Nous nous avançons vers elle mais pas suffisamment rapidement. Elles arrivent à se séparer et nous font face comme pour un… Un contre un ? Sincèrement… ? Ce n’est pas que je ne pense pas qu’elle puisse se défendre maiiiis… après, c’est vrai qu’elles ne peuvent savoir qui nous sommes après tout… Je ne sais pas trop comment se bat Vrenn, je vais éviter d’être un peu trop… Violent.
Elles s’approchent de manière assez fluide et je ressens une hostilité qui est autre du fait qu’on se soit introduits dans leur chambre. On ne leur a même pas parlé encore serait-ce juste parce qu’on est des hommes ? Ou alors c’est simplement leur intuition qu’on est là pour leur créer des problèmes… Quoi qu’il en soit, je garde simplement les mains dans les poches, histoire de voir ce qu’elle fait.
Plutôt rapide, suffisamment pour que cela m’impressionne. Il est rare que je n’arrive pas à anticiper un mouvement. Il y a pas mal de personnes qui soit capable de me tenir tête et de me battre et elle n’en fait clairement pas parti. Je vois son coup de poing arriver du bon côté et génère simplement une fine couche d’acier sur le visage, à l’endroit de l’impact. Je sens son poing s’écraser dessus, ainsi qu’un bruit d’os qui craque et un léger cri lui échappe.
Au moment où elle retire sa main, je lui attrape le bras et la colle face au mur, lui faisant une clé dans le dos. Je vois que Vrenn a aussi maîtrisé sa donzelle, ce qui est parfait. Bon, comment procéder… Le faire légalement ne serait que trop long et contre-productif… Devrais-je transgresser les règles ? Cela me fit grincer des dents. Je devais simplement trouver une solution.
Ma ‘’prisonnière’’ se tortillait malgré ma forte poigne. Elle devait avoir l’habitude parce que j’avais de plus en plus de mal. Au pire, je lui refous un coup sur la tête et cela devrai la calmer assez facilement. J’ouvris la bouche pour lui parler, essayant du faire du mieux que je peux pour paraître un minimum impressionnant.
- Personnellement, je me fiche pas mal du butin que vous avez amassé. Je cherche simplement une babiole que vous avez vol.
Et je lui donne la description de cette petite statuette de tour que je recherche. Je n’ai pas de réponse favorable et cela me fit soupirer… Doit-on vraiment en arriver là ? Je tords un peu plus son bras, la faisant crier de douleur.
- Je suis assez honnête. L’autre qui m’accompagne, je le connais moins donc vous devriez vraiment parler.
En parlant de lui, je lance un regard à Vrenn. Il maintient l’autre demoiselle et semble être assez… Intimidant dans sa façon de faire. Pourtant, cela ne semble pas faire effet non plus… Alors quoi on va les torturer ? Pas vraiment une envie… Je la ramène à côté de sa pote et la balance au sol, avant de l’attacher en générant un espèce de corde d’acier avant de soupirer.
- Franchement, je n’aimerais vraiment pas avoir à l’utiliser contre vous…
Une lame apparaît dans ma main. Enfin apparaît... Je la forme depuis ma paume. Toute lisse, elle luit à travers le peu de lumière que transmettent la fenêtre et les lampes. En soit, je ne m’en servirais pas. Mais si Vrenn en remet une couche, on devrait pouvoir mettre la main sur le butin.
Maintenant qu’elles sont toutes les deux prises au piège, y’a plus qu’à obtenir les informations qu’on veut. C’est toujours la partie un peu pénible : on est rarement tranquille chez soi, à pouvoir prendre des heures et des jours. C’est déjà arrivé, évidemment, dans une cave sous un terrain vague, de pouvoir travailler au corps sur un temps long, c’est efficace mais assez peu ragoûtant. Nan, là, faut jouer sur l’aspect psychologique, du coup.
« On peut crier, offre l’une.
- Ils croiraient que c’est des clients, et vous pourriez crier qu’une fois.
- Au bout d’un moment, quelqu’un va venir voir, de toute façon.
- C’est long, un moment, vous le savez aussi. Il peut se passer pleins de trucs. On peut vous faire pleins de trucs. »
Leurs regards ne cillent pas, restent directs.
« C’est bien, vous êtes motivées. Tiens, surveille la tienne, que j’dis à Kay. »
Une fois que c’est fait, et contrairement à ce qu’elles semblent croire, j’reste fixé sur la mienne, de cible.
« Franchement, ce qu’on va faire, c’est que j’vais te faire mal. »
J’lui montre en rapide succession quelques-uns de mes couteaux, les plus horribles, genre celui de chasse, et celui à lame dentelée.
« Evidemment, j’vais te bâillonner avant, histoire que tes beuglements attirent pas tout le voisinage. Et ce sera à ta copine de voir si elle décide d’intervenir ou pas. J’espère que vous êtes vraiment aussi proches que vous en aviez l’air quand on est entré dans la chambre, hein ? Ca serait drôlement dommage, sinon. »
Elle déglutit, jette un œil à sa binôme.
« Ah, et les couteaux d’avant, c’était de l’esbroufe, évidemment. J’vais plutôt utiliser celui-là. »
J’lui montre, de très près, un surin très fin et extrêmement aiguisé, qui rappelle un peu celui que le garde a généré dans sa paume. C’est que c’est un travail de précision, pas de la boucherie non plus. Faudra que j’fasse gaffe à pas me mettre du sang partout, cela dit. Celle qu’est bâillonnée et va servir de bloc de viande essaie de parler, mais c’est peine perdue avec le tissu qui lui recouvre la bouche. Pas d’bol.
J’commence une première incision au ras de la peau, sur le bras. Trois fois rien, juste l’échauffement. Au bout d’une dizaine de centimètres, ça parle enfin.
« C’est bon, c’est bon. Les quelques richesses qu’on a ramassées valent pas le coup. »
Ahah. Mais c’était pas quelques richesses.
« Y’a un hangar, le long du fleuve, côté Est. C’est quand tu pars de la place avec la statut de l’ancien roi à cheval, là.
- Bregon ?
- Oui, lui ! »
J’réfléchis quelques secondes.
« M’étonnerait, le territoire appartient déjà à un gang, les Bâtards. Et vous en faites pas partie. »
Elle déglutit.
« Bon, comme j’suis pas convaincu, j’reprends où j’me suis arrêté, hein ? T’as encore un peu de temps pour réfléchir, j’ai pas fini mon dessin. Après, c’était pas forcément une mauvaise idée de nous envoyer au casse-pipe sur les plates-bandes d’un gang assez connu pour pas avoir le sens de l’humour, je dis pas. »
C’est que tout est dans la précision, pour donner un truc esthétique et efficient. Donc j’me remets au travail en ignorant ses protestations. Kay a pas l’air de passer un bon moment, en tout cas. Moi aussi, j’préfèrerais qu’elles bavent la réponse et qu’on puisse se barrer, gros bêta.
Alors que mon motif d’arktigor commence à prendre forme, elle reprend la parole, avec les yeux écarquillés et la respiration haletante.
« On a une cache dans les faubourgs du nord de la ville. »
J’la fixe quelques instants, sans bouger, et elle soutient mon regard, puis j’me tourne vers celle que j’coupe doucement… à peine quelques millimètres sous la peau. Euh… C’est possible que ce soit vrai, du coup.
« J’vous crois pas. Vous mentez mal. »
Allez, au bluff.
Elle nie, évidemment, au début, mais comme j’l’écoute pas, elle change finalement son fusil d’épaule. Pfiou, on a eu chaud.
« C’est à quelques rues d’ici. Il y a une chambre au nom d’Ella. Tout est dedans, dans un hôtel minable. »
Elle donne les coordonnées exactes, et j’ai un sourire satisfait.
« Ben voilà, c’était pas si compliqué. »
Ça aurait été plus simple si Kaytsak avait eu une potion de vérité, mais bon. En tout cas, on s’assure qu’aucune des deux ne bougera tout de suite, et on s’arrache. Si on fait assez vite et qu’elles ont menti, on aura même le temps de revenir pour les suriner en douce, avec un peu de chance.
Mais ça ne s’avère pas nécessaire : la majorité du butin est là, et j’vois mon coéquipier ressortir avec un colifichet qui n’a pas la moindre importance au regard de l’ensemble de ce qu’on a pu accumuler tous les trois pendant nos heures de travail. La vengeance aura été légère, à cause de sa présence. Normalement, je t’aurais suriné tout ça et balancé dans le Fleuve, pour l’ironie dramatique. Mais c’était compliqué. J’exclus pas de leur retomber dessus à l’avenir pour finir le travail proprement, cela dit.
Même si elles se rappellent pas. C’est pas une raison.
D’ailleurs, elles se rappelleront de lui, donc elles essaieront p’tet de se venger, maintenant que j’y pense. Bah, c’est sa merde, puis peu de chances que ça vienne le chercher jusqu’au Blizzard, hein. Enfin, m’en fous.
« T’as ce qu’il te faut ? »
Comme il hoche la tête, j’lui tends la main pour la serrer.
« J’vais prévenir le Guet pour qu’ils récupèrent ce qu’il reste. Mon client sera content, en tout cas. »
A la main, j’ai un collier serti de pierres précieuses. S’il m’empêche de tout récupérer, j’aurai au moins le truc plus coûteux en main, ce sera pas pour rien. Puis ça aura fait une soirée intéressante, au final.
Cela dit, ça n’a pas l’air de l’intéresser outre-mesure, pasqu’il se casse comme ça. Hé, parfait.
J’me sers allègrement de tout ce que j’peux porter, et j’vais vite le planquer ailleurs.
La Garde, c’est nos meilleurs alliés, hé ?
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