Troisième Lune de la saison chaude

Après cette mission au village perché où nous avons pu mettre la main sur quelques individus de cette secte étrange. J’ai demandé au Capitaine Dorago si je pouvais enfin me prendre quelques jours de repos pour aller retrouver quelques connaissances. Ni une, ni deux, je fais un tour à Forteresse pour voir comment ça se passe depuis la mort d’Elina. La feu capitaine était une personne extraordinaire et essayait de redorer le blason de notre belle ville. Depuis cette fameuse année en 997, tout a été chamboulé, les capitaines se succèdent et malheureusement, je perds mon ami lors d’un assaut qui a mal tourné.

Quoi qu’il en soit, je voulais me promener dans les montagnes pour me recueillir et lui adresser quelques mots sous l’oeil de notre chère Lucy. J’avais pris ma joyeuse troupe avec moi. Loki mon kitsune adulte et protecteur de ma petite catosorus Lucy qui n’était pas encore apte à être ma monture. Sans oublier Hamlet mon cheval de guerre. Non je n’avais pas une ménagerie mais presque surtout que mon étalon va pouvoir enfin prendre sa retraite d’ici quelques saisons enfin plus de long voyage en montagne, Lucy s’en occupera.

Je dormais dans la Taverne de Ofeig, un homme avec qui j’ai pu travailler dans le passé pour une sombre histoire de trafic d’alcool quand j’étais encore en service au bastion de la ville Rocheuse. Il était un des aubergistes défavorisés par ce trafic avait fait monter le prix de l’alcool à prix exorbitant. Prenant mon petit déjeuner au calme, parlant avec la serveuse, la fille d’Ofeig qui me racontait toutes les derniers potins à l’intérieur des remparts.

- Oh Bridget, si tu savais tout ce qu’il se passe ici. On ne sait toujours pas qui sera le Capitaine, on a encore cet homme qui fait l’intérim, pas très causant. Tu devrais postuler !
- Je te l’ai déjà dis Olga, ce n’est pas possible pour moi. Depuis la mort de mon père, je souhaite rester près de ma mère. Je ne peux pas la laisser seule, Lucy veut que je veille sur elle.  
- Mais on a besoin de toi ici. Je sais que tu es triste de la mort de la Capitaine Von Andrasil, c’était sa soeur d’armes et tout ça. Mais on en a assez de ces hommes bourrus qui viennent tout changer et faire de nouvelles règles.
- Je sais, je sais… Mais je crois que j’ai encore quelques petites choses à faire à la Capitale. La reine m’a demandé d’aider de surveiller son Dafresk qui passe son temps à finir dans le jardin de sa Première Ministre.
- Eh bah, tu t’amuses bien dis donc.
- J’avoue que c’est beaucoup plus calme au Palais ! Pas de monstres qui te dévorent. Juste des hommes.. Et je pense que c’est peut-être le plus dangereux des prédateurs cela dit.
- Enfin, si tu es heureuse. C’est tout ce qui compte, d’ailleurs toujours pas de prince charmant ?
- Je n’ai pas le temps pour ça et hors de question de finir avec un garde et je te coupe avant aucun Capitaine est mon goût.  
- Même pas le Colosse, tu sais le Capitaine du Village Perché. Je crois qu’on l’a vu qu’une fois à Forteresse. Je ne comprends pas pourquoi personne ne veut venir ici. Nous avons les meilleurs thermes du Royaume !
- Je pense que le froid et la montagne leur font peur. J’avoue que malgré le climat rude, les habitants sont les plus chaleureux possible. Enfin… peut-être que je prendrais ma retraite ici. Tu me garderas une chambre.
- Soit pas bête, tu vivras avec ton petit mari et tes enfants !
- Tu connais mon âge, tu veux que je les fasse comment ?  
- Tu feras un élevage de Catosorus. D’ailleurs comment va ta petite Lucy.
- Parfaitement bien, j’ai mis pris un protecteur pour elle. Un kitsune adulte.
- Oh, il est à toi aussi dans l’écurie.
- Oui, je ne pouvais la laisser sans défense.  
- Je te reconnais bien là. Oh attends, je dois te laisser, les clients m’appellent.
- Allez file. Va travailler, je peux me débrouiller seule.  
- A plus tard Bridget.


La jeune rouquine partit aussitôt servir les clients assoiffés pendant que je finis mon repas et ma boisson. Je prends le temps de regarder les environs avant de repartir dans ma chambre pour m’équiper de nouveau de ma tenue de garde complète. J’avais simplement par mon armure sur moi mais la parfaite tenue d’une aventurière expérimentée. Mais ma tranquillité dura quelques secondes quand quelqu’un vient me déranger. Je pivote sur mon tabouret quand je tombe nez à nez sur … Ivara ?

Je cligne une fois, deux fois les yeux sauf que ce n’était pas elle, je ne reconnaissais pas sa façon de parler ni sa tenue d’ailleurs. J’écoute sans vraiment comprendre ce qu’il disait car il avait plus une voix d’un adolescent. D’ailleurs, il était mince, frêle à se demander si ce n’était pas une femme mais non. Peut-être que la nature ne l’a pas gâté mais la ressemble avec ma cousine Ivara est troublante. Est-ce qu’elle avait un frère ? Un cousin ? Non ce n’était pas possible, je le saurai non.

- Euh oui… je connais bien la montagne.  

Puis il continue de parler, parler, racontant sa missive, les Grandblues etc. Est-ce qu’il sait que c’est énorme comme truc et tout seul il n’arrive à rien. Il comptait vraiment partir tout seul dans cette montagne avec ses petits bras. Je ne pouvais le laisser faire et je me retrouve alors à lui dire oui pour éviter un nouveau désastre.

- Je peux vous accompagner, ça sera plus prudent. Laissez moi m’équiper avant, mes affaires sont là-haut.
- Oh Bridget ! Alors déjà sur une nouvelle mission.

Olga était arrivée comme furie quand le jeune homme est venu me voir.

- Hey petit, sache que tu as devant toi la meilleure guide de la ville. Mais bon, fais attention à toi, son coeur est dur à conquérir.
- Olga ! Mais arrêtes ! Puis il a dit qu’il ne venait pas pour ça. Puis je dois avoir dix ou quinze de plus que lui…  
- L’amour n’a pas d’âge.
- Bien sûr… On se retrouve devant l’écurie dans dix minutes. Je vais prendre mon équipement.
- N'oublie pas ce que je t'ai dis Bridget ! N'oublie pas !

Je pars dans ma chambre, m’équipe de mon armure légère avec cette chaleur. On constate les armoiries de la garde ainsi que de mon bataillon du Myrmidon. Je prends mes sacs sans fond, prends ceux des familiers et descends devant l’écurie avec tout le matériel. Le jeune homme était déjà là, attendant que je finisse ma préparation. Je fais sortir Hamlet, le charge, glisse ma longue épée dans le dos et attrape sa bride pour voir mon jeune ami.

- Je suis prête ! D’ailleurs nous n’avons pas fait les présentations. Lieutenant Bridget Alnilnam du Myrmidon de la Capitale. Mais vous êtes un civil, appelez moi Bridget.

Nous faisons les présentations avant de prendre la direction du col Jaya qui se trouve à deux heures de cheval.

Je ne comprends toujours pas pourquoi Olga m’a proposé comme guide à ce jeune homme. Il est vrai que s’aventurer seul dans les montagnes n’a jamais été une bonne idée. J’en ai fais des récupérations d’aventuriers se croyant plus fort que la nature mais pour cet homme m’intrigue. Il ressemble à ma cousine Ivara, il a le même gabarit, je retrouve ses yeux, cette petite faussette mais c’est tout. Ne parlons pas de son langage qui est digne d’un marchand de poisson, rien n’a voir avec ma Ivara. Mais sinon je devrais arrêter de faire mon lieutenant et de juste faire cette mission avec lui. J’aurai comme ça une petite prime en cadeau, parfait pour m’acheter des nouvelles améliorations à mon armure surtout qu’après mon passage aux Mille et unes bêtes, la soeur du dresseur avait l’air de bien s’y connaître.

Une fois tous les deux équipés et sur nos chevaux, nous quittons tout doucement les murailles impressionnantes de Forteresse. Cette ville avait toujours cette impression d’être imprénétable, creusée comme elle est, à même la roche. Certes, c’était brut, pas de froufrou ou autres comme au Palais, c’était tout bonnement fonctionnelle, voilà tout.

On prends un pas lent, pas la peine de stresser nos bêtes surtout que Loki, mon Kitsune et Lucy ma catosorus étaient dernière nous, profitant de ce calme relatif.

- Effectivement, je connais bien les environs. J’ai servi une dizaine d’années ici, Olga et Ofeig ne vous ont pas menti.

Je faisais certainement partie des gradés qui ont le plus servi à Forteresse. Ici, peu de gens veulent rester et à la moindre occasion profite pour choisir une affectation plus sympathique. Le froid donne son lot de complications tout comme les monstres qui rodent dans nos montagnes.

- Mais sinon non, je ne fais plus partie du Blizzard. Je suis du Myrmidon à la Capitale, on va dire que c’est moins valloné !

C’est même plat surtout que je supervise la circulation fluviale, il n’y a pas plus plat comme topographie… Non, c’était une autre vie, plus calme, moins dangereuse, du moins on ne se fait pas manger en pleine nuit, juste poignader entres les deux omoplates.

- Donc Elio, vous prenez une mission sans vraiment vous renseigner j’ai l’impression.

Je le dis sur le ton de la rigolade avant de continuer sur mon explication.

- Les Grandblue sont de grandes cachotières, on peut en trouver facilement si on sait où chercher mais la Montagne ne facilite jamais les choses. On prends la direction du col de Jaya. Un belvédère et une passerelle plus loin, nous atteignera certainement un lieu proprice. Je dirai en début d’après midi après espérons que les orages nous ne trahissent pas car la passerelle ne sera pas praticable et devront faire un bon petit détour.

Durée du détour, certainement une journée voir plus mais je prie Lucy pour qu’un orage de saison chaude ne nous tombe pas dessus. Lucy s’amuse à courir partout quand nous commençons à prendre le premier chemin qui mène vers l’ouest. Les murailles étaient derrière nous et nous voilà partis pour l’ascension. Les chevaux jaugent alors le dénivelé et adaptent leur allure. Hamlet est un cheval de la Capitale mais je ne me fais pas de soucis qu’il va s’y faire. Nous n’étions pas pressés, j’étais en permission !

- Vu qu’on va passer une bonne partie de la journée ensemble. Vous êtes toujours aussi doué pour les compliments pour les femmes ?

Je positionne ma monture près de la sienne, lui adressant un sourire taquin. C’était un civil, je pouvais me permettre un peu plus de légèreté avec celui-ci.

- Enfin, je ne connais pas votre accent Elio. Vous n’êtes pas d’ici, ni du Sud. Vous n’avez pas les marques de la mer donc curieuse, je me demandais d’où vous pouvez bien venir car vous ressemblez à une connaissance à moi. Si vous portiez quelque chose de moins d’aventurier, j’aurai pu pensé que c’était cette personne. Mais bon, c’est certainement un signe de la part de Lucy que je devrais prendre un peu plus de nouvelles d’elle. N’oubliez pas de me le rappeler à notre retour !

Je lui fais un petit clin d’oeil avant de voir Lucy courir devant, essayant d’attraper une sorte libellule. Elle se retrouvait dans son élément et pouvait courir partout. Loki, plus réservé, se contentait de rester près d’elle sans faire des allers-retours inutiles. Il m’envoit un message télépathique comme quoi son harnais lui allait parfaitement bien et que ça ne le genait pas trop. Enfin là j’ai fais la traduction car l’image qu’il m’a envoyé était un vrai casse-tête mais à force, je finis par comprendre.

- Bon, je ne sais pas si vous êtes un grand bavard. Moi il m’arrive de beaucoup parler surtout quand c’est calme comme maintenant. Ce qui me fait penser, vous avez dit que vous n’étiez pas un bleu, vous avez l’habitude de travailler en équipe ? Vous êtes de la guilde ou un homme à son compte ?

Mon équipement sur moi, mon uniforme, mon armure, raconte tout ma vie. J’étais garde et on pouvait aisément deviner ce que je faisais. Etre en civil et on pouvait s’imaginer tout plein de choses. Est-ce son vrai nom ? Est-ce un mercenaire ? Un assassin ? Un orphelin ? Un ex-garde ? Non plein de choses qu’on peut se raconter le temps d’une aventure. Je ne suis pas sûre de le revoir de toute façon, déjà que prendre des vacances est difficile alors m’amuser à jouer les guides de montagne à mes heures perdues…

- Trop curieuse peut-être ? Vous n’êtes pas obligé de répondre, c’était pour faire la conversation mais j’espère que pour vous, vous savez chanter quelques chansons pour compenser.

Ca par contre, j’étais vraiment nulle pour les chansons, histoires autour du feu et j’en passe. Toujours Dumas ou Rios qui s’amusaient à faire ça, je me contente d’être spectratice pour une fois…

Sans vraiment rentrer dans les détails, je lui raconte qu’un évènement majeur à ébranler la cargaison de Forteresse. Une attaque de monstres qui a malheureusement fait disparaître de nombreuses personnes, des plusieurs d’escouades. Encore aujourd’hui, je me rappelle encore de cette scène. J’étais en appui en arrière pas en première ligne comme certains frères ou soeurs d’armes qui encore aujourd’hui repose près du poste-frontière. Les wendingos étaient des humains jadis, on ne sait pas comment ils ont pu finir pour faire trois têtes de plus d’un homme et leur férocité à faire peur un Fenrir mais cette attaque, on ne s’y attendait pas comme la mort de notre Capitaine. La Commission et l'État-Major a voulu poser ses pions, les soldats survivants d’autres. Une mutinerie éclate et tous les officiers supérieurs sont dispersés sur les cargaisons du Royaume. Evidemment, je faisais un tableau plus positif à Elio. J’ai bien raconté l’histoire de l’attaque mais ensuite, j’ai ajouté que j’ai préféré changer d’air après cette dure épreuve. Ce qui était une réalité, grand bien me fasse mais c’était ma seconde famille que je venais de quitter…

Une page qui se tourne, voilà tout. Nous avons notre mission, enfin surtout la sienne, je ne fais qu’accompagner ! Notre balade est lente mais nous approchons de plus en plus à notre première étape difficile. Cette passerelle était un point clé de notre voyage, le temps était encore clément mais tout le monde connaît la Montagne, elle pouvait décider que ce soleil paradisiaque se transforme en véritable enfer. Heureusement pour lui, je connais pas mal d’abris dans les environs sur le long de notre parcours. La seule règle qui faut savoir c’est de ne jamais prévoir de rendez-vous pour notre retour, c’est le retard assuré ! Pouvoir finir la mission a temps, insinue que Lucy vous à aider dans son périple.

Malgré le patois de mon compagnon, nous discutons d’un peu de tout. Sa réponse sur les femmes me laissent perplexe. Est-ce qu’il a perdu sa femme ? Un râteau mémorable qu’il a perdu confiance en lui ou simplement deux pieds gauches ? Aucune idée mais sa réponse évasive me laisse penser que je devrais changer de sujet de discussion. J’apprends ensuite qu’il n’était pas de la guilde mais un homme à tout faire. Beaucoup plus libre que les aventuriers, c’était une type de population difficile à contrôler pour nous les gardes. Les aventuriers avaient pour principe un certain code d’honneur, du moins un code d’honneur honnête, ne parlons pas du code des pirates ou autres voleurs. Ces mercenaires ou autre homme de main, ne rendait de compte à personne mise à part au client du moment et encore. Fort heureusement, il n’existe peu de groupuscule, ils travaillent généralement en solo.

- Ne pas savoir se défendre et décider d’affronter la Montagne aurait été totalement inconscient ! De toute façon, je viens ici en tant que guide et non comme une force armée.  

La différence est notable, on ne loue pas mes services d’épée, je suis Garde, je n’en ai pas le droit. Guide de Haute-Montagne, ça je peux le faire. D’ailleurs, on entend un cri de ralliement de Catosorus. Théoriquement solitaire, si un mâle entre dans le territoire de l’autre, il pousse ce genre de grognement qui résonne sur les parois de la roche.

- Un Catosorus, nous n’avons rien à craindre encore.  

Lucy avait bougé ses oreilles pour reconnaître la direction de son congénère. Elle m’interroge télépathiquement pour avoir la confirmation de ce qu’elle a entendu. La petite grandissait, ce n’était encore qu’une adolescente dans sa croissance mais le chant doux d’un mâle adulte ne laissait pas indifférente. Je demande alors par ordre télépathique à Loki de bien faire attention à sa “ petite soeur “. Machinalement, le voilà qui se colle presque à elle.

- Mes familiers ? Alors le Catosorus est surtout une monture. Peu doué pour le combat mais elle peut se défendre contre des bêtes de la taille de petit renard. Mais bon vu son poids, elle pourra toujours faire basculer un homme sans arme. Elle est dressée pour être une monture tout terrain pour garde. Elle connaît quelques combinaisons de combat et sait quoi faire dans certaines conditions. Loki, le kitsune adulte sert essentiellement de protecteur pour Lucy. Je ne pourrai pas protéger mon catosorus si je rentre dans une phase de combat. Loki est surtout là pour me rassurer et il finit de passer ses compétences militaires également. Ils sont aussi une grosse force de dissuasion lors de de patrouille, personne ne voudrait affronter deux bêtes de cette taille.  

Alors une fois que je pourrai monter sur Lucy, je pourrai aisément impressionner à la capitale. C’était monnaie courante d’avoir des montures de catosorus pour Forteresse mais mon félin sera la première à être adapté aussi pour le milieu urbain. Cette petite balade tombait à bien nommée, elle va permettre de garder le niveau de celle-ci. Il ne faut pas que ses coussinets oublient la dureté de la roche ainsi que le froid.

- Sinon ils sont dotés de quelques facultés magiques ainsi que du matériel adapté. Ce ne sont pas des familiers comme les autres !  

Parler avec un animal n’était pas courant mais c’est la première chose que j’ai fait pour communiquer avec eux. Ils ont au moins le bonheur de me tenir compagnie quand je me sens seule lors de mes patrouilles. Bon le langage est assez restreint mais on finit par se comprendre avec nos mots à nous. La passerelle était presque visible, enfin moi je savais qu’elle n’était plus très loin. Nos chevaux côte à côte, mon ventre me fait un petit rappel à l’ordre. C’est vrai que ça fait un certain temps que nous sommes partis.

- Je propose une halte quand nous serons proche. De quoi faire reposer les chevaux. De toute façon, ils ne sont pas friands de cette parcelle en bois qui flottent. Les ponts suspendus sont un véritable enfer pour eux !  

Sans ajouter ceux qui ont le vertige, les lattes cassées, les cordages abîmés. Le village non loin prenait grand soin de ce passage, seul moyen de rejoindre Forteresse rapidement en cas de soucis.

- Une petite heure, je pense.  

Et l’heure se passa rapidement. Le pont suspendu était visible, il se situait à une vingtaine de mètre en hauteur. Il n’a jamais fait défaut et ce n’était pas aujourd’hui que ça allait se dérouler. Il y avait quelques panonceaux avec les indications pour des chemins bis en cas de mauvais temps, vent violent, etc.

- On peut passer théoriquement à deux mais le mien de se faire un passage avec vous et un passage avec toute ma ménagerie.  

Je pose pied à terre, Hamlet était nerveux. Il détestait ce pont, c’était un cheval de la ville et non des montagnes. Lucy n’avait jamais traversé ce pont et restait curieuses à renifler les différents cordages. Je fouille dans mes besaces pour récupérer quelques fruits secs et de l’eau. Il n’était pas encore l’heure de faire un énorme casse-croûte.

- Prêt pour la traversée ?  

J’attrape la bride de mon étalon et pose ma botte sur la première latte. L’architecture du pont était assez simple, des rondins en quinconce, des lattes par-dessus, des cordages qui reprennent les charges avec quatres tirants pour chaque pilier qui sont au nombre de quatre. Non, ce n’était pas un simple pont, peut-être un petit rafraîchissement ne serait pas de trop mais c’est fonctionnel. Je pars donc devant, Lucy et Loki derrière nous, se demandant ce qu’il se passe. Ayant l’habitude, je joue avec le vent et le balancement du pont. Hamlet était tendu et regardait où se posait ses sabots.

-T’inquiètes mon grand, ça fait des années que je le prends. Tu ne crains rien.  

Lucy me donne des images mentales du vide et je la tente de la rassurer comme avec Loki. La traversée d’une centaine de mètre dura une éternité mais une fois pied à terre, tous les animaux sautent de joie. C’était au tour de Elio de passer et je lui fis un grand geste pour le prévenir. Nous allons faire un petite pause ensuite pour que nos bêtes reprennent contenance donc j’attrape un bout de viande séchée ainsi que du pain. Elio finit par arriver et lui demande ses impressions pendant que je mangeais mon sandwich.

-  Alors ? Marrant n’est-ce pas ?  

Après lui avoir expliquer les divers magies qui peuvent exister pour les familiers comme la téléportation, les déplacements plus rapides, la télépathie, parole humaine ou autre partage de sens, nous passons enfin la passerelle. C’était amusant de voir qu’il n’était pas du tout à l’aise avec ça. Il a été crispé toute la traversée, un peu comme Hamlet qui essaye de se remettre du voyage. Lucy et Loki avaient adoré par contre cette attraction, leur esprit un peu chasseur reprenait le dessus tout comme mon catosorus qui reconnaissait son espace de vie naturel.

- On s’y fait à la longue. Vous verrez le retour se fera sans encombre.

La pause fut courte mais mon cheval était prêt à repartir. Je note qu’il avait déjà mal à son postérieur. Il n’est pas au bout de ses peines celui là. Bon je ne peux rien dire car j’ai une selle sur mesure et très confortable. Privilège de Lieutenant et de connaître un bon sellier.

- Oui, surtout à cette période où un orage peut nous tomber dessus. J’espère que Lucy sera clémente.

Non pas que notre déesse contrôle la météo mais j’aimerai ne pas dormir sous la pluie. La perspective de pouvoir redescendre à temps dans une auberge était non négligeable.

- Je pense que nous pouvons atteindre un premier endroit dans une heure.

La route fut calme malgré la pente qui devient de plus en plus raide. Quelques fois, j’ai cru que nous allions finir par terre mais pas besoin de descendre de selle. Il restait encore un dernier virage pour

-Nous tomberons sur le Cirque de Prior, sur la façade ouest, il y a généralement quelques Grandalues.  

Vu la saison, certains ont dû déjà passé mais il va falloir faire un peu d’escalade pour vérifier ce point. Nous arrivons enfin à l’endroit tant voulu pour avoir une vue magnifique. Derrière nous, on pouvait apercevoir notre belle Forteresse creusée à même la roche. Malgré que nous ayons mis une certaines distances, on peut ressentir d’ici la puissance de la Citadelle. Ses hautes murailles, sa défense militaire et j’en passe. Si un jour des ennemis viendraient de ce côté, ils seraient très bien reçus. Je pose pied à terre, la main en visière au-dessus des mes yeux, j’essaye de faire appel à mes souvenirs.

- Alors, alors. Ça serait par là théoriquement.

Quelques “ restanques “ plus haut, on pouvait voir quelques arbustes mais impossible d’y grimper avec les chevaux. On va devoir y aller en escaladant.

- Elio, c’est le moment de sortir ses crochets foreurs.  

Tirant de la sacoche, crochets, arbalète grappin et tout le reste. Je demande gentiment à Hamlet de rester dans le coin.

-  Lucy, Loki, vous ouvrez la voie ?

Les deux familiers partent aussitôt sur les sommets. Je préfère leur laisser de l’avance pour éviter toute chute de pierres sur nous.

- J’espère que vous aimez l’escalade. Une grandalue, ça se mérite. Puis si il y a quelques pieds, on va pouvoir profiter pour se faire un petit thé.  

Leurs feuilles sont excellentes puis on en trouve rarement sur le marché. J’avoue d’avoir pris plusieurs fois des mélanges avec des feuilles de cet arbuste pour remplir des rapports compliqués ou simplement pour profiter d’un petit moment de calme. J’enfile mes gants, lance mon arbalète pour nous faire une ligne de vie. Les crochets me servent à mieux me tenir et je pars la première, mon épée dans mon dos. Ça faisait bien longtemps que je n’avais pas fait ça, je sens le poids de l’âge et le manque d’exercice à la capitale. Mes doigts n’ont plus l’habitude, je retrouve moins facilement mes marques comme la gymnastique pour mettre ses pieds sur les meilleurs prises. La chaleur nous n’aidait pas sur le coup et j’ai l’impression d’avoir mis des heures à grimper. Lucy passait la tête depuis sa corniche, m’encourageant mentalement et me dire où mettre les mains. Bon elle a du mal avec la gauche et la droite mais ça nous a fait un bon exercice pour plus tard.

- Allez Elio ! On y est presque.  

Presque, c’était vite dit. Il nous restait encore une cinquantaine de mètres et Lucy me dit que la vue est magnifique mais pas de fleurs qui brillent. Bon, peut-être on ne trouvera pas ce qu’on chercher mais au moins, on pourra voir où se trouve les autres plants….

C’était bien notre veine. Le temps était clément jusqu’à là mais Lucy en a décidé autrement. La pluie devient de plus en plus insoutenable, mettant à mal notre ascension. Ce n’était pas raisonnable de continuer à grimper mais Elio me fait remarquer la crevasse qui pourrait nous protéger le temps que le déluge cesse ou diminue. Mes familiers se sont déjà cachés un peu plus loin. Après une ou deux pirouettes plus tard, on finit par se caser dans ce petit troupe. Ce n’était pas le grand luxe mais on n’avait que ça. Le jeune homme prenait à coeur de ma sécurité, ce qui me fait sourire quand il hurle un juron. En temps normal, j’aurai glissé un petit “ langage “ mais ce n’était pas le moment.

On continue d’avancer dans la crevasse pour éviter de se faire écrabouiller. Lucy et Loki viennent d’arriver, ils gardent la “ porte “ et se mettent en boule pour se tenir chaud mutuellement.

- Malheureusement, je ne suis pas devin mais les orages dans les montagnes ne sont jamais cléments. Il est préférable qu’on reste ici.  

Faire un feu dans un espace si exigu ? Meilleure solution pour s'asphyxier. J’enlève le haut de mon armure et le vêtement trempé pour prendre un sec dans mon sac.  A Forteresse, on n’apprends toujours à prendre de quoi se changer.

- Vous allez apprendre à être patient mon cher Elio. On ne gagne pas face à la montagne. Donc asseyez vous et venez vous sécher au lieu d’hurler contre ses pierres.  

Lucy se secoue le pelage et on reçoit quelques gouttelettes sur la figure.

- Lucy !

Elle retourne se cacher derrière Loki, ses oreilles se dressant, signe qu’elle voulait jouer.

- Non, ce n’est pas le moment. Montez la garde au lieu de faire des bêtises vous deux.

Il y avait peu de chance que des prédateurs viennent nous rejoindre. La pluie limitait les déplacements pour tout le monde. Seul un animal apeuré pourrait venir. L’orage gronde de nouveau dans la vallée, le tonnerre résonne contre les parois, à se faire hisser les poils dans le dos. Non, ce n’était vraiment pas le moment de sortir… quelques gouttes apparaissaient le long de la roche mais rien d’alarmant. Le ciel s’assombrit encore plus, le nuage noir était maintenant au-dessus de notre tête pendant certainement deux bonnes heures. Nous n’avons rien vu venir, il était caché de l’autre côté du versant…Une jolie surprise. Je finis de me sécher avec ma serviette sèche magique et sort mon thermos magique.

- Tenez, prenez ça pour vous sécher. Je nous prépare une boisson chaude.  

Une petite infusion nous fera le plus grand bien, rien de mieux pour réchauffer nos os. L’eau était bien chaude et je lui tends une timbale propre.

- Vous n’aimez pas rester sans rien faire non ? On s’y fait à la longue, être trop téméraire nous mène à rien. Vous l’apprendrez un jour.  

La foudre éclate juste devant nous, un petit éboulis de pierres passe devant nous. Aucun dommage n’est à prendre en compte mais je demande par message télépathique à Lucy de mettre la truffe dehors pour voir. Deux minutes plus tard, la foudre tombe un peu plus loin, le nuage fautif s’éloigne de nous et tant mieux !

- Bon, mon petit doigt me dit que nous allons rester deux heures ici en vue de la couleur du ciel. La bonne nouvelle, je pense qu’avec le vent qu’il souffle, on pourra se débarrasser de tout ça mais le soucis… bah si on veut trouver une grandalue avec la nuit, ça me semble bien compromis. Mais n’ayez crainte, je connais une autre grotte, beaucoup plus grande dans les hauteurs. On trouve votre butin et nous passons la nuit à la belle étoile ! Heureux ?  

- Tentons notre chance oui !  

Car c’était bien le mot. Le ciel s’était dégagé mais pour combien de temps ? Car c’était la magie de la montagne ! L’imprévisible était notre quotidien et c’était ce qui rendait la chose attrayante quand j'officiais à Forteresse. Le jeune homme décide d’aller dehors et on continue notre ascension. Le vent frais avait refroidi toute la vallée et je me couvre le cou pour éviter les courants d’air. Ça ne dure que quelques minutes mais nous arrivons enfin sur la corniche. La vue était encore une fois magnifique et acceptait sa main tendue pour les derniers centimètres. Mes familiers étaient déjà arrivés et s’amusaient à tourner tout autour des arbustes.

Je m’empêche de rire quand il voit l’allure d’un grandalue.

-Vous ne le saviez pas ? C’est pour ça que c’était étonnant que vous partiez seul pour cette aventure. Il faut mieux vous renseigner mon cher !  

D’une hauteur de presque deux mètres, il va être amusant de faire redescendre tout ça sans l’abimer. J’avais le nécessaire d’escalade avec moi, pas comme mon camarade.

- Il faut déraciner la plante complète si on veut conserver toutes ses propriétés. Il est recommandé de ne pas défricher toute une zone. Un sujet suffit largement. Puis je ne me vois pas porter deux trucs de ce genre, déjà qu' un, on va s’amuser !

Je sors deux pelles compactes de mon sac et donne une à Elio.

- Ça ne va pas se faire tout seul !  

C’est parti pour un long travail de jardinerie. Il ne fallait pas qu’on brise les racines et on pouvait entendre le jeune homme rouspété quelque fois.

- Dites vous que c’est que le début… attendez qu’on le descende.

Car oui, tout ce qu’on a monté, on doit le redescendre avec un léger surpoids. On arrive au bout d’une trentaine minutes à bout de l’opération. Je sors d’autre corde pour emballer la Grandalue puis je prends deux crochets pour faire une sorte de treuil pour descendre.

- Vous descendez le premier et vous réceptionnez ?  

D’un commun accord, il finit par redescendre et lui envoie Loki avec lui. Il ouvre la marche et au bout d’une quinzaine de minutes, il m’annonce que je pouvais commencer la descente. Je fais appel à toute ma force pour retenir la charge avec Lucy qui tient la corde pour m’assister. L’entreprise dura encore une fois un certain temps et le soleil se veut déclinant. La pluie nous a fait prendre beaucoup de retard et je vais devoir annoncer à Elio qu’on va certainement bivouaquer cette nuit à son plus grand plaisir. Je décroche les cordages et redescends à l’aide des crochets foreurs. Je retrouve rapidement la terre ferme.

- Bon, faisons une civière pour le poser mais avant, on doit retrouver les chevaux.  

Mes deux familliers partent à leur recherche. L’orage a été bruyant et je pense qu’ils ont dû se cacher quelque part. Lucy me fait un appel télépathique pour me dire qu’il était là, un peu plus loin dans une crevasse. Hamlet avait fait son rôle de protecteur avec l’autre cheval. Il avait l’habitude d’attendre et il savait qu’il ne devait pas bouger.

- Je pars les récupérer.

Deux cents mètres plus loin, les deux canassons étaient là. Hamlet, le poitrail gonflé pour montrer qu’il a accompli son travail de cheval militaire, l’autre plus en retrait, se demandant ce qu’il se passe encore. J’attrape les deux brides et retour voir l’aventurier.

- Voilà notre moyen de retour !  

Il nous restait à faire la civière et nous allons pouvoir de nouveau repartir. Espérons que le vent ne se lève pas et que nous pourrons traverser le pont suspendu...

La nuit qui tombe, le vent qui se lève, je prends la décision que ce n’est même plus la peine d’aller vers le pont suspendu, on ne pourra jamais le traverser. J’annonce la bonne nouvelle au jeune aventurier qui ne broncha plus après la sentence. Est-ce qu’il avait peur de dormir à la belle-étoile, une mauvaise expérience jadis ? Je n’en savais trop rien et je ne préfère pas réveiller de vieux souvenirs. On avança tout doucement, traînant notre fardeau vers la grotte connue. Ca ne sera pas le grand luxe mais bien suffisant pour nous et notre petite troupe. Il fit un brin d’humour quand nous arrivons devant et je m’amusa alors à répliquer à sa boutade.

- Je ne vous fait pas dire , c’est avec toute commodité !  

Elle a le mérité d’être assez profonde, nous protège des grands vents de l’est. On peut rentrer plusieurs chevaux si on le souhaite et un foyer était déjà prêt, manque plus que le bois. Machinalement, on s’occupe de déposer nos affaires et on se partage les tâches. Une fois posée, Elio me demande comment on allait gérer la suite.

- Voilà pourquoi j’ai des familiers, ils peuvent se charger de notre protection !  

A ce mot, Lucy et Loki tournent la tête vers nous. Ma catosorus prenait cette mission à cœur maintenant assez âgée pour ce genre de tâches. Loki, lui, il le fera sans montrer aucun entrain mais ils s’arrangeront tous les deux pour le tour de rôle. Je le sais, je me lèverais pendant la nuit, m’assurant que tout se passe bien.

- Puis ici, ça ne craint pas grand chose. Forteresse n’est pas si loin et avec tous nos amis à quatre pattes, il faudrait être un peu fou !  

Nous prenons alors notre repas, partageons nos réserves avant de se quitter chacun dans notre coin pour entamer notre nuit. Recouverte d’un plaid bien chaud sur mon lit de fortune, je m’endors paisiblement, mon arme non loin, Loki qui veille pour ce premier tour.

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Le réveil fut en douceur, le soleil commençait à se lever tout doucement, la fraîcheur et l'humidité du matin était encore présente. Cette nuit, j’ai tenu un peu compagnie à Lucy. Elle était devant l’entrée de la grotte, à l’affût avec tous ses sens. Je lui avais donné une petite caresse pour la féliciter de son travail et je lui explique quelques petites choses par message télépathique. Le reste de la nuit fut tranquille, Lucy m’a appelé une seule fois pour un bruit étrange qui était simplement un rongeur. Il faut qu’elle s’adapte aux bruits de la forêt mais c’était mieux ainsi que de laisser le danger approcher.
Je fis ma petite routine matinale. Mon armure encore près de mon couchage, je sors de notre repaire pour quelques étirements et de mouvements avec l’épée. Une fois échauffée, je retourne au campement pour prendre le petit déjeuner. Mais une fois arrivée proche de mon camarade, quelque chose avait changé…

- Je ne comprends pas… Elio ?  

Je cligne plusieurs fois les yeux mais aussi les oreilles, oui c’était impossible. Elio était soit pas du matin, soit il s’est passé quelque chose dans la nuit. Ou était le langage paysan que j’avais la veille ? Méfiante en prime abord, je demande à Lucy et Loki par télépathique pour m’indiquer si quelque chose avait changé ici pendant mon petit tour. Lucy pris la parole en première dans ma tête et me montre des images d’elle qui n’avait pas bougé ainsi qu’Elio qui se tortillait avec ses vêtements avant que j’arrive. Bon peut-être que j’extrapole trop vite et pense à  notre petit déjeuner.

- Partie chercher du petit bois et faire ma routine matinale. A mon âge, j’ai besoin de ça pour garder la forme en tant que Lieutenant !  

Son “ Brijet “ sonna bizarrement dans mon oreille mais je le laisse sortir ses provisions pendant que je fais chauffer l’eau. Je demande alors à Loki de faire attention, plus âgé, je pense qu’il sait où je veux en venir. Me battre à l’épée, je sais faire mais contre la magie ? Je n’ai presque aucune défense. Puis si vraiment c’était un de ses métamorphes étranges, il m’aurait tué dans la nuit.

- La pluie s’est calmée, beaucoup moins de vent qu’à aller. On pourra franchir le pont suspendu les yeux fermés. J’espère que cette fois-ci, vous irez plus vite, c’était bien amusant de vous voir galérer ainsi.  

Je me rappelle encore cette longue marche. Un pied après l’autre pour passer de planche en planche. L’aller, il n’y avait pas de vent, ce matin, il y avait encore un vent résiduel mais rien d’alarmant.

- Avez-vous du baume pour vos mains ? Il faudrait penser à acheter des crochets-foreurs pour votre prochaine escapade, ça évite ce genre d’aléas.  

J’entendis l’eau bouillir dans la casserole, je la mets hors du feu et sort deux timbales. Je verse de l'eau chaude et attends que ça refroidisse un peu pour glisser mes quelques feuilles de thé. Trop chaud et ça casse toute la boisson !

-  On va en avoir pour au moins cinq ou six heures de cheval pour transporter notre marchandise. D’ailleurs, c’était quoi le lieu de rendez-vous pour la livraison ? Autant prendre le bon chemin pour rentrer, ça nous évitera des efforts inutiles !  

Je montre du doigt le tronc de la grandalue.

- Allez prenez des forces, vos fesses vont encore souffrir aujourd’hui encore !  

Alors plus j’observe Elio, plus je me dis que le ciel lui est tombé sur la tête. Non pas que je deviens folle mais maintenant que notre mission est finie, dirons-nous, je perçois ses quelques petits changements. Alors soit parler comme un paysan était une manière de faire mais là, j’avais une toute autre personne en face de moi. Ces mots en sont plus mangés à chaque syllabe, non c’était bien différent mais pourquoi ? Je lui ai posé cette question toute simple car finalement la réponse m’intéressait vraiment mais je ne reçois aucune information supplémentaire, nous devons retourner à l’auberge. Relativement simple, dirons nous..

On reprend la route et même sa manière de monter en selle est différente. Je devrais arrêter de penser à ça, je suis sûre que je me monte la tête, il n’y a que ça. Mais ma surprise est toute autre quand il me dit “ ma belle “. J’arrête mon cheval aussitôt et je me tourne vers lui.

- Ma belle ?  

Si je me rappelle bien de ses paroles de la veille, les cristaux avaient plus de valeur à ses yeux et ce n’était pas son genre de draguer un lieutenant. Car j’avais fini par comprendre que le fait d’être une garde et encore plus une officier, le dérangeait. Mais ce matin, c’était tout autre ?

- Je crois qu’il va avoir un petit problème tous les deux.  

Je m’approche un peu plus de lui, mon cheval était plus haut que le sien, je le surplombe.

- Maintenant que nous avons récupéré la marchandise, vous essayez de me courtiser ? Nous avions un marché non avant de partir ? Je vous accompagne, on partage les gains, je ne me rappelle pas d’avoir signer pour autre chose ? Car partout seul comme inconscient ne vous suffisait pas ?  

Le ton que j’emploie ne montre aucune sympathie ainsi que le regard noir que je lui adresse. Ces yeux me disent quelque chose maintenant que je le regarde face à face. Pourquoi je n’arrive pas à mettre un nom au visage que j’ai en face de moi. Je ne connais aucun homme avec une chevelure blonde de cette taille, une femme oui, ma chère cousine que je n’ai pas vu depuis si longtemps mise à part aux funérailles de mon père mais c’était il y a plus d’un an et il faut dire que je n’avais pas la tête de dire bonjour à qui que ce soit. Le temps s’assombrissait plus au nord, peut-être que cette fois-ci, on ne va pas essuyer un autre déluge; Hamlet trépigne d’impatience, ne voulant que se promener.

- Alors souhaitez vous encore berner un lieutenant encore longtemps ? Puis arrêter de m’appeler Brijet, je m'appelle Bridget Alnilnam, ça ferait du bien à mes oreilles que vous évitez d’écorcher mon nom.    
Je tire les rennes de mon cheval pour le calmer et attends patiemment les réactions de mon cher camarade d’aventure...