Ce n'est clairement pas le moment de faire de l'esprit, mais il ne peut s'en empêcher. Déjà, ça lui permet de ravaler tout ce qui a pu se passer et être dit les dernières minutes. Ça allait trop vite, tellement de choses à inscrire en si peu de temps...L'important, c'était que le sale Gauss l'avait passivement foutu genoux à terre, profitant de la blessure du blond pour subtiliser son appui. Bien qu'il ait par la suite fait preuve d'un sang froid incroyable, qui gagna le respect de Warren pendant cinq solides secondes, avant de se rappeler dans la douleur de l'état de sa jambe, car faut bien se relever et être digne, donc ne pas couiner comme un chien apeuré en se relevant.
'' En tout cas, on dirait bien que vous avez tout prévu. Au vu de ce qui est en train de se passer...J'étais prévoyant avant, pas autant. J'imagine que ça va être obligatoire, dorénavant. ''
Le blond ne pouvait s'empêcher de sentir croître une pointe de culpabilité, imaginez si cette embuscade avait été lancée par ce satané connard écailleux ? Ce ne serait que justice, en vrai. Foutre les autres Archontes dans la panade l'ennuie plus que de mettre en jeu sa propre vie ; rassurez vous, il est toujours égoïste, mais nuire à des amis comme Ina ou des beautés comme Olenna et Sarah, c'est impardonnable. Oscar ? Oh, il en sortirait grandit, hein. Ou pas du tout. N'importe, les deux lui vont.
Clopi-clopant, il suivait tant bien que mal le groupe, gardant quand même en tête l'espoir de ne pas être celui qui traîne derrière, qui doit se sacrifier pour l'équipe, blablabla, puis quoi encore ? Juste derrière Olenna, qui guidait le groupe non sans avoir couvert leurs arrières de sa magie, Inaros, qui avisait le groupe de la situation juste avant d'envoyer une pique à Warren, et Ruffio, qui semblait plus ennuyé de ne pas être juste au niveau des jupons de sa maîtresse que de la situation catastrophique du groupe.
'' J'ai baissé mon froc devant maintes dames ; aucune n'a cependant les reins assez solides. '' Petit silence. '' Pour envoyer de tels hommes de mains. Mais merci d'avoir pensé à autre chose. '' Sa blessure ne s'améliorait absolument pas, bien au contraire. '' Que Ruffio vienne s'il veut, j'en ai que faire, par contre je vais vous accompagner à la caserne, l'avantage c'est qu'ici, ils me connaissent pas. Et je ferais bien...Genre...Recoudre le trou que j'ai dans la jambe. Ça...Paraît une bonne idée. ''
Oh, si seulement entre deux pirouettes et des enchères de mort, la doctoresse avait prit le temps de lui apprendre deux ou trois trucs utiles, comme genre, de la médecine?
Depuis le début, il ne voulait rien dire sur le retour de Wolfram, et là encore, il décidait de faire le muet. Après tout, quelle utilité ? Inaros serait le seul à comprendre tout ça. Non, ça ferait l'affaire d'un entretien privé et ultérieur, un monde existe où il n'était pas le seul visé, et qu'il n'y avait donc aucun mauvais sang à se faire. Pour sa part du moins, il n'oublie pas avoir vu de la fumée se dégager d'un bâtiment. A la base, juste une pensée telle que ''Super, un incendie, y en a au moins quelques uns qui passent une aussi bonne journée que nous''. La réaction de Sarah se fit sans appel, si bien que même Oscar pouvait comprendre ce qu'il se tramait, alors Warren, n'en parlons pas. Étrangement muette depuis quelques instants, aucune idée de s'il fallait rajouter quelque chose aux dires du mercenaire. Il s'y hasarda tout de même.
'' Pressons le pas, voulez vous ? Nul doutes qu'Archibald se débrouillera ; comme toujours. Y'as plus de chance qu'il enterre ses gamins que l'inverse. '' Il soupira, sa jambe commençait vraiment à le lancer. Et donc, pourquoi à chaque fois, c'est à lui de prendre ? Aucune idée ce qu'il a pu faire, pour mériter ce traitem- Ah oui. C'est vrai. Les arnaques, les morts, les embrouilles, tout ça. Si douloureux, mais pourtant si bon. '' Ça va aller, poupée ? J'imagine bien qu'on arrivera pas à te retenir de toute manière... ''
Derrière le sobriquet ridicule se cachait une vraie pointe d'inquiétude, alors que le groupe suivait toujours l'hôtesse des lieux. Retenir Sarah de quoi ? D'y aller franco, au devant du danger, comme la dégénérée qu'elle est ? Oui, mais c'est ce qui fait son charme. Lui, en tout cas, allait sagement se planquer jusqu'à récupérer assez pour se rentrer à la capitale.
'' En tout cas, toujours aussi accueillant le Grand Port, un plaisir de venir. Dommage que Sandro ait pas pu être des nôtres. ''
'' Et Enola, aussi ''. Ces paroles avaient été heureusement et fortement retenues en son for intérieur, vu la situation, ce n'est pas le moment d'évoquer à Sarah sa sœur. Ce qui est sur, c'est que même en nombre restreint, les Archontes de l'Ordre ont encore prouvé qu'ils arrivaient à s'en sortir. Imaginez le jour où ils referont une telle réunion, mais au complet. Le futur est prometteur.
Le monde tourna autour d’elle quand Oscar passa sa main sous son aisselle pour l’aider à la relever. Le contact de sa peau contre la sienne la fit frissonner de dégoût, mais elle ne dit rien. Le simple plaisir de voir Warren boîter comme un estropié lui procura suffisamment de satisfaction pour ne pas vider son sac sur Oscar.
« Merci … dit-elle d’une voix effacée. »
Elle suivit le mouvement, supportée par son partenaire d’aventure. Elle savait que ce qu’elle avait vu était un effet de son pouvoir. Elle avait beau le vanner sans arrêt, elle avait réellement écouté la description qu’il lui en avait faite. Elle savait donc ce que ça impliquait, mais le voir était autre chose. Elle trébucha sur la première marche et avait des difficultés à écouter ce qu’il se passait autour d’elle, mais elle gardait toujours son répondant. Juste avant de rentrer dans le passage, elle attrapa Rufio par le col, manquant de lui faire perdre l’équilibre alors qu’il se cachait derrière Olenna.
« Eh Medor, au lieu de te glisser derrière nous l’air de rien alors que tu as été d’une inutilité flagrante durant toute cette histoire, tu voudrais pas aider ta collègue la servant chelou qui agonise sur le sol ? C’est pas trop te demander ? Parce que si on attend que lady Belmont s’inquiète de son personnel, je crois qu’elle aura clamsé bien avant … »
Elle désigna la servant masquée qui avait été fauchée par un carreau elle aussi dès le début du combat. Sarah n’avait aucun avis sur elle si ce n’est que son pouvoir était vraiment … dérangeant. En plus, à cause de ça, personne n’avait entendu ses gémissements, c’était d’un glauque. Heureusement pour elle, Sarah n’était ni une noble égoïste, ni un criminel sanguinaire ni un aventurier possédé par le fantôme d’un aventurier sanguinaire. Elle pensait à tout le monde en cet instant au lieu de penser à sa propre vie. Elle s’inquiétait pour son père, pour sa sœur qui était peut-être attaquée en ce moment. Elle avait aussi une pensée pour Sandro, mais elle savait qu’il se débrouillerait sûrement très bien.
« Elles avaient peut-être pas les reins assez solide, mais t’as pensé à leur demander si elles étaient mariées avant ? ricana Sarah. Mais ouai je pète la forme. »
Elle toussa violemment en disant ces quelques mots ce qui lui arracha une grimace de douleur.
« Désolé Inaros, mais mes partenaires de commerce ne sont généralement pas du genre à se planter au couteau quand il se font sucrer des contrats. C’est plus le genre de votre bord ça … »
Ils déboulèrent dans la cave de Lady Belmont et Sarah leva les yeux au ciel.
« Eh bah je vois où est passé le budget de la sécurité … »
Elle n’arriva pas à en dire plus, car sa tête tourna. Le sang commençait à sérieusement alourdir ses vêtements. Elle tapota le bras d’Oscar pour lui demander d’arrêter.
« Faut que tu casses la flèche et que tu compresses ma blessure sinon j’crois qu’ … vais tourner de l’œil. »
Elle sentit une vague de fatigue lui faucher les jambes et faillit tomber. Elle laissa Oscar la pose au sol avant de reprendre quelques couleurs.
« Je peux nous ouvrir un portail, voir deux avec un peu de temps, mais faudra que j’aie une vue dégagée. L’idéal serait un bâtiment avec des vitres pour que je crée le portail directement à l’intérieur … »
La lueur de son regard était désormais éteinte, et il fit taire la conscience qui l’avait poussé à assassiner des hommes de sang-froid. Non pas qu’il éprouvait des remords à leur égard – si ça n’avait pas été eux, ça aurait été les archontes – seulement, ce n’était pas son rôle d’assurer cette protection. Laissant alors ses remords de côté, il laissa son regard émeraude se poser sur l’aventurière, arrachant le tissu de sa robe pour vérifier l’état de sa blessure. Il releva alors vers elle un regard candide, aussi inexpressif qu’il l’avait toujours été.
« Je suis désolé Sarah, ça risque de faire mal, lui souffla-t-il. »
Tenant la flèche au plus proche de la blessure, il la brisa d’un mouvement de la main avant de la tirer délicatement attentif au moindre changement d’expression de l’archonte. Lorsque la plaie fut dévoilée, il retira sa cape pour venir presser la blessure. Pendant qu’il entreprenait ses soins d’urgence, l’aventurier continuait à parler pour garder Sarah consciente en s’assurant que celle-ci continuait à lui répondre. « Tu n’as pas à t’en faire pour ton père. » Ou encore « Dis-toi que Warren a été assez stupide pour se prendre une flèche à bout portant. » Et que s’il n’avait pas joué à faire son coq, ils auraient probablement rencontré moins de difficultés à s’évader des lieux.
Une fois la cape bien serrée, l’hémorragie plus ou moins maîtrisée, il saisit Sarah sous les genoux pour la soulever, s’assurant de ne pas trop solliciter la douleur de sa blessure.
« Essayons déjà d’évacuer les lieux, garde tes forces pour quand ils viendront à notre rencontre dans les rues. Et par pitié, ne viens pas hurler parce que j’essaye de t’économiser, tu vas t’épuiser et nous épuiser.»
Il était certain qu’après un tel raffut, et avoir attaqué la compagnie sur tous les fronts, la garde serait tentée de se bouger. De véritables imbéciles qui étaient venus si préparés qu’ils n’avaient au final rien tiré des archontes si ce n’était un envoi direct aux pieds de Lucy. Les dégâts matériaux ne semblaient par ailleurs ne pas déranger l’hôte des lieux dont le visage semblait surtout s’être marqué par la contrariété après ces événements. Le jeune archonte partagea un bref regard avec Inaros, le questionnant silencieusement de sa présence sur les lieux alors qu’ils suivaient le chemin pour sortir de l’établissement, incapable de savoir où débouchait la sortie.
Evitant alors que Sarah se remette à gesticuler d’impatience, il resserra faiblement sa prise autour d’elle, parfaitement imperméable à tous les vacheries et mots d’amour qu’elle aurait pu lui sortir.
« Le fait qu’ils soient si bien renseignés sur nous me laisse tout de même perplexe, reprit Oscar pensivement. Quelqu’un aurait pu lâcher des informations ? En sachant que même nous, n’étions pas au courant des actions de dame Belmont pour Althair. »
L’archonte soulevait un point sur lequel il se permettait de réfléchir maintenant que l’adrénaline retombait. Jusqu’où allait la trahison de ceux qui avaient vendu les archontes ? Et à quel point s’était-il étendu dans les réseaux pour pourrir le noyau de la compagnie tant de l’ordre ? Ses questionnements qui resteraient probablement sans réponse pour le moment força Oscar à se reconcentrer sur le chemin qui les guidèrent hors de la demeure de la lady, alors qu’il s’était rendu complètement silencieux.
Mais une chose était bien certaine, c’était que cette réunion s’était montré agaçante bien au-delà de ce qu’il avait imaginé. Il se contenterait donc d’envoyer Jeanne à l’avenir.
- Accélérez le pas, voulez-vous ? Si on ne peut pas sortir d’ici grâce à la magie, on s’en ira à pied. Il faut qu’on remonte jusqu’aux jardins extérieurs. Derrière il y a un portail enchanté, je peux en ouvrir le sceau, il mène à un escalier qui descend jusqu’à un petit débarcadère privé. Il suffira d’emprunter un bateau là-bas et s’échapper.
Après cette seconde intrusion chez elle, la première menée par Inaros avant que l’Ordre ne soit fondé, il devenait certain qu’Olenna allait investir en une pléthore d’enchantements de sécurité et gardes privés. Il devenait urgent de dissuader quiconque de revenir empiéter sur ses plates bandes. Et en vue de sa position au sein de la cour royale, on la considérerait comme une héroïne de guerre et louerait son courage face à ces abjects personnages, tout en lui assurant une merveilleuse publicité. Finalement, elle ressortirait gagnante de cette infortune, et peut-être même plus puissante encore. Si les locaux du Grand Port de la compagnie Althair étaient en train de brûler à l’extérieur, lady Belmont se disait qu’elle pourrait sans doute racheter les parts du vieux Jefferson et étendre son statut majoritaire. Sarah fulminerait sans doute plus, mais elle n’aurait plus de choix que de fermer définitivement son clapet, ou partir. Elle écarterait ainsi une gênante bruyante. Et si aucun rachat n’était possible, alors la situation ne changerait pas d’un pouce. Au moins, elle aurait la satisfaction de pouvoir s’afficher avec Sandro face à elle, attirant encore plus de rage et une certaine envie de Warren.
L’archonte roulait des mécaniques tout en lorgnant sur les bouteilles de vin rangées à sa droite. Malheureusement pour messire Richter, subtiliser une bouteille lui serait impossible, on verrait à mille lieux la protubérance du verre sous son veston. Olenna n’en aurait cure, mais cela serait d’un cruel manque de classe pour l’homme qui essayait comme il pouvait de faire celui maîtrisant la situation. La vérité était tout autre, ils étaient tous dans le même navire, lui compris. Mais il restait à supposer qu’il faisait partie des mieux lotis. Au moins, ni lui ni Olenna n’avaient leur père menacé de mort ni leur entreprise familiale, affaire d’une vie, qui se consumait dans les flammes. Oscar devait se trouver parmi les chanceux également, il avait une occasion de briller face à Sarah, bien que cette dernière ait, à juste titre, d’autres chats à fouetter. Quant à Nikolaos, ce dernier devait être la véritable cible de tout ce remue-ménage, tout le laissait penser en tout cas. Il était sans doute le plus malchanceux de cette épopée, mais il demeurait possible pour lui de retomber sur ses pattes. Le problème, c’est qu’il était en pleine chute…
Un bruit, la porte de la cave.
Elle s’ouvrit à la volée et une immense musaraigne à nez pointu s’engouffra à l’intérieur de la pièce, une bouteille d’Everluce à la main. Ce vin fort coûteux du Castel de Valmer avait la couleur du sang, un goût de fruits rouges et de violette, d’arrière notes acides d’épices et de prunes. C’était une boisson majestueuse, délectable, bien trop noble pour le palais d’un soiffard nauséabond comme lui. L’hybride referma la porte derrière lui avant de laisser tomber la bouteille, vide, sur le sol où elle partit rouler bruyamment derrière un petit tonneau d’hydromel à siroter. Alors qu’il s’apprêtait à attraper une nouvelle bouteille au hasard pour continuer de se saouler, son museau remua légèrement et l’homme-rongeur se tourna brusquement vers le groupe en fuite, pris la main dans le sac. Il s’apprêtait à bouger, sans doute pour dégainer quelque chose ou se mettre ventre à terre pour leur charger dessus. Mais Olenna fut plus prompte à réagir.
- Voyons si je suis si inutile que vous le pensez…
Enveloppant le manche du sabre dans un revêtement caramélisé, Olenna fit s’envoler la lame qui fusa à travers la pièce pour transpercer la main griffue de la musaraigne et la planter dans le mur. Épinglé sur la cloison, il s’apprêtait à crier de douleur mais en fut empêché par un flot de pâte sucrée rosée qui vint recouvrir ses lèvres. S’étalant sur son buste, la pâte se durcit pour le fixer sur place, entravé par ce qui, à l’origine, aurait dû servir à créer de délicieux berlingots. Olenna n’en avait pas terminé. S’avançant doucement au milieu des rayons de bouteilles, le regard impénétrable, elle glissait dans sa somptueuse robe à diamants telle une lamia vers sa victime. D’un mouvement de poignet, elle matérialisa des serpents de réglisse qui sinuèrent pour se nouer fermement autour de ses chevilles avant de redevenir inertes. Son autre bras n’était pas prisonnier et ballottait dans l’air en tentant de trouver prise sur n’importe quoi et s’en servir pour se libérer. La couturière royale matérialisa une nouvelle vipère de réglisse qui se glissa entre ses doigts, passant et repassant entre ses phalanges. Le craquement de ses os fut bien soudain lorsqu’Olenna ordonna au ruban noir de plier ses doigts, son entrave de sirop durci étouffant son cri de douleur.
- Nous pouvons accéder au jardin en traversant la salle de bal, fit-elle d’une voix de velours des plus glaciales. En remontant de la cave, il faut traverser le corridor jusqu’au bout. Hâtons-nous.
- Si Sandro avait été là, les choses auraient pu être différentes, ouais. Vous allez pouvoir tenir l’coup ?
Il regarda tour à tour le blond et la brune, captant entre deux le regard d’Oscar qui l’interrogeait, une nouvelle fois et silencieusement, sur la raison de sa présence ici. Le plus jeune des archontes allait encore devoir patienter, s’il ne devinait pas d’ici là par lui-même. Inaros était d’ailleurs très impressionné par son pouvoir et ce qu’il pouvait en faire. Le sang-froid dont il avait fait preuve et sa nonchalance à toute épreuve faisait grimper en flèche le capital sympathie, empathie et même fierté qu’il éprouvait à son égard. Les divinités avaient été bien lunées de le placer sur sa route. Par contre, il toucherait probablement un mot ou deux à ceux qui n’avaient de cesse de le tacler. Un mot. Ou deux. Ou trois. Il ne craignait pas le caractère sanguinaire de l’aventurière et il savait qu’il pouvait jouer franc-jeu avec l’homme d’affaires. Mais il n’allait certainement pas le faire maintenant et attendrait quelques jours pour savoir si les différentes relations entre chacun allaient s’améliorer une fois qu’ils seraient sortis de là.
- Les jardins, on essaie les portails, le bateau si ça marche pas. Belle journée, non ?
Suivant leur moyen de locomotion, chacun n’aurait ensuite plus qu’à promptement se diriger vers les deux institutions qu’ils avaient en visu : la caserne et les locaux de la Compagnie Althair. Il savait déjà où il irait : voir le patriarche Jefferson et constater l’étendue des dégâts avec lui ; en espérant que personne n’était blessé voire dans un pire état.
- Achève-le, on n’peut pas l’laisser en vie, même dans cet état, dit-il ensuite en direction de la Couturière royale.
Il ne voulait prendre aucun risque. Comme l’avait souligné Oscar, ils étaient extrêmement bien renseignés sur eux et qui sait quels renseignements ils détenaient davantage ? Chacun s’affairant à se remettre en route, Inaros profita de ces instants pour se glisser près de Warren.
- J’vais avoir b’soin de toi, plus tard. Il va falloir qu’on trouve qui étaient ces types, et j’pense qu’avec ton réseau, son regard se fit un peu plus insistant, il parlait bien sûr du réseau criminel qu’ils côtoyaient tous les deux contrairement aux autres, y’a sûrement moyen de trouver un ou deux trucs.
L’instant d’après, il lui tendait un morceau de bandage qu’il conservait dans la besace sans fond qu’il trimballait constamment avec lui - parce qu’on ne sait jamais - et le lui tendit.
- Tiens, prends ça. Pour ta jambe. T’as b’soin d’appui ?
Warren n’était que de cinq ans et demi son aîné et, avec les chemins qu’ils avaient empruntés, sensiblement proches l’un de l’autre et se croisant de temps à autre, Inaros le considérait presque comme son frère. Sandro et le défunt Stentor n’y étaient pas pour rien dans cette histoire. Une fois prête à repartir, la joyeuse troupe reprit donc son trajet vers le corridor et les jardins extérieurs.
Enfin, ils les atteignirent. Autour d’eux, il y avait plusieurs corps inanimés sur le sol et le mercenaire s’en approcha pour tâter leur poul. Ils étaient vivants et probablement de la maisonnée d’Olenna. Elle prenait déjà la direction du fameux portail mais, avant qu’elle ne fasse quoique ce soit, il jeta un nouveau coup d'œil à Sarah.
- C’est bon pour créer un portail ? Tu peux nous emmener à la Compagnie ? I t’faut autr’ chose pour les matérialiser ?
Il lançait d’autres coups d'œil furtif autour d’eux, espérant que personne ne viendrait les interrompre une nouvelle fois. Ils avaient eu de la chance mais ils étaient nombreux et se déplacer à autant laissait forcément des traces.
- Si tu peux pas faire d’autres portails, le reste du groupe partira à la caserne en bateau. Qui a quelque chose à dire contre ça ? Un meilleur pl…
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il reçut une fléchette dans le cou. Bordel, qu’est-ce que c’était que ça ? Ils n’étaient pas en mesure de se défendre, avec les blessures de chacun. Il arracha l’aiguillon de ses chairs, se maudissant d’avoir été aussi peu vigilant. Il contenait sûrement du poison et il n’allait pas tarder à découvrir lequel. En effet, à peine quelques secondes plus tard, sa main commença à se raidir. Paralysie, donc. La journée était définitivement encore plus belle que prévu. Au bout de dix secondes, il ne sentait plus ses bras et il était sur le point de perdre l’usage de ses jambes. Il n’était déjà plus capable de parler.
Allez les gars, vous allez assurer.
« Ou est-ce que tu mets tes mains là bordel ! »
Sarah protestait vivement contre Oscar sans pour autant le gêner d’une autre manière qu’auditivement. Elle décala l’une de ses mains qui avaient glissé inconsciemment dans des endroits dérangeants. Sara rageait intérieurement d’avoir à se faire transporter comme une princesse, mais elle n’était pas non plus stupide au point de penser que son saignement n’était que bénin. Elle voyait bien les petits points lumineux qui dansaient devant ses yeux … Et puis elle préférait les bras d’oscar à ceux de Warren qui d’ailleurs leur jetait des regards étranges. Va te faire foutre le jaloux.
Toutefois, au moment où Inaros s’effondra comme une merde devant eux, Sarah ne resta pas les bras croisés. Elle se déroba à l’emprise d’Oscar et matérialisa un portail devant eux pour les protéger d’autres fléchettes.
« Oscar ramasse le transsexuel, on se replie à l’intérieur ! »
Tout le monde rentra dans la salle de bal avec précipitation. Si les archontes finissaient tous paralysés, ils n’avaient aucune chance. C’était presque une armée entière qui les attendait là dehors et Sarah se demandait vraiment qui pouvait leur en vouloir autant. Ce n’était pas un peu disproportionné juste pour se débarrasser d’un concurrent ? Elle fut la dernière à rentrer, claquant les portes massives derrière elle, alors que des flèches et autres fléchettes empoisonnées fusaient sur le bois. Depuis l’intérieur, on pouvait entendre leur impact sur la porte, synonyme d’une mort certaine si on avait le malheur de la rouvrir.
« Comment va Inaros ? s’inquiéta-t-elle. »
Heureusement pour lui, le mercenaire n’était que paralysé et le poison n’avait pas affecté son cœur. Sarah laissa Oscar ou Warren s’en occuper et réfléchit. Depuis la salle de bal, elle pouvait voir la chambre d’un manoir un peu plus loin, de l’autre côté du jardin. Si elle pouvait avoir une ligne de vue dégagée, elle arriverait à ouvrir un portail.
« Oscar, Rufio, venez m’aider. Il faut qu’on renverse cette table et qu’on la place devant la fenêtre pour me protéger pendant que j’ouvre un portail. Aller, à la une, à la deux, à la troiiiis ! »
Avec l’aide des deux hommes, elle renversa la table devant la fenêtre. Heureusement que le goût d’Olenna pour les meubles imposant et lourd allait pouvoir leur servir de bouclier. Une flèche se planta immédiatement dans leur abri de fortune, mais son épaisseur ne fut qu’à peine entamée.
« Ton épée ! demanda Sarah à Oscar. »
Lorsqu’elle obtint enfin l’arme, Sarah entreprit d’y percer un trou, mais l’effort ne fit que lui faire perdre du sang davantage et elle dut abandonner cette tâche à Oscar qui lui perça un orifice suffisamment grand pour qu’elle puisse avoir une vue dégagée sans risquer de se faire percer le crâne.
« Allez tout le monde. J’ai de quoi nous faire tous passer dans le manoir d’à côté. Condamnez la porte. La moitié se rassemble devant moi, l’autre derrière moi. Lorsque le portail est ouvert chaque groupe entre le plus rapidement possible par chaque face du portail, bougez vous il ne sera là que quelques secondes ! »
Quand Sarah fut certaine que tout le monde avait bien compris, elle tendit ses bras et une forme ovoïde commença à se matérialiser devant elle. Tout d’un coup, les flèches et les carreaux d’arbalètes fusèrent à travers les vitres. Les archontes étaient hors d’atteintes, mais Sarah entendit Rufio glapirent de terreur quand un morceau de la table vola en éclat au-dessus de leur tête, manquant d’assommer la grande perche d’Olenna. Au bout de trente secondes, la forme floue s’ouvrit une chambre richement décorée.
« MAINTENANT ! »
Sarah se précipita dans le portail avec tout le reste du groupe à sa suite.
Signifiant sa désaprobation d'un mouvement de tête, il s'était tout de même emparé du bandage tendu par celui qui était à la fois son patron et son cadet ; eh, que ça fait bizarre, de se dire qu'un jeunot est au dessus de lui dans une quelconque hiérarchie. Il faut toutefois souvent s'en accommoder. Par contre, que le mal l'emporte s'il en venait à demander de l'aide, mourir serait plus honorable et surtout préférable au fait de devoir s'appuyer sur ce frêle corps de femme.
Le blond était étrangement silencieux alors que l'ensemble des archontes présents cherchaient toujours à trouver une faille, un fautif dans l'histoire. La justification du ''je dois me soigner là en fait'' serait suffisante pour ne pas se sentir encore plus visé. Savait-il qu'il n'avait rien à voir avec tous ces déboires ? Non. Rien n'était venu à l'encontre de ses craintes, que Wolfram avait bel et bien retrouvé ses traces aussi aisément qu'on repère un éléphant dans une forêt de bambous. Surtout que la démonstration de force de dame Belmont, au delà de son côté rigolo de par l'ironie d'utiliser des douceurs pour se trouver rugueuse, avait suffit au blond à comprendre de pas trop la titiller. Nan, surtout que c'était déjà Sarah qu'il aimait et aimerait titiller.
Laissant le groupe s'éloigner quelque peu ; Oscar jouant toujours le chevalier servant pour une Jefferson toujours aussi ingrate ; ce qui fait son charme, même en train de se vider de son sang ; il se posa non loin de l'espèce d'hybride immonde qu'Olenna avait littéralement laissé collé là, brisa la hampe et la tête du carreau -car retirer le fut serait du suicide- non sans grimacer, il a beau s'en être pris des vertes et des pas mûres dans le passé, il faut pas oublier que Warren est maintenant un trentenaire, enfin, un jeune et fringuant trentenaire, qui n'a plus la résilience de sa vingtaine, puis entoura sa blessure précautionneusement, prenant tout de même soin de bien appuyer dessus.
C'est avec une patte traînante qu'il apercevait de nouveau tout le reste du groupe, enfin, pour une courte durée, puisque Inaros tomba genre subitement, après s'être reçu quelque chose. S'il pouvait courir, il l'aurait fait immédiatement. Si bien qu'il dut traîner sa carcasse à la suite des autres, devant bénéficier de la couverture de l'autre blessées de la bande, tout en aidant autant que faire se peut Oscar à traîner également Inaros en sécurité dans la salle de bal, alors que même une fois les portes fermées et les archontes relativement protégés, les flèches et autres projectiles fusaient encore, s'écrasant contre les parois, dégâts qui seront à la charge de l'hôtesse bien sur, si ça arrivait chez lui, il serait déjà en train de péter un câble et s'évanouir face à tous ces cristaux qui s'envoleraient. Alors que Ruffio et Oscar obstruaient tant bien que mal les lignes de vue, Warren, lui, se souciait plus du sort d'Inaros.
'' Il va bien, le salop. Même pas il dort ou il est inconscient, juste raide comme un mec qui serait resté trop longtemps sur la quille. Ça va du coup ? On s'accorde un petit repos ? ''
Son avantage, c'est aussi ça, même dans les pires situations, il sera toujours là pour vous les briser en deux. Après, il se permet, car la situation est loin d'être aussi désespérée, aucune idée de qui a bien pu engager ces bras cassés, bien qu'il ait son idée, mais en tout cas, ils ont affaire à des personnes qui sont loin d'être la crème de la crème, avec ces effectifs, en quantité mais non en qualité s'entend, Warren aurait pu renverser facilement les petits hommes d'affaire de l'archipel et s'approprier le lieu en termes d'économie. S'ils sont toujours en vie, peut-être y a-t-il un intérêt à ne pas les voir morts ? Oui, ce sont bel et bien les réflexions d'un mec qui s'est prit un carreau carrément hostile dans la jambe, donc pour ce qui est de les laisser vivre...On repassera.
'' Bon, Ruffio, tu vas finir par te bouger et venir m'aider ? C'est pas avec une jambe valide que je vais me trimballer sa seigneurie partout ! ''
Au signal de Sarah, il s'était emparé d'Inaros, on peut pas dire que le corps hôte soit bien lourd, bien qu'elle abuse peut-être de certains petits fours, on sait pas, mais avec un appui restreint, porter une personne incapable de se mouvoir relevait du défi, et c'était bien plus pratique de demander au pantin articulé qu'au gamin de venir l'aider, surtout que pour rendre à Oscar ce qui appartient à Oscar ; il en a déjà bien assez fait ces quelques dernières secondes, on peut le laisser souffler un peu.
'' Bien sur, après vous, Lady Belmont ; je n'en ferais rien. ''
Ainsi, le trio Warren-Ruffio-poids mort s'engouffra dans les derniers dans le portail. Ils n'étaient plus dans le domaine de l'archonte de la cité aquatique, mais bel et bien dans un tout nouvel édifice qu'il ne saurait distinguer ; comme s'il avait tout visité, surtout que toutes ces demeures de riches du coin s'assemblent et se ressemblent. Cela arracha tout de même un sifflement des lèvres de Warren.
'' S'il faut investir quelque part ; c'est dans le coin hein. Sans vouloir marcher sur tes plates bandes, Sarah. En tout cas, on peut pas se permettre de traîner, et faut continuer d'éviter les fenêtres -un carreau, quand il y en a un, ça va, c'est quand il y en a plusieurs que ça peut poser problème. '' Il se dirigea vers la porte, en tourna la poignée et- par tous les saints, elle s'ouvre ! Dingue ça, elle aurait très bien pu être fermée, qu'elles étaient les chances ? De toutes façons, personne n'essaye de crocheter ou défoncer une porte avant même de vérifier si elle est ouverte, non ? '' Sur ce. ''
Il passa le seuil en premier, le menant dans un long couloir. Il laisse le soin aux autres de s'occuper d'Ina la statue, lui-même et Sarah ont sans doutes d'autres préoccupations, du genre, oh, aléatoirement, de survivre.
Le rôle de camaraderie étrange des archontes avait tout de même réussi l’exploit de les garder tous en vie, et Lucy seule savait à quel point cela pouvait se montrer bien plus incroyable que ce qu’il n’y paraissait. Les vives exclamations de chacun fit sortir le jeune aventurier de ses pensées, puis suivit Warren sans un mot afin de vérifier quel était la situation. Un long silence parcourut par l’écho de leurs pas – et ceux clopinant de l’insupportable Richter - régnait dans les lieux. Aucun propriétaire dans les lieux afin de leur sommer de disparaître, aucun domestique ? C’était assez étonnant en regardant les riches décorations qui parsemaient leur chemin qu’aucun chien de garde ne leur soit sauté dessus.
Poussant un profond soupir, il devança l’archonte de la Capitale afin de rejoindre les escaliers. Oscar s’y prenait méticuleusement dans le cas où une autre menace puisse surgir à tout instant, bien vite interrompu par une voix grave.
“Que faites-vous chez moi ?!”
Un léger sursaut, l’aventurier se retourna vers l’hôte des lieux qui le jauger à travers la rambarde des escaliers, une rapière dans la main. Rapidement, l’orbe émeraude se posa sur le blessé à l’étage avant qu’il ne revienne porter sur le vieil homme plus bas. Il mit quelques secondes à chercher ses mots, mais sa posture montrait bien qu’il n’était pas une menace, détendant légèrement les épaules de l’hôte des lieux.
“Nous avons atterris chez vous par accident, commença le jeune archonte d’un ton posé. Et certains de mes comparses sont blessés.”
Il lui résuma brièvement la situation sans rentrer dans les détails lorsqu’enfin il put avoir son attention. Et l’empathie qu’il put lire dans son regard fit baisser légèrement la garde de l’aventurier. Par chance, rien d’autre ne lui fut demandé si ce n’était de laisser les blessés se reposer en attendant que les soins leur soient apportés.
Il était retourné à l’étage afin de prévenir ses collègues de la situation. Peu importaient les regards qui lui étaient lancés. C’était une situation suffisamment critique pour les blessés, et tous devaient être épuisés.
“J’ai un ami non loin qui est médecin, je l’ai fait quérir pour vos compagnons. Prenez le temps qu’il vous faudra pour vous en remettre en attendant que la garde agisse.
- Je vous en suis reconnaissant, le remercia chaudement Oscar avec un doux sourire. Et je suis navré de vous imposer notre présence.”
Entre de bonnes mains, cette histoire finirait sûrement très vite, alors que l'hôte les laissa enfin seuls. La journée s’était montrée intense et impitoyable, il était de fait évident que chacun puisse souhaiter rentrer chez soi. Lui le premier, cela étant dit. Et bien que la majorité de leur problème soit résolue, il demeurait le questionnement concernant la présence des bandits chez la lady. Et jusqu’où s’étendait toutes les informations qu’ils possédaient sur la compagnie. Une légèrement migraine saisit le crâne de l’archonte qui laissa cette histoire de côté, il aurait tout le temps d’y repenser à tête reposée.
Oscar observa à travers la fenêtre, la vaste cité portuaire s’agiter dans tous les sens alors que la fumée des quartiers du patriarche Jefferson s’atténuait. Garde déployée, il était certain qu’ils ne tenteraient plus de nouvelles attaques en plein jour. Puis il observa le corps encore raide d’Inaros. Il poussa un profond soupir en glissant machinalement sa main entre ses mèches brunes.
“Je suppose qu’il va falloir te cacher aux yeux de la garde le temps que tu te remettes du poison, fit remarquer le jeune archonte en croisant ses bras sur sa poitrine.”
À nouveau, il porta son attention sur les ruelles de la ville, avant qu’il ne vienne passer son bras sous son épaule pour le soulever.
“Je vais bien nous trouver une auberge, mais il vaut mieux pas que tu restes ici.”
Emportant le corps inerte du mercenaire avec lui, Oscar sortit de la chambre.
“Débrouillez-vous pour le reste, conclut-il.”
Ce n’était qu’une impression vague qui laissait supposer de l’agacement de l’aventurier. Dans cette histoire, il n’avait au final été qu’une victime des déboires de chacun, alors que les plus grandes gueules du groupe n’avaient fait que l’ouvrir.
Se tournant vers l’hôte une fois en bas des marches, il lui sourit légèrement.
“Il est seulement ivre, je vais l’emmener se reposer ailleurs pour ne pas qu’il cause de dégâts, lui annonça Oscar affable avant de sortir du bâtiment. Encore merci pour votre bienveillance.”
Qu'il le croit ou non, ce n'était plus son problème, il souhaitait juste s'échapper pour permettre à Inaros de pouvoir s'en remettre sans rencontrer de difficultés lié à la justice. délaissant cette affreuse journée derrière lui, l’archonte entraîna le mercenaire jusqu’à l’auberge la plus proche. C'était un fait, la prochaine fois, la réponse à la missive serait négative.