Les doigts qu’il glissa sur les siens la surprirent au moins tout autant que lui . Queen sourit à sa remarque, il n’était pas dans le faux mais pas tout à fait dans le vrai non plus. Elle avait parfaitement conscience de ne pas être quelqu’un de facile à vivre et se faisait un plaisir de malmener les gens qui ne lui semblaient pas à sa hauteur ou qui osait lui faire des affronts. Et le plus agaçant dans tout ça c’est sans doute qu’elle possédait un répondant extraordinaire. Pour beaucoup les joutes verbales étaient un véritable tour de force, pour elle, cela était un jeu. Un jeu des plus amusant qu’elle remportait bien souvent avec facilité. Ce qui ne plaisait qu’à peu de gens. Cependant, Keith ne pouvait pas savoir ce genre de chose, il avait eut la chance de trouver les bons mots et ainsi approcher la jeune femme de la meilleure des façon, aussi il n’avait pas eut a subir la partie la plus exécrable de son caractère.  
 
Un nouveau compliment et elle relâchait son bras pour récupérer le verre qu’elle avait délaissée jusque là, avalant une nouvelle gorgée au passage. L’alcool commençait doucement à faire son effet et elle pouvait déjà se sentir beaucoup plus détendu. C’était peut-être là la seule raison de son calme et de sa grande loquacité. Ce n’était pas pour lui déplaire. Elle était pour une fois en très bonne compagnie et ne se sentait pas obligée de revêtir son masque hautain pour être en paix. Quand il eut terminé de parler, elle leva son verre dans sa direction et trinqua.

- Alors, a l’opportunisme ! Et au moment où leur verres s’entrechoquèrent, un éclair zébra le ciel, le coup de tonnerre vibrant dans l’air. Pas dérangée le moins du monde par ce genre de petite surprise, elle poursuivit. - Ils ont peut-être de qui tenir c’est certain ! Mais je crois que je pourrais en dire de même des votre, vous ne croyez pas ? La jeune femme se leva ensuite de la margelle. - Je vous accuserais volontiers si vous ne m’étiez pas aussi sympathique. Doucement elle se mit a rire. Rire qui fut bien vite stoppé par une goutte qui tomba doucement dans son verre avec un petit « plop ». Elle le releva devant son nez l’air perplexe puis leva les yeux vers le ciel.

- Mon cher Keith je crois que nous allons avoir un… Et avant qu’elle ait pu terminer sa phrase un deuxième éclair vint  déchirer le ciel et une pluie torrentielle se mit à tomber. - Problème. Finit-elle tout en affichant une moue des plus désespérées, plaquant ses cheveux contre son crâne.  

Si ça n’avait tenu qu’à elle, la jeune femme aurait sans doute piquer une petite crise d’hystérie. Pourquoi donc fallait-il qu’une pluie pareille se fasse un plaisir de déranger cette soirée. Quelques petites gouttes n’auraient-elles pas suffit ? Non. Cela aurait sans doute été bien trop simple, il valait mieux une bonne tempête comme l’on n’en faisait plus. Alors que l’eau continuait de battre sur son visage, Queen se mit à maudire sa déesse. Parfois elle se demandait encore comment elle pouvait garder la foi après toutes les choses improbables qu’elle avait vécu au cours de sa jeune existence. L’ambition et l’espoir était sans doute les deux moteurs principaux de sa foi. Elle se disait qu’à chaque obstacle surmonté, cela la rapprochait un peu plus de ce but qu’avait fixée Lucy pour elle. Mais elle devait bien l’avouer, cette dernière était diablement farceuse où elle ne s’y connaissait pas. Enfin, toujours était-il qu’elle se retrouvait une fois de plus dans une situation des plus incongrue et improbable. Fort heureusement, son compagnon d’infortune ne semblait pas s’être laissé prendre de cours par la situation et lui indiquait déjà un endroit où s’abriter.

- Bien ! Dit-elle d’une voix forte et tout en lui emboîtant le pas. Pendant quelques instants elle hésita à prendre son bras afin de se guider plus aisément, lui qui semblait ne pas avoir de mal avec la pénombre mais elle se ravisa bien avant d’esquisser le moindre mouvement. Même si elle passait actuellement un très bon moment avec lui, elle avait pleinement conscience qu’ils n’étaient rien l’un pour l’autre et entrer en contact plus qu’elle ne l’avait déjà fait pourrait être interprété de la mauvaise façon que cela soit comme un signe de séduction ou de faiblesse. Et à son goût, elle s’était déjà un peu trop facilement ouverte à cet homme. Aussi elle préféra se diriger grâce à sa silhouette, qui, bien que grisée par les giboulées était tout de même visible. Encore une fois, elle effectua le chemin avec brio et ne trébucha pas une seule fois. Une bonne chose de faite.

Ses sourcils se froncèrent une fois qu’elle fut à l’abri. Sa robe à défaut d’avoir perdu forme à cause de l’averse, était aussi lourde qu’un âne mort et Queen devait bien avouer qu’elle s’en serait volontiers débarrassée. Elle étudia du regard les brocards de soie et pinça les lèvres en voyant qu’ils étaient froissés et que cela lui coûterait sans doute une petite fortune. De plus même son corset semblait ne pas avoir apprécié l’instant puisque lui aussi s’était mis à peser un poids considérable sur les hanches de la jeune femme. Il ne manquait plus qu’il décide de se détendre et ce serait la cerise sur le gâteau. La trésorière n’accorda à nouveau son attention a Keith que lorsqu’elle entendit sa voix, relevant la tête l’air surpris, comme si elle découvrait sa présence pour la première fois. Un long moment, ses lèvres restèrent close.

La coutume voulait qu’une Queen Milan frustrée fasse trembler les foules. Pourtant Keith, lui, arborait un sourire calme et serein. Elle n’en avait aucunement l’habitude et se contenta de poser sur lui son regard de soie, détaillant ses traits, reprenant peu à peu contenance. Lorsque enfin l’information parvint à son cerveau, elle se redressa et passa une main dans ses cheveux pour les décoller de son front.

- Une surprise ? Croyez vous donc que je cache un parapluie sous ses kilomètres de tissus ? Railla-t-elle mi amusée, mi en colère. Maintenant qu’elle y réfléchissait, elle aurait sans doute pu utiliser son pouvoir afin de leur faire un abris, un abris qui n’aurait certainement pas duré longtemps mais qui aurait sans doute pu leur éviter tout ces dégâts. Enfin, le mal était fait et sa robe été fichu par sa propre faute. Pour une fois qu’elle supportait la présence de quelqu’un, elle n’allait tout de même pas s’acharner sur lui. Sans compter qu’il était sans doute l’un des plus gros poissons de la soirée sans même le savoir. Une potentielle amitié à ne pas gâcher en somme. - Hum… Ils manquent tout de même cruellement de volume vous ne croyez pas ? Dit-elle tout en tirant doucement sur une des mèches qui ne cessaient de revenir se coller à son front. - Sans parler du fait qu’ils vont bientôt se mettre à boucler et ce que vous avez vu tout a l’heure n’étaient qu’une infime partie de leur capacité. Ajouta-t-elle tout en ronchonnant en même temps, incapable de cacher son amertume.

A son tour, elle posa les yeux sur son verre. A l’instar de celui du jeune Veriano, il s’était rempli d’une quantité d’eau considérable. Aussi elle l’imita bien vite et le vida sur les pavés en face d’eux qui continuait d’être battu par la pluie.

- Je crois que nous allons être coincé ici un moment.  

Queen lui lança un regard noir. Ca ne l’amusait pas. Elle pouvait déjà sentir le poids de ses cheveux s’amenuiser et ses boucles prendre forme à mesure qu’ils étaient entrain de sécher. Bientôt son visage ne serait plus qu’un ovale sous une masse informe d’anglaises en bataille. Néanmoins elle ne pipa mots, ce n’était pas après tout ces temps de politesse qu’elle allait se laisser aller. Elle aurait pu lui répondre et d’ailleurs elle faillit le faire jusqu’à ce que son attention soit attirée par les mains du jeune homme. Bien qu’elle ne puisse voir exactement de quoi il retournait, elle avait également entendu le bruit que cela avait produit et le silence de son vis-à-vis.

La seconde suivante une petite flammèche dansait devant ses yeux. Elle détourna le regard. Depuis sa mauvaise expérience dans la tour, elle avait un mal fou avec tout ce qui s’approchait de près ou de loin du feu. Bien sur, elle n’en avait pas aussi peur que d’un Kerberus Alpha en chair et en os  mais cela avait le don de la mettre mal à l’aise. Elle était aussi presque convaincu qu’elle serait bien incapable d’allumer un feu elle-même dorénavant. Faisant un pas en arrière, la blonde fit mine de vouloir le laisser passer afin de s’éloigner de lui et de cette maudite invention qu’était le feu.

Un petit son d’écrou rouillé et enfin de la luminosité. La jeune Milan cligna des yeux plusieurs fois. La lumière n’était certes pas très forte mais ses yeux s’étaient tellement bien accoutumés à la pénombre que ce peu d’éclairage créait un inconfort pour ses yeux clairs. Elle les frotta alors avant de les ouvrir à nouveau, observant enfin les traits du visage du Veriano. L’avantage c’est qu’elle pouvait constater que lui non plus n’avait pas échapper à la pluie et elle prit un plaisir coupable à jubiler. Elle pouvait bien se le permettre après sa petite taquinerie un peu plus tôt.

Toujours silencieuse, elle le regarda quitter sa veste sans esquisser le moindre mouvement, pensant que cela ne ferait pas de mal si elle en faisait de même. Ne serais-ce que pour la première couche de vêtement. C’était là l’un des principaux inconvénient à être une femme, même sans se mettre complètement à nu, retirer une simple épaisseur pouvait être mal perçu. Le regard auburn qui se posa sur elle la tira finalement de ses rêveries et elle lui accorda son attention au moment même où il se mit à parler.

Il disait vrai. Ils n’étaient certes pas dans la meilleure des situations mais dans leur malheur, ils avaient de la chance. Principalement parce qu’ils étaient tout deux d’accord sur le fait que la compagnie était agréable et qu’en plus de cela ils avaient de quoi boire et s’enivrer encore un peu. Sans compter la lumière qui faisait danser leurs ombres sur les murs en pierres. Vraiment il n’y avait pas franchement de quoi se plaindre. Si l’on était pas un Milan. Queen était habituée à un certain confort et même si elle était du genre à ne pas hésiter à se salir les mains en cas de besoin, elle n’était pas du tout satisfaite de ce qui se passait en l’instant. Elle avait froid, elle était trempée et pour couronner le tout sa coiffure était un véritable désastre. Les seules choses qui lui semblaient être correcte était la bouteille de cognac ainsi que la présence de Keith. Rien de plus.

La suite lui faut hausser les sourcils alors que son regard se soulignait de surprise avant de s’affûter comme une lame de rasoir. Alors comme ça, lui aussi la voyait de cette façon. Ses sourcils se froncèrent, dessinant un petite ride au milieu de son front et sa mâchoire se contracta. Lui aussi était au final comme tous les autres qu’elle côtoyait et dire qu’elle avait eut la stupidité de croire qu’il pourrait voir plus loin que le bout de son nez. Il voulait qu’elle se défoule et qu’elle se laisse aller. Bien. Il allait être servit.

- Ah oui ? Et pourquoi d’ailleurs hein ? Passant les mains dans son dos elle délassa ce qui pouvait s’apparenter à un pourpoint et le retira comme si elle retirait un gilet a l’envers. Se retrouvant maintenant uniquement vêtue de sa jupe noir et rouge ainsi que d’une chemise de soie noire et de son corset. - Bien. Alors je vais me mettre à mon aise, de toute façon comme vous le dites, vous ne m’en tiendrez pas rigueur n’est-ce pas ?Puis elle le contourna à peine pour allait étendre son vêtement là où elle trouva une place. Bien sur elle ne pouvait se permettre d’enlever tout son attirail mais si elle pouvait au moins faire sécher cela ainsi que sa chemise et son corset, ça serait toujours ça de prit.

Ensuite elle se retourna et se planta devant lui. Bien qu’elle soit grande, elle pouvait se rendre compte que lui l’était bien plus mais ce n’était certainement pas quelques choses qui l’empêcherait de lui dire ce qu’elle avait à lui dire. Alors elle tendit la main, attrapa son propre verre et la bouteille de l’autre. - Alors Keith que vous attendiez vous à voir ? Vous vouliez me pousser afin d’être sûr que je suis bien celle que les autres dépeignent ? Elle eut un rictus malfaisant avant de lui tourner le dos. - Mes félicitation cher ami. Vous pourrez vous targuer auprès de vos amis lorsque la pluie aura cessé. Grognant, elle avala une longue et grande gorgée, jusqu’à gonfler ses joues de liquide et terminer presque entièrement son verre. - Moi qui vous pensez moins sot. Alors. Dites moi. Vous m’avez approché pour le challenge ou uniquement pour mon frère ? Puis de nouveau elle se tourna pour lui faire face. Ses yeux n’avaient plus une once d’amusement, ils étaient plutôt un mélange de colère et de déception.  

- Bah voyons… Murmura-t-elle les dents serrées alors que Keith lui assurait qu’il ne lui tiendrait rigueur de rien. Elle savait bien ce que ce genre de propos pouvait cacher dans la majorité des cas. Des rumeurs, des anecdotes et autres petites choses qui lui déplairait sans doute mais qu’en temps normal elle s’amusait elle même à lancer. Sauf que ce cas de figure était différent des autres et qu’elle n’était certainement pas d’humeur à jouer de cette façon ce soir.

Son vis-à-vis eut l’intelligence de la laisser parler sans l’interrompre. Il valait mieux pour lui. Déjà que son humeur s’était drastiquement dégradée, si en plus il avait eut l’outrecuidance de lui couper la parole, il ne faisait aucun doute quant au fait qu’elle l'aurait rabroué comme il se devait. D’ailleurs à mesure qu’elle déblatérait, le visage du jeune homme se faisait de plus en plus sombre alors que ses lèvres à elle s’étiraient en un petit sourire victorieux. Bingo. Se dit-elle tout en pensant avoir enfin découvert ses véritables motivation. Puis se fut son tour à lui de prendre la parole. Malheureusement aucun effet positif notable n’égaya le visage de la trésorière, au contraire, plus il parlait et plus elle avait du mal à empêcher les muscles de son visage de se contracter un à un. Ne comprenait-il donc pas que maintenant qu’elle avait découvert le pot aux roses les compliments n’étaient plus de mise ? Apparemment pas. Et plus il continuait, plus cela la mettait hors d’elle. A la fin, elle du se faire une violence inouïe afin de ne pas lui envoyer une magnifique giclée de sève au visage et quitter les lieux.

Qui croyait-il donc qu’elle était pour croire pareille sottises ? Bien sûr qu’elle était ravissante et que sa famille était incroyable. Elle savait déjà tout ça. Mais cela n’empêchait pas les gens de l’ignorer, la fuir ou au contraire tenter de l’approcher pour des raisons diverses et variés mais jamais dans l’idée de lier une quelconque amitié. Personne ne souhaitait avoir un Milan pour ami, sauf peut-être un fou. Ce que semblait être Keith bien qu’elle ne croyait pas un traître mot de sa longue tirade. Quand il se tut enfin, elle ne chercha pas à relancer la conversation. Queen se contentait d’observer ses traits. Il semblait nerveux et ne lui en déplaise il se mit à éviter son regard et à serrer les points. Elle avait gagné la partie. En plus d’avoir tenté de l’entourlouper, il n’avait pas été bien difficile à contrecarrer. Quelle déception. Puis toujours sous le regard méprisant de la blonde il se détendit.

Son regard rencontra à nouveau celui de la jeune Milan et elle le soutint sans ciller. Contrairement à son dernier discours, sa voix était beaucoup plus douce et presque aussi chaleureuse qu’à leurs premiers échanges. Pourtant elle restait sceptique. Comment diantre comptait-il la convaincre. Queen était une femme têtue de nature mais plus encore lorsqu’elle était en colère. Sa preuve, elle l’espérait pour, devrait être en fer forgé, pour qu’elle daigne ne serais-ce qu’en tenir compte. Cependant elle était aussi une personne curieuse et si, en temps normal elle ne lui aurait pas laissé le temps de poursuivre, cette fois elle le fit.

- Vous m’en direz tant… Cracha-t-elle à voix basse juste avant que les premiers sons ne parviennent à ses tympans. Enfin, elle se tut, son esprit étant accaparé par ce qu’elle voyait et entendait maintenant. Plusieurs sentiments vinrent s’entrechoquer dans sa poitrine. D’abord de l’intérêt puis un sentiment légèrement euphorique qu’elle avait elle même ressentit à ce moment là et pour finir ce sentiment de calme et de sérénité lorsqu’ils étaient tout deux à la fontaine. Ses traits si tendu jusque là, se déridèrent enfin, légèrement. Après les dernières images ; représentant Keith entrain de discuter avec une vieille mégère dont elle n’arrivait pas à se souvenir le nom, tout stoppa et seul le son de la pluie perturbait le silence environnant.

Ce fut lui, qui, en premier le brisa. Détournant les yeux de l’endroit où les images lui étaient apparut elle les reposa sur lui. Sans piper mot, elle lui prêta l’oreille et le laissa même lui reprendre la bouteille avant de froncer ses sourcils parfaitement dessinés. En vérité si elle ne rétorquait pas, c’était pour l’unique et bonne raison qu’elle ne savait pas quoi lui dire. C’était bien la première fois qu’elle se retrouvait dans une situation pareille. Plus encore personne n’avait jamais cherché à batailler dans l’espoir de conserver une possible amitié dont on était même pas sûre qu’elle éclose un jour. Alors elle préféra garder son air coléreux. Un œil avisé pourrait facilement voir que ce n’était qu’un masque, hormis ses airs renfrognés, rien ne lassait plus supposer qu’elle fut en colère. Même son regard n’était plus glacial. Seulement perplexe, perdu et ce n’était ni les yeux chaleureux de Keith ni ses paroles bienveillante qui l’aiderait à savoir comment réagir.

Comme bien souvent, elle opta donc pour la mauvaise foi. Croisant les bras sur sa poitrine, elle détourna le regard et le posa sur la pluie qui ne cessait de tomber à un rythme parfaitement régulier.

- Qu’est ce qui me prouve que c’est là la véritable capacité de votre pouvoir. Peut-être que ce n’est qu’une illusion de plus. Pinçant le nez, elle détourna aussi la tête comme aurait pu le faire un enfant boudeur. Pendant quelques instants elle eut envie de se mordre la langue, même elle ne croyait pas franchement à ce qu’elle disait mais perdre la face serait encore pire. - Que je sois ravissante est un fait. Que je porte le nom de Milan est un attrait. Vous avez au moins le mérite de l’avouer. Mais il y avait d’autre femmes a peu près jolies et portant des noms important. La question est donc toujours la même, pourquoi moi ? Diantre ! Elle n’y arrivait pas. Elle se mélangeait les pinceaux dans ce qu’elle voulait dire et même ses pensées était maintenant en désordre. Maudit Veriano. Grogna-t-elle intérieurement tout en essayant de reprendre contenance.  - Vous devriez savoir que tous le monde s’intéresse à ce que les autres pensent que ce soit leur fréquentation, leur réputation ou même les choses plus futile qui soit. Me feriez vous croire que vous vous fichez bien de toute opinion public quelle qu’elle soit ? Enfin, elle retrouvait sa capacité à cogiter correctement, son regard vint à nouveau à la rencontre de celui du brun. - Et il semblerait que non. Les gens ne viennent pas à moi alors m’apprécier ? Laissez moi rire ! D’un mouvement agile, elle fit volte face et lui tourna le dos. - Vous êtes sot et même plus encore. Si vous étiez plus malin vous auriez sans doute évité de croiser ma route. Croisant ses bras sur sa poitrine une nouvelle fois, elle fit teinter le verre avec son ongle. - Pour votre gouverne. Je vais toujours bien.

Queen laissa ensuite un long soupire passer la barrière de ses lèvres et tendit son verre sur le côté sans même se retourner. Une demande silencieuse et quelques peut impolie pour lui demander de la resservir. Une deuxième verre ne pourrait pas lui faire de mal.

- Vous êtes un bien étrange personnage Keith, mais je crois vous l’avoir déjà dis.  

Évidemment ! Il n’avait aucune preuve ! Bien que dans le fond, elle se doutait que c’était là la seul utilité de son pouvoir. Révéler ses sentiments ainsi que ses souvenirs et les faire voir à une autre personne que lui. Néanmoins elle n’aurait su dire si il était en capacité de falsifier ses propres souvenirs. Après tout c’était une chose que beaucoup de gens faisait naturellement et sans s’en rendre compte, allant même jusqu’à croire leur propre mensonge. Mais c’était un processus qui prenait du temps, corrompre son propre esprit, se voiler la face n’était pas à la portée de tout le monde et encore moins aussi vite. Elle préféra ne rien dire mais elle n’en pensait pas moins. Seul le temps leur dirait ? Mais elle n’avait pas de temps. Pas le temps d’attendre de voir si Keith ferait partie de ses amis ou de ses ennemis et en même temps, il ne lui laissait pas le choix. Il aurait été mentir que de dire qu’elle lui ferait confiance dès le début. Même si leur entente était toute naturelle, cela ne prouvait rien.

Une autre évidence se présenta. Une réponse qui laissa de marbre la jeune femme qui tournait toujours le dos à son interlocuteur. Il ne savait pas pourquoi elle. Comme toujours ce qu’il disait été choisit soigneusement et les mots qu’il employait sonnaient comme des compliments dans sa bouche. Un maître dans l’art du langage à n’en point douter. Ou alors était-il simplement sincère ? Elle avait du mal à y croire mais ne put pas réfléchir à la question bien longtemps puisqu’il enchaîna prestement avec des paroles qui l’intéressèrent un peu plus cette fois.

Une fois que son verre fut plein, elle le porta à ses lèvres, laissa un silence religieux tomber entre eux. La question principale était : Comment devait-elle réagir ? Queen n’aimait pas ce genre de situations où elle n’était pas à son avantage et où elle n’avait pas un contrôle absolue sur la personne en face. De plus elle appréciait plutôt bien la compagnie du jeune homme ; pour cette raison elle s’abstint de faire ce qui traversait son esprit. S’il n’avait pas été lui, elle aurait sans doute trouvé une excuse pour lui faire faux bond. Une quelconque excuse bancale lui aurait suffit, peut-être même de faux air de crise de colère et pouf elle s’en serait aller. Tout cela dans le seul but d’échapper à ce qu’elle ne contrôlait pas. Néanmoins elle n’en fit rien et resta immobile face à la pluie réfléchissant tout en portant son verre à ses lèvres.

Keith semblait avoir dit ce qu’il avait à dire. C’était donc maintenant à elle de prendre la parole, ce qu’elle fit après un moment qui sembla durer une éternité.

- Si vous croyez que vos belles paroles et votre « temps » suffiront aux autres. Vous vous mettez sans doute le doigt dans l’œil et plus profondément que jamais. Mais vous avez de la chance, je vous apprécie, je vais donc vous faire cette faveur. Pour cette fois. Ronchonna-t-elle dans sa barbe, avant de lever le nez vers le ciel, l’air dédaigneux. - Votre jugement et celui des votre hein… Le jugement des autres n’est bon qu’à flouer le votre. Tenez… Que direz les votre comme vous dites, s’ils nous voyaient là ? J’avoue que la réponse m’intéresse. Et lui permettrait aussi, possiblement, de jauger les personnes que Keith fréquentaient et qu’il surnommé « les siens ».

Restant sur ces quelques mots, elle but à nouveau avant de se retourner, enfin. Elle ne lui adressa pas pour autant un regard, au début et ne trinqua pas non plus avec lui.

- Complètement irrécupérable vous voulez dire. Dit-elle en tournant la tête à la manière d’une adolescente courroucée. - Pourquoi donc irais-je ma… Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’un éclair puissant et lumineux, zébra le ciel, les éclairants comme en plein jour. Le coup de tonnerre  qui lui succéda fut si puissant que le sol sembla trembler sous ses pieds, la faisant violemment sursauter. Comme si cela ne suffisait pas son verre lui échappa des mains. Tant bien que mal, elle tenta de le rattraper. Mais se fut peine perdu et se dernier se vida intégralement sur son vis-a-vis. Le tout agrémenté d’un – Oh… Perplexe de la jeune femme, dont la bouche avait prit la même forme que le son qu’elle venait de produire.

Dans une position délicate, penchée vers le jeune Veriano, tenant du bout des doigts le bas de son verre maintenant vide, la jeune Milan se sentait bien sotte.  

Elle s’était figée. Plus encore que sa maladresse, la main qui venait de tapoter avec douceur son crâne lui fit l’effet d’un coup de jus. Comme si l’éclair à défaut d’avoir frappé le sol dans son dos, l’avait finalement frappé elle. Même le mot étrange ne définissait pas suffisamment bien Keith aux yeux de la jeune femme. Queen n’esquissa même pas l’ombre d’un mouvement lorsqu’il retira son verre de sa main pour le remplacer par le sien. La seule chose qu’elle fit, c’est refermer ses doigts autour du nouveau verre afin d’éviter de le briser sur le sol ou pire de le renverser une nouvelle fois sur le jeune homme. Quoi qu’au point ou il en était, un verre de plus ou un de moins, cela ne faisait plus vraiment différence. Néanmoins il valait tout de même mieux éviter.

Rapidement il s’éloigna d’elle et son regard le suivit. Ce fut d’ailleurs la seule chose qui bougea chez elle. Interdite elle ne s’était toujours pas redressée et ne savait plus vraiment comment réagir. Personne n’avait jamais eut l’outrecuidance de lui caresser la tête comme on le ferait à une enfant. Personne sauf Primus, qui devait bien souvent faire face aux remontrances de la demoiselle. Queen détestait plus que tout qu’on la traite comme une enfant. Elle était jeune c’était un fait mais elle était aussi un partie très puissant d’Aryon et aimait que les gens ne l’oublie pas. Cependant, l’alcool n’aidant pas, elle se contenta de piquer un fard magistral tout en se rendant compte que le jeune Veriano était entrain de déboutonner sa chemise. Bien entendu, ce n’était pas ça qui lui posait problème. Non c’était plutôt le tout. Qu’il l’a croit suffisamment stupide pour craindre l’orage et qu’il lui caresse la tête comme à un petit chiot. Et bien entendu comme si cela ne suffisait pas, il n’hésita pas à piquer une nouvelle fois la jeune femme avec l’air taquin qu’il portait au visage depuis bien trop longtemps déjà. Après un long moment, elle se redressa enfin et passa la main devant sa bouche avant de toussoter discrètement.

- Je n’ai pas peur des orages… J’ai été surprise voilà tout. Aussi surprise que vous en cas de contrôle. Marmonna-t-elle. En temps normal elle aurait sans doute pu rire de la blague, qui était plutôt bonne il fallait l’avouer. Mais elle n’était pas en position de force, aussi, elle ne put l’apprécier à sa juste valeur. - Et je ne rougis pas. Dit-elle tout en tapotant prestement ses joues avec l’espoir stupide de faire diminuer la chaleur qui en émanait. Soupirant elle s’approcha un peu de Keith et saisie le tissus de sa chemise qu’elle frotta entre ses doigts tout en marmonnant. - Je ne suis certes pas experte, mais cette matière devrait être facilement rattrapable. Pour peu que vos domestiques ne soient pas des incapables. Auquel cas, envoyez moi la facture. Je vous paierais les dommages. Puis elle le relâcha et fit un pas en arrière.

- Soit dit en passant, je ne suis pas sûre que vos proches apprécient que vous vous fichiez de leur avis. Elle tapota son verre avec ses doigts de manière régulière, les uns après les autres. - Mais il est bon de savoir que vous vous fiez d’avantage à votre propre jugement qu’au reste. Pour la énième fois, un soupire franchit ses lèvres. - Bien, au point ou nous en sommes, vous devriez vous resservir un verre. Je ne crois pas que cela empêchera votre chemise de sécher. N’est ce pas ? Dit-elle tout en levant son verre devant lui. - Et ne me caressez plus la tête. Elle avait murmuré la dernière phrase, presque sur un ton de confidence.    

Lorsqu’il rit à sa remarque, elle ne put refréner un regard assassin. Ne s’était-il pas suffisamment moqué pour ce soir ? Inspirant longuement avant d’expirer bruyamment, elle fit un effort considérable pour ne pas relancer la machine, lui laissant le soin de reprendre la conversation si le cœur lui en disait. Et sans réelle grande surprise, c’est ce qu’il fit rapidement. Queen se félicita intérieurement de ne pas avoir rétorqué face à son hilarité quelques secondes avant. Auquel cas elle n’aurait sans doute pas vu la couleur de cette « concession » qu’il acceptait de faire. En vérité, il aurait suffit d’une fois de plus pour qu’elle sorte de ses gonds et bien qu’elle ne soit ni contre ni étrangère aux éclats en public, ce soir elle n’était pas dans cet état d’esprit. Même un peu plus tôt lorsqu’elle lui avait fait mille et un reproche, elle était resté courtoise et presque agréable comparé à ce qu’elle était capable de faire dans ses mauvais jours ou face à une personne qu’elle n’appréciait guère. Haru pourrait en témoigner sans difficulté si quelqu’un venait à lui poser la question. Elle en était convaincu.

Elle garda néanmoins le silence, le gratifiant d’un « merci » polie une fois qu’il l’eut servit. Ensuite, elle imita son vis-à-vis et avala une grande rasade de liquide. Passant une main sur sa tempe elle put enfin se rendre compte de son état d’ébriété qui commençait enfin à véritablement se faire ressentir. En soit c’était une bonne chose. Avec les années, la trésorière avait remarqué que sous l’emprise de l’alcool elle était d’un naturel beaucoup plus joyeux et agréable. Ne lui en déplaise, cela avait ses bons côtés. Comme celui de ne pas écharper tout ceux qui passait à sa portée ou encore d’être capable de côtoyer des personnes d’un rang inférieur sans leur rappeler que leur place était certainement plus proche du paillasson à l’entrée de son domaine qu’à ses côtés.  Une nouvelle fois, le brun se mit à rire, sans qu’elle en comprenne la raison. Cependant, elle tourna son regard dans sa direction, un sourcil arqué l’air dubitatif. Qu’allait-il encore pouvoir lui sortir de saugrenue ?

Aussi imprévu que son rire, ses paroles laissèrent la jeune femme silencieuse. La jeune Milan devait bien l’avouer, elle avait un mal fou à cerner la personnalité de Keith. Bien entendu il était toujours resté agréable voire même chaleureux, ce qui n’avait pas manqué de bouleverser les habitudes de la trésorière. Mais d’un autre côté il semblait se jouer d’elle avec une facilité qui la laissait coite. Il était rare qu’un Milan créait des liens positif et c’était encore plus vrai pour Queen. Primus par exemple avait le mérite d’être passé maître dans l’art de l’hypocrisie et sa petite sœur était sans doute l’une des seules personnes capable de dire qui il appréciait réellement ou pas. Néanmoins, ses tours de passe passe lui permettait d’être une personne fortement appréciée que cela soit dans la sphère de la noblesse ou même pas les petites gens. Queen, tout à son contraire, avait toujours eut du mal à se cacher derrière des masques. Avec le temps elle avait finir par réussir mais ces derniers restaient fragile et se brisaient bien trop rapidement. Révélant ainsi les véritables sentiments de la jeune femme au grand jour. Fort heureusement, Andra était bien pire qu’elle. Incapable de porter le moindre masque ou de s’imposer quelconque filtre et cela suffisait à la réconforter.

Après avoir laissé traîner le silence qui s’était installé lorsque le brun s’était tue, elle soupira doucement et posa son regard sur lui.

- Je vous remercie. Dit-elle finalement. Elle désignait à la fois le fait qu’il ne fasse pas un esclandre de la tâche qui trônait sur sa chemise – dont elle même aurait sans doute fait une crise de colère monstrueuse - et à la fois qu’il accepte de ne plus lui caresser la tête contre son gré. - Et je suis ravie de vous l’entendre dire. Jusque là, je passais également une très bonne soirée. Enfin, pas qu’elle soit gâchées mais mes nerfs vont avoir besoin d’encore un peu de temps pour se détendre. J’espère que vous ne m’en tiendrais pas rigueur.

Queen se mit à passer ses doigts dans ses cheveux après avoir reposé son verre, les séparant rapidement par une raie parfaitement droite. Elle démêla ensuite tant bien que mal chacun des deux côtés puis se mit à fouiller dans les pans de sa robe avant d’en ressortir un premier accessoire. De même que sa robe il arborait des couleurs noir et rouge. C’était un nœud simple mais qu’elle avait toujours adoré. Avec habitude elle forma une première couette sur le côté gauche et y noua son apparat avant de passer à l’autre côté avec un tout autre accessoire. Semblable a celui d’un enfant, celui ci était une simple tête d’ourson bicolore toujours dans la même tranche de couleur, si ce n’était le côté droit de ce dernier qui arborait un blanc qui tranchait drastiquement avec le reste de tenue. Une fois fait, elle tapota les deux couettes, fière d’elle et soupira d’aise.

- Voilà qui est mieux !

Elle attrapa ensuite son verre et se tourna vers la pluie, puis avala une grande gorgée rapidement avant de lancer : - Préférez vous rester ici ou je tente de nous créer une protection dont je ne garantis en rien l’étanchéité, afin de rejoindre les autres convives ? Puis elle se tourna à demi pour lui lancer un regard.  

Queen resta un moment silencieuse et lui tourna le dos. La pluie tombait toujours aussi dru et même si cela faisait maintenant un petit moment qu’ils n’avaient pas été dérangés par un quelconque coup de tonnerre, elle avait conscience qu’à moins de passer la nuit sous ce porche, ils étaient tout deux bons pour essayer de passer ce rideau d’eau. Alors, une fois qu’il eut terminé de parler et qu’elle l’eut activement écouté, hochant la tête par moment, roulant des yeux à d’autre, elle soupira et lui fit de nouveau face. Pas pour le regarder mais pour remplir son verre une dernière fois. Cela lui serait sans aucun doute très utile, que cela soit pour le jeter au visage d’un maraud qui tenterait de se moquer d’elle ou pour accentuer un peu plus son taux d’alcoolémie. D’ailleurs son état d’ébriété commençait sérieusement à lui poser problème. Son esprit semblait ralentit, de même que son corps et si en temps normal c’était une sensation qu’elle appréciait, elle devait bien avouer que là, maintenant, elle s’en serait bien passé. De plus, Keith, semblait curieux de voir les prouesses de la jeune femme et elle n’était pas décidé à le décevoir. Son pouvoir en rebutait plus d’un, elle le savait mais il était d’une polyvalence à toute épreuve et collait parfaitement à sa personnalité. Contrairement à beaucoup de jeune de son âge à l’époque, elle s’était immédiatement prise d’affection pour son pouvoir.

- Vous avez sans doute raison. Avoua-t-elle au terme d’un silence d’une longueur démesurée. - Mais d’après vous… Il serait pire de nous montrer dans cet état ou de nous échapper tous les deux. Lequel de ces choix ferait le plus de bruit ? Elle passa un doigt sur son menton en réfléchissant. Dans les deux cas, les gens trouveraient quelques choses à redire c’était certain. Mais elle se plia finalement aux volontés de Keith. La jeune femme préférait encore que des rumeurs sur leur étrange entente et leur fuite de la soirée fusent plutôt que d’entendre la populace critiquer son accoutrement. Encore que toutes les personnes ici présente savaient pertinemment que le goût de la mode et de la perfection de Queen était sans aucun doute bien au dessus des leurs. Mais il était possible que ça ne soit pas le cas de Keith alors pour une fois elle n’insista pas. - Bien. Nous contournerons donc le bâtiment pour rejoindre vos domestiques. De sa main libre, elle attrapa le pourpoint qu’elle avait tenté de faire sécher et le posa sur son avant bras afin de se libérer.

Inspirant de longues secondes elle finit par expirer au moment même ou ses doigts se mettaient à s’agiter. Doucement au début, effectuant des mouvements rythmés et souple comme si elle donnait la cadence à un morceau de musique inaudible. Peu à peu, une boule ambrée se forma au creux de sa paume. Elle se mit ensuite à grossir et le rythme de ses doigts s’accéléra. Une fois qu’elle eut atteint une taille qui lui semblait convenable, Queen étira son index vers le ciel et la substance suivit immédiatement le mouvement. Elle étira ensuite la sève de pars et d’autre avec le même doigts de son autre main, son verre ne l’entravant pas tellement pour ce genre de mouvement. Même s’il s’agissait là de son propre pouvoir, la trésorière aimé toujours le regarder agir. La sève toujours en mouvement, révélait mille et une teinte dorée et caramel qui avait toujours eut le don de la fasciner, sans compter que la faible lumière qui se reflétait dedans lui donnait une teinte encore plus radieuse.

Quand enfin, il eut la forme escompté, elle referma vivement la main et le tout se durcit laissant de l’ambre à la place de la substance mouvante et gluante. Ce n’était certainement pas du grand art, déjà parce qu’elle n’avait certainement pas la patience de créer quelques choses de parfaitement parfait mais aussi parce que l’alcool qui coulait dans ses veines ne faisait qu’accentuer sa feignantise. Ses doigts s’enroulèrent ensuite sur l’espèce de petit parapluie, très fin mais qui ne laissait pas filtrer l’eau. Elle le tendit devant elle et regarda les gouttes ruisseler dessus avec un petit sourire fier.

- Voilà une bonne chose de faites. Vous devriez vous presser un peu mon cher, mes capacités ne sont certainement pas opérationnelles des heures durant.  Elle tendit ensuite l’objet au dessus de sa tête et se poussa pour faire une petite place au jeune homme. - J’apprécierais effectivement que vous puissiez me ramener. La marche ne me fait pas peur mais ce temps me rebute sans aucun doute. De toute façon je n’habite qu’à quelques pâtés de maison, cela ne devrait pas vous faire un gros détour. Enfin, elle attendit qu’il se positionne à ses côtés pour enfin franchir le rideau de pluie. En priant intérieurement pour que son parapluie de fortune soit aussi étanche qu’elle le pensait malgré sa finesse et surtout que l’alcool ne réduise pas son temps d’action. Auquel cas ils seraient tous les deux bons pour une nouvelle douche.  

Diantre ! Quand allait-il donc cesser de s’émerveiller au sujet de choses évidentes. Elle était une personne exceptionnelle, bien entendu que son pouvoir l’était autant qu’elle. La seule chose qui la fit légèrement sourire fut qu’il  était une des rares personnes suffisamment avisées pour s’en rendre compte. Keith venait de marquer un bon point d’ailleurs en ne prenant pas cet air rebuté à la vue de l’épaisse sève qui s’était agitée sous son nez. Queen portait un véritable amour à son pouvoir et même s’il en existait des plus puissants ou des plus beaux, elle ne comprenait pas pourquoi le sien pouvait dégoutter les gens à ce point. Il ne s’agissait ni plus, ni moins que de sève, sève qui se transformait indubitablement en ambre et dont les nobles de la cour aimaient se parer. De toute façon noble ou petites gens, rare était ceux dotés d’un cerveau, alors pouvait-elle vraiment leur en vouloir ? Évidemment que oui. Le manque d’intelligence n’était pas une forme de rédemption à ses yeux. Concernant ses « talents d’artiste », Queen préféra les passer sous silence, parce que s’il y avait bien un domaine où elle était mauvaise c’était bel et bien pour les arts. Que cela soit la musique, la couture ou la peinture. Elle maîtrisait ces sujets au terme d’un apprentissage des plus drastiques et même avec cela elle n’atteignait pas les meilleurs niveaux. Étirer sa sève pour en faire un dôme était pour elle une formalité et à la portée d’un enfant de cinq ans.

Enfin, le brun daigna se tenir à ses côtés et sans plus attendre ils franchirent le rideau de pluie. La trésorière avait envie de pleurer et de taper des pieds. Jamais au grand jamais, elle n’aurait pu tolérée de marcher sous une pluie aussi violente, dans la boue et sur un sol qui semblait vouloir la faire chuter à chaque pas. Pourtant c’était bel et bien ce qu’elle était entrain de faire et sans s’en plaindre s’il vous plaît. Comme si tout cela ne suffisait pas, l’orage reprit de plus belle. La jeune Milan du faire des pieds et des mains pour ne pas sursauter mais à force de relever le nez, elle trébucha et se raccrocha l’air de rien à son compagnon de galère avant de se redresser, pinçant le nez. Puis elle s’écarta à nouveau de lui sans demander son reste. Elle n’avait pas franchement peur de l’orage, du moins pas comme certains pouvaient en avoir peur. Au contraire, elle aimait ce genre de temps. Voir le ciel déchiré par ces filaments d’électricité oscillant entre le blanc, le rose et le bleu avait toujours eut le don de la fasciner. Lorsqu’elle était bien au chaud, chez elle, un thé à la main et une énorme couverture pour compagnie. A l’extérieur c’était une tout autre affaire. La main de Keith sur son épaule la sortie de ses pensées et elle opina d’un simple signe de tête avant de reprendre la marche.

Broyant du noir dans son coin, elle fut plus que ravie quand enfin les formes d’un carrosse se dessinèrent sous ses yeux. Elle allait pouvoir se mettre au sec et rentrer chez elle. Pas que la compagnie du Veriano ne soit pas agréable mais un bon bain chaud lui semblait pour l’instant beaucoup plus attrayant. Sans compter sur l’alcool qui bien que pour l’instant maîtrisé, pourrait faire des ravages au cours du reste de la soirée.  

Profitant de la présence du cocher à l’intérieur de la cabine -ce qu’elle trouvait d’ailleurs aberrant- elle termina son verre d’une traite et l’abandonna sur un petit muret qui se trouvait là. Une fois revenu aux côtés du Veriano, elle lui lança un regard perplexe. Son domestique n’aurait-il pas pu s’abriter sous le porche plutôt que dans la cabine qui leur était destinée ? Enfin ce n’était pas l’un des siens, elle ne se voyait pas commenter sa façon de faire maintenant. Mais à l’avenir, aurait-il peut-être besoin de ses conseil avisés en matière d’éducation ? Peut-être ou peut-être pas. La question se poserait en temps voulu. Sans se faire prier, elle monta à la suite de Keith et prit place sur le banc faisant face à son vis-à-vis. Elle se laissa choir dessus sans grâce aucune avant de soupirer longuement. Quelle soirée mouvementé, elle avait tellement hâte de retrouver sa salle de bain, ses vêtements secs et tout son petit confort. Jetant le parapluie d’ambre par la petite fenêtre, elle releva le regard vers lui quand il prit la parole.

- Vous avez une bonne mémoire. Lui dit-elle simplement avec un ton proche de l’amusement. Pendant un instant, elle se voyait déjà obligée de répéter les mêmes paroles pour la énième fois. - Cette soirée était sommes toutes… Différente et aussi étonnant que cela puisse paraître votre compagnie ne m’est pas totalement désagréable. Peut-être que cela ne semblait pas en être un mais il s’agissait là d’un nouveau compliment. Sur la réserve certes, mais un compliment tout de même. - J’avoue néanmoins que j’ai hâte de retrouver mes appartements, je commence à avoir froid et un bon bain chaud ne serais pas de refus. Quel dommage que je ne sois pas équipé de ses petits bijoux de magie. Vous savez ? Les pierres de communications. Avec ça, il suffirait d’un petit appel pour que tout soit prêt avant même mon arrivée. Un nouveau soupire lui échappa et elle passa la main par la petite fenêtre avant de toquer sur le bois humide, indiquant au cocher qu’il pouvait démarrer. - Et vous Keith, cette soirée vous satisfait toujours autant ? Ou vous avez changé d’avis ? A cause de l’obscurité, elle ne pouvait que deviner les émotions qui passait sur son visage mais cela ne l’empêchait pas de le fixer comme si elle le voyait parfaitement. Elle se tue ensuite, attendant de voir ce qu’il pourrait bien lui répondre.