« Tu ne devrais pas boire autant, tu vas finir par faire un malaise avec cette chaleur. »

La barde haussa brièvement les épaules en regardant son amie.

« Ce n’est pas comme si j’allais quitter l’ombre du parasol, je peux bien profiter encore un peu de ces vacances. Je vais pas cracher sur les belles vacances que m’a offertes Emerald. »

Son joli regard se fronça légèrement, elle était un peu contrariée.

« Mais cet espèce d’idiot n’est même pas venu. J’avais prévu qu’on passe les vacances à ce qu’il me raconte toutes ses histoires bien croustillantes. Il abuse. On a pas idée d’offrir des vacances si ce n’est même pas pour en profiter avec moi. »

« Ooh, ça va au moins tu n’es pas seule. »

La jeune femme lui offrit un léger sourire navré.

« C’est vrai, désolée. Mais j’attendais tellement de le voir… Maintenant qu’il passe la plupart de son temps en voyage, c’est encore plus difficile de le voir. Enfin bref… »

Elle apporta son verre à ses lèvres avant de le lâcher subitement sur le sol. Sa main se portant à sa gorge comme si elle étouffait.

« Calci ? Qu’est-ce qu’il y a ? Eh réponds-moi. »

« Je… Je vais… Bien ? »

« Non non ma belle tu vas pas bien, t’es blanche comme un linge. Mais… C’est pas ton verre ! »

« Comment ça c’est pas mon verre ?! J’ai bu quoi alors ? »

Elle se leva soudainement en reculant, la tête prise dans un étau.

« Ne t’approche pas ! Hurla-t-elle en tendant sa main face à elle. »

« Reviens ! Non ! Lâche cet arbre ! »

« Qu’est-ce qu’il m’arrive ? Ou… Ah ! »

Rougissant de gêne, la jeune femme posa ses mains sur ses lèvres, une grande panique se lisant dans son regard.

« Aide-moi ! »

« Je veux bien mais dis-moi, qu’est-ce que tu ressens ? Qu’est-ce qu’il te faut ? »

« Je… Je sais pas ! Banane ! »

Elle sauta sur un pauvre homme.

« Calci… Par pitié, arrête de courir dans tous les sens… Oh lieutenant ! Vous tombez à pic ! Aidez-nous ! »

« Il dit quoi l’autre, là ? »

« Oh par pitié Calcilia tais-toi ! Je suis sincèrement désolée, normalement elle n’est pas co-… Non Calcilia ! Lâche le chapeau ! Oh par pitié, aidez-nous… »

« Hihihi ! Tu fais une drôle de tête Amy ! »

« Oh non, descends de sur moi sinon je va-… Aaah ! »

Les deux jeunes femmes s’écroulèrent sur le sol sous le rire hilare de la jeune barde qui s’échappa à peine son amie essaya de l’attraper.

« Essaye m’avoir ! »

« Je vous en prie aidez-nous, elle n’est vraiment pas comme ça habituellement… »

Les jambes croisées sur le tronc, Calcilia se maintenait ainsi la tête pendue dans le vide, sans se départir de son rire. Son amie sautilla sur place pour essayer de la rattraper, mais aussitôt, la jeune femme sauta en arrière, se réceptionnant sur ses deux pieds en s’enfuyant à nouveau. Elle bouscula les passants, puis piquait chapeaux et nourritures sans se soucier des conséquences.

Durant ce temps, un autre serveur s’approcha du lieutenant, discrètement, légèrement confus.

« Ce verre à cocktail n’appartient pas à notre bar… J’ai plus l’impression que quelqu’un a interverti les verres. Sinon, il y en aurait eu au moins deux sur la table. »

Pendant qu’il racontait les faits, la jeune femme arriva comme une fusée dans la conversation, sautant sur le dos du garde, gloussant contre son oreille. Elle fouilla dans sa chevelure avec ses doigts, en plissant les yeux, déçue de ne rien trouver. Elle quitta aussitôt son dos, allant reproduire son cirque sur toutes les personnes qui croisaient son chemin. La pauvre Amy continuait à courir après son amie, gardant difficilement le rythme à mesure que celle-ci continuait de lui échapper.

« Par pitié… Calci, arrête-toi, héla-t-elle essoufflée. Mais quel cauchemar… »

Le serveur légèrement confus baissa la tête en s’excusant pitoyablement.

« Nous ne servons même pas ces boissons… »

Ce qui voulait dire que la boisson avait été volontairement empoisonnée, sans en connaître le but. Sans doute, trouveraient-ils leur réponse une fois que la boisson serait examinée. Mais il était impossible de connaître le temps que durerait l’effet, et Calcilia ne semblait pas épuisée pour autant de sautiller dans tous les sens.

Un cri d’alerte arrêta soudainement tout de suite la conversation. En position défensive, elle venait de rencontrer un inconnu qui s’était mis sur sa route. La jeune femme frappa sur son torse avec ses poings, en poussant un rugissement, prête à en découdre. Puis elle tapa ses deux poings sur le sol, et s’élança contre lui. Le pauvre homme ne put que se mettre à courir dans la direction opposée, coursé par une furie qui hurlait.

« Au secouuuuurs ! »

Le cri résonna alors que l’homme essayait de s’enfuir, désespéré.

Amy dut s’arrêter un moment, n’arrivant plus à suivre le rythme de son amie qui semblait inépuisable. Mais elle ne put s’empêcher de repenser aux derniers événements qui avaient surgi depuis qu’elles s’étaient posées sur la plage pour profiter un peu de leurs vacances. Surtout lorsqu’elle croisa le regard d’un homme qui se dissimulait derrière ses lunettes de soleil. Elle crut le reconnaître, comme si elle le croisait régulièrement sans le connaître. Puis l’idée fit rapidement son chemin surtout lorsque l’homme commença à s’enfuir, lorsqu’il comprit qu’il était démasqué.

« CALCI ! »

Le singe s’arrêta momentanément en entendant la voix de son amie. Lorsque celle-ci indiqua l’homme qui s’enfuyait.

« Il faut que tu l’attrapes ! Il a des bananes. »

Subitement très intéressée, la jeune femme se lança à la poursuite du fuyard, son objectif la rendant particulièrement efficace alors qu’elle se jeta sur lui, l’écrasant de tout son poids.

Calcilia sautilla sur le corps de sa pauvre victime qui étouffait sous son poids. La jeune femme émit un petit rire en psalmodiant.

« Banane ! Banane ! »

« J’ai pas de banane salope ! »

Calcilia ouvrit les yeux en grand avant de froncer les sourcils sur son beau visage. Avec un sourire, elle appuya entre les omoplates innocemment de son talon.

« Banane ! Ajouta-t-elle. »

Pendant ce temps, l’homme clamait sa douleur, en tapant sa main sur le sol sablonneux.

« Aïe ! Aïe ! Oui, c’est bon ! J’avoue ! C’est moi ! C’est moi ! »

Calcilia diminua la pression, loin d’avoir perdu son intelligence malgré son soudain attrait des bananes. Elle se gratta sous le bras en poussant un long bâillement. Attendant que sa victime finisse enfin par avouer son crime.

« C’est juste qu’on voulait rigoler un peu ! C’était juste un pari ! »

La barde plissa les yeux, alors que le drôle d’alcool semblait perdre son effet peu à peu.

« J’ai perdu un pari contre un pote, répéta-t-il. »

Le serveur qui était intervenu plus tôt se cacha derrière son plateau prêt à prendre la poudre d’escampette à la moindre occasion.

« Banane ! Termina la jeune femme en donnant un coup de pied dans l’entrejambe de l’imbécile. »

Il poussa un cri douloureux en se recroquevillant sur lui-même tandis que Calcilia se relevait en frappant dans ses mains satisfaite.

« C’était pas méchant ! T’étais pas obligée d’être aussi violente. »

La fureur se dessina dans les orbes violine. Calcilia attrapa le poignet du serveur qui venait de parler après avoir trouvé un élan de courage pour se confronter à la barde. Elle le fit valdinguer par-dessus son épaule afin qu’il aille rejoindre son complice.

« Évidemment, c’est hilarant de s’attaquer à des touristes. »

Elle s’assit en tailleur sur le sol pour les regarder tour à tour avant de se fendre d’un immense sourire.

« Du coup, je suis certaine que vous allez aimer tester ce cocktail ! »

Mais avant qu’elle n’agisse, elle frappa son poing dans sa main somme si elle venait d’avoir l’idée du siècle.

« Oh mieux ! Pourquoi ne pas vous pendre par les pieds avec des cacahuètes dans les narines, histoire de voir lequel de vous deux attirera un vrai singe en premier ! »

Elle se fit soudainement très sérieuse en croisant les bras.

« Vous imaginez la gravité de votre connerie pour ‘’rire’’, fit-elle. Les dégâts que j’aurais pu causer sans être maître de moi-même ? Il faudrait apprendre à réfléchir avant de vous lancer dans des idioties pareilles. »

La jeune femme se releva enfin avant de s’incliner poliment devant le garde.

« Je ne suis pas juge pour décider de leur punition. Je les laisse à vos soins. Je suis aussi désolée pour le vacarme que j’ai causé. »

Elle jeta un regard froid vers les deux farceurs.

« Même si ce n’était pas réellement de mon fait. »

Calcilia sourit de toutes ses dents avant d’attraper son amie par les épaules.

« Pour vous remercier, je vous propose une tournée à mes frais quand vous aurez fini votre service ! »

Entraînant Amy avec elle, la barde ramassa les affaires qu’elle avait semées partout avant de ranger prête à partir. Mais ajouta à l’attention de Valentino.

« Je serai à la taverne de l’Oiseau Dégarni ce soir ! Me faîtes pas faux bond, termina-t-elle en faisant de grands mouvements avec ses bras. »

Calcilia était prête pour sa fuite, si elle pouvait s’éviter une entrevue avec la garde, c’était le moment de se carapater et de ne plus le revoir. Mais évidemment, rien ne pouvait être facile lorsqu’il l’alpagua en sortant son carnet. La jeune femme rentra sa tête dans ses épaules avant de faire demi-tour, de toute façon, il y avait moins de risques en étant une victime qu’en étant la vile petite voleuse.

« Très bien, allons au moins nous asseoir quelque part, je n’ai pas envie de rester planter au milieu de la plage. »

Elle se dirigea vers une table en bois non loin, en croisant ses doigts sur la table.

« C’est un peu flou, donc je ne pense pas vous être d’une grande aide. En revanche, je vous fais confiance sur les procédures à appliquer. Je n’avais pas fait vraiment attention, on m’a offert des vacances et j’étais pas en état d’alerte, je pense qu’Amy sera plus apte à vous décrire. »

La jeune femme glissa une main sur son front en soupirant, les récents événements tournant dans sa tête comme un tourbillon peu net.

« Je vous ai dit ce que je savais également, fit l’amie de la barde en hochant la tête. Je sais pas ce que je peux vous dire de plus. Je les ai vus nous suivre un peu, je pense juste qu’ils voulaient trouver une victime pour leur farce stupide. »

Calcilia avait la tête qui lui tournait légèrement, probablement la chaleur mêlée aux effets qui ne s’étaient pas totalement dissipés.

« Si maintenant, je dois faire attention même aux boissons que les serveurs m’apportent, j’en ai pas fini… Soupira-t-elle longuement. Pour ma part, j’étais consciente, mais pas tout à fait, c’est comme si je voyais ce qu’il se passait, mais que je n’étais pas maître de mon corps. J’irai peut-être consulter un médecin, histoire de vérifier qu’il n’y ait pas de second effet dérangeant. »

Mais une chose était certaine, elle se sentait épuisée à présent, elle espéra donc que ça n’allait pas durer beaucoup plus longtemps car elle espérait dormir.

« J’avais comme une deuxième voix dans ma tête qui prenait toutes les décisions, mais elle n’était pas dotée de la même intelligence, régie par l’instinct. Bon un singe, je vais pas vous faire un dessin, je pense que mes actions étaient assez explicites. »

Calcilia se passa la main sur le visage, légèrement contrariée. Ça l’agaçait au plus haut point que des abrutis aient pu abuser d’elle de la sorte, au risque de mettre des civils en danger.

« Je suis vraiment désolée pour ce qu’il s’est passé, même si ce n’était pas vraiment moi, ça le restait quand même dans le fond. »