Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Entre mes retrouvailles avec Luz, l’inquiétante disparition de ma sœur, mon affrontement avec l’étrange Calixte, ma cuite au festival … Il est temps pour moi de me remettre sur les routes des quêtes. J’aurais préféré rester en ville au cas où l’enquête avance sur Calia, pour le moment l’affaire stagne et moi je me ronge les sangs. Mener l’investigation moi-même n’avait pas donné grand-chose, faire comme si de rien est me fatigue. Même Carci m’a fait une remarque la dernière fois. La seule personne à qui je peux en parler – que Lucy soit bénie pour ce cadeau – est Luz. Nous en avons discuté un soir, elle n’est pas sans savoir la disparition des jeunes femmes dans le royaume, dont Calia. Mais je préfère pimenter nos douces rencontres de sentiments plus enthousiastes. Pour l’heure, j’ai besoin de souffler, sortir à nouveau de ce train train quotidien. Partir à l’aventure, après tout, c’est ma vie maintenant. Le cristal de communication me permet d’être contacté si la situation l’exige, Arban Höls n’est pas sans le savoir.

C’est tout naturellement que mes pas me mènent à la guilde, ma deuxième maison. Je parcours le tableau des quêtes, à la recherche d’une mission simple qui me fera changer d’air sans trop me prendre la tête, ni perdre du temps. Je tombe alors sur ces mémoires oubliées. Le nom m’interpelle, l’ordre qu’il contient est adopté. L’arbre sacré de la grande forêt … De nombreuses fois je me suis rendue au village perché, je dois avouer que c’est un endroit que j’affectionne particulièrement. Je me vois bien finir ma vie dans une de ces maisons suspendues où la nature règne. Mais ça, on y est pas encore, j’ai encore de longues années devant moi avec son lot de péripéties et de dangers.
Je me rends au comptoir faisant signe à l’une des hôtesse afin de m’inscrire.

- Oh nous attendions justement un deuxième aventurier pour cette mission, votre futur camarade va être ravi d’apprendre que vous allez pouvoir partir. Il se nomme …

- Ne te donne pas cette peine, surprise!

Je tapote le bois avant de commencer à repartir, en me retournant je finis cette presque discussion.

- Donne lui rendez-vous demain ici le temps que je rassemble mes affaires.

Un signe de la main et je disparais.

Le lendemain est vite arrivé, ma préparation a été rapide, tout mon matériel est minutieusement rangé dans mon studio, être organisé est primordial quand on vit dans une petite surface, et ça permet de vite rassembler le nécessaire en cas d’alerte. Bon okay vous avez raison, je suis maniaque ! Voilà c’est dit, content ?
Je me rends de nouveau sur mon lieu de travail pour retrouver l’hôtesse, harnaché de mon grand sac sans fond. Il faut le dire, c’est une merveilleuse invention, j’ai de quoi affronter une armée avec ce qu’il contient, et il pèse à peine quelques kilos de plumes. Je sais bien qu'il ne s'agit que de la recherche d'un livre, mais on est jamais trop prudent, surtout avec ce qui traîne dans la grande forêt.
D’un haussement de sourcils je demande à la jeune femme si mon coéquipier est arrivé, je n’ai pas très envie de parler, heureusement qu’elle me connaît bien. Sans un mot son doigt pointe vers une tête blonde que je ne pensais pas recroiser de si tôt. Nous nous étions vu au festival, agissant comme si de rien ne s’était passé. Après tout, notre entrevue n’était que de courte durée. Courtois l’un avec l’autre, il faut dire que Carci l’avait bien monopolisé.
De là à faire une mission avec lui … Si Lucy en veut ainsi, qu’il en soit ainsi. Je ne pense pas que les chose arrive par hasard.
Je lui tend la main pour serrer la sienne.

- A qui ai-je l’honneur?

Je fais référence à ses nombreux rôles, je ne sais réellement pas sous quel nom il s’est inscrit à la guilde. Pourquoi faire une quête ? Est-elle emprunte d’informations capitales pour la garde ? Quelque chose me dit que ce livre est loin d’être anodin.

- Pas besoin que je me présente n’est-ce pas?

Ne commence pas à ouvrir les hostilités Naë, tu es là pour prendre l’air et oublier le stresse de la Capitale … Loupiac, mon familier, sort la tête de mon chèche et gazouille. Je crois qu’il reconnaît Calixte et s’envole autour de lui.

- Es-tu déjà allé à l’arbre sacré ? J’imagine que tu as un accès aux portails de téléportation. Mon idée est de rejoindre l'un des villages alentours et, si tu n’as pas de montures, louons en sur place. Ça te va?

Comme lors de notre investigation dans la citée enfouie, mon leadership prend le dessus. Je tâcherai de ne pas être aussi directif que sous terre.

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Mémoires oubliées

─ avec Calixte

La surprise semble partagée. Calixte reste un instant interdit en me découvrant et reprend vite contenance. Il ne prend même pas la peine de répondre à mes questions – à mes attaques devrais-je dire – je suppose donc qu’il est ici en tant que lui, Calixte. D’ailleurs, puis-je le croire lorsqu’il me dit être Calixte ? N’est-ce pas un autre personnage de sa panoplie ? Celle de l’aventurier innocent ? Je souffle en moi-même, qu’est-ce que ça change de toute façon ?

Nous ne tardons pas à partir après les dernières recommandations de l’hôtesse. Nous allons directement au portail de la Capital pour nous faire téléporter à celui de l’Arbre sacré, ou d’un village alentour. Sauf que voilà, il n’y en a pas. Je suis étonné, et à la fois pas tant que ça. L’Arbre sacré est un lieu de recueillement, et comme souvent, l’accessibilité y est réduite pour laisser place aux plus fervents. Mon coéquipier insiste, désespérément. Moi non plus mon cher je ne me réjouis pas de passer tout ce temps avec toi, pourtant il va falloir te faire une raison « mon pote », songé-je en mon for intérieur. Ce sera notre chemin de croix à tous deux. Je finis par lui tapoter l’épaule avec un signe de tête vers la sortie. Ça ne sert à rien de supplier davantage, ils vont pas l’inventer le portail.

Nous voilà affublé de deux magnifiques Rapidodos, l’avantage de ces bestiaux, leur vitesse. Ça secoue pas mal mais une fois qu’on s’adapte au mouvement la balade n’est pas si désagréable. Le silence est maître de notre traversée, je n’ai jamais fait l’effort de parler avec mes anciens acolytes - sauf Carciphona qui pourrait faire parler un mur - pourquoi commencerais-je aujourd’hui ? Pour briser la glace me direz vous ?! Quelle glace ? Je suis plutôt tranquille à vrai dire, et surtout indifférent à l’espion. Je ne vais pas l’ignorer non, ce n’est pas ce que j’ai dit … Faut-il vraiment tout vous expliquer ? Bien sûr que s’il me parle je lui répondrais ! Mais dans un accord tacite, ni l’un ni l’autre ne prononçons un mot.

Nous croisons un tas de beau monde, je suis sûr que cette foule se raréfiera au fur et à mesure de notre avancée. Je préfère d’ailleurs éviter les premières auberges souvent bondés et aux clients un peu … farfelus dirons-nous. Calixte ne dit mot et me suis. Nous trouverons un couchage douillé un peu plus tard, mais ça, je ne prends pas le temps de le lui confier. Je me dirige vers un terrain pas trop accidenté où nous pourrons nous poser sans trop souffrir d’un sol difforme. Le bruit du ruisseau est réconfortant je trouve, l’eau est un élément apaisant. Mortelle, oui, mais apaisant lorsqu’il coule en toute quiétude comme ce soir. Je laisse le garde s’occuper du feu, il semble bien parti pour le faire. Je commence à me confectionner un hamac avec mon cordage et la toile, les troncs sont à parfaite distance !

Calixte part alors dans une palabre sur le repas à la Caserne qu’il propose d’améliorer. Je sens son anxiété et je décide de jouer le jeu. Après tout, nous allons nous supporter ainsi quelques jours, autant que ce soit de la plus agréable manière possible.

- Comme tu dis, profitons de ce que nous offre la nature et gardons ce … flan, en cas de coup dur.

Je suis sur le point de révéler mon amour pour la cuisine en bivouaque quand une voix me stoppe net. Alerte je regarde autour de nous, je n’ai entendu personne approcher. Et pour cause ! Voilà qu’une … trousse ?! déblatère. Elle me drague même, j’hausse le sourcil devant cet enchantement … Ou maléfice si l’on en croit le visage décomposé du garde.

- AVEC QUOI TU VEUX MANGER LE SEL ?

Qu… Quoi ?! Cette situation est invraisemblable, cette trousse est invraisemblable, Calixte est invraisemblable ! Non sérieux tout ça est réel ? J’éclate d’un rire franc et communicatif. La tension accumulée ces derniers temps s’évacue, et mon rire ne cesse, j’en ai les larmes aux yeux. Je n’arrive plus à m’arrêter, surtout en revoyant la mine déconfite du blondinet. Lorsque j’arrive enfin à me calmer, je reprends mon souffle avant de regarder mon binôme :

- Tu m’expliques?

J’attrape mon fil de pêche que je fixe sur un bâton qui me semble assez souple puis j’’y attache l’hameçon. J’écoute l’espion avant de me lever et de me diriger vers le ruisseau, lui faisant signe de me suivre.

- Apolline donc … Et bien Apolline je suis enchanté.

- Pas autant que moi beau gosse ténébreux. D’ailleurs si tu …

Calixte la fait taire dans ses mains. Je tique avant de sourire, c’est comme ça que Carci me surnomme. Décidément. Je sens que je ne vais pas m’ennuyer avec cette trousse, et encore moins avec la décontenance de son détenteur.

- Je vais t’avouer un petit secret sur moi Calixte … J’adore cuisiner ! Et encore plus dans ces conditions.

Il faut l’avouer, même si le froid commence à mordre le bout de mon nez le temps est idéalement calme. Je jette le fil dans l’eau et attends patiemment que ça morde, chose qui ne tarde pas à arriver. La pêche à l’éperlans est simple et rapide. Et je dois cela à mon amie d’aventure avec qui nous avions fait un concours dans cet art dont je ne connaissais rien. Autant dire que j’ai lamentablement échoué.
Je nous prépare notre premier dîné en tête à tête, grillant les petits poissons avec quelques herbes aromatiques qui relèvent le goût avec douceur.

C’est ainsi, grâce à l’âme artificielle, que nos rapports deviennent beaucoup moins distants. J’ai l’impression de retrouver en Apolline une Carciphona bis. En bien plus crue et aux histoires bien plus alambiquées. Adieu tranquillité.
Une routine s’installe déjà entre nous, je me charge du repas, tantôt chassant, tantôt cueillant fruits et herbes consommables, tandis que l’espion prépare le feu et le campement. Le nombre d’auberges s’amoindrit avec la distance, au troisième soir nous en trouvons une, sobre et impersonnelle, presque austère. Je propose à l’homme d’y passer la nuit, un vrai lit ne nous fera pas de mal.

- Nous devrions arriver demain dans la matinée.

Nous laissons la propriétaire se charger du repas qui se définit en une simple soupe, simple, mais bonne. Un velouté de champignons fraîchement cueillis.

- Ça m’rappelle la fois où le vieux Galiot, v’savez j’vous en ai parlé la dernière fois, celui qu’avez des vers au derch là …

- Oui Apolline on s’en souvient, si tu pouvez éviter de nous rappeler ça …

- Ah, sensible le beau gosse ?! Se moque-t-elle. Ben vous d’vinerez jamais où il avait des champis le vicieux !

Mon moment préféré, je regarde Calixte qui ne sait plus comment faire taire l’âme. Ses yeux s’affolent, ses mains s’agitent, ses joues s’empourprent en voyant la dévote aubergiste nous fixer d’un sale œil. Je vole à son secours.

- Epargne nous la suite Apolline et écoute bien, ce soir c’est moi qui raconte une histoire.

Intriguée la trousse se calme, ou boude je ne sais pas. Je sors alors mon petit sac sans fond et quelques Origamis qu’il contient. Je conte l’histoire d’un bushi - ce guerrier gentilhomme – sur son destrier, à la quête incessante de gloire qui lui vaut les défis de Lucy. De mon sablier gousset je fais prendre vie aux pliages qui s’animent sous mes paroles.

- Hé tiens tu voudrais pas faire intervenir ça aussi ?!

Apolline recrache de son précieux contenant le Centipède multicolore que j’avais fait pour l’espion lors du festival du Solstice. Je fronce légèrement les sourcils avant de sourire avec douceur au jeune homme. Moi qui pensais que le papier avait fini brûlé … Je l’intègre alors à l’histoire, dans une farouche lutte entre le samouraï et le monstre.

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Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Nous arrivons dans un clairière, la fraîcheur matinale éveille les sens, le soleil déjà bien présent réchauffe la peau de ses rayons lumineux. J’adore ces moments là, la chaleur et la froideur s’harmonisant dans une atmosphère pure. Je ralentis le pas de mon Rapidodo, émerveillé par le spectacle devant moi. Un arbre, non, pas « un » arbre. L’Arbre ! Je l’ai déjà vu en représentation, peint dans des livres ou en tableau. Déjà qu’il me semblait magnifique … La réalité est bien plus belle. Nous nous rapprochons, les racines s’entremêlent au sol sur des dizaines de mètres autour de l’imposant tronc avant de plonger au centre de la terre à la recherche de substrat. Je détaille l’être feuillu, la nervure de ses écorces, et le jeu de lumière dans ses feuilles, reflétant les couleurs chatoyantes que cette saison aurait pourtant dû ternir. Je reste ainsi subjugué avant de remarquer les gens autour de nous.

Sans parler, Calixte et moi nous comprenons. Paradoxe de nos relations, nous semblons être sur la même longueur d’onde jusqu’à ce que Monsieur vrille dans une crise de personnalité. L’instant est trop onirique pour que je me soucis de son côté menaçant, et, descendant de ma monture, je me rapproche de la femme âgée. Lui proposant mon aide je fais s’asseoir mon Rapidodo pour qu’elle puisse monter dessus. Elle refuse, ça se mérite de prier au pied de l’Arbre Sacré ! Je lui offre alors mon bras qu’elle accepte sans rechigner. Dans cette ambiance sereine ma voix grave, bien que basse, semble résonner. La brise s’amuse entre les branches de l’imposant végétal, nous offrant une mélodie jouée par les feuilles des plus agréables.

- Cela fait longtemps que vous venez Le voir?

Unique en son genre je ne peut que personnifié l’Arbre. Est-il l’oreille de Lucy sur notre terre ?
La femme me répond de sa voix tremblotante que ce sera son dernier pèlerinage en ce lieu, pour son plus grand désarroi. C’est pour cela qu’elle tient tant à arriver jusqu’au bout par la force de ses vieilles gambettes.
J’aperçois derrière le tronc de la fumée, en décalant légèrement la tête une masure d’où cette dernière provient. Je ne pensais pas qu’il y aurait une habitation si près du feuillu. Peut-être une auberge pour le repos des voyageurs fatigués par le long périple ? Quel qu’il en soit, nous aurons sûrement nos chances de trouver ce que nous recherchons – à défaut, au moins des informations dessus – dans ce lieu.

La voix d’Apolline nous parvient, forte – bien trop à mon goût – prête à traumatiser toute une classe par ses histoires. Voilà que je suis devenu une monnaie d’échange … Ma petite mamie semble accablé par les propos de l’âme, j’hausse les épaules d’un air contrit.

- Dites Madame, auriez-vous entendu parler d’un livre perdu ici même?

Et là je me rends compte du peu d’information que nous avons. Je suis incapable de décrire l’objet, ni de dire ce qu’il contient. Perturbé par l’identité de mon coéquipier j’en avais oublié de poser quelques questions à notre hôtesse. Bigre, j’espère que nous aurons de la chance ...

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Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Marchant à l’allure de la femme, mon bas la soutient jusqu’au pied de l’Arbre. Loupiac virevolte dans les airs, heureux comme jamais de cette balade matinale. Il se perd dans les branche du millénaire pour revenir vers moi, puis repartir. Je souris de le voir si jovial, sa joie est communicative. Je m’apprête à repartir, pensant que mamie ne veut me répondre. Je me méprends et suis attentif à ses paroles. Une légende ? Ça m’intéresse ! Allons voir cet aubergiste !
Elle me retient quelques secondes de plus avec une phrase mystérieuse que j’ancre dans ma tête.

Tenant mon rapidodo d’une main je part retrouver Calixte à pied, mon Chantelune sifflotant des airs mélodieux pour le bonheur des pèlerins présents. Je retrouve mon coéquipier afféré avec les enfants, proposant un tour de rapidodo contre Apolline. Pauvre ami, tu ne sais pas que tu viens de louper une occasion de te taire là ! Évidemment les gosses vont vouloir faire un tour sur le dos de l’animal, TOUS les gosses !

- Calixte ! Je me rends à la taverne là bas, il y aurait une légende sur un bouquin caché dans cet endroit, et l’aubergiste en saurait plus apparemment.

Je commence à partir et la voix des gamins se bousculant pour essayer en premier le rapidodo me parvient. Vais-je réellement laisser Calixte se débrouiller seul avec les minis tornades ? J’aimerais vous dire oui, tellement … Mais dans un élan de gentillesse je propose à la marmaille ma propre monture, ça ira plus vite. Après tout, c’est à deux que nous avons commencer cette mission. Tout en faisant le tour de l’arbre rapidodo en main et garnement sur rapidodo, je continue à parler à mon acolyte tout en ignorant les exclamation de l’enfant – je veille tout de même à sa stabilité sur l’animal, je ne voudrais pas me retrouver avec une maîtresse en furie sur le dos à cause d’un bambin blessé.

- Mamie m’a aussi dit que la curiosité n’est pas un si vilain défaut que ça. Même si ça ne nous fait pas avancer, je crois que c’est important que tu le saches aussi.

La communication ! Une clé importante pour résoudre le mystère du livre et en finir. Plus nous échangerons sur ce que nous savons, nos déductions, plus nous pourrons avancer. Du moins je l’espère.

Après nous être occupé des derniers veinards je me dirige enfin vers l’auberge fumante, Apolline faisant ses adieux aux mains tripoteuses et Calixte à ma suite. Loupiac profite et reste sur une branche de l’Arbre. Je reste en lien télépathique avec lui. Je ne dis rien mais … ce petit Chantelune est mon petit protégé, je l’ai vu grandir et je me suis vivement attaché à l’oiseau. J’attache la monture à l’extérieur avant de rentrer dans le lieu.

- Bonjour! salué-je les présences en me dirigeant instinctivement vers le feu réchauffant l’atmosphère.

Ici l’ambiance est paisible, je n’ai presque pas envie de déranger qui que ce soit. Il va bien falloir si l’on veut retrouver notre livre.

- Je suis désolé de vous importuner, dis-je à l’attention de la personne s’occupant du service. Connaissez-vous une certaine légende sur un livre important qui serait caché dans les parages ? Une pèlerine m’en a vaguement parlé il y quelques minutes, mais elle n’en sait guère plus.

J’en profite pour commander un thé, histoire de me réchauffer le temps d’écouter notre hôte.

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Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Pas très avenant le gars … Et quand il parle, je pipe pas grand-chose. Je me concentre ce qui a pour effet de me faire froncer légèrement les sourcils. Si je comprends bien, il faut retourner à l’Arbre. Ça nous fait une belle jambe tout ça. Je finis mon thé tranquillement, remercie l’homme malgré son caractère acariâtre et je fais signe à mon acolyte de ressortir. Je contacte Loupiac par télépathie, et par des images simples j’arrive à lui faire comprendre que nous recherchons un livre autour du millénaire végétal.

- T’as compris tout ce qu’il a dit toi? demandé-je à l’espion.

C’est la trousse en cuir qui prend la parole, à croire qu’elle aime se faire la voix de Calixte.

- Pas compliqué ! Il a dit de chercher autour des racines et de faire gaffe au trou, énoorme trou qu’il a dit ! Ça m’rappelle la fois où …

Je n’écoute déjà plus l’âme artificielle. Un trou ? Tiens, et si justement nous le trouvions plutôt que de l’éviter ? J’en fais part au blond qui, dans sa plassitude me suis dans mon idée.

- D'ailleurs tu en a appris plus auprès du client ?

De retour au pied de l’Arbre je respire un grand bol d’air, fermant les yeux.
Nous nous mettons sans tarder à la recherche du fameux trou, et c’est mon collègue qui le trouve une dizaine de minutes plus tard. Je rappelle Loupiac, qui se pose sur mon épaule. C’est vrai qu’elle est imposante ce cavité …

- Calixte, je vais demander à Loupiac de voir s’il y a quelque chose là dedans, pour ça je vais utiliser le partage de sens. Je serais aveugle et sourd le temps de son exploration, peux-tu veiller sur nous?

Je m’assoie en tailleur sur une racine, casse un veruminescent que je glisse entre les pattes de mon Chantelune. C’est un peu lourd pour lui mais il le tien, je ferme alors les yeux et la magie opère.

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Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Le partage de sens est une expérience bien étrange et unique. Je vois, j’entends et je ressens ce que Loupiac vit. Mais je ne contrôle pas les mouvements. C’est comme être emprisonné dans un corps qui ne vous apparient pas. Au final, c’est exactement ça. Il y a quelque chose de frustrant, qui peut vite se transformer en angoisse pour le plus claustrophobe d’entre vous. Fort heureusement ce n’est pas mon cas. Je suis concentré sur ce qui m’entoure, enfin ce qui entoure mon Chantelune. De la terre, des racines, le bruit des insectes qui fuit la venue de l’oiseau. Et surtout ce long tunnel. Creusé par un foreur ? J’essaie de repérer la présence de déjection de l’animal en vain, Loupiac est trop absorbé par sa descente linéaire.

Au bout de cette galerie, trois nouveaux chemins. L’un d’eux est à moitié ensevelit, on peut sûrement y passer en rampant mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. Après tout, s’il y a eu un éboulement peut-être que, si le passage continue, il est de nouveau bouché plus loin. Toujours est-il que deux autres tunnels se prolongent. Mènent-ils quelque part ? Je pense que ça vaut le coup d’explorer les souterrains. Non pas que j’adore particulièrement ce milieu, c’est plutôt l’inverse, surtout depuis notre mésaventure avec Calixte. Cependant la curiosité prend le dessus, mon instinct me dit que l’on va y découvrir quelque chose. Peut-être pas le livre, peut-être pas un trésor, peut-être une nouvelle mésaventure mais j’espère me tromper sur ce dernier point.

Je préviens Loupiac de nous attendre tandis que je coupe notre lien sensoriel. Revenant à moi j’ai l’impression de sortir d’une lourde sieste. Je cligne des yeux pour réhabituer ces derniers à la lumière du jour, inspirant profondément pour revenir totalement à moi. Tendant la main au garde pour qu’il m’aide à me relever, je commence à lui faire part de mes observations. Il reste à m’observer avant d’attraper mon bras, comme pris d’un débat intérieur sur le comportement à adopter. Je ne fais aucune remarque, continuant de préciser les différents tunnels creusés sous nos pieds.
Faisant le tour de l’inventaire nous décidons de descendre avec la simple corde de l’espion. En espérant que personne ait la mauvaise idée de la décrocher une fois que nous serons sous terre… Mettant mes lunettes de jour je suis le premier à m’engouffrer dans les profondeur de ce sol, arrivant au niveau de Loupiac l’animal se pose sur mon épaule, gazouillant de satisfaction. Je lui caresse le ventre avant qu’un poids ne s’affaisse sur moi. Je retrouve mon coéquipier toujours aussi adroit … Ça y est, je suis déjà plein de terre …

- Bon, quelle galerie veux-tu explorer?

Demandé-je tout en m’époussetant. Il est hors de questions que nous nous séparions, trop d’inconnus pourraient entraver notre périple, et les risques trop nombreux pour les affronter seuls. Via les lunettes de jour je peux apercevoir un sol un peu plus meuble sur le chemin du milieu, j’en fais part à Calixte et ensemble nous décidons de l’emprunter. Avant de nous jeter la tête la première dans ce labyrinthe j’active ma ficelle enchantée afin de revenir ici à tout moment de l’expédition.

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Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Notre exploration débute à peine que nous commençons par une rencontre avec des rats géants … Ce sera toujours moins dangereux que les fabuleux Centipèdes qui nous avaient accueillis dans les souterrains de la cité enfouie.
Toujours est-il que les grosses bestiales émettent des sifflements hostiles à notre attention. Très bon choix de chemin Naë, m'exaspéré-je pour moi même. Pas plus gros qu’un petit chien ce n’est pas la taille dont je me méfie, mais bien des incisives de l’animal qui sont tranchantes et surtout potentiellement porteur de je ne sais quelles maladies ou infections.

Loupiac se loge dans mon chèche, non seulement il n’y voit plus rien mais pour lui les rats sont de véritables mastodontes. Je lui envoie des images rassurantes pour le calmer tandis que j’attrape ma dague retour, la lançant vers les deux rats qui me font face, plus pour leur faire peur que pour les blesser.

- Allez ouste!

Dis-je de ma voix grave. Calixte s’anime, préparant une attaque à son tour. Trois rats s’avancent vers lui, je tape du pied espérant produire un bruit sourd qui les feras déguerpir. Au lieu de cela mon panard s’enfonce dans le sol meuble amortissant tout bruit provocateur. Super ! Une brillante idée.

J’arme mon arbalète d’une flèche simple, prêt à tirer sur le premier rat trop agressif.

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