Si les courbettes de Marc-Antoine étaient parvenues à rassurer le capitaine sur les intentions du jeune homme, le prince quant à lui n’avait pas été dupe. Aeron avait pu voir par le passé les œuvres du cadet des de l’Épée. Il savait à ce titre à quel curieux spécimen il avait affaire. Marc-Antoine, en plus d’être inapte au combat, n’était ni doté d’un grand sens moral ni capable d’effectuer le moindre sacrifice pour autrui. En toutes circonstances, le jeune homme voyait son intérêt et uniquement ce dernier. Servir la garde, protéger le prince ? Tout ceci était accessoires aux yeux du grand blond qui ne voyait ces tâches que comme des façons de se faire bien voir et d’obtenir des avantages de diverses natures. Par principe, il fit cependant en sorte de faire bonne figure et de ne pas laisser transparaître ses craintes. Une tour qui apparaissait sur les terres pourtant surveillées d’Aryon du jour au lendemain ; cela n’avait rien de commun.  

Avant de rejoindre le mystérieux bâtiment à explorer, un membre de la garde jugea bon de confier à Marc-Antoine un sac contenant divers items. Parmi la multitude de choses placées dans l’accessoire de voyage, il était important de noter la présence d’une gourde fontaine ainsi que d’une lampe magique capable d’éclairer en tout temps les terrains les plus obscurs. Le roi ainsi que ses conseillers prenaient visiblement cette affaire très à cœur. Pour cause, fournir à tous les volontaires pareil matériel avait un coût ; Certes on n’avait pas confié au cadet des de l’Épée une rune antique capable de dévaster un pays mais tout de même. Marc-Antoine s’enorgueillit de ces maigres présents. Il savait qu’il allait devoir rendre tout ces accessoires à l’état une fois sa quête terminée mais ne put s’empêcher de songer à une façon quelconque de détourner cette obligation. Oui, l’interne était avare.

Alors qu’il écoutait le prince ainsi que le capitaine converser, Marc-Antoine plissa les yeux. Ce sac sans fond portait bien son nom. Malgré ses multiples tentatives, le jeune homme était dans l’incapacité de discerner un quelconque tissu formant la base de l’objet. La conversation des deux hauts gradés du groupe se poursuivaient quand le plus inexpérimenté de la bande jugea bon d’interpeller le quatrième membre de l’escouade ; à savoir l’archiviste. Cassiel, puisque c’était ainsi qu’il fallait l’appeler, était resté bien silencieux au goût du de l’Épée. Certes, il n’y avait pas eu matière à discourir des heures durant jusqu’à présent néanmoins Marc-Antoine aimait parler. C’était là une de ses plus grandes passions et il estimait ne pas avoir à gêner les deux « grands ». Ainsi, il se rabattit sur cet archiviste au teint livide.
▬ Cassiel, si j’en crois les dires de mon supérieur, votre rôle sera de prendre des notes ? Dois-je en conclure qu’il nous faudra vous protéger vous aussi ou êtes-vous en mesure d’assurer cette tâche par vos propres moyens ? Dans tous les cas, sachez que je ferai mon travail pour que tout le monde ici ressorte de cette tour en vie.
Il enchaînait mensonge sur mensonge avec une assurance effrayante. Pour ressortir de cette tour en vie, encore fallait-il y entrer. C’est ce que Marc-Antoine et ses collègues ne tardèrent pas à faire, une fois le plan mis en place.
Marc-Antoine possédait une vue quasi parfaite néanmoins le jeunot n’était en rien nyctalope. L’obscurité régnait en maître dans cette tour, les partenaires de galères furent bientôt séparés. Bien qu’ils firent tout leur possible pour rester en contact, tous leurs sens semblaient altérés. Marc-Antoine claqua des doigts, appela toutefois personne ne semblait l’entendre. Il imaginait que ses collègues eurent eu la même idée et comprit vite qu’un sortilège l’affectait. Il chercha alors dans son sac à dos la lampe magique et tenta de voir si cette dernière était en mesure de rompre le sort.
Marc-Antoine possédait bien des défauts néanmoins il n’était pas totalement dénué de neurones. Il doutait néanmoins qu’un sort d’une telle ampleur puisse être vaincu par une simple lampe. Enfin qui sait.

Spoiler:

Marc-Antoine poussa un soupir. Comme il s’y attendait, cette lampe n’était pas assez imprégnée de magie pour éclairer la voie. Le sort dans lequel était plongé le groupe était bien trop puissant pour espérer être dissipé par cet item aux pouvoirs rudimentaires. Alors que les ténèbres continuèrent d’entourer notre héros, ce dernier songea à une méthode plus drastique pour briser le sort. Marc-Antoine songea l’espace d’un instant à dégainer son épée afin d’effectuer de grands coups dans le vide. Ainsi peut-être allait-il « déchirer » la noirceur environnante. Dans le même ordre idée, le cadet des de l’Épée songea à se mutiler. S’il s’agissait bel et bien d’une illusion, ce type de procédure avait généralement pour effet de dissiper le sortilège. Peu enclin à prendre des décisions – et surtout dans le but de ne pas passer pour un clown en se trucidant le bras sans raison – Marc-Antoine n’en fit rien. Passif, il entendit tout comme ses collègues une curieuse voix prononcer les mots suivants : « Zerbah Usla Maradmah Zernih »
Pour l’épéiste, il n’y avait rien à comprendre. Il s’agissait là d’une sorte de curieux charabia digne du plus grand ivrogne d’Aryon. Ou du plus grand mage noir de ce même royaume. L’un dans l’autre, Marc-Antoine resta perplexe.

Loin d’être lourdes, les paupières de notre héros s’ouvrirent sans grand mal. Et c’est toujours sans la moindre difficulté qu’il se réveilla près de ses camarades. Ce qu’il s’était passé ? Marc-Antoine n’en avait aucune idée. L’incantation lointaine qu’il avait entendu les avait probablement téléportés ici. Peut-être était-il toujours sous l’emprise d’une forme d’illusion. Par principe, il se pinça la joue afin de s’assurer que tout ceci ne relevait pas du rêve.
Le sol était froid et la pièce peu imposante. Yuduar fit rapidement le tour de cette dernière. Marc-Antoine pour sa part restait silencieux. Il avait répondu à la question de son supérieur d’un simple hochement de tête et analysait lui aussi la situation. A son avis – qui n’avait rien de humble – la meilleure solution afin d’explorer cette tour était de se séparer. Il y avait trois chemins à emprunter et ils étaient quatre. Les calculs étaient vite faits. Néanmoins Marc-Antoine craignait d’être seul, sans défense, face à un mage aux pouvoirs sans limite. De fait, il prit la parole d’un air faussement assuré :
▬ C’est un bon plan. Nous devrions tous descendre.
Comme toujours, le grand blond ne brillait ni par son courage ni par sa capacité à prendre des décisions fortes. Et c’est ainsi que – pour ne pas passer pour un poltron fini – il prit les devants en faisant signe à ses collègues de le suivre de près. Marc-Antoine n'était pas attaché mais il priait très fort pour que Yuduar ne le lâche pas d'une semelle.

Spoiler:

« Dans la plupart des récits que j’ai pu lire » avait-il dit … Mon dieu ce qu’il ne fallait pas entendre pensa Marc-Antoine. Ce prince n’avait aucune expérience du terrain. Sa logique défiait toutes les lois de la nature. Pensait-il réellement que la vie était faite de la même façon que l’étaient les récits héroïques ? Si oui, le groupe d’aventuriers étaient dans de beaux draps. Entre Marc-Antoine le garde incompétent, le prince naïf et Cassiel dont l’utilité était encore à définir – comprenez par là qu’il faisait preuve jusqu’à présent d’une inutilité manifeste aux yeux du bretteur –, c’était une fine que voilà. Seul Yuduar inspirait confiance à l’apprenti chevalier. Heureusement que le capitaine de la garde était là. Il était assurément l’alpha de ce groupe, le guide, le plus grand, le plus fort, le plus …
Clic.
Marc-Antoine fit volte-face et pointa sa lampe en direction de son supérieur hiérarchique. Qu’avait-il fait ? Qu’avait-il touché ? A moins que ce bruit ait été provoqué par un mouvement brusque d’un des deux gus situés plus en arrière ? D’un geste de main, il plaça sa lampe de sorte à apercevoir ses deux autres compagnons de route. Jusqu’à preuve du contraire, ils étaient encore là.

A en juger par son expression facile, c’était bien Yuduar le responsable de ce déclic. Lui qu’il encensait jusqu’à présent venait d’activer, par allez savoir quel procédé, un mécanisme. Ce son n’inspirait aucune confiance au de l’Épée qui voyait déjà de là les embrouilles arriver. Yuduar ordonna dans la seconde de s’arrêter, ce que le cadet de la noble famille guerrière fit. Il grimaçait. Si même le capitaine de la garde et l’homme le plus fort du groupe se mettait à saboter cette expédition, ils étaient mal barrés. En proie à la peur, Marc-Antoine déglutit avec difficulté.
En règle générale un malheur n’arrive jamais seul. C’est écrit dans les récits ça aussi. A ce titre, notre héros envisageait déjà le pire.

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