L’important dans une élection, c’est de n’oublier personne. Certes, une grande majorité des membres de la guilde des aventuriers passent par la capitale, il y en a qui ne fréquente pas la ville aux milliers de bar ; et c’est bien dommage pour eux. Quand d’autres candidats n’ont que faire de cette petite partie de l’électorat et préfère se concentrer sur le gros des aventuriers à convaincre, il y a des chics types comme moi qui pensons global. Etre le candidat de tous les aventuriers, ce n’est pas que des mots. C’est une réalité qu’il faut mettre en pratique. Je sais que Camomille, la candidate des hôtes et hôtesses de la guilde a organisé des rencontres aux villages perchés et pour ne pas se marcher sur les pieds et bénéficier d’un petit séjour sans devoir subir la pression des autres candidats, j’ai privilégié le grand port. D’abord, parce que Lou Trovnik m’y a envoyé pour un boulot. Parce que même en campagne, il faut continuer à bosser et même si Lou est un concurrent, c’est sûrement le dernier à faire passer l’élection avant le boulot. Il a des archives à mettre à jour.

Mon contact sur place est, vous vous en doutez sûrement, Yoponsa Pelcan, hôtesse des bureaux locaux de la guilde au Grand Port. C’est mon principal contact quand j’ai des boulots dans le coin et faut dire qu’elle a petit quelque chose charmant qui ne laisse personne indifférent. Je préfère pas trop en parler, parce qu’après, des gens vont commencer à déformer ou répéter mes propos ailleurs et un jour, ça va m’embarrasser. N’est ce pas Damoiseau ? Bref. Je l’ai informé de ma venue et elle s’est mis en tête d’organiser un banquet des membres locaux de la guilde pour, dans un premier temps, permettre à chacun de rencontrer tous le monde ; parce qu’avec les départs et les arrivés, ça brasse quand même pas mal ; et dans un second temps, me présenter à un maximum de monde et récolter des signatures. Je vous vois tout de suite venir : « Ah bah d’accord ! On dilapide l’argent du contribuable pour s’enfiler des petits fours et boire des alcools raffinés ! Elle est belle la guilde ! ».

Non. Pas du tout.

L’événement est financé dans les règles. Il y a un budget événementiel à consommer au grand port et ce petit banquet rentre parfaitement dans cette optique. C’est le mot banquet qui vous fait tiquer, je suis sûr. On va davantage parler de repas commun. On est pas dans le faste et l’opulence. Je laisse ça à des gens beaucoup plus déraisonnable. Outre le budget événementiel, les candidats ont quelques subsides offerts par la guilde dans le cadre de la campagne, mais tout doit être tracé. Normalement, c’est Trovnik qui fait les comptes de campagne, mais comme il est aussi candidat, ça a interrogé du monde. Puis, on s’est rappelé que c’était Trovnik et qu’il préférait se trancher les veines plutôt que de faire une erreur sur les centièmes de cristaux. Enfin, j’ai quelques économies. Faut bien que ça serve de temps en temps, mes différents boulots rapportent justement pour ce genre d’occasion. Bref, elle s’occupe de tout avant même que j’arrive et je me dois de la retrouver après en avoir fini avec mon boulot, consistant à vérifier la solvabilité d’un riche marchand du grand port. Oui. Vérifier la solvabilité d’un type riche. Ce n’est pas aberrant, c’est la procédure. Et les procédures, c’est important de les respecter, sinon, c’est faire pencher notre société vers le gouffre de la déliquescence.

Et ça, on veut pas.

Rendez-vous donné devant une boutique d’accessoire féminin, donc. Choix étonnant, surtout qu’en jetant un regard à travers la vitre, je suis surpris de voir des choses très féminines, mais pas forcément très accessoires, si vous voyez ce que je veux dire. Je repasse dans ma tête tous les messages de Yoponsa pour chercher une signification cachée dans tout ça, mais je ne vois pas. J’avise aussi l’autre type avec son gosse. Comme l’a dit le narrateur, je sais bien que je dois rencontrer quelqu’un qui contribue grandement au repas, parait-il. Mais il se produit toujours cette scénette ou chacun sait qu’il a quelque chose à voir avec l’autre, mais personne n’ose faire le premier pas, parce qu’on pourrait se tromper, dans le doute. Et c’est quand même un peu ballot. Et puis, ça coûte pas grand-chose d’attendre notre connaissance mutuelle pour commencer la conversation non sans lâcher le fameux « Ah ? Mais c’était vous que je devais rencontrer ! J’hésitais… mais… j’étais pas sûr. Je vous ai bien vu ! ». Un classique.

D’habitude, je suis pas comme ça. C’est juste que je suis perturbé par la météo. Il est vrai qu’on peut tout avoir un peu n’importe quand, mais se prendre succinctement des choses comme de la neige, de la grêle, du brouillage et de l’orage, on peut vous dire que c’est pas banal. Et les quelques personnes qui passent dans le coin en sont tout aussi désarçonner, surtout que ça semble localiser de notre côté. J’avise un moustachu regardant le ciel, fronçant ses épais sourcils comme pour deviner un dieu facétieux jouant avec un arrosoir.

-Sale temps, hein ?
-Qu’est ce que vous me voulez ?
-Moi ? Rien, pour…
-C’est mon argent que vous voulez ? Brigand !
-Mais pas du tout.
-Laissez moi ou j’appelle la garde !
-tout doux ! Je vous laisse.
-Délinquant.

Il s’en va sous mon regard perplexe. J’en vois pas souvent des types pareils. Comme si j’allais l’agresser. J’en ai croisé du monde et tout le monde m’aime bien. Il doit avoir un problème dans sa vie. Je lui pardonne, parce que c’est tout à fait Whiskeyjack, ça. Je finis par me retourner vers l’inconnu qui n’est pas si inconnu parce qu’on est censé se rencontrer.

-Excusez moi ? Vous attendez Yoponsa, n’est ce pas ? Je l’attends aussi. Je suis Whiskeyjack Callahan.

Je tends ma main ferme dans sa direction. Il a comme un mouvement de recul qui me surprend un peu, mais ce qui m’étonne le plus, c’est que le gamin sur ses épaules me regarde avec l’expression typique de l’enfant sur le point de pleurer. Je sais bien que j’ai une grosse moustache, c’est pas pour autant d’en faire tout un foin. Il a sanglot.

-Et bah mon petit gars. Il y a quelque chose qui ne va pas ? Tu veux qu’on te dise bonjour ?

Je lui montre ma paume de main pour qu’il puisse taper dedans comme le fond les gamins de mes voisins. Malheureusement, ça n’a pas le don de le calmer. Pire.

Il ouvre les vannes.

Je vous avoue, je me sens pas très bien.

Faire pleurer les gosses, ça m’arrive pas souvent. Je suis plutôt du genre à privilégier la pédagogie plutôt que de gronder à la moindre bêtise. C’est plus c’est petit, plus c’est difficile d’appréhender les réactions et de se foirer ; jusque là, rien n’anormal. C’est beaucoup plus la panique quand c’est le père qui se met à geindre. Là. Comme ça. Sans raison. Sans raison apparente, vous allez me dire, mais moi, j’ai pas l’explication de tout ce pataquès. Clairement, je n’inspire pas confiance. Quelqu’un m’a mis un masque sur la tête qui me parait beaucoup plus horrible et menaçant que d’habitude ? Je me tourne vers la vitre de la boutique et je détaille mon reflet. Non. Rien. Où alors, c’est cette barbe de trois jours qui fait cet effet là ? Rien n’oblige d’être rasé de près, non ? Je tâte même la peau pour vérifier que ce n’est pas une illusion d’optique, mais rien n’y fait. Je suis tel que je suis, pour le mieux, mais ce n’est au goût de l’inconnu et de son marmot qui occupe plutôt bien l’espace auditif avec ces hurlements. Il ferait une bonne sirène d’alerte, si vous voulez mon avis.

Et l’alerte, il le donne. Plusieurs personnes convergent dans notre direction. Dans un premier temps, pour se mettre à couvert, passant dans la micro-depression météorologique ; et pas que ; surpris par la grêle, la neige et ce genre de phénomène pas très agréable quand le ciel t’annonçait un si grand soleil. Dans un deuxième temps, ils viennent pour le père et son gamin. Faut dire que c’est un spectacle qui ne laisse personne indifférent dans une société d’entraide comme Aryon. Un gamin hurlant à s’en casser la voix et un père incapable de contenir ses larmes, qui se rouleraient en boule dans un coin s’il n’avait pas un minimum d’esprit pour faire passer la sécurité de son gamin avant son confort personnel, si j’ose dire. Entre le vieux monsieur marchant avec une canne, le jeune messager avenant et la mère de famille portant son sac de course, on a le droit à des gens de multiples horizons pour venir en aide au jeune père que je ne peux pas nommer parce qu’il ne m’a pas donné son nom.

-Qu’est ce qu’il se passe ici ?
-Qu’est ce qu’il vous arrive ?
-Vous avez un problème ?
-Vous ne vous sentez pas bien ?

Ça pose des questions, je m’écarte doucement pour laisser la place aux autres qui, eux, n’ont pas l’air de provoquer de réaction hors de propos sur le binôme étranger. Mon mouvement a le mérite, ou pas, d’attirer l’attention des deux moins jeunes qui me lancent soudainement des regards soupçonneux en fronçant les sourcils.

-Qu’est ce que vous lui avais fait ?
-Vous l’avez agressé, c’est ça ?!

J’essaie de calmer le ton. Parce que c’est quand même bien de ne pas se faire lyncher quand on est innocent.

-Non ! Pas du tout ! J’étais là, je lui ai dit bonjour et il s’est mis à pleurer !
-Ca n’a pas de sens ! Personne pleure sans raison !
-Je vous jure ! D’abord, c’est le gamin, au moment ou j’ai voulu lui dire bonjour.

C’est à ce moment là que j’ai su que j’avais dit une bêtise, mais en même temps, c’était la vérité vraie de la vie véritable. Comment savoir que ça allait se retourner contre moi ? Les regards écarquillés et les bouches ouvertes de surprises, elles n’arrivent que quand c’est trop tard pour reculer. Cette fois ci, c’est le jeune qui se redresse vers moi, menaçant.

-Vous vouliez kidnapper son fils ?
-MONSTRE !
-Mais pas du tout !
-Vous ! Ne le laissez pas s’échapper !
-C’est un CRIMINEL !

D’autres passants bifurquent dans ma direction, me coupant toute retraite. Toute sauf une : la boutique. J’évite la première tentative de ceinturage et je m’engouffre dans la boutique, refermant la porte derrière moi au nez d’un malheureux un peu trop rapide. J’aggrippe une chaise qui ne faisait rien de mal et je la cale sous la poignée pour bloquer la porte. Ça tape à la porte en ordonnant d’ouvrir. Derrière moi, la vendeuse arrive, paniqué.

-Mais qu’est ce qui se passe ? Qui êtes vous ?!
-C’est un malheureux concours de circonstances ! Je ne vous veux aucun mal !
-AU SECOURS ! AU VOL ! ON M’ASSASSINE !
-Mais non !

Ca ne va vraiment pas bien. Si quelqu’un me fait une face, j’aimerais bien qu’elle s’arrête, j’ai assez rigolé. Le bon côté des choses, c’est qu’entre le kidnappeur d’enfants, le voleur et l’assassin, ça ne peut pas être pire. Mais je dis pas ça pour vous mettre au défi, hein. Soyez gentil.

J’émerge des débris, un peu hagard, mais heureusement sans beaucoup de casse. Je jette un regard circulaire autour de moi pour constater que la boutique est sans dessus dessous, déjà, ce qui fait que Yoponsa va avoir du mal à acheter ce qu’elle voulait dans cette établissement. Heureusement pour les proprios, elle n’est pas du genre à mettre des mauvaises notes. Où alors, quand il y a des répétitions dans le genre. Puis, je me rends compte que ce n’est pas le problème plus grave ici. Déjà, il n’y a plus de plafond. Il y a juste un gros vers. Mais vraiment, UN GROS VERS. Et pas du genre à vivre sereinement en pleine ville. Ça se saurait. Un vers qui parle en passant, enfin, qui essaie. Mais est-ce que c’est étonnant ? Je ne crois pas. En vivant dans un monde de magie, il faut savoir ne pas s’étonner de tout et prendre les choses tels qu’elles sont. Des trucs magiques. Voilà tout.

La menace, magie ou non, est bien réelle. Entre se faire bouloter par un vers qui peut me faire tenir plusieurs fois de tout mon long dans sa taille et affronter une foule menaçante, le choix est vite fait. Aryon a une justice. Les vers non. Et j’ai confiance en la justice de mon pays, la garde ne fait jamais de bévues. En tout cas, celle de Capitale. Comme la royale. L’élite de la nation. Je connais un peu moins celle du grand port, mon avis que je vais pas tarder à le savoir, parce qu’un vers de cette taille dans la ville, ce n’est pas un truc que les gardes du coin se contentent de regarder en faisant la moue, hésitant à intervenir parce que c’est l’heure de la pause. Mais bref, faut que je me tire de là. Je m’élance aussi vite que je peux, traversant l’espace à découvert et je percute la porte branlante, l’épaule en avant. Je me fais assez mal au passage, parce que ça marche généralement qu’avec les pros ce genre de mouvement, mais le vers m’a bien aidé à ébranler la solidité du truc. J’envoie valser la porte sur un passant qui se la prend en pleine poire avant de s’affaler de tout son long, Assommé. Je m’en soucie pas. Je jette un regard de tous côtés pour analyser la situation.

C’est sacrément bien la merde.

Çà et là, de la magie. Libéré. Sans aucun contrôle. Les gens ne semblent pas faire exprès. C’est comme si le monde, ici, ne tournait pas rond. Sauf pour moi. Etrange non ? Parce que je ne suis pas transformé en glooby. Je dois avoir une sorte d’immunité naturelle. Les gens appelaient à un grand destin résistent souvent aux affres du hasard. Si c’est du hasard, hein. En tout cas, un grand bordel implique de gros moyens pour s’en occuper. Et c’est la garde qui intervient en ce moment. Une dizaine d’agents qui arrivent sur place, d’abord étonné par la profusion de magie, puis déterminé à agir avec tout le professionnalisme qui les caractérise. Je leur laisse le vers, je ne suis pas habilité à lutter contre ce genre de monstruosité. Passez un contrat à la guilde, ils vous en débarrasseront. Bref, j’ai plus grand-chose à faire ici. Yoponsa ne viendra pas ici avec ce foutoir. Je la retrouverais plus tard. Je pars pour me barrer d’ici sans regard en arrière ; ce n’est pas de la lâcheté, je ne veux pas déranger le travail des professionnels, ils sont tout de même payés pour faire ça.

Sauf que je m’aperçois d’un truc. Je revois l’autre gus qui attendait Yoponsa. Celui que j’ai fait pleurer, oui, pas très glorieux, je vous avoue. Voilà qu’il est à la lutte avec quelques personnes et visiblement, des gens malintentionnés veulent s’en prendre à son gosse. Décidemment, entre moi qu’on accuse à tort et eux qui le font réellement, le quartier est très porté sur l’enlèvement d’enfants. Tout à fait charmant. La garde est trop loin et bien trop occuper à gérer les débordements de magie. Ça, c’est une mission pour Whiskeyjack Callahan. Je me lance à la rescousse, entrant dans un blizzard de neige. Les deux premiers criminels ; ils fuait appeler un chat un chat ; me voient arriver avec surprise et déjà, des grimaces se dessinent sur leur visage d’honnêtes gens. Ne pas faire confiance aux apparences. Je leur colle à chacun d’entre eux une patate bienveillante qu’ils encaissent très mal et viennent s’écrouler par terre. Un troisième part déjà avec le gosse, prétextant que les enleveurs d’enfants, c’est nous.

Joli bluff.

Mais ça ne prend pas, car personne ne s’intéresse à nous. Il y a un vers de plus de cinq mètres à deux pas, rappelez vous. J’attrape le père sans ménagement pour le remettre droit et je lui fous une claque sur la joue. Un coup de vent et un grondement d’orage plus tard.

-Magne toi le cul ! Tu veux récupérer ton gosse, oui ou merde !

Je le laisse là et j’essaie de pas me casser la gueule dans la neige, essayant de rattraper le troisième larron qui a bien du mal à canaliser le gosse qu’on repère facilement dans la météo capricieuse. C’est déjà ça.

-Salut. Moi, c’est Whiskeyjack Callahan. Mais tu peux m’appeler Jack.

Alors, évidemment, il le sait déjà, parce que je me suis déjà présenté tantôt, avant que tout se mette à aller étrangement mal, mais il a peut-être oublié, et puis, les circonstances sont toutes autres, façon de recommencer sur des nouvelles bases, même si niveau présentation, on a fait mieux. Faut dire que j’ai été surpris par le gros orage doublé d’un brouillard épais qui m’a transpercé en tous sens d’un froid mordant. Aussi humide que si je m’étais jeté directement dans un fleuve. Mais les circonstances ne m’empêcheront pas de me séparer de mon petit sourire jovial en coin et de ma bonne mine sympathique. On a vu pire, non ? Oui.

-Bien sûr que je vais pas te laisser seul. T’es pas en état.

Ça serait criminel. Déjà, on me demande et ça, je peux pas dire non. Et puis même si on me demandait pas mon avis, j’aiderais, parce que je suis comme ça. L’important maintenant, c’est de trouver un endroit au calme, loin du tumulte du chaos magique à côté, loin des questions et des interrogations de la garde, loin des éléments qui vous pourrissent la vie et encore loin du froid qui va m’assaillir si on ne fait rien. Heureusement, il y a une unique solution à tout cela. Et ça s’appelle le bar. J’en connais justement un à trois rues. Un truc coincé entre deux grosses maisons. Un coin d’habituées qui servent des choses plutôt classiques, mais qu’est calme et qu’on te pose pas de questions. Indispensable pour souffler un coup.

-Viens avec moi. Tu peux marcher ? On va aller se mettre au chaud. Tu veux que je t’aide pour ton gosse ?

A la question aussi bienveillante que je suis capable de faire, il a comme une réaction de répulsion, me jetant un regard partagé entre le haineux et l’angoisse de pas réussir à tenir le coup. Je comprends bien que malgré son état de faiblesse, il y a des choses avec lesquelles il ne faut pas déconner. En pareille situation, je pourrais faire mon Sam et dire que si je ne peux le porter pour lui, je peux le porter lui. Mais même si c’est pas une masse, je crains de pas réussir à faire trois mètres sans m’effondrer à mon tour, ce qui serait pas la chose la plus intelligente à faire. Je vais me contenter de le supporter, passant son bras par-dessus mon épaule, le soutenant par la taille pendant qu’il a un bras occupé à gérer son marmot qui darde un regard suspicieux dans ma direction tout en suçant son pouce avec une vigueur insoupçonné. Je lui fais quelques grimaces dont j’ai le secret, histoire de briser la glace entre nous sans briser le barrage qui retient ses larmes, parce que c’est quand même assez relou de devoir calmer un gosse hurlant.

-Quand on sera tranquille, j’enverrais un message à Yoponsa, pour qu’elle nous retrouve. Les aléas de la vie ne doivent pas nous empêcher de mener nos affaires, non ?

Philosophe, le Jackie. C’est comme ça qu’on se traîne vers le débit de boisson le plus proche et le plus adéquat. Et la météo finit par se calmer, petit à petit, comme si on s’éloignait du bordel magique. Et ça, c’est quand même plutôt agréable. Enfin, pas plus que de vider une mousse en bonne compagnie, hein.