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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Ronge-Coeur
    Luz WeissCroc de foudre
    Luz Weiss
    Informations
    Ronge-Coeur
    Ven 16 Avr 2021 - 12:23 #
    Ronge-Coeur


    Luz passa le plat de sa main sur le tissu gainé de cuir qui recouvrait ses avants bras. Ses doigts tremblaient, juste avant qu’elle ne raffermisse sa prise et ne chasse ces élancements maladifs. Un soulard lui jeta un regard de curiosité trouble, affalé contre les restes d’une poubelle et jaugeant de toute évidence que les réponses à ses questions se trouvaient à l’intérieur de la bouteille de whisky qu’il tenait. Elle ne lui prêta aucune attention, les épaules droites et dégagées à la manière d’une habituée des lieux marchant en terrain conquis. Ce n’était néanmoins qu’une apparence mensongère, car les protections qui la recouvraient présentement étaient plus nombreuses que les couches minérales qui enserraient le cœur de la terre. Au-dessus d’elle, à deux mètres de ses chausses encrassées de la boue que régurgitaient les pavés, se tenaient les belles lettres peintes de la taverne Aux Trois Piliers. Écrasantes, impassibles, absolues. L’écrin de ses interrogations fossilisées dans la peinture même, écaillée sur le bois, malmenée par les intempéries. Sacralisées par la lumière éclatante qui filtrait sous les fenêtres, soulignée des rires et aboiements de la foule de clients qui s’égayaient dans l’établissement. La gueule ouverte d’un crocodile n’aurait pu être plus amicale, conscience patiente car la proie finissait toujours par sautiller d’elle-même jusqu’aux crocs mortels.

    Elle avait fait un détour par chez elle. Avait marché à pas de loup dans la demeure familiale par crainte de réveiller Basile et son grand-père. Les domestiques avaient été renvoyés à cette heure. Alors, elle s’était marbrée de noir, avait englouti ses traits sous une paroi de vêtements imperméables. Elle avait longuement bandé sa poitrine pour en adoucir la courbure, avait attaché des plaques de cuir solides à ses tibias et à ses avant-bras pour en augmenter la solidité. Il n’avait pas été difficile ensuite de recouvrir le tout d’une combinaison souple qui seyait parfaitement à ses formes et recouvrait ses cheveux d’une capuche opaque. Le roux flamboyant de sa chevelure avait été retroussé sous la forme d’un chignon strict et recouvert d’un lacet protecteur. Quant à son visage, à ses prunelles d’un vert si caractéristique, elle n’avait pas dévié de son précédent déguisement… Un masque à l’étrange figure dotée de crocs retroussés était venu recouvrir ses traits. Parfait miroir de celle qu’elle désirait singer.

    Voilà qui suffirait à protéger cette nuit son identité physique. Mais il lui fallait davantage, il lui fallait l’appât doucereux d’une apparence joviale, une hypocrisie sociale supplémentaire qui lui permettrait de se faufiler au milieu du tout-venant. Elle s’était faufilée entre les portes de la bibliothèque familiale, s’était glissée jusqu’aux artefacts étranges et oubliés qui demeuraient endormis dans l’arrière salle. Il n’avait pas été aisé d’ôter l’ample nappe cirée qui protégeait l’objet de la poussière, mais son obstination était parfois une utile compagne. Ainsi s’était-elle retrouvée debout face au miroir de glace de ses ancêtres, jaugeant du regard l’artefact investit de magie qui lui renvoyait son propre reflet anonymisé.

    Un coutelas était caché dans sa botte droite et des cercles d’or étaient à peine décelables à ses poignets. Un cadeau de la Famille dont elle ignorait les motivations, percluses d’incohérences et d’absurdités impossibles. Et pourtant… Pourtant ils lui donnaient toutes ces informations, qui retrouver et comment l’identifier, et cela tout en lui confiant des armes sans jamais rien demander en échange. « Pour notre sœur », lui avait seulement dit l’homme. Et elle avait rejeté cet argument d’un mouvement dédaigneux de l’épaule, n’avait pas hésité à se saisir des Katars Jumeaux du Changeforme qu’on lui proposait. Elle n’était de toute façon pas femme à dédaigner une arme puissante face au mal personnifié. Elle marchait par l’axe de sa volonté seule, persuadée que les réponses viendraient en temps et en heure de par son travail de laboureur. Tout prendrait sens. Ses incohérences intérieures disparaitraient, élimineraient la détresse sur sa langue.

    Une heure trente plus tard, elle contemplait sans mot dire la devanture des Trois Piliers, protégée par l’apparence illusoire que le miroir des glaces avait consenti à lui donner. Il n’avait pas été aisé de le déplacer afin de n’activer le sort qu’au dernier moment dans une ruelle adjacente, aidée en cela par son grand sac sans fond. Elle espérait que sa magie ne serait pas défaillante, quand bien même sa tenue de cuir masquerait malgré tout ses traits si l’enchantement devait cesser. Elle calcula qu’il lui restait à présent cinquante-cinq minutes pour trouver sa cible.

    Trouver Croque-Chance.

    Qu’avait-dit l’homme déjà… ?

    Cherche dans la foule, près du comptoir…

    Elle poussa la porte de la taverne d’un geste assuré du poignet et s’engouffra dans le brouhaha éclatant de la grande salle.


    Apparence illusoire de Luz :
    Mysora WeissCroque Chance
    Mysora Weiss
    Informations
    Re: Ronge-Coeur
    Mar 20 Avr 2021 - 2:06 #
    feat Luz Weiss
    Ronge-Coeur


    Fou. Le monde autours d'elle était fou.

    De la part d'une meurtrière d'enfants, le constat s'avérait quelque peu ironique...
    Elle avait pour sa défense d'avoir connu une existence bien étrange et d'être doté d'un pouvoir qui ne facilitait pas la compréhension de ce monde - pas du point de vue du tout à chacun. Être perpétuellement chanceuse s'avère parfois être une malédiction : qu'en est-il de l'échec et de ses leçons, de la jalousie ou de l'admiration qu'il procure, du long chemin parcouru pour parvenir à une réussite tant convoitée ? Jusqu'à récemment, sa vie était comparable à un long chemin pavé sans le moindre dénivelé, caillou ou obstacle. Les rares événements d'apparence malchanceux qu'elle subissait s'avéraient toujours être bénéfiques, et il ne lui aurait pas semblé étonnant que son abandon par ses parents ait été également influencé par la chance...

    Ce potentiel n'était pas passé inaperçu et l'innocente Mysora, autrefois simple voleuse à l'étalage, avait rapidement était formée à utiliser son potentiel pour de plus sombres desseins. Puis vînt le premier meurtre, les premières récompenses. Pour une enfant des rues, recevoir un salaire capable de subvenir au besoin de sa Famille pendant un mois entier est une motivation plus que suffisante pour tuer. Surtout lorsque la besogne est si ridiculement facile à réaliser. Pouvait-on la blâmer ? Vient ensuite le second contrat. Puis un troisième, un quatrième, et avant même qu'on ne le réalise la chose devient une tâche presque quotidienne : deux gouttes de vaehsus dans une tisane, le tranchant d'un couteau sous la gorge de sa victime, une flèche en plein cœur depuis un toit... Les gens la félicitent, lui disent à quel point elle est douée et qu'ils referont appel à elle. Bientôt, c'est son monde tout entier qui se teinte de rouge et une fois prise dans l'étau, impossible d'en sortir. Le plus simple reste alors d'y prendre goût, puisque le renoncement est synonyme de mort.

    Mais qu'en était-il de ces individus ? Courant, s'affolant, visiblement désemparés... La mort de l'une de leur recrue avait fait l'effet d'un coup de pied dans une fourmilière - et les fourmis semblaient ne plus vouloir obéir à leur propre reine... Ils remuaient terre et ciel pour tenter de mettre la main sur un assassin parfaitement invisible, allant jusqu'à faire appel à des criminels, des voyous du même genre que la personne qui venait d'ôter la vie à leur chérubin. Jusqu’où étaient-ils près à aller par pure vengeance ? Pathétique. A cette pensée, Mysora émit un léger rictus qu'elle fit taire aussitôt ; elle venait d'arriver.

    Sur place, elle constata que le cagibi dans lequel elle venait de pénétrer était toujours aussi mal rangé. C'était une volonté du propriétaire, certainement, ce afin d'éviter d'attirer trop l'attention - les gardes ne désiraient pas venir, et les curieux ne désiraient pas rester... Elle passa la première pièce, arriva près de trois portes similaires et les jaugea chacune. Après cette courte observation, elle sortit de l'une de ses poches un dé et redoubla d'intérêt pour les portes : un et deux, la première, trois et quatre, la seconde, cinq et six, la troisième. Elle lança l'objet. Cinq. S'approchant de la porte concernée, elle y frappa un code qui lui permit d'accéder à l'intérieur. Un vieil homme, au visage découvert, l'y accueillit. On devinait à sa façon de se tenir qu'il avait dans la semaine, à en juger la couleur et la taille des hématomes, été victime d'une rixe dont il n'était visiblement pas sortit vainqueur. Lui proposant de s'asseoir, il désigna le siège face à lui avant de prendre lui même place dans son fauteuil, lâchant un léger râle de soulagement au contact du cuir confortable. Puis, il jaugea finalement la personne qui lui faisait face. Sa tenue tout d'abord, bien particulière et peu pratique pour une simple séance de divination ; sa posture ensuite, droite, sans failles, assurée ; enfin, le fait qu'elle ne semblait pas vouloir s'éterniser. Il comprit alors : son heure était venue.

    La tâche accomplie, Mysora ressortit de la Maison des Chuchoteurs comme elle y était entrée.


    ►◄


    Elle s'installa non loin du comptoir. Suffisamment proche pour se faire entendre aisément du tavernier, suffisamment loin pour ne pas être prise par erreur dans une baston de bar. On lui apporta une première pinte qu'on déposa sur sa table, sans un mot, ainsi qu'une assiette où se battaient en duel un morceau de pain et de fromage. Elle saisit le premier qu'elle déchira en plusieurs morceaux et porta l'un d'eux jusqu'à sa bouche, scrutant silencieusement les alentours. Les Trois Piliers fonctionnaient décidément à plein régime : rien qu'au bar, une dizaine d'habitués, plus alcoolisés que dangereux, s'agglutinaient en entonnant des chansons paillardes. A certaines tables, quelques groupes tentaient de discuter discrètement d'affaires sérieuses. D'autres encore se contentaient d'observer tout comme elle les autres énergumènes présents dans le bâtiment... Un bon ramassis de brigands, de manière générale.

    La porte s'ouvrit. En surgit une femme - du moins, c'est ce que sa silhouette laissait supposer. C'était chose rare, dans ce genre d'endroits... Non pas que le "métier" ne concernait que le genre masculin, mais parce qu'il n'était pas rare qu'un groupe un peu trop en confiance s'en prennent à ces demoiselles lorsque leur taux de testostérone grimpait au delà du seuil critique. Et si les demoiselles en question s'avéraient incapables de se débarrasser de ces gêneurs, la situation pouvait rapidement virer au drame.

    Elle cessa de la regarder et reprit un nouveau morceau de pain, qu'elle accompagne cette fois-ci d'une lampée de bière. Une fut alors subitement prise d'une quinte de toux qui la fit renverser le liquide doré sur sa table - elle venait d'avaler de travers. Plus surprise que gênée, elle remarqua que plusieurs regards s'étaient tournés vers elle. Certains moqueurs, d'autres simplement curieux. Elle soupira, fit un signe au tavernier qui lui envoya un torchon, s'en servit pour éponger la bière. Situation banale pour n'importe qui.

    Mais pas pour elle.
    Luz WeissCroc de foudre
    Luz Weiss
    Informations
    Re: Ronge-Coeur
    Jeu 29 Avr 2021 - 11:43 #


    Cinquante-cinq minutes.

    Le temps s’égrenait là dans la lenteur de son pas, ici dans le bras qui soulevait la chope jusqu’à des lèvres avinées, ou encore près de cet autre qui n’en finissait plus de faire tourner un jeton de métal entre ses doigts. La taverne des Trois Piliers était fidèle à sa réputation. Un carcan étriqué tout en angles et en recoins, ni trop célèbre, ni noyée dans l’inconnu. Un coupe gorge pour les plus naïfs, une opportunité pour les plus démunis et les égoïstes. Une population hétéroclite du moins, mais uniquement en apparence. Un feu déjeté dans le bac de poudre et ces Messieurs tireraient tous leur masque dans un bel ensemble pour mieux dévoiler un semblable sourire reptilien…

    Cinquante-quatre minutes.

    La foule s’était densifiée à l’entrée et elle dut jouer des coudes pour se faufiler entre les corps lourds d’alcool et les voix graves qui s’interpellaient. Beaucoup sortaient un instant sur le parvis du bâtiment, qui pour fumer, qui pour savourer la fraicheur de la nuit à d’autres effets plus… Prosaïques. Les besoins humains ne changeaient guère en quelques millénaires de temps. Pour l’heure, nul ne prêtait encore attention à elle hormis le glissement d’un œil cocasse sur la rondeur de ses hanches et cette main qui vint inopinément tâter ses fesses : elle la chassa d’une toquade sans daigner vérifier son propriétaire. Où était Croque Chance ? S’était-elle tapie dans l’ombre ? La famille lui avait-elle menti ? Etait-ce un piège, courrait-elle volontairement à sa perte ? Elle crut ne jamais y arriver. Recluse derrière son trop plein émotionnel, prise dans les remous d’un océan dont elle ne connaissait pas encore l’arrière-goût, elle peinait à identifier les visages et à fixer son regard sur des détails efficaces. Se trompait-elle ? Il devait s’agir du mauvais ch…

    Là, le bruit d’une toux. Un coup d’œil machinal, une réalisation. Les griffes de la colère refermèrent définitivement leur emprise sur sa poitrine, une pulsation d’une inquiétante régularité étouffée. Glacée. Et tout à la fois bouillante. Elle passa la langue sur sa lèvre inférieure asséchée, les mains moites peut-être et une ébauche de plan en tête. S’approcher. Elle devait s’approcher. Rien d’autre ne comptait ? Elle pivota vers le fond gauche de la salle, se dirigea vers un groupe de deux hommes qui cessèrent aussitôt leurs messes-basses pour la dévisager. Elle apprécia ce qu’elle crut déceler dans leurs louvoiements de chats aux aguets, l’intérêt opportuniste qui s’embrasa au coin d’une prunelle… La bourse remplit de cristaux qu’elle lança sur la table ne produisit aucun son lorsqu’elle heurta le bois dans l’atmosphère surchauffée de la salle.

    « Elle est à vous en échange d’une bagarre générale. Je veux qu’elle soit célèbre, que les membres d’une même famille en viennent à se détester. »

    Ils se coulèrent un court regard. Et un sourire de parfaite entente étira leurs bouches, dévoila l’or d’une dent et la place manquante d’une molaire. L’un deux avala sa chope de bière cul sec et se releva d’un bond aussi élégant qu’il lui fut possible.

    Cinquante-deux minutes.

    Elle ne se retourna pas lorsque le premier cri surpris retentit derrière elle, rapidement suivi d’un choc sourd et du bruit crissant d’une table mise à mal. Elle ne se retourna pas, car elle se tenait à la lisière d’un autre territoire, au centre duquel trônait Croque Chance à la manière d’une Impératrice en son domaine. Il y avait quelque chose d’étrange à contempler ce bout de vie hors du monde, un espace vital où ne s’agitait aucun buveur, comme un filet de sécurité invisible tracé à l’encre magique autour de la table que s’était choisie sa cible. Une bizarrerie qui n’était que la suite d’une longue série depuis que leurs routes s’étaient croisées. Autour d’elle, l’air s’appesantissait, les objets étaient à l’écoute et le temps se couchait à ses pieds tel l’animal aimant attendant une caresse de son maître. Et Croque Chance, le geste fluide et presque aqueux, dédaignait ces phénomènes qu’elle créait elle-même avec le mépris d’une âme noble, gantée de cuir et cerclée de fer.

    Luz franchit le vide qui séparait le chaos ambiant du périmètre de Croque Chance. Recula la chaise qui lui faisait face dans un raclement de pieds contre le sol, et s’y installa. Ses prunelles n’avaient pas quitté d’un seul souffle le regard semblable que lui retournait Mysora depuis le début du processus. Amarrée à ce reflet de miroir aussi déroutant qu’une incohérence de la réalité, un visage strictement identique au sien qui lui retournait une attente jumelle. L’intensité de deux joyaux verts taillés par une lame de silex.

    Cinquante-et-une minute.
    Et nul ne s’était encore aventuré dans leur cercle aphone.

    Elles s’observèrent, s’entre-regardèrent sous la tenture de leurs longs cils sombres, deux Reines soudain prises au piège sur un même territoire qu’elles ne pouvaient décemment pas se partager.

    « Ranly. Cette nuit, sur le toit. »

    Sa voix était atone. Mais son besoin grandissant. Elle ne parvenait pas à contrecarrer le sentiment d'urgence qui la taraudait, cette envie suprême de lui faire connaître son identité. Elle voulait qu’elle sache. Elle voulait voir cette lueur subite dans ses yeux, l’émotion qui parcourrait peut-être son visage en réalisant le rapprochement souhaité, et peut-être comprendre par ce biais qui était Croque Chance ?

    Il y eut un flottement.

    Le temps d’une vie, une erreur dans le sablier.

    Sa senestre dégaina fluidement la dague cachée jusqu’alors dans sa botte. Son autre main saisit le bois de la table, projeta d’une violence poussée la tranche de la surface contre Mysora.

    La lame volait déjà promptement vers sa poitrine.

    Mysora WeissCroque Chance
    Mysora Weiss
    Informations
    Re: Ronge-Coeur
    Dim 30 Mai 2021 - 21:41 #
    feat Luz Weiss
    Ronge-Coeur


    Elle se débarrassa du torchon humide en le renvoyant négligemment à son propriétaire, non sans que plusieurs gouttes ne se soient éparpillés sur le sol au passage. Le barman ne lui en tiendrait pas rigueur, la bière sur le bois de son enseigne étant le cadet de ses soucis lorsqu'il lui arrivait fréquemment de devoir éponger des litres d'hémoglobine, de vomi, d'urine, et parfois le mélange odieux des trois en même temps... Il se contenta de jeter le tissu sale dans un bac derrière lui puis s'équipa d'un nouveau pour retourner s'occuper de sa clientèle, épargnant le moindre commentaire à Mysora. La demoiselle, l'accident réparé, revînt à l'assaut de sa maigre assiette. Arrachant un nouveau morceau de pain entre ses doigts, elle porta celui-ci jusqu'à sa bouche et le dégusta tout en observant la naissance d'une rixe entre deux hommes, relativement calmes jusqu'à présent, et un groupe d'aventuriers en plein discussion. Le point de friction entre les deux entités n'était pas clair et, à vrai dire, il était probablement inexistant : aucun mot, aucune insulte, aucun geste n'avait justifié le déplacement des deux molosses et précédé le premier coup de poing asséné. C'était arrivé, aussi rapidement et étrangement qu'un gros nuage de pluie lors d'une journée ensoleillée.

    Peu inquiétée par la distance à laquelle se déroulait le combat, l'assassine continua tranquillement son observation. Ce genre de situations l'amusaient et lui permettaient de passer un peu de bon temps entre deux contrats, et la présence d'un peu d'alcool et de nourriture ne faisaient que rendre la situation d'autant plus agréable. Cette fois-ci pourtant, un raclement de chaise lui fit détourner le regard et ses yeux verts trouvèrent un nouveau centre d'intérêt : la jeune femme qui avait précédemment franchit la porte venait de s'installer devant elle, assurée, et demeurait silencieuse en la confrontant du regard. Une cliente ? Une alliée ? Une opportuniste ?

    « Ranly. Cette nuit, sur le toit. »

    Deux battement de cils un peu trop rapprochés, seuls indices trahissant ce qu'elle ressentait en cet instant... Non, ce n'était pas un échec ; pas cette fois-ci, la survie de cette personne n'étant pas le fruit de la chance ou de la malchance mais de sa volonté seule. Ce qu'elle ressentait, c'était la sensation de ne plus avoir le contrôle, ne plus être maître de son affaire. On aurait pu penser à de la peur, mais la peur paralyse, empêche d'articuler le moindre mot, de réfléchir et d'agir de manière naturelle. Ce n'était pas son cas et, si elle demeurait immobile et silencieuse, c'est qu'elle tentait de comprendre qui était la personne face à elle - Croc de foudre.

    L'échange de regard sembla duré une éternité sans qu'aucune des deux femmes ne daignent y mettre fin. Au fond, la meurtrière savait. Que le moment allait arriver. Qu'après avoir fait le premier pas, l'inconnue se chargerait également du second. Qu'elle n'attendait aucune réponse. Elle bondirait simplement sur elle, sans prévenir, et tenterait de changer le dénouement de leur premier affrontement.  

    Ce fut soudain. L'inconnue dégaina une lame, aussi vive et précise que l'éclair, et projeta violemment de son autre main la table en direction de sa cible. Celle-ci eu le réflexe de placer ses mains devant elle, amortissant le choc et la faisant basculer en arrière sur sa chaise. Lorsque son adversaire tenta de lui asséner un coup en direction du cœur, elle se laissa entraîner par le mouvement enclenché et se releva d'une roulade et d'un saut parfaitement exécutés. Elle fut alors accueillie par ce qui, à l'origine, devait être un coup de chaise dans le dos : par chance, l'objet se désolidarisa dans les pinces de son propriétaire avant l'impact, ne lui laissant en main que le dossier et un air béats sur le visage. Entrainé par sa propre force, l'homme chuta ridiculement au sol et se releva aussitôt, le front et les joues rouges, colérique. Il remonta ses manches, s'équipa d'une nouvelle chaise à proximité puis tenta un nouvel assaut.

    Il n'en eut pas le temps.

    Ses yeux s'ouvrirent grand, sa bouche s'élargit - d'où sortit un simple râle - et il chuta à genoux, puis ventre à terre, le tout sans la moindre retenue. Derrière lui se tenait la femme, une bouteille brisée dans sa poigne.

    Connaissant les capacités de la combattante et l'exploit qu'elle avait accomplie à leur première rencontre, Mysora ne mit pas longtemps à s'équiper des lames jumelles, prenant la menace au sérieux. Elle aurait pu fuir, très certainement. Mais fuir n'était pas son genre, et l'idée d'être poursuivie sa vie entière par une femme aussi déterminée ne lui plaisait guère... Elle l'affronterais ici-même, la mettrais à terre une nouvelle fois et lui ferais regretter sa venue sur son territoire. Et cette fois-ci, elle n'oublierais pas de l'achever...

    Luz WeissCroc de foudre
    Luz Weiss
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    Re: Ronge-Coeur
    Mar 22 Juin 2021 - 12:01 #


    Ses lèvres se retroussèrent sur ses dents, un sourire tout en éclat blanc cru, parfait reflet de la faim dévorante qui la gagnait. Souple sur ses appuis à la manière d’une louve rôdant en périphérie d’une proie, elle esquissa un premier pas en avant lorsqu’une ouverture lui fut offerte par un autre belligérant. Malheureusement, un puissant étau se referma derechef sur son torse, bloquant instantanément ses gestes et arrachant à sa poitrine un souffle heurté. Le chaos avait gangrené la salle comme un poison subreptice, un feu de poudre noire et rouge qui laissait ici et là au coin des bouches une écume blanche haineuse. Sans doute ne connaissaient-ils plus même l’identité du corps qu’ils s’acharnaient à frapper, mais leur chair leur hurlait de se débattre dans cette arène imbibée d’une folie animale métamorphosée en poings et en cris. Une bête immonde, totale, une masse noirâtre qui pulsait de multiples membres, car il n’y avait plus guère d’individualité dans ce marasme ! Quelques-uns avaient su tirer parti de cette guerre alcoolisée, allégeant leurs adversaires occupés de leur bourse ou se faufilant à toutes jambes vers la sortie avec le fruit de leurs rapines – souvent des jeux de cartes peu équitables. Ainsi le chaos était-il toujours profitable. Hormis que l’espace trouble et flouté dans lequel évoluait Croque Chance avait fini par être gangrené à son tour, écornant l’étrange magie qui l’environnait jusqu’alors. Si plusieurs de ces Messieurs se chargeraient de mettre des bâtons dans les roues de son adversaire, Luz ne faisait pas exception à la règle, également absorbée par le raz-de-marée qui déferlait désormais autour d’elles.

    Mue par quelques réflexes, ses talons vinrent s’ancrer fermement dans le sol, repoussant en arrière son agresseur dans un simulacre de chute titubante : ils durent heurter un mur, enlacés qu’ils étaient, car l’homme poussa un grognement sourd lorsqu’un choc les saisit. Il ne desserra néanmoins pas suffisamment l’étau de ses bras pour dégager entièrement les siens malgré une faiblesse apparente et provisoire, aussi puisa-t-elle dans Polarisation. Les genoux fléchis, elle poussa brutalement sur le sol dans une courte détonation électrique, arrachant son corps à son étreinte et à la gravité tandis qu’elle s’élevait haut au-dessus de lui, pivotant sur elle-même jusqu’à planter ses talons contre la surface du mur vertical pour mieux y prendre appui. Nouvelle détonation. Une énergie fourmillante creusa une trace de suie contre l’enduit, la projetant avec une vélocité féroce jusqu’à Croque Chance, dressée à deux mètres de là.

    Elle vit le sillon dessiné par l’une de ses lames sœurs remonter l’air, mortel et mordant, position immédiatement défensive qui cherchait à la contrer. Dix centimètres. Cinq centimètres, trois centimètres de son visage. Jusqu’à entailler la pointe d’une mèche de cheveux… Et riper sur les trois griffes de ses katars dans un crissement d’étincelles aux deux forces contraires titanesques. Jumelles. Le choc dévia sa course, manqua l’éjecter dans la foule environnante. Elle ramassa toutefois ses muscles sous elle, pivota en plein air et se réceptionna dans un accroupi glissé malmené : elle dut planter les lames de son autre main dans le parquet pour stopper sa course, ralentir sa vitesse magiquement augmentée par sa foudre.

    Elle ne parvint cependant pas à éviter entièrement l’une des rares tables encore debout de l’auberge, heurtant à demi son pilier central. Elle gronda. Pesta contre l’hématome qui ne manquerait pas de gagner son coude. Et sursauta lorsqu’une énorme masse s’abattit brutalement sur le dessus de la table, miraculeusement protégée de cette attaque par le meuble décidément vaillant. Le bois trembla et gémit à n’en plus finir, mais ne céda pas. Reste qu’elle n’attendit pas de savoir si cela suffirait et s’éjecta donc d’un bond de sa cachette, constatant que trois ivrognes avaient entrepris de s’étriper en roulant sur ladite table. Ils ne lui prêtèrent pas la moindre attention.

    Tant mieux. Car elle avait justement perdu Croque Chance des yeux.

    Quelle guigne !

    « Je t’interdis de te cacher ! cracha-t-elle aux ombres mouvantes de la foule, prête à contre-attaquer. »

    Mysora WeissCroque Chance
    Mysora Weiss
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    Re: Ronge-Coeur
    Mar 24 Aoû 2021 - 23:19 #
    feat Luz Weiss
    Ronge-Coeur


    Son pouvoir lui avait presque toujours garantit d’écrasantes victoires, mais elle constatait aujourd’hui que celui-ci ne serait peut-être pas suffisant pour venir à bout de son adversaire. N’importe quel autre individu aurait depuis longtemps chuté au sol, trébuché sur sa lame ou reçu un objet non identifié sur le crâne le faisant tomber dans l’inconscience ; sa jumelle était pour sa part, comme une petite poignée d’autres « élus », l’une de celles qui demandaient plus que de la chance pour en venir à bout. Qu’à cela ne tienne ! La rouquine n’avait pas à rougir de ses capacités au combat et ses prouesses n’étaient pas que le fruit de son pouvoir, mais aussi celui d’un entraînement strict, rigoureux et d’un mental d’acier. Rien contre lequel une inconnue, aussi déterminée soit-elle, ne puisse rivaliser. Qu’elle ait son apparence ou non…

    L’assassin se mit en garde sans perdre une seule seconde du regard son sosie. Les jambes légèrement pliées, solide sur sa position, elle anticipait d’ores et déjà la future attaque de son ennemie. Celle-ci esquissa finalement un premier pas mais elle fut aussitôt interrompue dans son élan, « enlacée » sauvagement par un individu qui, visiblement, ne cherchait pas ici la moindre affection.

    « Attent… ! »

    Elle se surprit à faire un geste dans la direction de Luz avec la ferme intention, non pas de profiter d’une ouverture pour porter un coup facile, mais bel et bien de lui porter secours. Elle chassa cette idée saugrenue de son esprit – sans doute l’envie que son combat ne soit pas tronqué -  et reprit place à son emplacement premier, fixant toujours la femme pour en observer les capacités : rapide, agile et visiblement futée. En l’espace de quelques secondes, elle avait fait preuve d’autant de forces pour échapper à la prise du lourdaud bonhomme avec pourtant toujours le même objectif en tête : parvenir jusqu’à elle pour l’affronter. Un instant plus tard, ce fut chose faite, et leurs lames s’entrechoquèrent enfin dans un millier d’étincelles. Étrangement, l’échange – bien que de courte durée - provoqua un son des plus agréables, celui de retrouvailles. Comme si l’acier dont elles étaient forgées provenait d’un même et unique filon. Quelque chose d’indescriptible, en réalité, qui toucha profondément la jeune femme sans qu’elle n’en comprenne la raison…

    L’assaut terminé, son adversaire - malgré un contrôle évident de ses mouvements – vint heurter l’une des rares tables encore debout de la pièce, quelques pas plus loin ; là où un groupe d’ivrognes venait visiblement de s’établir pour s’étriper joyeusement. Devant cette vision incongrue, Mysora constata que si sa chance n’était pas des plus impactantes en cette soirée, elle semblait en revanche complètement absente chez l’autre combattante.

    « T’en as quatre pour le prix d’un ! » cria un homme non loin d’elle, qu’elle entendit clairement malgré le brouhaha ambiance.

    « Mais j’vais foutre le feu à la taverne... »

    « Fais-le ! »

    Intriguée, ses yeux furent attirés par deux individus, postés à quelques pas d’elle, dont l’un semblait tenir une flamme dans les mains. Elle écarquilla les yeux et vit sans difficulté les cibles que désignait le premier homme : les trois alcooliques ainsi que la femme. Le mage de feu ne semblait plus vraiment hésitant, convaincu par les paroles de son camarade, et il se leva de sa position – caché derrière un meuble renversé – en espérant avoir le champ libre pour griller les quatre malchanceux. Il fut cependant accueillit par un coup d’estoc à l’épaule qui lui arracha un hurlement de douleur, puis il tomba au sol sans demander son reste. Son ami, peut-être plus dégourdi, se jeta aussitôt sur l’agresseur dans l’attention de la faire chuter au sol. Tentative fructueuse, ils roulèrent boulèrent plus loin avant de s’arrêter lorsqu’un obstacle interrompit naturellement leur course ; la rouquine constata alors que le pauvre bougre s’était malencontreusement empalé sur sa lame lors de son attaque. Elle se débarrassa du corps en le laissant tomber sur le côté, reprit fermement en main ses armes et revînt en direction de celle qui retenait toute son attention.

    « Je ne me cache pas. » lui dit-elle, le buste couvert du sang de sa précédente victime.


    Luz WeissCroc de foudre
    Luz Weiss
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    Re: Ronge-Coeur
    Sam 4 Sep 2021 - 19:10 #


    Elle était telle à une apparition. Une silhouette féminine aux traits semblables aux siens, si semblables qu’il était déroutant de vouloir en percer les mirettes de ses lames. Son port était altier, souple sur ses appuis, plus proche de la panthère que de l’être humain… Sournoise, roublarde, en adéquation avec le métier qui paraissait être le sien. Travaillait-elle pour le compte de la Cabale ou n’était-elle qu’une professionnelle particulièrement douée dont l’ordre s’était accaparé les services ? Avait-elle trouvé son compte dans le meurtre de Ruth, dans ce geste sec qui avait précédé sa décapitation, dans la composition indubitablement artistique de la scène de crime ? Était-elle de ce sang qui appelait sans cesse à davantage de massacre, davantage de violence, affamée et jamais rassasiée ? Luz sentait croitre en elle le brasier vindicatif d’une tempétueuse colère. Colère, à l’égard de cette autre elle-même dont la moralité s’échouait à l’inverse de la sienne. Colère, également et surtout, contre sa conscience qui lui aiguillonnait les entrailles et agitait sa poitrine d’une plainte désespérée… Elle ne voulait pas la tuer. La réalité était là dans toute son incongruité, dans toute son abominable horreur, et cette perception diffuse de sa volonté lui arrachait le cœur. Était-ce là tout ce que valait son amitié pour Zahria ?! La souffrance de Calixte ? Et la perte de Ruth… ? Sa loyauté ne valait-elle guère plus que quelques passes d’armes, trois pas de danse ? Ô aveugle et enferrée dans ses illusions… Refusant de voir ce qu’elle percevait chez l’Autre, cette étincelle fugace dans ces prunelles qui n’étaient pas elle. Une bravade soucieuse, insolente, insupportable. L’inconnue était inquiète pour elle. Et Luz refusait d’accepter la réalité de cette inquiétude, tout autant que de reconnaitre qu’un effroi jumeau lui enserrait la poitrine.

    Ah l’envergure de leur scène de théâtre était décidément bien trop étroite ! Elle se sentit sur le point d’étouffer soudain, dans cet espace restreint au sein duquel elle ne pouvait déployer sciemment le panel complet de ses compétences. Heh quoi, détruire plus avant l’endroit ? Prendre le risque de laisser davantage de traces, de strier le bois d’éclats scintillants et de passades électriques ? Qu’allait-il se passer si ses griffes perçaient la défense de l’autre, traversaient sa garde pour mieux travailler sa chair, briser ses os… ? Oui, qu’allait donc bien pouvoir ressentir Luz si ses pas la conduisaient à une inattendue victoire ? Elle sursauta, s’aperçut qu’elle n’avait jamais jusqu’alors anticipé cet instant. Que le monde s’était limité à cette fenêtre infime, cette rencontre présente sans passé ni futur. Pas d’après. Pas de dénouement à cette confrontation. Pas de porte de sortie. Un piège personnel dans lequel elle s’était jetée à bras ouverts, peut-être dans l’espoir d’y mourir et d’éteindre, enfin, sa culpabilité douloureuse. Car elle n’avait pas dénoncé Croque Chance.

    Elle.

    N'avait pas.

    Dénoncé.

    Croque Chance.

    Elle rata une respiration, haleta, voulu enserrer sa poitrine entre ses mains, une souffrance croissante lui fouissant la peau. Elle n’avait rien fait. Rien. Rien pour foutu de rien ! Elle avait laissé mourir Ruth, elle avait cédé Calixte et Zahria au mal, les avait jetées en pâture. Peut-être avait-elle elle-même tenu ce couteau qui avait entaillé les membres de l’apprentie espionne, à voir ce visage si semblable au sien… Quelle différence ? Voilà où venait mourir la confiance qu’on lui prêtait. A ses pieds, piétinée, désagrégée, incendiée comme un souvenir glacé. Qu’espérait-elle résoudre ? Vaincre Croque Chance seule, masquer sa faute, enterrer la réalité qu’elle refusait tant de voir et d’accepter ? Parce qu’elle s’était persuadée par elle-ne-savait quel tour de mauvais goût qu’une âme esseulée vivait ici derrière cette Inconnue, qu’il y avait quelque chose à sauver chez elle ? Oh, comme elle aurait voulu pouvoir traverser ce miroir d’un simple pas, saisir la main de cette étrangère pour la contraindre à traverser à son tour la mince paroi d’étain… Contempler son reflet, découvrir qu’une logique se cachait derrière l’ensemble de cette mascarade.

    Mais personne ne viendrait. Aujourd’hui, comme hier sur ce toit où Croque Chance l’avait laissée pour morte. Personne ne venait jamais. Et la petite fille en elle en avait assez d’attendre, assez de croire en l’existence d'éventuels secours. Son âme était tronquée. Alors, il suffisait de dévorer pour la réparer…

    Le chant de ses lames changea. Une vibration rouge et obscure qui gangrena le métal d’énergie erratique, luisait d’une lueur mauvaise en vrombissements sanguinaires. L’arme avait perçu l’ambition de sa maîtresse, en retour de quoi Luz ignora la pointe perçant ses forces vitales. Mais l’arme adverse était constituée du même matériau, une résonnance jumelle qu’elle perçut dans ses membres et ses dents finement serrées... A nouveau, ses griffes glissèrent contre les lames jumelles de l’assassine, une étreinte presque tendre, un jeu de jambes vif tandis qu’elles échangeaient à la manière de deux lointaines amies : des coups précis et adroits, portés avec la rigueur chirurgicale d’une attaque mortelle, néanmoins sans cesse contrés par leurs opposés. Cela dessinait dans l’air autour d’elles des gerbes éparses d’étincelles, le filament chuintant du métal chauffé à blanc, un souffle subreptice sur leur peau à peine le temps de trois virevoltes serrées. Luz se désengagea d’un bond souple en arrière, le souffle court, animale et sauvage. Les sourcils froncés par la contrariété. Elle n’avait pas les ressources nécessaires à un combat aussi redondant. Pas lorsque ses lames puisaient dans son énergie pour augmenter leur efficacité.

    « Pourquoi… haleta-t-elle, pourquoi m’ont-ils donné une arme semblable à la tienne ? »

    Croque Chance répondrait-elle ? Comprendrait-elle ? Elle n’eut pas l’heur de le découvrir, car un bruit saugrenu attira derechef son attention sur l’arrière droite de son adversaire, là où sa vision rencontrait vraisemblablement un parfait angle mort. C’est ce geste imprévu, lorsqu’un type avait malencontreusement glissé sur un pied brisé de table, qui avait accaparé son attention et lui permit de voir qu’un belligérant tentait d’approcher Croque Chance par derrière. Sa dextre se saisit spontanément de l’épaule de son double, l’entraina à sa suite dans un brusque pivot glissé – l’arme blanche de l’homme feula dans l’espace entre elles deux sans dommage, échouant à poignarder le dos ciblé. Déjà, un cercle se formait autour d’elles, un changement d’atmosphère qu’elle ressentit jusque dans les pulsations de ses veines… Alentour, il ne restait plus guère qu’un groupe de malfrats et d’ivrognes victorieux, désireux d’en découdre avec les deux dernières combattantes encore debout.

    « … Eux d’abord. »

    Ce fut à peine un murmure glissé dans l’oreille de l’assassine. Luz se retournait de toute façon sans attendre, exposant son angle mort à Croque Chance, dos à dos face à cette nouvelle nuée de nuisibles.

    Mysora WeissCroque Chance
    Mysora Weiss
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    Re: Ronge-Coeur
    Dim 5 Sep 2021 - 14:03 #
    Mysora Weiss a écrit:
    feat Luz Weiss
    Ronge-Coeur


    Le geste inattendu de sa semblable lui épargna une grave blessure - la mort peut-être même – et elle termina son mouvement face à son ancienne position, là où se tenait maintenant un homme visiblement contrarié. Il se remit en garde, bientôt rejoint par tout un groupe d’élus victorieux qui, semblait-il, avaient décidé d’un commun accord  de s’en prendre au duo de fauteuses de troubles. Ivrognes, malfrats, habitués… Il n’y avait dans ce groupe ni logique ni revendication ; mais l’idée d’une coalition d’hommes alcoolisés s’en prenant à deux femmes dans un lieu loin des préoccupations de la garde n’augurait rien de bon pour Mysora.

    A peine un échange plus tard, sa moitié lui tourna le dos prêt à en découdre. Elle en fit de même, adoptant une posture plus défensive qu’à l’accoutumée - car pour l’heure, il n’était plus question de survivre seule mais bien à deux.

    « Le chétif, face à toi. C’est un grand amateur de poison. A bon entendeur. »

    L’avantage d’être issue de ce milieu et d’y avoir beaucoup de relations : on y croisait régulièrement les mêmes individus qu’on apprenait, sans parfois même leur adresser la parole, à connaître jusque dans les détails les plus intimes. Évidemment, la chose était réciproque et il y en avait plus d’un pour qui Mysora n’était pas une parfaite inconnue. Tous savaient à quel point la femme pouvait être dangereuse, même si cela ne les empêchait pourtant pas de vouloir tenter leur chance aujourd’hui. Après tout, ne dit-on pas que l’union fait la force ? Ce qu’ils ignoraient toutefois c’est qu’une autre union, bien plus puissante, venait de voir le jour…

    La rouquine brisa sa posture au grand étonnement de son adversaire – et désormais cible – le plus proche. L’homme para l’attaque par réflexe mais n’eut pas le temps d’apercevoir le coude de la jeune femme propulsé vers sa mâchoire, qu’elle frappa avec tant de force qu’il en tomba au sol sans demander son reste. Un autre profita de l’occasion en se glissant derrière elle pour enserrer son torse tandis qu’un troisième s’approchait pour profiter de son apparent désavantage. Elle vint alors recouvrir de ses bras ceux de son assaillant et profita de leur position pour relever ses jambes, les détendant violemment pour toucher le torse de l’homme lui faisant face et le projeter en arrière. Son assaillant, plus coriace, se contenta de reculer de quelques pas mais une simple demi-seconde de relâchement dans son étreinte permis à Mysora de viser avec adresse son foie, si bien qu’un simple coup de coude suffit à faire plier l’homme. Libre, son genou vînt percuter le menton du gaillard qui chuta lui aussi, puis elle se tourna pour apercevoir le troisième homme – remit de ses émotions – arc à la main, bandé dans sa direction. A cette distance, même le plus incompétent des archers ne raterait pas sa cible et rien dans les parages ne pouvait offrir à la demoiselle une protection contre cette flèche qui pointait dans sa direction.

    « Tu vas me rater. » se contenta-t-elle de lui dire, pleine d’assurance.

    « Ce n’est pas toi que je vise. »

    Alors, il pivota légèrement pour viser une toute autre cible : Luz, toujours préoccupée par ses propres combats et persuadée d’être couverte par sa partenaire de mésaventure. Un battement de cils plus tard, l’homme relâcha la corde et la flèche siffla… Pour être interrompue en milieu de course par la mauvaise cible.

    Malgré sa main gauche transpercée, Mysora ne perdit pas une seule seconde et dégaina l’un des couteaux dissimulé dans sa bottine. Avant que l’homme n’ait le temps d’encocher une seconde fois, elle lança l’arme de jet qui vint se loger dans sa poitrine sans toutefois le tuer. Débarrassée, elle brisa la flèche en deux avant de se retourner : numéro un et numéro deux étaient à nouveau sur pieds, bien déterminés à lui faire payer pour les coups reçus et l’humiliation...

    Luz WeissCroc de foudre
    Luz Weiss
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    Re: Ronge-Coeur
    Lun 13 Sep 2021 - 20:19 #


    « Poison ou pas, ils meurent tous de la même manière, grogna-t-elle en raffermissant sa prise sur ses armes. »

    L’indice jeté à vau-l’eau entre elles deux ne se perdit néanmoins pas dans les abysses de sa colère. Elle ne douta pas non plus de la parole de son alter ego, il le fallait, cela devait être juste de la même manière qu’un mensonge n’aurait pas traversé sa propre bouche en cet instant. Sous les illusions de son apparence factice, ses prunelles s’embrasèrent d’un reflet mordoré de mauvais augure. Et tandis que Croque Chance s’élançait, Luz s’envolait de même dans un ensemble parfaitement synchronisé. L’homme dont les sombres techniques avaient été dévoilées s’attendait vraisemblablement à constituer sa première cible. Aussi fut-il fort surpris lorsqu’elle bondit d’une formidable détente électrique, se projetant au visage de son comparse à sa droite. Ses cuisses vinrent enserrer le cou de l’outrecuidant et c’est d’une violente torsion arrière du corps qu’elle l’envoya valdinguer dans un reste de tables éparpillées, prenant brièvement appui au sol de sa dextre pour rétablir sa verticalité et atterrir accroupie. Tout abasourdi qu’il était, le chétif avait cependant survécu jusqu’alors grâce à ses réflexes et son poison finement travaillé… Le poignard traça une ligne rectiligne vers la pommette de son adversaire, escomptant la piéger dans une vaine esquive. Sa lame traversa un air vibrant d’électricité contenue, vrombissant sur l’évidente absence de sa cible en face de lui. Luz s’était d’ores et déjà téléportée derrière lui, boule d’énergie contenue reprenant soudainement forme humaine, heurtant l’arrière de ses genoux d’un coup chirurgical du talon. Désarçonné, il ne put résister à l’attraction terrestre et se plia dans une drôle de contorsion, semblable à quelque moine pieux priant Lucy à genoux dans l’obscurité des temples… Hormis qu’il chercha à pencher la tête en arrière vers son ennemie, réflexe par trop humain face à un danger immédiat. Visage qu’elle enfonça donc d’un brusque et précis mouvement du coude, un craquement d’os audible qui résonna un court instant dans la salle dévastée.

    Elle se redressa juste à temps pour percevoir la rugosité d’une phalange, l’amplitude d’un bras lancé à vive allure droit vers son ventre. Pas comme ça, pas ainsi, songea-t-elle dans une fulgurance de foudre déliée, pivotant d’un quart de centièmes sur la gauche, suffisamment pour choisir avec soin l’endroit de l’impact… Elle sentit cette force contraire heurter sa chair, se propager à travers ses os, échouant par ailleurs à arracher son souffle de sa poitrine et à la coucher à terre : elle accompagna le coup, se laissa fluidement glisser vers l’arrière à la manière d’une eau mourante, les dents serrées sur la souffrance qui irradierait très bientôt ses membres. Lorsque l’adrénaline s’enfuirait. Ses doigts habiles s’étaient du moins amoureusement enroulés autour du bras de son adversaire, l’enveloppant à présent dans un tendre linceul d’énergie cinétique. Un pas vers l’avant qu’il fut contraint de faire. Une perte d’équilibre, on sautille sur un pied et… Croc de foudre remonta l’arrête de son genou droit dans son sternum. L’étreignit au cœur de cette vaste salle, jusqu’à ce qu’elle laisse son corps inanimé s’effondrer sur le plancher. Ce qui lui laissa tout loisir de découvrir la flèche plantée dans la senestre de sa jumelle.

    Une main plaquée contre son flanc abominablement douloureux – un hématome d'une taille éloquente en perspective, elle tourna les talons et arracha à un meuble éventré l’envergure d’une planche sommairement brisée dont elle évalua l’équilibre d’un rapide mouvement d’épaule. Satisfaite de sa trouvaille et investie d’une lenteur uniquement mue par une prédation glaciale, elle dépassa Croque Chance, gagna son premier agresseur et envoya le large morceau de bois s’exploser en millions de copeaux contre son visage en une claque incroyablement voltée.

    « Les miens aussi sont en forme… constata-t-elle sans prendre la peine de se retourner, les grondements douloureux de ses propres lascars commençant à poindre dans son dos. Partons d’ici. »

    Avant qu’ils ne reprennent entièrement leurs esprits. Avant, et surtout, que la Garde ne juge opportun de se renseigner sur le raffuts inhabituel de ce quartier malfamé.

    Dehors, la pénombre avait dévoré les distances. Une obscurité trouble, morcelée de brume effilochée dont les longs doigts glacés se répandaient sur les murs et s’ourlaient de filaments autour de ses chevilles. Il régnait un silence inquiétant, ce silence précurseur des grands fracas. La rue toute entière paraissait retenir son souffle, une attention aiguisée tournée vers la taverne fort mise en branle cette nuit. Un voisin devait avoir prévenu la Garde. Elle ne voyait pas d’autres raisons à la prompte disparition des misérables et des truands qui rôdaient d’ordinaire dans ces parages, aussi rapides à s’évanouir au coin des carrefours qu’un banc de sardines surpris en flagrant délit. Luz échangea un regard de connivence avec son étrange alliée provisoire – partenaire certes pas. Ce visage si familier, ses prunelles pourtant réhaussées de sourcils à la courbe beaucoup plus dure, beaucoup plus froide que celle qu’elle percevait habituellement dans son reflet.

    « On ne peut pas rester. »

    Une évidence. Et pourtant… Le temps d’un battement des cils et l’illusion qui avait jusqu’alors étroitement protégé son corps se désagrégea, bris de glace aussitôt mangés par le néant, laissant progressivement transparaitre par âpres morceaux la véritable identité de leur détentrice. Egale, ressemblant à s’y méprendre à cette autre dans une troublante dissonance, un éclair de souffrance fissuré dans ses prunelles. Ce mal dans sa chair après avoir été rouée de coups, ce mal dans son cœur qu’une poitrine écartelée ne pouvait plus contenir. Le temps d’un monde, un millénaire peut-être, leur souffle dessiné sur leurs lèvres dans la pâle lueur de la lune, et ce regard parut vouloir lui transmettre un message important, traduire pour elles d’eux cette impossible supposition. Une pointe d’espoir, la féroce morsure du métal chauffé à blanc, abattu de culpabilité, anéanti d’une haine viscérale et d’un rêve en lequel elle n’osait plus croire. Haine d’elle-même avant tout, car elle ne pouvait proprement se détourner de ce visage : elle avait tendu sa dextre à présent à travers le vide qui les séparait, ses doigts à un souffle d’effleurer sa joue.

    Elle sursauta et replia ses doigts, comme brûlée par une flamme intangible. Au loin, le son métallique de Gardes en armure résonna contre les façades des masures. Elles ne pouvaient pas rester. Tout comme elle ne pouvait plus la tuer. Sans qu’elle ne l’ait vu venir, sans qu’elle ne l’ait prémédité, cette porte s’était silencieusement refermée, désormais scellée dans les contreforts de sa conscience. Elle sut que sa colère était vaine et qu’il n’existerait plus de réalité où sa main s’élèverait contre son miroir jumeau. Lucy l’avait-elle damnée… ?

    Peut-être bien un peu.

    Peut-être définitivement.

    « Dans une semaine. Porte sud, demande Monsieur Cheizer. Discutons par courrier. »

    Il faudrait convenir d’un rendez-vous. Eclaircir certains points. Pour l’heure, ses pensées étaient plus insaisissables qu’une nuée d’étourneaux et son abdomen lui renvoyait une maladive sensation de nausées. Croque-Chance s’en sortirait toutefois, elle n’en douta pas lorsqu’elle se mua en un nuage d’étincelles, bondissant par téléportation sur un toit voisin à une centaine de mètres de là. Fuyant dans la nuit une bien plus déroutante menace que la Garde elle-même…

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    Re: Ronge-Coeur
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