"Capitaine du courrier pour vous."
"Merci Attok, posez ça sur mon bureau."
Répondant négligemment au page qui venait d'entrer timidement dans son bureau, Yuduar indiqua l'emplacement désiré d'un geste de main sans même lever le nez du dossier qu'il était entrain de lire. Surement une autre missive de la Capitale, de la Commission même ça se trouve, ou autre chose dans ces eaux là. Sommes toutes rien de bien particulièrement pressant qu'on se le dise. La lecture sur laquelle il était actuellement penché traitait des affaires des brigands dans la région éloignée de l'Est du Royaume. Malgré les renforts envoyés sur place le calme ne semblait pas revenir, au contraire même la vindicte des malfrats ne faisaient que grandir. A croire qu'ils étaient entrain de s'empêtrer dans une toile bien plus grande que prévue et qu'ils ne faisaient qu'attiser les foudres d'un réseau secret. il allait devoir trouver une solution pour remédier à cette hémorragie le plus rapidement possible sans quoi le mécontentement de la population ne manquerait pas de tarder à s'amasser devant sa porte et devant celle de la Gouverneure.
Perdu dans ses pensées, les minutes s'écoulèrent avec perplexité jusqu'à le mener sur le crépuscule d'une agréable journée de saison douce. Derrière lui, la fenêtre entrouverte laissait passer un léger vent frais qui lui caressait la nuque avec frisson, portant de doucereuses odeurs issues des fourneaux du Bastion. Pain, légumes en cuisson, viandes rôties, les petits plats se faisaient placer dans les grands afin de créer le meilleur repas possible aux hommes et femmes du Régiment Al Rakija. Le Capitaine se frotta le front, plissant les yeux de fatigue et réajusta son bandeau par la même occasion. Une bouffée d'air, étirement sur le pouce, craquement de vertèbres. Encore quelques heures de plus et des racines allaient apparaitre sur son noble fessier vissé à sa chaise de bureau, pour sûr. Mais afin de contrer le sort il se saisit de cette pensée et se leva pour faire quelques cents pas sans grand but dans son office. Quelques caresses à Hernando, son ribec blanc entrain de roupiller sur son perchoir, un coup d'oeil jeté sur les plantes au milieu desquelles Manzana, son glooby, était entrain de vivre sa meilleure vie, puis un sourire passager à son regard tombé sur l'un des dessins récemment envoyé par sa fille, Yanesh. Il allait bientôt retrouver sa petite famille à la Ville-Aquatique, encore quelques jours et la fin de semaine lui ouvrirait les bras pour un repos plus que salvateur. Une bonne occasion de quitter ses quartiers de Capitaine que voila. Le terrain lui manquait toujours aussi horriblement mais il devrait pouvoir se permettre de reprendre du service sans trop craindre de croiser un ou deux visages trop familiers dans la foule du Grand-Port. Après tout voila maintenant plusieurs mois que ses cavalcades avec Astrid au dernier Solstice avait crées plus de bruit que prévu initialement. Nouveau sourire sur son visage affable à la pensée de l'excentrique citoyenne qui masquait la réelle existence du feu Commandant de la Garde Royale.
Jouant de ses bras et attrapant ses coudes pour mieux les étirer, Yuduar s'en allait attraper son cache-poussière au moment où ses yeux noisettes tombèrent sur le courrier amené plus tôt. Peut-être garder ça pour demain? Ou cette nuit si le sommeil le fuyait une fois de plus. Le paquet avait l'air important, comme une boite enveloppée dans un épais papier aux tons ocres. Pas le genre de la maison qu'était la Garde. Sourcil froncés, regard interrogateur, le gradé reposa son vêtement là où il l'avait précédemment trouvé pour saisir l'objet de ses interrogations soudaines. qui aurait bien pus lui envoyer un truc pareil au juste? Sa famille justement? Etrange pensée, il allait les rejoindre d'ici peu après tout. Un camarade de la Capitale? Autre Garde? Aventuriers? Peut-être bien Kosei qui voulait se rappeler à sa bonne mémoire maintenant que la géographie leur était plus favorable pour de futures rencontres. N'arrivant pas à contenir sa curiosité, le Capitaine se saisit de la boite et se retrouva séant sur le siège qu'il avait quitté un peu plus tôt, faisant taire sa précédent détermination à quitter son bureau pour se remplir la panse avec ses hommes.
Un bruit à la porte.
"Oui?"
"Capitaine, le repas est annoncé."
"Euh... Je prendrais à manger plus tard, ou pas, j'arrive, enfin je termine juste une lecture."
"Vous voulez que je vous remonte quelque chose?"
"Non merci beaucoup Attok, vous pouvez disposer et prendre votre soirée, pas de soucis."
A peine entrouverte, pour laisser passer le mince filet de voix du page, la porte se referma sans plus de cérémonie pour à nouveau laisser Yuduar seul avec ses énigmes. Comme pour l'inviter à ne pas perdre plus de temps que nécessaire sur cette affaire, son ventre pris la parole à travers un gargouillement suffisamment sonore pour être remarqué. Il reposa le paquet. Puis fronça à nouveau des sourcils et le récupéra entre ses mains. L'agita à la manière d'un enfant devant un cadeau inconnu puis le reposa encore. Puis finalement, ayant tranché quant à sa décision finale, il entreprit de dénouer le fin cordage qui reliait le tout pour ensuite déplier le papier entourant la boite pleine de mystère. Simple et sans fioritures aucunes, un banal coffret de bois blanc de mauvaise qualité. Un brin déçu il soupira avec une moue désabusée puis rapprocha le tout de lui pour en voir le contenu une bonne fois pour toute. Il dut légèrement forcer sur les côtés pour l'ouvrir et sa surprise n'en fut que plus grande une fois l'action faite.
"Qu'est-ce que..."
Une paire d'anneaux, de bonnes tailles, dorés et parsemés de gravures étranges semblables à un enchevêtrement de runes et de représentations oniriques. Le tout totalement étranger pour le maigre savoir que possédait le Capitaine en la matière. Il regarda un à un les accessoires, tentant de voir si ils pouvaient s'assembler ou peut être trouver un semblant de continuité sur le travail d'orfèvre à leur surface, mais rien n'y fait, ils étaient identiques en tout point. Puis cette circonférence... Ils étaient destinés à être portés où au juste? Aux bras? Chevilles? Ou juste servir de décoration?
Le pire c'est qu'ils reposaient sur un lit de paille défraichi sans l'ombre d'autre chose en plus pour expliquer leur origine mystérieuse. Qui diable aurait pus lui envoyer de pareils colifichets? Laissant la paire d'anneaux sur son bureau, il attrapa la boite d'un tout pour renverser l’entièreté du contenu de la paille sur ce qu'il restait des dossiers qu'il consultait plus tôt. Avec un peu de chance, un détail qui lui aurait échappé plus tôt allait se terrer quelque part là-dedans.
"Bonne pioche!"
Calée au fond, sous le lit de paille, une lettre tomba d'abord sur le plan de travail de Yuduar pour ensuite choir à même le sol. Il tenta de la rattraper, en vain, mais tout content qu'il était de mener pareille chasse au trésor il n'hésita pas l'ombre d'un instant à ployer le genoux pour lui mettre la main dessus. Quelle idée d'avoir planqué ça tout au fond aussi, quiconque avait envoyé ça aurait très bien pus joindre la lettre en évidence sur les anneaux voir même en la séparant du boitier complétement! Mais ces questions seront à remettre pour une autre fois car c'est avec un grand sourire que le Capitaine se mis à ouvrir l'enveloppe. Ses yeux de gamins brillants d'excitation, le mystère l'appelait à découvrir l'identité de la mystérieuse personne derrière ce présent. Une page, deux pages, trois pages. Bordel c'est long en plus. Il existe quelqu'un dans le Royaume déterminé à lui écrire autant, à lui qui est connu pour ne pas tant aimer la lecture que ça? Mais une fois de plus, voila là des questions pour plus tard.
Cher Yuduar,
J'espère que ce présent arrivera jusqu'à toi malgré son tumultueux voyage à travers notre Royaume. Je ne sais pas quel homme tu es devenu mais je me doute qu'au moment où tu lis ces lignes, plusieurs questions doivent t'assaillir. Qui je suis, qu'est-ce que c'est, d'où ça sort, j'en passe et des meilleurs. Toutes aussi légitimes les unes que les autres, je vais essayer de faire court et concis mais cela n'as jamais été mon plus grand point fort, j'espère que tu saura excuser mes digressions passagère.
Voila maintenant plusieurs mois que j'ai eu vent de ton existence et quelle n'as pas été ma surprise en apprenant que tu est devenu Capitaine de la Garde! Une voyante me l'aurait prédit il y a vingt ans de cela que je ne l'aurais pas crue! Enfin, vingt ans. Plutôt trente maintenant peut-être. Plus même? Les années passent bien vite et se ressemblent sans jamais créer de lassitude pour autant, n'est-ce pas? Mais toujours est-il qu'au moment où j'ai croisé ton nom, mon coeur n'as fait qu'un bond. Je ne savais pas vraiment comment te contacter, si je devais venir en personne ou plutôt rester à distance. Comme je l'ai fait là finalement, tu l'as surement deviné vu que tu es entrain de lire ma lettre et que je ne suis pas là. Enfin, ne suis-je vraiment pas là? Non je déconne, je ne me cache pas derrière je ne sais quel meuble qui pourrait potentiellement t'entourer. Bref. Je sais que ma lettre peut sembler tardive car j'ai depuis appris que tu n'es passé Capitaine il y a peu mais depuis maintenant quelques années. C'est plus ta mutation au Grand-Port que j'ai récemment découvert. Au vue de ton grade et surement de l'importance qui vas avec, je me suis dit que tu saurais trouver ces artefacts à ton goût. Je me rappel encore de toi gamin entrain de sauter dans tout les sens avec ton frère sur les talons. Mais on y reviendra plus tard.
J'ai tant de choses à te raconter et qu'un nombre limité de pages pour le faire! Peut-être qu'un jour nos chemins se croiserons pour une plus grande discussion? Qui sais de quoi l'avenir est fait. Ces anneaux que tu as surement dût trouver dans la même boite où tu as trouvée ma lettre, sont une trouvaille faite durant l'un de mes voyages. Je ne vais pas m'étendre sur le sujet, il y aurait de quoi en faire un bouquin entier. "Les Anneaux de la Derviche Céleste" ça en jette non? T'adorais les noms à rallonge comme ça, qui sonnait comme les histoires de légende du Héros de la Lumière et compagnie! Bon en tout cas son ancienne propriétaire n'en a plus l'usage aujourd'hui et je me suis dit que ça pourrait faire un joli cadeau. Tant pour nos "retrouvailles" que pour fêter toute ton ascension et ta mutation et tout ce qui vas avec. T'es devenu quelqu'un de sacrément important maintenant! Ah oui, ce qu'ils font. En soit c'est pas bien compliqué, suffit de les porter aux chevilles et tu pourras "sauter sur l'air". Oui ça a l'air con dit comme ça mais c'est vraiment plus utile qu'il n'y parait en vrai. Et avec un brin d'imagination y'a de quoi en faire un sacré avantage crois moi! Pour les avoir vue plus d'une fois en action, je me suis fait couper la chique plus de fois que ce que j'aimerais admettre! Puis j'ai tellement le souvenir de toi entrain de sauter partout, ouais je me répète désolé.
Bon maintenant que tu sais "Pourquoi" et que j'ai vite fait expliqué "Qu'est-ce que c'est" j'imagine que ce qu'il reste c'est surtout le "Qui" non? J'ai du mal à savoir comment je vais amener ça, c'est que j'ai jamais été très doué avec les mots et que j'ai pas envie de créer un nouveau bordel dans la famille. Je me prénomme Cesario K. Almeida, même si on me connais plus sous un autre patronyme. Shiza Le Vagabond. J'sais pas si ça vas te dire grand chose mais on sais jamais, je laisse ça là. Je me doute que tu dois avoir le regard écarquillé en lisant ça. J'imagine que ta mère ne t'as jamais parlé d'un quelconque oncle de quoi que ce soit dans la famille et franchement à sa place j'aurais surement fait la même chose. Bref, le passé est compliqué, lui aussi mériterait bien qu'on lui écrive un bouquin tient. Qui je suis donc? Et bien ton oncle, comme je viens de dire. Alors pourquoi maintenant? Pourquoi t'as jamais entendu parler de moi avant? Pourquoi je t'ai jamais contacté par le passé? Tout ça c'est long à expliquer en quelques mots seulement. Je t'ai connu gamin, je te voyais en douce à la Ville-Aquatique quand je trainais dans le secteur, toujours entrain de taper des pointes au milieu des étales et de faire je sais pas trop quelle connerie. Tu dois peut-être bien tenir ça de moi, ça m'étonnerais pas. Ou de ton père, il était pas triste lui non plus. Bref. M'étonnerais que tu te rappel à quoi je ressemble et franchement ça fait tellement longtemps que j'ai pas croisé mon reflet dans un miroir que ce serais même difficile pour moi de faire une description. J'avais bien essayé de me rapprocher quand t'étais mioche mais je sais pas par quel mystère ta mère avait réussi à me mettre le grappin dessus avant même que je fasse le premier pas. Et tu la connais hein, la négociation c'est pas son point fort. Surtout quand il s'agit de sa progéniture. Du coup je suis retourné battre les chemins. Parait que t'as été Aventurier aussi? Mon boulot c'est a peu prêt ça, en différent je dirais. En plus compliqué. Bref, c'est en bossant dans le Sud du pays que j'ai entendu parler de toi. T'imagines pas ma surprise quand j'ai entendu des trouffions parler des "ordres du Capitaine Al Rakija" ah! Sur le coup je me suis dit que c'était peut-être le vieux Ylies mais bon à l'âge qu'il doit avoir il est surement à la retraite le petit père. J'ai continué à tendre l'oreille l'air de rien, glaner quelques informations, le reste était cousu de fil blanc. J'voulais pas mettre les pieds dans la soupe et directement aller leur demander qui t'étais, j'allais passer pour un gars louche. Surtout qu'ils avaient l'air sacrément occupés. Ouais enfin bref, je m'égare encore.
Tout ça doit te sembler sacrément soudain j'imagine. Un oncle sorti de nul part qui t'envoie des anneaux pour sauter sur l'air, je t'accorde que ça a ni queue ni tête. Mais avec le temps qui passe j'ai tendance à m'arrêter pour regarder par-dessus mon épaule avec un brin d'amertume et de regrets. T'en a surement pas grand chose à carrer de mes états d'âmes vue que j'ai disparu de la circulation y'a des années je veux dire. Mais j'aurais aimé te connaitre, te voir grandir, être un peu plus proche de vous. De ma soeur aussi. Si je lui envoi un quelque chose, coup sûr que ça terminera au feu sans plus de réflexion. Elle à pas dut s'adoucir avec l'âge on vas pas se mentir. Alors pourquoi maintenant? Parceque j'en savais pas plus que toi avant de lire cette lettre, voila pourquoi. J'ai essayé de raccrocher les informations avec ce que j'avais sous la main, j'ai appris que t'avais des enfants toi aussi depuis le temps. Mes hommages à madame du coup, si tant est qu'elle soit pas entrain de lire par-dessus ton épaule ou quoi.
Et j'arrive à la fin du papier. J'ai l'impression d'avoir lâché un sacré paquet de connerie un peu n'importe comment, je sais vraiment pas quoi dire alors qu'il y a des heures, des années à rattraper. Peut-être que t'en auras rien a faire toi aussi, surement que ta vie à déjà suffisamment son lot de surprise pour pas avoir a rajouter ça au compteur. Mais si jamais t'as aussi envie qu'on trinque tout les deux un de ces quatre, je te laisse essayer de mettre la main sur Shiza Le Vagabond. Si t'es moitié aussi doué que ce que j'ai vu dans le fond de tes yeux quand t'étais gamin, je suis sûr que tu réussiras à m'attraper même si c'est pas la tâche la plus facile du monde. Et bien sûr si tu peux passer ça à ton frère, j'ai rien pour lui je suis désolé mais j'ai pas trouvé d'info le concernant. Le petit Shoânn est surement devenu un sacré bonhomme lui aussi j'suis sûr!
Ton Oncle, Cesario K. Almeida.
Première lecture. Seconde lecture. Troisième lecture.
Un regard vers les anneaux, leurs gravures étranges, leurs runes sans aucuns sens. Il les prend, les tournes entre ses mains, regarde la lettre, les repose sur le bureau. L'esprit embrumé, les yeux humides, la bouche entrouverte de stupéfaction. Cesario Almeida. Ce nom résonne dans son crâne sans l'ombre d'une image, sans l'ombre d'un savoir. Juste le vide l'ignorance la plus complète malgré le récit de la lettre. Une larme isolée coule sur sa joue, s'échoue dans sa barbe, son sillon vite effacée d'une manche vive et précise. Cesario Almeida. Son Oncle. Shiza le Vagabond.
Soudainement, un éclat de rire au dehors le tire de sa torpeur. Il fait nuit, sa fenêtre toujours ouverte est le théâtre du vent frais et incertain porté par les courants marins au large du Grand-Port. Odeur iodée en fusion avec les senteurs puissantes du bois qui brûle dans les âtres des quartiers des gardes en dessous. Un autre éclat de rire, son des choppes qui s'entrechoquent, des gars qui doivent surement être entrains de savourer leur soirée un peu plus bas. Yuduar porte ses mains à ses tempes, les massant avec lenteur et intensité. Il ne sais pas quoi penser de tout ça. A qui pourrait-il en parler? A ses parents? A un ami de confiance? Qui, où, comment? Si lui devait aussi regarder par-dessus son épaule comme l'as fait son oncle, qu'y verrait t-il? Les fantômes d'un passé heureux et révolu? Non, il secoue du chef, chassant ses idées sombres. Son présent est d'une lumière différente certes mais d'une lumière toute aussi bienfaitrice que l'as été son passé. Il renifle, ramasse la paille pour la jeter dans la boite sans y prêter plus d'attention que ça, comme guidé par des automatismes plus que par sa propre volonté. Un énième regard vers la lettre. Il n'arrive pas à mettre les mots sur ce qui le bouleverse tant, comme si la réelle émotion qui lui enserrait la poitrine n'avait de cesse de lui filer entre les doigts. Machinalement il ouvre un tiroir pour en sortir une flasque à la devanture frappée de ses initiales, la débouchonne d'un geste vif pour laisser son alcool puissant réchauffer sa bouche, sa gorge, son estomac.
*Ressaisis toi.*
Ces deux mots en boucle, formant une cadence presque aussi militaire que son quotidien. Un tiraillement au coeur, toujours présent. Une simple lettre pourtant, d'un oncle inconnu. Mais pour un Al Rakija, la famille est sacrée. Du moins il le pensait. Non, il en est certain en ce qui le concerne. Le visage de sa mère apparait dans ses pensées, douce, heureuse de voir son fils heureux et épanoui malgré les épreuves.
Un bruit à la porte.
"Capitaine, je vous ai apporté un plateau..."
La petite voix de Attok, la clanche se tourne et la porte s'ouvre pour laisser apparaitre la tête blonde et son regard fuyant d'un trop plein de politesse et de respect pour l'homme devant lui. Surpris par cette apparition inattendue, Yuduar hoquette en portant la main à sa bouche face à un relent acide. La faim est effectivement présente, peut-être qu'un bon repas chaud saura le remettre sur les rails.
"Merci, je... Il est tard en effet, je n'ai pas vue le temps passer" répondit Yuduar en tâchant de récupérer le sourire solaire qu'est normalement le sien.
"Madame Prêth à été surprise de pas vous voir pour la surprise du chef."
"Mademoiselle Prêth, si elle t'entendais..."
"Oui, Mademoiselle Prêth, désolé Capitaine."
Yuduar ria de bon coeur "T'en fait pas allons, appel là Lieutenant et comme ça t'es sûr de pas te tromper non? Puis y'a que nous deux là donc pas de soucis?" conclut-il avec un petit clin d'oeil malicieux.
Le page releva le menton et glissa un léger sourire amusé. Yuduar le congédia en lui rappelant qu'il avait désormais ordre de prendre sa soirée et de profiter un peu du temps de relâche plutôt que de "perdre son temps à venir s'occuper de lui". Ces quelques mots échangés, cette responsabilité de Capitaine et de meneur d'homme, ce repas chaud désormais devant lui avec le fumet prononcé du bouillon qui l'attendais, ces éléments suffirent à chasser les ténèbres qui dansaient autour de lui quelques instants auparavant.
Balayant son bureau du regard, la douceur d'un sourire se dessina à nouveau sur son visage. Nouveaux éclats de rire dehors. Nouveau courant d'air.
Dernier regard sur la lettre qu'il plie ensuite pour la ranger dans l'un de ses tiroirs.
Une nouvelle tête dans sa famille, n'est-ce pas après tout le seul bonheur qui se trouvait devant lui en cette soirée? Qu'importe le reste.
Une aventure à faire au passé avec un oncle à rencontrer au futur.