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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    L'assassin de la couronne
    Le royaume d'Aryon  » Le royaume d'Aryon » La capitale
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    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    L'assassin de la couronne
    Ven 30 Avr 2021 - 12:01 #
    Bonjour Ahlan ! Non… Pas vraiment naturel…

    Surprise ! Non, ça fait gamin…

    Encapuchonné, seulement éclairé par la faible lueur des cristaux de lampadaires, Klarion marchait d’un pas rapide et décidé, tenant fermement un morceau de papier jauni entre ses doigts fins. Sur ce bout de papier savamment plié contenait l’adresse et le contact d’Ahlan, un homme étrange que l’éco-terroriste avait rencontré il y avait peu et avec qui il avait réussi à sympathiser. Pour lui, ça relevait du succès compte tenu des très mauvaises relations et considérations qu’il avait pour les autres humains. Ahlan était un vieux loup, dur comme fer mais qui avait fait l’effort de l’écouter et le considérer comme ce qu’il était vraiment, Klarion s’en était vu suffisamment touché et ému pour vite se mettre à l’apprécier. Il ne savait pas vraiment expliquer comment, ni pourquoi, mais il s’était senti comme porté par le grand homme. Ahlan, d’après ses dires, venait du Grand Port et avait certaines accointances avec les criminels locaux, assez de connexions pour connaître Don Marcel, dit Le Pingouin, grand mafieux de la Capitale et ornithologue à ses heures perdues. Ahlan avait entraîné le phytomancien dans un infernal duel de cartes face au Don. Mais même si le jeune homme avait été au cœur des mises, il n’arrivait pas à en vouloir à Ahlan. Au contraire, avoir pu être au cœur de son aventure lui avait finalement plu. Il s’était senti pousser des ailes, à la manière de cet esclave oiseau que les deux compères d’un jour avaient réussi à libérer des griffes du mafieux.

    Avant de partir, Ahlan lui avait donné son contact, au cas où Klarion avait besoin de lui. Il ne s’étaient vus que depuis quelques jours, mais le garçon avait déjà senti le besoin de le contacter à nouveau. Il y avait certes l’envie de le revoir, de passer à nouveau du temps avec cet ami fraîchement acquis, mais Klarion avait un véritable motif pour se présenter à nouveau, le genre de raison qui pousse à chercher de l’aide pour se sortir d’un guêpier le plus rapidement possible : il était traqué. Il s’était senti suivi, épié, depuis plusieurs jours. Et ce sentiment s’était renforcé lorsque plusieurs plantes s’étaient mises à lui susurrer quelques messages d’avertissements. Il en avait eu le cœur net en retrouvant l’un de ses abris complètement chamboulé, plusieurs plantes écrasées et détruites, avec une simple note cachetée d’un sceau évoquant un œil. Un simple nom avait été écrit sur cette note : « WOODRUE ».

    Il ne fallut pas longtemps à Klarion pour connecter les liens entre ses ressentis et la présence de cette note dans sa planque saccagée. Quelqu’un était à ses trousses et voulait le faire payer pour l’assassinat de Sir Woodrue, un noble qui se donnait des grands airs de philantrope mais qui, derrière sa sainte façade, cachait un être avide et méprisant. Woodrue avait menacé de détruire des hectares de plantes pour son bénéfice personnel, poussant Klarion à le réduire au silence. Mais il ne pensait pas que quelqu’un, sans doute sa veuve, avait décidé d’engager un tueur à gage pour faire tomber le souverain floral. Klarion n’avait nullement besoin d’Ahlan pour vaincre le cavalier de la mort, il pouvait le battre seul. Mais il avait besoin de lui pour que le problème soit réglé vite, et bien. Il fallait faire pencher la balance à son avantage et traquer le traqueur. Cette personne avait déjà une longueur d’avance en espionnant Klarion et ses allées et venues, si bien que le jeune homme sentait ce besoin de faire appel à un allié pour équilibrer les chances.

    Malgré sa situation, Klarion demeurait confiant et trouvait même plaisant de revenir vers Ahlan. C’était à son tour de lui proposer une aventure, avec certes moins de magouilles mais finalement tout autant palpitante, même s’ils ne risquaient pas de croiser de demoiselle en détresse en vue des circonstances. De plus, il aurait l’occasion de pouvoir connaître un peu plus Ahlan, ce qui réjouissait davantage Klarion. Progressant vers l’adresse indiquée, le phytomancien se demandait à quoi pouvait bien ressembler le logis de son camarade. Il ne voyait pas le vieux loup se vautrer dans un amas de luxe et de dorures à l’image de Don Marcel, mais il ne le voyait pas non plus se contenter de la froideur d’une maison sans fioritures. Avait-il des trophées de ses anciennes épopées au Grand Port ? Des souvenirs des malfrats qu’il avait pu croiser ? Avait-il même une famille ? Si c’était le cas, il était certain que Klarion se sentirait de trop, peut-être même envieux envers ces gens pouvant le côtoyer davantage que lui. Le pauvre n’avait que peu connu sa propre famille, ses grands-parents décédant vite malgré qu’ils l’aient élevé. Avec une mère morte en couche et un père dont il ignorait tout, il n’avait pu que se raccrocher toute sa vie à toute figure un tant soit peu familiale lui passant sous la main ainsi qu’à lui-même…

    J’y suis.

    Il n’y avait personne dans la rue, mais Klarion arrivait enfin à l’adresse indiquée. Il n’arrivait pas à se l’expliquer mais un nœud commençait à se faire sentir dans son ventre. Le garçon n’avait plus été anxieux de la sorte depuis bien longtemps… Avait-il peur qu’Ahlan refuse, ou que ce mystérieux assassin en fasse sa victime ? Il ne pouvait plus reculer. Seul dans la rue mal éclairée, il était une proie facile et ne voulait pas que le vieux loup le retrouve sur son porche le matin venu. Passant sa main sur le mur encadrant la porte, il fit pousser une petite mimule rosée pour lui servir de mouchard au cas où on venait fouiner suite à son entrée. Ceci fait, il se mit à frapper, ayant complètement oublié comment il allait souhaiter le bonsoir à son ami…
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 1 Mai 2021 - 12:32 #
    « Je ne sais plus quoi penser… »

    Arban grommelait presque, repoussant d’une palme habile Mistigri qui venait quémander son affection du soir, alors que son propriétaire s’afférait, encore et toujours, à quelques bidouilles mécaniques, un brin technomagiques, sur son nouveau prototype d’arbalète capable de neutraliser très exactement zéro opposant. Dernièrement, sa passion pour l’ingénierie, aussi brûlante fût-elle, peinait à s’exercer entre le gouffre énergétique de l’administration de la Garde et l’affaire non moins pressante à propos de Klarion Brando, ineffable écoterroriste qui, tout le monde s’en rappelait, avait mis la Reine en danger lors d’un kidnapping diurne.

    « Je me demande pourquoi cette vieille branche de Joeystar a mentionné mon nom pour me tirer de ma retraite ; lui qui m’a permis de disparaître dans cet unique but de ne pas être retrouvé. Et puis, même si je suis capable de trouver des solutions drastique aux problèmes les plus épineux, moi, Commandant de la garde ? À diriger des hommes ? T’y crois, toi ? »

    Il fit un signe de tête à Mistigri. Ce dernier, incrédule, le regardait en penchant la tête, avant de tourner le dos et rejoindre Marquisette, assoupie sur le lit.

    « C’est ça, ouais… maugréa le vieux Höls, s’en retournant à son mécanisme. »

    Mais rien n’y fut. La frustration montait au fur et à mesure qu’il se heurtait à des problèmes toujours aussi difficiles à résoudre les uns que les autres.

    « Bon, allez, ça m’a saoulé. Une autre fois. »

    Il quitta sa mansarde.

    Ces derniers jours avaient été d’un ennui profond. Il se rappelait l’époque précise où il avait copiné avec un pêcheur, au Grand Port, où il avait également appris à faire montre de patience, à attendre que la proie se présente à soi plutôt que de la chasser, ce qui avait tant pour effet de porter à sa connaissance qu’on la traquait, mais aussi de l’acculer dans ses derniers retranchements. Et Klarion n’était pas une proie à acculer dans ses derniers retranchements.

    Arban ne s’était pas trompé à son sujet. C’était quelqu’un de brillant. Beaucoup plus que le capitaine Yuduar Al Rakija. Sans doute plus que lui-même. Possiblement moins que Delancy, mais Delancy n’était plus une option envisageable pour quoi que ce soit, dût-il revêtir une enveloppe corporelle juvénile et attirante.

    Qu’il reste moisir à faire le pilier de comptoir, pensa Höls, comme tourmenté par une colère intérieure.

    Oui, ces derniers jours, il se retrouvait à attendre, attendre que Klarion daigne se montrer de lui-même, sans que le cinquantenaire grisonnant n’échafaude cette fois un enième plan de derrière les fagots avec des gardes encore traumatisés. Sans parler de l’autre affaire non moins épineuse, la défection de l’Ombre, l’un de ses meilleurs atouts. Même si la présence de Vrenn avait de quoi fournir au Service Espionnage un atout redoutable, il se dit qu’il n’y avait pas de mal à désirer le beurre et l’argent du beurre.

    Dernièrement, il avait en réalité pensé au cul de la crémière, ce vieil Arban aigri qui serait incapable de souvenir s’il avait déjà touché au corps d’une femme. Son esprit était davantage tourmenté par le crime, les mécanismes et ses deux chats que par des paires de fesses. Et pourtant…

    « Il faut tenter. »

    ---

    Ahlan battait de pavé d’une démarche monotone et presque programmée, arpentant les rues de la capitale, ignorant les gardes qui pouvaient reconnaître leur commandant affublé d’habits sombres et miteux. Il se rendait au crépuscule à l’une des cachettes sous tutelle de la Garde ; une planque inexistante des registres, que seuls les espions devaient connaître. Initialement, il avait commencé à l’investir en espérant que l’Ombre lui rende visite, lui donne un signe de vie, quelque chose. « Non, Arban, je ne t’ai pas trahi. » Et même si, au plus profond de lui-même, il était convaincu que la jeune femme à la peau d’ébène était suffisamment intelligente pour ne pas faire de telle bêtise, elle n’en demeurait pas moins une personne maladroitement sujette à l’empire de ses émotions les plus primaires. Cette affaire de défection puait la merde, au bas mot.

    Mais tant pis. Il se servirait de ce point de chute pour attraper un autre gibier, plus pressant cette fois.

    « Salut. »

    Il avait hélé Klarion qui avait attendu en face de la porte. Il s’approcha de lui et l’invita à se décaler pour déverrouiller la serrure.

    « Entre vite, lui lança-t-il sans autre forme de procès. »

    Le lieu, discret, même s’il ne payait pas de mine, dégageait cette même impression de sécurité qu’on eût pu éprouver après qu’on eut investit la planque de Klarion. Un appartement tout ce qu’il y avait de plus sobre qui avaient très certainement abrité, par le passé, des roturiers célibataires et nantis. Arban invita Klarion à se mettre à ses aises dans le petit salon, où de vieux canapés en cuir trônaient. Il était facile de s’y poser et s’en extraire s’était souvent révélé difficile, tant leur confort inoui était inégalable – peut-être dans certaines remises au palais royal, en fait.

    Le vieux quitta la pièce un instant. Klarion pouvait entendre qu’il servait un apéritif pour l’aider à se détendre, rien de plus commun en somme ; un verre assez large, cristallin, comme les hommes aimaient. Il fallait recevoir les invités dûment, après tout. Ainsi, il revint, tendant un breuvage brun à son hôte, un sourire tristement affable.

    « Qu’est-il advenu de Vivienne ? finit-il par demander avant de s’asseoir face à lui, buvant son bourbon de moitié sans sourciller. »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
    Informations
    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 1 Mai 2021 - 15:19 #
    Klarion ne s’attendait évidemment pas à un palace, mais il ne s’attendait pas pour autant à être accueilli dans ce qui ressemblait plus à une garçonnière qu’à un véritable pied-à-terre. Une désagréable odeur de tabac froid s’était fait sentir dès l’instant où le jeune homme eût passé le pas de la porte, le genre de senteur qu’on tente, sans grand succès, de faire disparaître avant l’arrivée d’un invité. La première chose qu’il remarqua fut un cabinet ouvert contenant plusieurs bouteilles d’alcools et d’assortiments de verres convenant à chaque type de boisson. Du rhum de l’Archipel en passant par les vignobles du centre, n’oubliant pas non plus la vodka du nord ou l’eau-de-vie de campagne. Ahlan semblait être un fin connaisseur et amateur de courage liquide ; les traits sous les yeux du grand homme ne faisait que renforcer cette impression de Klarion. Le pauvre devait se sentir surmené au point d’avoir parfois besoin d’un petit coup de pouce enivrant…

    Des rideaux de velours pourpre avaient été tirés face à une fenêtre, devant un petit salon composé de fauteuils et d’un canapé brun au cuir légèrement craquelé, témoignage d’années d’usage et de confort. Klarion s’installa justement sur le canapé suite à l’invitation d’Ahlan, un intense grincement se faisant entendre dès qu’il se posa dessus. Son ami partit ensuite vers une pièce adjacente, prétextant d’aller servir à boire. Pourquoi donc devait-il changer de pièce ? Il avait tout un cabinet d’alcools et de verres à disposition… Néanmoins Klarion restait là, à inspecter les lézardes au mur, et les napperons froissés sur la table. Le tout manquait cruellement de plantes, songeait Klarion. Ahlan revint rapidement avec deux verres remplis de bourbon ambré, quelques glaçons baignant dans le verre. Le vieux loup le questionna au sujet de Vivienne, l’hybride oiseau qu’ils avaient sauvé des griffes de Don Marcel. Le garçon ne se fit pas attendre pour lui répondre :

    - Partie. J’ai dû subtiliser quelques richesses pour en faire de l’argent. Je lui en ai donné un peu et elle est partie se réfugier loin en empruntant une caravane marchande escortée d’aventuriers, vers le Village Perché je pense. D’après ce que j’ai compris, elle veut à terme ouvrir son propre commerce, une librairie ou galerie d’art je crois… Au moins, elle sera bien là-bas, je suppose.

    Klarion passa sous silence la partie où il avait lui-même convaincu Vivienne de partir vers le Village Perché. S’il y avait bien un endroit d’Aryon que Klarion ne comptait pas attaquer et était en sécurité contre sa croisade verte, c’était bien cette ville. Il préférait savoir Vivienne à la fois en sécurité de Don Marcel, mais aussi de lui-même au cas où il se décide à frapper ailleurs que la Capitale. Il ignorait ce dont son avenir était fait mais préférait mettre les chances de son côté, et que le peu de bien qu’il avait réussi à accomplir reste ce qu’il était : purement du bien. L’ancienne esclave avait eu la chance inouïe d’obtenir une nouvelle opportunité et Klarion avait souhaité qu’elle puisse véritablement s’envoler. Ce qu’il advenait d’elle à présent n’était plus de son ressort…

    - Elle m’a donné ça pour toi, en guise de remerciement et cadeau d’adieu.

    Passant sa main à l’intérieur de son manteau, Klarion en ressortit une plume bleutée possédant certaines nuances d’or. Il la posa sur la table face à Ahlan avant d’attraper son verre pour en boire une lampée.

    - Je ne suis sûr de rien mais je crois que c’est l’une de ses plumes… Dit-il en adoptant un air circonspect. Je suppose que ça peut servir pour écrire. Enfin, peu importe. Je suis là car j’ai besoin d’un petit coup de pouce. En effet, je suis suivi par

    Klarion marqua une pause, sa tête se mit à tourner et sa vision se brouillait peu à peu. Ignorant pourquoi, il n’arriva bientôt plus à voir quoi que ce soit. Le net devint vite abstrait, les formes et les couleurs n’étaient plus qu’une bouillie informe, comme un voile d’eau qui coulait incessamment, déformant tout dans son champ de vision. Il lâcha le verre, n’arrivant plus à le tenir. L’objet cristallin partit s’écraser au sol pour se briser en mille petits éclats, libérant le bourbon piégé et les glaçons sur la carpette poussiéreuse. Klarion n’eut que le temps de réaliser, trop tard, que sa boisson avait été droguée. Pourquoi Ahlan faisait-il une chose pareille ? Il tenta de bouger mais, en un soupir, s’affala en arrière, ne pouvant articuler que quelques mots :

    - Pourquoi ? Hoqueta-t-il. Ahlan… je… maintenant

    Klarion s’endormit, emporté de force dans les bras de Morphée et les ténèbres. Sa dernière pensée fut le nom d’Ahlan envers qui Klarion, malgré la réalisation d’avoir été empoisonné, ne s’était pas encore résolu à haïr. Il ne voulait pas croire qu’il avait été trahi. Mais Klarion savait depuis longtemps qu’il ne restait qu’un fil le rattachant à son humanité. Le couper aurait de désastreuses conséquences. Si bien qu’avant de sombrer, il espéra de tout son cœur ne pas devenir le monstre que tout le monde lui criait qu’il était…
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 1 Mai 2021 - 18:42 #
    La dose avait été justement calibrée, parfaite, ni trop légère, ni trop puissante. Klarion Brando, avachi sur le canapé, semblait sombrer dans un sommeil profond, assailli par une incompréhension passagère alors qu’il laissa son verre se briser sur le sol, dans un fracas presque accablant. Il semblait s’être fait avoir si facilement. Klarion Brando était un garçon brillant et intelligent ; seulement Arban avait l’avantage de l’expérience, et il semblait qu’il avait réussi à trouver une faille chez l’adversaire. Klarion, le bourreau de la couronne, avait une faiblesse : il était seul. Non seulement seul physiquement, mais aussi seul d’esprit.

    Arban le regarda un instant, attendant que la substance fasse effet et qu’il dorme d’un sommeil profond. Son visage s’était assombri. Il n’était plus le personnage d’Ahlan qui jouait la comédie, le personnage qui portant contenait un peu d’Arban s’il n’avait pas été aussi militaire, si lié au destin de la Garde. S’assurant que le jeune écoterroriste était hors d’état de nuire ou de se défendre, il se pencha sur lui pour lui administrer des menottes anti magiques aux poignets et une ample poche noir sur le visage. Il rabattit également son capuchon sur son visage avant de le hisser tel un vulgaire sac à patates sur ses épaules.

    Il quitta les lieux sans même nettoyer le désordre, prenant néanmoins le soin de refermer derrière lui à double tour, hissant Klarion de temps à autre pour qu’il reste bien fixe sur son dos. Il se mit en route, tranquillement. Il avait l’air d’un père bienveillant qui transportait son fils sans doute assommé par l’alcool ou simplement le labeur. Cette fois-ci, il n’évitait plus les gardes, ordonnant à la plupart de ceux qui l’avaient reconnu de lui offrir une escorte sommaire jusqu’à la sainte caserne. Après tout, Klarion disait avoir été suivi et ça n’était certainement pas par quelqu’un de la garde – autre que lui-même, bien entendu.

    Le cinquantenaire arriva à bon port, suscitant l’interrogation de la plupart des trouffions et autres lieutenants, à qui il n’offrit aucune réponse sinon un silence méprisant. Presque personne n’avait été au courant de l’escapade de Höls ; certains étaient même surpris de le voir habillé dans un pareil accoutrement. Mais son imposante stature et son aura ne laissaient pas de doute sur sa position. Pour certaines recrues encore fraîches, c’était un spectacle exceptionnel de voir cette armoire à glace rentrer au bercail avec un criminel sur le dos. Quelques soldats plus alertes avaient compris qu’il fallait céder le passage à Arban jusqu’aux geôles, notamment une cellule temporaire inhabitée. Le problème, c’est qu’elles étaient toutes investies.

    « Transférez le détenu de cette cellule dans celle d’à côté, somma-t-il à un garde qui l’accompagnait. Je veux une geôle individuelle pour lui. »

    Après un court salut militaire d’approbation, le garde s’exécuta sans davantage de zèle, secondé par deux collègues qui, sortant d’une ronde monotone, semblaient subitement ragaillardis par la présence du Commandant. La pression pesait sur leur frêles épaules : voir Arban par ici n’était décidément pas commun, et surtout dans de pareils accoutrements.

    On aida Arban à installer correctement Klarion et à le menotter à son pieu. Ses poignets, quant à eux, étaient mis en évidence, soigneusement menottés. Le garde sembla reconnaître le minois de l’écoterroriste.

    «  C’est…
    — Un jeune fauteur de trouble, rien de plus, coupa subitement Arban. Veillez sur lui jusqu’au petit matin. Si j’apprends qu’il lui est arrivé quoi que ce soit, je vous le ferai payer cher sur cent générations. Me suis-je fait comprendre ? »

    Il fusilla d’un regard glacial les trois gardes qui déglutirent, avant d’approuver d’un signe de tête discret. Le vieux se redressa et sortit de la cellule qu’on verrouilla à double tour.

    « J’insiste. PAS de mauvais traitement. Je sais que vous avez les nerfs assez à vif avec certains détenus, mais celui-là ne mérite aucune, absolument aucune négligence de notre part. Conduisez-le demain dans mon bureau après qu’il a déjeuné et repris contenance. Me suis-je bien fait comprendre ?
    – Eh, t’as chopé qui, Commandant ? héla une voix provenant d’une geôle lointaine.
    – Ta gueule, Bertrand ! tonitrua l’un des trois gardes qui se dirigea vers le fauteur de trouble. »

    Höls soupira. Bientôt, les rires commencèrent à fuser, à donner naissance à un semblant d’effervescence générale. On voulait savoir qui Arban avait déposé en cellule. On mourrait d’envie de le savoir.

    « VOS GUEULES ! aboya un autre garde alors qu’Arban s’en allait déjà sans même accorder un regard au moindre détenu. Il progressait difficilement dans cette cacophonie qui, en plus de le rendre sourd, le rendait presque aveugle, assailli de bruits stridents et blancs, désagréables au possible. Presque une torture à laquelle il devait se faire néanmoins.

    « Bande de marmousets pédérastes… étouffa le vieux Commandant après qu’il se trouva seul. »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 1 Mai 2021 - 19:25 #
    Klarion s’éveilla en marmonnant, un mince filet de lumière émanant d’une lucarne loin au-dessus de sa tête. Il n’avait rêvé de rien durant son sommeil, du moins c’était l’impression qu’il avait. Il se réveillait avec un léger mal de crâne qui allait s’estomper d’ici la prochaine demie-heure, mais le jeune homme n’avait pas suffisamment mal pour perdre sa perception sur ce qui l'entourait. Il se trouvait dans une cellule d’une quinzaine de mètre carré avec une couchette, un siège et une table en bois sur laquelle on pouvait trouver une pile de papier, un encrier et une plume. Il y avait aussi une cruche d’eau et, au sol, un seau qui devait sans doute servir à uriner pour les prisonniers aux envies pressantes. Il n’y avait rien d’autre, les murs étaient faits de briques grisâtres, Klarion remarquant une toile d’araignée abandonnée par son hôte au plafond.

    - Évidemment… se chuchota Klarion à lui-même.

    Klarion vit les menottes bridant sa magie passées autour de ses poignets. Plus que jamais, les plantes et leurs voix lui manquait. Ici, il n’entendait plus les chants floraux de ses amies végétales, juste les hurlements des gardes provenant de pièces ou couloirs voisins. Il ne comprenait pas vraiment ce qu’ils braillaient, d’ailleurs, les échos de leurs cris se répercutant sur trop de murs, faisant perdre sens à leurs invectives. L’endroit dans lequel il se trouvait était vide, aucun garde ne parcourant le corridor face à sa cellule, si bien que Klarion décida de se lever pour regarder au travers de la lucarne. Cette dernière faisait la taille de sa tête et était évidemment bien trop petite pour lui permettre de passer. Néanmoins, il voyait la ville en contrebas et se doutait qu’il se trouvait dans la caserne de la Garde.

    Alors comme ça Ahlan l’avait piégé ? Klarion n’arrivait même pas à éprouver de la colère, juste une intense tristesse d’avoir été à nouveau rejeté et trahi par quelqu’un en qui il avait confiance et qu’il appréciait. Il en venait à se dire que tous les humains étaient les mêmes, qu’ils ne méritaient rien, que les plantes devaient tout prendre… Mais qu’importait ? Il ne pouvait rien faire depuis sa cellule. Le vieux loup n’avait même pas eu le courage de lui faire face avant de le piéger, qui sait où il était à présent ? Le garçon en avait presque oublié l’assassin qui lui courait après, au moins il ne risquait pas de le trouver ici. Ou alors l’avait-il déjà vu se faire entraîner dans la prison ? S’il était suffisamment zélé, il viendrait le cueillir dans sa cellule. Autrement, il demeurait toujours quelque part dehors…

    - Je ne vais pas rester enfermé, Ahlan. Ces menottes ne m’empêcheront pas de sortir, susurra-t-il à nouveau.

    Klarion préférait attendre, quelqu’un finirait par venir le trouver là et constater qui il était vraiment, si ça n’avait pas déjà été fait. Si la Garde était si tatillonne sur l’administration et si honorable qu’elle voulait le laisser croire, il aurait droit à un procès. Des gens finiraient tôt ou tard par défiler face à lui, peut-être même que la reine reviendrait le confronter ? Il avait quelques petites choses à lui dire encore.

    Mais il n’y avait qu’une personne que Klarion voulait revoir.

    Ahlan… La nature gagne toujours
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    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 1 Mai 2021 - 20:08 #
    La nuit avait été anormalement longue. Arban était resté à ses appartements à la caserne. Ça n’était pas tant le fait de se retrouver privé de ses deux chats qui le tourmentait, mais bien ce qu’il allait faire de son détenu. Plus d’une fois l’idée de revenir dans les geôles pour s’assurer qu’il soit en sécurité avait percuté son esprit ; et si les gardes mandatés n’avaient pas fait leur boulot correctement ? Pire ! Et s’il y avait une taupe qui le ferait sortir ou, pire, le tuerait ?

    « Non… Aucune raison. »

    Difficile de se convaincre. Le mieux qu’il put faire, cette nuit, était de ne dormir que d’un œil, dans ce semblant de suite royale, on ne peut plus confortable que sa mansarde. Et Arban détestait le confort, ça le fragilisait et lui faisait presque oublier son devoir, sa raison d’être, sa mission. Mission qui avait croisé la route de ce malheureux jeune homme à qui il rendrait des comptes en premier. Les tourments dansaient anormalement dans son esprit, lui qui était d’ordinaire si droit et si implacable, voilà qu’il se trouvait bouleversé depuis quelques jours. Tant de questions, tant d’hypothèses, de possibilités d’échec, toutes aussi probables les unes que les autres. Et s’il en demandait trop ?

    L’aube finit par mettre fin à la plupart de ses tourments, mettant un terme à une attente insoutenable dans la nuit noire. Ses yeux étaient comme rougis par l’absence de sommeil et son humeur était massacrante. Mais après tout, si chacune des missions se déroulait comme il l’entendait, il ferait très certainement un piètre commandant, pensait-il. Il plongea presque d’une traite dans un bain d’eau froide pour s’enhardir, étouffant une plainte virile, serrant les dents. Il lâcha subitement un râle.

    « Pourquoi Joeystar… Pourquoi…! »

    Le corps engourdi, il resta bien cinq bonnes minutes à fixer le plafond, s’habituant à l’eau froide. Puis il secoua la tête, la plongea comme pour se faire violence et reprendre contenance.

    Quelques instants plus tard, il avait revêtu sa tenue de Commandant, noire, impeccable, toujours aussi propre sur lui. Il avait toujours le poil désordonné et grisonnant, mais il contrastait par rapport à Ahlan tant sur la propreté que sur son attitude. Il quitta ses appartements, le pas militaire. Le peu d’hommes qu’il avait croisé s’était immédiatement mis au garde-à-vous en sa présence, à qui il répondit soit par un simple signe de tête, soit par un « Rompez. » des plus glaciaux. Les salutations qu’il accorda à sa secrétaire n’étaient pas moins chaleureuses. Au fond, il aurait préféré quelqu’un comme Vivienne pour remplacer cette espèce de greluche rentière qu’il n’avait même pas le temps de virer ou de remplacer. Et puis, pour ainsi dire, ça n’était pas le plus pressant de ses problèmes.

    Il s’assied à son bureau, contemplant l’artéfact que Klarion lui avait remis ; le cadeau de Vivienne. Il était beaucoup plus charmant que le présent de ces imbéciles de Yuduar et Astrid avec leur balai croulant de sous-entendus tous aussi vaseux les uns que les autres.

    ---

    Un garde se présenta à la geôle de Klarion. D’apparence sobre et affable, propre sur lui, la mine sur son visage n’était ni trop tendre, ni trop sévère. C’était simplement un garde consciencieux à qui on avait intimé les ordres de la hiérarchie vis-à-vis du traitement de ce captif inconnu. Il avait déjà été oublié du reste des geôles, ou sinon de quelques loubards qui s’en seraient bien pris à son fondement, mais guère plus. Il ouvrit la cellule de Klarion, un plateau à la main qu’il déposa sur le rebord du lit.

    « Votre déjeuner, dit-il promptement. Prenez votre temps, mais pas trop. Le Commandant en personne veut vous voir. »

    Klarion, s’il avait encore les menottes au poignet, n’aurait pas de difficulté véritable à se nourrir, d’autant plus qu’il s’agissait d’un repas réservé aux officiers et non aux détenus.

    Après que l’écoterroriste captif fut rassasié, le même Garde, qui était de retour vingt minutes plus tard, fit débarrasser les couverts de Klarion et l’agrippa ni trop fort, ni trop mollement au bras pour l’éconduire hors de sa cellule, sans un mot de plus. Klarion put croiser des regards inquisiteurs, curieux ou encore méprisants parmi les hommes de la Garde qu’il avait pu croiser. Après quelques déambulations jusqu’à un étage calme, silencieux, sans doute réserver aux bureaux d’officiers ou de personnage éminents de la Garde, le fantassin toqua à une porte, arrivant dans une espèce d’anti-chambre sobre, où une vieille femme marquée par la paresse releva la tête.

    « Je viens informer le Commandant de la venue du détenu de la cellule trente-sept.
    – Il attend, répondit la vieille femme sans une once de compassion. »

    À ces mots, le garde, en bon sujet, se dirigea vers la seconde porte, plus impressionnante celle-là, et toqua sobrement avant d’ouvrir la porte et de se présenter en compagnie de Klarion. Arban se trouvait face à la fenêtre, ne bougeant pas. Les échos grisâtre des pas du garde et de Klarion s’étaient manifestés dans son bureau et leur présence était déjà actée.

    « Commandant, annonça le garde. Je vous laisse le prisonnier trente-sept comme convenu.
    – Merci. Disposez, d’ordonner promptement Arban, sans même accorder un regard à sa recrue. »

    Il semblait scruter on ne savait quoi à travers la fenêtre condamnée. Décidément, ça n’était pas seulement une prison pour Klarion.

    Après que la porte se referma, Arban tourna les talons, dévisageant Klarion encore menotté. Lui était impeccable, revêtait un habit formidable qui affichait clairement un statut dont il s’était défait le temps de son escapade. Il avait les mains jointes derrière le dos, qu’il finit par délier pour inviter Klarion à s’asseoir.

    « J’imagine que ton esprit fourmille de questions et je te promets d’y répondre. Mais pour l’instant, c’est moi qui vais t’interroger, Klarion Brando. »

    Il fit comme les cent pas, laissant un silence pesant s’installer dans son bureau, testant encore et toujours le jeune homme comme il l’avait testé lors de cette partie de cartes avec le Don. Cette fois, demander la confiance de Klarion aurait été osé, mais l’écoterroriste était neutralisé.

    Il se dirigea à nouveau à son bureau avant de prendre place.

    « Comprends-tu pourquoi tu es là ? »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 1 Mai 2021 - 23:16 #
    - Tu me demandes à moi si je comprends ce que je fais ici, Commandant ?

    Contrairement à toute attente, Klarion n’avait pas adopté un ton désinvolte pour s’adresser au Commandant de la Garde. Fixant celui qui s’était présenté comme étant « Ahlan », son ami, le phytomancien le dardait de ses yeux perçants et avait parlé d’une voix calme mais glaciale. Pourquoi tout ces coups de théâtre ? Pourquoi l’avoir traîné jusqu’en prison s’il voulait une entrevue avec lui ? Il l’avait déjà dans le creux de sa main lorsqu’ils étaient en ville. Tout ceci avait donc été qu’une vaste mascarade pour lui passer les menottes ? Le Commandant n’avait plus rien d’Ahlan, arborant même une tenue bien mieux coupée et élégante que son accoutrement d’homme des rues. Mais il possédait toutefois cette même froideur et cette étrange aura embaumée de mystère.

    Klarion ne se laissait pas démonter, demeurant debout face au dignitaire, soutenant son regard sans trop sourciller. Son mal de tête était parti depuis quelque temps, mais c’était les questions qui dansaient à présent dans son esprit. Qu’attendait-il ? En tant que Commandant, il n’avait pas à le revoir en entretien privé, maintenant qu’il était derrière les barreaux. Il pouvait très bien reprendre son train-train et faire comme si de rien était, avec la certitude d’avoir accompli un travail bien fait et protégé le royaume d’un vil malfrat terroriste. Néanmoins, Arban Höls l’avait fait mandé pour d’obscures raisons, allait-il se pavaner pour avoir réussi sa capture ? Peu importait, Klarion n’avait pas dit son dernier mot, menotté ou pas.

    - Je suis ici parce que je suis Klarion Brando, l’affreux méchant de l’histoire qui a osé toucher à sa sacro sainte majesté la reine juste pour lui parler. Je ne l’ai pas blessé, ni même effleuré, juste éloigné de ses toutous pendant quinze minutes. Sans oublier mon attaque sur les jardins botaniques contre son ex-directeur véreux et corrompu. Ou encore cet imbécile de prêtre qui a dû venir pleurer dans vos chaumières après m’avoir croisé. Oh, et en petit bonus l’assassinat de sir Woodrue, c’était moi oui, qui menaçait de détruire des centaines d’espèces de plantes et d’écosystèmes pour son gain personnel. Je connais mon dossier, merci, je sais ce que je fais ici avec ces menottes. Et pour ta gouverne, si tu m’avais laissé en placer une avant de me droguer, j’aurais pu t’apprendre que la veuve Woodrue a mandaté un assassin pour me tuer. Mais c’est moi qui suis menotté et pas elle, alors je suppose que j’ai pas voix au chapitre

    Klarion continuait de fixer le grand homme d’un air dur, ce dernier lui renvoyant lui-même un regard tout aussi sévère. Il était évident que le Commandant connaissait son dossier. Il s’en était occupé en personne après tout. L’éco-terroriste ignorait ce qu’il faisait dans son bureau, il ne pouvait se contenter que de répondre aux questions qu’on lui posait, avec plus ou moins de détails, avec plus ou moins de zèle. Il n’avait rien à perdre de toute façon, et que risquait le Commandant avec ces menottes anti-magie ? Klarion restait néanmoins discret. Si Arban avait coupé sa magie à cause des menottes, il avait oublié de vider ses poches de ses poudres et produits, armes subtiles si souvent négligées. S’il fallait s’enfuir, il s’enfuirait et ferait sauter ces affreuses menottes. Mais, en attendant, il voulait discuter avec celui qui l’avait jeté en cellule. C’était bien l’une des rares personnes avec qui il avait énormément à converser.

    - La véritable question, c’est plutôt de savoir si tu comprends ce que je fais là. Fit doucement Klarion en montrant ses mains menottées. Mais, ça n’est pas à moi de poser les question n’est-ce pas, Ahlan ?

    Il était toujours calme, mais le sarcasme dans sa voix était palpable. Klarion faisait évidemment référence à l’absurdité des griefs qu’on lui reprochait, de l’enquête baclée où on avait nié ses mobiles pour ne retenir qu’une illusion, où la vérité dérangeait pour mettre derrière les barreaux un être qui avait ses torts mais face à des victimes qui étaient tout sauf innocentes.

    - Continue, je ne peux qu’écouter de toute façon. Soupira-t-il, attendant patiemment que son interlocuteur n'en dévoile davantage.
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    Re: L'assassin de la couronne
    Dim 2 Mai 2021 - 7:13 #
    Arban écoutait le jeune Klarion dans un silence des plus religieux. Impassible, il s’était armé de sa nouvelle plume bleutée aux nuances dorées, prenant des notes sur une feuille vierge qu’il avait tôt fait d’investir, comme jouant à un homme ès lettres qui se donnait un faux style à trempotter la pointe de sa plume dans son encrier presque vide.

    « Cette plume est magnifique, mais… Que ce n’est pas pratique pour écrire. Il va me falloir un temps d’adaptation. »

    Il avait commenté ça le plus simplement du monde, avant de ranger soigneusement l’appendice qui lui rappelait cette jeune Vivienne qu’il ne reverrait sûrement plus. Il observait ensuite Klarion, l’air un peu plus serein, sans dire mot, puis se leva pour se diriger vers l’arrière de la pièce, le dos à nouveau tourné, alors qu’il semblait mettre en marche un étrange mécanisme destiner à faire bouillir de l’eau.

    « Au moins, nous gagnons du temps… fit-til remarquer en faisant porter sa voix. Tu reconnais avoir “touché” à la Reine pour simplement lui parler. Pour les autres meurtres, de toi à moi, ce ne sont pas de grandes pertes, mon jeune ami… Mais cela reste des meutres, et nul n’est censé ignorer la loi… Du moins… En théorie. »

    La bouilloire magique démarrait, émettant un semblant de son crépitant en vagues grisâtres, tandis que le Commandant faisait de nouveau face à Klarion, lui indiquant un fauteuil pour qu’il prenne place ; le pauvre, il ne l’avait pas invité à s’asseoir, mais au moins, il avait de bonnes manières.

    « Si je t’avais laissé en place trop longtemps, non seulement tu prenais le risque de m’échapper, mais de plus j’aurais brisé une confiance plus grande que si je t’avais fait prisonnier dès le début, jeune Klarion. La confiance est une denrée rare, et l’idée de t’avoir berné est difficilement supportable. C’est pourquoi je devais agir vite. Que tu le veuilles ou non, tu es un criminel, Klarion. Ce n’est pas un jugement de valeur, c’est un fait. Et tu n’es dorénavant pas sans savoir que, du fait de mon poste de Commandant, lorsqu’il est question des affaires royales, je prends la chose très au sérieux. »

    Arban s’était de nouveau assis derrière son bureau, comme un inquisiteur de la Commission retranché derrière un malfrat qu’il expédierait au-delà des murs. L’image, si elle pouvait paraître amusante un temps, disparaissait immédiatement de l’esprit du vieil homme, aussi vite qu’elle était venue.

    « Alors comme ça, tu dis avoir un assassin aux trousses ? C’est quelque chose d’embêtant. Quel poids ce doit être de devoir regarder constamment par-dessus son épaule, à guetter la présence de la Garde ou d’agents privés qui veulent ta peau. Eh, raison de plus pour te garder ici, n’est-ce pas ? »

    L’engin siffla. Arban se releva lentement, non sans prestance, comme s’il savourait ce moment avec Klarion, pareil à une fissure dans le train-train d’une existence terne, rythmée par la paperasse, les emmerdes et… Les emmerdes.

    Il prit le soin de faire infuser deux tasses, tournant à nouveau le dos à Klarion.

    « Moi-même j’ai des assassins aux basques, jeune homme. Et je vis avec. Tu ne devrais pas t’étonner de semer ce que tu récoltes, mais encore une fois, la question n’est pas de te sermonner, mais de comprendre un peu plus. Pour répondre à ta question, Klarion Brando, non, je ne comprends pas ce que tu fais là, et c’est pourquoi je t’ai fait mander ici – pas très proprement, certes, mais il m’a fallu agir vite. »

    Les tasses étaient fumantes et brûlaient le bout des doigts. Il en portait deux par la poignée. Il s’approcha de Klarion et offrit l’une d’entre elles.

    « Promis, celle-ci est innocente, fit-il remarquer, l’air faussement amusé. »

    Après tout, Klarion pourrait très bien la prendre pour la jeter au visage d’Arban et le brûler. Le vieux Commandant en avait conscience. Il n’avait visiblement pas fini de le mettre à l’épreuve, alors qu’il lui tournait le dos pour reprendre sa place, derrière son bureau sobre, austère, mais imposant.

    « Je m’appelle Arban Höls. J’ai pris ma fonction de Commandant il y a deux ans. Mon premier contact à la garde s’est fait à douze ans. J’étais un jeune homme tout ce qu’il y eut de plus banal et, tu dois t’en douter, certaines opportunités se sont présentées à moi, puis j’ai gravi les échelons par la force des choses, non sans douleur. J’étais mu par un sens de l’honneur fabuleux, je croyais dur comme fer à notre mission, à notre cause. Je mourrais pour la couronne encore aujourd’hui… »

    Les yeux dans le vague, il sirota sa tasse encore chaude sans faire de bruit. La gorgée qu’il but était timide et lui brûlait le bout de la langue.

    « J’ai beau me présenter comme un colosse sec et nerveux, en réalité, c’est davantage pour dissuader les gens de me chercher des noises que d’être un excellent combattant. Quand j’étais garde, j’étais tellement généreux que je distribuais des pains à mes collègues pour des raisons parfois exagérées, et je me suis vite calmé lorsque j’ai compris que je finirais en cour martiale si ça continuait comme ça. Je suis davantage cérébral ; comme toi en fait. Je n’étais pas un très bon officier de mon point de vue, je n’avais pas le charisme nécessaire pour subjuguer mes hommes. J’étais davantage un chef qu’un véritable meneur, mais je prenais ma tâche très à cœur, alors, j’étais passable. Et puis un jour, j’ai rejoint le Pôle Espion. C’est là que j’ai découvert que même la Justice n’était pas parfaite. Mes idéaux sont tombés en désuétude, c’est dire si j’ai douté de l’omniprésence salvatrice de Lucy, de moi, de tout. Mais j’étais pris au piège et je devais continuer à remplir mon rôle, encore, toujours. Pour la couronne… »

    Sa voix s’était assombrie alors qu’il plantait à nouveau son regard perçant dans celui de Klarion, sa tasse faisant quelques aller-retours à sa bouche épaisse.

    « J’étais au point culminant de ma carrière, voire même de ma vie à ce moment-là. Être un espion, c’était un peu renoncer à une partie de soi, mais la célébrité ne m’avait jamais intéresser ; tout ce que je voulais, c’était rendre la justice, de façon expéditive lorsque mes cibles essayaient de justifier leurs meurtres. Et j’en ai vu, des choses atroces. Alors tu te doutes bien que tes meurtres de pacotille, Klarion Brando, je serai le dernier à le juger et le premier à les comprendre. Des nobles pédophiles. Des complots contre la couronne. Des hauts dignitaires corrompus. Des réseaux de contrebande… J’en ai eu pour tous les goûts. Le problème, c’est que lorsque tu es habitué à jouir d’une pareille liberté et d’un pouvoir aussi grand, non seulement tu multiplies tes ennemis, mais de plus… La réalité te rattrape. Alors que m’est-il arrivé ? On m’a attrapé, tout simplement. »

    Il s’avachit légèrement pour sortir une pièce de monnaie d’un tiroir, qu’il tint entre son index et son pouce, l’exhibant en face de Klarion.

    « J’étais bon pour passer de l’autre côté du mur. Mais un vieil ami a témoigné en ma faveur, lorsque je lui ai fait comprendre que des gens lui en voulaient et qu’on m’avait sommé de le tuer. Ce que ces enflures de commanditaires avaient oublié, c’est que je ne trahissais pas mes amis. Alors, ce vieil ami en question, dans sa plus grande mansuétude, m’a aidé à disparaître. »

    Sur ces mots, il fit passer son autre main devant la pièce de monnaie, qui disparut comme par magie. Un tour peut-être grossier, peut-être pas impressionnant, mais qui dépeignait une certaine mise en scène, alors qu’il joint de nouveau ses deux grosses mais pour les serrer et faire apparaître non pas une, mais deux pièces, dans leur paume respective, avant de les saisir et les refaire disparaître et…

    « Mh, pardon. Je reprends donc. Mon vieil ami m’ai aidé à disparaître. De la Garde. Des archives. De partout. Je me croyais promis à une retraite paisible, à jouir d’une existence frugale mais simple, sur la côte Ouest. Mais Lucy en avait décidé autrement. J’ai été rappelé il y a deux ans pour succéder à ce vieil ami à reprendre les rennes de la Garde, et me voilà aujourd’hui Commandant. »

    À nouveau, un silence de plomb. Arban dardait cet éternel regard inquisiteur sur le criminel assis devant lui, comme s’il voulait continuer à le tester, à l’observer. Il prit une plus grande lampée d’infusion avant de poursuivre.

    « Tu connais tout ce qu’il y a à savoir en ce qui me concerne. Je t’épargne certains détails de ma vie privée parce que, tu t’en doutes, tu n’as pas totalement ma confiance, et j’imagine que c’est assez réciproque au vu de la situation dans laquelle tu te trouves. Cela dit, je n’ai qu’une parole, Klarion, et si tu continues de t’en remettre à moi, je peux te promettre que, non, tu ne finiras ni assassiné par l’assassin de la veuve Woodrue, ni expédié en pâture aux créatures nordiques. Ta place n’est ni là-bas, ni ici, d’ailleurs. Seulement, on n’est jamais trop prudent. Et je ne peux te laisser en liberté aussi facilement pour que tu te mettes à faire des bêtises qui te mettent dans une situation un peu plus difficile chaque jour. Alors aide-moi à trouver une solution intelligente. Oublie tes peurs et fais marcher ta tête quelques temps. »

    Il se releva promptement, faisant encore les cents pas dans tout son bureau, l’air de se dégourdir, de sentir Klarion autour de lui. Au fond, il se devait de prendre des risques, comme pour lui laisser des marges de manœuvre. La confiance, si elle avait été brisée, pouvait laisser place à une nouvelle relation, plus sincère celle-là.

    « Mais avant de te faire part de ma proposition, j’aimerais que tu me racontes ton histoire à ton tour. On ne devient pas un écoterroriste criminel du jour au lendemain et, pour le peu que j’ai badiné avec toi, je te sais différent de toutes les stupidités que j’ai pu lire à ton sujet. Me feras-tu cet honneur de montrer patte blanche ? »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Dim 2 Mai 2021 - 13:30 #
    Klarion avait écouté le Commandant sans piper mot ni toucher au thé qu’il lui avait servi. La boisson fumait encore dans sa petite tasse de porcelaine, de fines volutes de fumées s’échappant du récipient pour décrire d’élégantes arabesques avant de disparaître. Le thé était une boisson de nobliards, on disait même dans la rue qu’ils en buvaient tellement qu’ils finissaient par le pisser comme des fontaines. Pour Klarion, c’était surtout l’exploitation de milliers de plantes dont on faisait sécher les feuilles pour les faire infuser, juste pour le bon plaisir des castes supérieures. Il n’avait jamais pu penser qu’Ahlan, enfin Arban, était amateur de ce genre boisson délicate. Il n’en donnait du moins pas du tout l’impression. Mais, vu son ton calme, posé et sincère, le loup n’avait pas dû réaliser ce qu’une simple tasse de thé, outre la suspicion de poison, aurait pu impliquer pour Klarion. Il préféra donc passer sous silence cette maladresse et écouter le dignitaire sans même prendre la tasse dans ses mains.

    Arban lui révéla son parcours de vie, dans les grandes lignes mais suffisamment pour que Klarion ait un aperçu de l’homme qui se tenait sous ses yeux. Il avait l’air sincère, pourquoi lui mentirait-il de toute façon ? Après tout, il avait gagné, le criminel était menotté face à lui, il n’avait plus de raison de jouer aux mascarades. Le Commandant disait avoir lui aussi été menacé de procès, sanction et exil. Mais pour quelle raison ? Il ne s’était pas attardé sur les détails, mais son discours semblait traduire une grande lassitude contre toute la lie de l’humanité qui s’était révélée sous ses yeux, exactement comme Klarion. Se reconnaissait-il en lui de cette façon ou comptait-il lui faire la leçon en raison de ses expériences passées ? Mais voilà qu’après avoir achevé sa tirade, Arban voulut connaître la version de Klarion, son histoire à lui. Aucun garde n’avait jamais fait cet effort, mais malgré la boisson droguée et l’emprisonnement, Klarion répondit sans broncher :

    - Le début, je l’ai déjà raconté. Ma mère est morte en couche, je n’ai jamais connu mon père, et mes grands-parents m’ont élevé jusqu’à leur mort. C’est eux qui m’ont appris tout sur les plantes, ils m’ont enseigné comment les respecter, et les aimer. N’ayant plus de famille, j’ai préféré fuir plutôt que de vivre en orphelinat. J’ai échoué dans la rue, où j’ai appris à voler à la tire pour avoir de quoi manger, personne ne se souci des miséreux après tout.

    Klarion marqua un temps d’arrêt pour soupirer et tourner ses poignets pour les dégourdir, légèrement endoloris par la prise des menottes. Le thé qu’Arban lui avait servi était tiède, ne fumant plus depuis bien longtemps…

    - Pour ne pas mourir et avoir un toit, j’ai fini par travailler pour des gangs de rue, à faire pousser des plantes qu’ils utilisaient comme narcotiques. Je n’ai jamais pris part à leurs activités ou manies sordides, je faisais juste pousser des plantes. Elles ont été mes seules amies pendant bien longtemps, mon seul réconfort et souvenir de ma vie perdue, même si elles étaient usées à des fins illégales. J’étais juste un adolescent complètement perdu, et qui n’avait pas le choix. Mais ils ont fini par se faire attraper par la Garde, et j’ai dû m’enfuir pour retourner dans la rue.

    Le jeune homme pinça les lèvres, sachant pertinemment sur quel couplet il allait enchaîner. Pour l’instant, il apparaissait comme plus pathétique qu’autre chose, et Klarion savait que ce tableau n’allait pas aller en s’arrangeant.

    - J’ai essayé de faire les choses bien, j’ai voulu m'enrôler comme aventurier. Mais je me suis fait jeter dehors, me faisant traiter de parasite indigne. Il n’y avait qu’une seule chose que je savais faire : m’occuper de plantes et manier leurs vertus en préparant potions et élixirs. Alors j’ai commencé à en préparer pour les revendre à qui en voulait. Je ne faisais pas de distinction, cure, poison, tout y passait. Je pouvais aider à rendre la vie comme la prendre, tout ce que je voulais c’était survivre. Et pour ça, seules les plantes m’ont permis de réussir, et de m'accrocher à ma propre vie.

    Klarion fixait la plume de Vivienne qu’il avait donnée à Arban. Il l’avait gardé, il lui accordait donc une quelconque importance. Il aurait pu la jeter, ou considérer le présent comme superflu. Mais pourtant, il l’avait conservé. Le terroriste détacha son regard de la plume pour le reposer sur Arban avant de reprendre :

    - Mais je voulais faire quelque chose de plus noble. Je voulais partager mon amour des plantes et les merveilles de la flore avec tout le monde. J’ai été admis aux jardins botaniques, d’abord comme jardinier puis botaniste. Là-bas, j’ai pu transmettre tout ce que je voulais… Mais le directeur et sa cohorte de sycophantes ne le voyaient pas de cet œil. Je leur faisait de l’ombre, avec mes connaissances et mes opinions, alors j’ai été, encore une fois, jeté dehors.

    Les lèvres de Klarion étaient pincées, et ses sourcils froncés, ses yeux plus électriques que jamais. Mais pourtant son ton était emprunt d’une grande tristesse. Son désespoir était palpable, comme s’il avait dû raconter cette histoire un millier de fois sans jamais réussir à se faire comprendre.

    - Ça a été la goutte d’eau. Depuis toujours, j’ai été exploité, rabroué, manipulé et usé jusqu’à l’os. J’ai eu affaire des à des moins que rien, des outres avides et détestables comme cet abject Don Marcel ! Tout ce que je voulais c’était partager un amour différent, mais l’humain n’a jamais rien fait d’autre que me cracher dans la main et utiliser la flore que de vulgaires esclaves muets et impuissants. J’ai décidé qu’il était grand temps que les choses changent, que les plantes reprennent leurs droits et que le peuple d’Aryon comprenne enfin sa réelle place. J’ai cru, peut-être un peu trop naïvement, que la reine pouvait comprendre. Mais elle m’a regardé comme un fou. Et j’en suis là, menotté dans ce bureau, taxé de criminel pour avoir pointé l’évidence et fait justice moi même.

    Klarion avait achevé son histoire, mais il était las. Toutefois, une vague lueur d’espoir le narguait de très loin, sans savoir réellement où elle se trouvait.

    - Tu aurais pu me tuer en ville, personne n’aurait accordé un tant soit peu d’importance. Tu aurais pu mentir, dire que tu m’aurais trouvé mort, on t’aurait cru. Après tout, tu es le Commandant, terrifiant les clampins, je l’ai entendu depuis ma cellule. Je suis au moins rassuré de constater que la plus haute instance de la Garde n’est pas occupée par un vulgaire imbécile ému par une volonté chevaleresque et ridicule. Si je suis vivant, et dans ce bureau, alors ça veut dire que tu as conscience que je suis plus utile vivant que derrière des barreaux ou la frontière. Ce qui nous amène à la question qui me brûle les lèvres : que fait-on à présent ? Où en est-on ?
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    Re: L'assassin de la couronne
    Dim 2 Mai 2021 - 14:11 #
    Arban, qui allait et venait dans la pièce, l’air de réfléchir, s’était à nouveau retranché derrière son bureau, s’il lui fallait prendre des notes vis-à-vis de l’histoire contée par Klarion. Le jeune homme dispersait des vagues bleutées, parfois frèles, parfois vagues, dépeignant des émotions diverses et variées. Il était réellement difficile de croire qu’il mentait, et sans doute qu’une potion de vérité eut été superflue dans ce contexte. Les notes qu’il prenait étaient en fait des traits divers et variés, comme s’il codait les informations de Klarion. La vérité, c’est que lui-même s’était inventé des moyen mnémotechniques naturels pour relire ses symboles, qui lui rappelaient les echos de la voix de Klarion et subsequemment de son discours. Décidément, sa synesthésie avait bien plus de ressources qu’il le pensait.

    Le vieux Commandant demeura silencieux, pareille à une statue de marbre, un monstre de patience qui absorbait le discours de son hôte. Il en avait vu et entendu, des choses pas tendres. Le cas de Klarion n’était pas le pire, mais il n’étais pas tout rose non plus.

    « Tu n’as vraiment pas eu de chance. Parfois, elle se joue à peu de choses, la différence entre un héros et un… Criminel. Et contrairement à une idée reçue, je ne tue qu’en dernier recours. Pour ce qui est de mentir, c’est hors de question. Et inutile de tergiverser sur Ahlan. Je te protègerai face à la Garde, mais tu ne dois jamais oublier dans quel camp je me trouve. J’ai conscience d’être un chien à la solde de la Couronne, mais si je dévie du droit chemin, alors la Garde ne s’en remettra jamais. Et si tu te dis rassuré, alors c’est un bon pas et tu vois où je veux en venir, alors venons-en aux faits. »

    Il s’éclaircit la gorge, vidant sa tasse de thé d’une traite, avant de poursuivre.

    « Je veux que tu travailles à nos côtés. Je ne compte en aucun cas exercer mon pouvoir pour te remettre dans le jardin botanique, ce qui serait vecteur de corruption. En revanche, je vais sévèrement étudier ton cas pour que tu ne finisses pas condamné si tu viens à être jugé. J’ai promis aux Hautes Instances de la Garde de te ramener moi-même pour te traduire en justice. J’ai tenu ma promesse. Je te promets qu’il ne t’arrivera rien de mal. »

    Il marqua un silence. Il s’était répété, certes, mais il fallait mettre du baume sur la blessure causée par ce semblant de traitrise que Klarion avait essuyé.

    « Comme j’estime que ma parole a du poids, je peux aussi te promettre que, si je te fais confiance et que tu me trahis ou que je te surprends à commettre un acte qualifiable de crime, non seulement je te retrouverai, mais je risquerai effectivement de te tuer sans passer par la case procès, dussé-je perdre mon grade pour ça. Mon honneur n’en serait que préservé. J’ai déjà assez de problèmes de trahison sur le dos, dont une autre affaire qui viendra après que je saurai quoi faire de toi. La confiance est fonction du temps, Klarion. Tu te doutes que je ne pourrai pas te faire totalement confiance dès le début et que tu te sentiras quelque peu privé de tes libertés, et c’est comme ça que tu comprendras que je ne te trahirai plus. En revanche, quelqu’un d’assez proche et critique m’a trahi dernièrement, et cette personne, je la connaissais un peu plus, déjà. »

    Il marqua un arrêt, la mine de nouveau sombre. Encore, il se redressa, debout, faisant les cents pas dans la pièce, tournant autour de Klarion, continuant de porter sa voix pour que celui-ci l’entende.

    « Tu ferais très certainement un bon espion si tu as les capacités de tuer. À la différence près que cette fois, ça ne serait plus toi qui ferais justice toi-même, mais tu serais le bras armé d’une justice déjà bien tourmentée. Le fait est que ce qu’on te proposerait serait très certainement en adéquation avec tes convictions profondes… Quoique, tu risquerais aussi de verser dans l’excès : où tuer des personnes qui t’étaient chères, ou tuer à ton compte comme j’ai fait l’erreur de le faire. C’est donc une piste dangereuse qui nous mettrait tous les deux en danger. »

    Un autre silence vint peser. Il fallait mûrir l’idée entre les pas lourds du Commandant.

    « Ce qui m’inquiète, si je te garde, c’est mon incapacité à te tirer d’affaire si la Commission décide de te condamner à mort. J’ai déjà tiré d’affaire des personnes qui sont officiellement portées disparues, mais en ce qui te concerne, je dois dire, même si tu n’as effectivement pas causé de réel tort à la Reine, tu as marqué les esprits. Si nous choisissons de te faire attendre pour ton procès, nous devons mettre toutes les chances de notre côté pour que tu sois au mieux gracié, au pire, disparu de la mémoire de la Garde, mais bel et bien vivant. Te dire que je suis prêt à jouer ma peau pour te sauver ne devrait pas te convaincre, alors si nous choisissons cette première hypothèse, garde le à l’esprit. »

    Il revint s’asseoir à son bureau.

    « La seconde, plus facile et moins en accord avec mes principes, est que je te laisse partir, comme s’il ne s’était rien passé. Aucun garde ne saura que Klarion Brando est allé et venu entre ces murs. Je dirais aux gens les plus curieux que j’avais cru retrouver un fils perdu, ils en feront des rumeurs stupides, mais cela aura de quoi affaiblir les soupçons. Cependant, qu’est-ce qui me dit que, après que je t’ai libéré, tu te comporteras en bon sujet sans chercher à nuire à la garde ou, pis encore, à ce bourru de Commandant qui te fait passer une sale journée ? Est-ce admissible de te garder secrètement tel un électron libre, sachant que tu dis avoir un tueur à tes trousses et sachant que je n’ai pas la certitude que tu nous aideras dans des situations épineuses où tu serais à même de le faire ? Me contenterais-je de ta parole, Klarion Brando… »

    Si le jeune devait se contenter de s’en remettre à la parole d’Arban, alors ce dernier se devait de le faire également. Il finit par admettre.

    « J’ai peut-être fait une erreur en te ramenant ici. »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Dim 2 Mai 2021 - 17:04 #
    - Ça nous aurait effectivement retiré l’épine de la situation actuelle du pied. Et cette gargote aurait été plus confortable qu’une cellule. Mais revenons à nos moutons

    Arban venait de se livrer davantage et mettre sur la table le genre de proposition qui méritait réflexion. Le Commandant proposait de lui donner la même chance, d’en faire un allié et un bras armé d’une justice gangrenée par des idéaux arrogants, des égos aveugles et de la corruption discrète. Klarion était dubitatif, mais l’idée de pouvoir faire discrètement pousser ses plantes depuis l’intérieur du jardin avait quelque chose de séduisant. La perspective d’être une mauvaise herbe ne lui avait jamais vraiment traversé l’esprit. Mais maintenant qu’il y songeait, il réalisait qu’on ne pouvait pas réellement se débarrasser d’une mauvaise herbe. Elles ne faisaient que pousser, et repousser inlassablement même après avoir été arrachées, jusqu’à envahir tout le jardin et en être les maîtresses. Elles en sont les vraies propriétaires, le tout sans que qui que ce soit ne remarque rien.

    - Tu sais autant que moi comment se joue ce petit jeu. Si j’échoue dans une salle d’audience au tribunal, peu importe mes discours sur l’éthique et la morale, peu importe si tu intercèdes en ma faveur. Je reste coupable du crime que j’ai commis, et plaider pour moi ne fera que te causer des ennuis. Un procès n’est pas une option envisageable dans l’état actuel des choses. Il faut être bien plus subtil.

    Klarion croisa les jambes, réceptif à la proposition que lui faisait Arban. La Garde et la Couronne ne pardonneraient jamais l’éco-terroriste, il ne fallait pas se faire d’illusion. S’il voulait évoluer et changer sa situation, c’était vers Arban et Arban seulement qu’il devait se tourner et réfléchir en cette perspective. Il était cependant clair que demeurer emprisonné et jouer le bon jeu de l’administration finirait mal, pour l’un comme pour l’autre. Le plus intelligent à faire était d’être plus inventif.

    - Tu peux avoir Klarion Brando et je peux toujours sortir. Admettons qu’un certain assassin mandaté par une noble veuve trouve la mort. Tu peux utiliser son corps sans vie et le faire passer pour le mien. Maquille le, change son apparence, n’importe quoi...  Je meurs aux yeux du grand public, tu te débarrasses rapidement de mon faux cadavre, la Garde cesse de me traquer et nous trouvons tous notre compte. On m’oubliera vite dehors, je n’aurai plus les gardes aux trousses et la Capitale changera de bouc émissaire.

    La solution était peut-être un peu capillotractée mais elle marcherait sans doute mieux qu’un procès de pacotille où l’issue était déjà jouée. Klarion n’avait aucune envie de rester dans cette prison et semblait séduit par la conjecture que faisait miroiter Arban. Ils avaient clairement un souci mutuel de confiance, mais le phytomancien savait qu’ils réussiraient pas à le régler autour d’une unique discussion dans un bureau austère. Ni l’un ni l’autre ne pouvait avoir la certitude que l’autre remplirait sa part du marché. Mais c’était précisément la raison pour laquelle ils se devaient d’être irréprochables dans cette affaire.

    - Je respecte mes engagements quand je fais des promesses. Tu peux ne pas me croire, je m’en fiche. Mais je vais être clair sur une chose : je me défendrai si nécessaire. Si un garde, citoyen ou noble trop zélé estime qu’il peut me faire du mal, ou mal se comporter, je n’aurai aucun remord à le lui faire savoir.

    Klarion continuait de bouger ses poignets, les menottes trop serrées commençaient à être sacrément inconfortables. Comment fonctionnent-elles en plus de ça ? Le minerai utilisé pour leur confection était-il ce qui bridait la magie ? Ou étaient-elles imprégnées d’un enchantement interdit ? Les questions lui traversèrent l’esprit sans vraiment être d’importance capitale. Malheureusement pour les deux, même s’ils ne pouvaient pas totalement se croire, ils se devaient de trouver une solution avant de procéder à la suite des événements. Ils avaient tous deux diverses armes à leur disposition, des armes qui pouvaient mutuellement les toucher. Mais la porte qu’Arban avait entrouverte était trop belle pour être refermée.

    Plante grimpante, plante envahissante.

    L’idée est à exploiter


    - Je peux être en vie et mort à la fois, je suppose que tu ne t’attendais pas non plus à ça hm… Fit Klarion en souriant malicieusement. Alors, que fait-on ? Je peux être le bras armé de la nature, je peux être ton allié, mais il va falloir se bouger.

    Et il montra ses poignets menottés au Commandant de la Garde, toujours aussi sévère.
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    Re: L'assassin de la couronne
    Lun 3 Mai 2021 - 20:59 #
    La discussion murissait et avançait. Les neurones travaillaient chez les deux êtres et plus le temps passait, plus Arban semblait convaincu que Klarion serait un atout plus qu’un poids mort au service de la sainte-couronne. Il lui arrivait même de déclarer tout haut ce qu’il pensait tout bas.

    Le vieux commandant prit un peu plus ses aises, comme s’il passait d’un militaire strict à un analyste décontracté, comme au bon vieux temps où il réfléchissait à comment démêler une situation difficile avec sa clique très fermée d’espion. Il contempla longuement le grand tableau noir devant lui, s’imaginant déjà dans son esprit comment le remplir pour évoquer toutes les hypothèses, toutes les possibilités ; rien, absolument rien ne devait être laissé au hasard – déjà qu’il n’avait pas dépouillé Klarion de ses effets personnels…

    Le gamin avait par ailleurs déjà passé plus d’un test. Le vieil homme se leva promptement, se dirigeant vers Klarion d’un air menaçant et… entreprit simplement de déverrouiller les menottes privatrices d’un coup de clef. Il le contempla longuement après ça, toujours dans l’expectative, toujours dans l’inquisition. Comme s’il avait libéré une bête sauvage. Puis il haussa les épaules et s’en retourna au grand tableau noir, s’armant d’une craie, notant de gestes amples, presque las, certaines indications.

    « Te faire passer pour mort n’est pas une option, mais une nécessité. Je ne mentirai absolument pas aux hautes instances de la Garde, en revanche l’opinion publique sera heureuse de savoir qu’ils ne craignent plus les agissements d’un écoterroriste notoire… »

    Il regarda par-dessus son épaule, jetant un regard empreint d’une certaine mélancolie, comme voulant vérifier les sentiments de Klarion à ces mots. Il s’en remis à ses notes.

    « J’ai réussi à gagner du temps auprès de la Commission. Ce que je peux leur omettre, c’est que je t’ai capturé, que tu es passé par ce bureau et que j’ai passé un accord avec toi. Ce que je peux leur dire, c’est que je me suis accointé à ta personne, que je t’ai apprivoisé et que je peux nous faire un allié de choix. Non seulement j’ai recruté des atouts de choix, mais j’ai certains faits d’armes qu’ils ne peuvent ignorer. Ce qu’ils ne doivent pas croire, en revanche, c’est que je protège un criminel de la Garde. Tout repose sur moi de ce côté-là. Parce que s’ils refusent, je serai obligé de te considérer comme un ennemi et, si je pourrai sans doute te permettre de gagner du temps face à la Garde, je ne pourrai pas jouer éternellement un double jeu pour tes beaux yeux. »

    Il soupira. La situation devenait en fait plus compliquée. Il reprit enfin, élaborant d’autres schémas succincts dans un autre coin du tableau.

    « Nous allons donc nous intéresser à ton assassin pour te mettre hors de danger pour l’instant. Le tuer et te faire passer pour lui n’est pas une option que je préfère, alors j’aime autant y être contraint. Le fait est est que tu es en danger. »

    Il réfléchit un instant, marquant une brève pause.

    « Ils ne peuvent pas m’accuser de traitrise au vu de ce que je risque personnellement… Il faut qu’ils acceptent que tu bosses avec nous. Le fait est que j’ai besoin de toi. Enfin. »

    Il s’empara d’un chiffon qu’il passa méthodiquement sur l’intégralité des inscriptions au point qu’il eût été difficile de deviner ce qui avait été dit a posteriori.

    « Parle-moi de cet assassin, maintenant. »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Lun 3 Mai 2021 - 22:15 #
    - Écoute, je me fiche de ta Commission ou de la Garde. Leur prétendre que je peux travailler de concert avec eux est chimérique. Jamais ils ne voudront de moi, et je ne veux pas non plus d’eux. Après ce qu’ils m’ont fait, jamais ! J’accepte, en revanche, de m’allier à toi. Et toi seulement. Si ça ne te plaît pas, alors je peux retourner m’occuper des plantes et du peuple d’Aryon dehors, je ne suis pas spécialement perdant dans cette histoire. Dans les deux cas, je sortirai de cette caserne.

    Klarion s’agaçait en constatant la place que commençait à regagner l’intégrité d’Arban. Considérait-il autant la Garde et sa position malgré ce que Klarion venait de lui raconter et ce que le Commandant lui avait dit. Pourquoi diable revenait-il obscurcir leur potentielle alliance en se souciant de ce que pouvait bien tolérer ou concéder la Commission ? Jamais Klarion ne serait pardonné par qui que ce soit dans les hautes instances. Le jeune garçon commençait à douter et se demander s’il n’était pas le moins idéaliste des deux dans ce bureau…

    - Je ne veux pas laisser passer cette opportunité, ni être défaitiste ou désagréable. Mais il faut se rendre à l’évidence, jamais personne dans les hautes instances ne peut concéder quoi que ce soit à mon sujet. Je mets déjà assez d’eau dans mon vin en acceptant de me faire passer pour mort, de changer drastiquement tout ce que je suis, j’étais même prêt à changer d’apparence pour parfaire le tableau et changer d’identité… Je pense qu’il serait peut-être temps de considérer que le « double » jeu doit effectivement avoir lieu dans les deux sens.

    Klarion était frustré et parlait sans doute avec un ton plus désinvolte qu’il ne le devrait. Mais l’éco-terroriste avait l’impression d’être à nouveau si près d’un but qui commençait peu à peu sa dérive. Arban avait été, malgré sa tromperie, l’une des rares personnes à avoir répondu à ses mains tendues. Cela comptait pour Klarion et avait l’impression de se retrouver comme un enfant à qui on avait fait une promesse, découvrant qu’on ne pourrait malheureusement pas la remplir. Il vivait cela comme une injustice, mais peut-être qu’il avait encore la possibilité et le temps de faire changer le Commandant d’avis.

    - Je ne sais pas vraiment qui est l’assassin à mes trousses. J’ai juste trouvé une note m’indiquant qu’il me traquait pour venger la mort de Sir Woodrue, me faisant penser qu’il s’agit d’un type engagé par sa femme, même si je n’ai aucune preuve. Il a dû me suivre pendant quelque temps, a même saccagé l’une de mes planques. Il ne mérite rien d’autre que la mort. Je n’avais pas spécialement besoin d’aide pour le faire tomber, j’avais juste envie qu’on passe à nouveau un peu de temps ensemble, ironiquement. Mais la prochaine fois je suppose que je me débrouillerai moi même quand je vois où ça m’a mené.

    Klarion soupira d’exaspération, partant s’asseoir sur un divan posé dans un coin du bureau d’Arban. L’assise de cette méridienne était plus confortable et moins bourrue que celle de la gargotes dans laquelle ils s’étaient rencontrés plus tôt dans la journée. À côté, sous un coussin, se trouvait un livre ouvert aux pages cornées qui avait dû être perdu ici depuis plusieurs jours déjà, de grosses boules de poils de chats coincées entre des pages. Arban avait un chat ? Encore une chose qu’il ne lui avait pas dit. Au moins il avait de la chance, il pouvait faire ce qu’il voulait, même se vautrer sur ses livres, le Commandant ne devait pas lui reprocher grand chose.

    Il demande à la Commission s’il peut lui filer ses croquettes aussi ?!

    Il s’en retourna vers Arban, le visage plus excédé qu’autre chose. Klarion vint à penser qu’il ignorait toujours comment s’articulait le pouvoir du Commandant, ils n’en avaient jamais parlé. Le vieux loup n’avait jamais vraiment montré signe d’un quelconque usage de sa magie durant leur précédente escapade, avait-il un pouvoir psychique ? Ou ne l’avait-il tout simplement pas utilisé ? Peu importait, mais encore un point passé sous silence. Devait-il réellement lui faire confiance ? Klarion était confus, et la nouvelle zone d’ombre dans le tableau n’arrangeait pas les choses.

    - Je pourrais philosopher sur l’éthique et le bien fondé des choses, ça a l’air d’être une autre de mes marques de fabrique, en plus des plantes. Mais si tu acceptes de considérer une alliance avec moi, c’est que tu veux changer les choses. On ne peut être irréprochable à ce jeu là, surtout vis-à-vis de l’institution qui veut ma tête sans même avoir pris le temps de considérer mes motivations. J’ignore pourquoi tu ressens le besoin d’en parler à la Commission, mais c’est une mauvaise idée. Le pouvoir réside là où les gens pensent qu’il l’est, c’est une mascarade, une ombre au-dessus des têtes. Et même la plus petite fleur peut projeter une ombre immense
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    Re: L'assassin de la couronne
    Mer 5 Mai 2021 - 0:11 #
    Le vieil homme demeura coi.

    Comme il aurait pu s’y attendre, l’évocation du mot « Commission » n’avait pas plu au jeune homme, sans doute à raison. Son humeur semblait avoir changé d’un coup, si bien qu’il devenait dorénavant délicat de trouver un terrain d’entente entre un Commandant possiblement complice et un écoterroriste craignant de répondre de ses actes. Le vieil homme, craignant que le jeune garçon ne monte dans les tours, resta immobile, les bras le long du corps, sans faire montre de quelque geste menaçant néanmoins. Il repensa à ce que le dévot de Lucy lui avait témoigné à propos de Klarion, se rappelant que contrarier le jeune homme était sans doute la dernière des choses à faire. D’autant plus qu’il était désarmé, possédait sans doute quelques artéfacts douteux, eût-il le désavantage de se trouver en terrain ennemi qu’il comptait fuir. La prudence était de mise.

    « Laisse-moi éclaircir certains points. Tu dis que tu veux t’allier à moi, mais il faut bien que tu comprennes que je n’ai aucun intérêt personnel. Si je suis parti te chercher, c’est pour la Couronne, la Garde et, dans une moindre mesure, le peuple. Tu as kidnappé la Reine, Klarion. C’est quelque chose. Et si tu lui avais fait du mal, crois-moi, nous n’aurions pas cette discussion. Ce que je veux que tu comprennes, c’est que si tu t’allies à moi, tu t’allies à la garde, et tu t’en feras une alliée, officielle ou officieuse. Pour le reste, tu ne peux pas deviner ce qu’ils décideront de toi. Moi non plus. Ce que je peux te garantir, c’est que je vais tout faire pour te blanchir. Maintenant, si tu veux retourner t’occuper des plantes et du peuple Aryon dehors, le choix te revient. Ne compte simplement pas sur moi pour te couvrir. Tu sauras à quoi t’attendre et je ne te laisserai plus le bénéfice du doute si j’entends parler de tes agissements en mal, c’est aussi simple que ça. Maintenant… »

    Il prit une inspiration avant de poursuivre.

    « Tu disais hier avoir besoin d’un coup de pouce, et maintenant tu me dis que tu voulais simplement passer du temps avec moi. C’est incohérent. Moi, j’essaie de t’aider, et si tu es un écoterroriste dans les faits, il n’y a aucun jugement de valeur de ma part. Tu as supprimé des personnes pour ton compte parce que tu estimais qu’elles le méritaient. J’ai fait la même chose dans le passé, mais cette spirale destructrice ne mène à rien de bon, Klarion ! Ta sensibilité et ton génie doivent honorer de meilleurs desseins. Je ne te parle pas d’être le chien de la Garde, simplement de te blanchir ; peut-être pas de nom, mais tu n’auras plus à fuir. Je ne pourrai pas te faire passer pour mort auprès de mon camp, malgré tout ce que tu lui reproches. Alors si tu es prêt à tirer un trait sur ton ancienne identité, c’est un choix courageux, je peux même t’y aider… Simplement, avec l’appui des instances de la Garde. C’est comme ça. Et détrompe-toi, je fais partie des hautes instances et si pour l’instant je suis le seul des hautes instances capable de concéder des choses à ton sujet, tu dois me faire confiance pour aller plus loin, et accepter de voir où ça peut te mener. »

    Il serra le poing. La discussion semblait verrouillée et les deux hommes avaient des intérêts divergents. Au fond, la crainte du jeune Klarion était compréhensible. Il était pareil à un animal sauvage qui avait raison de se méfier de tout, et Arban se retrouvait partagé entre le livrer à la Commission et… Le protéger. Il y avait forcément une solution idéale dans le tableau, mais elle peinait à montrer le bout de son nez. Peut-être était-ce trop tôt. Il tourna encore le dos à Klarion.

    « Ton destin n’est pas de finir condamné à mort, Klarion. Tu n’as pas eu de chance. L’on dit que lorsqu’un arbre repousse de travers, il ne se redresse jamais. Je hais cet adage. Personne, absolument personne n’est exclusivement bon ou mauvais. Cependant, j’ai cinquante ans révolu et je sais que si je dois mourir un jour, c’est soit en étant assassiné, soit de vieillesse. Mais pas en étant jugé par mon propre camp pour haute trahison. Alors je vais insister une dernière fois… »

    Il refit face à Klarion, le regard plus dur que jamais.

    « Je sais que tu as besoin d’aide pour cet assassin qui te traque. J’ai du temps à te consacrer. Ahlan a brisé ta confiance et a aussitôt disparu. Arban est prêt à prendre la relève. De surcroit, je pourrai même t’aider à retrouver un emploi décent au Jardin Botanique, sous un autre nom s’il le faut, seulement je n’utiliserai pas de mon influence, nous ferions ça à la loyale. Et tant que je suis officiellement affairé à te traquer, tu n’auras pas à craindre les invectives de la Garde. C’est dire si la majorité des Gardes céans savent à quoi tu ressembles… Enfin. Comprends juste que, tôt ou tard, je rendrai des comptes à la Commission, en disant l’exacte vérité sur ce qu’il s’est passé, parce que même si je déteste la plupart de ces infestes bureaucrates, il y a certaines personnes qui ont la tête sur les épaules et le sens du devoir. Alors si tu estimes que tu ne voudras jamais badiner avec nous, je doit te demander de quitter immédiatement les lieux et de sortir par toi-même. Je reviendrai avec des moyens tout autre pour t’arrêter et réitérer ma proposition de te recruter et changer ton quotidien. Qui sait, peut-être que cela te convaincra. »

    Il tendit les bras, comme pour montrer patte blanche une fois pour toute.

    « Et si tu réfléchis plus loin, accepter de m’allier à toi en tant qu’Arban, c’est accepter de trahir mon camp et subséquemment te trahir plus tard. Je ne tolère pas la traitrise. On a toujours le choix. Et aujourd’hui, le choix te revient : où tu me laisses le temps de trouver une solution, trouver le compromis idéal qui te permettrait d’embrasser une existence moins tourmentée, ou tu peux quitter cette caserne. »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Mer 5 Mai 2021 - 17:12 #
    - Tu veux parler de trahison ? Tu m’as drogué pour me jeter en cellule et tu viens me parler de trahison ? Je suppose que je n’ai pas non plus besoin d’évoquer le saccage des jardins botaniques où je t’ai mystérieusement trouvé au même moment, à l’endroit exact où j’ai enlevé la reine, hm ? Ta Commission n’hésiterait pas une seule seconde à te planter un couteau dans le dos si ça pouvait leur bénéficier. Et si ce que tu dis sur ton passé est vrai, quelque chose me dit qu’ils n’attendent que ça

    Klarion savait que la Commission n’était pas une bande de tendres idéalistes, certains devaient même être bien enclins à la corruption ou au vice. Il suffisait de voir avec quel zèle la consultante Amaryllis Tylwaen avait accepté de s’allier en secret à Aryon. Il devait bien y avoir d’autres électrons noirs de son acabit au sein même de l’institution. Le jeune homme n’aimait pas cela et ne faisait en aucun cas confiance en la Commission, et ne comprenait pas plus la fidélité d’Arban à leur égard. Il y avait là dessous quelque chose d’hypocrite, de la part des deux parties, mais insister ne risquait d’avoir que peu d’impact si ce n’était tourner court la discussion. Il attrapa le coussin au-dessus du livre bourré de poils et constata qu’une carte postale décorée d’aquarelles dépassait du roman en guise de marque-page, avant de placer le coussin sur son ventre comme pour plus de confort.

    - Tu veux du temps, parfait, prend donc le temps. On verra ce que l’avenir nous dira. Mais je ne considérerai rien tant que la Commission n’aura pas revu sa partition, et je ne serai jamais un de leurs laquais, qu’on se le dise. Si tu veux du temps, alors soit, je te l’accorde, mais tu as mon opinion sur le sujet pour l’instant.

    Le phytomancien en avait assez, ses poignets lui faisaient mal, il avait envie de se reposer et voulait surtout retourner auprès de ses plantes pour ne plus les quitter. La journée avait été bien trop riche en émotions et le garçon voulait se retrouver au milieu d’être qu’il savait sincères et avec qui il ne risquait rien. Il voulait aussi oublier ces affreuses menottes, qu'on les jette au plus profond de la Rivière Luisante pour ne plus jamais les avoir autour de ses poignets. C’était la première et dernière fois qu’il les portait, il se le promettait intérieurement. Il y avait toujours ce problème d’assassin qu’il devait régler le plus vite possible, ce qu’il ne pouvait faire coincé ici dans une caserne à conserver au sujet d’un avenir hypothétique.

    - Maintenant qu’on a réglé cette question, pour l’instant, est-ce qu’on peut se hâter de s'occuper du tueur à gage à mes trousses ? Je veux sortir d’ici et que cette caserne ne soit plus qu'un lointain souvenir.

    Klarion se releva, reposant le coussin sur le livre caché, avant de s’en retourner vers le bureau d’Arban. L’éco-terroriste s’impatientait et commençait à tapoter du talon sur le sol. Leur accord était certes maladroit, mais il fallait à présent que les choses avancent, pour l’un comme pour l’autre.

    - Allons, on va prendre racine à force
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    Re: L'assassin de la couronne
    Jeu 6 Mai 2021 - 18:16 #
    « Je t’en dirai plus sur la Comission le moment venu. Tu mérites de savoir ce qu’il y a à savoir à leur sujet. »

    Il eut répondu promptement à Klarion sans s’éterniser sur le sujet après avoir abouti à un consensus salvateur qui, en plus de leur permettre de ne pas s’éterniser dans la pièce, pourrait permettre au vieux de résoudre le cas de Klarion une fois pour toute, dans l’idéal sans mort, sans effusion de sang et, cerise sur le gâteau, avec un brillant cerveau à ses côtés. Si la voix serait libre, la route serait longue, mais elle semblait justifier les moyens.

    Il rangea promptement son bureau et ses affaires, dévoilant la suite des opérations à Klarion.

    « Lorsque je sors de la caserne, c’est de deux manières : soit officiellement et je suis sous escorte lourde, soit… Officieusement. Et je ne pensais jamais montrer ça à quelqu’un un jour. »

    Il crut presque fendre son visage d’un sourire amusé alors qu’il scrutait Klarion, l’intimant de le suivre. Il semblait gagné d’une énergie nouvelle, nourrie par le goût du défi qu’était celui de rallier Klarion à une cause noble, à démêler un problème épineux qui n’attendait que d’être résolu. Un peu comme si le garçon était un Arban en devenir, mais qui avait bien plus souffert pour ce qu’il en avait vraiment mérité.

    Il poussa la porte de son bureau. Sa secrétaire, vieille, assoupie, dirigeait son regard vers son supérieur, interdite, prise sur le fait à brasser de l’air.

    « Dites à qui de droit que j’ai réglé la situation avec mon neveu. Il comptait faire justice lui-même avec les toupets qui lui cherchaient noise, mais l’affaire est réglée. »

    Il regarda durement l’espèce de pervenche affalée sur sa chaise, la moue réprobatrice, alors qu’il continua son chemin pour quitter l’antichambre.

    « Suis-moi, avait-il ordonné promptement à Klarion. »

    La démarche militaire, suivi par l’écoterroriste, Arban se dirigeait le plus naturellement du monde dans les couloirs, empruntant des escaliers en colimaçon pour atteindre le dernier étage de la caserne. Un autre couloir présentait quelques portes. au bout, une porte sombre, jusqu’à laquelle Arban s’avança.

    « N’en prends pas trop la vue, confia-t-il à Klarion avant de déverrouiller la porte. »

    Celle-ci donnait sur une suite personnelle spacieuse, sobre, qui conservait un charme d’ancienneté et de prestance. Un grand salon abritait en son sein trois divans confortable, une table d’appoint, tandis que les murs étaient couverts de bibliothèques aux ouvrages divers et variés. D’autres cloisons, d’autres portes laissaient croire qu’il y avait d’autres pièces d’usage.

    « Ma suite personnelle. Je n’y suis pratiquement jamais, sauf pour partir en loucedé. Tu connais le mot “loucedé” ? »

    Sans nécessairement attendre de réponse, il s’était dépêché d’ôter prestement son grand manteau noir, qu’il pendit avec un soin presque maladif. Il se changeait comme s’il revêtait la peau d’Ahlan le vaurien, prêt à en découdre à nouveau, attrapant l’autre manteau moins sombre, plus usé, plus irrégulier.

    « Profites-en pour me parler de ce que tu sais sur Woodrue. Tu es sûr que c’est sa femme qui a mandaté quelqu’un pour te tuer ? Dis-moi tout ce qu’il s’est passé, je n’ai aucune connaissance de ton dossier, pas même depuis le fonds des archives de la Garde. Tu as sûrement un lieutenant aux basques pour ça, mais rien qui n’est remonté à mes oreilles. Avec ce que tu as fait à Son Altesse Royale, en même temps… Pas sûr qu’on garde en mémoire que tu as supprimé un véreux. »

    Il finit de se changer. Il ressemblait au parfait homme des rues qui n’était ni trop menaçant, ni trop affable ; juste quelqu’un d’aléatoire, sans le sou, qui ne cherchait ni des amis, ni des ennemis.

    Il se dirigea vers la fenêtre. Le temps au dehors semblait couvert, ou s’agissait-il seulement d’un effet visuel ? En effet, à côté de celle-ci, contre le mur, Arban sembla activer un mécanisme technomagique. Dans de petits cliquetis et sous une précision infinie, celle-ci s’ouvrit mécaniquement alors que le linceul de nacre se dissipait, laissant voir la lumière du jour comme on la voyait d’ordinaire.

    « Passe. »

    Il sortit, chevauchant l’ouverture et se retrouvant sur la toiture de la caserne. Ça n’était pas le bâtiment le plus haut de la Capitale, mais la vue avait de quoi couper le souffle pour les âmes sensibles. Après le passage de Klarion, le mécanisme s’enclencha de nouveau de lui-même, laissant le voile se reformer.

    « Suis-moi et accroche-toi bien. Fais appel à tes dons végétaux si tu ne le sens pas. »

    Il se laissa tomber, disparaissant de la vision de Klarion, se laissant glisser le long d’une colonne jusqu’à une terrasse condamnée, avant de continuer sa descente. Le passé de Maître Espion lui hantait : quelque part, il s’était senti obligé, dès son retour, de créer ses propres portes dérobées dans la caserne, dont seul lui avait le contrôle et qui, si elles étaient exploitées par quiconque autre qu’Arban, avaient la faculté de soit bloquer l’intrusion, soit donner une alerte quelle qu’elle soit, par un mécanisme ou effet magique dont seul le Commandant avait le secret.

    Toujours est-il qu’ils furent tous les deux au dehors de l’enceinte militaire, avec pour seul danger la garde de la capitale pour les considérer comme suspects.

    « Inutile d’essayer de faire marche arrière de cette manière, au fait. Et juste au cas où : inutile de poser la moindre question sur tout ça. On n’est jamais trop prudent, après tout. Enfin. On retourne là où je t’ai drogué, ou tu souhaites me montrer autre chose ? »
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Jeu 6 Mai 2021 - 20:13 #
    - Où tu traînais ces dix dernières années exactement ? Tu connais le mot « loucedé » mais tu colles sur Woodrue ?! S’exclama Klarion, une expression à mi-chemin entre l’étonnement et l’exaspération.

    Klarion était enfin sorti de la caserne forteresse en compagnie d’Arban, ce dernier l’ayant guidé à travers un passage secret aboutissant à la toiture. Heureusement qu’il était le seul à connaître pareil mécanisme. Mais il paraissait logique que le Commandant soit au courant qu’une issue de secours potentielle au cas où les criminels retenus sur les lieux parvenaient, on ne pouvait deviner comment, à briser leurs chaînes et assaillir leurs geôliers. Au moins, le chef de la Garde avait moyen de s’enfuir en parfaite discrétion et s’en sortir sans une égratignure. Tout ce qu’il avait retenu pendant la descente était qu’Arban avait besoin d’être mis au parfum par rapport à sir Woodrue, comme pour se rassurer et ne pas faire de faux pas, avoir un point de focus afin de ne pas dégringoler. Se concentrant pour ne pas faire une maladresse, il répondit à son interlocuteur une fois les pavés de la rue touchés et la caserne derrière eux :

    - Woodrue était un noble bien apprécié pour ses dons à certaines œuvres caritatives et ses apparitions distinguées dans les soirées mondaines. Tout le monde l’appréciait, sauf que tout n’était qu’une façade pour flatter son égo et son influence, il n’y avait jamais aucune sincérité dans ses actes. Il se contentait d’arroser tout le monde d’argent pour gagner du pouvoir. Je me fichais de lui jusqu’à ce qu’il décide d’investir pour raser des hectares de plantes et s’en faire une propriété avec un haras privé. Je me suis introduit chez lui, je l’ai tué et j’ai détruit l’acte de propriété pour que personne d’autre ne reprenne son entreprise. Il faut pas être bien dégourdi pour deviner que j’étais derrière l’assassinat, j’ai littéralement enfermé Woodrue dans un cercueil de ronces. Sa femme doit être assez remontée, même si j’ai rien pour prouver que c’est elle.

    Klarion avait rabattu sa capuche par précaution tandis qu’Arban emboîta le pas. Les deux hommes se mirent à marcher pour descendre la rue afin de ne pas rester statiques devant la caserne et paraître suspects. Ils passèrent dans une étroite ruelle où des commerçants nettoyaient leurs devantures avant de fermer boutique. Une grand-mère jeta d’ailleurs un bref coup d’œil derrière ses épaisses binocles pinçant son nez rabougri avant de rentrer vite chez elle, claquant une porte de bois rongée d’échardes.

    - Je m’en fiche de savoir qui c’est, je veux juste que cet assassin soit hors d’état de nuire. De toute façon, c’est pas comme si on pouvait trouver le responsable autrement que par potion de vérité directement sur le mercenaire, beaucoup de gens aimaient Woodrue, même s’ils ne le connaissaient pas… Si ce n’est pas la veuve Woodrue, alors ça pourrait être n’importe qui. Un meilleur ami, un proche collaborateur, un fan invétéré

    Quelques minutes plus tard, ils déboulèrent sur un boulevard avec plus de populace. Ils traversèrent rapidement un pont pour rejoindre l’île centrale avant de descendre se réfugier sur les quais et longer loin du gros de la foule. S’ils ne pouvaient pas pister le commanditaire de l’assassinat, alors ils devaient directement tomber sur l’assassin en personne. Klarion avait une furieuse envie de lui faire regretter de l’avoir suivi et détruit les plantes de son antre. Mais il devait se refréner. Arban avait la Garde comme atout, et le livrer au Commandant pour que ce dernier use des élixirs de vérité pouvait s’avérer plus lucratif qu’autre chose. Il ferait tomber deux têtes pour le prix d’une et en ressortirait deux fois plus gagnant. Le jeune homme avait peut-être un début d’idée…

    - Si ce tueur me traque, il faut remonter le fil. On peut repasser dans ta gargote et voir s’il y a eu des traces de fouilles. S’il m’a suivi, il m’a vu rentrer là-bas, et potentiellement être emporté jusqu’à la caserne. Par extension, il devient aussi ton problème du coup

    Klarion réalisait à peine le point qu’il venait d’exposer. Si l’assassin avait bien vu Klarion se faire emmener, il avait forcément vu Arban. Ce dernier ne risquait sans doute pas de mourir, mais il pouvait être inquiété d’une façon ou d’une autre dans toute cette histoire. Il pouvait être identifié comme un proche de l’éco-criminel et être agressé par la même occasion. La nécessité de retirer cette nouvelle épine se faisait de plus en plus sentir et ils devaient agir vite, et de concert. Les quais étaient moins peuplés mais le cour de la Rivière Luisante ne dormait jamais vraiment, plusieurs péniches qu’on devinaient allumées, d’autres desquelles on entendait des bruits étouffés d’amusement et de fête.

    Si on veut savoir qui est le pêcheur, il suffit de remonter sa ligne. Pour le piéger, il suffira d’emporter l’hameçon avec nous, et on a de la chance… puisque c’est moi. Si on ne trouve rien chez toi, on fera le tour de quelques-unes de mes planques et il suffira de lui tendre un piège et le cueillir tout doucement.

    Il va s’amuser, le Commandant, ça devrait le dérider, cette chasse à l’assassin… !

    Klarion souriait en s’imaginant les folles années d’Arban avant qu’il ne passe cet air aussi austère qu’une soutane de prêtre. Il était prêt à en découdre et à prouver, une fois de plus, que la nature gagnait toujours.

    - Il finira comme une mouche dans une plante carnivore !
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    Re: L'assassin de la couronne
    Lun 10 Mai 2021 - 18:56 #
    Le vieil homme croisa les bras, toisant le jeune Klarion qui, sous son sourire narquois et ses airs d’enfant de cœur, semblait s’émoustiller à l’idée de jouer à quelque enquêteur résolu à combattre le crime. Décidément, ce jeune s’était trompé de voie à se mettre à dos les instances officielles du royaume. Ou alors c’était un sacré psychopathe dont on eu tôt fait de se méfier. Mais pour l’heure, Arban ne percevait pas une seule once de malice en son cadet ; c’était simplement un garçon perdu qui, comme il l’avait pressenti avec le capitaine Al Rakija, s’était engourdi dans les affres de la solitude, à cultiver de sombre desseins qui ne lui ressemblaient pas.

    Il secoua la tête.

    « Si l’on tient vraiment à savoir qui a exactement envoyé cette personne à tes trousses, il vaut mieux ne pas laisser l’assassin dans la trachée d’une plante carnivore. De même, jeune homme, je ne suis pas partisan du meurtre. J’ai vu des choses bien trop dures que tu ne puis imaginer parce que j’était trop présomptueux pour croire qu’il n’y avait pas d’alternative ; c’est un coup à perdre toute humanité. Enfin, trêve de bavardage et retournons sur les lieux du… Du crime. »

    Il avait hésité sur son dernier mot. Il n’y avait pas eu le moindre crime commis, certes, mais c’est ce qui sonnait le mieux. Secondé par le jeune fugitif, il s’était mis en direction de la fameuse planque où tout allait se terminer… Et où tout reprenait un nouveau départ. Il faisait profiter à Klarion des mêmes astuces pour éviter de croiser certains gardes qui, même s’ils ne reconnaitraient pas le duo de choc, procéderaient à des vérifications routinières, tant leur accoutrement attirait plus l’attention qu’autre chose.

    « Tu as la certitude que ton minois est connu de tous ? Il va vraiment falloir que nous en reparlions… »

    Lui-même avait tendance à facilement oublier des criminels notoires – le comble, c’est qu’il se souvenait très facilement de l’un d’entre eux, Vrenn, sans doute son meilleur atout à l’heure actuelle, alors que cette personne avait pour don de se faire oublier. Le cerveau avait une capacité limitée et les archives avaient une capacité… Moins limitée.

    « Nous y sommes. »

    Il déverrouilla la porte. Entra dans le couloir étroit. À première vue, aucun passage de l’agresseur de Klarion. Il nettoya la pièce principale qui semblait être restée intacte depuis son passage, avec le verre de Klarion brisé, par la suite de quoi il répéta le même manège, mais servant deux boissons moins agressives, moins ambrées cette fois. Presque affalé dans son fauteuil, il perdit son regard sur le sol, l’air songeur.

    « Un bon assassin ne laisse jamais présager sa frappe… C’est quand même étonnant que tu saches avec quasi-certitude qui en a après toi. Et s’ils étaient plusieurs ? Plusieurs parias par exemple ? Je pense que c’eut été une stratégie efficace pour te retrouver ; et parfois l’appât du gain adoucit les mœurs au point de ne pas te vouloir mort, je ne sais plus si la Garde a posé une prime juteuse sur ta tête… Tu crois vraiment qu’il pourrait se pointer ici ? »

    Il jeta des regards alentours au cas où. Derrière un mur, il cru voir de timides tâches dorées prendre naissance à la base.

    Est-ce qu’il s’était fait avoir au point de n’avoir vu plus tôt qu’il y avait quelqu’un d’autre à l’intérieur ?

    Il resta de marbre, le plus naturel du monde, son regard seul comme indiquant la cloison qui l’intéressait. Il ne fallait alerter personne. Continuer comme si de rien n’était.
    Klarion BrandoSouverain de la flore
    Klarion Brando
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    Re: L'assassin de la couronne
    Lun 10 Mai 2021 - 20:15 #
    - Je sais que je ne dois pas le tuer, même si ce n’est pas l’envie qui m’en manque. Cet assassin le mériterait. Et si tu veux ouvrir un autre débat éthique, on peut parler du bien fondé de l’exil par delà la frontière et l’atroce mort plus ou moins lente que les exilés doivent subir, hm ? Une exécution sommaire aurait moins de panache mais le résultat serait le même. Mais ça va, je sais, on va s’épargner les tirades grandiloquentes.

    Entrant dans la garçonnière pour la seconde fois, Klarion avait été légèrement agacé par la remontrance d’Arban au sujet du potentiel dénouement de son traqueur. Le jeune homme n’avait rien fait d’autre qu’émettre un ressenti, parfaitement conscient qu’il ne fallait pas simplement tuer l’inconnu mais le livrer vivant à la Garde pour débusquer son employeur. De plus, Arban semblait distrait. Il avait l’air de considérer que Klarion était sûr de ce qu’il avançait alors qu’il n’émettait que des hypothèses et n’était sûr que d’une seule chose : on le traquait. Par qui ? Il ne le savait pas. Sur les ordres de qui ? Il le savait encore moins. Le jeune homme ne faisait qu’assembler le peu de pièces qu’il avait entre les doigts. La journée n’avait pas été dure uniquement pour lui quand il entendait le Commandant…

    Dans tous les cas, ils n’avaient pas plus avancé. La gargote où ils s’étaient retrouvés plus tôt était restée la même. Si elle avait été visitée, alors le cambrioleur avait pris soin d’effacer trace de son passage. Klarion crut déceler quelque chose mais se renfrogna en constatant qu’il ne s’agissait qu’une touffe de poils de chat. Sans doute Arban avait dû la laisser tomber de son manteau plus tôt lorsqu’ils s’étaient vus. Le phytomancien envoya la pelote sous un meuble avant de se relever, un coup d’œil partant vers le canapé où il avait été drogué. Arban n’avait même pas pris soin de faire le ménage, laissant les morceaux de verre au sol. Il avait dû partir immédiatement après l’avoir endormi. Le tapis, bien que désormais sec, avait toujours la marque d’alcool brun, à demi estompée sous les éclats cristallins.

    - Bien, visiblement on ne trouvera rien là. On perd notre temps, partons. On va aller vers la planque qu’il a saccagée. Il sait au moins que c’est l’un de mes points de chute et que je m’y trouve régulièrement, c’est là-bas qu’il m’a laissé sa petite note. On l’attend là-bas, on lui tend un piège, affaire réglée. Tu devrais être rassuré, je n’ai pas eu le temps de faire repousser suffisamment de plantes pour qu’il finisse dévoré par l’une d’elles. Gangréné par des spores et transformé en champignons lumineux , à la limite

    Le point qu’Arban marquait était sur la minutie d’un assassin. Klarion ne comprenait pas vraiment pourquoi celui-ci avait pris soin de s’annoncer et lui laisser un mot, lui indiquant qu’il était traqué. Pourquoi ne l’avait-il pas simplement cueilli à l’improviste pour finir le travail ? Devait-il respecter un code personnel ou était-ce une simple maladresse de débutant ? Peut-être que cet assassin n’était finalement que néophyte dans le métier, ça peut arriver. Il faut bien commencer quelque part. Mais s’il avait une certaine habileté à suivre sa cible, la discrétion et le silence n’avait pas l’air d’être son fort. Peut-être n’était-ce qu’un vulgaire mercenaire arrondissant ses fins de mois avec des contrats moins reluisants. S’il avait été commandité par la veuve Woodrue, ça voulait dire que cette dernière n’avait pas le même carnet d’adresses et de contacts que son mari. L’erreur pouvait également venir du commanditaire pour avoir fait confiance à quelqu’un de moindre calibre.

    - Mettons-nous en route, on y sera d’ici une quinzaine de minutes si on marche rapidement. Ceci dit, on devrait peut-être prendre notre temps, au moins on aura plus de chance que ce type me voit et saura que je rentre chez moi… Une fois arrivés, on pose le piège. J’ai plusieurs bombes de spores prêtes à l'usage, elles sont inoffensives mais servent surtout à faire peur. Je peux les agrémenter de poisons soporifiques ceci dit, ou entravants. Mais il ne faudra pas les respirer, ou nous placer assez loin avant de les enclencher. L’endroit est plutôt vaste, c’est une ancienne taverne abandonnée, il y a de quoi faire pour s’en sortir.

    Klarion continuait son exposé tandis qu’Arban l’écoutait. Il demanda un petit linge imbibé d’eau pour se débarbouiller avant de reprendre la route. Le contact de la serviette humide lui fit un bien fou, il avait l’impression de revivre après son passage en cellule, où tout sentait le moisi et l’urine. Ils se remirent en route, Arban emportant une miche de brioche pour grignoter sur la route. L’esprit de Klarion fut embrumé par une nouvelle pensée, cette fois plus inquiétante…

    Et si c’était lui qui nous attendait déjà ?
    Serions-nous, dans cette histoire, non pas les trappeurs mais les piégés ?

    Mes pauvres plantes…
    InvitéInvité
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    Re: L'assassin de la couronne
    Sam 15 Mai 2021 - 13:31 #
    À nouveau, le vieux Commandant paru d’oripeaux bien miteux, secondé par l’un des criminels les plus notoires du royaume, foulèrent le pavé des rues en direction de la planque de Klarion, où ils s’étaient quittés environ une semaine plus tôt. Cet événement lui rappela un instant le visage de Vivienne, éclairé et radieux face à ses deux comparses salvateurs. Être l’esclave du Don ne devait pas être une partie de plaisir.

    Il demeurait silencieux alors qu’il marchait avec Klarion. Ils avaient quitté l’appartement comme si de rien n’était. Il s’était gardé de fouiller de fond en comble, d’autant plus qu’il n’avait rien vu à l’emplacement des tâches dorées. Mais cela ne faisait aucun doute : ils avaient été trois dans la garçonnière. Impossible de déterminer si c’était un de ses hommes ou…

    « Jeune homme, il faut que je te dise. Je n’ai pas un pouvoir très sensationnel et je me fie beaucoup à mon intuition mais je sais que nous n’étions pas seuls. Alors si tu es au courant de quelque chose ou si tu as un allié qui nous épie, il faut que tu me le dises. Pars juste du principe que tout ce que nous avons dit là-bas a pu être écouté. Les murs avaient des oreilles. »

    Il sortit de son manteau la miche de brioche qu’il rompit pour en proposer à Klarion, mordant dedans sans vergogne, comme s’il se prenait définitivement à jouer le rôle d’Ahlan, s’entraînant un peu plus à paraître comme un rustre machiste sans grande éducation.

    « Si c’était bien l’individu – ou un des individus – qui sont à ta recherche, on peut suggérer que la personne nous suit en ce moment même. À dire vrai, si c’est un de mes hommes, ça serait le cas aussi. Mais je ne penche pas pour la dernière option. Tu es sûr de vouloir lui tendre le même piège dont tu as parlé ? Je n’ai aucun doute sur tes capacités tant ton
    coup d’éclat avec Sa Majesté a fait trembler la Garde… Cependant… »

    Il attira Klarion à l’angle d’un bâtiment in-extremis, laissant passer cette fois cinq gardes marchant au pas de course, avant de reprendre.

    « J’ai l’intuition que tu devras redoubler d’attention cette fois. »

    Ils continuèrent leur route, arrivant finalement sur les quais, au niveau de cette épaisse futaie qu’ils allaient devoir traverser non sans peine. Avant de se pencher et débroussailler le chiendent, il jeta un dernier regard autour de lui.

    Personne. Pas même une tâche révélatrice. Il darda un regard interrogateur à Klarion, l’air de lui demander : « Que faire à présent ? »
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    Re: L'assassin de la couronne
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