Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Calixte prend part à la discussion et se révèle être un fin interrogateur. Nous marchons lentement dans le couloir, suivant notre hôte ectoplasmique. Je tique une première fois lorsque Krev annonce l’âge du livre et donc l’âge supposé de son auteure. Hel n’est donc plus en vie ? Pour qui faisons nous la mission alors ? Je croyais qu’elle en était la revendicatrice ? Il me paraît inconcevable que quelqu’un vive aussi longtemps … Sauf si Hel est comme Krev.

La second révélation me fait l’effet d’une douche froide. Je me stoppe net en l’entendant. Comment ça personne n’est ressorti vivant de ce livre ? Mon désarroi intrigue Loupiac qui vient se blottir sur mon épaule, laissant l’être flotter mollement seul au dessus du sol.
Mon coéquipier demande comment les autres sont morts … Je ne suis pas certain de vouloir le savoir, mais cela nous aidera peut-être à survivre ici. Et si en fait ils étaient toujours coincés à errer dans le labyrinthe des pages ? Je commence à culpabiliser d’avoir embarquer ce beau monde là-dedans.

- Quitte à mourir, autant vivre les meilleurs moment de ma vie ! Cal, Naë, vous venez? J’ai un gros trou à combler …

Surenchérit Apolline de sa voix salace. Diantre on ne va pas s’en sortir ! Kerv – autant ne plus faire d’effort sur son prénom vu la sentence qu’il vient de nous annoncer – nous rappelle à l’ordre. Je démarre au quart de tour, déterminé.

- Oui allons-y, pressons le pas, je n’ai pas l’intention de rester moisir ici!

code ─ croquelune

Résumé:

Mémoires oubliées

─ avec Calixte

La liste des morts dans ce livre ne me dit rien qui vaille. Le piège s’est refermé sur nous, et par ma faute. Sans perdre mes moyens ni laisser la nervosité m’envahir, je me fais la promesse de nous sortir tous indemne de cette malédiction. Krev continue son laïus lorsque nous entrons, enfin, dans la première salle. Et ce n’est pas du tout, mais alors pas du tout ce à quoi je m’attendais.

La pièce, spacieuse, nous régale d’un buffet en son centre à la savoureuse senteur. L’ectoplasme se réjouit et file se jeter sur la nourriture. Loupiac vole autour de lui, partageant son enthousiasme pour les mets présents. Apolline à leur suite, sautant une nouvelle fois du sac de mon acolyte. Mais comment fait-elle pour s’échapper à chaque fois ? Elle complimente les plats dès son arrivée au pied du buffet, et quels plats ! De ce que je peux voir la panoplie est large. A croire qu’il suffit de penser à quelque chose, aussi insolite soit-il, pour qu’il apparaisse sur la table.

Mon regard croise celui de mon coéquipier, je crois y lire la même chose que le pressentiment qui me tenaille. Je repense à l’histoire du garçon mort par suffocation d’avoir trop mangé lors d’un buffet à volonté. N’y aurait-il pas un enchantement sur cette gastronomie qui, d’une part vous attire, car je dois bien avouer que je suis fichtrement attirer par le fumet qui titille mes narines et mes papilles gustatives, mais également vous empêche de vous arrêter de manger ?

J’exprime à voix basse ce que nous pensons tous deux, méfiants.

- Il serait peut-être préférable de ne rien goûter de ce qui et là tu ne crois pas? Sait-on jamais qu’un quelconque enchantement nous lie à cette table ensuite …

A peine ai-je le temps de prévenir Calixte que j’aperçois Loupiac en train de gober un raisin. Je lui somme télépathiquement de revenir, mais obnubilé par la nourriture le Chantelune ne semble pas faire attention à mes conseils. Je décide de le récupérer, trottinant jusqu’à la table : une belle dinde rôtie me fait de l’oeil, accompagnée de ses petits légumes sur un lit de sauce à l’exquise senteur. L’eau me vient à la bouche, mes yeux ne savent plus trop où se poser face à l’immensité de ses vivres plus alléchant les uns que les autres.

Je dois me faire violence pour récupérer Loupiac et m’écarter du festin auquel Krev nous invite vivement à participer. Ma bouche se fait pâteuse, je ne suis pas contre boire un petit coup. Je continue de m’éloigner, faisant signe au garde de me suivre. Loupiac se débat un peu dans mes mains, je le garde précieusement. Posant mon sac sans fond au sol, j’attrape d’une main ma gourde fontaine pour me désaltérer sans toucher une goutte de ce qu’il se trouve sur la table.

- Tu en veux? Demandé-je à Calixte.

Notre « hôte » - ou devrais-je dire geôlier ? - semble se régaler, je lui fais signe que nous n’avons pas faim devant sa demande de le rejoindre.
Je détache avec regret mon regard de la table pour chercher une nouvelle issue à cette pièce.

code ─ croquelune

Résumé:

Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Alors que Kerv continue à se bâfrer, deux chemins s’offrent à nos yeux. Des portes battantes d’où s’échappe des brides de voix, et le couloir qui poursuit sa route. Avant que je ne m’interroge Calixte propose de voir ce qu’il se passe derrière les portes battantes.

J’espère y trouver la propriétaire des « lieux » si je puis ainsi dire. Je voulais finir cette mission vite fait bien fait, après tout nous sommes juste venus récupérer un fichu livre, pourquoi les choses doivent-elles ainsi se compliquer ?
J’acquiesce à la proposition du blond et le suis d’un pas prudent. Après tout ce que nous a raconté ce cher Kev.

Et si tout ceci était une mascarade encore, comme la blague que les villageois perché nous ont fait à Carci et moi-même ? Ils ont l’air de particulièrement apprécier piéger les pauvres voyageurs, pourquoi ne serait-ce pas encore là un de leur forfait ?
En y réfléchissant bien c’est peu probable, les Examinateurs de la Guilde sont censés vérifier la véracité d’une mission avant de l’inscrire dans l’organisation. Les conséquences pourraient être lourdes pour une telle vanne, perte de temps, de mains d’œuvre … Et puis l’être volant semble réel pour ce qu’il puisse l’être.

Comme mon collègue, je dégaine une dague retour en approchant de la porte battante, chacun d’un côté, tentant de voir discrètement ce qu’il se passe derière avant de nous jeter dans la gueule du loup. Hel D. Gher nous voilà !

Au pire, nous aurons toujours la possibilité de fuir vers l’autre sortie, encore faut-il que celle-ci soit meilleure solution.

code ─ croquelune

Résumé:

Mémoires oubliées

─ avec Calixte

On s’approche, il s’agit de la cuisine. Peut-être est-ce de là que les plats viennent ? Toujours est-il que nous nous avançons à pas feutrés, une femme joufflue ectoplasmique cuisine dans de grands gestes d’agacement. Qu’est-ce qui peut bien l’énerver ainsi, passer son temps en cuisine ? Elle semble goûter sa préparation et repart dans une agitation énergique muée de démonstration théâtrale. J’essaie de voir s’il y a une autre sortie toujours dans un félin silence, jusqu’à ce qu’Apolline décide de descendre du sac de Calixte dans un « pong » qui aurait pu passer inaperçu dans le bruit de la cuisine. Sauf que la Kevinette se tourne brutalement, nous observant de ses yeux vitreux avant de nous foncer dessus louche en main, menaçant de nous assommer avec.

Deux solutions, fuir en risquant d’être poursuivis par l’être grossier ; Se défendre, quand bien même on ne peut attaquer ces êtres intangibles ; Ou la dernière option qui me vient spontanément.

- Est-ce qu’on peut vous aider en cuisine ? Nous sommes envoyés par Hel!

Loupiac, apeuré, s’envole et virevolte loin de la chef, j’ai un mouvement de recul avant de poursuivre rapidement, espérant que mes mots touchent une corde sensible.

- Nous avons quelques herbes qui pourraient sublimer vos plats ! Déjà forts goûteux je dois bien vous l’avouer. Tellement que notre guide s’en régale encore à cet instant !

C’est quitte ou double … La flatterie fonctionne plutôt bien sur les êtres humains, pourquoi pas sur les êtres … littéraires ?  

code ─ croquelune

Résumé:

Mémoires oubliées

─ avec Calixte

Alors que ma tactique semble fonctionner - à mon plus grand étonnement – je me retrouve plaqué au sol par un poids normalement plume mais qui, avec de la vitesse, a réussi à me déséquilibrer. Me voilà nez à nez avec le blondinet qui passe de son instant héroïque à une gêne oppressante. Il se met à bafouiller autant que l’ectoplasme et je ne comprends ni l’un ni l’autre. En tentant de se relever, Calixte a le bras qui glisse et s’étale de nouveau lamentablement de tout son long sur moi. Les amis, on est pas rendu ?

Je me racle la gorge avant de le repousser doucement pour l’aider à se remettre sur ses jambes. Pour lui épargner plus d’embarras encore je lui tends ma main pour qu’il m’aide, à son tour, à me relever. J’entends Apolline se réjouir dans son coin de pièce tandis que Loupiac semble traumatiser par la réaction de Krevounette, qui se prénomme visiblement Aichoua. Pas facile à dire. Voyant que les compliments font mouche je continue sur ma lancer sans un dernier regard de réprimande envers le garde.

- Vous portez bien votre prénom.

En soit, nul mensonge n’est prononcé, ce prénom est aussi étrange que l’être qu’il nomme, mais ça, je ne suis pas obligé de le dire. L’interprétation est parfois un avantage linguistique.

- Quel bande de goujats! rajouté-je lorsqu’elle explique que plus aucun visiteur ne mange ses plats. Ne vous fiez pas à eux, ils n’ont pas le palais aussi fin que vous.

C’est alors que Quechua nous certifie de ne pas nous manger si nous lui donnons nos herbes aromatiques. Ainsi donc nous allions être réduit à de vulgaires volailles ?! Je regarde Calixte puis d’un signe de tête entendu je fouille dans mon petit sac sans fond. Ai-je des herbes ? Il est vrai que je cuisine en forêt avec ce que je trouve. A part quelques herbes médicinales je n’ai rien d’autre. Si mon coéquipier ne trouve rien, je donnerai celle-ci en inventant un avantage goûteux. En attendant je comble le silence en parlant cuisine. Et ça, je m’y connais un peu, je dois avouer que c’est un loisir que j’apprécie particulièrement.

- Connaissez vous la Phume ? C’est une plante qui pimente les plats, malheureusement je n’en ai pas sur moi, si vous avez l’occasion de vous en procurer … Peut-être pourrais-je vous en ramener ? Oh et pour vos dessert, il y a une algue merveilleuse pour son effet gélatineux. L’agluti ! J’en mets un peu partout je dois avouer maintenant. Les quatre épices, savant mélange de clou de girofle, cannelle, muscade et gingembre. On peut aussi bien l’utiliser pour le salé que le sucré. Si vous avez ces quatre épices en stock je connais les proportions pour vous faire l’alliance parfaite !

Je continue à parler et à m’emballer quelque peu dans un monologue sur la préparation de certains, plats, je ne me pensais pas si enjoué pour le terrain culinaire, et pourtant !

- Et vous, quel est votre plat préféré ? Parce que vous cuisinez pour les autres, mais cuisine-t-on pour vous ?

Je laisse Quechua répondre et Calixte rentrer dans la danse des épices. Et au fait, où est Kerv ?! Toujours en train de se bâfrer ? Guide de pacotille ! Même pas qu’il lèverait le petit doigt pour nous sortir de là … En même temps, n’est-il pas le bourreau de ce livre quand on y pense ?

code ─ croquelune

Résumé:

Mémoires oubliées

─ avec Calixte

La parole de trop … Calixte a le malheur d’expliquer ce que Krev nous a insinuer, je vois le visage – déjà pas très accueillant – de Quechua se transformer en une hideuse moue avant que sa colère n’explose lorsqu’elle sent les arômes qu’elle énonce de « normales ». Je fais les gros yeux à mon coéquipier qui me regarde de son air innocent. J’vous jure parfois il mériterait des baffes !

- Normales ? Il suffit de les accordées les unes avec les autres pour qu’elles ...

Elle lance un objet vers ma tête que j’esquive de justesse. Je crois que le temps de la parlotte est révolu, il temps celui de la … quoi d’ailleurs ? Défense ? Attaque ? Est-ce qu’on peut combattre un être qui peut-être intangible quand il le souhaite. Non, le temps est venu pour la fuite !
Alors que la femme se jette sur l’espion celui-ci prend la tangente, au moins cette fois il prend la bonne décision. Il aurait été capable d’attendre voir si le coup allé lui passer au travers ou non, juste pour savoir. Un peu comme les Wärdens, sont-elles de gentilles créatures ? Allons leur dire bonjour pour voir …

Mon sac bien ancré sur mon dos je cours vers la table pour choper Apolline d’un grand revers de main, tombée de l’épaule de son propriétaire lorsque ce dernier a choisi l’esquive définitive. Loupiac est resté avec le garde, il a pas intérêt à ce qu’il lui arrive quoi que ce soit.
Un petit ectoplasme est là, observant la scène un bloc note entre ses mains translucides, et griffonnant je ne sais quelles annotations dedans. Qu’est-ce que c’est que ce binz ?
Pas le temps de demander mon reste, je fuis à la suite du blondinet, courant vers le tunnel qui jouxte la cuisine du livre.
Au passage j’aboie à l’intention d’un Kerv se tenant la panse :

- Kerv ! Si tu veux rester notre guide c’est le moment de nous suivre!

Sinon tant pis, la visite sera-t-elle pire sans lui après tout ?
De peur de Quechua nous rattrape avec ses outils de cuisine nous courrons toujours dans le couloir, espérant ne pas tomber sur une impasse. En rattrapant Calixte je lui fiche un coup derrière le crâne, il tourne sa tête vers moi, le visage ahuri.

- Pourquoi lui … insinuer ce que … Krev nous a dit? Dis-je entre deux halètement.

Question qui n’attend pas spécialement de réplique, juste une réponse à son regard interrogateur. Bon et maintenant ? Ce couloir est long comment au juste ? Apolline toujours dans ma main, je la sens se tortiller, réalisant que je la tiens peut-être un peu trop fort. Je relâche ma prise, libérant ce qui lui fait office de bouche. On entend aussitôt sa voix résonner contre les parois du tunnel.

- Oh oui beau gosse ténébreux, sers moi encore comme une ...

La fin de sa phrase s’étouffe lorsque je m’exécute. La trousse aurait-elle des pratiques Sacrément Morbide ? Je ne préfère pas savoir et la lance à la tête de son propriétaire.

- Tiens, tu allais l’oublier!

code ─ croquelune

Résumé:

Mémoires oubliées

─ avec Calixte

A peine Apolline heurte-t-elle Calixte que celui-c disparaît au sol pour réapparaître quelques secondes plus tard. Au moins il a de bons réflexes le bougre ! Voyant que notre poursuivante et bien … ne nous poursuit pas ! Je me remets à marcher, sur le qui-vive. Mieux vaut rester sur nos gardes - et non sur le garde comme pourrait le suggérer la trousse – d’autant que notre guide ne nous aura pas … guider … bien longtemps.
Plus on avance plus je me sens nauséeux, j’ai l’impression d’avoir un pied sur un bateau. Puis une sorte d’asthme me prend tandis que le noir envahit le couloir. Je peine à trouver mes lunettes de jour ou l’orbe lumineuse. Quand j’en touche un du bout de doigts je sens une main m’agripper me faisant lâcher ma prise. Dans mon sac. D’un effort comment, comme mue par une force extérieure, nous avançons, Calixte – enfin je l’espère – et moi jusqu’à ce qu’un espace vide remplace le mur que je tâtonne du bout des doigts. Mon coéquipier avance encore, la salle où nous nous trouvons s’éclaire.

La sueur froide qui me paralyse le dos commence à s’évaporer, mes maux d’intestin également. Une chétive silhouette s’active sur un petit bureau dans la petite pièce du petit livre où nous nous trouvons. Silhouette qui se retourne d’un air menaçant, des crépitements et une aura d’air l’entourant.
Calixte, dans sa bonhomie, se présente et commence à débiter un laïus, qui, je sens, va nous attirer de nouveaux ennuis. Je le stoppe dans son élan d’un placage de main sur ses lèvres auquel un commentaire d’Apolline ponctue.

- Calixte adore ça!

Qu’est-ce que je vais faire de ces deux là ? Les traits de la jeune femme me rappelle terriblement ceux de l’auteure du livre, portrait que j’ai pu observer sur la missive de la quête.

- Est-ce qu’on peut vous aider ? Vous sembliez en … difficulté? Tenté-je de parlementer.

Vu le regard incendiaire de notre interlocutrice ma main vient se plaquer contre le torse du garde pour l’inciter à reculer.

- Encore plus baaas rajoute la trousse en roulant derrière nous.

La situation est-elle vraiment bien choisie pour ce genre d’humour ? N’y-t-il vraiment rien pour arrêter l’âme dans ses frasques orales ? Sans jouer les graveleux ...

code ─ croquelune

Résumé: