Les ruines des corbeaux

Ain se dirigea vers le ballon rouge qu'on lui avait indiqué, elle trainait Griis par la longe et hésitait encore à le prendre avec lui. Un cheval de cette taille peut-il monter dans la nacelle ? Cependant, étant lié à lui par ce lien de familier, elle ne parvenait pas à se dire qu'il fallait mieux le laisser au campement... Sentant le dilemme de sa maîtresse, Miel lui donna un coup de truffe sur la main et l'aventurière lui grattouilla la tête machinalement. A quelques mètres du point de départ, la jeune femme s'arrêta cachée derrière un arbre enfin prête à prendre une décision : elle se retourna vers son familier et lui caressa doucement le chanfrein. Trifouillant dans ses affaires, elle en sorti un collier en argent, tout simple et tout rond. C'était un objet de pouvoir qu'elle avait acquis il y a quelques temps de cela, Griis le reconnu tout de suite et émit un hennissement satisfait, donnant un coup de tête sur l'épaule de sa maîtresse réclamant ce collier. Ain exécuta et lui passa autour du cou, puis observa la silhouette du cheval de lune se métamorphoser... En quelques secondes à peines, se trouvait face à elle un jeune homme, légèrement plus petit qu'elle, svelte et complètement nu.

- B-bonjour maîtresse...

Sa voix était angrodyne tout comme les traits de son visage. Il avait la peau pale et une chevelure grise comme la robe que le familier avait dans sa forme animale. Se redressa, il s'étira doucement pendant qu'Ain lui lança des vêtements pour s'habiller. Griis commença à s'habiller non sans perdre deux ou trois fois l'équilibre après être passé des quatre pattes au deux jambes mais avec l'aide de sa maîtresse, il parvint à enfiler la tenue blanche que la jeune femme lui avait fourni.

- Ça va ? Tu arrives à garder l'équilibre ? J'aimerais avancer jusqu'au ballon..

- Oui, merci de me laisser vous accompagner maîtresse

Le jeune homme esquissa un sourire qui se dessina timidement sur ses lèvres. Pendant ce temps, Miel lui tournait autour et fit parvenir à Ain une pointe de jalousie. Malheureusement, la jeune femme ne possédait qu'un seul collier du compagnon et ne pouvait humaniser qu'un seul de ses familiers à la fois... Le solnar comprenait mais ce n'était pas pour autant qu'il appréciait que le cheval ai plus de reconnaissance que lui. Vif quant à lui se posa sur la tête de son ami maintenant bipède et continua sa discussion, malgré le fait qu'il ne pouvait rien entendre hormis les piaillements du chantelune :

- Griis est devenu comme maman ! Bientôt Vif aussi !

Ignorant les commentaires du jeune oiseau, après avoir vérifier que Griis parvenait à marcher seule, elle sortie de sa cachette pour se diriger de nouveau vers le ballon. Lorsqu'elle arriva, les groupes étaient déjà fait. En habituelle solitaire, elle n'avait personne avec qui partir mais cela lui était bien égale. Elle chercha tout de même dans la foule une grande tête brune qu'elle ne trouva pas. Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas eu de nouvelles de Nora et elle espérait seulement qu'il se porte bien. Mais elle avait d'autres affaires dont elle devait s'occuper et elle n'était ni sa mère ni sa femme pour s'inquiéter davantage.

Alors que le départ s'annonçait proche, on la fit monter dans la nacelle et un garde lamba lui indiqua un petit groupe de trois chez qui il manquait visiblement une personne. Ain haussa les épaules, elle avait l'habitude d'être greffé à différents groupes. Elle ne connaissait aucune des têtes présente, elle n'avait pas une excellente mémoire visuelle mais elle était certaine de ne pas avoir croisés ses individus à la guilde. Mais qu'importe, s'ils s'étaient portés volontaire pour cette expédition c'est qu'ils n'étaient pas incompétents.

Alors qu'ils discutaient, elle s'approcha vers eux et se racla la gorge. Elle n'aimait pas parler ou se présenter mais c'était un passage obligé. Sentant certainement sa gène, c'est Vif le premier qui se posa sur son épaule et piailla bien fort :

- ENCHANTE ! MOI C'EST VIF ET MAMAN C'EST MAMAN !

Bien évidemment, les autres ne pouvaient entendre que le petit chant du chantelune et non le message télépathique qu'Ain recevait à chaque fois qu'il ouvrait le bec. Elle soupira intérieurement et repris face à ses compagnons d'infortune :

- Bonjour, je m'appelle Ain. On m'a assigné à votre escouade, enchantée.

Elle marqua une pause, ayant presque oublié de présenté ses familiers et rajouta :

- Et voici Miel, Vif et Griis.

- Enchanté

Poliment, Griis inclina le buste pour saluer les compagnons de sa maîtresse.

Alors que les présentations se faisaient tranquillement, elle se tint à l'écart de toute discussion pendant le voyage, ne souhaitant pas communiquer plus que nécessaire mais garda l'oreille attentive sur les trois gardes. D'après le nom et l’appellation qu'on lui donna, Ain devina que l'un d'eux était capitaine de la garde royale. Rien que cela, elle ne comprenait pas pourquoi on l'avait collé, elle, simple aventurière, avec un groupe aussi élevé mais qu'importe. Elle n'était pas là pour contester les décisions et elle s'en moquait. Il y avait également une jeune femme, pleine d'entrain et un grand gaillard : faisaient-ils également partie tous deux de la garde royale ?

Accoudé sur le rebord du ballon alors qu'il prenait de la hauteur, Ain observait cet étrange paysage en indiquant à Vif de ne pas voler trop loin : le petit chantelune était encore plus excité que la plupart des aventuriers à l'idée d'aller dans une mer de sable volante...

Elle resta muette tout le trajet et lorsque le ballon arriva à terre, elle respira un grand coup. Elle sentait le sable mais ne sentait pas la chaleur du désert... Encore un des effets de son pouvoir, en bien comme en mal, parce qu'elle ne pourrait pas sentir les coup de soleil arriver. Suivant son escouade, elle posa pied à terre et hocha la tête à la question du capitaine ignorant royalement le commentaire de la jeune femme qui l'accompagnait. Si elle n'était pas prête, elle ne se trouverait pas en ces lieux et si elle se trouvait en ses lieux, ce n'était pas pour faire la causette non plus... Elle leva le regard en direction des ruines, Miel collé à sa jambe et avança d'un pas sur en suivant son groupe.