Vous y croyez vous ? Astrid avait l’impression qu'hier encore elle avait été au barbecue organisé par Yuduar, avec la chaleur et les jolies filles si caractéristiques du Grand-Port, en train de picoler et de manger en bonne compagnie avec une tenue légère et aussi rafraîchissante que les bières qui avaient été servies. Puis avant qu'elle ne s'en rende réellement compte, là voilà aujourd'hui emmitouflée dans sa meilleure tenue contre le froid et le solstice. Écharpe rouge enroulée autour de son cou, gants et chaussettes du Solstice pour la tenir au chaud magiquement, elle était bien parée contre le temps qui ne ferait qu'empirer à partir de maintenant. Toutefois, ce n'était pas plus mal. La capitale drapée de blanc avait un charme dont la citoyenne ne s'était jamais lassée en désormais 84 ans de vie et ce n'était pas prêt de changer.
En cette fin d'après-midi, après une bonne journée de travail et un dur labeur récompensé par une bonne bourse bien remplie, la voilà qui se dirigeait vers la place commerçante décorée pour les festivités avec des sapins à la senteur agréable, des boules de toutes les couleurs et des guirlandes, le tout agrémenté d'une musique entraînante et gai.
La connaissant, n'importe qui aurait pu penser qu'elle allait rejoindre une taverne pour picoler et faire de la merde comme elle en avait tant l'habitude. Et ces personnes là ne se trompaient pas totalement car Astrid rimait sans aucun doute avec alcool. Enfin, non, mais les deux commençaient par la même lettre. Mais non, la femme à tout faire n'allait pas boire tout de suite, pas encore. Elle se dirigeait vers la partie commerçante de la capitale pour une raison bien précise : celle de jeter un coup d’œil à ce que les boutiques avaient à offrir en cette fin d'année 1000. Étonnant ? Pas tant. La blanche avait pour habitude d'acheter des cadeaux à ses amis pour fêter le solstice de la saison froide malgré ses maigres moyens financiers. Cela étant, les cristaux n'étaient pas le problème, car elle pouvait toujours travailler deux fois plus durement. La réelle difficulté était plus de réfléchir à quoi acheter, et c'était ce qui expliquait sa présence ici dans le but de faire un peu de repérage des objets qui pourraient potentiellement plaire à ses connaissances.
Bien sûr, une fois que ce serait fait, ce serait direction la taverne. Après tout, que serait une soirée sans alcool pour Astrid Dalgaard ? Rien. Une nuit qui ne serait pas satisfaisante. Elle bavait d'ailleurs déjà à l'idée de pouvoir se relaxer avec une bonne chope entre les mains près du doux feu d'une cheminée. Puis, avec de la chance, elle pourrait séduire une jolie serveuse en petite tenue rouge. Mais ça, ça tournerait probablement au vinaigre.

C'est ainsi qu'elle ne remarqua pas d'abord la calèche qui était passée à côté d'elle, bien trop accaparée par ses pensées de cadeaux, de bières et de serveuses qu'elle allait tenter de draguer.
Ce ne fut qu'au timbre d'une voix familière qu'elle releva les yeux vers la source, avec des sourcils froncés. Yuduar ? Qu'est-ce que ce gamin faisait ici ? Maintenant qu'elle y pensait, ça devait faire exactement un an depuis leur soirée mémorable de l'année dernière. Il s'était bien foutu dans la merde alors qu'il était capitaine de la garde et avait fuit ses propres troupes. Rien qu'en y repensant, elle eut un petit ricanement qu'elle ne prit même pas la peine de cacher.
Elle était bien contente de le voir, mine de rien, car on ne s'ennuyait pas avec lui.

-Ouais, j'achète des cadeaux, ptit con. Mais tu gâches un peu tout, parce que voir ta gueule fait un potage (po tâche) avec le paysage, sale gamin. Tu fais quoi ici ? Tu te rends chez ta chérie Queen Milan ? Tu vas manger une salade CAESAAAR autour d'une tasse de thé avec elle ? Pourquoi avait-elle eut besoin de crier le nom de ce mets ? Aucune idée. Désolée de te l'annoncer, mais ta princesse est dans un autre château, hahahaha.

Ah bien sûr, cette rumeur allait poursuivre le capitaine un certain temps, surtout avec la commère qu'était la femme à tout faire qui s'amusait à répandre et amplifier celles qui avaient le malheur d'atteindre ses oreilles.

-Ou peut-être que t'es venu pour me voir spécifiquement ? Quel honneur. Je t'ai fait tant d'effet que ça au barbecue la dernière fois ? Demanda-t-elle ensuite avec son éternel air moqueur.

N'était-ce pas aux insultes et aux moqueries qu'on reconnaissait de vrais amis ? D'ailleurs, profitant du fait que Yuduar avait passé la tête à travers l'une des fenêtres de la calèche, Astrid fit tomber par télékinésie de la neige du toit de la voiture directement sur sa tronche et éclata de son rire de sale gamine :

-Hahahaha ! Là tu te fonds dans le décor !

Avant de mourir de rire suite à sa petite farce digne d'une gamine de 10 ans qui venait tout juste de découvrir la joie et l'amusement de casser les couilles aux autres, Astrid avait tout d'abord émit un léger « Aaaaaaaaaaaaaaah » en se souvenant qu'il était en effet courant que les hauts gradés de la garde fassent une petite réunion de fin d'année bien barbante autour d'un repas sobre et d'un verre de vin dégueulasse. En tout cas, c'était comme ça qu'Astrid s'en souvenait, et l'espace d'un court instant, elle eut de la peine pour le pauvre gamin qui allait devoir subir ça, surtout en compagnie d'Arban qui n'était pas vraiment connu pour être drôle. Quoique, en comparaison à feu Edmond, Arban était en fait un vrai petit blagueur agréable et plein de joie en fait.

Arrêtant peu à peu de se foutre de la gueule blanche de neige du capitaine, la citoyenne réussit à répondre entre deux souffles et en essuyant ses larmes de rire :

-Hahaha...Pfiou, eeh, ouais, de nouveaux jouets ! Je les ai découvert derrière une poubelle quand j'étais en train de vomir….Drôle d'histoire j'te jure, mais pas mécontente !

Une étrange histoire en effet dont elle ne gardait que de vagues souvenirs en réalité. Vraiment, quelle sacrée coïncidence d'avoir trouvé tous ces objets magiques qui lui allaient comme un gant derrière une poubelle dans une sombre ruelle de la capitale pendant qu'elle se vidait l'estomac après une soirée bien trop arrosée. Parfois, elle se demandait si Lucy l'aimait bien au final, avant de se rendre compte que non, pas vraiment.

-Ah les cadeaux ! Naaaah, j'achète pour les potes. Répondit-elle avec son éternel sourire narquois. Les gens qui me supportent sont assez rares pour que je les en remercies, une fois par an au moins, héhé.

Ils pouvaient même se compter sur les doigts de la main pour la citoyenne qui avait le don d'agacer et d'embêter absolument tout le monde. Mais au moins, l'avantage, c'était que ça lui faisait des économies certaines.
Lorsque Yuduar proposa de déposer la femme à tout faire, celle-ci n'hésita pas un seul instant à accepter. Pourquoi se gêner ?

-Bah, je me fais assez transporter par des gardes pour rejoindre une cellule pour que ça n'étonne plus personne. Et par contre...elle plissa les yeux et plaça sa main devant elle, s'en servant comme visière pour se protéger du soleil qui était, soyons franc, inexistant. Un beau brun ? J'en vois pas. Tu parles de lui peut-être ? Elle pointa du doigt un passant, puis se mit à ricaner : Moi j'ai rien à craindre, c'pas moi le coureur de jupons du Grand Port, heh.Avec un éclat de malice dans les yeux, elle rajouta en se grattant le menton, faisant de toute évidence semblant d'être pensive : Je me demande ce que cette Milan doit en penser, cela dit.

Rien ne confirmait leur relation, mais pour la blanche, il était toujours marrant de taper dedans pour taquiner le capitaine qui devait en avoir l'habitude depuis le temps. Acceptant donc la proposition du brun, Astrid s'avança vers lui et lui dégagea de la neige sur son épaule avant de la lui tapoter :

-Tu devrais venir faire les boutiques avec moi tiens, histoire que t'offres un truc à Arban toi aussi. Il se décarcasse tellement alors qu'il était à la retraite y'a pas si longtemps qu'il mérite bien un petit quelque chose pour qu'on l'en remercie. Mais avant ça….

L'espace d'un instant, la femme disparut, ne laissant derrière elle qu'une traînée de neige et de pas sur la neige. Il fallut quelques secondes avant qu'elle ne reviennent en un clin d’œil, avec deux chocolats chauds dans les mains. Elle en tendit un à son camarde avant de monter dans le carrosse et lui dit avec un clin d’œil :

-Ce serait bête que t'attrapes froid à cause de la neige. Tiens, ton cadeau du Solstice, heh, réchauffe toi avec. À moins que tu préfères qu'on se réchauffe mutuellement ? Huéhuéhuéhué.

Blague après blague, beauferie après beauferie, Astrid était inarrêtable.
Et totalement fière d'elle, elle avala son chocolat chaud avant de pousser un soupir de soulagement. Pfiou, ça faisait sacrément du bien en cette période.

-En tant que trésorière royale, elle doit sacrément bien manier les bourses. Rajouta la citoyenne tout autant amusée que le capitaine. Surtout les tiennes, huéhuéhué. Et peut-être que tes Valkyries comme Solveig et Sam ont un grand avenir dans la trésorerie aussi, à toi de me le dire, heh.  

Les rumeurs étaient ce qu'elles étaient, et Astrid le savait. Mais vraies ou fausses, elle s'en moquait éperdument et aimait juste en jouer et les amplifier. Cela dit, elle avait ses doutes sur la véracité de celles-ci, et si l'occasion lui était présentée un jour d'utiliser une potion de vérité sur ce gamin, elle n'hésiterait bien entendu par une seule seconde. Toutefois, peu importe la vérité, il était sûr et certain qu'elle continuerait à briser les couilles et à embêter le pauvre garde.
Bien entendu, ce dernier n'avait aucune idée de quoi offrir au commandant et cela n'étonna pas Astrid, surtout lorsqu'il confirma ce qu'elle avait pensé : à part pour le boulot, ils ne se voyaient pas vraiment pour boire des coups. Vu l'emploi du temps et le caractère d'Arban, c'était loin d'être étonnant et on ne pouvait pas vraiment dire qu'Astrid allait souvent picoler avec lui non plus. Ça arrivait, mais trop peu souvent au goût de la femme à tout faire. Au moins, elle avait l'avantage de mieux connaître l'autre sale gamin qu'elle...non, qu'Edmond avait eu sous son aile auparavant pendant un temps.

Une fois confortablement installée avec sa boisson entre ses mains, la blanche hocha la tête à la question du capitaine. Il n'y avait pas à dire, c'était bien plus chaud et confortable de ne pas avoir à marcher en plus de pouvoir se faire plaisir avec du chocolat chaud. Elle n'aurait pas rêvé mieux puisqu'elle ne pouvait absolument pas se permettre de se payer ce genre de moyen de transport avec ses maigres finances qui partaient déjà dans l'alcool. Pas à dire, la vie de femme à tout faire était pas facile, et contrairement à elle, le capitaine lui gagnait bien sa vie en plus de ne pas avoir à directement payer de sa poche les moyens de transport comme les calèches ou même dans une certaine mesure les portails de téléportation, heh. Que des avantages auxquels Astrid avait renoncé sans remords. Mais parfois, ça lui manquait bien.
D'ailleurs, son manque de sous et le trop plein de sous de l'autre lui donna une idée.

-Des idées de cadeau pour Arban j'en ai masse,
Contrairement à toi qui est à la ramasse,
Mais il ne faut pas avoir d'angoisse,
Parce que Astrid Dalgaard est dans la place,
Et tout ce dont on a besoin, c'est que tu sois plein aux as.
Heh.

Et sur ces sages paroles dont elle était si fière qu'elle en bomba le torse, elle but une gorgée de son chocolat chaud avant de s'étrangler avec, se mettant à tousser frénétiquement dans la calèche et renversant une partie de sa boisson sur le sol. Le karma n'était jamais bien loin de la citoyenne qui essuya le coin de sa bouche avec le manche de sa veste, ignorant totalement toute histoire de propreté.

-Merde, kof kof, putain…. ! Eeeeh, donc, où j'en étais ? Ah. Arban. J'avais déjà pensé à lui acheter un objet quelconque pour me moquer de lui, genre un livre pornographique ou un vagin artificiel parce qu'il doit se sentir bien seul.  Un rire gras accompagna la fin de sa phrase avant de reprendre un peu plus sérieusement : On pourrait aussi lui acheter un manche à balais pour la blague qu'il appréciera sûrement pas, mais nous faut autre chose aussi, un vrai truc. Petite pause, puis un sourire en coin. T'as sûrement remarqué que j'utilise beaucoup « on » et « nous »… Elle tapa alors dans les côtes du gamin avec son coude, armée de son air le plus complice et son plus grand sourire. Ça te dit de coopérer ? J'ai des idées, tu as des bourses encore bien remplies que tu n'as pas encore vidé chez la Milan, je pense qu'on peut faire en sorte d'offrir un bon cadeau à ce vieux Arban de… « notre » part, heh. Qu'est-ce que t'en dis ? Et je propose absolument pas ça parce que je suis un peu fauchée, haha. Genre, pas du tout. Vraiment. J'le jure.

Et pour confirmer ses dires, elle se mit à tousser et siffloter comme si de rien n'était.

Un nouveau rire retentit dans la calèche alors que Yuduar décrivait avec précision l'état de ses bourses épuisées.

-Si jeune et déjà quasiment vide ? Ça doit bien en profiter dis moi. Ta trésorière doit suer et être vaaaaachement épuisée, à force de devoir gérer tes bourses qui se vident. J'te jalouse un peu j'dois avouer, heh.

Des sous-entendus à peine cachés qu'elle prenait un malin plaisir à faire et auxquels le capitaine répondait du tac au tac. C'était ce qu'elle aimait bien aussi, chez ce sale gamin. Cela dit, elle s'inquiéta un moment que les finances du garde soient vraiment au plus bas, limitant leurs choix de cadeau pour le nouveau commandant. Aussi, ce fut après un petit soupir soulagé qu'elle s'exclama en tapant un grand coup l'épaule de son camarade :

-À la bonne heure ! Faut parfois savoir économiser un peu ses forces, pour repartir de plus belle ! Si tu voix ce que je veux dire, huéhué.

Ils parlaient toujours de cristaux, hein ? Difficile à le dire, et le jeune Londar ne semblait plus savoir où donner de la tête en entendant le capitaine parler d'une telle manière et se faire traiter de la sorte par une inconnue qui n'était de toute évidence pas de la garde. Si seulement il savait qui était Astrid, elle aurait payé cher pour voir son choc !

-Te fais pas trop de bile gamin. Je ramènerai ce grand con intact ! Petit moment de silence durant lequel elle resta pensive. Puis elle rajouta :  À priori ! Un autre moment de pause.  Je pense. Un autre moment.  Peut-être. Une pause.  Éventuellement. Potentiellement. Enfin, elle haussa les épaules : Eeeeeeh, on verra bien.

Pour sûr qu'Arban comprendrait de quoi il en retournait quand on croisait le chemin d'Astrid Dalgaard. Entre autre, il y aurait beaucoup de merde et de chaos en perspective et il était parfaitement possible que cela lui donne plus de travail qu'il n'en avait déjà.
Quelques minutes plus tard, les deux compères se retrouvèrent non loin de la Place Commerçante de la capitale, laissant derrière eux le cocher qui ne semblait plus savoir quoi faire.

-Ouep. Confirma la citoyenne en suivant les pas de Yuduar vers la Place dont on entendait déjà le brouhaha habituel des passants et des commerçants, surtout en cette période.  Exactement. Nous faut tout ça. Et tu te souviens du jour où on est allé le chercher et où il nous a accueilli avec des arbalètes ? T'étais même prêt à te pisser dessus ! Un souvenir qu'elle n'était pas prête d'oublier….Bon, certes, elle avait peut-être exagéré, non, inventé la dernière partie, mais est-ce que c'était vraiment siiiiii important ? Ahem.  Il est fan de mécanismes et d'ingénierie, donc on pourrait lui fournir un ptit objet technologique ou quelques outils supplémentaires dernier cri. Parce que quelque chose me dit que depuis qu'il a repris du service, il a pas trop eu de temps pour son petit hobby. Et c'est un peu not' faute.

Est-ce qu'elle se sentait coupable ? Un peu. Elle l'avait un peu sortie de sa retraite qu'il avait pleinement mérité et l'avait vendu pour ne pas avoir à elle devenir éventuellement commandant pour remplacer Fergys. Le royaume aurait peut-être bien trouvé quelqu'un d'autre que Arban ou elle, mais il y avait toujours eu cette infime possibilité qu'elle n'avait pas été prête à jouer.
Tout en marchant, elle sortit de sa poche un bonbon qu'elle déballa avant de le fourrer dans sa bouche. On ne le dirait jamais assez, mais en plus d'être alcoolique, la femme à tout faire était une grande gourmande. D'ailleurs, elle interpella le garde et lui en lança un également avec son sourire narquois habituel :

-Tiens, cadeau, heh. Promis, il est pas pimenté. Je crois. Et du coup tu comprends mieux pourquoi ma bourse seule ne suffit pas, heh. Ça coûte pas rien ces machins là faut dire. Aprèèèèès…..on peut toujours se contenter d'un truc pour ses chats, il aimerait tout autant, haha.

Et alors qu'ils discutaient de quoi acheter à ce bon vieux commandant, les deux amis arrivèrent finalement à la Place Commerçante de la capitale, qui, sans surprise, regorgeait d'activité et de monde en cette fin d'année. Bondée comme jamais et décorée de multiples couleurs pour le plus grand plaisir des yeux , il serait bien facile de se séparer et de se perdre en faisant les boutiques et en cherchant quoi offrir. Elle demanda donc:

-Hmm, on se sépare et on se retrouve ici ou va chercher ensemble quoi lui offrir ?

A son tour Astrid goba son bonbon avant de faire une petite grimace en se rendant compte qu'il avait un goût de…..châtaigne. Ça lui apprendrait à acheter des bonbons avec des goûts surprise pour surprendre ses connaissances. Et il fallait dire que ce n'était pas l'un des pires ! Goût piment, œuf pourri...Bref. Et en observant la réaction du capitaine, il était tombé sur une douceur plus...conventionnelle. Tch.
Tout en calant le bonbon dans sa joue droite, la citoyenne répondit aux questions du capitaine qui ne semblait pas vraiment connaître les boutiques spécialisées de la capitale. À vrai dire, Astrid non plus. On ne pouvait pas dire qu'elle fréquentait beaucoup les boutiques d'enchantements ou des forges. Elle avait bien quelques adresses cela étant, mais toutes fermées pour congés. Pas de chance.

-On avisera, comme tu dis. Mais je m'y connais moins en trucs pour chats, même si j'ai une tonne de familiers. Bien trop, soupira-t-elle mentalement. Puis, elle rajouta en ricanant :  Si on doit payer avec TON rein, moi ça me dérange pas hein, héhé. C'est un sacrifice que je suis totalement prête à faire pour notre bon vieux Arban.

Direction l'Allée des Forges, le meilleur endroit du royaume pour acheter une arme ou un objet magique, il ne fallut pas longtemps pour que Astrid se mette à lever le nez pour renifler l'air. Est-ce qu'elle venait de sentir… ? Fermant les yeux, se concentrant uniquement sur l'odeur, elle repéra bien vite la source et eut un grand sourire ravi, se léchant rapidement les babines en s’imaginant y tremper ses lèvres. Elle avait bien prévu de boire plus tard, mais quand une occasion comme celle-là se présentait, comment refuser ou résister ?
D'ailleurs, sans surprise, le capitaine eut la même idée et proposa à la femme à tout faire un verre.

-C'est fou, tu lis dans mes pensées ou quoi ? Tu t'es payé un jouet pour ça aussi ? Hehe.

Les deux comparses étaient assez similaires pour s'entendre sur ce point, et bien d'autre encore, expliquant pourquoi ils étaient amis. Et, en attendant que le capitaine aille acheter ces verres, Astrid se mit à réfléchir à quel objet acheter. Les possibilités étaient immenses après tout, mais ils se contenteraient sûrement d'un objet qui n'aurait pas été personnalité pour le commandant, car c'était certain de coûter plus qu'un rein. Probablement un bras et une jambe aussi. D'ailleurs, elle se demanda un instant quelle tête le gamin ferait, en recevant un cadeau. Ça la rendait plus curieuse que nécessaire, et peut-être qu'elle accompagnerait Yuduar pour lui remettre ce qu'ils auraient acheté, juste pour voir son expression. Toutefois, elle fut très vite sortie de ses pensées par le brun qui ramenait enfin le vin chaud.

-Je vais pas contredire. Répondit-elle en prenant le verre qu'elle leva en direction de son camarade.  Santé ! Il manquerait juste quelques macarons pour accompagner le tout et faire un vrai goûter, heh.

C'est tout en s'hydratant qu'ils finirent enfin par arriver au Quartier des Forgerons dont l'ambiance était clairement moins festival que sur la Place Commerçante. En même temps, les lieux étaient moins propices à la fête et pour preuve, l'endroit n'était pas aussi bondé ni fréquenté mais était par contre tout aussi bruyant pour d'autres raisons. Notamment des marteaux tapant sur des enclumes.
Entre autre, ça ne donnait pas vraiment envie de faire les boutiques ici.
Levant un sourcil interrogateur, Astrid regarda la boutique qui ne se démarquait pas tant des autres et d'une sobriété qui vous donnerait envie de peindre le tout en rose. Quant au nom, ça ne lui disait rien mais elle ne pouvait pas tout connaître non plus. Haussant donc les épaules, elle s'avança et pénétra dans l'antre de ce fameux Aimaye Tih. L'état des lieux qui était absolument déplorable, plus déplorable encore que la maison de la blanche réussit à lui soutirer un:

-Hé béh.

Des armes de toutes sortes accrochées sur les murs de manière désordonnées, des tonneaux où divers objets y étaient déposées de manière chaotique, des cartons entiers d'outils magiques non-identifiés….

-Ma Lucy, moi qui croyais que j'étais désordonnée.

Un pas après l'autre, elle fit bien attention à ne pas marcher sur une quelconque arme enchantée qui lui exploserait au pied, et apercevant une silhouette leur tournant le dos au fond de la boutique s’affairant à un quelconque enchantement sur son atelier, Astrid hurla :

-Bonsooooiiiir ? Monsieur Aimaye Tih ? On aimerait acheter un truc pour...euh, un ami ! Qui aime bien les trucs technologiques ! Vous auriez pas des soldes ? Des réductions quelconques ? On est un peu fauché vous voyez...Enfin surtout moi. Lui par contre il est riche comme Cré...

Soudainement, son pied tapa dans un petit bracelet en acier qui traînait par terre. Rien de particulier au premier abord, mais ne résistant pas à sa nature curieuse, Astrid ramassa l'objet et remarqua alors un petit mécanisme qu'elle activa.
Surprise.
Cela fit apparaître un sucre d'orge dans les mains de la femme à toute faire qui se tourna vers Yuduar en haussant les sourcils.

-….Ok ? Quand tu disais saloperies marrantes, j'pensais pas vraiment à ça ? C'est mangeable au moins ?

Plissant les yeux, la femme à tout faire tourna le sucre d'orge dans tous les angles possibles pour l'examiner. Ça avait l'air d'une sucrerie tout à fait normale, mais malgré tout, la bonne chose à faire aurait été de ne pas y goûter et de remettre le tout sur l'étagère comme le vieux Aimaye Tih leur avait gentiment demandé. Toutefois, on parlait ici d'Astrid Dalgaard, une enfant dans un corps d'adulte qui ne se souciait guère de l'avis des autres, qui était bien trop curieuse pour son propre bien et qui détestait absolument qu'on lui donne des ordres.
Aussi, ce fut en haussant les épaules qu'elle goba le sucre d'orge. Était-ce de l'inconscience ? Un peu, mais elle savait que si elle tombait malade, elle n'aurait qu'à activer son pouvoir pour se guérir.

-Hmm, pas mauvais. Dit-elle en jetant le bracelet dans une caisse quelconque.  Pas mauvais du tout même. Ché quoi cha ?

Délaissant Yuduar et le vieux forgeron qui étaient bien trop occupés à se remémorer le bon vieux temps, Astrid telle une enfant entrant dans un magasin qui lui était inconnue se décala discrètement pour observer les différentes étagères, caisses, tonneaux, n'hésitant pas un seul instant à toucher à tout ce qui pouvait attirer son attention et à tout ce qui pouvait être drôle. C'était bien entendu là sa curiosité plus que l'envie de trouver un objet technologique pour Arban qui était à l’œuvre. Qui sait si elle ne trouverait pas dans ces ordures une pépite qui lui permettrait de faire des farces et des conneries encore plus débiles ? Ah et oui, trouver un truc pour l'autre gamin. Il ne fallait pas qu'elle oublie. Un bâton avec deux lames rétractables, ennuyant, un gant déployant un bouclier, chiant...Oh ! Une épée émettant des lumières multicolores ! Drôle ça !
Recherches après recherches, créant encore plus de bordel et de chaos au fur et à mesure, son regard tomba finalement sur ce qui semblait être des vêtements rouges et blancs.

-Hmmm….

Quelques secondes plus tard, tous les regardes se tournèrent vers elle alors qu'elle était en train d'enfiler cette tenue étrange. Avec déjà la veste rouge bordée de bandes blanches bien trop grande pour elle ainsi qu'un bonnet pointu de la même couleur, elle croisa le regard des deux autres et laissa  tomber son sucre d'orge sur le sol, prise la main dans le sac. Dans un silence plus que gênant, elle continua à mettre le pantalon rouge par dessus le sien et resserra la ceinture noire autour de sa taille.
Une fois prête, elle s'attendit à ce que ce costume active un quelconque effet, mais ce ne fut pas le cas à la grande déception de la citoyenne qui poussa un soupir exaspéré.

-Nah, sa poule c'est la deuxième de la famille Milan. Du coup, on peut dire que Yuduar a un gros COQ. Est un gros coq pardon. Heh. Ricana-t-elle en tentant de trouver un quelconque bouton d'activation sur les manches de sa nouvelle veste.  Ça fait quoi ?

-Oh ça ? C'est une tenue qui permet de rentrer et de sortir d'une cheminée en toute facilité. Enfin, c'était. Il y a plus vraiment de magie et j'ai enlevé tous les mécanismes qui y étaient liés pour d'autres objets.[/b]

Hmm. Le genre d'objet vachement pratique pour cambrioler les maisons avec une cheminée. D'ailleurs, maintenant qu'elle y pensait, il y avait un an de cela à la même période, plusieurs cas de cambriolages s'étaient déclarés dans la capitale et de rares témoins auraient dit avoir vu une silhouette sur les toits en pleine nuit. Hmmm….
Naaaaaaaaaaah. Une simple coïncidence.
Et donc, où-est ce qu'ils en étaient ? Ah oui. Un cadeau pour Arban.

-Hmm...J'sais pas, tout dépendra du budget du ptit con. Elle pointa Yuduar du menton avant d’enchaîner : Sinon, un objet relativement complexe et pas trop cher, et ptet qu'il pourrait démonter et remonter pour pouvoir l'examiner et l'étudier. C'est un petit féru de mécanique et d'ingénierie faut dire notre pote, bien capable avec ses 10 doigts. Du coup...J'sais pas. Le gant-bouclier pourrait être pas mal, ou cette ceinture qui tire deux grappins et qui se permet de se déplacer tant qu'il y a des choses sur quoi s'accrocher. Aprèèèès, j'dois avouer que j'ai un faible pour cette épée qui tire des rayons lumineux arc-en-ciel huéhuéhué.

Accompagnant le geste à la parole, elle leva l'épée vers le plafond, baignant soudainement la boutique dans une lumière à la couleur changeante, allant du rose bonbon au caca d'oie.
Sourire en coin, elle s'adressa ensuite au capitaine :

-Y'a plein d'autres trucs j'imagine. Mais si t'as des sous en plus pour ce costume rouge je prends aussi huéhué, je l'aime bien.

Parce qu'une merde arrivait toujours avec Astrid, elle ramassa cette fois un bouclier en face des deux hommes.

-Hey ! Dépose ça tout de su…. !

Mais trop tard, un filet venait de sortir du morceau de ferraille pour tomber directement sur Yuduar et le forgeron.

-Oops….

Lentement mais sûrement, elle déposa l'objet par terre. On ne pourrait pas dire qu'elle n'avait pas écouté les conseils et les ordres qu'on lui donnait.

-C'est pas mal aussi, ça, tu trouves pas Yud' ?

Puis, comme si de rien n'était, elle se mit à siffloter et regarda ailleurs.

À peine venait-elle de piéger Yuduar et le forgeron que – de manière tout à fait involontaire et imprévue rappelons le - l'attention d'Astrid se reporta sur une autre caisse pleine d'objets en tout genre. Ni une ni deux elle se remit à fouiller, toujours à la recherche d'un trésor unique pour la farceuse qu'elle était. Elle trouva bien des choses, comme une chaussette rouge qu'il fallait mettre au dessus d'une cheminée, ou même une corde permettant d'attacher des somnambules à leur lit….Attendez, c'était vraiment un objet magique ou technologie ça ? Avec un haussement d'épaule désintéressé, elle balança l'objet derrière elle et continua sa chasse, tombant cette fois sur une petite boite métallique sobre et froide. Elle n'avait pas l'air très intéressante comme ça, mais….étrangement, l'intuition de la citoyenne lui disait que c'était une sacrée trouvaille. Mais la question était bien sûr, quel effet ?
Se creusant la tête, elle se tourna vers le capitaine, appuya sur un petit bouton et……

-AH. S'exclama-t-elle en voyant le garde qui était soudainement en tenue rouge qui lui rappelait étrangement la tenue rouge qu'elle port….

...tiens, pourquoi est-ce qu'elle se sentait plus libre au niveau de la poitrine ? Cette sensation si familière de liberté en fin de journée…Baissant son regard pour constater avec amusement que ses vêtements avaient également disparu pour être remplacés par ceux du capitaine bien trop larges, elle eut un grand sourire. Toussant un instant pour échauffer sa voix, elle bomba le torse et dit avec une voix grave, imitant son camarade d'infortune :

-Regardez moi ! Yuduar Al machin chose, le capitaine fantasque du Grand-Port ! Je me tape toutes les valkyries sous mon commandement et ces temps-ci j'ai même pris goût aux jeunes nobles arrogantes ! Mais c'est pas tout parce que…. !

Un unique pas devant elle suffit à ce que la pipelette arrête soudainement de parler car elle dut tenir son pantalon – ou plutôt le pantalon du capitaine – pour éviter qu'il glisse trop.

-Mon vieux, tu vas devoir te mettre au régime. Lui dit-elle en ricanant et un clin d’œil. C'est pas mal comme objet ça aussi en vrai, j'adore ! Une vraie caverne d'Al...euh aux trésors débiles en fait cet endroit! J'y reviendrai quand j'aurai moi-même plus de sous, huéhué !

Mais de toute évidence, le propriétaire lui n'était pas ravi à l'idée d'avoir Astrid comme cliente régulière et le fit bien comprendre avec moult insultes, arrachant soudainement l'objet des mains de la citoyenne. Ni une ni deux, ce fut avec grand regret que la femme à tout faire reprit ses habits rouges et Yuduar les siens.

-Tch. T'es pas drôle Aimaye, faut s'amuser un peu dans la v….

-Ça suffit nom d'une pipe !

Non content d'avoir arraché à Astrid son nouveau jouet, le vieux forgeron attrapa le bras de la citoyenne qui haussa un sourcil. Est-ce qu'il comptait finalement la jeter dehors ? Ce serait sûrement le choix le plus sensé à faire, vu comment elle était insupportable à force de tout toucher. Qui sait si dans 2 minutes elle ne ferait pas exploser la boutique avec un objet interdit sous le comptoir ?
Mais non, le vieux forgeron semblait avoir une autre idée en tête. Sans crier gare, il jeta sur Astrid une petite bille de fer qui explosa sous les yeux ébahis de la citoyenne pour faire apparaître une multitude de corde. Avec sa vitesse, elle aurait pu facilement esquiver et fuir...si seulement elle n'avait pas été retenue par ce vieux débris. Aussi, la seconde qui suivit, Astrid se retrouva ligotée du cou jusqu'au pied et totalement incapable de se mouvoir.

-Qu'est-ce que…. ?!

Ignorant la femme à tout faire qui était désormais hors d'état de nuire, le propriétaire se tourna vers Yuduar en lançant et rattrapant avec sa main d'autres billes similaires.

-Voilà, comme ça elle s'tiendra tranquille la petite ! T'devrais revoir tes fréquentations ! Et du coup j'peux vous proposer ça aussi. Il suffit de lancer la bille sur quelqu'un pour la ligoter sur le champ comme t'as pu le voir. J'pourrais libérer ton amie et récupérer la bille d'un simple geste, mais je vais m'y risquer avant que vous ayez acheté un truc et qu'elle dégage le plancher!

Il fallait dire qu'elle l'avait bien cherché.

La bâillonner ? Avec une chaussette qui plus est ? Astrid aurait espéré que Yuduar la connaisse un peu mieux. Car nul doute que même si elle se retrouvait incapable d'utiliser sa voix ni de se mouvoir, elle aurait bien d'autres moyens de communiquer comme cligner des yeux ou taper du pied pour faire passer ses blagues de merde en morse. Certes, les personnes pour la comprendre auraient été limitées, mais au moins, l'intention y était !
Mais bon, tant qu'elle avait la possibilité de raconter des conneries, autant continuer :

-Ligotées et ballonnées, c'est donc ça que t'aimes chez les nanas Yuduar ? Hé bien hé bien, je n'irai pas juger le vice des autres heh. La jeunesse de nos jours.

Avec un soupir désabusé, elle remua la tête de droite à gauche et se tenta même à -difficilement- hausser les épaules.
Désormais bien incapable de toucher à tout ce qui se trouvait sous son nez, la femme à tout faire se contenta de sautiller telle un saucisson pour se déplacer à travers la boutique alors que les deux hommes étaient retournés à leur discussion sur le cadeau d'Arban. Bien sûr, elle écoutait attentivement ce qui se racontait mais il fallait bien qu'elle s'occupe un peu. Puis, pour activer un objet, des mains n'étaient pas forcément nécessaire….heh. Avec un sourire mauvais, elle fouilla cette fois de façon télékinétique une autre caisse et ce en toute discrétion pour ne pas véritablement finir avec une chaussette dans la bouche et les yeux bandés. Sans un bruit, elle souleva des objets et les examina avant de les reposer par terre, jusqu'à ce qu'une fois encore un outil en particulier capte son attention. Une sorte de petite boite rectangulaire avec différents boutons. À quoi pouvaient-ils servir… ? Elle amena l'objet au niveau de sa tête et le tourna dans tous les sens jusqu'à ce que la voix de Yuduar l'interrompt dans son examination. Sous la surprise, elle lâcha mentalement l'objet qui tomba à terre, s'activant soudainement pour qu'une mélodie qui pouvait s'entendre dans toute la boutique et même dans la rue se fasse remarquer. Une mélodie qui correspondait bien à la période et au solstice.
Curieux, certaines personnes s’arrêtèrent et passèrent leur tête pour observer d'où venait la source de cette musique, et  Astrid en profita donc pour chanter à tue-tête des paroles sans grand sens :

-Fonce petit traineau, comme le veeeent,
à traveeeers la neige, PADORU PADORUUUUUU !

Appuyant sur un autre bouton, la mélodie changea cette fois pour un air plus prenant, et toujours aussi débile, la farceuse continua dans sa folie tout en se trémoussant :

-J'en ai bavé, je suis coincé….
Je suis ton grand chipolataaaa, chichi popo latataaaaaaa !

La musique changea une nouvelle fois et cette fois, Astrid se tourna vers le capitaine en continuant à chantonner de vive voix :

-Je pense que c'est parfait ! Paye et on pourra se barrer, avant que Aimaye ici présent m'étrangle, car je le vois dans ses yeux, il en a vraiment envie !

La main rejoignant son front, le forgeron jura dans sa barbe hirsute avant de lancer moult autres insultes à la citoyenne, comme quoi elle était pire qu'une gamine surexcitée et bien d'autres mots désobligeants. Ce qui était...totalement vrai. Toutefois, la blanche fit mine de ne rien entendre et répondit :

-Pardoooon ? J'entends rien ! La musique est trop forte ! Ça coûte combien du coup ce brassard ?

-….

-Quooooooooooi ? Faut parler plus fort ! T'as entendu quelque chose toi Yud ?!

Oh, elle se foutait totalement de sa gueule et pour qu'il n'y ait aucun doute sur ce fait, elle se mit à ricaner avec son air moqueur habituel.

Une nouvelle musique, de nouvelle paroles qu'Astrid connaissait également. Sautillant et tournant sur elle même, activant également l'épée arc-en-ciel pour baigner toute la boutique de couleurs éclatantes et vives, elle chanta en même temps que Yuduar et poursuivit avec un ironique :

-LIBEREEEEEEEE, DELIVREEEEEEEEEE ! - malgré le fait que je sois encore ligotée - JE NE MENTIRAI PLUS JAMAAAAAAAAAAIS !

Elle était prête à s'ambiancer davantage, adorant cette musique, mais un soudain « coupe le son » l'interrompit malheureusement. Aaaah...et dire qu'elle s'amusait bien. Haussant les épaules autant qu'elle le put, elle fit léviter une épée en direction de la boite jusqu'à ce qu'un « éteint le son, coupe pas la boite ! » paniqué l'interrompt de nouveau.

-Roh bordel ! Se plaignit-elle en faisant tomber son arme dans un grand fracas. Faut savoir à la fin !

Continuant à rechigner, elle finit toutefois par obtempérer. Au moins, elle saurait quel objet acheter en revenant ici avec plus de sous dans les poches. Elle ne pouvait décidément pas passer à côté vu le potentiel de ce gadget qui l'aiderait bien dans ses farces et pour faire la fête en général. Sans surprise aucune, le brun eut la même idée et semblait également bien intéressé par la boite musical. Fallait dire que son barbecue de la dernière fois était bien cool mais qu'il avait cruellement manqué de musique entraînante.
Quel était donc le prix de tous ce bordel ? Ne pouvant pas donner de coup de coude à son camarade, elle se contenta d'un coup de hanche pour attirer son attention et lui dit à voix basse :

-Petit jeu, parions combien tout ça va coûter. J'miserais sur...50 cristaux gris !

Un beau petit pactole, surtout pour Astrid car c'était bien là l'équivalent d'un peu près 10 fois le salaire mensuel d'un citoyen mal payé. Le nombre de bières qu'elle pourrait se payer avec cette somme...bordel. Cela étant, elle avait peut-être visé trop haut, ne s'étant jamais réellement renseignée sur la valeur de ce genre d'objet.

-Pour toi Yuduar, je te fais les 3 à… le forgeron hésita un instant, jeta un coup d’œil à Astrid quelques secondes, puis dit finalement : disons 170 cristaux gris.

-….

Les yeux ébahis, la bouche grande ouverte, Astrid resta silencieuse en fixant Mr.Tih. L'espace d'un instant, elle hésita à se prendre une boisson, n'importe laquelle, pour la boire puis la recracher sur le forgeron pour encore plus dramatiser sa surprise et son choc.
Il blaguait hein ? 170 cristaux gris ? C'était 20 fois le salaire d'un citoyen ! Et un mois de salaire d'un putain de capitaine de la garde ! Quoique, maintenant qu'elle y réfléchissait, c'était pas un peu débile et abusé que les capitaines gagnent autant comparé à des citoyens ?!
Non, ce n'était pas le moment de remettre en question le système économique qui régissait le royaume. Le plus important à retenir était que, d'un point de vue d'une personne lambda, ce prix était totalement démesuré et elle le fit bien savoir :

-Attends attends le vieux sénile, t'as pas l'impression, l'étrange impression que t'abuuuuuuuses un tout petit petit peu…. ? Y'a pas une petite réduction pour le petit con ? Vous vous entendez tellement bien faut dire ! Pas vrai que vous vous entendez bien Yuduar ? Allez, j'suis sûre que tu peux descendre à...disons….30 cristaux gris pour les trois objets ? Alllleeeeeeez !

Lui faisant les yeux doux et adoptant un sourire angélique qui lui ne sied guère, elle tenta tant bien que mal d'amadouer le vieux propriétaire. Peut-être que si elle ne s'était pas montrée aussi intenable, chaotique, débile, et un peu plus présentable sans ses cordes de la tête aux pieds, peut-être aurait-elle été un peu plus convaincante et aurait réussi à faire fondre le cœur de glace de Aimaye. Malheureusement, pour ces négociations là, il ne faudrait pas compter sur elle pour quoi que ce soit et le vieil homme le fit bien voir sur les traits de son visage : Fait de pierre, il se montrerait sans pitié.

-Tch.

La tentative de Yuduar pour baisser le prix des objets ne mena malheureusement à rien au plus grand désespoir de la citoyenne qui tapa du pied de mécontentement. Si elle avait encore son salaire de commandant, acheter tout ça n'aurait été qu'une bagatelle. Mais étant désormais citoyenne sans même la moindre pension et ayant vécu dans la pauvreté toute son enfance, ce prix lui semblait désormais tout bonnement obscène et inacceptable.
Se remuant les méninges à toute vitesse sur un moyen quelconque de convaincre le vieux Aimaye de céder du terrain, Astrid eut un soudain éclair de génie et afficha un sourire mauvais. Le genre de sourire mauvais qui ne disait rien qui vaille et qui se traduisait par "ça va être la merde". Un cambriolage, une arnaque, une escroquerie ! Un plan foireux, fou, risqué, mais comme disait l'autre, à vaincre sans péril on triomphe sans gloire, heh.

-Ouais cassons nous, on trouvera mieux et moins cher ailleurs. Confirma-t-elle en hochant la tête en se tournant également vers la sortie. Pour ce prix là, j'pourrais picoler pendant 20 ans sans me soucier de tomber à court de cristaux ! Franchement !

Toujours ligotée, elle sautilla donc devant les passants qui s'étaient rameutés précédemment à cause des chansons et du bordel de tout à l'heure. Après tout, ils avaient devant eux un sacré spectacle et un duo improbable dans une situation saugrenue. Surtout concernant l'étrange individu nommé Astrid.
Un saut après l'autre, esquivant les objets disséminés un peu partout sur le sol parce que cette boutique était un bordel sans nom, on put voir cette saucisse géante glisser sur une connerie quelconque et tomber soudainement en arrière comme un arbre sans aucun moyen d'utiliser ses bras pour se retenir à quelque chose ou se protéger :

-TIMBEEEEEEEEEEEEEEEEEEER ! Hurla-t-elle avant que sa tête fasse la rencontre avec le sol.

Bonk. Inconsciente. L'instant d'après, elle était debout dans une montagne enneigée, tentant de la grimper par tous les moyens sans jamais faire de progrès. Un pas après l'autre, elle avança encore et encore, mais le pic lui semblait toujours à la même distance, totalement inatteignable. C'est alors que, sans crier gare, des rennes tirant des traîneaux pleins de cadeaux apparurent à côté d'elle, et dans l'un des traîneau se trouvait un homme à la barbe blanche et à la bedaine proéminente habillé de la même façon qu'Astrid, c'est à dire en rouge avec un bonnet ridicule. Ou peut-être que c'était Astrid qui était habillée de la même façon ? Ce n'était pas important. Ce qui l'était par contre, c'était de savoir qui c'était.

-Euh, vous êtes qui ?

-Ohohoh, moi ? Je suis le père N….

Avant de pouvoir entendre son nom complet, la femme à tout faire revint dans le monde des conscients, ouvrant les yeux pour apercevoir les visages inquiets du capitaine et du forgeron au dessus d'elle. Il y avait également des têtes inconnues. Sûrement les passants. Eeeeh, qu'est-ce qu'elle faisait là déjà ? L'arrière de sa tête pulsait étrangement.
AH OUI. Début de l'opération, heh.
La première chose qui sortit de la bouche de la blanche fut un râle d'agonie :

-Uggggh.

-ça va ?

-Mal à la tête. La peur de ma vie. Dit-elle un peu plus fort. J'ai glissé sur un truc par terre.... C'est tellement mal rangé.  En plus j'étais attachée à cause d'une certaine personne donc j'ai pas pu me rattraper ou quoi. Poussant un petit soupir, elle continua : j'aurais pu finir dans un coma ou mourir en me prenant une épée à 80 cristaux gris dans la gueule. Heureusement qu'il n'y avait pas une connerie pointue à genre 60 cristaux gris là où ma tête a heurté le sol. Je me demande à qui la faute, tous ces risques…Elle était bien bavarde pour une personne venant de se casser la gueule...Et je me demande aussi si je devrais pas déposer plainte…Ma vie était en danger, quand même. Et y'a plein de témoins. Vous imaginez les gros titres ? « Une jeune femme ligotée par le propriétaire Aimaye Tih de Forge et Enchantement se retrouve avec le crâne ouvert parce qu'elle a glissé sur un objet mal rangé », ça mérite un petit geste commercial non…. ?

Durant toute sa tirade, elle se retint de sourire ou d'éclater de rire même si ce n'était clairement pas l'envie qui lui manquait. Elle n'avait aucun scrupule pour son propre gain, quitte à faire exprès de glisser par terre et à se faire mal. Pour les blessures ? Pas de problème, elle pouvait facilement se soigner avec ses joujoux, heh.