Quoi qu'il en soit, les informations récupérées ici étaient précieuses. Et pour la première fois depuis leur arrivée, Lyriss et Arthorias tenaient une véritable piste. Au moins, leurs efforts communs n'avaient pas été vains. Et alors que son coéquipier acquiesçait sur le fait de se mettre en route vers le Nord, Lyriss attrapa avec dextérité la bague lancée. Une fois encore, ça ne lui disait rien. Elle avait beau l'observer sous toutes ses coutures. "Hum...Effectivement. Mais ça ne me dit rien, je ne connais pas les pirates locaux." Affirma t-il avec regret en un haussement d'épaule.
Plaçant sa main à plat, le joyaux au centre, elle le tendit vers les ex-otages. "Ca vous parles?" L'homme s'approcha et la pris dans ses mains, l'air horrifié. "Varek...." Souffla t-il alors que les femmes partageait désormais sa stupeur. "C'est le Capitaine du Passeur du Temps. L'un des plus gros bâtiment de la flotte du coin". Lyriss haussa un sourcil. Ce nom lui disait quelque chose, elle était presque sûre d'avoir déjà entendu le nom de ce bateau. "Arthorias, ce bateau n'est pas, ou en tout cas n'était pas un bateau pirate jusqu'à récemment. Il mouillait souvent à grand port, il commerçait avec les Archipels pour approvisionner le continent". Assura t-elle en marquant un arrêt. "Et si..." Elle se tu un moment, réfléchissant à une théorie qui ne lui semblait plus si saugrenue.
"Arthorias, nous cherchons des pirates depuis le début. Mais si celui qui tirait les ficelles n'en était pas un?! Tu disais que les pirates n'étaient pas assez intelligents pour s'organiser de la sorte. " Reprit-elle avec enthousiasme. C'était en fait une très bonne couverture. Un riche capitaine, qui se sert de la piraterie pour s'enrichir encore davantage. "Je connais mal ce Varek, mais si ma mémoire est bonne, il n'a rien d'un bon samaritain, il a construit son empire en écrasant beaucoup d'autres marchants".
Elle se mit finalement en route vers le Nord, il n'y avait pas de temps à perdre. Arthorias avait raison, les pirates allaient sûrement revenir.
L'idée de Lyriss le frappa aussi durement qu'un carreau à bout portant. L'idée était folle. Un riche marchand qui subventionnerait des pirates pour mettre à mal le commerce dans la région. Créant par conséquent une flambée des prix via une diminution de l'offre. Et par la même, la ruine des compagnies rivales.
-Je ne connais pas non plus cet homme, pas même de réputation. Mais ce que tu dis se tiens. Et si une seule bague ne suffit pas à prouver sa culpabilité. Je pense que les anciens prisonniers que nous avons avec nous vont devenir une épine dans le pied de cet homme.
A n'en pas douter, le Passeur du Temps allait montrer le bout de sa coque s'ils tentaient de s'enfuir. Un tel navire aurait toutes les raisons de croiser dans les eaux. Pour peu que les pirates soient déjà prévenus...
Alors qu'ils progressaient sur la plage, l'officier vit à quelques kilomètres un pirate surgir sur la plage, ce dernier hurlant quelque chose qui fut emporté par le vent mais que l'officier devinait sans peine.
-Il faut accélérer. Le village ne devrait plus être très loin.
Et effectivement, les ruines fumantes de ce dernier étaient visibles. le groupe aurait tout juste le temps de les rejoindre avant de se faire attraper par les pirates mécontents.
Arthorias fit signe aux survivants de courir alors qu'il se portait à hauteur de Lyriss.
-Ils n'arriveront pas à embarquer à temps.
La horde de pillard fonçait sur eux. La distance était grande, mais ils étaient plein d'énergie et poussés en avant par une force inconnue. C'était presque oubliés qu'eux aussi avaient des pouvoirs.
Un javelot s'éleva de la horde et vint se planter entre les deux gardes.
Plantés entre les civils et les pirates, ils étaient deux contre une cinquantaines d'individus. Non sans humour, Arthorias se tourna vers sa partenaire avant de dire.
-C'est à peu près à ce moment que tu dévoile un pouvoir pour nous sortir de là
Un javelot planté soudainement entre eux deux surpris légèrement la Garde qui chercha du regard une échappatoire. Un pouvoir? Tu parles; Elle avait bien le pouvoir le plus inutile dans ces circonstances. "Je ne ressent ni le froid, ni la chaleur. Je ne vois pas bien en quoi ça va nous aider. Et toi alors?!". Précisa Lyriss en faisant un pas en arrière, se retournant vers le village en proie aux flammes. Par reflex, elle attrapa le bras d'Arthorias. "Arthorias...Le feu !" Souffla t-elle en se mettant à courir vers le brasier. "Je pourrais peut-être faire quelque chose là bas" Précisa t-elle tout en réfléchissant...Même là elle ne voyait pas bien comment intervenir.
Parvenu au village, elle ne vit pas les otages dans un premier temps. Avant de les apercevoir un peu plus loin, sur un ponton qui n'avait pas brûlé. Deux barques restaient là. Ils les attendaient. Lyriss commençait à se demander si c'était une bonne idée. Passant les barricade de fortunes embrasées du village, elle attendit qu'Arthorias ne soit entré pour saisir le pilier fragilisé de l'entré du village. Posant ses mains sur les braises incandescentes de ce dernier, elle poussa de toute ses forces pour le faire tomber, condamnant l'entrée du village momentanément pour gagner du temps "Ca ne va pas les retenir longtemps, il faut rejoindre les embarcations !"
Le pilier s'effondra dans un fracas de bois brisés et de cendres soulevées. L'appel d'air raviva des braises jusqu'alors quasi éteinte, relançant le brasier qui baigna de flammes les deux gardes.
La chaleur monta à tel point que l'officier fut contraint de quitter son corps mortel pour ne présenter qu'une armure vide à sa partenaire, sa voix se faisant plus caverneuse.
-Bon plan, mais ne nous attardons pas, j'ai peur qu'il trouve quelque chose pour ça aussi. Faisons vite.
Et alors qu'ils s'avançaient dans la fournaise, un des pirates fit se volatiliser purement et simplement le pilier qui bloquait le chemin, alors qu'un autre se mit à cracher de l'eau pour éteindre les flammes. S'ils continuaient ainsi, même eux n'arriveraient pas aux embarcations.
-Tu ne notera pas ça sur ton rapport.
Dans un mouvement fluide, il se retourna en dégainant Hex, expédiant un carreaux en plein de la gorge du cracheur d'eau, rompant chair et os. Le cadavre s'effondra dans le brasier, sa gorge trouée goutant encore un peu d'eau. Mais le tout fut rapidement consumé par les flammes.
Cela leurs fit gagner quelques précieuses secondes, suffisamment pour sauter dans une des barques encore à l'eau et ramer de toutes leurs forces pour tirer les gens de là
Laissant par la même, la compagnie de pirate sur le port à lancer des injures et quelques javelots qui ne blessèrent personne.
Le cœur redevenu de chair de l'officier battait à tout rompre alors qu'il se laissait tomber dans la barque. Il pensait que le plus dur était passé. Mais en cela... Il avait surement déjà tors...
-S'ils sont assez rapides, ils seront sur leurs bateaux avant qu'on ai pu aller bien loin, mais si on peut accoster sur une île moins recluse... peut être que la garde, malgré la corruption nous aidera...
Peut être
Il était bien évident que Lyriss n'était pas du genre à tout mentionner dans les rapports. Mais si la règle indiquait qu'elle le devait, certains détails n'avaient pas à être connus. Ceci dit, elle ne comprenait pas bien la réflexion de son acolyte. Ils étaient là en situation de légitime défense. Le fait d'abattre un pirate qui voulait clairement les tuer eux même ne présentait pas un élément inhabituel. "Pourquoi? Tu as peur que l'on sache que tu n'es pas si mauvais?" Rétorqua Lyriss avec malice, comme pour détendre une atmosphère plus que tendue. Il n'y avait bien qu'elle pour plaisanter bêtement alors qu'ils n'allaient peut-être pas s'en sortir vivants. Par chance, elle était combative. Et se faire tuer alors qu'elle était normalement en permission ne faisait pas partie de ses options.
Une fois dans la barque, Lyriss attrapa une rame, au même titre que tous les otages. "Allez, nous n'avons pas de temps à perdre, cap au Nord!" Indiqua t'elle avec fougue. Ce n'était plus l'heure de plaisanter. Ils devaient ramer de toute leur force pour gagner en vitesse et atteindre l'île qu'elle voyait poindre au Nord. Au milieu de leur traversé, les voiles de navires plus gros firent leur apparition à l'Est, mais par chance, ils parvinrent sur une île centrale des Archipels. A priori, une petite ville s'y trouvait. Le port était clairement un port de commerce. Mais l'un deux, un magnifique voilier trois mâts, portait sur sa poupe une inscription en lettres dorées: "Le Passeur de Temps". "Arthorias, regarde !" Précisa Lyriss en lui montrant du doigt. "Nous ne devons pas accoster ici". Précisa t-elle en indiquant une crique à quelques encablures. C'est là bas qu'il accostèrent, Lyriss jugeant cela plus prudent. "Tirez la chaloupe sur la plage, s'ils ne savent pas où nous avons accosté, nous gagnerons du temps".
Les otages s'exécutèrent, de même que Lyriss qui les y aida. Bon. Ils n'étaient de toute évidence par tirés d'affaire. Mais ils s'approchaient du but. Elle se tourna vers Arthorias. "Tu penses toujours à la Garde? Si le bateau de Varek mouille ici, nous sommes peut-être dans le lieu le plus corrompu".
Toutes plaisanteries à part, la Commission n'aimait guère que les gardes tuent des criminels. Même si la chose était courante. Surtout quand ces derniers étaient aussi agressifs que ceux là.
-Ce serait dommage de me faire de la pub, à être trop efficace, on pourrait me renvoyer me balader partout dans le royaume !
Mais l'heure n'était pas tant aux plaisanteries qu'à l'action et rapidement, ils finirent par accoster sur une nouvelle île. La silhouette du navire géant n'avait rien de rassurante, voir le navire suspect si prêt d'ici avait de quoi inquiéter. Comme elle le disait si bien... La garde n'était peut être pas le meilleur des plans finalement
-C'est ce navire !
Dit un des otages en tremblant, pointant du doigt la grosse coque amarrée aux quais
-C'est lui qui à déposé les pirates dans le village et qui à mis le feu ! Je le reconnaitrais entre mille !
Au moins... Les preuves seraient plutôt simple à trouver, mais il fallait garder ces gens en vie. Surtout s'ils avaient vu quelque chose. Il n'était pas à douter que tout serait tenté pour les réduire au silence.
Fort heureusement, la crique était hors de vue, et une petite caverne permettait de cacher les barques. L'officier effaça les traces laissées par le group avant de conduire les gens vers les hauteurs.
-Le pire lieu possible oui... Mais on ne pourra pas rester ici indéfiniment. Toi comme moi, nous pourrions nous en aller, mais un tel groupe ?
Rechargeant son arbalète, Arthorias prit le temps de la réflexion, tachant d'évaluer les options qui s'offraient à lui avant de dire.
-Si c'est bien lui qui gère tout le trafic dans la zone, et qui fait chanter la garde, on doit agir. Et en publique pour que tout le monde le voit tomber.
Un coup d'éclat... mais extrêmement risqué. Quitte ou double.... Qu'en dit tu ?
Lyriss craignait que sa théorie ne soit la bonne. En fait, quelque chose en elle lui indiquait déjà qu’elle avait raison au moment de l’indiquer, mais elle ne voulait pas franchement y croire non plus. Quelle autre option s'offrait à eux? D'autant plus que les otages venaient de pointer le dit navire comme étant le transport utilisé par les pirates qui avaient rasé leur village. Le doute n'était alors plus permis. Il fallait agir. Et vite. Maintenant qu'ils étaient là, ils n'avaient plus le choix. Ils touchaient au but. Mais Arthorias avait raison, la seule façon d'y parvenir était de ne pas le faire dans l’ombre. Ainsi, aucune menace n'aurait le temps de s'abattre sur eux, et surtout sur les otages qu'ils avaient libérés.
Lyriss soupira. C'était risqué. Et pas seulement pour eux. Mais elle ne voyait pas d'autres issues.”La garde ne nous viendra pas en aide sous le nez de Varek. A moins qu'ils n'aient intérêt à le faire” Précisa-t-elle, très certainement à raison. Mais le fait était que le nombre de soldats composant leurs rangs n'était plus le paramètre principal. ”Le port était bondé quand nous sommes passés, c'est maintenant ou jamais”.
Effectivement, ils n'avaient pas une fenêtre d'action très large. Ils ne devaient pas traîner. Lyriss se tourna vers son acolyte. ”Mais nous ne pourrons pas les protéger si ça tournait mal.” Elle se tourna vers les otages qui les accompagnaient toujours. "Cachez-vous jusqu’à notre retour. Cachez la chaloupe et effacez vos traces.” Ordonna-t-elle en se dirigeant vers le port sans demander son reste. Il ne fallait pas traîner. Elle connaissait le risque pour elle, et son coéquipier. Mais en s’engageant dans la Garde, elle avait accepté le fait de sacrifier sa propre vie au profit de la sécurité d'un plus grand nombre. ”Si jamais ça devait mal tourner, mes parents ont un élevage de chevaux à Grand Port. Prévient les.” Annonça-t-elle en se tournant vers Arthorias, on ne peut plus sérieusement.
Elle n'avait pas peur. Mais elle n'était pas naïve au point de croire que ce qu'ils comptaient faire était sans risque. ”Et toi? Quelqu'un à prévenir?" Acheva-t elle simplement avant de reprendre sa route vers le port principal, là où ils avaient vu le Passeur de Temps.
La décision prise, l'expédition de sauvetage tourna à la préparation. L'officier ouvrit son sac sans fond, sortant une quantité impressionnante de carreaux et de barillet de rechanges pour ses armes, qu'il commença à charger en prévision de ce qu'ils allaient tenter.
Ecoutant distraitement Lyriss donner ses instructions, Arthorias se focalisa sur sa tache, sortant une petite burette d'huile avec laquelle il aspergea le mécanisme de ses arbalètes.
Contrairement à sa collègue, la mort n'était pas une fin pour lui. A peine une déconvenue ou un ralentissement passager. Il ne se faisait donc pas de soucis quant à ce qui allait suivre.
Néanmoins, il ferait de son mieux pour que la jeune femme survive à ce plan risqué.
-Si le pire arrive, j'irai personnellement les voir, et je ferais en sorte que ta mémoire soit honoré.
L'entretien de ses arbalètes fait, le blond porta sa main au fourreau dans son dos, tirant la longue lame noire qui avait fait sa renommée jusque là. La grande épée ne reflétait nullement la lumière, semblant presque l'absorber alors que l'officier passait un chiffon imbibé d'huile dessus avec habitude.
-Personne non, mais fait moi une promesse. Fait tout ce que tu peux pour survivre, y compris si ça doit impliquer de me laisser tomber. Je trouverai un moyen de m'en sortir.
Assure toi juste de sortir de là en vie d'accord ?
Son casque se tourna vers elle, l'homme finissant par rengainer son épée dans son dos. Se relevant en époussetant son armure avant de sa planter devant elle, portant ses mains aux fermetures de son heaume pour la regarder les yeux dans les yeux.
-C'est la seule chose que tu dois faire pour moi ! Tu peux me le promettre ?
En réalité, Lyriss se fichait pas mal de sa mémoire. Mais elle voulait éviter l'embarras à ses parents qui s'inquiéteraient probablement inutilement tant qu'ils n'auraient pas eu de nouvelle. Certes. Le fait d'apprendre la disparition de leur fille unique ne leur ferait probablement pas l'effet d'un soulagement, mais si cela devait arriver, Lyriss tenait à ce que la nouvelle ne tarde pas afin de leur épargner le doute.
Sa considération pour sa potentielle disparition d'arrêtait là. Bien que si cela devait arriver, cela l'ennuierais bien que ce soit si tôt. Elle avait encore bien assez de choses à voir pour s'en tirer correctement. "Merci." Précisa t-elle alors d'une voix sans timbre. Appréciant le fait qu'il ne lui rit pas au visage. Il aurait pu, remarquez. Elle n'en aurait pas perdu son objectif de vue pour autant. Lyriss était une jeune femme déterminée. On ne la terrasserait pas comme ça.
"Tu plaisantes j'espère? Comment voudrais tu que je vive ma vie en sachant que j'ai laissé un coéquipier derrière moi? Pas question." Précisa t-elle bornée. Avec une certaine indignation dans la voix. On dit qu'il faut toujours respecter les dernières volonté. Mais Arthorias n'était pas encore assez mort à son goût pour qu'elle estime lui devoir ce service.
Lyriss pouvait se révéler être une véritable tête de mule. Même si sa réaction pouvait sembler stupide, en s'engageant dans la Garde, elle avait montré qu'elle en épousait certaines valeurs. Notamment la loyauté. Pas parce qu'il était un responsable de quelque chose, un haut gradé, ou quelqu'un d'influent. En fait, depuis leur rencontre et même depuis qu'elle avait décelé le fait qu'il n'était pas un simple soldat, elle s'était adressée à lui comme à un égal. Il l'était toujours. Et il aurait bien pu être le Roi que ça n'aurait rien changé. "A moins que tu n'ai une botte secrette dont j'ignore tout". Mitigea t-elle alors en saisissant l'épée fixée dans son dos. Une lame fine, mais impéccablement entretenue. Ce n'était pas visible à l'oeil nu, mais cette arme avait la particularité de résisté à toutes les sources de chaleurs. Bien pratique lorsqu'il faut entrer dans un brasier. Manque de chance, ce n'était pas le cas ici.
Bientôt, le port fût en vue, et le Passeurs de temps aussi. Les deux Gardes avait regagnée une ruelle adjacente. Le navire vomissait des marchandises à n'en plus finir, assailli par une armée d'hommes et de femmes qui s'attelait à en vider les cales. Des gens crasseux, usés. Probablement pas des pirates, ni des citoyens. "Des esclaves". Souffla Lyriss. Mais alors qu'ils s'approchaient, progressant parmi l'attroupement habituel sur un port à l'occasion d'un débarquement. Le regard de Lyriss croisa celui de l'homme qui se tenait devant le navire, à quai, à l'entrée du ponton, supervisant le va et vient de pauvres âmes en charge de la basse besogne. "Varek !" S'exclama t-elle faussement enjouée, comme si elle saluait des retrouvailles attendues. Elle savait qu'il les avaient reconnu comme étant des Gardes. Des Gardes n'ayant pas graissé sa grosse patte d'ours peu scrupuleux. Elle ne pouvait pas lui donner l'occasion de s’éclipser discrètement.
Il se tenait là, ventru, trapu, un peu plus petit que la moyenne. L’œil mauvais. Il n'avait rien d'un soldat. Mais probable que sa garde ne soit pas bien loin.
Surpris par la réaction de sa collègue, Arthorias leva une main blindée en signe d'apaisement, tenant à insister sur le dernier point cité. Mieux valait éviter que la soldate ne prenne de risque inutile pour lui.
-Je suis très sérieux, il ne faut pas risquer ta vie pour moi, camaraderie ou non. Je ne mourrais pas, même seul. Même si tu me vois tomber.
Promis, ça ne sera pas un abandon ou une tache sur ton honneur, simplement un risque inutile d'évité.
Et alors qu'il terminait les préparatifs de son équipements, l'officier sortit une paire de sur bottes qu'il accrocha à ses chausses, ces dernières formant des griffes de rapaces dont le tranchant luisait doucement à la lumière et produisant un bruit métallique alors qu'il se remettait debout.
Au final, il ne pouvait pas faire beaucoup plus pour la gare, de peur de trop en dire et rendre son atout beaucoup trop prévisible pour tout le monde.
-Disons cela oui, si les choses tournent mal, fuis, je me chargerais du reste
S'il devait patauger dans le sang des pirates pour s'en sortir, ainsi soit-il.
Comme prévu, ils trouvèrent le passeur du temps amarré à quai, l'immense navire déchargeant sa cargaison bien trop humaine au gout de l'officier qui grimaça à sa vue.
-Des esclaves oui... Pire que ce que je pensais...
Et ce fut quand il croisa du regard les deux gardes qu'il se mit à hurler en les désignant. Inaugurant les hostilités alors que des hommes en arme commençaient à se détourner des esclaves pour accourir vers eux
-C'est le moment de jouer !
Dit il en enclanchant son phénix, décollant à toute vitesse pour foncer sur le pont du navire, ou il se renversa au dernier moment pour planter ses griffes dans le torse d'un des mercenaires qui maltraitait des esclaves.
Ce dernier hurla quand les lames perforèrent son torse et qu'il bascula dans le vide dans un "plouf" sonore.
La partie amusante venait d'arriver
Lyriss avait pris note de la demande de son coéquipier du jour. Elle n'était pas certaine de comprendre ce qui le poussait à lui faire une telle demande. Sans doute avait-il en tête une botte secrète ou quelque chose du genre. Elle se contenta donc d'acquiescer d'un signe de tête. Jugeant préférable de lui faire confiance, il ne s'était pas montré manchot jusque là, pas de raison pour elle de ne pas croire en ses paroles. Et pourtant, la confiance n'était pas chose aisée chez Lyriss.
Quoi qu'il en soit il était temps pour eux d'entrer en action. Une ultime action qui aurait pour résultat - Lyriss l’espérait - la chute de cet homme qu'elle voyait maintenant comme le pire des connards. Il était fréquent que le jugement de Lyriss soit hâtif. Néanmoins peu de chance qu'elle se trompe sur ce coup là. Quoi qu'il en soit, ce n'était plus le moment d'y songer. Ils n'avaient pas beaucoup de temps pour faire mouche.
Il semble qu'Arthorias était de son avis. Il s’élança le premier alors que Lyriss plongeait sa lame dans un fut de poix, y mettant le feu à la hâte. Une chance que la magie de sa lame lui permettre de ne pas être altérée par la chaleur et qu'elle même ne puisse pas être brûlée. S'élançant à son tour, elle fût prise à partie par deux pirates qu'elle terrassa rapidement, profitant de l'inquiétude généré par le feu, sans doute bien trop prêt du bateau aux yeux de son propriétaire.
La population s'était mise à hurler, fuyant les lieux en courant, ce qui permis de faire rapidement le tri entre les citoyens et les hommes à blâmer. La garde locale ne tarda d'ailleurs pas à arriver. "Vous avez l'occasion de combattre celui que vous auriez du neutraliser depuis le début, quel choix ferez vous?!" Lança Lyriss en jetant un regard au premier garde qui semblait lui en vouloir à elle. La balle était désormais dans leur camps.
Déjà sur le pont, Arthorias se battait déjà. Utilisant à égale mesure ses arbalètes que ses griffes accrochées à ses pieds. Usant de son objet pour s'élever et augmenter l'inertie de ses mouvements.
Les carreaux sifflaient en se plantant dans les pirates, les faisant tomber en hurlant alors que les projectiles perforants se logeaient dans les torses.
Les coups pleuvaient, mais rataient pour la plupart, ou glissaient sans effet sur l'épaisse armure de l'officier, ce dernier rendu invincible par sa plate. Lentement, le cercle autour de lui se fit plus important alors que les pirates laissaient un peu d'espace.
Ce ne fut que lorsque que ses deux armes claquèrent à vide que les bandits reprirent confiance et relancèrent leurs assauts. Le blond du dégainer la grande épée noire attachée dans son dos, tranchant en deux trois assaillant d'un même mouvement alors que la lame wardan passait au travers des vêtements de le chair.
Bientôt, le pont commença à s'imbiber de sang, les pirates s'empêtrant dans le corps de leurs camarade alors qu'un dilemme frappait les soldats qui venaient d'arriver.
Face au feu à la mort des pirates... Devaient ils continuer à renier leur rang ou se soulever pour enfin faire ce qui était juste ?
Les cris du propriétaire du bateau se firent plus insistant, poussant leurs allégeance sur une balance à l'équilibre précaire
-Ne faites pas rougir la Garde par votre honte d'hier, tachez de redorez votre blason, hommes du sud !
Ce fut tout ce qu'il parvint à crier avant de replonger dans la mêlée, tranchant et perçant alors que les coutelas glissaient sur sa peau de fer
Quoi qu'il en soit, elle ne fit pas de quartier. Même si elle avait bien compris que cela ferait une tâche énorme sur leur rapport. Il n'était plus question de paperasse, mais de vies humaines. Et dans la balance, elle avait fait son choix entre esclaves et tortionnaire. Tant pis si elle devait être mise à pied pour ça. De toute façon, Lyriss n'était pas réputée pour sa docilité. Ce n'était pas pour rien qu'elle n'avait jamais rien fait de plus qu'être simple soldat.
La Garde locale venait d'arriver. Par chance pour eux deux, leur choix fût de rallier les rangs qu'ils avaient pourtant déserté depuis un moment. Lyriss ne crachait pas sur un peu d'aide. Sans doute que ces derniers, galvanisé par un espoir de victoire, avaient choisi de se repentir. Toujours est il que le combat ne s’éternisa pas, bientôt, les derniers pirates quittait le quai en courant, fuyant le combat, à juste titre. Leur rang décimés ne les encourageait plus à poursuivre un combat perdu d'avance, laissant Varek sans défense. Lyriss ne manqua pas l'occasion, se glissant derrière lui d'un geste, bloquant violemment son bras dans son dos sans aucun ménagement, au risque de la casser. Sa lame s'était glissée sur sa gorge. "C'est fini Varek." Avait-elle lancé froidement, à bout de souffle. Ne souffrant à priori que de quelques contusions et égratignures superficielles. Une chance qu'elle ne soit pas partie sans équipement.
L'homme captif s'était mis à hurler, à la fois sous la douleur et la rage, très probablement, mais Lyriss faisait fit de ses cris pour chercher son coéquipier du regard. "Arthorias? Tout va bien?" Questionna t-elle sans le trouver pour le moment.
Le dernier pirate tomba à l'eau, son cadavre rougissant les eaux alors que l'officier cherchait sa nouvelle cible qui ne vint jamais. Le pont du navire était devenu silencieux car nul homme en mesure de crier était resté dessus. Le sang maculait une partie de son heaume. On aurait pu dire que la violence avait été excessive, mais les marques sur sa cuirasse pouvaient prouver que tel n'avait pas été le cas.
La lutte avait été dure, et si la maitrise d'arme de l'officier avait suffit pour le maintenir en vie, il était à douter que quiconque aurait pu désarmer la vingtaine de pirates qui gisaient sur le pont.
La voix de sa collègue le ramena à la réalité, et l'officier repartit vers elle, essuyant la lame noire sur les vêtements d'un mort avant de la ranger dans son fourreau.
-Oui, ça va.
Son corps de chair regagna son armure, les deux orbes lumineux de ses yeux redevenant plus humain alors qu'il enjambait un cadavre sanguinolent. Retrouvant sa collègue et le gros bonhomme qui hurlait toujours.
Même avec son heaume, ses yeux le fusillaient du regard, et une grande main gantée enveloppa son visage, le contact de l'acier poisseux de sang laissant une grande marque sur le visage de l'esclavagiste.
-Quant à toi, je te conseil d'économiser tes cris, tu en aura besoin dans les landes du Nords
La pression se relacha légèrement sur son crane alors qu'Arthorias finissait par le lâcher, se retournant vers les gardes qui mettaient les menottes aux survivants.
Enlevant son heaume, il resta muet un moment avant de hausser les épaules
-Quant à vous, ce sera aux enquêteurs de déterminer jusqu'ou vous tremper dans cette mascarade...
Ne restait qu'a rapporter le capitaine au Grand port ou il serait jugé et puni pour l'exemple. Ce ne fut qu'une fois sur le bateau du retour qu'il put se préoccuper de Lyriss
-Et toi ? Pas blessée ?
Alors que les Gardes sur place prenaient en charge les rescapés et entravaient les coupables restants en vie, Arthorias leur adressa un ultime avertissement avant de reprendre la route. Lyriss ne prononça plus un mot. Elle n'en voyait pas l'utilité. Tout était fini. Leur rôle s'arrêtait là. Elle n'en était pas mécontente à vrai dire. Peut-être pourrait-elle enfin profiter de sa permission.
Montant sur le bâteau vers grand port, elle ne s'était plus soucié de Varek, aux fers. Il ne ferait plus de mal. C'est accoudée sur le bastingage qu'elle profita de la traversée. A ce moment là, elle regrettait de ne pas ressentir la fraicheur de la brise. Bien qu'elle n'ai pas chaud non plus, elle aurait voulu la ressentir. Essuyant d'un regard de main une goutte de sang qui perlait sur sa joue, elle ne pris pas le temps de regarder s'il s'agissait du sien ou pas. Arhorias s'était approché. "Non, je ne crois pas. Je suis plus solide que j'en ai l'air". Prévint -elle en tournant son regard vers lui, lui adressant un sourire fatigué, mais malicieux.
Bientôt, les quais de Grand Port apparaissaient à l'horizon. Elle soupira, soulagée. En descendant du bateau, elle se tourna une dernière fois vers son acolyte. "Ce fût un plaisir Arthorias. Au plaisir de te revoir sur le terrain!". Précisa t-elle avant de reprendre. "Prend soin de toi!". Avant de s'éloigner vers la périphérie de la ville. Tout ça n'était plus son problème. Elle allait simplement retrouver son cheval et ses parents pour quelques jour avant de remonter vers le village perché. Qui sait quelles autres aventures l'y attendrais.