Parce que pour les petites gens qui n'ont pas le standing de participer aux festivités du bal du palais, la guilde des aventuriers propose de déguster de nombreuses spécialités alcoolisées du pays, de la bière aux trucs un peu plus forts. Pour votre palais, aussi, il va y avoir un bal. On fait aussi quelques planches à manger, parce que même si une bière, c'est deux tartines, on dit rarement non à un petit saucisson aux noisettes.
Devant un comptoir monté à la va-vite, mais suffisamment solide pour supporter les coudes et les têtes des assoiffés de la fête : des tables, des chaises et une petite scène où des groupes de musiques composés d'aventuriers amateurs s'enchaînent avec des qualités musicales inégales. Ici, on vous sert des mets pas délicat, mais bon, et surtout, de quoi fêter le solstice sans avoir soif. Certains jouent aux dés, voire aux cartes. On ne se met pas une mine, hein, la saine convivialité avant tout. Des aventuriers de la guilde veillent au grain.
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Explication du fonctionnement de votre stand : Des gens boivent, mangent, jouent, rigolent et écoutent de la musique dans la bonne ambiance. Si vous êtes suffisamment convivial, on vous offre un choppe aux couleurs de la guilde, édition limitée du solstice, parce qu?on se fiche pas de vous. Un examinateur traîne dans un coin, renseignant de potentiels candidats pour rejoindre la guilde et racontant des anecdotes qui rendent la guilde plus grandiose et vertueuse que certains pourraient croire, à tort, évidemment.
Quand j’me pointe devant le stand officiel de la Guilde, j’ai presque une grimace de jalousie. Faut dire, on était un paquet à proposer de faire une buvette : c’est sympa, c’est convivial, et on peut picoler à l’œil. Mais, évidemment, lors de la présentation des projets, celui de Jack avait nettement l’air d’être le plus sympathique. Alors ça n’a pas loupé, c’est lui qu’a gagné le pompon. Bon, en même temps, c’est vrai que son rival le plus sérieux, c’est Gégé le pilier de bar, alcoolo au dernier degré, qu’arrive déjà totalement torché le matin à neuf heures.
Mais quand même.
Bon, du coup, j’me devais d’être corporate et venir aussi pointer ma frimousse pour boire une mousse au stand de Jack. Puis, franchement, qui pourrait dire non ? La bière sera bonne, j’le sais, et l’environnemnt sera sympa, il peut pas en être autrement. Quand j’me pointe, Whiskeyjack lui-même est là en train de superviser les derniers détails.
« Salut Jack, ça va ?
- Salut… Draine. Impec’, et toi ? Tu as l’air un peu fatigué.
- Ouais, pas beaucoup dormi ces derniers temps. En parlant de drainer, d’ailleurs…
- Tu veux me parler de Zahria ?
- Hein, quoi ? Non, du tout, je parlais de drainer une bière.
- Ah. On peut parler de Zahria aussi, si tu veux. Je sais qu’entre vous… »
Ouais, l’amour fou.
« Nan, nan.
- Bon, je vous laisse à vos petites affaires, alors. Mais n’hésite pas, tu sais que tu peux tout me dire.
- J’en doute pas une seconde, Jack, pas une seconde… »
Pour le coup, c’est vrai, il est adorable, et jamais nous ferait un vieux plan.
« J’reviendrai plus tard, pour reboire un coup, hé ? Essayez de me garder un mug, ça serait bien la première fois que la Guilde offre quelque chose à son personnel.
- Vrai que les chefs sont radins avec les cadres.
- Ouais, on s’tue à la tâche depuis des années, et on reçoit même pas une petite cuillère.
- Ah ça, y’a du monde pour payer les petits fours ou la piscine des patrons dans leur village en bord de mer, mais pour ce qui est du reste… »
C’est que j’ai déjà fini ma pinte alors qu’on papotte avec les autres aventuriers du coin. L’ambiance est bon enfant, et on profite de l’absence des bureaux et des esprits hiérarchiques qui les hantent pour balancer quelques conneries. Mais y’a pas de fumée sans feu, comme on dit. J’m’essuie la bouche, j’adresse un signe de main aux copains, et j’reprends ma balade.
Hey ! T'a un trucs sympa pour moi ? Un truc qui arrache moins que les boissons pas très agréables qu'on nous file d'habitude !
Parce que les mélanges bizarres des hôtesses, ça va bien un temps.
Je veux une lumineer Jack !
Je patiente un instant au comptoir en regardant autour de moi. Pas mal de collègues de la Guilde mais aussi des inconnus comme ce type là qui tape la discussion comme si l'examinateur était son meilleur pote. Ma boisson en main, je m'écarte à la recherche d'autres activités à faire.
Le stand est installé, Chocolatine au taquet, je ne doute pas qu’elle attirera le chaland rien que grâce à ses petites oreilles de chatte. Et aussi sa mignonne petite bouille de jeune femme séduisante. Avec la Garde qui va tourner partout dans les rues, je ne doute pas qu’un client récalcitrant se fera rapidement évacuer. Quant à moi, je vais profiter de l’occasion pour me promener un peu et essayer de retrouver Carciphona. Premier arrêt le stand de la Guilde, une taverne à ciel ouvert. Avec un peu de chance, je lui tomberai dessus directement là-bas. Je slalome entre les aventuriers et autres badeaux amassé là pour rejoindre le comptoir improvisé et heler le tenancier.
Hey ! Vous avez un lait de boucton ? Et à tout hasard, vous sauriez pas où je peux trouver Carciphona Ixchel ?
Sait-on jamais, entre collègues, ils savent peut-être où se trouver les uns les autres.
-Callahan.
Quand on parle du loup. Si c’est des examinateurs comme moi qui nous occupons de l’organisation et du service, il fallait bien l’examinateur en chef pour gérer les ficelles de la bourse. Parfaitement assis derrière une petite table sur lequel est posé plusieurs boites classant pas taille les monnaies, Lou Trovnik me jette un petit regard indifférent bien de chez lui, puisque le bonhomme sans âge est visiblement incapable de ressentir le moindre sentiment. Avant même que l’on commence à vendre, je l’ai vu vérifié trois fois les finances du stand, méfiant à l’égard de ceux qui pourraient piquer dans la caisse. C’est bien mal nous connaître, mais il est ainsi.
-Oui, monsieur ?
-Cessez de bailler aux corneilles Callahan. Si pour une fois vous pouviez accomplir votre travail correctement, qui plus est dans cet environnement de débauche que vous connaissez bien, ce serait un grand accomplissement pour vous. Le seul, évidemment.
-Bien sûr, monsieur.
La gentillesse caractérisée de Lou m’amène à l’éviter le plus possible et je viens me planquer du côté de Gégé, qui bien qu’ayant fini dernier à la candidature des stands de la guilde, il n’a pas perdu sa passion pour les comptoirs et les godets qui se vident. Et c’est là que c’est beau, de contempler que l’échec des uns ne les plonge pas dans les gouffres de la tristesse et de la dépression. Il me dit que la bière est bonne. Je lui dis que j’ai suivi ses conseils. Il sourit. Il boit. Vous voyez ? Des plaisirs simples. Et le plaisir de servir, évidemment, alors quand on me demande un verre, je l’offre, surtout quand c’est la guilde qui demande.
Origami. Je la connais pas. Des aventuriers, il y’en a beaucoup et puis, on est pas dans la même branche, à moi les plaisirs de l’administration et de la bureaucratie. Mais on la connaît de visu, parce qu’elle dénote un peu dans le paysage.
-Salut Ori ? La fête est bonne ?
La politesse, évidemment. Je me retourne vers Pierre, au comptoir, un petit avec une petite barbe rousse et plus beaucoup de cheveux, mais qui a le regard de celui qui aime la bière. Sauf que là, je lui murmure doucement.
-Elle a demandé un Lumineer. C’est quoi un lumineer ?
-Jamais entendu parlé.
-ça doit être cocktail. Mets les fruits de Martha et Corinne, les filles de la compta. Ils sont frais du marché.
-Ouai, mais en alcool ? On fait quoi ?
-Attends, j’ai un flacon d’Ivresse que j’ai obtenu je sais pas où. Ça sera fruité et y’aura de l’alcool. Ça ressemblera à la quasi-totalité des cocktails, ça devrait passer.
-Ouai. Pas trop. L’ivresse, ça tape.
-T’inquiètes.
La complexité des cocktails. Vrai qu’ils sont tous pareils. Alors que la bière, c’est différent. Les goûts sont très variés. Mais le client est roi et avec Pierre, on sert un beau cocktail comme on en fait rarement. Avec un petit parapluie ; jamais compris pourquoi.
Elle nous remercie et s’en va. On la regarde un instant s’en aller, le regard un peu perdu.
-J’espère que ça ira.
-Ouai. J’ai jamais dosé de potion d’Ivresse, moi.
-Au pire, on s’excusera.
-Ouai.
Heureusement, d’autres clients attirent notre attention. Parce qu’il faut continuer à faire son boulot qu’importe ses remords.
-Carciphonia ? Pas vu depuis qu'elle est partie à l'autre bout du pays. Les collègues disent qu'elle a fait de la plongée, mais je pense qu'ils confondent.
Elle est populaire, elle. Et puis, les missions sont carrés. Pierre s'occupe de la commande avec une petite moue, parce que tout le monde prend des trucs bizarres et pas des céréales bien de chez nous. Il sert quand même, toujours avec le sourire.
-A votre bon coeur.
Je suis quand même surpris. Il me semblait que le chargement de lait de Boucton n'était jamais arriver. J'ai dû me tromper.
La balade continue, et les arrêts sont souvent les mêmes. Par exemple, j’m’arrange pour passer régulièrement à la taverne de la Guilde. Déjà parce que la bière est bonne, puis la compagnie est sympa. J’me note mentalement de devoir passer à mon propre stand, enfin, celui que j’ai proposé histoire de montrer que j’suis corporate, que j’ai bon esprit. J’ai immédiatement, évidemment, tout refilé aux stagiaires. Ils sont ravis, bien entendu. Je leur ai fait un grand discours sur la responsabilité, l’importance d’être indépendant, et que c’était les premiers pas sur le chemin qui les mènera aux plus hautes strates de la Guilde.
J’ai vu les étoiles dans leurs petits yeux, ils ont pas vu les bières dans les miens.
J’me note d’y passer après avoir pris une recharge.
N’empêche, on croise des gens marrants, et on retrouve des gens, surtout. Genre la mère Gher, par exemple, après les affaires sympathiques qu’on a fait dans la Cité Aquatique et sa jolie bulle. J’me passe machinalement le doigt sur mon anneau en cuivre, qui m’a déjà pas mal servi jusque-là. La famille des Terranglae pourrait presque s’en souvenir, s’ils étaient suffisamment en vie.
J’ai un frisson quand j’vois Lou qui surveille tout avec le regard d’un oiseau de proie. Ouais, va être temps d’aller se faire voir du côté de mon stand, même si personne s’en souviendra. P’tet bidonner des rapports de présence ? J’veux dire, ils connaissent mon pouvoir. J’me rapproche de Gégé, ce brave gars, avec sa bedaine, les yeux qui tombent et les veines du nez bien éclatées. Bon, il fait un peu poivrot, mais selon les rumeurs, il était un brillant examinateur, un jeune cadre dynamique qui inspirait les générations futures et les encourageait à devenir des premiers de cordée.
Comme quoi, les gens changent.
La Gher semble chercher quelqu’un, et le nom me rappelle quelque chose. J’pense que c’est le stand d’origamis devant lequel j’suis passé. Carciphona, ça m’rappelle aussi quelqu’un dans les dossiers, mais j’ai la flemme d’y réfléchir, et j’garantis pas de trouver. J’reçois ma bière, et j’regarde autour. Personne a l’air très inspiré, alors j’lève la main pour signaler que j’ai quelque chose à dire. Pas la main avec l’objet enchanté, ça pourrait attirer son attention, la faire réagir.
« J’crois qu’elle était du côté du stand de magie sans magie. J’me souviens plus du nom. »
J’pointe dans une direction approximative qu’est pas du tout celle du chalet des origamis. L’erreur bête, pas vrai ? Qui pourrait donc m’en vouloir, ou se rappeler que j’ai commis une triste erreur ?
Personne.
Dommage, hein.
Voilà enfin le grand événement que la Couronne depuis quelques temps, c’est un événement que la Reine est fière de participer, le premier millénaire de notre fabuleux pays commence et ça se déroule lors du règne de la Reine Allys et moi je peux à ses côtés, je retiens une certaine fierté et nous devons tout faire pour que rendez-vous soit parfait et dans les annales.
Je m’étais proposée pour représenter la Couronne lors du festival, laissant du répit aux gardes et ainsi éviter un cortège armé si le couple Royal décide de se promener officiellement dans les ruelles de la ville. J’avais demande à Lancelot de m’accompagner ainsi que deux autres gardes en renfort mais ils resteront à distance, seul le Garde Royal Steelhearth restera officiellement auprès de moi puis de toute façon tout le monde à l’habitude que je le promène partout puis il avait enfilé sa belle tenue de garde, il était éblouissant. Pour le bal, j’avais décidé de ne pas me déguiser à proprement parler, je porterais simplement un masque de belle manufacture c’est pourquoi je me trouve avec une si jolie robe sur moi, je ne savais combien de temps allait me prendre la visite des stands mais je décide d’y aller directement avec ma belle tenue pour éviter de perdre du temps inutilement pour rentrer à la maison, j’avais tout de même prévu le coup si nécessaire, mon déguisement magique était à mon bureau au palais, un petit saut rapidement et je me changerais mais je ne raffolais pas de porter cette toile magique où ma tenue n’était qu’illusion.
Je traverse alors la grande cour pour rejoindre les festivités, ma robe noire qui accentuait mes courbes de femme ne déplaisait pas à certains gardes qui laissaient traîner leur yeux sur moi, je voyais que Lancelot leur sommait d’arrêter par un regard noir, il était mignon quand il faisait ça mais je l’avais pris pour qu’il fasse aussi ce job et il le faisait très bien. J’avais lu le programme et on m’avait dit d’aller au Bal des Palais, un examinateur de la Guilde tenait le stand pour des dégustations.
Je m’approche doucement du comptoir posé de manière un peu précaire, c’était digne d’aventuriers ça, une planche des tonneaux et ils sont contents, c’était leur état d’esprit et j’avais encore du mal à me familiariser avec ça mais bon il n’y a pas d’âge pour apprendre. Je retrouve le taulier, un homme à la moustache extravagante mais qu’il semble de très bonne compagnie avec un autre homme à la barbe fournie.
Je m’approche au coin du comptoir et interpelle un serveur, Lancelot dans mon dos.
- Bien le bonjour Monsieur, servez moi quelque chose de raffiné s’il vous plaît, on m’a dit que du bien dans votre stand.
Enfin les gardes du Palais m’ont dit du bien pour être exacte et certains ont beaucoup d’humour...
Qui disait quoi que ce soit, disait alcool en fait pour la jeune femme qui cherchait juste une excuse pour picoler comme un trou en cette belle soirée de festivité, même si aucune excuse n'était nécessaire et qu'elle le savait pertinemment. Mais bon, pour l'esprit toussa, c'était mieux plutôt qu'admettre qu'on était alcoolique, heh. M'enfin, le stand de la guilde devant lequel elle se tenait proposait apparemment de l'alcool de tout le royaume. Le hic, c'était qu'Astrid avait déjà goûté à tout l'alcool du royaume, dans son éternel quête de saveur et de gueule de bois le lendemain. Le tout ressemblait plus à une taverne en plein air qu'à un véritable stand, et Astrid appréciait la pensée. Si elle n'avait rien prévu de sa soirée, pour sûr qu'elle aurait créché ici toute la nuit. Sauf que malheureusement, elle avait d'autres projets. Des projets qui consistaient à faire chier le monde. Donc elle ne pourrait pas rester ici, à son grand regret.
Cela dit, ça ne l’empercherait pas du tout de profiter d'un peu d'alcool et de bouffe avant de continuer son chemin, puis de revenir un coup après avant de repartir puis de revenir encore pour reboire un coup.
Hmm, quelque chose lui disait qu'elle passerait ici plus que prévu.
Portant fièrement un masque de singe, elle se dirigea fièrement vers le comptoir dans l'espoir de sécher sa soif, mais changea d'avis en voyant une jolie nana avec une sacrée robe noire pourtant un masque. Elle était accompagnée de ce qui semblait un garde, ou son amant. Héhé. Mais elle était probablement une personne importante, pour avoir un garde avec elle.
Astrid aurait pu la reconnaitre, si elle avait passé un peu plus de temps sur ce visage masqué mais non, son regard tardait un peu trop sur les courbes de la nana.
Hmmm.
Changement de plan ! La citoyenne fit mine de partir, mais avant ça, elle claqua les fesses de la jeune femme avant de prendre ses jambes à son cou à la vitesse du son en ricanant grassement comme la dernière des salopes.
Elle reviendrait ici un peu plus tard pour picoler, heh.
-Merci de votre visite Madame la Première Ministre. Raffiné, madame la Première Ministre ? Bien entendu, madame la Première Ministre !
Il se retourne vers le comptoir arrière et me tirant avec lui et me jette un regard à moitié fou. J’ai un peu du mal à sortir de ma subite torpeur.
-Jack ! Qu’est ce que tu fous bordel ?
-Hein, quoi ?
-Tu rêvasses. C’est la putain de Première Ministre !
-Sérieux ?
-Bah regarde toi !
Je jette un regard peu discret au-dessus de mon épaule pour regarder. Effectivement, c’est la première ministre. De profil, on la reconnaît bien. Et puis, le bulldog à ses côtés fait aussi forte impression. Il me rappelle le capitaine Arthorias, mais en moins beau.
-Oh bowdel… Elle veut quoi ?
-Un truc raffiné ?
-C’est quoi ?
-J’en sais strictement rien. Cherche dans l’Aryonpédia.
-Okay.
-Et te goures pas comme le Lumineer.
-En même temps, des bières faites à partir de fruit, c’est quand même vachement bizarre.
-Oui, mais bon… tu trouves ?
-Rien. Rien à « raffiné ». Même dans le bestiaire.
-Sûr ?
-Sûr.
-Merde.
-Je me rappelle d’une recette pour noble. En mesure.
-Balance, on a pas le choix.
-De souvenir, c’était Ambriosa, Ambriosa, Vin de Lucols Rouge, liqueur de Ghla Siucre, eau, eau, tige de Thir’h’an.
-Okay. Et bah, on dirait que t’as avalé l’Herbier.
-On fait pas une erreur deux fois.
-Oh, oh. Tige de Thir’h’an. C’est bon.
-Je m’en occupe.
Je me retourne vers la première ministre et je lui offre mon sourire le plus sympathique pour faire bonne impression, lui tendant le verre d’une belle couleur, mais je voudrais pas dire laquelle, parce que je vois pas bien les couleurs.
-Tenez, madame la Première Ministre. Ce nectar saura comblé votre… euh… soif. Je crois.
Je me retourne et j’échange un regard rassuré avec Pierre. Celui-ci jette une bouteille avec les autres.
-Il reste encore du sucre oh oh ?
-Du quoi ?
-Bah, ce qui était dans la bouteille.
-Sucre Oh Oh ? Jamais entendu parlé. T’as pas mis d’eau ?
-Bah, non…
On se regarde en écarquillant les yeux.
-Au pire, on s’excusera.
Putain !
Quand j’suis sorti du stand du magicien, quelqu’un m’a balancé un éclair au chocolat sur les vêtements, et j’en ai vu assez pour savoir que c’est la nana qui m’a coiffé au poteau pour l’affaire Balakyn. Bon, finalement, tout était bidon, donc c’était pas si pire, mais c’est pas souvent que j’me fais casser la gueule comme ça. J’crois qu’elle était énervée pour son éclair au chocolat, en plus, de mémoire ?
Du coup, y’a une forme d’ironie vachement bizarre à ce qu’elle m’en jette un dessus. Elle est pas nette, mais j’le savais déjà plus ou moins.
Astrid, qu’elle s’appelait. Mais elle a disparu avant que j’puisse la rattraper pour lui dire ce que je pense de son attitude. T’façon, ça se serait mal passé…
Quelques pas plus tard, les couleurs de mon déguisement magique ont ondulé doucement, et la tache n’est déjà plus visible. Sacrément utile, ce vêtement, l’air de rien. Mal sapé, bien habillé, classe, tranquille, tout est possible. Le truc piégeux, c’est que comme ça n’a jamais la même tronche, faut pas oublier de le laver, sinon on pue la mort. Et ce qui me dégoûte, c’est bien les collègues qui daubent. On en a eu un dans le bureau à un moment, à la Guilde. Heureusement, on l’a calmé assez vite, et il se lave maintenant, en plus de changer de vêtements.
Bon, après l’effort, le réconfort.
J’retourne vers la taverne, histoire de s’abreuver un p’tit peu. Et qui c’est que j’découvre ? Bon, déjà, à nouveau Astrid qui s’enfuit en courant. Elle doit encore avoir fait une connerie, mais peu importe, à la limite. Nan, j’vois m’dame notre grandiose première ministre, avec son garde du corps et chevalier servant probablement, vu que j’le reconnais pas. En tout cas, il a l’air un peu raide, style balais dans le cul. J’m’exprimerai pas sur le reste.
Ça m’rappelle l’idylle passionnelle qu’on a vécu tous les deux y’a quelques semaines. J’me demande à quel point elle s’en souvient ? J’veux dire, les sentiments forts me concernant impriment un peu mieux dans les mémoires, alors y’a p’tet un reliquat. En tout cas, ça vaut le coup d’essayer, juste pour rire.
Du coup, j’décide d’aller me mettre là où elle me verra bien. Puis j’visualise ce qui s’est passé pour la petite sauterie qu’il y a eu à la Guilde, pour l’anniversaire de la petite-fille du ponte. Ça a mal fini, cette histoire, d’ailleurs. La concentration sera clef, comme toujours.
Tourné vers elle, j’attends que ses yeux balaient la salle ouverte dans ma direction, et dans un souffle, mon déguisement magique devient celui de l’arktigor que j’ai pu être pour la fête qui faisait peur. Ça reste une seconde, peut-être trois ? Puis ça redevient des vêtements tout à fait lambda. Puis j’me retourne, et j’me casse. Des fois qu’elle soit hargneuse, elle pourrait envoyer son chien de garde me mordre, et j’ai pas envie.
Hé, j’suis un grand nostalgique, j’suis comme ça, moi.
« - Eykse f-vous avez fu Sara...? Assez peti- gran- moyenne, c-c'te daille là, abeuprès ? »
Franchement, je n'aurais jamais cru tenir aussi bien les sept... huit godets que j'avais alignés sur ma table, un peu triste de voir que personne ne m'avait rejoint alors. Pourtant tout un tas de visages me semblaient familiers, y compris celui d'un étrange énergumène couvert d'une étrange matière, qui buvait à quelques pas de moi.
C'était d'ailleurs lui... ou bien son voisin que j'avais accosté de la sorte, quittant maladroitement mon recoin pour venir m’accouder à ses côtés. Non, ce n'était pas lui, celui-là était propre.
« - Y'on ze sherait pas déjà bu ?
- Je n'ai aucune idée de qui vous êtes madame.
- Jeuh sserche J-jaque auzi. »
À vrai dire, le lieu était assez grand et bondé ; cela valait le coup de tenter. Après, quant à savoir ce que je voulais réellement au gérant... aucune idée, mais c'était une personne sympathique et tout ce qu'il me fallait à cet instant, lorsque les regards se voulaient méfiants ou dédaigneux.
Toujours pas là donc... Ah quel dommage, je devrais probablement repasser pour boire un verre encore et essayer de le trouver cette fois-ci ! Déçue, mais loin d'avoir baissé les bras, je quittai ultimement mon tabouret pour rejoindre l'allée centrale et jeter mon dévolu sur un autre stand, histoire de passer le temps...
Tout se déroulait à la perfection, j’avais passé ma commande, on me souriait, le barman n’était pas à son aise, son collègue l’avait rejoint et je voyais que quelque chose n’allait mais vraiment pas quand je sens soudain une main sur mes fesses, qui avait osé faire pareil affront à moi ? A peine j’ai eu le temps de me tourner pour voir l’individu qui avait osé me claquer les fesses, je lance un regard noir à Lancelot pour faire le nécessaire mais il est désemparée, la femme est partie comme une voleuse impossible de la rattraper.
- J’espère que vous avez vu à quoi elle ressemblait….
Il m’indique que c’était une femme avec un masque de singe et une chevelure blanche mais il ne pouvait pas m’aider plus. Je hais les bals costumés...Le jeune homme revient avec mon verre, je prends le temps de sentir les douces odeurs fruitées, ça avait l’air sympa comme cocktail quand je regarde aux alentours je m’aperçois d’une chose qui me fait rentrer dans une peur monstre, je ne sais pas pourquoi je me tétanise sur place, mon verre tombe dans un fracas effroyable, j’ai des sueurs froides et je vois cet individu porté un costume d’Arktigor puis disparaît à nouveau.
Lancelot vient tout de suite à mon bras, me demandant comme ça va et je n’arrivais plus à parler, ni tenir sur mes jambes. Il m’attrape le bras et décide de m'emmener loin d’ici, il donne quelques cristaux à l’aventurier.
- On rentre au Palais Ma Dame ?
Je lui fis non de la tête, je devais juste me reprendre et le plus loin d’ici sera le mieux...
Bordel, pourquoi j’arrive pas le Tape-Gloot ? Paraît que même les gamins de la Ville Aquatique y arrivent, et j’suis pas plus con qu’un autre. J’suis même pas si bourré, depuis le temps que j’suis là et que j’bois pas trop. J’en suis un peu désespéré, alors pour me remonter le moral, j’vais à la taverne ouverte qu’est tenue par les Aventuriers. Là, j’serai soutenu.
J’me pose sur le comptoir, et ce brave Gégé me sert une bière. J’sens le regard de Lou sur moi, j’arrive jamais à savoir s’il se rappelle ou pas. Faudra que j’repasse à mon stand un jour, d’ailleurs, ne serait-ce que pour surveiller mes stagiaires et m’assurer qu’ils continuent pas à piquer dans la caisse. D’un autre côté, j’aurais fait pareil à leur place, alors j’peux difficilement leur en vouloir. Enfin, si, ils devraient tricher mieux. Faut tout leur apprendre, putain.
« Plus fort que la bière, Gégé, t’as ?
- Oh, oui, sûr, j’te débarrasse de ça. »
Il attrape ma pinte, l’enfile cul sec. J’me demande s’il fait aussi les fonds de verre quand il passe entre les tables, mais à voir sa mine déjà un peu avachie, la réponse me semble assez évidente. Cela dit, il va pas tarder à avoir fini son service, alors finalement, il prend juste un peu d’avance pour la suite de la soirée, pas vrai ? Bref, il me pose un godet, un peu petit mais bien serré, et m’adresse un clin d’œil fastidieux.
« Tu m’en diras des nouvelles. Si avec ça, t’as pas le moral, c’est que… qu’il en faut davantage. Ouais. Voilà. »
Puis il file à l’autre bout du comptoir de fortune pour servir quelqu’un d’autre. J’examine, un peu méfiant, ce qu’il m’a servi, mais au final, on dirait simplement de la gnôle assez standard. Pas d’odeur particulière, semble pas avoir de couleur non plus… Bon, enfin, en alcools qui tapent, on peut lui faire confiance.
J’jette le contenu du verre au fond de ma gorge, et j’avale sans sourciller.
Puis je sourcille. J’me retiens de tousser, ça fait pas sérieux, mais j’sens bien le liquide couler le long de mon œsophage, avec une chaleur d’abord brûlante, puis simplement agréable. Et j’lâche une expiration bien chargée en alcool.
Vrai que ça requinque.
La guilde offre à boire, mais la guilde offre le divertissement. Et c’est un joyeux petit groupe d’aventuriers pas trop maladroit de la gratte et de la flute qui s’installent sur la petite scène de fortune de la guilde. J’ai bien cherché à gratter un cachet à leur offrir, mais Lou a été intraitable là-dessus. Le rapace. En dernier recours, j’ai réussi à négocier de boire à l’œil, ce que le premier groupe a peut-être trop respecté, vu qu’ils ont bien du mal à monter sur la scène à se tenir droit. Les « Lys cent-quatre » comme ils s’appellent, peut être en l'honneur de la première ministre, sont fort heureusement un groupe populaire maitrisant difficilement des musiques de comptoir qui ne nécessitent pas forcément de grandes qualités musicales. Les fausses notes font même partie de la partition. L’important, c’est d’avoir de l’entrain. Ce qu’ils ont. Le petit air guilleret du classique « L’an 999 » qu’on est justement en train de quitter émerge de la scène dans une cacophonie mélodique, couvrant même pas la voix braillarde du chanteur aventurier. Mais les cœurs des buveurs reprennent en cœur et l’ambiance s’installent définitivement. C’est beau une assemblée en communion avec son godet et ses voisins. Trop occupé à chanter et à trinquer, ça nous un peu de répit pour écluser le passif qui nous restait. Et quand c’est fait, on est plutôt serein. Chacun est à son poste, les futs sont rechargés. Alors, je m’accorde une petite pause, parce que le festival, c’est quand même grand.
J’avise justement mon pote Iarwenn qui se finit un shot fourni par ce bon vieux Gégé. Je m’approche, un godet à la main.
-Salut Frenn. Bon festival ?
-Plutôt, ouai. Je vois que les affaires tournent bien.
-Ah, ça, tout le monde veut boire à la table de la guilde.
-Vrai. Même la Première Ministre.
-T’as vu ? Bientôt, on va se faire remarquer.
-Si seulement…
-T’as déjà fait le tour des stands ?
-Ouai, pas toi ?
-Pas le temps. Trop de boulot. Mais je crois que je peux faire une pause. Pas vrai Gégé ?
-Ouai. Moi aussi. Je vais faire une pause. Il est où le bizarre ?
-Sous le comptoir.
-Merci.
-De rien Gégé.
-Je t’emmène, alors, Jack ?
-Ouai. On va où ?
-Au Tape-Gloot. Tu verras, c’est facile.
J'avisais la silhouette de celui que je reconnaissais trop bien, mon ami précieux que je voulais à tout prix rencontrer ce soir-là, mais qui m'avait fait faux-bon plus d'une fois. D'ailleurs, le voilà qui discutait avec un autre client et...
« - A-ah noon ! » m'exclamai-je en voyant les deux hommes quitter le bar, tandis que je venais de me faire servir un énième verre par un des employés du patron.
Je tentai bien de me relever, mais seulement pour m'affaler douloureusement sur le tabouret une seconde plus tard. Des ombres passèrent et puis plus rien : Jack avait disparu une fois de plus, emporté dans le festival. Pas de chance, mais j'espérais bien réussir à l'attraper une autre fois pour rediscuter de ce qu'il s'était passé dans les thermes ce matin-là. Étrange rencontre, étrange découverte et une intimité balnéaire plus que discutable.
Serrant ma main engourdie autour de ma pinte, je l'amenai difficilement jusqu'à ma bouche pour en prendre une petite gorgée, dont je laissais une bonne partie retourner dans le verre. Ah, ça devenait difficile à présent.
« - 'Zab-vez... boi j-ji zui Garbe.
- Ha ! Et moi je suis la Grande Prêtresse !
- Z-c'est pas b-vrai ?! Bous z'êdes-hik- pludôt dien gons-zervée gue t-trouve. »
Et poilue aussi peut-être, mais il fallait vivre avec son temps. Les femmes étaient maîtresses de leur corps et pouvaient tout à fait ne pas se raser. Après tout, il m'arrivait fréquemment de...
« - Bon, c'est la dernière fois qu'on vous sert madame.
- Hein, q-guoi ?! B-bourquoi ?!!
- Vous tenez à peine debout et il y a déjà bien assez de coma éthyliques dans les environs, » conclut l'homme, ou la femme, en désignant de l'index la rangée d'arbres qui jouxtait le stand et sous lesquels se trouvaient des cadavres d'hommes et de femmes alcoolisés.
J'hallucinais devant le spectacle, inquiète de l'inertie de la Garde face à un tel fléau... Ces gens ne pouvaient tout simplement pas dormir là : imaginez si quelqu'un leur marchait dessus par inadvertance ou, même pire, trébuchait sur leurs silhouettes endormies.
« - A-afvreuh...
- Allez hop, je récupère votre verre.
- M-meuh ma bia-ère... » râlai-je, impuissante, voyant le barman éloigner ma consommation malgré mes supplications.
Bon, peut-être qu'il avait raison et que je devais m'arrêter là. Toutefois affaiblie par cette désillusion, je fis demi-tour sur mon tabouret et me jetai au sol dans un geste dangereux pour lequel seule la chance me préserva d'une chute.
Avais-je fait le tour de tous les stands à présent ? Non, il en restait un, même si j'avais une impression de déjà-vu...
C'est avec une bourse assez maigre que Jin pesa à la va vite alors que c'est le boucan dans le Stand. Il ferme les yeux comme pour essayer d'évaluer combien de cristaux il pourrai y avoir en mettant son oreille à côté, secouant son porte-monnaie. Les maigres reste de sa dernière Prime feront peut-être sa soirée. Dans une musique très dansante, le Chasseur de Prime essaie de se faufiler tant bien que mal jusqu'au comptoir en évitant les gestes brusques qui frôlent son visage; des personnes à deux doigts de vomir, d'autres qui dansent comme si rien d'autre existait. Du mieux qu'il pu, il trouve enfin un tabouret.
Et bah putain, ils savent s'amuser ici.
- Hum, une bière. Pas trop corsée siouplaît, si ça sort du mauvais côté y'a des chances qu'on ne retrouve plus le comptoir.
Ne rote pas Jin, faut profiter de la soirée.
Le barman, intrigué, éxécute la commande puis glisse la chope intercepté aussitôt par notre Aventurier.
- Vous êtes du coin?
- Yup, mais j'suis nouveau dans la Guilde.
- Guilde? Ah...Aventurier hein...
- Sans dec'. Pas mal la bière.
- Pas corsée, du coup.
- Et c'est très bien.
Le regard de Jin se pose sur une jeune femme complètement ivre. Arquant un sourcil, il se tourne à nouveau vers le serveur.
- Elle a pas l'air bien la donzelle.
- Ouais, soit-disant une Garde, j'ai arrêté de la servir ou je vais me retrouver avec une personne dans le coma, pas le meilleur moment pour vendre.
- J'vois, elle a l'air d'avoir plus encaissée que distribuée.
- Comme vous dites. Mais, rassurez moi, vous n'êtes pas là pour faire la même chose j'espère?!
- Nope, comme je l'ai dis. J'suis nouveau.
Se tournant face au groupe de musiciens les deux bras posés et dos au comptoir, il se délecte de l'ambiance entre les joies, les rires, l'alcool et la danse.
Loin des criminels, proche de la population, Jin ne pu s'empêcher de laisser apparaître un léger rictus.
Luz s’était adressée au barman, une main posée sur sa sacoche d’ustensiles. Au regard méfiant qu’il lui renvoya, elle crut bon d’ajouter dans un grand sourire :
« Hé. Faites-donc comme chez vous. »
Il eut un geste exaspéré et vaguement blasé en direction du cadavre de jeune femme qui trônait à une extrémité du comptoir. Luz le remercia d’un léger hochement de tête et se rapprocha de la blonde affalée sur son tabouret. Elle ne s’était vraiment pas loupée… Combien de verres avait-elle donc bu ?! Luz grimaça, et son regard fit la navette avec l’arbre des « éprouvés ». Ces festivals étaient décidément source d’un peu trop d’enthousiasme chez certaines personnes !
Elle s’était accroupie à sa hauteur, les prunelles concernées et tâchant d’attirer une once de son attention. Elle jugea que ses capacités seraient de toute façon limitées pour résoudre ce type de problème… Elle sortit une petite feuille séchée de l’une de ses sacoches, et la tendit à celle qu’elle ignorait être Elina von Andrasil :
… Et cela lui permettra probablement de reboire à nouveau, songea-t-elle silencieusement, ne se leurrant absolument pas sur la continuité de cette affaire. Tout en se redressant, son regard agrippa la silhouette d’un jeune homme attablé à proximité. De son âge, approximativement, peut-être un Aventurier. Brun, yeux orangés. Elle lui adressa un sourire des plus charmants et se rapprocha à son tour du comptoir. Affable et tout à fait sociable, elle tenta un début de conversation enjoué :
Il était toujours plus utile de demander conseil à un client plutôt qu’à un professionnel. Lui ne tenterait pas de l’entourlouper. Et quitte à profiter de ce brin d’après-midi, autant se désaltérer la gorge…
Elle ne voyait réellement pas à mal dans cette proposition, désireuse de découvrir de nouvelles sources d’intérêt à chaque instant. Puisque cet homme était seul, autant nouer un bout de causette avant de devoir retourner aux trivialités de l’existence…
Dépité d’une nouvelle, énième défaite au Tape-Gloot, je retourne au Bal du Palais. J’ai vu que Jack avait perdu également, mais j’ai aussi remarqué le petit manège de son rival impromptu. Un vrai cœur d’or, ce Jack. J’comprends pas pourquoi j’ai pas réussi, cette fois. Pourtant, j’connais le pattern, en tout cas en partie, et sa logique. Je suis presque en pleine possession de mes moyens, vu que j’ai pas bu tant que ça, même avec le remontant de Gégé. Et le pouvoir de l’amitié n’a pas suffi.
Dois-je remettre en doute cette amitié ?
Je reconsidère ces possibilités, me demande à quel moment j’ai fait le mauvais choix pour ne pas réussir à faire un jeu accessible pourtant à des enfants. Je veux cette figurine, indéniablement.
Je m’attable au comptoir, et j’écoute d’une oreille distraite l’histoire d’un collègue à destination du public. Il raconte une de ses aventures, une anecdote cocasse, d’ailleurs, qu’il enjolive davantage à chaque fois qu’il l’explique. Résultat, on est maintenant arrivé à quelque chose d’assez improbable, mais de diablement marrant. En plus, suivant les gens qui écoutent, il change certains détails pour la rendre encore plus drôle.
« Hé, Gégé. Ton remontant n’a pas suffi. J’ai besoin d’un truc plus fort. »
Il a l’air complètement torché, mais je lis dans son regard une forme de sagesse qui le transcende. Il est là dans son élément, et pourra continuer jusqu’à la destruction du monde si nécessaire, je le sens clairement. Il acquiesce d’un air grave.
« Ce que je vais te proposer, peu de gens l’ont fait. Ou, en tout cas, peu l’ont fait et sont encore là pour en parler. »
Des abîmes du désespoir dans lequel je me trouve, je n’ai pas peur.
« Envoie, Gégé. »
Il me pose cinq verres, et les remplit à partir d’un ensemble de bouteilles que je suis incapable d’identifier.
« Cul sec. Sois fort. »
Je m’exécute, subjugué par son charisme d’ivrogne aguerri, un véritable maître en la matière.
Et quand je me lève pour retourner affronter ma némésis, tout tourne légèrement. Et ça empire.
- Eh ! J-ch'ui be-nu carr ele pad-tron...
- Je m'en fiche de vos explications vaseuses, nous ne vous servirons plus !
- Ah... Abah za c'est brai-ment dommagche...
- C-comment avez-vous eu ce verre... ?
- H-héhé. »
Je l'avais trouvé, pardi. Un homme qui s'était levé juste avant moi et qui n'avait pas terminé sa pinte ; évidemment, j'avais guetté la table jusqu'à être sûre qu'il ne reviendrait pas. Et puis je m'étais servi, cela aurait été dommage de gâcher du si bon alcool, non ? Très fameux en plus, un petit goût fruité...
Dommage qu'il dut partir si vite, dès lorsque le barman posa sa main dessus et l'arracha de mon emprise. Hébétée, je me retrouvais là, triste, sans savoir que faire, privée de mon précieux nectar. Cette interaction passée, toutefois, je me retournais pour voir si une autre choppe ne trônait pas à nouveau, abandonnée par son maître.
Et dévisageant le public du stand, je le reconnus. Mince alors ! Zahria, où était-elle ? Il était là ! Vite, mes notes, mes notes. Je les saisissais brusquement et, sans tenir compte de tous les mots écrits précédemment, gravais sa présence sur le papier.
« - Yrenn... Bi-rrren Did-rrani... et... est... ait ?... l-là. »
Parfait, du moins je croyais. Maintenant où était Zahria ?
...Et tiens, pourquoi devais-je la retrouver d'ailleurs ?
Quand j’arrive au Bal des Palais, je suis en pleine incertitude. J’ai certes vaincu le Tape-Gloot et récupéré un objet totalement pourri, inutile, que je vais planquer dans un placard pour ne pas avoir besoin de le voir… A moins que je ne décide de le défoncer avec une batte ? Juste pour le plaisir de lui écrase sa sale tête de gloot ? Nan, quand même, c’est pas mon style, de casser des objets utilitaires.
Mais, donc, l’incertitude, la remise en question. J’ai encore une fois échoué à mon propre stand, alors que j’avais tout pour gagner… à part peut-être un collègue qui ne soit pas totalement bourré. J’admets volontiers ne pas être au maximum de mes capacités, mais, tout de même, je n’étais pas au point de vomir sur le bord de la piste de course.
Nan, le problème, c’est de trouver quelqu’un de sobre. Et, on ne va pas se leurrer, à mesure que le festival avance, ça va devenir de plus en plus compliqué. Entre les gens qui sont clairement là pour se murger, et ceux qui se laissent contaminer par la bonne humeur ambiante… Quoi que, si tout le monde est torché, est-ce que ça me donne pas mes chances, même avec un binôme de merde ? Une idée à creuser, même si j’en ai d’autres.
J’croise le regard perpétuellement désapprobateur de Lou. Ouais, j’suis pas à mon stand, mais tout roule là-bas, t’inquiète, poto. Dans un coin, j’avise ma bonne copine Elina von Andrasil, pour qui j’ai eu la chance de bosser. Hé, p’tet qu’elle serait d’accord pour repasser une nuit torride tous les deux ? J’espère qu’elle aura un plus joli pyjama, cette fois. Nan, j’me doute déjà bien d’où j’vais finir. J’espère juste qu’elles seront pas trop crevées par toute l’activité du festoche.
Ouais, j’vais continuer mes promenades, j’pense. Clairement, on s’amuse, et ça m’fait du bien au moral. Puis Elina a l’air bien trop torché pour que j’me donne la peine de lui parler. Putain, ils doivent pas s’amuser des masses à la forteresse, pour qu’elle en arrive là.
« Un double, Nico. »
Il tangue carrément.
« Oh, Zyrene, c’toaaaa… J’ai bu seize bières, t’sais ? T’rends compte ? Même pas j’vomis, promiiiis… »
J’remarque une trace brunâtre sur le col de sa chemise. Et son haleine tuerait un chameau à trois mètres de choc éthylique.
« Bien sûr, Nico, on te croit tous.
- T’un vrai pote, copain… »
Ouais, j’aurais dû venir bosser ici, on s’amuse davantage.
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