La remarque qu’il adressa ensuite, lui arracha un sourire. Jin était une bonne personne, elle ne le connaissait pas mais son instinct le lui soufflait et elle se trompait rarement. Enfin, vint la question a laquelle elle aurait préféré ne pas répondre. Son regard se tourna un instant vers lui puis elle se remit à regarder droit devant.
- Ahah, une expédition comme une autre. Du moins, c’est ce que nous pensions. J’ai été intégré à l’escouade de Thépa et du capitaine. Quand nous sommes descendu… Il y avait une cité. Je veux dire une vraie cité. Avec ses maisons, ses boutiques, ses temples… Des gens avaient vécu ici… Mais comment ? Tout était plongé dans le noir. Et où étaient-ils ? Tout était luxueux. Quand la cité était habitée, cela devait être un endroit magnifique. Elle se redressa et s’étira. - Nous n’avons pas rencontré beaucoup de problème au début même si nous avions l’impression d’être suivit. Le premier obstacle à été un nid de tissenuit. Elles sont coriaces ces bêtes là. Nous avons été obligé de battre en retraite, ce qui n’était pas compliqué avec l’aide du pouvoir de Thépa. Sauf que quand nous nous sommes retrouvé presque à l’abri c’est une autre créature qui a croisé notre chemin. Je ne la connaissais pas. Mais elle était redoutable, elle a eut tout les tissenuits ainsi que le capitaine. Elle lui lança de nouveau un regard. - Nous l’avons soigné rassure toi. Enfin.. Il y avait des dizaines voire des centaines de ce genre de monstre et même ceux que nous connaissions… Ne l’était pas. Ils étaient différents… Plus redoutable. Nous avons dû quitter les lieux en urgences. Les communications avec l’extérieur étaient coupés, nous avons voulu dégager le terrain pour les troupes à venir mais c’était tout bonnement impossible. Ils étaient trop fort. Elle arrêta de parler un moment et se mordilla les lèvres. Tendant la main elle termina son verre d’une traite avant de reprendre. - Je savais que nous avions eut des pertes. C’est le lot quotidien de la garde. Nos frères tombent tout les jours et personne n’est jamais certain de retrouver son ami le lendemain. Mais quand nous avons survolté le champs de bataille… Homme et bête… C’était des montagnes de cadavre. Certains tentaient de s’enfuir, poursuivit par une horde entière parfois. Ils courraient avec l’espoir de leur échapper alors que d’en haut… Nous savions qu’ils n’avaient aucune chance. Nous ne pouvions pas les aider. Une vie vaut moins que trois tu comprends ? Passant ses mains derrière sa nuque elle enfouie son visage entre ses genoux. - De mémoire de garde… Je n’avais jamais vu ça. C’était un abattoir. Garde, aventurier, citoyen et même noble. Tous morts. Mon escouade à été l’une des dernières à quitter les lieux et je crois que l’entrée à été scellée. Personne n’a pu aller récupérer les corps. Ils sont toujours entrain de pourrir là-bas, sous terre. Ils sont restés dans cette cité…
D’un mouvement brusque mais aérien, elle se leva et prit une grande inspiration. De l’air, elle avait besoin d’air. Les images macabres défilaient dans son esprit comme un kaléidoscope qu’elle ne pouvait stopper. Après avoir passé une main faible sur son visage, elle recouvra son air impassible et son regard opalin se posa sur Jin. - C’est ça, la réalité de cette expédition. Tout ça pour qu’aucun mystère ne soit réellement résolu. Elle eut un rire nerveux puis tendit une main amicale. - Nous devrions rentrer. L’apitoiement n’avait que trop duré, il était temps qu’elle se ressaisisse. Demain, une nouvelle mission l’attendait.
Le bon équilibre? Est-ce que c'était la réponse qu'il cherchait? Une clé parmi tant d'autres ? Ou bien seulement un bon conseil qui pourrai se marier dans n'importe quel contexte? Dans tous les cas, ça lui fait l'effet d'une révélation, peut-être que faire moins de grabuge pendant ses affaires permettrait d'endormir un peu sa réputation, et lui permettra de garder une certaine pérennité pour son travail ainsi que garder la boutique. Oui, pourquoi pas. Mais l'envie de corriger ces criminels... Une envie, une pulsion, une addiction qui a sue s'installer dans le cœur du chasseur et ne peut s'empêcher de reproduire encore, encore et encore un traitement sadique à leur égard. Une satisfaction plus agréable que l’appât du gain, que la fortune même. Il s'en rendait compte, il l'acceptait. Maintenant il va devoir prendre des décisions, peut-être cette rencontre avec la garde confirme ce devoir. Il acquiesce de nouveau, gardant ses tourments pour lui. Quelle curieuse soirée.
Puis comme il le pensait, la question qu'il lui retourne la fit détourner du regard. La culpabilité l'envahit, mais va s’atténuer aussitôt lorsque cette dernière décide de témoigner son périple. Il savait que c'était une histoire plus longue que tout ce qu'elle a pu raconter depuis le début de leur échange. Il s'allonge sur le flanc, le coude posé dans le sable et Katon quant à lui grimpera sur sa jambe. Curieux comme d'habitude, Jin sait se taire lorsqu'il s'agit d'en apprendre plus. Une soif de connaissances, d'apprentissage, mais aussi de témoignages de personnes qu'il pourrait rencontrer comme ce soir. N'ayant aucun compagnon, en capitale ou bien ailleurs Jin passe même à la taverne pour s’abreuver, mais pas de l'alcool, non. Mais des histoires contées par de vieux hommes ayant le bagou nécessaire pour transporté n'importent qui dans les descriptions de leurs aventures, de leurs conquêtes, de femmes d'un soir, de bagarre de comptoir où même de leurs jeunes années de service à la garde.
Spectateur, il dissèque chacun des mots racontés par la jeune femme. Ô quelle témérité, quel courage et de dévotion pour sa patrie et son serment elle fait part. Cette expédition n'avait rien d'une mission lambda. Pourtant, elle était revenue de ce cauchemar. Jin a essayé tant bien que mal à se mettre à sa place. Savoir ce qu'il aurait fait, lui qui déteste fuir le combat. L'aurait-t-il fait quand même ? Sans doute. Elle fait mention d'une certaine Thépa. Jin conclut que malgré sa tendance à ne pas être de ceux qui se mélangent à un groupe, a toute de même un repère et une personne avec qui s'entretenir. Une personne très importante peut-être. Jin en a vu des massacres, il a fait également beaucoup de mal à beaucoup de gens qu'il estimait le mériter. Là, en l'occurrence, l'échelle de l'horreur qu'elle a passée dépassait son imagination. Alors il avait du mal à tenir le regard vers elle, mais malgré ça on pouvait voir dans ses prunelles flamboyantes, une profonde admiration. Peu de personnes peuvent prétendre regarder la mort dans les yeux et revenir en vie. Est-ce pour ça qu'elle a ce pressentiment? La mort lui a fait tirer une loterie, et elle aurait tiré le bon chiffre qui va reporter son ultime soupir à une autrefois? Mystère.
Elle conclut en se redressant à une vitesse qui ne laisse pas le chasseur indifférent. Elle paraissait grande, forte et inébranlable. Jin photographie ce moment et se jure de ne jamais l'oublier. Il saisit sa main gentiment proposée puis se relève avec Katon dans les mains.
- J'dois récupérer mes affaires avant.
Il s'en va récupérer son petit sac sans fond, remet son manteau et ses bottes puis rejoint la garde qui avait fait de même. Un dernier regard vers la lune, comme pour la remercier pour cet événement singulier et d'une rencontre agréable l'un pour l'autre, puis ils quittent la plage.
A présent sur le chemin, l'ambiance n'était quand même pas au beau fixe. En effet, ils se sont arrêté sur une note assez triste et Jin voyait bien que la situation n'allait pas s'améliorer. En regardant le Glooby sur son épaule, c'est là que lui vient une idée. Il prend un ton faussement alarmé et fouille dans son sac.
- Merde !
- Que se passe t-il ?
- J'ai oublié un truc. Roh, Katon m'embête, j'peux pas fouiller mon sac correctement...
Il le saisit des mains et le balance au visage du garde !
- Réflexe !
La limace finie sur le visage de la jeune femme et l'animal, apeuré, reste collé étouffant sa victime qui gesticule dans les sens. Le châtieur, effondré de rire, arrête le massacre en récupérant l'animal comme un bonbon collé à une chaussure. Après quoi la jeune garde reprit une respiration, haletante.
- Excusez-moi, c'était vraiment trop tentant.... Fiouh ! Tout va bien j'espère ?
Décidément, Jin aura eu l'âge d'un enfant de huit ans ce soir.
Contrairement à l’aller, elle ne rabattit pas sa capuche sur son front et se contenta de marcher aux côtés du brun. L’ambiance n’était pas à la fête, mais cela ne gênait pas Riley qui avait toujours eut l’habitude de marcher dans le silence. En vérité, pour elle tout était parfaitement normal. Ce qui ne semblait pas être le cas pour lui puisque après avoir fait mine de vouloir fouiller dans son sac il lui envoya Katon au visage. Sous la surprise, elle manqua de l’écraser d’un grand revers de main. Heureusement elle maîtrisait parfaitement ses gestes et s’arrêta à seulement quelques centimètres de la créature. De vie d’homme, personne n’avait jamais vu une telle expression sur le visage de la jeune femme. Les yeux écarquillés et louchant ostensiblement, sa bouche aurait sans doute pu former un « o » si la limace ne s’était pas scotché dessus.
Heureusement, elle fut vite libérée. Mais son visage dégoulinait encore de la substance visqueuse caractéristique des glooby. D’un geste vif mais puissant elle saisit le col de Jin et le traîna jusqu’à elle. De gré comme de force, il répondrait de ses actes ! Sa main droite vint passer sur son visage pour la débarrasser de ce qui s’y trouvait. En temps normal, Riley se serait contentait d’essuyer sa main sur n’importe quelle surface. Sauf que cette fois il avait cherché… Alors sans vergogne elle passa sa grande dextre sur la face de Jin, étalant inexorablement la substance dessus. Une fois que le tableau lui sembla suffisamment parfait, elle le relâcha et reprit les devant de leur petit groupe.
- Maintenant je vais bien. Lui asséna-t-elle avec un sourire moqueur. Et toi ?
Peut-être la pire et la meilleure idée du soir, conclut Jin après sa farce. Tout redevenait plus léger, plus fumigène. Toutes les choses du monde paraissaient moins importantes, et les démons de chacun furent balayé d'un simple geste. C'était sans doute les moments préférés du chasseur. Quelque chose qui vit exclusivement avec sa mère d'habitude. Lorsque cette dernière décide de faire du gâteau et que toute la farine se retrouve tapissée dans tous les murs de la boutique. Ou bien de la confiture, se retrouve à se disputer la baignoire de la salle de bain, intégralement devenu violet à cause des myrtilles, et rouges avec les fraises et oranges avec les abricots. Quand il essaie de se concentrer à rédiger son rapport de mission et que sa mère lui renverse l'encrier dans le visage. Des moments de "répit" que Jin estime essentiel, lorsqu'on fait un métier comme le sien. Mais là ce soir, ça sera avec une grande élitiste de la Garde. Si Jin ne parle pas comme un homme de salon, c'est tout simplement parce qu'il sait derrière les fonctions de chacun se cache un humain. Il a difficilement pu débusquer celui qui se cachait derrière Riley, mais maintenant il s'est retrouvé à jeter une limace visqueuse sur l'une des personnes les plus dangereuses au corps-à-corps qu'il a pu rencontrer.
Essayant de sauver les meubles, d'éloigner Katon de son visage. Riant de sa plaisanterie, en conquérant. Mais il ne tiendra cette expression que quelques secondes avant de se faire attraper par le col comme le ferait un garde qui attraperait un voleur. Il pousse un petit cri de surprise et son visage est maintenant à sa merci. Beurk. C'est froid, visqueux et collant. Effectivement, y avait rien à lui envier à la jeune et à son supplice. Le chasseur grimace, dégoûté par ce qu'on vient de lui déposer à la face, et laisse Riley reprendre la marche. Sa réponse sarcastique, le fit quand même sourire, puis rigoler. Jeux de mains, jeux de vilains. Bon joueur, il la rejoint en saisissant un chiffon pour se débarbouiller avec Katon, toujours sur l'épaule et moins... Traumatisé.
- D'accord, bien jouer. Mais, ça fais un partout !
Toujours grand gamin, et son légendaire manque de tact, il la bouscule légèrement et reste à ses côtés afin que le petit groupe nocturne demeure ensemble. Le chemin était linéaire, sans aucun virage, propres et sans déchet et longe la mer sur des centaines de mètres. Les rues étaient désertes. De l'autre côté de la rue, des maisons, des résidences et des bâtiments, on pouvait voir à travers les fenêtres les lumières de bougies ou de cristaux qui scintillaient comme des lucioles à travers la ville. À un point qu'un dôme de lumière entouré les habitations, mais on voyait moins le ciel cela dit. Riley, Jin, et Katon gardèrent le silence sur la route. Mais dans un bel état d'esprit, un peu comme pour ne pas bousculer le silence nocturne qui règne en maître dans ce bas monde. Une marche qui amenait presque à la méditation, à la détente. Le châtieur ardent se délectait de cette régénération mentale comme physique. Car demain, il va devoir traquer, chasser et sans doute se battre. Au loin, l'aventurier aperçoit une structure, qui se démarquait des autres, des tours, des bannières et des gardes en surveillance. Instinctivement il s'arrête aussitôt, comme par appréhension d'avancer davantage. Il pose ses yeux sur cette bâtisse alors, c'est ici chez elle. Son foyer. longuement comme pour photographier le lieu. Peut-être qu'il aura l'occasion d'y aller, engagé pour la capture d'un criminel. Va savoir. Au fond de lui, il espérait retrouver Riley à ce moment. Il prend une grande inspiration et se tourne vers son vis-à-vis.
- Bon, c'est là qu'on se sépare on dirai.
Dans un halo de lumière, la lune éclaire le duo dans une symétrie parfaite. L'Éclat flamboyant d'un côté, les fumées obscures de l'autre. Un regard brûlant d'un côté, glacial de l'autre. Jin fronce les sourcils pour se blinder car n'aime pas dire au revoir et pose une main amicale sur son épaule.
- A un d'ses jours. Et... Si il t'arrive d'avoir un coup de mou... Essaie de repenser à cette nuit où tu n'as fais que faire des bêtises avec une tête brûlée et un Glooby.
Jin tourna les talons. Et quelques mètres plus loin il se retourne et continue de marcher en reculant, la main levée.
- Tu vas y arriver, Riley ! Tu es comme un poisson dans l'eau... Tu n'peux pas te noyer ! Ha !
La paume vers le ciel, une boule de feu se trouve propulsée dans les airs et explose en éclats. Katon couine, l'aventurier rigole et refait de nouveau un salue militaire qu'il avait fait lorsqu'il s'était présenté au début, au garde-à-vous, dans une posture très maladroite et caricaturale, comme d'habitude. Puis il s'éloigne, et sa silhouette devient de plus en plus petite.
Puis ils reprirent la route. Tout se passa en silence pour le plus grand plaisir de la garde. Dans la nuit, sous les cristaux de lumière, leurs ombres gigantesques dansaient une drôle de parade, ondulant au gré des illuminations vacillantes. Le silence n’était brisé que par le sons de leurs pas sur le sol. C’était agréable de marcher aux côtés de quelqu’un d’appréciable. Cela faisait longtemps que ça ne lui était pas arrivé. Sans avoir besoin de combler un vide, de réfléchir à ce silence que tout le monde trouvait d'habitude gênant. Non, ils avançaient simplement en appréciant cet instant tel qu’il leur était offert.
Au bout de quelques minutes de marche, ils tombèrent enfin sur la caserne. Le regard opalin de la jeune femme passa sur la porte, puis sur la sentinelle à moitié endormis à l’entrée. Encore un qui n’avait pas de mal à s’endormir. « Chanceux » pensa-t-elle dans un petit sourire en coin tout juste perceptible. L’aventurier prit un air mécontent, sourcils froncés. Elle ne comprenait pas pourquoi, tout comme il ne devait pas comprendre ses airs neutres. Chacun d’eux avaient ses petits défauts et ses particularités après tout. Puis il vint poser une main amicale sur son épaule et elle en fit de même. D’égal à égal.
- J’y penserais. Prend soin de toi, Jin.Dit-elle simplement avant de le laisser s’en aller. Pour sa part, elle le regarda s’enfoncer dans l’obscurité. C’était un beau spectacle d’une certaine façon et elle avait la sensation qu’il fallait qu’elle regarde. Comme pour lui donner raison, il se retourna et lui lança un encouragement. Cachée par la pénombre elle rit mais ne répondit pas. Non, déjà, la sentinelle commençait à s’éveiller. Il était temps pour elle de retrouver son dortoir et sa vie. Cette parenthèse lui avait fait du bien et c’est le pas plus léger qu’elle regagna sa chambrée, où Thépa ronflait encore allègrement. « Certaines choses ne changeront jamais » pensa-t-elle simplement.
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