu’on ressent lorsque l’on n’est pas sur le point de voire une immonde bête féroce, prête à vous réduire en bouillie pour bébé risun,  surgir de nul part à tout instant.