Soleils Miniatures
À peine ont-ils mis les pieds à l’intérieur de l’immense bâtiment dont la luminosité blanche monotone des murs est, en fait, plus déprimante qu’encourageante… qu’une jeune femme apparaît pratiquement devant eux.
Nuziel sursaute, reculant d’un pas alors que son champ de vision est envahi par un mélange de couleurs mimosa, saumon et rouge néon. Le tout brillant légèrement plus fortement que la plupart des âmes communes. Il cligne à plusieurs reprises des yeux afin d’y voir un peu plus clair. Et… oh. C’est vraiment une jolie couleur. Le cœur de la flamme resplendit d’une couleur mimosa doux pour se dégrader vers une couleur saumon un peu plus chaude, avant d’à nouveau s’éclairer vers cette couleur mimosa d’origine. Tout cela ponctué d’une ligne droite rouge néon faisant des pics aléatoires. Il… considère que cette âme correspond parfaitement à la femme, d’une façon ou d’une autre.
Femme dont il prend maintenant le temps d’observer un peu plus. Ses cheveux roux encore plus foncés que les siens, plus proches du rouge que du roux, encadre son visage avec beaucoup de grâce. Elle pourrait certainement rivaliser avec son colocataire. Malgré cela, il reste fixé sur la brillance de son âme. Elle se démarque tellement dans… dans tout ce blanc ! Est-ce que sa musique serait aussi douce et chaleureuse que sa couleur ?
Quoi qu’il en soit, elle remet deux paquets à PurpleAsh-and-Hosta, avant de s’éloigner vers qui sait où. Et tandis qu’il la suit du regard, son étrange accompagnatrice l’informe qu’il s’agit de Luz Weiss, la directrice elle-même de l’hôpital. « Ah. » Eh bien. Ça confirme davantage que la couleur de son âme colle parfaitement avec qui elle est. C’est assez rare.
Bien qu’il n’écoute que d’une oreille, mourant profondément d’envie de traverser l’hôpital les yeux fermés en laissant PurpleAsh-and-Hosta le traîner, la future maman et son sac parlant se révèlent être de sérieuses pipelettes n’ayant apparemment pas trop de soucis à raconter leur vie… quelque peu privée. Il n’a vraiment pas besoin de savoir ce qu’elles font à l’écart du public, bon sang ! Et puis, ça sort d’où, ça, ’Nuzi’ ?! « Merci, mais non merci. J’ai déjà une maison, et les inconnus sont pas les bienvenus. » Où il habite, et avec qui, ça ne regarde que lui ! Il se passera d’avoir des inconnus qui s’invitent chez lui à l’avenir !
… Attendez une seconde. La directrice de l’hosto ? N’était-ce pas elle qu’ils étaient venus rencontrer plus que toute autre chose ? Ouais, si, totalement. C’est sûrement pourquoi ils s’élancent maintenant à sa suite, tentant de la rattraper. Mais Mimosa-and-Salmon s’échappe vite, se faufilant entre les gens avec une aisance époustouflante.
Malheureusement, elle finit par s’évanouir dans la foule en entrant dans une pièce qui semble vraisemblablement être la fameuse salle du buffet, vu l’odeur de nourriture qui flotte autour. Et même lui, avec toutes les autres couleurs, la perd de vue. Ou bien, justement à cause de toutes les autres couleurs.
Cependant, il semblerait que PurpleAsh-and-Hosta n’ait pas abandonné sa traque. Il prie intérieurement, prenant par la même occasion une profonde inspiration afin de se préparer à entrer dans la pièce… sauf qu’ils bifurquent brusquement dans une autre direction, empruntant des couloirs nettement moins peuplés et comportant très peu de portes, qu’elles soient ouvertes ou fermées. Peut-être que les patients sont plutôt installés aux étages supérieurs…
« Framboise et vert amande… » Le jeune peintre marmonne sans vraiment y penser alors qu’une personne venant en sens inverse passe à côté d’eux. Et il la regarde, mais pas exactement en même temps. « Havane, rouge brique et abricot… » Cette fois, c’est un petit groupe de trois individus qui, en l’entendant parler, lui jettent un regard étrange. Heureusement, ils ne s’arrêtent pas, et eux non plus. « Bleu pétrole et bleu paon… » Par moment, il y a des tableaux en même temps, et ses errances visuelles pourraient être confondues avec la citation des couleurs des tableaux… si ceux-ci arboraient même des couleurs mentionnées, ce qui n’est pas souvent le cas.
Quelque part, il croit entendre PurpleAsh-and-Hosta lui parler de Mimosa-and-Salmon, ainsi que des Ukiyo. Mais huh. Quoi ? Il n’est pas assez à l’écoute pour suivre la conversation exacte. Juste un coin de son esprit qui catalogue le nom des Ukiyo, et rien de plus. Ah si, et le fait qu’il connaisse cette école, bien sûr. Sauf qu’il n’a jamais essayé de l’intégrer. Ni celle-ci, ni l’une des trois autres, d’ailleurs. Mauvaise période. Et maintenant ? Bah maintenant, il est trop à l’aise avec sa vie installée aux côtés de quelqu’un qui le comprend. Donc ouais. Non. Ça ira.
« Violet cendré et… ah. » Il sort de sa transe lorsqu’il manque de bousculer PurpleAsh-and-Hosta qui s’est stoppée devant une fresque arborant un écriteau. Il cligne des yeux à plusieurs reprises, puis les plisse vers la femme qu’il accompagne contre son gré. Finalement, il suit son regard vers l’écriteau car, sérieusement, qu’est-ce qu’il peut bien avoir de passionnant, cet écriteau ?
C’est un écriteau explicatif de l’architecture du bâtiment, et qui indique plusieurs noms. Sûrement ceux qui ont participé à la construction et/ou la décoration.
Il croise les bras lorsque PurpleAsh-and-Hosta et son sac parlant recommencent à lui poser des questions. « Non, bien sûr que non. Il est de notoriété publique que les artistes n’entendent jamais parler de leurs semblables. » Il répond sur son ton sarcastique habituel, ne réalisant qu’après coup, une fois de plus, qu’il pourrait paraître méchant, mais ne trouve pas suffisamment en lui pour s’en soucier. Il juge juste la question un peu stupide. Évidemment qu’il a déjà entendu certains noms, surtout les plus connus. Cependant, il ne les a jamais rencontrés. Et même si ça arrivait, il n’aurait pas grand-chose à leur dire, anyway.
Alors il poursuit, cette fois en direction d’Apolline. « Pas la peine. » Il lève les yeux vers l’architecture de l’hôpital. Il n’y avait prêté qu’une vague attention jusqu’à présent. Plus attiré par les couleurs passant à côté d’eux. « Malgré le mélange des styles, l’art abstrait ne s’accorde pas avec. »
Nuziel n’ajoute rien de plus. Il doute franchement que se lancer dans des explications sur le pourquoi du comment soit très pertinent ou même intéressant pour PurpleAsh-and-Hosta et son sac parlant. Toutefois, plus il observe l’architecture, plus il y trouve une certaine élégance qui plairait sans l’ombre d’un doute à son colocataire, tout en arcs arrondis et lignes minces. Limite, il ne serait pas surpris de dégoter un orgue ou un piano à queue quelque part dans ce bâtiment… Et pour un peu, il serait presque tenté de le dénicher. Jil’ aimerait ça, non ? Il aimerait en jouer ?
Mais le mot-clé est bien ’presque’. Ni son meilleur ami, ni lui n’apprécient de traîner dans les lieux peuplés. À la fois par manque de sociabilité, et par contrainte sensorielle.
Soupirant, il continue d’arpenter vaguement l’écriteau explicatif des yeux, ainsi que l’architecture. Jusqu’à ce que la femme enceinte l’interpelle à nouveau. Qu’est-ce qu’il y a cette— Ah. Elle lui tend un paquet. Oh ouais. Ce sont les mêmes paquets donnés par Mimosa-and-Salmon, un peu plus tôt.
Peu intrigué, il l’ouvre plus lentement, prenant davantage attention à ne pas abîmer ou même déchirer le papier, contrairement à la précipitation dont fait preuve PurpleAsh-and-Hosta. On ne sait jamais. Le papier pourrait resservir pour décorer ou pour un autre cadeau. Ça serait bête de le gaspiller.
Le roux découvre une unicorne, créature peu commune, mais très belle et gracieuse, à l’intérieur du paquet. Il reste sans voix devant cette statuette sculptée si parfaitement, jusqu’à des détails infimes, malgré le fait qu’elle soit de si petite taille. « Une unicorne. » Il se demande ce que donnerait cette créature avec des ailes. Ne serait-elle pas encore plus élégante ? Et devrait-il la peindre, ou cela gâcherait-il la statuette ? Sinon tant pis, il se contentera d’imaginer les couleurs. « Elle est sympa. » Même s’il ne sait guère ce qu’il va en faire.
Il remballe la créature de bois dans le papier pour éviter de l’abîmer également, puis regarde au loin, vers la suite des couloirs. Un certain brouhaha en provient, et peut-être qu’ils ont réellement contourné la salle des buffets pour arriver par une autre entrée. Enfin, dans tous les cas… « Je doute fortement que tu m’aies conduit ici juste pour me montrer ce panneau et me donner ce paquet. Alors quoi ? Je crois pas qu’on va retrouver Mimosa-and-Salmon, si c’est elle que tu cherches. T’as vu le monde qu’il y a dans l’autre salle ? »
« Pour le coup, les invités c’est de la faute de notre Lumi nationale … »
Sa voix mourut à la fin de sa phrase, comme si quelque chose était venu boucher sa gorge. Il laissa Violette serrer son bandage, mais à vrai dire, ce faisant elle avait faire ressortir pas mal de choses en lui. Peut-être qu’elle ne s’en rendait pas compte … non, elle ne s’en rendait pas du tout compte. En quelques secondes, elle avait résumé l’entièreté de sa vie de merde en quelques mots, des mots qui avaient un goût … amer.
« Tu trouves que je vais de l’avant ? »
Non pas maintenant, pas devant elle. Il voulait sourire, qu’elle pense qu’il avait envie de faire ses blagues. Pourquoi il sentait quelque chose monter en lui ? Pourquoi il n’arrivait jamais à le contenir ? Était-ce à cause de Klarion ? Oui, assurément, mais pas que … Ses yeux s’embuèrent et quelques larmes longtemps contenues commencèrent à se glisser sournoisement à travers ses défenses.
« Je … je dirais pas que je vais vraiment de l’avant en ce moment, plutôt que je recule, ouais, même que je m’enfonce carrément. »
Il serrait les dents, au point que son visage en devint rouge. Il ne voulait pas que ça sorte, il ne voulait pas. Trop fière, trop désespéré, trop fragile, impossible de savoir pourquoi. Violette avait percé quelque chose et quelque chose s’en échappait en continu et puis il craqua. Il s’en voulait de craquer, encore, de pleurer comme toujours.
« Putain de merde … »
C’est sur ces paroles sacrées qu’il fondit en larme. Trop de choses venaient de lui tomber dessus. La peur de mourir, sa rupture avec Klarion, son manque total de sérénité après avoir été aux portes de la mort deux fois, le regard de son ancienne amie qu’il n’arrivait plus à se sortir de la tête. Il en voulait à Maya de l’avoir fait sortir de sa chambre, de l’avoir traîné ici, devant Violette à qui il ne voulait surtout pas montrer ça. Mais il n’arrivait plus à le contenir tout simplement. Oui, Violette avait raison, il était maudit. Tout dans sa vie partait en sucette et il se sentait totalement impuissant. Pourtant, à une époque il avait réussi à affronter ses problèmes. Il était entré au temple et avait cessé de broyer du noir, de boire … Malheureusement, c’est quand on a déjà touché le fond qu’on y retombe le plus vite n’est-ce pas ?
Aord essuya ses larmes avec son bras valide.
« Pardon … c’est quand tu as dit que j’étais maudit … j’en ai pris tellement dans la gueule ces derniers temps que … »
Qu’il pliait.
« Mais merci, Violette, merci de croire un peu en moi, même si on se connaît à peine … »
Au milieu de son malheur, Aord gardait la foi. La foi que le chemin qui s’ouvrait devant lui n’était pas qu’une torture sans nom. En effet, il croisait le chemin de personnes incroyables comme Luz, Maya, Violette … Lucy avait permis ses rencontres et il la remerciait pour ça.
« Parfois, je suis empli de doute sur ce que je dois faire … sur le but de l’existence et … Je sais que la déesse me permet de continuer là où je veux aller, pour peu que je trouve la force de faire par moi-même ce petit bout de chemin. »
Il plongea son regard dans les yeux de Violette, tandis qu’une Lumi obèse se frottait à ses chevilles pour le réconforter. Un timide sourire se dessina alors sur ses lèvres.
« Merci de croire en moi, alors que moi-même je n’y crois plus vraiment … »
Il détourna les yeux laissant son sourire s’effacer lentement dans l’oubli. Cela lui avait fait un bien fou de se relâcher comme ça. De laisser tomber une barrière trop fatigante à entretenir … Il s’étira délicatement.
« Pfiouu, ça fait du bien se relâcher un coup comme ça, dit-il en souriant comme au début de la soirée. Désolé pour toute cette scène, je suis un peu à fleur de peau en ce moment. On va voir ce buffet ? »
Ouvrant les yeux tout en tournant la tête dans la direction de la demoiselle, la sorcière fut accueillie par un magnifique sourire auquel elle répondit. « Mademoiselle Weiss. » lui dit-elle alors qu’elle hochait respectueusement la tête en sa direction. Son regard verdoyant se perdit un bref instant dans les prunelles de la directrice avant de passer à ces mains où s’y trouvaient deux coupes. Amusée, l’apothicaire chercha rapidement un endroit pour y déposer sa coupe et une petite table disposée sur le côté de la piste de danse lui suffit. Elle n’allait pas s’en séparer alors qu’elle ne l’avait pas terminé, même si elle en était à son troisième verre.
Pour le moment, elle crut bon de répondre à sa cadette tout en acceptant cette tentative de corruption.
« Ne vous inquiétez pas, votre présence est toujours la bienvenue à mes côtés. Puis, comment résister à une petite sucrerie. N’est-ce pas? » Elle attrapa la petite cuillère dans laquelle elle recueillait du dessert glacé avant de le porter à sa bouche penchant le manche de cette dernière vers le bas. Tant de choses s'étaient produites depuis leur dernière rencontre qu’elle ne savait pas par quoi commencer à vrai dire.
« Nous nous portons bien, surtout Madame Bertha. Elle ne manque pas d’énergie et a toujours une histoire intéressante à raconter à tous les nouveaux voyages qui ont le malheur de croiser sa route. » Mentionna-t-elle dans un léger ricanement. « Mais bon, c’est ce qui fait tout son charme. Et vous? Comment vous portez-vous? J’ai cru comprendre que vous avez dû faire un peu de discipline avec certains des visiteurs. »
Elle espérait pouvoir tirer quelques informations supplémentaires sur la situation. Si elle ne s’en était pas mêlé et voir même éloigné c’est parce qu’il y avait une raison.
« Oui, monsieur Sealtar et moi nous sommes rencontrés par le biais d’un ami qui m’est cher. Je ne sais pas si vous connaissez, monsieur O'Sullivan? Il avait accompagné ce dernier en pleine chasse d'œufs de crapaureau pour me ramener de la gangue gélatineuse afin que je puisse y faire des tests…» Voyant qu’elle se perdait dans des explications superflus et qui ne l’intéressait peut-être pas, Nemue se tut avec une moue quelque peu gênée. « Je suis désolée, je m’égare un peu. Enfin, tout ça pour dire que les amis de mes amis sont mes amis et il semblerait qu’il ait un projet intéressant nécessitant de mes compétences.»
Aord, de son côté, s’il restait lui, n’était vraiment pas au top de sa forme. Elle pouvait bien s’en rendre compte, même si elle ne l’avait réellement vu que deux minutes au top de sa forme. Ce qui n’était pas grand chose. Mais c’était déjà suffisant pour se faire un avis. Après, Lumi avait en effet l’habitude de causer quelques problèmes ici ou là, même si en réalité la laïum était une amour… Elle s’emportait juste parfois un peu trop. Avait-il vraiment été obligé de prendre sa défense dans son état? Pas vraiment, mais c’était l’homme qu’il était.
« Aller de l’avant? Parfois il faut reculer pour mieux sauter! Tant que tu ne cours pas en arrière. Et, déjà, avoir décidé de te rendre à cette fête, c’est déjà bien! »
S’il n’avançait pas, au moins il essayait, et c’était le principal aux yeux de l’aventurière. Tout ne va pas toujours dans le sens où l’on aimerait, mais tant qu’on avait la volonté de continuer, c’était le plus important! Ce n’était pas grave d’avoir des moments de faiblesse, des moments où ça n’allait pas. Violette en avait eu aussi énormément avant qu’elle ne scelle sa volonté dans la direction de son rêve. Elle avait vécu des aventures difficiles, avait vu des partenaires de quête mourir sous ses yeux, avait enlevé des vies de ses mains et par sa lame. Ses mains étaient tachées de sang, de celui de ses compagnons qu’elle avait été incapable de protéger. De celui de pauvres brigands qui ne cherchaient certainement qu’à se nourrir eux et leur famille, d’une mauvaise façon, mais elle ne saurait jamais vraiment s’ils avaient eu le choix ou non dans cette sinistre carrière.
« Comment peut-on réellement briller sans avoir connu l’obscurité? On ne peut pas vraiment traverser la nuit sans espérer revoir le jour! Parce-qu’après les longues nuits froides et sombres, il y a l’Astre de l’Aube. C’est une citation. »
L’aventurière se racla légèrement la gorge.
« Bon, une citation de moi, que je viens d’inventer, mais une citation quand même. »
Le prêtre maudit, si ça faisait peut-être vendre comme synopsis dans des nouvelles ou des journaux douteux, ça n’était certainement pas facile à traverser. Il était vrai que c’était cruel, de dédier sa vie à la déesse pour qu’elle vous le rende ainsi. Elle pouvait comprendre ses doutes et ses craintes, et si elle ne pouvait pas arranger son état à elle seule, elle pouvait au moins transmettre un peu de sa bien drôle de façon de penser. Toujours était-il qu’il n’allait pas très bien, alors elle s’avança, pour passer ses bras autour de lui, lui offrir un petit câlin amical. Un acte assez rare de la part de Violette, mais qu’elle voulait rassurant alors que Lumi jouait aussi sa part en même temps.
« Maudit, de tout de façon, ça veut tout et rien dire. Je suis pas Lucy, mais je me suis toujours dit que les embûches qu’elle place sur nos chemins ne sont pas des obstacles pour nous freiner, mais des moyens d’apprendre à bouger plus efficacement, à nous apprendre à devenir meilleurs. »
C’était vrai pour elle-même, et ça l’était certainement pour tout le monde, même si très peu de gens le voyaient vraiment ainsi. Même si elle ne pouvait pas vraiment justifier un tel acharnement à son égard, elle se disait qu’elle lui faisait traverser les plus sombres allées pour que sa flamme finisse par luire plus fort que n’importe quelle autre. Elle ne voyait pas vraiment d’autres explications.
« Moi j’suis sûre que ça va aller. »
Tôt ou tard. Et elle était sûre qu’il en resortirait grandi. Et bien sûr que ça ne faisait aucun mal de se relâcher ainsi, bien au contraire.
« Bien sûr que ça fait du bien, si tu gardes tout en toi, tu finis par exploser. Ça vaut pour le gras aussi. »
Une petite touche de légèreté alors qu’il commence à aller mieux, et maintenant qu’elle avait fini de massacrer son traitement et ses bandages. Au moins, ils tiennent bien, et ils ne sont pas si mal faits que ça. Elle n’est pas la plus douce des infirmières, c’est évident, mais elle n’est pas maladroite. Peut-être un peu trop brute. Sûrement trop brute.
« Et, tu vois, tu as déjà envie d’y retourner, à ce buffet. »
Et ils étaient repartis, accompagnés de Lumi qui, cette fois-ci, bénéficiait d’une surveillance bien plus étroite de l’aventurière. Cela ne l’empêcha pas de revenir jusqu’au buffet qui avait été remis en état entre temps, et de pouvoir en profiter en commençant par servir Aord, puis ensuite donner un peu de sorbet à une laïum qui lui faisait encore des yeux de gloot battu.
« Tu vois, rien que de pouvoir profiter d’un bon buffet, moi ça me fait me sentir vivante! D’ailleurs, j’ai l’impression que le style des préparations me rappelle quelque chose… Heureusement qu’il n’y a pas d’ustensiles de cuisine maudits cette fois! Je crois que j’avais jamais autant cuisiné de ma vie à cette époque… »
Une sombre histoire d’ustensiles de cuisine enchantés pour donner un goût de poussière aux différents plats. Heureusement que ce n’était pas le cas cette fois - mais elle se souvenait bien de ces aventures lors d’un banquet rural. Elle voyait que le confectionneur de ces délicatesses trouvait encore du travail - ce qui ne l’étonnait pas. Devrait-elle aller s’introduire dans les cuisines lui passer le bonjour? Certainement, un peu plus tard! Elle n’allait pas abandonner Aord ici. En attendant, elle pouvait bien lui expliquer ces aventures et le plan machiavélique de vengeance amoureuse d’un citoyen de ce village et des outils de cuisine maudits, avant de continuer à parler de nourriture. Parce-que c’était Violette, et qu’elle parlait majoritairement de ça.
« Un jour, je te ramènerai de quoi faire un ragoût aux cinq herbes, avec de la Phume et du Lucyfilis. Tu verras. Je tiens la recette d’une auberge pas loin de la forteresse, y a déjà eu des meurtres pour moins que ça. »
Sans être une cuisinière professionnelle, elle était pour le moins habituée à se faire à manger sur les routes et à pratiquer de la cuisine de camping à même le feu et avec des instruments de cuisine usés par le temps et les flammes. Ce n’était peut-être pas de la haute gastronomie, mais manger un bon plat bien chaud au coin d’un feu en pleine saison froide sous une épaisse couverture, le tout après plusieurs heures de marche, donnait encore un goût plus exquis à toutes ses préparations. Le goût de l’aventure.
Tendant son propre paquet à Abdallah, son sac-à-dos enchanté, afin qu’il le rangeât dans ses entrailles, iel se pencha très légèrement en avant, par-dessus son ventre rebondi. Sous cette forme-ci, iel était légèrement plus petite que Nuziel, et certainement bien plus en chair que ce dernier. Comme iel devait lui paraitre agaçante de normalité babillante, avec son sourire affable s’écartant sur la mondanité de ses propos, ses mains un peu trop tactiles à la recherche de piliers pour l’aider à se mouvoir en raison de l’inconfort de son envergure toujours plus imposante, et sa présence aussi discrète qu’un kartoghan échoué, commandant à la fois bienveillance et pitié. Contrastant terriblement avec sa réserve maladroite campée sur un lit de sarcasmes, la tension en soubresauts de ses muscles tiraillés entre l’inconfort et la distraction, et sa silhouette étirée, noueuse et peinturée, évoquant l’exotisme audacieux d’une disgression.
- Initialement, il est vrai que je souhaitais te présenter à Luz, et inversement, finit-iel par répondre tout en gardant sagement ses doigts dans son dos, soupesant le tissu tendu – mais allégé magiquement grâce à un pendentif plume – d’Abdallah.
La médecin tenait une place particulière dans la vie, et dans le cœur, de lo coursier-e. Et en ces temps complexes pour la directrice de l’Astre de l’Aube, affairée à milles travaux pour maintenir l’essor de l’organisation et de ses diverses instances, Calixte n’hésitait guère à lui proposer toute attention susceptible de recharger ses batteries mises à rude épreuve. Fut-ce sous la forme d’un thé, d’une douceur, d’un livre au scénario distrayant, d’une potion de doux rêves glissée discrètement dans un verre de whisky, ou encore d’un jeune artiste au pinceau agréable.
- Que ce soit dans une démarche d’acquisition, ou de découverte, d’œuvres, d’un savoir-faire, c’est toujours un plaisir pour elle de rencontrer les artistes évoluant en Aryon. Une délicieuse pause dans son emploi du temps foisonnant toujours plus. Un merveilleux songe substantiel, adoucissant les contours plus acérés de notre vie. Et moi, vois-tu, j’aime à tenter d’adoucir son quotidien, avoua-t-iel d’un sourire en mi-teinte.
Ou peut-être était-ce un mensonge, encore. Un sentiment modifié, implanté, torturé, au creux de sa poitrine par un quelconque enchanteur dont iel avait oublié l’existence, et l’odieux travail, après s’être trahi-e tout à fait en acceptant de marchander ses émois. Non, Zahria n’avait pas mentionné d’autres liens sabotés en dehors du leur ; à défaut de pouvoir encore se faire confiance, iel pouvait bien croire aveuglément son ancienne Maître-Espion. Collègue. Amie. Sœur de cœur, peut-être même, s’iel en croyait l’historique affolant des notes qu’iel avait, après coup, retrouvées.
- Mais tu as raison : l’autre pièce est bondée de monde. Ce qui, en l’état, la rend hors d’atteinte, acquiesça-t-iel en repoussant ses propres doutes à l’orée de sa conscience pour observer les émotions se peignant tour à tour sur le visage de Nuziel. Alors quoi ? répéta-t-iel un léger sourire, presque taquin, étirant ses lèvres.
A la curiosité lo caractérisant et ne l’ayant pas quitté-e depuis sa rencontre, quelques minutes plus tôt, avec l’artiste s’ajoutait une douce pointe de sympathie ne cessant de croitre, envers et contre tout, dans le giron de son âme. Iel avait toujours aimé les rébus, les énigmes et les mystères ; c’était, en partie, la raison pour laquelle iel s’était épanoui-e chez les espions de la Garde. Mais, surtout, Calixte n’avait jamais craint l’aléatoire, la surprise et la déconvenue ; sa maladresse et sa malchance l’avaient dôté-e d’une résilience plutôt honorable sur ce versant-ci. Voire, d’une appétence pour celles-ci presque inconvenante.
- Alors moi, en toi, je vois l’occasion d’une opportunité. De compagnie simple pour se promener. Pour découvrir ce lieu sous un autre angle. Pour l’explorer dans ses moindres recoins, ou le quitter au plus vite. Pour en décrypter les diverses facettes, ou les apprécier silencieusement. Mais, surtout, l’opportunité de te découvrir, de te voir, toi.
Iel haussa les épaules.
- Présentement, c’est de toute évidence l’activité la plus intéressante et la plus plaisante qui me soit donnée, déclara-t-iel sans fard, levant finalement sa dextre pour glisser un doigt sous le menton du peintre et tourner, délicatement, son visage pour diriger son regard d’une légère plongée vers le sien. Et toi, Nuziel : qu’est-ce que tu vois ? Qu’est-ce que tu veux voir ?
Et, peut-être, n’y avait-il pas là qu’histoire de métaphore. Les murmures singuliers du jeune homme n’ayant pas échappé à l’ancien-ne espion-ne.
Le charme de Madame Bertha était un doux euphémisme et la perspective de cette présentation imagée arracha un gloussement à la rouge. Puisse Lucy protéger les voyageurs qui tombaient entre ses griffes ! Maniant sa cuillère à la manière d’une arme – car le sorbet était une affaire tout à fait sérieuse et un délice à ne pas négliger -, Luz prit le temps de terminer sa bouchée glacée pour répondre à son tour aux interrogations de Nemue :
Elle se pencha subtilement vers l’apothicaire, sa voix teintée d’un amusement perceptible malgré ses sourcils froncés :
Une nouvelle cuillérée de sorbet en bouche, Luz se perdit un instant dans la contemplation des musiciens, parvenant sans le savoir au point culminant de l’histoire. Un intervenant dont le nom devait être absolument familier à Nemue…
La praticienne songea fort innocemment qu’une rencontre entre Nemue et Aord serait gratifiante et judicieuse. Il n’était bien sûr pas l’heure de s’étendre sur les maux du frère en public, mais Luz se sentait en paisible confiance aux côtés de la brune. La Sorcière de Manillam était une confidente de qualité, on ne réussissait pas autant professionnellement dans une ville des Plaines en étant incapable d’écouter et de taire les informations délicates… !
Luz posa sa verrine de sorbet désormais vide sur une table attenante, prenant le temps de creuser sa mémoire. Son visage s’éclaira aussitôt que le nom retrouva sa juste place parmi les rumeurs entendues.
Son sourire s’étira. Allys possédait un bon jugement sur les gens et si ce Monsieur O'Sullivan était parvenu à attirer son attention, il devait nécessairement disposer d’un grand nombre de qualités. Elle passa un bras pensif sous sa poitrine, l’autre tapotant son menton :
Outre qu’il paraissait avoir accompli plusieurs quêtes, son nom s’était retrouvé gravé sur la plaque de commémoration dressée par le Roi à la suite des expéditions menées au sein du Désert Volant. Luz se rappelait encore avoir soigneusement parcouru chaque nom afin de s’assurer qu’aucun de ses proches n’était en danger ! Elle ne dit rien non plus des deux ou trois rumeurs croustillantes qui gravitaient autour de lui et de son appétence pour les jolies jeunes femmes : il avait bien raison de profiter des nombreux plaisirs de la vie ! Ce qui lui rappelait une autre donnée essentielle…
La sphère de la noblesse n’était pas bien grande et les mêmes potins avaient tendance à être régulièrement ressassés au point qu’il était ardu de les oublier.
Violette finit sa phrase, mais Aord avait arrêté de l’écouter. L’espace d’un instant, il s’était souvenu d’une lointaine époque. Une époque où il doutait aussi de lui-même, une époque où il était aussi au fond du trou. Comme maintenant. Et grâce à Violette il s’était souvenu de ce qui l’avait sorti de ce trou. Sa foi que demain était un autre jour et qu’il avait encore beaucoup à découvrir.
« Bon c’est pas tout ça, mais j’ai quelques bourrelets sacrés à retrouver, j’ai l’impression d’être aussi fin que les squelettes que je vois passer sur ma table d’opération. »
Il jeta un coup d’œil à Violette avant de rire aux éclats.
« Désolé, humour de morgue. Ce que j’essaye de dire, c’est que je crève de faim, parce qu’une certaine laïum ne nous a rien laissé. »
Aord jeta un regard plein de reproches au petit dragon qui se défendit en lui soufflant un peu de froid au visage, accentuant encore son rire. Les deux amis revinrent dans la salle qui s’était un peu dépeuplée. Les invités se dispersaient un peu partout et le buffet était enfin accessible sans avoir à jouer des coudes pour se procurer à manger. Ils prirent tous les deux de quoi se remplir le ventre comme deux miséreux qui n’avait rien mangé depuis des siècles au point au point de s’attirer quelques regards qu’ils ignorèrent superbement. La soirée ne faisait que commencer pour eux et ils avaient beaucoup de choses à se dire et de temps à rattraper.
– Ce n’est pas de la corruption, c’est de l’entretien d’estomac.
Il n’a même pas suivi un bout de la conversation. En fait, peut-être que l’histoire de corruption n’était pas pour lui, mais il a entendu le mot avec son nom plus loin dans la phrase et la réponse a été automatique. Il n’y a aucun énervement dans la voix, une simple explication. Puis, c’est un peu un mensonge, donner à manger aux gens est toujours un peu de la corruption. Le contrôle du monde vient de l’appétit. Dans tous les sens du terme. Il ne devrait pas penser à cela en ce moment.
Il pique des guimauves sur sa broche à Marshmallow et tente de les faire cuire en boucle en montrant l’action a réalisé à un commis un peu trop stresser pour s’occuper de la vaisselle sans la faire tomber en boucle au fond de l’éviter. Il y a plusieurs débris qui seront à jeter en une soirée, mais ce n’est pas l’important pour le moment. L'importance du moment est le fait qu’il s'est mis au final à aider pour la préparation d’un punch légèrement alcoolisé et avec pas mal de fruits bien sucrés dans le but de mettre le plus de monde possible dans une ambiance plus festive. Pas qu’il apprécie spécialement l’alcool, mais étrangement à chaque fois qu’une quantité raisonnable circule dans un banquet cela aide à détendre les convives. Enfin, la plupart du temps. C’est du quitte ou double en réalité, il le sait bien, mais il a le sentiment que cela va bien le faire. Au pire des cas, ce n'est pas sa décision à lui à la base.
— Servez-vous, il y en aura pour tout le monde, comme pour les soins et la générosité en ce lieu.
D’aller retour en aller retour dans la cuisine pour lui tout vas bien et il a l’impression de faire quelque chose d’utile par la même occasion en prime.
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Well, si PurpleAsh-and-Hosta renonce à le présenter à Mimosa-and-Salmon, peut-être qu’il peut s’éclipser dans ce cas. Ça ne sert à rien qu’il reste plus longtemps dans ce bâtiment. Elle n’aura qu’à les présenter un autre jour.
Malgré cela, il écoute son long discours sur la rousse d’une oreille distraite. Est-ce qu’elle a toujours autant à raconter ? Elle ne semble pourtant pas être du genre à n’avoir aucun ami, comme en témoigne ce monologue. PurpleAsh-and-Hosta et Mimosa-and-Salmon ont l’air d’être des amies d’assez longue date. Alors pourquoi parle-t-elle de ça à un inconnu comme lui ? Il doute sincèrement de donner l’impression d’être abordable.
Finalement, elle cesse de parler, même s’il ne s’en aperçoit que dans les trente secondes qui suivent avec l’absence de blabla continu. Il cligne des yeux et reporte son attention sur elle. « … Ah, cool. » Il répond simplement, plutôt désintéressé.
Non pas qu’il souhaite le malheur à Mimosa-and-Salmon, mais il ne la connaît pas, donc il ne va pas nier qu’il s’en fiche un peu. Certes, son âme brillait assurément plus que le commun des gens. Ça ne signifie pas pour autant qu’il va parler avec toutes les personnes qui entrent dans cette catégorie. En plus, si elle est médecin, alors il devient clair qu’elle ne déverse pas son imagination dans l’art, même si elle aime ça.
Quoi qu’il en soit, PurpleAsh-and-Hosta semble être parvenue à la même conclusion que lui. L’autre pièce est bondée et s’avère donc hors d’atteinte. Non, sans blague ? Il soupire d’exaspération. Il lui a fallu autant de temps pour s’en rendre compte ?
« Bien. Alors— » Il commence à répondre dans l’intention de dire qu’il part. Mais se retrouve immédiatement interrompu. Bon sang ! Elle ne s’arrête vraiment jamais de parler ?! Il croise les bras alors qu’elle le regarde droit dans les yeux. Quoi maintenant ? Qu’est-ce qu’elle a, sa tronche ? Sûrement rien d’intéressant, et elle a juste décidé de l’ennuyer un max.
Il se renfrogne davantage alors qu’elle se remet inlassablement à parler. C’est qu’en plus, elle adore blablater en prose ou whatever ce langage particulier qui lui sied tant. C’est beau, il lui reconnaît ça, mais aussi super chiant à comprendre. Peut-être que c’est fait exprès. Il comprend pas un tiers de ce qu’elle veut dire. Ou sous-entend. Parce que quoi ? Comment ça ’le découvrir, le voir’ ? Elle paraît pas myope, hypermétrope ou aveugle pour lui. Elle se dirigeait efficacement dans les couloirs, il y a quelques minutes. En plus, elle pourrait pas explorer ce bâtiment si elle voyait pas.
Ouais, d’accord, elle est définitivement myope vu comment elle s’avance allègrement dans son espace personnel sans prévenir, comme si elle avait tous les droits de s’approcher autant, et force sa tête à se tourner vers elle. Ça, ou c’est une affamée de contact, et dieu, il souhaite être partout sauf avec elle en cet instant.
L’artiste fronce les sourcils, profondément ennuyé par ce manque flagrant d’espace. « À l’heure actuelle, je vois ta tête en gros plan qui monopolise tout mon espace. » Suivant aussitôt sa réplique, il donne un coup dans sa main avec la sienne pour la repousser, et recule par la même occasion de quelques pas afin de restaurer une certaine distance. « T’as déjà entendu parler de ’l’espace personnel’ ? Parce qu’on dirait pas. »
Tssk. Est-ce qu’elle est sérieusement en manque d’affection or something like that ? Qu’elle aille voir son partenaire de vie pour ça, bordel ! Il espère franchement que ce n’est pas une de ces envies bizarres dont il a déjà entendu parler, où les femmes enceintes se réveillent avec, genre, un besoin inexplicable de manger des chips aux oignons ! Il s’en passera volontiers !
« Quant à ce que je veux voir, presque n’importe quel endroit qui ne soit pas ce bâtiment ou un lieu bondé me convient. Donc si t’as fini, je pars. » En espérant qu’elle ne l’ait pas conduit dans ce dédale de couloirs dans le but de le perdre afin qu’il passe plus de temps que nécessaire en sa compagnie.
Ainsi, il se détourne de PurpleAsh-and-Hosta sans un regard supplémentaire et s’éloigne dans la direction par laquelle ils sont venus. Il essaye de se repérer en fonction des tableaux qu’il reconnaît pour être passé devant, sauf qu’il n’a pas tant retenu précisément leur emplacement. Il croise d’autres gens colorés qui ne prêtent aucune attention à lui, et vice-versa.
Mais alors qu’il – pense – se rapproche de la sortie, il s’arrête au milieu d’un couloir et soupire. « Tu comptes me suivre jusqu’où ? » Il demande, jetant un regard par-dessus son épaule vers PurpleAsh-and-Hosta parce que bien sûr, celle-ci la suivit pour y raison.
La main toujours suspendue dans le vide où celle de Nuziel l’avait repoussée, Calixte observa la forme courroucée de celui-ci s’éloigner prestement d’iel comme si iel avait la peste, avant de tourner les talons pour mettre, décidemment, encore plus de distance entre leurs deux corps. Et, possiblement, en attestaient les derniers propos de l’artiste, s’échapper tout bonnement des corridors de l’hôpital de l’Astre. Les lèvres pincées sur un rire amusé qui serait certainement plus que mal venu, les épaules tressautant légèrement sous le joug de l’hilarité, lo soldat-e finit par ramener sa dextre à iel-même et emboiter le pas, avec un temps de retard, au peintre.
- Haut en couleur sur toutes ses facettes, commenta joyeusement Apolline qui roulait à présent son cuir contre le dallage du couloir.
- Certainement, acquiesça Calixte en détournant néanmoins son attention de la silhouette de Nuziel qui s’éloignait toujours plus pour la ramener vers la bifurcation indiquant les autres pièces rendues accessibles aux portes ouvertes.
Attaquer ? glissa contre son esprit celui agacé de Vreneli qui, à son habitude, s’était enroulé le long de son bras, à l’abri des regards mais bien à l’affût du moindre problème.
Et de la moindre excuse pour déchaîner ses foudres. S’il restait relativement farouche, le familier avait développé un certain devoir de protection envers lo coursier-e sous forme féminine et le moindre accroc titillait son instinct revanchard.
Non, je ne crois pas que ça serait une bonne idée, Eli, temporisa Calixte. Sauf si on veut vraiment lui laisser un impérissable souvenir désagréable de cet épisode.
Mpf. Lui épisode désagréable, grommela le teisheba en pointant tout de même son museau d’orage contenu hors de la manche qui le dissimulait.
Secouant légèrement la tête tout en levant les yeux au ciel – au plafond – lo soldat-e amorça un changement de trajectoire vers l’aile accueillant le buffet et l’agitation de celle-ci, lorsque la voix du peintre attira à nouveau son attention. Surpris-e, iel s’emmêla brusquement les pieds et se serait gauchement étalé-e de tout son long si ce n’avait été pour le bras bienvenu d’un passant aux réflexes aiguisés. Remerciant son sauveur imprévu avant de se tourner pleinement vers la silhouette de Nuziel se découpant nettement dans la lumière crue de l’entrée principale, iel arqua pensivement les sourcils.
- Jusqu’où veux-tu que je te suive ? demanda-t-iel en retour, d’un ton où pointaient mêlées taquinerie et curiosité.
A ses pieds, Apolline se mit à fredonner un air qui semblait indiquer « suis-moi jusqu’au bout de la nuit ». Haussant finalement les épaules comme pour chasser le souvenir collant d’ambitions passées, Calixte se détourna définitivement du peintre avec un geste d’au revoir de la main. Son ventre commençait à se rappeler à iel, pour une énième séance de grignotage, et iel avait bien envie de voir ce qu’il était finalement advenu de ce buffet vers lequel Luz était partie plus tôt en trombes. La trousse de cuir, elle, avait cependant un tout autre planning.
- A la Volière Cal-bute, appela-t-elle avec enthousiasme avant de se relancer à la poursuite de Nuziel.
L’âme artificielle n’en avait jamais fait qu’à sa tête, et elle était bien décidée à continuer l’aventure.
D'une main agile, elle s'attaquait à son sorbet en ne lui laissant aucune chance. Malgré cela, la sorcière écoutait attentivement ce que pouvait bien lui dire la belle rousse. Elle n'avait pas eu la chance de converser avec cette dernière depuis bien longtemps et elle avait l'impression de la croiser dans des événements tel que celui-ci. La demoiselle était une véritable aimant et semblait toujours bien entourée. Nemue n'était pas du genre à se sentir intimidée par cela, mais disons qu'elle préférait le calme avant tout même si certain lui connaissait son côté joueur.
Elle avait porté une attention toute particulière lorsqu'elle lui avait parlé du laium qui s'était régalé en se servant dans le buffet, mais pas parce que la créature ou sa maîtresse l'intéressait, mais plutôt parce qu'ils étaient accompagnés du prêtre qui se déplaçait en chaise roulante. Le corps de l'apothicaire s'était légèrement raidi lorsqu'elle en avait fait mention et bien qu'elle avait remarqué son état, sa mâchoire s'était serrée lui donnant un air quelque peu sérieux. Elle aurait pu l'aider et le soigner s'il ne se trouvait pas tous les deux dans cette situation et le savoir ainsi s'attristait.
« Aor… commença-t-elle avant de se reprendre en s'arrêtant net. Le frère Svenn semble avoir gérer la situation d'une main de maître… Enfin, j'espère qu'il se remettra rapidement de ses blessures. Malheureusement, je n'ai rien sur moi qui puisse l'aider et lui mentionner de passer faire un tour à ma boutique ne serait certainement pas une bonne idée au vu de son état. De toute façon, j'imagine qu'il est déjà passé par ici pour obtenir de l'aide. »
Elle se trouvait elle-même des excuses pour ne pas aller le voir aujourd'hui, car elle n'y était pas prête et cela se voyait bien. La demoiselle n'était pas du genre à ignorer les blessures d'une personne et même si cela lui faisait du mal, elle n'était pas prête à affronter la discussion qui pouvait en suivre.
Enfin, elle était bien heureuse de changer de sujet de discussion et de parler de son ami ainsi que de Faolan. Hochant la tête pour affirmer ses dires, elle ne s'attendait pas du tout à la question qui avait suivi. Ses yeux s'ouvrirent grandement, laissant paraître un moment de surprise, mais échappa un rire plus qu'amusé.
« Je peux vous garantir que s'il s'était marié à la demoiselle il m'en aurait parlé. Après tout, lui et moi sommes très proches. » dit-elle d'un sourire quelque peu révélateur. Enfin, l'était-ce vraiment? Après tout, elle se disait simplement grande amie de ce dernier, mais la rousse pouvait penser ce qu'elle désirait. Nemue ne chercha pas à préciser la nature de leur lien. « Ne vous inquiétez pas, je lui transmettrai vos félicitations lors de notre prochaine rencontre sans oublier de le taquiner au sujet de cette fameuse rumeur. » Elle n'était pas du genre à s'intéresser à ce genre de commérage, mais puisque cette dernière parlait de son ami, elle n'hésitait pas une seule seconde.
Pour la suite, la demoiselle n'entra pas trop dans les détails concernant le plan de Faolan puisqu'elle n'était pas tout à fait certaine de ce qu'il désirait en faire et qu'ils n'avaient eu que quelques minutes pour en discuter, mais elle comptait bel et bien l'aider du mieux qu'elle le pouvait. Elle continua à discuter avec la rousse encore un moment avant de la laisser prendre part au reste de l'évènement. Après tout, elle ne désirait pas s'accaparer toute l'attention de la jolie rousse, même si elle appréciait grandement sa compagnie, mais elle n'était certainement pas la seule à désirer entamer la discussion avec cette dernière. Puis, le sorbet semblait avoir ouvert l'appétit de la sorcière et il ne dirait pas non à goûter aux plats qu'avait préparé le jeune père.
Elle allait rester encore un petit moment avant de quitter et rejoindre la demeure de ses parents.
- Lancé de dés - Loterie de mai:
Quelle sera la réaction de Nemue fasse à la question de Luz?
1-4 :: Elle éclate de rire et blague sur la question.
2-5 :: Elle s'étouffe avec sa cuillère parce qu'elle ne s'attendait pas à cette question
3-6 :: Elle démontre de l'incertitude et se met sur la défense en démontrant presque de la jalousie.
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Oh. Well, apparemment, elle n’avait aucune intention réelle de le suivre. Vu sa surprise résultant de sa question. Et son trébuchement.
En voyant cela, d’ailleurs, il se retourne vraiment, tendant la main dans sa direction comme si ça pouvait l’aider à ne pas tomber… Il n’a pas les réflexes assez vifs pour la rejoindre à temps, contrairement à un inconnu passant par là.
Il laisse son bras retomber, et expire un soulagement. Peu importe combien PurpleAsh-and-Hosta est envahissante, il ne la déteste pas et ne souhaite pas qu’elle se blesse non plus.
Finalement, après avoir répondu à sa question… par une question qui le fait hausser un sourcil même si ça paraît être plus curieux qu’autre chose, elle se détourne avec une vague de la main. Vers la salle du buffet. Il cligne des yeux, étonné. Wow. Elle a du courage à essayer de s’aventurer là-dedans. Rien que les multiples couleurs dansant devant ses yeux lui donnent foutument mal au crâne.
Alors il secoue la tête, et fait demi-tour pour s’éloigner également. Il entend brièvement la voix du sac parlant, mais il l’ignore simplement.
Il quitte le bâtiment, regardant à droite et à gauche pour se localiser un peu. Même s’il habite dans la capitale depuis toujours, il ne la connaît pas par cœur. C’est immense, after all.
… Il concède de prendre à gauche car il y a moins de monde et que son mal de tête grandissant le supplie d’éviter davantage de foules. Il aimerait bien revenir au pont où il peignait avant d’être embarqué contre son gré par PurpleAsh-and-Hosta. C’était un peu plus calme là-bas…
Il se rend compte, au cours de sa marche, qu’une voix parlant non-stop continue de le suivre. Une qu’il a beaucoup trop entendue durant ces dernières minutes. Il s’arrête et se retourne… pour voir le sac parlant derrière lui, s’extasiant de ceci ou cela. « … Tu fais quoi là ? »
Il soupire. Quelle que soit sa réponse, de toute façon, il ne peut pas vraiment l’arrêter. « J’te préviens, tu viens pas chez moi. » Même s’il ne se dirige pas du tout vers chez lui. Ce sac chelou n’a pas besoin de le savoir.
Mais, alors qu’il reprend sa route, il se rappelle trop du temps passé avec PurpleAsh-and-Hosta et réalise à quel point il a été désagréable avec elle. Certes, c’est un peu de sa faute pour l’avoir traîné dans cet hosto contre son gré… Il grommelle à voix basse, passant sa main dans ses cheveux hérissés. Voilà que la culpabilité l’étreint maintenant.
Il s’arrête à nouveau. Il prend une profonde inspiration et souffle. Il ne regarde pas pour autant le sac roulant dans son dos. « Écoute. J’pense pas qu’on se reverra mais… Je suis désolé d’avoir été si désagréable. » Il n’explique pas davantage. Il ne demande pas à ce que le message soit transmis non plus. Il ne sait même pas si ce fichu sac bizarre va retourner voir sa propriétaire, et si oui, dans combien de temps. Il s’en fiche. Il voulait juste présenter ses excuses, même indirectement.
Sur ce, il poursuit pour la énième fois son chemin vers le pont. Et apparemment, sa suiveuse – son suiveur ? c’est un sac, non ? – finit par le lâcher car il n’entend plus sa voix continue. Un calme vraiment bienvenu et reposant au milieu de cette capitale bruyante.