Les vacances de Nevaeh lui manquaient déjà. Cela faisait si longtemps qu’elle n’avait pas vu sa famille, elle aurait bien voulu rester plus longtemps avec eux. Malheureusement, elle devait revenir à la capitale. Quoiqu'elle fût en vacances, les aventuriers, eux, ne l'étaient pas. Elle devait continuer de faire les plaques pour les nouveaux, tenir à jour les missions et accueillir tous les clients. Il faut tout de même dire que le travail lui manquait. L’ambiance et les gens sont des choses dont elle ne se lasse jamais. Heureusement, l'hôtesse est arrivée à temps dans la grande ville. Cela faisait déjà deux jours que la pluie lui tombait sur la tête. Au moins en étant hôtesse, elle pouvait rester à l’abri la majorité de la journée et par chance. Alors que le soleil se couchait et que le quart de travail de Nevaeh se terminait, elle remarqua la porte ouvrir. Parfait, pensa-t-elle. Son collègue qui prenait sa place pour la nuit était enfin arrivé.

Il était dommage que la soirée soit encore jeune. Normalement elle aime bien prendre des marches pour se détendre d’une longue journée. Malheureusement avec la pluie, elle allait devoir laisser tomber ses petites promenades dans les rues. D’un pas rapide, elle se fraya un chemin vers chez elle. Il s’agissait d’une bonne marche entre chez elle et la guilde, mais elle ne s’en plaignait pas. Sauf lorsqu’un orage décide soudainement de se faire entendre. En général, Nevaeh est loin d’être une femme peureuse. Peu de choses lui font peur. Toutefois, être à l’extérieur trempé jusqu’aux os et entendre le tonnerre non loin n’était jamais agréable. De plus, avec l’eau le bandeau autour de ses yeux l'empêchait de bien voir. Elle enleva alors le morceau de tissu et quelques jurons plus tard elle s’arrêta à la première place ouverte. N’ayant pas eu le temps de s’ajuster au paysage autour d’elle, l’aventurière entra tête première dans la porte en trébuchant sur ses propres pieds.

« Ça y est. J’en ai assez de la pluie. »

Dit-elle un peu trop fort en réalisant que du sang s’écoulait de son nez. Lentement, elle balaya la place en cherchant une place près d’une source de chaleur. Sa robe collait sur son corps et elle commençait déjà à frissonner. Elle pouvait déjà sentir qu’elle allait être malade. En examinant la place, ses yeux tombèrent sur quelqu’un qui pouvait peut-être l’aider.

« Ah, bonsoir !  Avez-vous quelque chose pour mon nez ? Et peut-être un café ? »

Elle offrit un sourire à l'homme en espérant qu'il ne pense pas qu'elle soit folle. Elle ne voulait pas du tout devoir retourner dehors. Si la chance lui souriait, peut-être serait-elle capable de rester jusqu'à ce que la pluie cesse.

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Il faut dire que Nevaeh sait faire des entrées remarquables. Même si cela était involontaire… À peine entré dans la pièce et tous les regards étaient sur elle. Si ce n’était de la situation, cela ne l’aurait point dérangé. Toutefois, ce dont elle avait besoin était de ce réchauffé et arrêter ce saignement de nez. Lorsque le serveur arriva avec des mouchoirs, elle les accepta volontiers avec un grand sourire.

« Merci énormément. »

Elle suivit les instructions de l’homme et prit place sur la chaise en face du foyer. Instantanément, elle put sentir le froid se dissiper. Le froid glacial lâchait enfin prise sur sa peau. Si seulement son nez voulait coopérer et cesser de couler, Nevaeh serait bien heureuse. Puis, le serveur revint avec beaucoup plus que ce qu’elle avait demandé. La pluie avait réellement affecté ses yeux, car il y avait beaucoup trop de tasse dans les mains du roux. Elle comprit alors que le reste était des cadeaux.

« Et bien, pour le moment il ne semble pas vouloir m’écouter. » Elle lui répondit en riant légèrement. « C’est parfait »

Lorsqu’il pointa les personnes assez généreuses pour lui offrir autant de chose, elle leur rendit un sourire. Puis, elle retourna son attention vers le serveur lui rendant les cristaux pour son café. Lorsqu’il retourna à ses affaires, la jeune femme tendit la main vers la tasse pour savourer l’arôme du café. La boisson la réchauffait de l’intérieur, faisant disparaitre les frissons. À peine une gorgée plus tard, elle entendit des pas se rapprocher. Dites-moi que ce n’est pas un des trois qui m’ont envoyé des cadeaux…, pensa-t-elle. Tout ce qu’elle voulait était de se distraire sur son café jusqu’à ce que la pluie arrête. Son seul plan pour la nuit était de s’endormir seule dans un cocon de couverture. Alors qu’elle entendait les pas se rapprocher elle se prépara à renvoyer la personne d’où elle venait. Ce dont elle ne s’attendait pas était de voir le serveur revenir avec une serviette.

« Alors je ne la refuserais pas. » Puis d’un ton plus bas elle lui dit, « Pas besoin de me dire de qui ça vient. »

Elle n’avait pas besoin de donner plus d'excuses aux clients de venir lui tenir compagnie. Fouillant dans son sac, elle sortit quelques cristaux pour les donner au serveur.

« Voilà pour les mouchoirs. Ça semble être une soirée plutôt calme. Pas beaucoup de gens souhaitent être dehors à une telle température. Vous pensez que ça va durer longtemps ? »

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Selon le serveur, la pluie pouvait prendre encore quelques heures. Ça lui donnerait amplement de temps pour terminer ses cafés et la tartelette aux fruits. De plus, elle pouvait profiter de la chaleur du foyer en paix. Ou presque. Elle aurait bien aimé pouvoir dire qu’elle sirotait son café entre deux bouchées de désert, mais ses oreilles captèrent des brins de conversation au loin.S’il y avait bien une chose que son maître lui reprochait était sa manie d’écouter aux tables. Chaque fois, elle lui répondit qu’il ne fallait pas sous-estimer les informations qu’on pouvait décrocher simplement en écoutant deux personnes ayant trop bu. Au fil du temps, Nevaeh avait aiguisé son ouïe pour distinguer les différentes conversations. Toutefois, était une soirée plutôt calme et il y avait peu de gens dans la salle.

Elle fut heureuse d’entendre que le serveur les conseillait de la laisser tranquille. Contrairement aux autres, il avait compris qu’elle n’avait pas envie de passer la soirée en compagnie d’un idiot. Elle étouffa un ricanement lorsqu’elle l’entendi bégayer légèrement. Son maître l’aurait sûrement moins gronder si au moins elle arrivait à écouter au table sans que cela soit évident. Un grand sourire se dessina sur son visage lorsqu’elle l’entendit dire qu’elle n’était pas un objet. Visiblement, il était bien plus décent que les autres hommes dans la pièce. Elle reprit une gorgée de café tout en gardant un œil sur les clients. En surveillant la salle, elle fut surprise de voir un enfant. Ce n’était pas ici qu’elle s’attendait à voir une petite fille. Que faisait-elle donc là, dans un tel endroit à cette heure. Elle semblait seule et personne ne lui portait attention. La seule personne qui semblait lui porter attention était le serveur. Peut-être devait-il la garder jusqu’à ce que ses parents reviennent ? Ou peut-être que comme elle, la petite c’est fait attraper par la pluie. Elle accrocha l’attention du roux un instant.

« Vous pensez qu’elle aime les chocolats chauds ? Une tasse bien chaude est toujours réconfortante durant un orage comme celui-ci. Elle semble si seule… »

Ses yeux s'adoucirent en pointa alors l’enfant assise un peu plus loin. Nevaeh a toujours un faible pour les enfants. Provenant d’une grande famille, elle a pu passer beaucoup de temps avec des enfants. Puis, avant qu’elle n’oublie, elle ramena son attention sur quelqu’un d’autre.

« Ah, d’ailleurs, vous pouvez lui dire que je préfère les femmes, c’est pour ça qu’on aime être tranquille, il n’intéresse personne »

Elle indiqua l’homme qu’elle avait entendu plus tôt. Elle avait bien hâte de voir sa réaction. La brune sourit et ses yeux pétillaient de malice. Le pauvre avait l’air si heureux de voir qu’elle l’avait pointer.

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Il faut dire que cet homme était bien doué dans son travail. Nevaeh avait réussi à captiver son attention bien rapidement et sans tarder, il était à sa table. De toutes les personnes dans cet établissement, il était le plus charmant. Elle n’avait pas l’intention de l'inviter chez elle du moins, pas ce soir. Elle le trouvait toutefois bien mignon lorsqu’il rougissait.

« Je vois je n’y avais pas pensé de cette façon. Je ne disais que cela, pensant que cela le découragerait. Homme ou femme, cela n’a pas vraiment d’importance pour moi. Mais je dois dire que s’il pense qu’il peut m’accompagner chez moi en montrant ses… chaussettes, c’est bien le mot ? Il sera bien déçu. »

L’aventurière prit une dernière gorger, terminant la première tasse de café. ‘Une de moins’. Elle soupira regardant les deux autres tasses encore chaudes grâce au foyer. Si la pluie était pour durer plusieurs heures, elle n’allait pas dormir de sitôt. Lorsqu’il termina de confirmer que la jeune fille aime les chocolats chauds, elle lui remit la tasse vide et l’argent pour le chocolat chaud.

« Alors si vous le permettez, je lui offrirais un chocolat chaud comme elle les aime. Un petit élan d’énergie pour terminer ses devoirs. »

En mentionnant l’enfant, elle put voir l’attitude d’Elion changer. Nevaeh pouvait voir tout l’amour qu’il avait pour elle. Un amour immense et innocent. Un amour plus fort que tout. Elle comprit alors qu’il devait être son père. Cette fierté dans ses yeux, elle pouvait bien la reconnaître. C’était la même étincelle qu’elle pouvait voir dans les yeux de son propre père.

« Oh, ne vous inquiétez pas pour elle. Elle a un sacré caractère. Elle saura aller loin. »
« Je n’en doute pas. Elle a de la chance de vous avoir comme père. »

Malgré son désir d’être seule, sa présence ne la dérangeait pas, au contraire elle était la bienvenue. La soirée était calme et elle avait une tasse encore pleine qu’elle n’avait pas encore touchée.

« La soirée serait peut-être moins longue en bonne compagnie ? La soirée s’annonce longue si ces idiots trouvent assez de courage pour me parler de leur chaussette. »

Elle lui laissa le temps de réfléchir à son offre pendant qu’il retourna la vaisselle en cuisine. Entre-temps, elle sortit ses crayons et son carnet à dessin. Dernièrement, il était rare qu’elle dessinât. Elle avait peu de temps à la guilde avec tous les clients qui se pointaient. Elle allait donc profiter de cette soirée pour mettre ses talents d’artiste à l’œuvre. Et elle avait une idée parfaite de ce qu’elle voulait dessiner.

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Chaque fois que Nevaeh ouvrait son carnet à dessin, elle se perdait dans son propre monde. Autour d'elle, les sons s'estompaient et les gens disparaissaient. Cela l'aidait à se concentrer, à éviter ses yeux de vagabonder sans but. Avec son crayon, elle dessina légèrement un croquis de son serveur et de sa fille debout devant la cheminée. Après tout, qui n'aime pas une photo de son enfant ? Entre deux gorgées de café, elle donnait vie à ce dessin, capturant chaque détail d'eux. Au début, elle n'avait pas réalisé que quelqu'un lui parlait. Mais après un léger poke qui lui chatouilla les côtes, son esprit fut ramené au présent.

« Merci mademoiselle pour le chocolat chaud. »

« Ça me fait plaisir. »

Ses yeux pétillaient de lumière et son sourire était aussi chaleureux et doux que le feu à côté d'elle. L'hôtesse avait vraiment un faible pour les enfants. Elle regarda la fille retourner vers son père qui lui ébouriffait affectueusement les cheveux. Elle pouvait voir tout l'amour qu'il avait pour elle. Il lui rappelait presque son père. Elle était reconnaissante que ce dernier ait pris une pause dans l'aventure lorsqu'il est devenu père. Pendant douze ans, il a fait passer ses enfants avant lui. Et il s'est assuré qu'ils savaient tous comment se battre. Ou presque. Killian et elle étaient un peu spéciaux, ils voulaient apprendre, comparé à Lovis. Ils voulaient apprendre à se battre et ensuite se battre l'un contre l'autre. Alors qu'elle le taquinait sur le fait qu'il ne savait pas viser avec un arc, il la taquinait sur le fait qu'elle frappait comme une fille.

Alors que le souvenir s'effaçait de son esprit, un soupçon de tristesse lui piquait le cœur. Il lui manquait. Son grand frère. Même si elle l'avait vu quelques jours auparavant, elle souhaitait parfois qu'il vienne plus souvent à la capitale. Maintenant, au lieu de s'entraîner avec lui, elle s'entraînait seule. Nevaeh retourna à son dessin, essayant de se concentrer sur son dessin plutôt que sur sa famille, mais son esprit passait sans cesse de l'un à l'autre. Dans sa tentative d'occuper son esprit, elle remarqua à peine que l'homme avait pris place à sa table. Après s'être sentie observée, elle leva les yeux en remarquant qu'il regardait le dessin.

« Tu sais... Je pense qu'un foulard rouge irait bien avec tes cheveux. Et pourquoi pas une fleur jaune dans les cheveux de ta fille ? Le bleu et le jaune sont complémentaire vous savez.»

Elle glissa le livre sur la table pour qu'il puisse mieux le regarder. Alors qu'il regardait le dessin, elle remarqua des taches de rousseur sur son visage, ce qui lui donnait un air mignon. Elle sourit et reprit son livre pour les ajouter.

« Je m'appelle Nevaeh. Et toi ? Est-ce qu'il y a un nom qui vient avec ton joli visage ?»

En sortant de sa bouche, le mot lui rappela la fois où elle avait flirté avec une femme dans une taverne. Et comme maintenant, elles ont partagé un verre. Trouver de nouveaux amis était toujours plus facile de cette façon.

« Je vois que beaucoup d'autres aimeraient être à ta place en ce moment. Que dirais-tu de les rendre encore plus jaloux et de me parler de toi… Ou y a-t-il un supplément à payer pour mieux te connaître ? »

Elle rit légèrement en disant la dernière phrase, le taquinant légèrement. Un sourire chaleureux et un peu d'humour étaient un bon moyen de faire en sorte que quelqu'un se détende un peu.

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La jeune femme ne s’attendait pas du tout à une telle réaction. Avait-elle été trop familière ? Était-ce sa petite plaisanterie qui était déplacée ? Peut-être qu’il n’était pas content d’être dessiné sans son accord. Elle était bouche bée une seconde, mais lorsqu’elle vu qu’Elion allait partir elle l’arrêta un instant pour s’excuser.

« Attendez. Je suis vraiment désolé de vous avoir blessé ou insulté. Je ne voulais rien sous-entendre ou quoi que ce soit. Ma plaisanterie était tout à fait déplacée, et je vous demande pardon. »

Nevaeh ne voulait pas causer de problèmes, mais sa langue avait repoussé la seule personne décente de la pièce. Malheureusement, elle n’avait aucune idée de comment réparer son erreur. Elle ne voulait pas non plus l’importuner plus longtemps si elle l’avait blessé. Une fois ses excuses terminées, elle le laissa continuer de travailler. Après tout, il était quand même en plein milieu d’un quart de travail. Peut-être qu’elle aurait dû ne pas lui demander de lui garder compagnie.

Elle referma alors son carnet, n’ayant pas l’envie de continuer le dessin puis décida de porter son attention sur le feu. Elle n’avait pas envie de retourner sous la pluie, mais elle était en train de considérer de quitter les lieux. Puis, elle entendit des pas revenir. Avait-il accepté ses excuses ? Non. Elle aurait bien aimé que ce soit Elion, mais malheureusement son regard tomba sur un client ayant sauté sur l’occasion de lui parler. Sans le serveur avec elle, l’homme avait enfin eu le courage de venir lui montrer ses chaussettes.

« Bonsoir ma p’tite dame, vous allez bien ? »

Elle le regarda avec un air complètement désintéressé, mais lui sourit quand même par politesse.

« Toutes mes excuses, mais ce soir je préfère être seule. »

« Ne dite pas ça, je vous ai vu inviter Elion à votre table. Je peux vous assurer que je suis de bien meilleure compagnie. Et en plus, je pourrais vous montrer mes chaussettes. Elles sont très jolies. »

Il ne lâchait pas l’affaire. Et en plus il avait cru que le sujet dès ses chaussettes était intéressant. Elle soupira avant d’appuyer son front sur sa main de façon complètement désespérée.

« Oui. Vous avez raison. J’ai invité Elion à ma table. Vous, par contre, n’avez pas été invité et vos chaussettes ne m’intéressent pas. Elion est bien plus intéressant et décent que vous, donc laissez moi tranquille. »

Elle ne voulait pas être si bête face à l’homme, mais cela était la seule façon pour lui faire comprendre. Nevaeh tourna alors sa tête, redirigeant son attention vers le foyer et tourna le dos au courageux qui pensait pouvoir lui parler. Si seulement la pluie cessait.

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La patience est une vertu. C’est une chose que l’on aiguise avec le temps, mais à ce moment-ci, la patience de Nevaeh s’effrita. La pluie avait déjà baissé son moral et elle sentait mal d’avoir pu faire du mal à Elion. Puis, voilà le brave homme dansant sur son dernier nerf. Elle avait tenté d’être polie dans son rejet, mais visiblement il ne comprenait rien. Même si elle lui avait tourné la tête et qu’elle lui avait dit très clairement qu’elle ne voulait pas de sa compagnie, il eut le culot de prendre place sur la chaise à côté d’elle. À plusieurs reprises elle tourna les yeux lorsqu’il essaya d’initier la conversation. Elle ne voulait pas causer d'ennui, alors elle fit son possible pour se retenir de l’envoyer valser dehors.

Alors qu’elle essayait d’ignorer l’homme à côté d’elle, son serveur revint pour la sauver. La jeune femme espérait que Marcel allait finir par comprendre et partir rejoindre ses amis, mais la vie n’est jamais aussi gentille. Elle écouta l’échange et plus Marcel ouvrait sa bouche, plus elle commençait à avoir du mal à contenir sa colère. Personne n’avait grillé leur cartouche et ce n’était le tour à personne d’autre d’essayer. Pourquoi était-ce si difficile pour les idiots de comprendre que les femmes ne s’intéressaient pas à eux. Nevaeh vint au bout de son rouleau lorsque Marcel décida de lancer les cristaux au visage d’Elion. Son visage était rouge alors qu’il se leva pour lui faire face.

« Tu te penses grand et fort hein ? Si c’était pas de moi et mes potes, tu crèverais de faim. Et tu - »

Nevaeh ne le laissa pas terminer. Elle en avait assez entendu. Sans avertissement, Nevaeh se leva et se mit entre Elion et Marcel. Assise, elle n’avait pas l’air grande, mais debout devant lui, elle le dépassa facilement avec ses 178 centimètres. Son regard rarement froid le cloua sur place et il n’arrivait pas à dire un mot de plus.

« Si tu ne sors pas maintenant, c’est moi qui vais te faire sortir. »

Ses mots étaient accentués avec ses pas, forçant l’homme devant elle à reculer. Lorsque le dos de celui-ci frappa la porte, elle se retourna pour retrouver le confort du foyer. Mais le problème avec ce genre d’homme, c’est qu’il n’abandonne pas si facilement.

« Vous êtes tous pareils. Vous voulez tous être tranquille. Fait pas la difficile, tu sais que tu meurs d’envie de coucher avec moi. »

Le courage et l’alcool ne font jamais bon ménage et s’il voulait finir dehors à la pluie, il avait trouvé les bons mots. Elle agrippa sa dague et la lança vers Marcel. La lame manqua la joue de quelques centimètres avant de rester coincer sur le mur derrière lui.

« La prochaine s’en va entre tes jambes si tu ne sors pas maintenant. »

À la menace, il s’enfuit sans plus de spectacle. Pour ce qui est de ses amis, ceux-ci quittèrent l’établissement de façon plus gracieuse. Nevaeh récupéra sa dague et la rangea dans le fourreau de sa cuisse droite. Puis, elle reprit sa place.

« Il ne devrait plus vous embêter maintenant. Merci d’être intervenu. »

Toute colère et froideur s’était dissipée et elle offrit un sourire à Elion.

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Nevaeh fut soulagée que le roux ne soit plus fâché. Du moins, la glace dans sa voix et son regard avait fondu. Elle n’aurait pas su quoi faire s’il n’avait pas accepté ses excuses.

« Si vous n’étiez pas intervenu, je n’aurais pas trouvé le courage de le faire fuir. Je préfère éviter les ennuis, voyez-vous. Mais, je ne pouvais pas le laisser dire du mal de vous plus longtemps. Vous méritez du respect comme tout le monde peu importe votre emploi. »

Le commentaire sur le maniement des armes ne la choqua pas du tout. Elle n’avait pas le physique d’une combattante. Elle était grande et svelte. Un corps mieux adapté pour une ballerine. Et comme son frère lui disait souvent, elle frappait comme une fille. Ses muscles avaient été entraînés plus pour l’agilité et la flexibilité. Sa force était plutôt ordinaire.

« Ne vous laissez pas impressionner. Je ne suis pas une grande aventurière, mes compétences sont plutôt moyennes. Je suis qu’une simple hôtesse à la guilde. »

Entre son maniement de dague, d’arc et d’épée, elle était une personne ordinaire. Elle n’avait participé qu’à deux missions dernièrement. L’une d’elles était censé être simple, mais elle se dégrada rapidement. Peut-être si elle avait été une aventurière à temps plein, elle aurait pu faire plus pour aider. Mais, elle était hôtesse et passait son temps à la guilde. Au moins elle avait le temps de s’entraîner.

« Vous savez… Il est un peu plus rare de rencontrer des clients comme Marcel à la guilde. »

Il y avait toujours de la place pour un nouvel hôte dans les rangs de la guilde.

« Le salaire est bon et on rencontre beaucoup de bonnes personnes. »

Elle adorait travailler à la guilde. On pouvait le voir dans son sourire et ses yeux pétillants. Les aventuriers étaient devenus une famille pour elle. Peut-être pourrait-elle partager ce bonheur avec quelqu’un d’autre.

« Et je suis certaine que la guilde pourrait accommoder toute situation… Je suis vraiment désolée, je ne voudrais pas que vous le preniez mal. C’est simplement un endroit génial. »

Réalisant que ce qu’elle disait pouvait être mal interprété, elle s’empressa de s’excuser. Elle avait déjà du mal à retenir sa langue, elle ne voulait pas froisser Elion davantage. Mais, s’il était traité de cette façon par les clients, elle ne pouvait pas rester muette.

« Je, je ne veux pas dire qu’être serveur n’est pas une bonne chose. Je voulais simplement dire que les clients sont bien plus polis et gentils. »

Plus elle parlait, plus elle avait l’impression qu’elle creusait sa tombe de plus en plus profondément. Ses joues se tintèrent de rouge à fur et à mesure que les mots sortaient de sa bouche. Depuis quand discuter avec les autres était si difficile.

« Enfin, je veux dire que je ne dirais pas non à travailler avec vous à la guilde. »

Elle devait vraiment apprendre à arrêter de parler.

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Nevaeh savait bien qu’elle ne devait pas trop se mêler de la vie des autres. Sinon, elle risquait de ramener de mauvais souvenirs. Leur vie était privée et ne regardait qu’eux. Mais, parfois il était difficile de tourner les yeux lorsque les gens avaient besoin d’aide. Était-elle arrogante ? Tendre la main vers quelqu’un qui n’avait pas demandé d’aide, n’est-ce pas de l’arrogance ? Elle avait eu la chance de rencontrer des personnes qui lui avait tendu la main et elle voulait faire de même. En étant aventurière, elle avait eu la chance d’aider des gens lors de ses missions. En tant qu’hôtesse, elle avait l’impression qu’elle n’aidait plus autant. Elle était une simple personne, effectuant son travail tout en restant amicale. Elle accueillait les aventuriers chaleureusement, toujours avec un sourire aux lèvres. Après tout, la guilde était leur maison. Une maison et une famille. Tranquillement, elle put se faire une place au cœur de cette organisation. Et celle-ci prenait toute la place dans son cœur. Elle ferait tout pour sa famille. Sur cela, elle pouvait comprendre Elion. Lui aussi avait quelque chose, ou plutôt quelqu’un, pour qui il ferait tout. Mais, elle ne comprenait pas la logique dans ses paroles.

« Les cristaux vous manquent afin de pouvoir offrir le meilleur à votre petit ange. Mais il vous est impossible d’accepter un poste plus payant en cristaux et moralement ? »

Elle ne comprenait pas pourquoi il refusait. Elle avait pourtant vu les yeux du roux s’animer avec des étincelles de bonheur ? D’espoir ? Qu’est-ce qui pouvait bien l’empêcher ? Avait-il une dette envers l’établissement ? Cela pouvait s’arranger. Tout problème avait une solution. Mais, il devait prendre le premier pas vers la solution. Elle ne pouvait pas le faire pour lui.

« Vous savez, j’ai appris, parfois, la meilleure chose que l’on peut faire pour les autres, c’est prendre un peu de temps pour soi-même. »

Pour un instant, ses yeux et son sourire se voilèrent de tristesse. Elle avait passé près de deux ans à laisser la culpabilité la tuer de l’intérieur. À chaque jour, elle ne pensait qu’à son cher ami, passant tous ses jours à son chevet. Elle faisait tout pour lui, mais à chaque service qu’elle lui faisait, les yeux d’Ahren semblaient toujours de plus en plus triste. Elle ne vu la joie dans ses yeux que seulement lorsqu’elle finit par accepter de laisser aller sa culpabilité.

« Je crois que si j’avais continué à ne penser qu’a lui et a tout ce dont il avait besoin, il ne serait pas aussi heureux qu’il l’est en ce moment… Peut-être… Les choses pourraient redevenir comme avant et nous pourrions repartir à l’aventure ensemble. »

À la penser de son ami, le regard se dirigea vers la tasse de café. Nevaeh n’avait pas tendance à parler beaucoup d’elle-même. Elle trouvait que la vie des autres était toujours bien plus intéressante. Son cœur se serra douloureusement aux doux souvenirs qu’elle avait partagés avec lui. Elle détestait lorsque cela lui arrivait. Chaque fois qu'elle pensait à lui, des sentiments qu’elle ne comprenait pas faisaient surface. Elle ne voulait pas s’attacher à qui que ce soit pour éviter de ressentir ce mal. Elle ne voulait pas non plus que les autres puissent ressentir cette douleur lorsqu’ils pensaient à elle. Elle préférait être qu’une simple figurante dans la vie des autres. De cette façon, ils pouvaient continuer leur vie en oubliant presque qu’elle aurait existé et de son côté, elle ne sentirait pas son cœur se déchirer en pensant à ceux qu’elle avait rencontrés.

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De tous les sentiments qu’elle pouvait ressentir, la fierté n’était pas sur la liste. Se pardonner fut une liberté au goût amère. Si les paroles du serveur ne faisaient pas de sens pour elle, ironiquement, les siennes n’en faisaient pas plus. La meilleure chose qu’elle avait faite pour lui a été de laisser aller ses sentiments. Laisser aller la tristesse et la colère qui la clouaient dans le passé. Elle l’avait fait pour lui et pour elle. C’était la seule façon de pouvoir continuer d’avancer. Mais, avait-elle réellement avancé ? Elle était encore hôtesse à la guilde. Nevaeh plongea ses yeux le regard bleuté d’Elion puis laissa échapper un rire jaune.

« J’ai bien peur que je ne puisse pas profiter de cette nouvelle relation. Pour ne plus le blesser, je l’ai laissé partir. »

La peur pouvait faire bien des ravages. Et sa crainte avait malheureusement brisé leur lien. Peut-être que si elle avait écouté son cœur, il aurait pu être plus que son meilleur ami. Il était désormais trop tard. Elle ne pouvait que vivre avec ses regrets et se forcer à regarder vers l’avant. Elle devait transformer son passé en une base solide pour paver son futur. La vie était un trésor, et elle se devait de toujours ouvrir ses yeux pour trouver toutes ces belles petites choses qui donnaient un sens à la vie.

La vie est un combat pour tous. Certains doivent se battre plus que les autres. Alors que la voix du jeune homme se faisait de plus en plus douce, Nevaeh se dit qu’il devait faire partie de ceux qui n’ont pas eu la vie facile. Le destin n’avait pas été doux et l’avait poussé vers cette vie. Elle avait rencontré certaines personnes qui ont manqué de chance et qui n’avaient pas eu la chance de connaître le bonheur d'avoir une main tendue pour eux. Alors lentement, elle posa sa main sur celle d’Elion.

« Je ne suis pas très doué pour réconforter les gens. Et j’ai souvent du mal à comprendre les sentiments. Mais, je n’ai qu’un conseil à donner si vous voulez bien l’entendre. »

Contrairement à ses frères, Nevaeh n’a jamais eu une idée particulière sur ce qu’elle voulait faire de sa vie. Heureusement, ses parents ont toujours été là pour elle.

« Mon père m'a toujours dit de me battre pour ce que je voulais être et de ne jamais regarder en arrière sur ce que ça aurait pu être. »

Ne jamais regarder en arrière était la chose la plus difficile à faire. Dans ses moments de faiblesse, son esprit semblait bien aimer se perdre dans le passé.  

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