Le crépuscule venait de s'achever, la lumière solaire ainsi occultée sonne comme le début de mon activité journalière. Point de quêtes en ce jour, ni de course à réaliser en ville. Une nuitée parfaite pour flâner dans les rues du port. À cette heure, les rues sont encore engorgées, le temps que les tavernes et bars absorbent le flot de soiffards en quête de breuvages. Ce n'est pas que je n'aime pas les foules, mais ce n'est pas le contexte dans lequel je suis le plus à l'aise. Il faut admettre aussi que cela ne fait que peut de temps que je suis arrivé en ville. Mon rythme de vie ne facilitant pas non plus les contacts humains. Il faut dire que la population en cette heure est plus sujette à la perte de mémoire que l'engrangement d'informations.
Quoi qu'il en soit, après avoir achevé mon petit rituel quotidien, il me faudra bien sortir. Léina elle, a déjà quitté le studio, j'ai donc le champ libre pour me préparer. Je quitte alors les vêtements me confortant dans mon sommeil, pour me rendre à la source d'eau du logement. Formant un creux avec mes mains, je recueille l'eau pour m'en asperger le visage et m'assurer de mon réveil. J'attrape ensuite l'un des tissus épais qui traîne pour essuyer les quelques gouttes récalcitrantes perlant sur mon corps. Sec, je peux me saisir de ma tenue inchangée composée d'une chemise claire, de ma veste et de mon pantalon de cuir sombre. Toujours dans la prévoyance, même si l'on voit peu en ces heures sombres, une image se doit d'être soignée, leçon apprise par la vie à la capitale. Là-bas, l'on doit reconnaître le travail de l'artisan à sa sueur et le rang du noble à sa parure vestimentaire et sa propreté. Ma bourse est loin de celle du noble, mais j'aime cet accoutrement et l'image qu'il renvoie. Un potentiel assaillant baissera sa garde face au noble inoffensif sans garde. Mais trêve de réflexions, je m'y perds trop souvent.
Après avoir empoigné un morceau de pain de la veille pour ne pas sortir l'estomac vide, je me mets en marche vers les quais. Je pourrais très bien me contenter de me promener dans les ruelles, mais la fumée des foyers encore actifs occulte les astres se montrant timidement. Seule solution, se diriger là ou vue est dégagée. Comme à l'habitude, aucune rencontre sur mon chemin, il faut dire que seuls les quelques commanditaire ou aventuriers rencontrés pourrait me connaître. Mes pas finissent par me guider jusque sur le devant des pontons. Le regard souriant, j'observe les derniers navires arrivés qui finissent de plier leurs voiles, dévoilant les dernières constellations masquées. Il est bien dommage que je n'aie guère de talents artistiques, une belle toile serait à réaliser. Les astres les plus étincelants, imités sur la mer calme, ornée par quelques bâtiments dont il faut admirer le travail de l'armateur.
Des matelots approchants me font alors signe de m'écarter pour faire circuler leur chargement. Je ne comptais pas m'éterniser de toute manière, trop proche du centre actif du port... enfin, surtout trop proche du brouhaha permanent. Je longe alors la côte jusqu'à ce que les éclats de rires se fassent rares. Dans l'obscurité, je parviens à distinguer les restes d'un mur faisant face à la mer. Parfait. Mon postérieur assit sur la pierre, mon regard se tourne vers le ciel. Dans mes yeux, se reflète la lune quasiment pleine. Si les besoins naturels n'existaient pas, je pourrais rester devant ce paysage pendant des heures. Silencieux, vaste et apaisant. Ce royaume n'est pas à ma portée... c'est pour cela qu'en partant de mon foyer, je me suis fait la promesse de découvrir le mien.
Me voilà de nouveau perdu dans mes pensées, face à l'immensité du ciel. Imperturbable, ou presque...
Les habitants du grand port étaient effrayés ou surpris dans un premier temps, maintenant ce n'est plus tellement le cas! C'est que les rumeurs sont rapides : elle aurait demandé à voir le capitaine Al'Rakija le jour de son arrivée dans la belle cité, certains diraient même qu'elle aurait prétendue être sa fille! Des paroles soufflées par le vent, des on-dit n'ayant aucune confirmation, des affirmations que seuls les deux concernés peuvent avouer ou nier! Dans tous les cas, elle ne semble pas dangereuse ou plutôt, elle ne l'est pas! Son apparence pourrait laisser croire le contraire mais, derrière ce grand, beau et surtout effrayant sourire, la jeune demoiselle s'est montré sympathique, curieuse, agréable même pourront dire certains, à chacune de ses apparitions! Peut-être est-ce parce que le grand port est un lieu moins animé que la capitale, peut-être moins grand ici, mais la poupée y a bien plus vite été acceptée - ou en tout cas moins crainte - que lorsqu'elle vivait au coeur du royaume! Certes, elle évite encore de trop se montrer le jour - les rues sont alors plus animées encore - mais elle ne manquerait ses balades nocturnes pour rien au monde!
"Bonjour!" Dit-elle alors qu'elle croise deux marins se dirigeant vers un bar. "Vous allez bien?" Demande-t-elle à une femme marchant les bras chargés d'achat de dernière minute. "Votre robe est si jolie!" Affirme-t-elle en passant devant une fille de joie qui lui répond d'un sourire timide... Elle se sent bien, est-ce grâce à son voyage qui lui a permit d'affronter ses peurs? À la rencontre avec son père qui lui a redonné espoir? Ou simplement à cette nouvelle vie pleine de promesse? Elle l'ignore mais dans tous les cas, il lui semble possible d'aller chaque jours plus loin avant que ses vieux démons ne la rattrape! Courageuse oui, téméraire non!
Pourtant, ses pas la mène bientôt bien loin de l'agitation de la vie nocturne du grand port! Elle ignore quel chemin elle a prit, un tournant à gauche, une ruelle inconnue, un bruit de vague qui s'écrase contre la berge et la voici, immobile, contemplant l'énorme étendue sombre qu'est la mer en cette soirée douce et agréable! Elle l'ignore en réalité! Elle ne peut pas sentir le vent qui souffle sur ses bras exposés, elle ne peut pas souffrir du vent de cette saison fraîche qui débute, elle ne peut pas humer l'odeur de l'air chargée de sel marin mais n'est-ce pas forcément une soirée agréable lorsqu'elle se sent si bien? Elle avait toujours voulu voir la mer lorsqu'elle vivait dans sa noble demeure de la capitale, le décors là-bas était bien moins enchanteur, bien moins féérique... Elle, la fée des poupées comme le dit si bien le petit Melta est maintenant aussi enchantée que le bambin lorsqu'il la vu pour la première fois! Déchaussant ses souliers qu'elle prend dans sa main - geste inutile mais qu'elle ressent l'envie de faire - la jeune noble se met à marcher le long de la côte, s'éloignant de plus en plus de la ville comme attirée par le bruit des vagues comme un insecte est attiré par une lumière! Il ne faut que peu de temps avant qu'elle ne se retrouve isolé de tout et de tous... Enfin presque!
Se distinguant dans le décors, une silhouette attire son regard : un homme? Elle ne saurait dire! Une personne en tout les cas, niché sur les reste d'un muret, le regard tourné vers l'infinité factice que semble offrir l'océan et le ciel qui se rencontrent à l'horizon... Souriant de son grand, beau et effrayant sourire, Fedora sautille littéralement avec gaieté vers l'inconnu! À aucun moment elle ne pense qu'elle risque de le surprendre, qu'il pourrait mal réagir à sa présence, que peut-être il voudrait être seul! Elle voit là une nouvelle rencontre loin de l'agitation de la ville et elle, elle aime les rencontres!
"Bonjour!" Clame-t-elle d'une voix incapable de reproduire sa joie. "Il est haut ce mur! Comment tu es monté?" Demande-t-elle même si, en y regardant bien il ne semble plus si haut que cela. "Peut-être que je pourrais aussi mais pas en robe ça c'est certain!" Réflexionne-t-elle pour elle-même plus qu'autre chose! Et alors, après ces banalités, la magie se met en marche et la petite poupée bavarde reprend ses mauvaises habitudes. "Oh fait moi c'est Fedora et toi? Tu fais quoi ici? Tu profites de la vue? Je te comprends c'est vrai que c'est beau! Moi j'aime la mer! Je ne l'avais jamais vu avant de venir vivre au grand port! Tu habites ici toi aussi? Moi cela fait peu de temps! Je suis venu depuis la capitale! C'était un long voyage tu sais? La route est encore plus longue en robe je pense! Quoi que, je n'en suis pas certaine? D'ailleurs tu aimes ma robe? Ah non peut-être pas, c'est vrai que celle-ci c'est ma vieille! Je ne mets jamais la nouvelle pour me promener le soir je ne veux pas l'abimer! Oh tu voudrais la voir? Tu me dirais si tu l'aimes? Ah mais Wilfred ne sera pas content que j'invite un inconnu en fait..." Et la voilà qui trouble le silence avec un flot ininterrompu de parole, une prouesse unique qui serait impressionnante si seulement elle avait du souffle...
Me voilà totalement absorbé par les cieux. Chaque petite lueur dans le ciel se déplace lentement tel de petits flocons de neige au ralenti. La scène avait beau ne pas être très animée, cela restait pour moi l'un de mes spectacles préférés. Mais ce soir, la représentation fut écourtée sans même être prévenu.
Sans crier garde, une petite voix féminine, mais au volume sonore important me fit sursauter. Par chance, le muret était assez épais, du moins suffisamment pour que ma main puisse s'y accrocher et m'éviter une chute en arrière. Perché, le temps de reprendre mon équilibre, je n'arrive pas encore à apercevoir mon interlocutrice. Je lâche alors une salutation hasardeuse.
« Euh ... oui bonsoir ? »
À peine le temps de reprendre ma respiration que la voix poursuit son discours. Je parviens alors à la localiser dans la pénombre, en vérité, elle était juste à un mètre de moi, mais le muret ajouté à ma taille n'avait pas attirés mon regard en contre-bas. C'est alors qu'en écarquillant les yeux, que je parvins enfin à mieux discerner son apparence. Léger mouvement de retrait en arrière. Bien qu'il ne fut très bref me rappelant de l'endroit où était posé mon séant. Néanmoins, l'expression sur mon visage ne pouvait trahir ma surprise, ou bien ma peur. En effet le visage de ... l'enfant ? Faisait froid dans le dos. Un large sourire carnassier, élément le plus visible de son visage, le peu de lumière présente se reflétant sur sa dentition. Très rassurant. Et cela assorti avec de grands yeux dans lesquels on jurerait que de petites flammes rouges brûlent. Chaleureux... Mais tout cela adoucit par une robe bien entretenue. Charmant. Mon cerveau avait du mal à assimiler toutes ces informations additionnées les unes avec les autres. À tel point que la première question qui me fut posée passa à la trappe. Je finis alors pas échapper à mes pensées et revenir sur la conversation. En réalité, son discours est très enfantin. Cela m'évoque même mon frère lors de ses premières visites à l'atelier de forge de mon père. "Et le feu il rend tout mou le métal ? Mais comment c'est possible ? Nan, mais y a un secret, les chevaliers ils ont pas des épées molles pourtant ..." Cela faisait rire mon père, mais pas moi qui à l'époque n'était déjà pas passionné par cela. De nouveau, je me rends compte que je me perds dans mes souvenirs, terrible symptôme de la reflexionite aiguë qui m'atteint.
« Oui non, effectivement, tu risques de l'abîmer, mais dis moi comment tu t'ap... »
Interrompu dans mon élan, je me fais devancer par la.. jeune femme ?
C'est alors que je réalise que ce n'est pas tant son nom qui m'intéresse, mais plutôt de savoir ce qu'est cette sorte de masque qu'elle porte. De toute manière, son nom, je le connais maintenant. Je m'apprête alors à me présenter de même qu'elle, mais, un torrent de paroles s'abat alors sur moi. J'essaye alors de trouver la faille, le moment de temps mort où elle reprendra sa respiration. Mais à mon grand damne, celui-ci n'arrive pas. J'essaye alors de retenir chaque question afin d'y répondre quand ce monologue s'achèvera. Heureusement, il n'y avait pas que des questions, elles étaient accompagnées d'un petit présentant sa situation, d'après ses dires, elle semble venir d'un milieu plutôt aisé, en effet, il est rare d'avoir des robes pour chaque occasion lorsque notre bourse est serrée. Enfin ! Le moment attendu se présente à moi, je saute alors sur l'occasion pour me présenter à cette parfaite inconnue, pourquoi d'ailleurs ? Trop tard pour y réfléchir.
« Alors moi, je me prénomme Kell, et oui, je profite de la vue, enfin pas de la mer, ce sont les étoiles que j'admirais avant que tu ne .. Mais euh oui, j'habite aussi au port depuis pas si longtemps, je suis aussi originaire de la capitale. Je n'étais pas en robe, et heureusement d'ailleurs... mais oui le voyage est assez long à pied, une bonne dizaine de jours dans mon souvenir »
J'hésite alors à commenter sa tenue, vu son caractère très énergétique, j'ai peur qu'elle puisse se vexer et me heurter de ses petits poings, bien que ses dents me paraissent bien plus létales. Un peu gêné par l'invitation si soudaine, heureusement, ce cher monsieur Wilfred semble être un frein.
« Oh tu sais, je ne voudrais pas importuner Wilfred, si ma présence est dérangeante ... »
Je coupe alors cours à cela pour enchaîner sur la vraie question qui trotte dans un coin de ma tête depuis tout à l'heure.
« Mais dis moi Fedora, si ce n'est pas trop impoli de ma part, pourquoi portes-tu ce masque à une heure pareille dans les rues du port ? »
C'est vrai que l'on pourrait qualifier cela de plaisanterie de mauvais goût. Heureusement, l'innocence de la jeunesse existe et tout n'est pas intentionnellement mauvais. Quoi qu'il en soit, j'ai un peu hâte de connaître la réponse, car la peur éphémère avait laissé la place à ma curiosité habituelle.
'Kell?' Demande-t-elle. "C'est marrant comme nom! Enfin j'aime bien, je ne veux pas mentir ou me moquer! Mais ça reste marrant!" Affirme-t-elle en riant doucement de son rire cristallin toujours aussi étonnant! Pas autant que l'autre rire, celui bien plus rare qui passe la frontière de ses lèvres lorsqu'elle trouve quelque chose particulièrement drôle, mais un rire surprenant tout de même tant il est étonnant de l'entendre provenir d'une poupée vivante. La demoiselle au dents blanches comme de la neige écoute avec attention son interlocuteur, elle s'en approche doucement jusqu'à s'arrêter véritablement au pied du muret, ne pouvant définitivement pas le rejoindre plus haut. "Les étoiles!" S'exclame-t-elle! "J'aime les étoiles!" Clame-t-elle en tournant sur elle-même, faisant virevolter sa robe et tendant les bras sur le côté. "J'aime la pluie aussi, et la neige! Les flocons qui tombent me rappellent un ami! J'aime bien cet ami!" Oui, comment ne pas pensé à Faolan et son pouvoir lorsqu'on parle climat? Une dizaine de jour? Elle ne s'était pas rendue compte que cela fut si long!
Elle rit doucement, posant sa main devant sa bouche, cachant sa dentition pour le coup. "Wilfred ne serait pas importuné! Il me dirait sans doute que je ne dois pas inviter tout le monde mais pourquoi pas après tout? À quoi ça sert d'avoir une grande maison si on ne peut inviter personne? Tu le sais toi Kell?" Car pour elle ce n'est que cela! Malgré tout ce qu'elle a vécue, tout ce qu'il lui est arrivé, elle a encore en tête que les gens sont bons! Après tout, la vie commence à lui sourire! Elle a retrouvé son père, elle a des amis, elle a plus de courage, elle arrive à se faire accepter! L'un dans l'autre sa mère avait raison! À force de sourire de son grand, beau et effrayant sourire, la vie lui sourit à son tour! Pourquoi devrait-elle avoir peur alors?
Et soudain, une question à laquelle elle ne s'attendait pas, une question qu'on ne lui a jamais posé! Un masque? Cette fois, c'est son autre rire qui se fait entendre, plus sonore, plus fort, moins cristallin et sans doute bien plus communicatif tant elle sait qu'il est ridicule mais, elle ne le contrôle pas. "GNYAGNYAGNYA!!! Tu es drôle Kell!" Affirme-t-elle, persuadé que cela n'est rien de plus qu'une plaisanterie. Cela étant elle préfère cela aux autres, ceux qui la traite de monstre! Ce genre d'humour est plus agréable, moins froid que les paroles blessantes de certains... Sauf que, après un petit moment, elle comprend que ce n'est pas de l'humour, il croit réellement qu'elle porte un masque? Elle le regarde de ses yeux inexpressifs en comprenant la réalité! Oh non! Et elle vient de rire? Pense-t-il qu'elle se moque de lui? "Pardon!" Dit-elle. "Je ne voulais pas me moquer!" Affirme-t-elle. "Je pensais que tu plaisantais!" Avoue-t-elle tout en agitant vivement ses mains devant elle, si bien que l'un de ses bras dans ce mouvement frénétique se décroche de son épaule pour partir sur le côté rapidement, ne s'arrêtant qu'une fois arrivé au bout de la chaîne... "AH!" S'exclame-t-elle. "Désolé, c'est un peu gênant..." Dit-elle comme si cela était parfaitement normal alors qu'elle attrape son bras dissident de son autre main pour le repositionner. Cela fait, elle regarde Kell en souriant grandement et penche la tête sur le côté. "Pour te répondre, et comme tu viens sans doute de le comprendre, ce n'est pas un masque! C'est mon pouvoir... Je suis une poupée! TADAAA!" Dit-elle en faisant une petite révérence, définitivement bien plus à l'aise qu'avant avec son pouvoir.
Kell en effet mon prénom, si je me rappelle bien, c'est mon père qui l'a choisi. C'est même assez évident vu la consonance de notre nom de famille. Dans mon esprit, mes deux dénominatifs sonnent plutôt de manière agressive, je ne savais pas si j'étais content d'entre que cela puisse être amusant, mais ça me faisait quelque-chose. Après tout, même si je n'aime pas l'admettre, j'aime recevoir des compliments, bien qu'ils aient tendance à me déstabiliser. Alors que je poursuis sans m'interrompre par peur de perdre le bâton de prise de parole, j'entends un petit rire, apportant de la nuance avec son apparence, peu commune. D'ailleurs à mesure que je continue de dialoguer, le peu d'inquiétude que j'avais à son égard, se dissipe. Simplement un comportement de jeune fille après tout, ce ne fut que prouvé lorsqu'elle tournoya sur place m'indiquant ce qu'elle aime. Et puis elle semble avoir des amis, du moins pas imaginaires, je l'espère, mais des amis dans tous les cas.
Les grandes demeures, bien peu pour moi, je préfère largement le nécessaire, assorti d'un grand terrain. Que peut-on faire d'une vingtaine de pièces ? Je me le demande bien, autrement que pour montrer la profondeur ou justifier l'architecture extérieure, je ne vois pas.
« C'est vrai que c'est triste ça, moi je vais te dire à quoi ça sert, à accumuler de la poussière et s'assurer ainsi que les domestiques ne roupille pas tranquillement pendant ce temps »
Je n'en n'étais pas conscient, mais un début de sourire assez timide s'était installé sur mon visage. Certainement fier de ma petite boutade. Par contre, j'étais bien conscient qu'elle s'était rapprochée de moi, et cela me gênait un peu. Son apparence n'en était point la raison, n'importe quel autre membre de la gente féminine aurait eu le même effet. Mes jambes se mettent alors à se balancer à quelques centimètres du sol, comme si mon cerveau, demandait à mes jambes de fuir. Mais cela, je n'en étais pas conscient non plus, un de mes nombreux tics, qui peuvent me trahir lorsque l'on me connaît bien.
Et voilà le moment tant attendu, je vois sa bouche s'ouvrir, pour ne pas dire ses lèvres, étant donné qu'il ne semble pas y en avoir sur le masque. Et déception, elle se tord alors devant moi en lâchant un rire à glacer le sang. Je m'entends alors prononcer en penser quelque-chose comme "oui... d'accord... très bien...", puis imaginant un petit moi prendre la fuite. Mais le petit nuage éclate alors que le ricanement cesse pour laisser place à des paroles. J'étais tout de même perplexe face à la scène, mon visage étant de nouveau neutre.
Mon esprit commence alors à imaginer toute sorte de scénarios, plus tordu les uns que les autres dans lesquels, la... personne sous mes yeux tuent de pauvres gens avec ce même rire. Heureusement, mon esprit peut souffler, le comportement enfantin refait surface. Elle semble alors paniquer en voyant que mon visage avait changer en un instant face à ce spectacle. En fait, elle s'inquiète plutôt pour moi, comme si elle culpabilisait à cause de son rire. Les différences, voilà un sujet bien sensible chez certains, l'incident transformé en traumatisme me l'avais bien prouvé. Je ne pouvais en aucun cas lui en vouloir pour ce qu'il venait de se passer. Je m’apprête alors à lui adresser la parole pour ne pas qu'elle s'inquiète.
Mais soudain, par réflexe voyant une chose chuter, je me penche en avant pour essayer de la rattraper. Avant de m'interrompre rapidement, prenant conscience de ce qui venait de se décrocher. Dans ma confusion, mon postérieur glisse du muret me ramenant sur terre après avoir été déséquilibré. Le discours de la jeune fille semble traduire une certaine gène, le mien, rien étant resté muet et immobile, debout devant elle. Mon regard suit alors avec intérêt l'autre bras replacer le premier à son emplacement initial. Mes yeux finissent par remonter droit vers son visage alors qu'elle s'adresse de nouveau à moi. Je réalise que de nouveau je suis peut-être un peu près, mes pieds glissent alors de quelques centimètres en arrière.
Un peu difficile pour mon cerveau, d'emmagasiner tant d'informations improbables en si peu de temps. Pourtant, la joie dans l'intonation de Fedora me ramène à la réalité. Je pensais alors penser, mais un peu trop fort à première vue.
« Une... poupée, ceci explique cela »
Dis-je alors en regardant de côté et faisant je ne sais quelle gymnastique de mes doigts.
Tout me paraît alors plus évident, bien que pas vraiment. Mais il faut croire que ce genre de pouvoir existe, généralement on a plus l'habitude de rencontrer des croisement animaliers que ce genre de transformations.
« Je vois, c'est la première fois que je vois quelqu'un comme toi, excuse moi de mon étonnement, mais tout cela m'a surpris »
Tout en terminant ma phrase, je me penche légèrement vers son bras, l'air inquiet.
« Mais rassure moi Fedora, tu ne t'es pas fait mal ? »
Vu l’énergie mise dans sa référence, cela ne semble pas, mais tout de même, ce n'est pas tous les jours que l'on voit quelqu'un perdre son bras. Enfin pour une personne dans la normalité, je suppose. Mais qu'est-ce que la normalité dans un monde ou presque tous ses habitants possèdent des pouvoirs presque uniques.
La discussion est aisé, du moins c'est ce qu'il lui semble! Étrangement Kell ne semble pas spécialement la craindre ce qui est plaisant pour elle, la plupart des gens la fuit les premières fois mais lui non... Il a certes l'air impatient ou nerveux - cette manière de balancer les jambes dans le vide par exemple - mais rien de plus! Pas de cris, pas d'insultes, pas de fuite... C'est appréciable en fait! Il lui semble que tout se passe bien d'ailleurs il fait même de l'humour! Ou, peut-être pas? Ah non, visiblement elle a mal comprit! Il était réellement sérieux? La voilà qui se confond en un myriade d'excuse alors qu'elle ne sait plus réellement où se mettre! Alors qu'elle pensait que tout allait bien, elle s'est totalement trompé sur ce qu'il lui disait! Dans cette précipitation, voici que le bras lui en tombe... Littéralement pour le coup! Ce qui ne manque pas d'avoir un petit effet sur Kell puisqu'il se laisse tomber de son muret, c'est du moins ce que pense la petite poupée en le voyant maintenant sur deux pied bien devant elle.
Malheureusement, alors qu'elle replace son bras - geste devenu extrêmement simple par l'habitude - tout en se présentant complètement, ce qui signifie son pouvoir également, Kell recule de quelques petits pas... Le sourire de Fedora est sans aucun doute un peu moins grand, maintenant qu'il a comprit que ce n'est pas un masque, il a également un mouvement de recule! Comme tous les autres au final, il faut croire que cette habitude elle la vivra toute sa vie! Ceci explique cela? Qu'est-ce qu'elle doit comprendre dans ces propos? C'est un mystère auquel elle ne se risquera pas à tenter de donner une réponse, après tout elle s'est déjà trompé précédemment, il vaut sans doute mieux ne pas recommencer cette erreur!
"T'excuser?" Demande-t-elle avec surprise. "Vraiment?" Questionne-t-elle doucement... Elle n'a pas l'habitude qu'on lui demande de pardonner un mouvement de recule, généralement on lui demande plutôt de s'éloigner en criant au monstre, on désire qu'elle disparaisse, qu'elle n'approche pas, qu'elle ne soit pas une menace! C'est bien la première fois qu'on lui demande de pardonner! La petite hoche donc simplement la tête, timidement en réalité, c'est qu'elle n'est pas vraiment sûre d'avoir bien comprit, peut-être se trompe-t-elle encore? Elle n'est parfois pas assez attentive. "Tu n'as pas à t'excuser tu sais... Je..." Commence-t-elle, hésitant un instant. "Je sais à quoi je ressemble!" Finit-elle sur une note entre la tristesse et la résolution. Pourtant, Kell ne semble pas méchant, loin de là même! "Oh oui oui je vais bien!" Affirme-t-elle. "Je suis solide tu sais! C'est l'avantage d'être une poupée... Je ne peux pas réellement avoir mal!" Dit-elle simplement.
Soudain, voici qu'elle reprend ses mauvaises habitudes! La poupée s'avance d'un coup vers Kell, parcourant assez rapidement la distance les séparant pour se planter devant lui, faisant fie de toute notion d'espace personnel! Elle doit lever légèrement la tête pour le regarder, c'est qu'il est grand quand même! La jeune noble sourit alors de toutes ses dents pointues et regarde le visage du jeune homme. "Tu es grand!" Dit-elle simplement! Il est vrai que du haut de son mètre soixante-deux, elle est bien petite en comparaison de son interlocuteur. "Mais pas plus grand que mon papa!" Affirme-t-elle sans aucune certitude en réalité, bien trop mauvaise pour évaluer les tailles de deux personnes qui ne sont pas l'une à côté de l'autre. "Tu ne semblais pas si grand là haut! C'est étrange quand même! C'est à cause de la proximité! Tu savais que plus un objet est proche plus il est grand? Enfin... Pas vraiment car maintenant tu ne pourrais pas être plus grand même si on se rapprochait! Ah mais... On ne peut pas vraiment il faudrait te marcher sur les pieds! Je ne suis pas lourde mais je vais éviter quand même! Je pense que c'est mieux? Hum... Oui c'est mieux! Tu en penses quoi Kell?" Demande-t-elle comme si tous ce raisonnement avait une certaine logique quelque part dans son esprit.
En effet, on peut voir à la réaction de la jeune fille que ses personnes lui sont chères. Mais ma remarque n'était pas ciblée en particulier sur eux, j'essaye alors de rectifier le tir.
« Ne t'en fais pas pour cela, je plaisantais, rien de plus et puis on voit bien que tu as un lien différent avec eux que celui de maître à domestique »
C'est assez rare à vrai dire, du moins ceux qui accompagnaient les clients de mon père était loin d'avoir un traitement exemplaire, souvent brusqué pour se dépêcher de récupérer les commandes ou répondre à tel ou tel ordre. Un autre des aspects de la noblesse qui me dégoûte. Mais par chance, Fedora ne semble pas être de cette catégorie-là.
La discussion se poursuit alors allant de surprises en découverte sur la personne singulière me faisant face.
Je finis alors par me retrouver un peu bête, devant une Fedora qui semble sidérée que je présente mes excuses. Une de mes mains viens alors se loger sur ma nuque dans le but de la gratter. En y réfléchissant bien, vu les réactions qu'elle à susciter chez moi, je peux largement entendre, que d'autres se retrouvent un peu terrifiés par cette apparence. Il faut dire que les dents aiguisées comme des lames et la lueur dans ses yeux n'est pas forcément rassurante, mais quelques minutes de dialogue avec elle ont su dissiper mes craintes. À moins bien sûr que celle-ci soit un génie du mal et compte me séquestrer dans la cave de son manoir, mais je pense qu'il me sera trop tard pour m'en apercevoir, alors autant faire comme si de rien n'était.
« Eh bien, oui, je ne voudrais pas avoir donné l'impression de manquer de respect envers une demoiselle »
Elle poursuit alors, toujours aussi surprise de mon discours à priori. De même, je poursuis le mien.
« Et moi aussi, je sais à quoi tu ressembles à présent, mais cela ne change rien au fait que tu soit une demoiselle. Comme je le pensais tout à l'heure, chacun sa particularité »
Face à l'affirmation qui suit, me voilà rassuré, elle a beau être une poupée je n'ai pas encore connaissance des limites de ce pouvoir intriguant. Je sens alors qu'elle retrouve un peu son calme et son enthousiasme petit à petit. Dans la continuité de mes pensées, j'essaye toujours plus de la rassurer.
« Eh bien voilà, tu vois ta particularité à même des avantages ! »
Mes belles paroles, mais sincères semble avoir eu l'effet escompté. Il est vrai que j'ai l'habitude d’encenser mes dires de manières un peu hypocrite pour me faire bien voir auprès des inconnus, mais ce n'était pas le cas cette fois. Pris au dépourvu par cette rencontre incongrue, je n'avais eu le temps de préparer mes belles phrases, mes pensées étant trop occupées par mes interrogations.
Pour la troisième fois déjà, mon sixième sens se met en alerte. En effet, Fedora venait à nouveau de se planter là, juste sous mon nez. Alors qu'elle s'adresse à moi, je tente de nouveau de prendre quelques centimètres nécessaires à ma plénitude. Mais le talon de ma bottine heurte aussitôt le muret derrière moi. Aucune marge pour agir, me mouvoir de côté me trahirai à coup sûr. Et je n'ai pas envie qu'une nouvelle fois elle se sente mal par ma faute. Je dois donc me résoudre à accepter mon sort, ou du moins, la présence envahissante de la jeune noble.
« Grand, je ne sais pas, je dirai dans la norme, mon père est encore plus grand »
À peine eu-je terminé ma phrase qu'on long monologue reprends.
Encore une fois, je me retrouve emporté par cette vague de mots emportant toute possibilité d'y répondre tant qu'elle n'a pas terminé. Décidément, je me demande si dans la poupée ne se cache pas un moulin à paroles. Enfin un moment de répit, du moins pour mes oreilles, car la jeune femme attend une réponse désormais.
« À vrai dire, tu n'en serais pas plus grande, c'est juste une impression enfin, un effet d'optique si l'on parle savamment. Du coup ... monter sur mes pieds ne te ... rapprocherai que de moi ... »
Je me sens alors hésitant sur la fin de ma phrase, ayant pour habitude de visualiser tout ce que j'imagine, la dite scène m'embrouille l'esprit. J'ai beau avoir vingt-trois ans la présence féminine à toujours réussie à me perturber. Je dirais bien qu'une personne en est l'exception, mais bien assez vite, je me remémore son départ, qui avait été douloureux pour moi. Ma seule amie... D'un peu gêné, mon visage change de nouveau d'expression, le regard décroché de Fedora, et perdu à l'horizon.
En tous les cas, la petite poupée observe son interlocuteur alors qu'elle approche de lui. "Une demoiselle?" Questionne-t-elle toujours surprise... Il est bien rare que l'on la qualifie de telle! Monstre, créature, parfois même objet oui! Mais en découvrant son apparence et - parfois quand on lui laisse le temps de parler - son pouvoir, elle n'ait pas souvenir que le terme "demoiselle" ait jamais été le premier utiliser. Certes, il y a des exceptions : Faolan bien-entendu pour commencer, Lin également c'est évident mais cela reste toujours surprenant! Elle sourit alors de son grand, beau et effrayant sourire, définitivement Kell est gentil! Elle n'a aucun doute sur ce fait même si, encore une fois, elle n'a même pas dans la tête la petite voix de la mise en garde qui lui souffle qu'elle pourrait se tromper. Alors, sans plus de sommation, elle s'approche vers le jeune homme, se plantant devant lui! Il recule, légèrement, suite aux paroles de la demoiselle mais se retrouve dos au mur, détail qu'elle ne remarque même pas bien trop concentrée sur sa taille! Elle doit aller jusqu'à lever la tête pour le regarder, bien-entendu qu'il est grand! Et son père l'est encore plus? C'est impressionnant! Cependant, réaction enfantine, la petite poupée croise ses bras sur sa poitrine.
"Mon papa est encore plus grand!" Affirme-t-elle sans aucune preuve. "Et ce n'est pas un... Effet d'optique?" Se rapprocher encore? Non, ce serait sans aucun doute une mauvaise idée, elle ne veut définitivement pas lui marcher sur les pieds même si elle est curieuse! Est-ce que cela l'agrandirait ou bien est-ce que Kell a raison? Et puis déjà, une - ou plusieurs - questions lui brûlent les lèvres... "C'est quoi un effet d'optique? Dis Kell tu m'expliques? Je veux savoir maintenant! Ça m'intéresse! Et toi il y a des choses qui t'intéressent? Moi oui! Tout plein! En ce moment j'étudie les enchantements avec mon amie Lin! Tu la connais? Elle est superbe! En plus c'est une grande enchanteresse! La plus grande de toute! Il n'y en a pas de meilleure! Elle a même son propre atelier dans la ville aquatique! Tu y a déjà été? Moi plusieurs fois! J'adore la navette même si j'ai eu peur la première fois..." Kell l'écoute-t-il? Elle n'en est pas sûre, il faut dire qu'il regarde dans le vide alors elle fait la seule chose à faire... Après tout il faut regarder les gens pour leur parler, peut-être que Kell a oublié sa présence parce qu'elle est trop petite? Elle attrape donc sa tête entre ses mains, il y a une vingtaine de centimètre de différence entre eux! Parfait, c'est justement la taille de ses chaînes et, puisque son corps le lui permet... Elle soulève littéralement sa tête de ses épaules, la décrochant de son corps et lève les bras de sorte à ce que sa tête se retrouve au niveau de celle du jeune homme. "Kell? Ça va?" Demande la tête qui "flotte" dans les airs.
De nouveau, Fedora semble surprise des mots que j'emploie. Une demoiselle, en effet, du moins c'est ce que j'imagine. Son comportement, m'évoque cela, mais il est vrai qu'avec un pouvoir aussi particulier. Si cela se trouve, elle ne vieillit pas et a quatre cents ans ! Nan, peu probable. Je la vois alors me sourire à sa façon, je suppose alors que j'avais vu juste, ou alors je me suis complètement trompé et cela l'a flattée. Hésitant trop sur la possibilité la plus probable, j'essaye alors de glisser discrètement, une question dans ma réponse.
« Eh bien oui, une demoiselle, du moins je le pense, je ne me suis pas permis de demander votre âge »
Le fil de la discussion se poursuit, jusqu'à ce que la petite brune, revendique alors la taille supérieur de son paternel. Cernant de mieux en mieux la personne en face de moi, je commence à me sentir plus détendu. Certes je n'avais plus de craintes jusque là, du moins plus concernant sa dangerosité. Mais je n'avais pas encore réussi à prendre mes aises, la poupée ayant un débit de parole soutenu. Néanmoins, mon visage semble moins coincé à présent, même si sa proximité me... Raaah c'est dingue ... j'ai beau me sentir à l'aise, j'arrive à ne pas y être pour autant...
« Eh eh peut-être bien, après tout, je ne le connais pas, et je ne compte pas revoir le mien, donc nous ne pourrons pas comparer »
Et, le moulin recommence à moudre ses paroles, alors que je suis dans mes réflexions. S'y ajoutent alors de nouvelles. Qu'est-ce qu'une illusion d'optique, je n'ai plus les mots exact, et puis, je ne voudrais pas me perdre en explications et prendre le risque qu'elle décroche. Le plus simple serait d'imager la chose. Je pensais alors pouvoir répondre, mais, non. Ce qui m'intéresse ? Pas compliqué, à peu près tout ! Un nom est prononcé, mais je n'ai pas réussi à le saisir au vol de mes pensées. De toute façon, je ne connais pas grand monde, encore moins si il s'agit de quelqu'un de célèbre. Et, en terme de voyage, pour l'instant, je ne connais que la capitale et cette ville, enfin si je ne compte pas le petit périple prévu, afin de m'abreuver en connaissance à la grande bibliothèque.
Soudainement, un petit cliquetis me sort de ma torpeur. Et ce qui s'en suivit, aurait pu me sortir de mes bottines si mes pieds étaient sur ressort. De la même manière que son bras, la tête de Fedora ne tenait qu'à un fil, ou plutôt, une chaîne. Si pour autant, j'avais supposé que ses autres membres pouvaient en faire de même, je ne m'attendais vraiment pas à ce que sa tête le puisse ! Pour le coup, c'était loin de mes mouvements discrets, je venais de sursauter sur place, tout en soufflant pour évacuer la surprise qui s'était à nouveau emparée de moi.
« Alors, oui, mais j'ai été surpris ! Je ne pensais pas que votre tête se ... détache ? »
Mes pulsations cardiaques se calment aussitôt.
« J'étais en train de réfléchir à toutes les réponses que je devais donner. Il me semble que je devais commencer par l'illusion. Alors c'est comme lorsque vous vous approchez de moi, je fais toujours la même taille et vous aussi, mais étant donné que le point de vue n'es pas le même, vous avez l'impression que je suis plus grand. Les illusions d'optique ne sont que des impressions, un peu comme quand l'on croit distinguer des formes au-dessus du sable en saison chaude. Pour mes intérêts, je dirais un peu près tout, je suis très curieux. Et non, je nais pas encore eu la chance de visiter la ville aquatique. »
Et c'est en reprenant mon souffle, que je m'aperçois que je venais d'imiter la jeune noble par un débit de parole important. Finalement, j'en avais trop dit, heureusement que je m'étais dit de faire concis pour mon explication. En repensant à ce que je venais de déblatérer, je suis alors pris de l'envie d'en dire plus sur mes intérêts.
« À vrai dire, en parlant de curiosité, j'ai même un projet, je souhaite parcourir tout le continent afin de le découvrir de mes propres yeux ! »
Si tracas, il y avait, lorsque je suis emporté par les sujets me passionnant, ils disparaissent. "Au diable la gêne" devait se dire alors mon esprit.
De toute façon elle en a déjà plusieurs des questions, beaucoup même. trop diront sans doute certains... Mais c'est qu'elle est curieuse la poupée et quand elle commence à parler, il est difficile de la faire taire! Un véritable moulin qui tourne sans cesse pour être sûr de vouloir dire tout ce qu'elle a en tête, ce serait dommage d'oublié une question capitale comme de savoir si l'on aime sa robe par exemple - sans aucun doute la question la plus importante de son répertoire d'ailleurs - sauf que Kell ne répond pas, pas tout de suite du moins! Ses yeux fixant l'horizon, il semble parvenir à oublier la demoiselle! Sans aucun doute la différence de taille elle ne voit aucune autre explication! Elle prend donc la décision très logique de rétablir l'équilibre, après tout, il n'est plus grand que d'une chaîne!
Lorsqu'il se retrouve ainsi face à face avec Fedora - littéralement pour le coup - il sursaute, réaction bien plus visible que ses petits pas de fuite! Oh non, vient-elle de lui faire peur? Peut-être finalement ne va-t-il pas réellement accepter le monstre si facilement? Avec un peu de précipitation elle veut remettre sa tête mais, à trop se presser on fait des erreurs! La tête glisse, Fedora la lâche et voilà qu'elle voit le monde à l'envers alors que sa tête pend le long de son corps! Pas vraiment une bonne action pour calmer le jeune homme! Elle se reprend cependant, remettant sa tête sur ses épaules, à sa place, et lève son regard inquiet - en réalité inexpressif - vers son interlocuteur. Surpris? Bien-sûr elle peut le comprendre! Au moins, il semble ne plus vouloir fuir du moins, pas visiblement! Mieux même, il répond enfin aux questions avec autant de ferveur et de précision que la poupée ne s'amuse à les poser ce qui fait grandement sourire la demoiselle. Pour une fois, c'est elle qui écoute les nombreuses paroles, bien heureuse que quelqu'un s'anime autant lors d'une conversation avec elle!
"Merci pour les explications!" dit-elle. "Je n'ai jamais vu le sable en saison chaude mais je regarderait la prochaine fois!" Affirme-t-elle. "Je comprends ta curiosité! Je suis exactement pareille!" S'amuse-t-elle. "J'ai du voir autant de paysage que toi mais j'ai le temps, j'ai seulement dix-neuf ans!" Avoue-t-elle fièrement en répondant à sa question indirecte en même temps et puis soudain, elle sourit à pleine dent, un idée ayant sans aucun doute germer dans son esprit. "Je sais! Allons voir la ville aquatique ensemble!" Et comme si cela était si simple, elle attrape la main du jeune homme dans la sienne et se tourne pour courir, faisant deux ou trois pas avant de s'arrêter brusquement en réalisant. "Ah mais... Il est peut-être tard pour cela?" Se questionne-t-elle sans le lâcher. "On ne pourra pas tout y faire... Hum... Oui c'est décidé!" Et elle se tourne vers Kell avec son beau, grand et effrayant sourire. "Demain! Allons à la ville aquatique ensemble demain!"
Je pensais que le pire venait d'arriver en matière de surprises. Sa tête est elle aussi mobile, surprenant, certes, mais, je m'en étais vite remis, c'était sans compter sur une nouvelle maladresse de la petite brune. Après son bras, à se précipiter, c'est sa tête qu'elle perdit. Cette fois je n'eut point le temps de réagir, j'étais juste planté là face à elle. Heureusement qu'en cette heure, les quais ne sont pas très peuplés, car je me vois mal me justifier d'une telle scène devant un passant. Alors qu'elle repositionne sa tête comme si de rien n'était, j'essuie avec mon avant-bras mon front pensant qu'une goutte de sueur s'y trouvait à cause de la succession d’événements inattendus. Mais non, rien ne s'y trouvait. Je demandais d'ailleurs si les surprises en chaînes avaient étaient suffisantes pour que de petites étincelles bleutées fassent leur apparition au sommet de ma chevelure, mais je pense que j'aurais eu le droit à une petite remarque vu la curiosité de Fedora.
Quoi qu'il en soit, calmé, je pouvais débuter mes explications.
Je n'avais pas réussi à obtenir une réponse à ma question dissimulée, mais je finis par l'obtenir d'une autre manière. La réponse me surprit un peu, je l'imaginais plus, jeune. C'est vrai qu'il est difficile de placer un âge sur une poupée, alors je m'étais basé sur son comportement jusqu'alors. Et, je lui aurais facilement ôté cinq années. Cette, fois-ci mon regard était à l’affût, prêt à... être surpris de nouveau. Oui, en fait, je ne sais plus trop à quoi m'attendre avec elle à présent. Et alors qu'elle fit une courte pause entre deux phrases. Je vois son sourire grandir petit à petit, comme si une idée venait de lui traverser l'esprit. Quel tour peut-elle avoir encore dans son sac ? Des yeux sur ressorts peut-être ? Après tout, il y a bien des chaînes qui relient ses membres et sa tête à son corps. Et finalement, je ne dirais pas que je suis déçu, mais ce n'est qu'une simple proposition qu'elle m'annonce.
Simple serait certainement le mot, si la personne qui recevait la proposition n'était pas moi. Je pense qu'en terme de surprises, c'est pire que les yeux sur ressorts.
« Je ... »
Oui, "je", le seul mot que j'avais été capable de prononcer. Il faut dire que mes pensées s'étaient éteintes comme une torche privée d'air, lorsque ma main fut saisi par la demoiselle. Mes pas s’emboîtèrent dans les siens machinalement. Là, je ne pouvais plus en douter, de petites étincelles chevauchaient forcément mes mèches grisées par la lumière ambiante presque inexistante. Il n'en faut pas plus pour que des centaines de pensées se brusquent à l'entrée de mon esprit. Ne savant lesquelles traiter en premières, aucune ne le fut. Etant de nature calme, mon affolement n'est pas exubérant, mais il existe bel est bien. Par chance, la jeune poupée me tourne le dos. En fait, me tournait, nous sommes soudainement à l'arrêt, et elle me fait face avec son grand sourire.
Mes pensées venaient d'être évacuée en cet instant, la réflexion m'était de nouveau permise. Mais ce n'était pas tellement sa question qui me préoccupait, mais l'image que je devais renvoyer en ce moment. Je m'imaginais déjà rougissant, tel que me décrivait mon amie d'enfance. Même si elle s'amusait à inventer cela pour justement me taquiner, sans que je ne m'en rende compte. Il faut agir et vite. Pensais-je. Mais la précipitation n'est jamais la bonne solution.
« Euh, oui euh la ville aquatique, demain... C'est que ... »
Eurêka
« C'est que je n'ai pas les moyens ... Je commence à peine à me permettre quelques achats et à prévoir une première expédition »
Kell ne réagit pas immédiatement et soudain sa réponse se fait entendre : il n'a pas les moyens? Elle le regarde un petit instant en penchant la tête sur le côté... *Que veut-il dire?* Se questionne-t-elle. Cela ne fait aucun sens, les ticket pour rejoindre la ville aquatique avec la navette ne coûte pratiquement rien et ensuite, la ville est comme toute ville : certes c'est un lieu touristique mais ils peuvent juste se promener et passer la journée tranquillement comme ils pourraient le faire au grand port! Elle ne comprends pas son refus, pas pour cette raison du moins, surtout qu'il affirme vouloir voir le monde! Il semblait si déterminé qu'elle était persuadée qu'il serait plus que ravi de cette offre et pourtant, pourtant il donne une excuse ridicule pour refuser? Soudain, elle comprend la véritable raison - ou du moins ce qu'elle suppose être la véritable raison - comment ne s'en est-elle pas rendu compte plutôt? Ses petits gestes de recule à peine perceptible, son sursaut lorsqu'elle a ôté sa tête, sa chute lorsque son bras s'est détaché et ce refus maintenant? N'est-ce pas évident?
La petite poupée lâche finalement la main du jeune homme, elle dépose sa main droite contre son propre bras gauche au niveau du coude. Elle est triste bien-sûr mais encore une fois, elle maudit son apparence qui ne lui permet pas de le montrer. "Tu sais Kell, je ne suis plus une enfant!" Dit-elle simplement. "Tu n'as pas besoin de chercher de fausses excuses..." Continue-t-elle. "La ville aquatique est juste une ville, il ne faut pas débourser pour s'y rendre tu sais? À peine dix cristaux sombres pour un ticket de navette c'est tout..." Elle hausse les épaules avant de reprendre. "Tu peux juste le dire que tu ne veux pas y aller avec moi!" Affirme-t-elle. "Je sais que je suis une poupée, un monstre pour certains, mais il n'est pas nécessaire de chercher des prétextes pour m'éviter! Tu pouvais juste le dire en faisant preuve de sincérité..." Conclue-t-elle en faisant le geste de soupirer même si elle sait qu'aucun air ne sortira de ses poumons inexistant. "Je ne t'importunerai pas plus! Je te conseil quand même d'aller voir la ville aquatique, c'est un endroit superbe! Bonne soirée." Et sur ce, elle tourne les talons - triste mais forte - pour s'apprêter à partir.
À l'arrêt, j'étais figé, ne savant quoi ajouter pour le moment, dans l'attente d'une réaction de la petite brune. Avait-elle remarqué mon état ? Pour une fois, je n'eu pas le temps de me perdre plus profondément dans mes pensées. Le geste qui m'avait tant perturbé, fut interrompu. Fedora venait de repousser ma main comme par... dégoût ? C'était sûr maintenant, elle l'avait remarquée mon attitude. Mon bras quant à lui, resta comme figé sur place, légèrement tendu vers l'avant. Mon interrogation n'allait plus durer, la poupée s'adressant à moi.
Je ne comprenais pas. Plus une enfant ? Pas besoin de me trouver des excuses ? Le pire scénario que j'avais imaginé plus tôt venait de se réaliser. C'est sûr, elle doit me voir rougir et être dans l’embarras, elle doit s'imaginer que j'ai des pensées... obscènes ! Pourquoi il fallait que cela m'arrive à moi. J'étais là, sur mon muret à observer le ciel, et maintenant, on pense cela de moi. Soudain, je reste encore plus idiot que je ne l'étais en entendant la suite de son discours. Finalement, c'est moins grave, là je ne pouvais m'en prendre qu'à moi-même. Je pensais réellement que ce serait hors de prix pour ma petite bourse, et voilà que je suis ridiculisé. Léina avait pourtant proposé plusieurs fois que nous nous y rendions, mais à chaque fois un contre-temps avait rendu la chose impossible.
Je m’apprête alors à me justifier. Mais hélas, Fedora n'en n'avait point fini. Et à mon grand malheur, c'était bien pire que ce que j'avais imaginé. Un comportement déplacé envers elle, non. Une preuve de radinerie, non plus. Je l'avais blessé. Ma sincérité, n'en était point pour elle. Mes paroles, devenues mensonges à cause de mon comportement en déduis-je. Alors qu'en elle, je n'avais vu à aucun moment un monstre. Une petite fille déguisée au premier regard, puis une curiosité comme on en croise dans ce royaume. Les paroles de la demoiselle se poursuivirent, alors que je suis toujours figé sur place. À ces mots, je suppose comprendre ce qu'elle peut ressentir. Les mots qu'elle a employés, ne sont pas anodins, elle les a entendus et plus d'une fois. Mais là n'est pas le problème, il est dans le fait que cette fois, ils me soient associés.
De nouveaux mots, résonnent dans mon esprit. Elle s'en va. Elle s'en va blessée. Je ne peux laisser cela ainsi. J'ai envie d'avancer vers elle, de m'expliquer. Mais c'est comme si une vitre me retenait prisonnier. Elle me tourne alors le dos me saluant. Il me suffit alors d'avancer vers elle. Mais ce qui avait pour habitude de me troubler, m'immobilise. Ce je ne sais quoi, qui me maintient enfermé dans mes pensées. Qui provoque toute sorte de tic, de gênes. Seulement maintenant, je réalise être pris dans le piège que je viens de décrire, mais avec en prime pour conséquence d'avoir blessé Fedora.
Des bris de verres, s'écrasant sur le sol. Une simple image, bien évidemment. J'ai refusé de laisser mes chaînes blesser quelqu'un. Cette promesse, je me l'été faite après mon incident ayant eu lieu lors de la découverte de mon pouvoir. Certes, Fedora n'est qu'une inconnue rencontrée il n'y a que quelques dizaines de minutes. Mais je ne pouvais pas accepter de la voir partir avec une nouvelle fois cette déception qu'elle à du vivre de nombreuses fois. Chacun de mes pas écrasait les morceaux de verre sur le sol, me rapprochant un peu plus d'elle. Mais elle aussi s'était mise en mouvement. Mon seul réflexe, fut le geste qu'elle avait effectué et qui m'avait en quelque sorte terrifié. Ma main saisit la sienne pour la retenir.
« Non, restes ici n’importuner... Je... c'est une méprise, les tarifs, honte à moi je n'en avais connaissance après plus d'une année à vivre ici. Je ne cherchais nullement de prétexte pour t'éviter... Je... Je cherchais un prétexte pour éviter que tu prennes conscience... de la gêne que je peux ressentir en présence de femmes. Je n'ai jamais eu plus que deux amies... je ne suis pas habitué aux contacts physiques... alors quand tu m'as saisis la main j'étais effrayé, comme je le serais avec n'importe qui... »
Je marque alors une petite pause, reprenant mon souffle. Je vois alors une petite goutte glisser le long de l'arête de mon nez. J'avais honte de mon comportement. Tellement ridicule, comment peut-on avoir peur des gens. Encore remué par le déroulement soudain des choses. Je ne pouvais m’apercevoir que de petites flammèches aux tons noirs et bleutés surplombaient ma chevelure.
« Je suis désolé que tu ais pu douter de ma sincérité... »
Elle s'avance pour partir, un pas, suivi d'un second, ses épaules s'affaissent doucement! Aura-t-elle la force d'attendre d'être arriver chez elle pour craquer? Mais soudain, un geste du jeune homme, alors qu'elle ne s'y attendait pas le moins du monde, voilà que Kell lui attrape le bras pour la retenir! Mauvaise idée en soit sans doute? Certes le geste est instinctif mais la réaction est somme toute naturelle, elle avance, il l'attrape, elle n'est pas humaine... Son bras se détache et la chaine se tend jusqu'à arrêter Fedora dans le bras n'est plus réellement en sa possession propre! Elle se retourne surprise, regardant Kell qui vient de lui dérober son bras et même si cela ne se voit pas sur son visage, elle se demande très sincèrement la raison de cette intervention! *N'a-t-il pas apprécié que je le perce à jour?* Se demande-t-elle. *N'accepte-t-il pas que je partes ainsi?* Se questionne-t-elle. Veut-il me rouer de coups en plus de m'avoir blessé sentimentalement parlant?* s'interroge-t-elle. Elle le regarde donc alors qu'il lui demande de ne pas partir et de l'importuner? Elle fronce les sourcils, en plus il avoue qu'elle l'importune? *Veut-il donc juste se moquer de moi?* S'enrage-t-elle.
Mais non, elle le laisse parler et l'écoute, après tout il tient toujours son bras en otage d'une certaine façon alors elle ne peut que rester là et écouter ses propos... Sa gêne? Ce serait sa gêne qui a provoqué cela parce qu'elle est une femme? Elle doit avouer que cette possibilité ne lui a jamais traversé l'esprit, sans doute aussi parce qu'elle n'a pas l'habitude que l'on puisse la comparer à une femme! S'est-elle seulement jamais vu ainsi depuis sa transformation? Certes il y a Faolan qui la fait sentir toujours un peu plus humaine et Lin qui la considère comme une jolie jeune fille depuis toujours mais, ce sont ses amis! Est-ce que c'est réellement la même chose? Soudain, Fedora le regarde avec attention, elle voudrait bien s'excuser, il est vrai que le prendre ainsi par la main n'était sans doute pas une bonne idée! On pourrait pourtant croire qu'elle avait compris la leçon suite à l'événement survenue avec Jaina lors de son escorte jusqu'à la ville portuaire, d'une certaine façon, elle est aussi responsable de la situation lorsqu'elle y pense! Cependant, alors qu'elle s'apprête à parler elle remarque quelque chose qui lui fait affreusement peur! D'un coup, elle arrache sa main de celle du jeune homme, reculant d'un pas comme une distance de sécurité essentielle.
"Oh... Désolé!" S'empresse-t-elle de dire en remettant son bras à sa place. "Je n'avais pas conscience que ma présence te faisait ressentir ainsi." Dit-elle sans le lâcher du regard alors qu'à nouveau, elle fait un petit pas de recule. "Peux-tu... Peux-tu arrêter cela s'il te plaît?" Lui demande-t-elle sans même savoir s'il sait de quoi elle parle. "Je veux dire... Les flammes..." S'explique-t-elle arrivant finalement à mettre un terme sur ce qui provoque sa peur. "Je suis une poupée alors..." Une attaque contendante elle le sent à peine, une coupure elle peut se recoudre mais des flammes? Ne pas approcher d'une source de feu c'est un très bon conseil pour une poupée!
Quand j'ai agi, un détail m'avait échappé, la particularité de la jeune femme. Oui, son bras amovible, je m'en étais rendu lorsqu'il chuta, mais ne savant pas trop comment réagir, redonner du mou, le lâcher ? Mais non, j'ai continué de tenir sa main alors que les mots s’échappaient de ma bouche. Les derniers mots prononcés, j'attends le verdict de la poupée. Point de mot pour débuter, un simple geste. Sa main s'arrache à mon emprise. Il semble bien que ma sincérité ne l'ai pas atteint. Mon regard se penche alors vers le sol, déçu de n'avoir pu lui faire entendre raison. Mais je pus alors entendre sa réponse, à trop vouloir se précipiter... Ses mots délivrèrent une nouvelle larme, me voilà soulagé, mais pas entièrement. M'étant redressé, je vois Fedora qui continue de s'éloigner tout en me faisant face. Je suis de nouveau confus, est-ce que ses mots seraient faux et serviraient à endormir ma confiance pour fuir ensuite ? J'avais beau me faire une image innocente de la petite brune, chacun peut dissimuler une part d'ombre. Un pas de plus, elle poursuit me demander de cesser. Me voilà bien naïf, je l'ai dégoûtée avec mon comportement, et voilà que ma réaction l'effraie. Décidément, le contact ne me réussit pas, j'ai voulu lui tendre ma main, et celle-ci lui eut l'effet inverse.
« Je comprends ce que tu ressens... tu peux par... »
Elle m’interrompt en me reprenant.
À l'ouest, je l'étais complètement. Si je suis en train de cauchemarder, il est grand temps que je me réveille. Mes flammes, n'étant pas lumineuses, je ne m'étais même pas rendu compte de leur présence. Pourtant, je suis bien conscient que mes émotions en sont l'étincelle. Mais les deux petites perles ayant coulé sur mon visage, ne m'avaient pas mis la puce à l'oreille cette fois.
« Je.. non, je ne peux rien y faire, ça va passer »
J'y étais habitué, mais mes paroles n'avaient aucunement l'aplomb qu'il m'arrive de connaître. Ce soir, ma confiance est mise à mal. Il ne sert à rien que je m’apitoie sur mon sort. Je passe alors une main dans ma chevelure enflammée, imitant une personne se recoiffant.
« N'aie pas peur... elles sont inoffensives. Je sais, c'est déconcertant, mais les flammes qui me recouvrent ne sont, qu'esthétiques. Je ne te demanderai pas d'y toucher si tu ne veux pas, mais la sensation est similaire à de la fourrure que l'on caresse »
Ironique, c'est le mot qui me vint à l'esprit.
« C'est plutôt marrant non ? Tu pensais que ton apparence, dû à ton pouvoir me faisait peur, mais au final, c'est mon pouvoir qui t'a effrayée. Comme quoi, il ne sert à rien de se fier à la première impression. C'est du moins ce que je m'efforce de faire. J'essaye de voir plus loin qu'une apparence, la personnalité est ce que nous définit réellement selon moi »
Mon regard se tourne de nouveau vers l'horizon tracé par la mer éclairée par l'éclat lunaire.
« Si tu étais un monstre, tu aurais essayé de me dévorer de tes grandes dents, mais à la place, elles n'ont fait que me délivrer tes paroles d'une manière des plus énergique »
Je me rapproche alors du muret dont je m'étais éloigné tout en parlant.
« Alors que moi, peu intimidant et peu confiant... »
J'appose alors ma main sur le muret de pierre, puis la balaye en traçant une ligne, laissant derrière elle, une traînée de flammes similaires à celles apparues plus tôt. Celles-ci s'étant d'ailleurs étendues jusqu'à recouvrir entièrement ma tête. Incluant mon visage, dont les traits étaient déformés par le mouvement des flammes. Seules trois marques presque blanches subsistaient, étant le seul indice pour discerner mes yeux et mon sourire absent.
« ... mon pouvoir peut se révéler mortel »
Je me tourne alors de nouveau vers elle, priant pour que tout cela n'ai pas empiré ma situation et qu'elle n'ai pas fuit dans la nuit.
Alors elle le dit, elle lui demande s'il peut les arrêter mais l'aventurier lui affirme que non! Malheureusement c'est un pouvoir qui lui vient de ses émotions et - par sainte Lucy - elle sait que les émotions sont incontrôlable, elle le sait à cause du pouvoir de Faolan lui-même rythmé par les sentiments du jeune cuisinier mais également par le propre affolement de son coeur lorsqu'elle est en sa présence! Elle a beau se dire que ce n'est rien, se voiler la face parce qu'au fond elle ne sera jamais humaine, cela n'empêche pas que les sentiments sont incontrôlables! Un nouveau pas de recule, s'il ne contrôle pas ce pouvoir, elle risque d'être blessé n'est-ce pas? Pourtant, il lui dit de ne pas craindre ces flammes? Elles ne sont rien de plus que de l'esthétique? Elle le regarde alors que, comme pour lier le geste à la parole, il passe sa propre main dans sa chevelure recouverte de ces flammes sombres sans qu'aucune douleur ne lui soit infligé. *Incroyable!* Se dit-elle, des flammes qui ne brûlent pas? C'est invraisemblable pourtant, elle devrait savoir que tout est possible dans ce monde, n'en est-elle pas la preuve? Elle, sorte d'automate vivant?
Kell se recule doucement alors que Fedora ne le quitte pas des yeux, comme captivé par cette flamme qui danse devant elle bien qu'elle soit sombre, cela lui rappelle son enfance, avant qu'elle n'ait son pouvoir et les problèmes qui sont venus avec, alors qu'elle restait bien installée devant la cheminée, sa mère qui lui racontait des histoires, son grand père qui s'occupait de ses documents... Elle se souvient encore cette époque bénie alors qu'elle descendait les escalier vêtue d'une petite robe et de ses chaussettes, faisant semblant d'être somnambule juste pour profiter un peu plus de la présence de sa famille alors que l'heure de dormir était déjà venue... Si elle était humaine, est-ce que ces flammes ne pouvant la brûler pourrait quand même lui faire ressentir cette douce chaleur?
Un premier cas vers le jeune homme. Ne pas juger sur les apparences? Combien de fois a-t-elle entendu des gens affirmer qu'ils le ne faisaient pas? Combien de fois cela s'est-il avéré faux? Pourtant, le jeune homme semble sincère. *Puis-je le croire?* Se demande-t-elle incertaine, une petite voix encore présente lui hurle de ne pas faire confiance, elle a été trompé si souvent, comment faire confiance à quelqu'un après cela? Pourtant, elle apprécie ce qu'il lui dit. Après tout, même s'il parle de ses grandes dents, ses paroles n'en sont pas cruelles ou médisantes pour autant, peut-être pourrait-elle le croire? Un pas de plus dans sa direction alors qu'il reparle de son pouvoir : "Mortel?" Demande-t-elle à demi-mot alors qu'il laisse ses belles flammes sombre et bleus recouvrir le mur dans une longue trainée! La jeune fille ouvre la bouche, ses yeux ne lâchant pas le visage maintenant totalement de feux du jeune homme. Pour la première fois elle est sans mot! C'est stupide sans doute mais elle trouve cela... Beau? Elle qui ne peut plus approcher un feu depuis ses cinq ans, elle qui pourtant aimer ces moments durant lesquels sa mère pouvait simplement être une mère avec son enfant sans être accaparée par le devoir de sa classe sociale... Elle est émerveillée par ce feu qui ne peut faire de mal!
Certes, Kell a affirmé qu'il pouvait être mortel mais, elle ne connait pas son pouvoir, elle ne le comprend pas et sa peau de tissu est incapable de ressentir une quelconque chaleur alors, sans aucune certitude elle se dit simplement que cela peut-être mortel pour le garçon mais pas pour les autres! Il a dit que son feu n'était qu'esthétique, elle se dit simplement que s'il le recouvre entièrement cela peut s'avérer dangereux et rien de plus! Elle voudrait toucher cette flamme, voir si un feu inoffensif peut lui donner une sensation quelconque cependant, elle est au grand port, son père est capitaine de la garde, elle ne veut pas faire courir des rumeurs - rumeurs dont Faolan est friand! Elle sait ce qu'il penserait s'il entendait dire qu'une poupée touchait la joue d'un homme... Définitivement elle ne le veut pas! - Alors, son regard dérive du visage immolé du jeune aventurier et elle voit soudainement le feu sur le mur... Des flammes qui ne peuvent bruler! Sans lâcher le muret du regard, elle fait un pas, puis un autre et tend soudainement sa main, l'approchant de cette source sombre.
À mon grand soulagement, la petite brune était toujours présente. Je remarque même qu'elle s'avance timidement vers moi, ou peut-être que prudemment serait plus adapté. Peut-être qu'elle ne distingue plus mon visage, mais moi, je peux voir le sien, stupéfait. À vrai dire, c'est une réaction assez courante, du moins pour ceux qui ont passé le stade de la peur. De telles flammes n'existent pas dans la nature, je suis même certainement le seul à en avoir la possession en ce royaume. Un pouvoir bien singulier, quand on voit que la grande majorité, si ce n'est l’entièreté est tirée de choses bien réelles. Quoi qu'il en soit Fedora semble fascinée par cela, s'approchant désormais à un rythme régulier, après tout, au point où j'en suis elle peut bien toucher mes cheveux, cela devrait bien se passer. Pour moi, du moins, je l'espère. Sa manière d'avancer, le bras tendu, me rappelle ma mère. Mon père venait nous chercher, moi et mon frère de bonne heure, nous descendions à son atelier encore en chaussettes pour "ne pas réveiller maman". Et effectivement, nous ne l'avons jamais réveillée, mais cela n'empêchais pas qu'elle vienne nous rendre visite en pleine crise de somnambulisme. Nous devions alors rester sur nos gardes et s'assurer qu'elle ne s'approche pas de la cheminée ou reposait le métal incandescent, prêt à être manipulé.
Rester sur mes gardes, c'est alors que la phrase résonne dans mon esprit. Cette nostalgie avait abaissé la mienne. L'espace d'un instant, mon regard était devenu aveugle au danger. En effet, Fedora ne se dirigeait plus vers moi, mais vers la traînée sur le mur. Un bref instant, je revis le bras de mon père en proie aux flammes. Non, pas cette fois. Je braque alors subitement vers Fedora puis l'enserre en abaissant son bras tendu, simple réflexe protecteur pour l'arrêter.
« Je.. désolé, je me suis mal exprimé et je n'avais pas réalisé que tu me posais une question »
Réalisant la proximité extrême, car on ne peut faire plus que cela, du moins je n'avais connu de proximité plus grande que celle d'une étreinte amicale, je relâche la poupée tout en m'assurant de lui barrer le chemin menant à sa perte.
« Les flammes qui recouvrent mon corps, elles, sont inoffensives. Par contre celles que je dépose volontairement sur des surfaces à l'aide de mes mains, sont bien dangereuses pour les êtres vivants.. »
Le délai écoulé, le danger mortel s'évapora de la pierre sans aucune stigmate de son passage, si ce n'est peut-être des mauvaises herbes calcinées. Par la même occasion, celles recouvrant mon visage s'éteignirent petit à petit, ce bref moment de stress, les ayant alimentées et leur offrant un sursis.
Elle approche sa main de plus en plus proche des flammes, nul doute qu'elle sentirait la chaleur mordre sa peau si elle était faite de chaire, cependant cela n'est pas le cas! Ne sentant pas la chaleur, elle ne ressent pas spécialement le danger non plus et alors que sa main va bientôt pénétrer dans le feu, un mouvement du jeune aventurier l'arrête! Une étreinte qui la sort de sa torpeur pour la plonger dans une autre bien différente! Son bras s'abaisse, son coeur rate probablement un battement alors qu'elle se retrouve prise dans un câlin qu'elle n'attendait pas! Les paroles du jeune homme lui viennent soudainement : il lui a sauvé la vie! Il ne l'avait pas dit clairement mais cette manière de s'excuser, de dire qu'il s'était mal exprimé et de l'enserrer ne lui laisse aucun doute! Une mauvaise compréhension mutuelle, une de plus, et voilà que la jeune femme risquait de se brûler les doigts pour commencer et sans doute de finir en flamme! Par réflexe, elle passe ses bras autours de Kell, lui rendant son étreinte avant de se rendre compte de son erreur.
Alors qu'il la relâche, elle doit avouer ne plus écouter ses explications, elle ne regarde pas le feu s'éteindre non plus, regardant à droite et à gauche rapidement. Est-ce que quelqu'un les a vu? Ce câlin n'était rien, rien de plus qu'un geste de protection, amical tout au plus cependant, elle n'ose imaginer ce que cela provoquerait dans l'esprit bien trop fertile d'une certaine personne... Rien, encore juste le calme de la nuit! Elle souffle doucement avant de reporter son attention sur Kell : Oh non! Elle l'a totalement ignorée! Elle espère sincèrement que lui non plus ne va pas imaginer des choses! Décidemment, il faut croire que les personne maladroites en relation sociale s'attirent... Entre elle, Faolan et Kell on peut dire que le trio est parfait! Peut-être les deux jeunes hommes s'entendraient-ils bien? Sans doute, quoi que, pas si cela commence avec une mauvaise compréhension concernant la poupée n'est-ce pas?
"Merci Kell!" Dit-elle simplement. "Tu m'as sauvé la vie!" Affirme-t-elle en souriant grandement. Confiante que personne ne les a vu, elle se sent libéré d'un poids. "Ton pouvoir est... Magnifique!" Affirme-t-elle. "Je ne m'en approcherai pas cependant..." Conclue-t-elle en riant doucement. Puis, elle s'avance vers le jeune homme et attrape sa main dans la sienne avec son grand beau et effrayant sourire. "Allez viens!" Lui intime-t-elle. "Toi aussi tu dois t'habituer au gens! Sinon on ne pourra pas aller à la ville aquatique!" Affirme-t-elle boudeuse, visiblement son refus précédent est déjà oublié et elle a bien l'intention de le faire se mêler à la foule pour qu'il n'ait plus aucune raison de refuser son invitation!
Une catastrophe vient certainement d'être évitée, mais je fus surpris lorsque la petite brune m'enserra en retour. C'est certainement d'ailleurs ce qui m'a poussé à prendre du recul, certes j'avais fait un pas aujourd'hui, qui risque certainement de me marquer. Mais ce n'est pas pour autant que je serais changé fondamentalement en une soirée. Je continue alors de m'exprimer et le plus clairement possible cette fois.
Viennent ensuite des remerciements de la part de la demoiselle, mais je me demande alors si je les mérites. Car certes, je suis celui qui lui a sauvé la vie, mais je suis aussi celui qu'il l'a mise en péril. Je ne parviens pas alors à m'en féliciter, étant plus gêné qu'autre chose. Mon regard s'abaisse comme un coupable à qui l'on énonce ses crimes au tribunal. Aucun mot ne sort. Fedora poursuit, ce n'est plus mon geste qu'elle complimente, mais mon pouvoir. "Magnifique", j'ai du mal encore avec ce mot. Je trouve ces flammes belles, apaisantes, mais très rapidement les images du bras de mon père me reviennent à l'esprit, et tout adjectif mélioratif se voit remplacé par "dangereux", "meurtrier", "effrayant". Et je ne suis pas le seul à le penser, ces mots m'avaient été crachés à la figure par d'autres, alors que j'expérimentais ce pouvoir létal pouvant laisser une trace irréversible. Et à présent, la petite brune l'a bien assimilé. Les dernières flammèches sur mon crâne s'éteignent alors que ma main se fait saisir à nouveau.
J'aurais préféré avaler un glooby avant de partir, plutôt que de croire que tout cela arriverait en cette soirée. Je ne voulais qu'un peu de tranquillité, mais le dieu de la fortune, si tant est qu'il en existe un, en avait décidé autrement. Et, ce n'était pas fini ! Fedora, ornée de son plus beau sourire, m'invita alors à la suivre. Que dire, je ne sais plus. Refuser, je n'en ai pas envie, mais je ne suis pas non plus guilleret à l'idée d'aller je ne sais où. Je me dis alors que rien de pire ne peut se produire n'est-ce pas ? Pourtant, me voilà peu enchanté par la proposition qui m'est accordée. Cependant, je ne peux refuser l'offre de visite de la ville aquatique.
« Tu, tu es sûre que j'ai besoin de voir des gens ? Je veux dire, il m'arrive d'en fréquenter »
Pour le travail, mais ce détail je me le garde pour moi.
« Et ne t'en fais pas... j'irai à la ville aquatique avec toi »
Ça avait du mal à sortir hein, mais c'est sorti, c'est le principal.
Je serais curieux de savoir, si Léina me croirait en lui contant tout cela. Des péripéties, ma maladresse m'en fourni assez, mais du contact humain, c'est le plus difficile à croire venant de moi. Par ailleurs, "contact humain" me fait réaliser que sans m'en rendre compte, j'étais passé de vouvoiement à tutoiement. Fedora ne semble pas être une noble ordinaire, si l'on repense à sa relation avec son personnel. Mais tout de même elle reste une noble et certaines manières doivent être tenue comme le disait ma mère, qui par sa profession de vendeuse à la capitale en maîtrisait les aspects.
« Je, je viens de réaliser que je m'étais approprié le tutoiement, j'espère que cela ne vous importune pas ? »
De toute manière il est trop tard, encore une fois j'ai mis les pieds dans le plat et ai fait constater une éventuelle faute, dont elle n'avait peut-être pas pris conscience. D'ailleurs en parlant de prise de conscience, la demoiselle me tenait toujours par la main. Va-t-elle la lâcher, compte-elle m'emmener je ne sais où de peuplé de cette manière. Quoi qu'il en soit, un frisson me parcouru l'échine me faisant me dandiner sur place. Par réflexe mon autre main se posa sur ma nuque mais rien à signaler. Et maintenant, que je sens une certaine détermination en la personne me faisant face, je ne peux plus que me torturer l'esprit me demandant à quelle sauce je vais être croqué, enfin à quel endroit je vais être emmené.
Et puis zut, elle venait de commencer à me tirer en direction du centre actif du port, la question me démange trop. Ma curiosité devança ma timidité.
« Mais euh, dis-moi, on va où exactement ... ? »
Je ne l'avais même pas regardée depuis que nous étions en mouvement, du moins pas dans les yeux, mon regard était perdu vers nos mains croisées. Un geste, tellement banal, mais qui pour une raison inconnue ne l'était pas pour moi.
Mais soudain voici que Kell relève un point intéressant : il la tutoie! Effectivement, elle ne l'avait même pas réellement remarqué! Elle-même le tutoie depuis un bon moment maintenant! C'est bien que cela soit ainsi non? Oui, elle en est persuadée! Pourtant, le jeune homme lui demande si cela ne l'importune pas, la réaction est immédiate! Fedora s'arrête dans sa course, d'un seul coup sans crier gare, elle se tourne vers le jeune homme et lâche sa main pour le regarder avec intensité. Elle fronce les sourcils et dépose ses petits poings sur ses hanches en penchant la tête légèrement sur le côté. "Kell tu es un idiot!" Lui dit-elle. "On est ami! C'est normal de se tutoyer!" Affirme-t-elle sans aucun doute. Vision sans doute bien simple du monde mais pour la petite poupée ce n'est que cela! Il ne l'insulte pas, il ne la juge pas, il est gentil avec elle et elle aime bien lui parler! Ils sont amis donc n'est-ce pas? Soudain, elle fait un pas vers lui en mettant ses deux mains dans son dos et se poste juste devant lui, se penchant légèrement, puisqu'il évite de la regarder elle se met dans un angle ne lui donnant pas le choix de croiser son regard même s'il regarde vers le bas. "On est amis pas vrai?" Demande-t-elle. "Oui bien-sûr!" Affirme-t-elle comme si aucune autre réponse n'était acceptable. "Alors c'est normal! Allez viens maintenant, je vais te montrer un endroit génial!" Dit-elle en reprenant sa main et en se remettant en route, pauvre Kell qui découvre que Fedora peut aussi être "autoritaire" quand elle a décidé quelque chose.
Leurs pas les mènent forcément en plein coeur du grand port, bien loin du calme des quais et de la tranquillité de la mer. Elle aime beaucoup la surface agitée de l'eau mais il y a peu de chance de croiser du monde! À la place, Fedora l'emmène en plein coeur de la grande place, là ou une petite fête se déroule pour célébrer l'arrivée du solstice! Il y a du monde, des vendeur de produits de saison, des familles qui se promènent, des activités pour l'occasion et même des jeux! "Kell regardes!" S'exclama la petite poupée en désignant un jeu d'adresse dont le but était de lancer des cerceaux autours d'un bâton. Trois anneaux sur cinq pour gagner un lot... "On essaie! Aller on essaie!" Et elle l'entraîne avec elle, essayant de réussir. Malheureusement, cela est bien plus compliqué que prévu et elle ne parvient qu'à mettre un anneau. "Mais! C'est difficile!" Se plaint-elle avant de se tourner vers Kell, son regard inexpressif qu'elle imagine suppliant. "Tu veux bien essayer? S'il te plaiiiiiiiiiiiit!"