Le lever se passe sans spécialement de difficultés. Il y a bien le conseiller qui a une tête pas possible en ce moment, clairement du à sa nuit blanche. C’était vrai que Violette avait un peu triché avec Lumi, s’étant un peu relayée avec sa laïum pour pouvoir récupérer un peu de sommeil. Mais ce n’était pas le cas du conseiller, qui avait clairement une nuit d’éveil dans les yeux.

« Eh, t’inquiètes pas, si on trouve rien d’extrêmement urgent, on pourra toujours aller faire une sieste cette après-midi! Mais pour le moment, on a un rendez-vous sur les mers, et ce serait bien impoli de lui poser un lapin! »

Nul doute que le conseiller ne serait pas contre un peu plus de sommeil, mais Violette essayait aussi de l’emmener aussi un peu de l’avant avec son entrain naturel. Elle n’avait pas besoin de le chercher bien loin, un peu comme Lumi, qui, malgré une nuit partielle, était déjà partie gambader et se rouler dans le sable avec Freesia.

« J’ai pris quelques croquis pendant la nuit, ça m’a littéralement prit des heures, même si j’aurais pu utiliser mon cristal de souvenirs ou mon cadre magique… Mais je me serais ennuyée, sinon. »

Pas du tout parce-qu’il n’y avait pas pensé sur le coup. A vrai dire, elle avait vraiment lancé des croquis simplement parce-qu’elle s’ennuyait comme jamais à attendre dans une grotte qui pue. D’un côté, ils seront plutôt utiles, maintenant qu’elle y pensait, puisqu’un expert pourra sûrement les identifier, et qu’ils allaient, justement, en voir un, d’expert!

Une petite invective mentale et Lumi commença à suivre le mouvement, sans vraiment s’arrêter de faire la folle. Si Violette avait une sacré réserve d’énergie, Lumi réussissait largement à la surpasser. Enfin, c’était plutôt que l’aventure l’appelait, et Lumi était certainement plus heureuse de pouvoir enfin s’amuser de nouveau. Elle ne râlait pas - Violette lui avait enseigné qu’il y avait un temps pour le travail, et un temps pour le jeu. Et la nourriture. Le voyage au port se passa bien, Xylia offrait des discussions bien agréables et des histoires qui ne manquèrent pas de faire rire l’aventurière. De son côté, elle avait plutôt des histoires de marins à moitié ivres, mais des histoires sur les merveilles et les dangers de l’océans. Pas vraiment effrayants - elle gardait ces histoires là pour un coin de feu.

Le Captain, fidèle à lui-même, s’empara des croquis pour aller agrémenter son avis d’expert avec une encyclopédie sur les poissons. Heureusement, Violette y avait passé un temps assez dingue, ce qui permettait d’avoir fait des dessins de bonne qualité, assez pour qu’il puisse identifier un Faungupta. C’était un nom que Violette avait déjà entendu, sans vraiment savoir à quoi ça ressemblait ni vraiment ce que c’était, à part un truc chiant pour les pêcheurs. Mais aussi une bestiole du grand large et des abysses, qui n’avait rien à faire sur la côte… D’un côté, il restait un peu émerveillé lui-même de la mer, et c’était à ça qu’on voyait que le Captain était un homme de passion avant tout.

« Sûre et certaine qu’il était bien là, mais d’un autre côté, il était plus tellement vivant. J’doute qu’un courant l’ai ramené là, mais il a pas un prédateur, le Faungupta? C’est peut-être lui qui l’a ramené là. »

Après tout, dans l’immensité de l’océan, il y avait toujours un poisson plus gros. Même si au bout d’un moment, leur simple apparition relevait plus des légendes que des faits, ces légendes ne venaient pas de nulle part non plus. La captain, lui, se gratta la barbe. Avant de retourner feuilleter son bouquin pour confirmer ce que son avis d’expert savait sûrement déjà.

« Pas vraiment, y a bien un animal qui les mange par contre, le Tortugram, mais c’est assez gros, trop gros pour traîner si près des côtes aussi. Et ‘me semble bien qu’il les mange entier, les Faungupta, ça laisse pas des os bien nets! »

Laissant l’occasion à Xylia de poser quelques questions au capitaine, Violette s’étira légèrement un peu en retrait, les yeux vers le large. La mer avait toujours quelque chose de fascinant, de difficile à expliquer. Toujours une dimension d’inconnues et de découverte qui parlait particulièrement à la brune.

La petite troupe embarqua peu de temps après, Violette faisant des grands gestes de loin pour signaler au conseiller que le départ était imminent. Elle ne savait pas combien de temps le voyage allait durer. Peut-être que le conseiller pourrait faire une sieste, pendant que Violette essayait un peu de canaliser les laïum pour ne pas qu’elles se jettent aux quatre coins du bateau. Lumi, de son côté, se pencha bien rapidement au-dessus du bord du navire pour aller renifler cette drôle d’eau salée. Pas la première fois qu’elle voyait la mer, mais c’était son premier voyage en bateau. Sursautant alors qu’une vague vint lui laper le museau, elle alla se réfugier chez Violette qui leva les yeux au ciel, un sourire amusé sur les lèvres.

« Et sinon, le phare, il est automatique? Y a jamais personne qui y va? »
« C’bien ça. Y a bien la vieille Germaine qu’est persuadée que y a un type dans la quarantaine qui y vit, mais c’est une des seules qui l’a vu. Moi j’pense que c’est un ramassis de conneries. »

Bon, à priori, l’endroit serait désert. Le conseiller n’était pas si convaincu que cela de ses lumières, mais Violette voulait en avoir le cœur net. Si quelqu’un y habitait, il aurait aussi la première vue sur des phénomènes bizarres dans les environs. Cette personne aurait sûrement aussi envie d’être seule, et l’interroger serait sûrement plutôt compliqué. Mais sinon, peut-être que d’autres indices s’y dissimulaient…

L’aventurière se retourna ensuite rapidement vers la garde, qui semblait mieux réveillée que le conseiller. Certainement qu’elle avait utilisé la même technique de fouine qu’elle de laisser son familier faire la moitié du boulot. Ou peut-être était-elle encore plus résiliente qu’elle. Dans tous les cas, il ne faudrait pas non plus laisser trop la fatigue les gagner. Sinon ils risquaient de louper la moitié des détails. Violette, elle, tentait de rester alerte dans les moments qui importaient le plus.

« Ca va bien, toi? Tu as l’air plutôt en forme! »

L’aventurière s’enquérit rapidement de l’état de Xylia, alors que l’îlot du phare approchait et grandissait de minute en minute.

Alors qu’ils accostaient, Haddock leur annonça qu’il garderait le bateau ici, et Violette ne tarda pas à poser pied à terre, suivi de peu par Lumi qui après un petit bond et un très court vol, décida de prendre une petite pose héroïque. L’aventurière, elle, s’avança directement vers le phare, bien plus intriguée par l’imposant édifice que par ce qui se trouvait autour. Elle alla directement jusqu’à la porte en bois, avant d’aller y toquer, et, dans l’absence de réponses, d’y entrer. Lumi, elle, semblait par contre un peu plus excitée que prévu, comme avant un repas.

* Lumi faim. *
* Lumi tout le temps faim. *
* Oui, mais Lumi sentir manger. *
* Manger? Quel genre de manger? *
* Bon manger. Cuisiné. *

Pas si déserte que ça, cette île, sûrement…

Spoiler:

-Tu as dû en avoir des aventures, capitaine, après toutes ces années.
-Pour sûr ! Mais qu’il ne soit pas dit que je n’ai plus la vigueur de mes jeunes années ! Je suis toujours capable de dompter les houles les plus terribles !
-Je ne me serais jamais permis, Capitaine. Voyez, j’ai pas trop le pied marin. Les bateaux, c’est plus pour aller d’un point à un autre. Ou éventuellement pour pécher un peu lors d’une séance de cohésion de groupe des examinateurs, même si c’est un peu derrière moi tout ça. J’ai entendu des histoires de marins, mais souvent, ils sont un peu portés sur la bouteille et j’ai toujours l’impression qu’ils exagèrent. C’est l’amusement de la taverne qui veut ça, mais je me disais que des histoires authentiques, ça serait pas mal d’en écouter.
-Le chemin est trop long pour qu’il soit passé dans le silence, mon ami. Je vais te conter les plus belles de mes conquêtes nautiques. De celles qui auraient pu me faire perdre l’esprit, mais j’ai tenu ma quille fièrement dans leurs eaux traitresses !

Le capitaine m’a l’air quelqu’un de tout à fait authentique et la détermination dans sa voix ne ferait souffler aucune contradiction quant à la véracité de ces récits. Emmitouflés dans ma cape, je me protège des embruns salés qui ont tout de même le don de me filer un sacré coup de fouet pour rester éveiller. Si sa vie semble faite d’aventures extraordinaire, je sens que ma prochaine nuit ne fera l’objet que d’un long et profond sommeil réparateur. Si je ne fais pas un somme plus tôt. On m’a raconté en substant cette histoire de poissons géants des abysses qu’on aurait trouvés. Vrai que c’est assez inquiétant comme nouvelle et que ça serait pas surprenant que ça ait un lien avec les problèmes de pêche du village. Parait que ça bouffe pas mal en temps normal. Enfin, peut-être que ça mange beaucoup quand ce n’est pas dans les abysses. On a des gens qui ont visité ces profondeurs ténébreuses pour savoir ce qu’ils s’y passent ? Ça tombe, ils hibernent là et ne sortent que pour se remplir la panse de temps en temps. Les secrets du monde marin sont aussi nombreux qu’inconnus. La faute à un petit problème d’apnée limité. Heureusement qu’on a des marins pour nous faire vivre des aventures extraordinaires à travers leurs mots, ça permet de motiver des petits jeunes à continuer le métier et c’est ainsi qu’on a du bon poisson sur les tables de la Capitale. Et ça, c’est important, parce que c’est plein d’eau méga 3. J’sais pas ce que c’est. C’est un type cultivé qui en a parlé un jour avec l’air sérieux de ceux qui savent plus que les autres. Ce jour-là, j’étais plus intéressé par ma bière.

Pour changer.

-Tu m’aurais vu, il y a quinze ans. J’ai fait face avec un courage dont peu sont capables une sacrée morue qui terrorisait tout le village. Un spécimen plus fort que les autres qui avaient déjà emportés deux pécheurs loin du village et de leur aimante famille. Triste histoire. Je lui ai tendu un piège aux premières ombres du soir avec tout mon matériel. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’elle morde à mon hameçon et là, je peux vous dire que ça a été un combat dont Lucy a été témoin. Nos cris ont résonné jusqu’aux cieux qui se sont ouvert en un éclair. La mer était déchainée. Et au petit matin, exténué, elle gisait là, épuisée, à mes côtés. Je n’étais pas en meilleur état, mais j’ai pu la ramener sur la terre ferme pour la montrer à tout le village. Elle n’a plus jamais posé de problème au village, je peux te le dire.
-Fantastique ! Comme quoi, il ne faut jamais sous-estimer les créatures qui semblent ordinaire.
-Elle était loin d’être ordinaire celle-là ! Bien vrai !
-Et des créatures extraordinaires, capitaine Haddock, t’en as croisé durant tes périples ?
-Bien sûr ! Je suis allé de toutes les mers et certaines ont enfantés de créatures aussi belles que retors. As-tu entendu parler des sirènes ?
-Ce sont des légendes…
-Les légendes ont toujours un fond de vérité. Je peux te dire que j’en ai croisé quelques exemples qui m’ont donné beaucoup de mal. On dit que nous, les marins, on est mariés avec la mer, mais celles-là, elles sont un peu nos maitresses. Elles se faufilent jusqu’à nous quand on y fait pas gaffe et viennent passer la tête sous notre quille en riant avant de vouloir nous grimper dessus, autant à bâbord qu’à tribord. Comme si dans la pureté de leur regard, elle essayait d’appréhender la hauteur de nos mats. Et leur chant. Rah. Elles vous font perdre la tête. Leur langue habile vous rentre dans la tête, vous faisant miroiter des monts et merveilles afin de vous faire craquer et que vous plongiez la tête la première dans leur giron. Et alors, une fois dans leur filet, elles entreprennent de vous dévorer de la tête aux pieds et de vous extraire la moindre goutte de votre âme que vous aviez pourtant dédiée à leur mer. Rares ont été ces rencontres, car malgré ma détermination et ma rigueur de marin, je ne suis qu’un homme solitaire qui ne peut rien face au saint d’une mer. Je ne t’en dirais pas plus, mais je suis sûr que tu comprends. On est du même bois. On peut le plier, mais jamais il ne casse. Moi, de ces épreuves, j’en suis sorti grandi. Quoi qu’on en dise. Je vois que tu as toi aussi tes propres créatures extraordinaires à dompter.

Il me fait un clin d’œil avant de faire un signe de tête en direction des deux autres. C’est à ce moment-là que je me rends compte que je n’ai pas du tout comprendre, mais par respect pour le marin, je ne dis rien maintenant.

-Je l’avoue, j’ai perdu la main ces derniers temps. Et puis, les aventures ne viennent plus me croquer à toute heure de la journée comme avant. C’est même plutôt le calme plat. Et je ne te parle pas de la vieille Bart qui ne cesse de m’avoir à l’œil. Des années que je l’évite, mais un jour, je n’aurais plus d’autres choix. Peut-être que ce jour, ce sera la ma dernière aventure.
-mais… Capitaine, La vieille Bart, ce n’est pas une créature marine.
-Bah non.

Il me regarde comme si j’avais dit une bêtise.

-Mais… Capitaine, tu ne parlais pas de combats contre des créatures marines ?
-Bah…. Non. J’parlais des… enfin… tu vois quoi.

Il fait un signe rapide des mains mettant en valeurs quelques courbes sans équivoque. Je comprends soudainement.

-Ah. Alors… Toutes les histoires… c’était… pour ça ?
-Oui.

Un silence gênant s’installe et je préfère m’intéresser à autre chose.
En même temps, la vie solitaire en pleine mer, ça fait des ravages sur les esprits, hein. Faut que je ne note à pas devenir marin. Heureusement on arrive bientôt, ce qui permet d’éviter de croiser le regard du capitaine et de traduire cette petite lueur dans le regard par quelque chose de plus malaisant que ce que j’aurais pensé aux premiers abords. Une fois l’ancre jeté, celle en métal j’entends, Violette saute à terre suivi de son familier. Je lui emboite rapidement le pas, désireux de ne pas trop rester en compagnie du capitaine. Déjà, ça me permet de me dégourdir un peu les jambes en pensant que j’ai pas trop souffert du mal de mer, mais le plancher des vaches, c’est pas mal. Je regarde les horizons sans trop me rendre compte de rien. C’est que je suis fatigué. J’avise même, au bout d’un moment, une petite grotte, m’étant éloigné un peu du bateau. Je n’y trouve pas grand-chose, mais je ne vais pas dans le fond, surtout qu’une bonne partie du passage est inondée. Par contre, je me trouve un petit coin entre deux rochers qui parait parfait pour faire une pause. Juste le temps de fermer les yeux quelques instants avant de repartir. Qu’est-ce que ça pourrait causer comme problème, hein ?

Spoiler:

Un doigt me parcourt le dos, de bas en haut. Je tressaille. Il devrait avoir un arome d’huile florale ou quelque chose dans ce genre. Sous ma peau nue, je sens le confort d’un matelas des plus confortables. Soudain, elle pouffe. Je me retourne lentement, découvrant son sourire cajoleur, ses yeux pétillants de malice et sa bouche entrouverte dévoilant une rangée de dents blanches mordant sa lèvre inférieure. Je m’approche doucement, ma main contre sa joue.

-Bonjour… capitaine.

Je me réveille en sursaut. J’ai la figure humide. Est-ce qu’il a plu ? Je suis pourtant protégé. Ou un crachin soudain portée par le vent. Ou peut-être alors la bave d’un animal qui s’est amusé durant mon sommeil. Combien de temps ai-je dormi ? Pas trop longtemps, je pense. Le temps d’une sieste courte. Mon corps endoloris se plaint de ne pas avoir choisi un meilleur endroit pour taper un roupillon. L’adrénaline du réveil soudain finit par se dissiper, me faisant prendre conscience que j’ai pris un peu de repos, mais faudra pas non plus tarder à se reposer dans un vrai lit à un moment donné. Je m’essuie les yeux, réprimant un bâillement cherchant à me faire replonger, mais je doute que j’y arrive maintenant. J’ai encore dans ma tête la dernière image de mon rêve. Un visage. Trouble. Et une sensation de vide dans l’estomac. Je l’expliquerais par une faim soudaine, ce que mon estomac semble me confirmer d’un couinement soudain. Lentement, je me lève, forçant sur mes muscles endoloris par l’humidité et le froid de la côte. J’avise autour de moi, constatant qu’il ne semble avoir aucune menace et rien à noter.

Et cette absence finit par me faire tilt.
Où est le bateau ?

Je fronce les sourcils, marchant en direction de l’endroit ou devrait être notre moyen de locomotion. Mais il n’est plus là. Il est parti. Je regarde aux alentours avant de fixer la mer où je finis par le voir, en route pour le village, surement. On ne voit plus grand-chose, surement le brouillard. Je comprends pas tout sur le coup, mais je me dis que les deux autres devraient en savoir plus. Elles sont allés au phare alors j’y vais. C’est là que je le vois. Un vieux. Avec un panier en osier sous le bras, montant difficilement vers le phare. Encore plus intrigué, je commence à avoir sacrément mal au crâne. Alors, je grimpe le chemin pour aller à sa poursuite, le rattrapant à mi-chemin du phare. Je l’interpelle et il se retourne lentement.

-Excusez-moi, mon bon monsieur, vous savez pourquoi le capitaine Haddock est parti ?
-T’as trouvé ma sirène ?

Je suis un peu décontenancé, mais je réponds rapidement.

-Là maintenant ou dans ma vie, vous voulez dire ?
-T’as trouvé ma sirène ?!
-Oui et non… enfin… je peux vous dire que j’ai déjà trouvé une … sirène… une fois… il y a longtemps.

Un bref flash d’un visage. D’un souvenir.

-Mais je l’ai plus.
-Alors t’as pas trouvé ma sirène.
-ça fait longtemps que vous la cherchez ?
-Depuis le temps que j’ai commencé à chercher !
-Ah oui, effectivement, ça commence à faire long.

Bizarre, ce bonhomme. Je commence à m’inquiéter pour Violette et Xylia.

-Et vous avez vu deux demoiselles, récemment ?
-A la soupe !

Ne me dites pas que ce vieillard compte les manger ?!

-Com… Comment ça, « à la soupe !
-Là-haut. Elles attendent. Pour ça les champis ! La bonne soussoupe.

Il me renvoie un sourire édenté. J’écarquille yeux d’horreurs, craignant pour la vie de mes associés. Si on apprend que j’ai laissé une garde et une aventurière finir en soupe pour un vieux fou, ça va attirer pas mal d’ennui sur la guilde. Alors je le presse d’aller vite.

-Montons vite, il fait faim, hein ?

A trop le brusquer, il pourrait me résister et ça tombe, il faut une clé pour ouvrir la porte. Je lui prends son panier de champignon et je l’aide à progresser sur le sentier jusqu’à arriver au phare dont il ouvre la porte qui n’était finalement pas fermé. Je découvre alors dès l’entrebâillement les mines plus que vivantes de Violette et Xylia et je souffle un bon coup, rassuré.

-Qu’est ce qui se passe, Jack ? T’es tout blanc.
-Non… rien… rien de grave.
-Ah bah tant mieux.
-Par contre, le capitaine Haddock est parti. Si quelqu’un pouvait m’expliquer ce qui se passe ici ?

Pendant que le vieillard s’approche de son chaudron pour faire son travail.

-Bon, cette soupe !

Qu’il dit, mais vous le savez déjà.

Spoiler:

Au final, la fatigue est supportable. Est-ce-que c’est l’air marin, les embruns ou le vent assez incisif sur la côte qui provoque cela? Peut-être un peu des trois, ou simplement l’appel de l’aventure qui résonne et la découverte de nouveaux paysages fort intéressants? Enfin, ce n’est pas les plus intéressants non plus. C’est un gros caillou, un petit îlot avec un grand phare érigé au point le plus haut. De quoi y trouver un peu de végétation, et quelques traces d’activité.

Violette était partie légèrement devant alors que le Conseiller prenait un peu de repos. Elle ne lui en voulait pas du tout, après tout certainement qu’à son âge elle gambaderait beaucoup moins aussi. Surtout après une nuit blanche. Le phare, néanmoins, était habité. Et ça avait même semblé faire perdre sa mâchoire inférieure à ce bon vieux capitaine sous la surprise. Comme quoi même les vieux loups de mer n’avaient pas toujours la science bien infuse.

Par contre, ils étaient encore tombés sur un sacré phénomène, le genre de gars qui pouvait rapidement vous donner une migraine avec ses mots et ses réponses. Et sa sirène. Qu’on avait pas trouvé. En même temps, ça ne courait pas les mers non plus, mais il parlait certainement d’autres choses. Il avait cet air des vieux fous, pas trop bien dans leur tête, mais dans son ramassis de bêtises, il y avait quelques informations à en tirer. Des bâteaux dans le coin. Le phare qui était son “pote” ou un truc du genre. Peut-être un petit différent avec le village aussi visiblement. Le genre d’histoire bien campagnardes qui restent à jamais des secrets dans ces petits villages et vouées à mourir avec leurs plus vieux représentants.

« Moi c’est Violette, et par là bas Xylia. Et les deux petites dragonnes c’est Freesia et Lumi. On vient pas des bateaux, on est juste de passage à Dunskerk! »

Le vieux leur adressa ce genre de regard qui voulait dire qu’il avait pas tout compris, et qu’il avait certainement déjà oublié une bonne partie de ces deux phrases. Mais ça sembla lui convenir, et, visiblement, les invita à la soupe. Visiblement la solitude lui pesait, si personne ne passait sur cette île depuis des décennies, il s’était inventé des trucs. Mais n’avait pas particulièrement cette envie de revenir sur la terre ferme pour autant. Ou peut-être que cette envie avait fini par le quitter à force d’y être resté?

Même si Violette essayait de tenir la discussion, le vieux ne semblait pas particulièrement réceptif et les sujets rebouclaient assez vite. Peut-être n’utilisait-elle pas les bons mots? En tout cas il y avait peut-être une meilleure compréhension entre lui et Haddock. P’t’être bien qu’entre vieux qui avaient plus toute leur tête ça se passerait mieux, pendant la cueillette aux champignons.

Violette se retourna vers Xylia, avec un regard qui en disait long sur son état d’interrogation. Elles ne savaient pas trop ce que ce type faisait là ni pourquoi personne de la ville n’était vraiment au courant. Même si le phare était autonome. Lumi, elle, s’était assise à table à côté de Violette en faisant mine d’attendre la fin de la soupe. Pouvait-elle seulement vraiment faire confiance à cette soupe et au viel homme?

« Ils ont pas tous l’air très très sains d’esprit dans le coin… A moins que ce soit nous qui sommes bizarres? Tu penses que la soupe est bonne au moins? J’ai pas trop envie de tomber malade là… »

Violette continuait de prendre la journée calmement, son attention dirigée vers la garde. Elle avait toujours tellement à dire, des petites anecdotes amusantes, et aussi quelques indices plus religieux qui éveillent un peu la curiosité de l’aventurière. Elle croyait en Lucy - plus parce-que tout le monde autour d’elle y croyait qu’autre chose. Même si elle n’était pas plus pratiquante que cela, elle invoquait souvent les faveurs de la déesse lorsque la chance devait lui sourire, même si ça ne marchait pas toujours. Elle était relativement nulle en théologie, mais toujours prête à en parler aussi.

« Pour répondre à ta question d’avant, j’ai surtout choisi d’aller à la Guilde pour voir du pays, des gens et vivre des aventures. Juste les découvertes, les rencontres, les spécialités locales des quatres coins du Royaume, j’ai l’impression qu’une vie ne serait pas suffisante pour tout découvrir. Les quêtes au final c’est secondaire mais c’est un moyen de gagner sa vie qui permet en même temps de visiter pleins d’endroits. Je pourrais pas supporter de me retrouver en garnison dans le même endroit et d’en sortir une fois toutes les deux lunes, et encore moins qu’on me dise quoi faire ou qu’on me donne des ordres. »

Les deux jeunes femmes étaient seules, et certainement pour un petit bout de temps d’ailleurs. Même si elle n’espérait ne pas oublier d’aller voir comment le conseiller s’en sortait. A vrai dire, une fois rentrés et avant la nuit, une bonne grosse sieste s’imposait puisque la prochaine investigation allait devoir être nocturne, pensait-elle. Mais ils n’en étaient pas encore là.

« D’un côté, l’aventure, c’était un peu un rêve de gamine. Y a pas vraiment eu de déclic en soi, c’était juste … La fascination d’une gamine pour un monde qu’elle ne pouvait pas découvrir. Comme pleins d’autres à qui on essaye de tracer leur vie et leur futur et qui décident de tout plaquer pour aller faire autre chose, comme élever des chèvres dans les montagnes, ou partir à l’aventure. Et de ton côté d’ailleurs, qu’est-ce-qui t’a mené jusqu’à la garde? »

Violette se rendit d’ailleurs compte qu’elle en avait peut-être un peu trop dit. D’habitude les gardes ne la laissaient pas autant en confiance et il ne manquait qu’à ce qu’elle lui dise qu’elle avait fugué pour se retrouver potentiellement avec de la paperasse au derrière. Certainement pas bien plus - elle était majeure depuis quelques années maintenant et celle qui avait reporté sa fugue était maintenant morte. Mais il y avait certainement un petit tas de papiers qui devaient l’attendre et qu’elle avait toujours pris un grand soin d’éviter. Violette était aussi comme ça : Pas très responsable sur ce genre de questions...

Dans tous les cas, elle avait encore le temps de lui parler de ses voyages et ses aventures, les créatures qu’elle avait évité - ou chassées alors qu’elles risquaient de faire de nombreux morts dans un village perdu. Ou encore le temps de lui parler des choses qu’elle avait pu manger ou boire aux quatres coins du royaume, les meilleures préparations d’auberges qui ne payaient pas de mine au premier abord. Elle pourrait en parler des heures. Pas si différente de Lumi, quand on creusait un peu… D’ailleurs, la laïum s’agitait toujours un peu quand on parlait de nourriture, même si elle était relativement sage actuellement.

Quelques minutes plus tard, voici leur hôte qui revient de sa cueillette de champignons. Et visiblement, il en a trouvé un de l’espèce “Conseiller” qui devait ronpiche près d’un rocher, même s’il était particulièrement blanc. Peut-être pour ça qu’il l’a confondu avec, d’ailleurs. Mais visiblement, ce n’était pas vraiment ça le souci.

« Le Capitaine est parti?! »

Violette se lève d’un bond, il n’avait pas l’air de plaisanter, et ça expliquait aussi sa pâleur. Sans navire pour repartir vers les côtes, ils étaient presque condamnés à rester là avec le vieux fou leur parlant de sa sirène à manger de la soupe de champignons. Cela ne prend pas plus de quelques secondes à Violette pour abandonner sa place à table et aller constater le départ du capitaine de ses propres yeux. Et en effet, l’absence du bateau sur la plage et une voile au loin ne laissait que peu de soupçons. Sans même un mot? Et elle qui pensait que le vieux loup de mer, bien qu’aux propos douteux, était assez fiable. Après, est-ce-qu’il était juste parti chercher des choses pour le vieux et comptait revenir avec des trucs? Ou est-ce-qu’ils venaient de tomber sur un sombre secret du village qui ne devrait jamais s’ébruiter, d’où cette trahison? Et puis, est-ce-que sa sirène ne serait pas la vieille folle que Jack avait pu rencontrer hier? Violette retourna rapidement dans le phare, Lumi y étant restée parce-que, évidemment, la soupe.

Pas de quoi paniquer, Violette pourrait toujours envoyer son ombre régler son compte au Capitaine, et, de tout de façon, il y avait des bâteaux à investiguer cette nuit. Du repos avant ne serait pas de refus, et, dans un phare, le point d’observation serait plus qu’idéal. Au pire, ils pourront toujours s’emparer d’un de ces mystérieux bateaux nocturnes pour rentrer… Restait à voir si leur demander gentiment était une option ou bien s’il allait falloir les persuader d’une autre façon.

« Le Captain est en effet retourné au village. Monsieur? D’ailleurs, vous ne nous avez même pas dit comment vous vous appelez! Aurions nous l’honneur de connaître l’identité de la personne ayant confectionné cette soupe à l’arôme exquis? »

Un peu de flatterie ne faisait pas de mal, même si c’était effectivement vrai que la soupe ne sentait pas si mal que cela. D’ailleurs, Xylia avait semble-t-il examiné les champignons.

« Vous le connaissiez déjà, le Capitaine Haddock? Vous ne vouliez plus rien avoir à faire avec le village? »

Histoire peut-être de relancer un sujet sensible, cela pourrait éclairer la raison du départ précipité du capitaine. Elle le voyait mal les trahir ainsi, après tout. Même si c’était une éventualité. Violette se retourna ensuite rapidement vers ses compagnons d’aventure.

« Si des bateaux viennent pas loin d’ici, on sera dans une position parfaite pour les observer. J’enverrai mon ombre au village pour vous chercher demain ou on empruntera un de ces navires qui viennent dans le coin pour rentrer. On peut se reposer avant, je pense que ce ne sera pas une nuit à l’auberge, encore... »

Spoiler:

J’écoute d’une oreille distraite. C’est que j’ai faim et la promesse d’un bon petit repas me détourne de mes questions. Mon ventre gargouille et le doux fumet qui s’échappe de la marmite du vieux Pavo, puisqu’il se présente ainsi, suffit à étouffer mon sens du devoir. La perspective de finir le repas sur les petits marrons de Xylia est aussi plutôt satisfaisante. Toujours partir avec des gens qui savent faire des bonnes choses à manger, ça permet de faire un voyage beaucoup plus agréable. Dommage que Violette ne sache pas préparer des trucs comme Xylia, ou alors, ces talents sont beaucoup plus cachés.

-Assurément. Pour qu’elle vous laisse en vie, il a dû avoir quelque chose de spécial entre vous.

Apparemment, sa sirène a dévoré son équipage. Je juge pas les histoires qui commencent sur le sacrifice de tous ces amis, ils ont peut-être leur raison. C’est peut-être un cadeau commun de l’équipage à leur capitaine qui s’est un peu retourné contre eux. Puis, si les sirènes aiment manger les gens, est-ce qu’on peut leur en vouloir ? Moi-même, je mange plein de gibiers, ce n’est pas pour autant qu’on va me pendre sur la place publique, non ? Après, dans la chasse, c’est le combat de l’un contre l’autre. Faut apprendre à perdre. On ne peut pas tout le temps gagner avec l’assurance de ne pas échouer. Ça fait partie du cycle de la vie, non ? J’hésite à lui dire que, peut-être, elle n’avait plus fin et elle comptait le garder pour son quatre heure. Une friandise qu’on garde pour les occasions spéciales, même si je dois avouer qu’il n’est plus tout jeune. C’est peut-être par peur de chopper des maladies et de devoir batailler avec les petits os pour peu de bonnes viandes que la sirène s’est dit que ce n’était pas nécessaire de manger Pavo. Enfin, je saurais jamais. Surtout qu’à penser de bouffes, là, j’ai encore plus faim et heureusement, on se met à table.

Je dois dire que la soupe est bonne. Clairement, Pavo a un certain talent dans la cuisine, ce qui est un peu normal quand on est censé faire sa bouffe avec les produits locaux. Si le phare est douée d’une conscience dont lui seul peut entendre les conseils, il a surement lu des livres de cuisines dans sa jeunesse de tas de cailloux. Je lui fais part de ma satisfaction et il me remercie bien. La nourriture déliant les nœuds de mon estomac, je me permets de lui poser une question.

-Et sinon, ça fait combien de temps que vous tentez de la retrouver ?

Il répond le plus facilement du monde. Trente ans.
Aoutch.
Clairement, c’est de l’amour. Ou de la folie. Mais je peux vous dire que c’est difficile à dire, hein, en tout cas, je trouve. Ma théorie sur son gout filandreux de vieillard tombe à l’eau. Il devait être jeune et fringuant. Peut-être bien que la sirène avait des velléités de créer un chainon manquant entre son espèce et les humains, mais que les aléas de la vie lui en ont empêchés. J’aimerais bien l’aider, ce pauvre bougre, parce que c’est une belle histoire.

-Vous la cherchez comment, du coup ?
-Je regarde la mer ! Et j’attends. Elle finira bien par me retrouver.

Par contre, c’est une belle histoire qui sent un peu le périmé. On les connait, les femmes, loin des yeux, loin du cœur. Et puis les flots portent d’autres fringuant bonhommes dont la frustration exacerbée sur la mer permet une plus grande ouverture des esprits envers les espèces humanoïdes féminines, surtout quand l’autre solution consiste en une viril compagnie aux odeurs de poissons. Faut un peu les chercher, les femmes. On les retrouve pas en restant chez soi. Faut faire le premier pas. Tout faire pour les retrouver et leur chanter des chansons d’amour, qu’on dit. C’est pas en restant dans ce phare qu’il va arriver à grand-chose le papy. Et trente ans d’échec, ça veut tout dire. Alors, je me permets une question qui dérange un peu, mais je pense que c’est important qu’on dise les choses.

-Mais… Pavo, en trente ans, vous n’avez pas peur que votre sirène, elle se soit trouvé un autre marin ?

Le vieux s’arrête de boire sa soupe. Il me lance un de ces regards, je sens presque un instant qu’il serait capable de me noyer dans la soupe. Heureusement qu’il ne reste pas assez de profondeur pour qu’il réussisse son méfait. Je crois que j’ai visé un poil trop précisément. Ça fait mal à son petit cœur. Il veut pas s’avouer vaincu, mais tous les signes sont là. C’est ce qu’il me sort, du coup. Exhibant sa fierté d’homme fidèle avec une petite pique quant au fait qu’il n’aime pas qu’on traite sa sirène de trainé, prête à sauter le pas pour le premier marin venu. Je m’excuse. Il accepte mes excuses. Ça redevient calme. En apparence. Comme s’il oubliait. J’espère qu’il oublie pas. Faut l’aider à le sortir du déni. C’est calme, mais un peu bizarre, je le sens. Alors, je me dis que je devrais m’en aller un peu, pour qu’il se sente plus à son aise.

-C’est où les toilettes ?

Il m’indique l’étage. Surement un vieux système avec un trou qui bazarde à flanc de phare directement dans un coin inaccessible ou même dans la mer. Classique. Je le remercie et je monte. Sauf que j’en profite pour monter tout en haut, sur la pointe des pieds pour pas me faire repérer. J’ai envie de fouiner un peu. Il est quand même vachement bizarre. Puis il y a cette histoire de phare qui fonctionne tout seul. Bon, je suis pas expert, mais l’installation semble plutôt intacte. Pas de signes que Pavo aurait trifouillés dans les cristaux. Ça lui aurait pété à la gueule, de toute façon, je pense. En hauteur, j’ai du coup une vision d’ensemble des alentours. Je remarque rien d’intéressant, pas même un bateau planqué dans une crique. On est bien isolé. Pavo aussi. Faudra compter sur Violette pour nous sortir de là. Je finis par redescendre et je fouine un peu du côté de ses affaires. Dans l’ensemble, il n’y a rien de surprenant. Des affaires classiques, plutôt simples. Pas d’excentricité. Je finis toutefois par noter quelque chose de surprenant. Il y a des réserves de nourritures, mais clairement pas des champignons de l’ile. Des trucs qui viennent du continent. Et des objets plutôt neuf quand on s’y attarde de plus prêt. S’il n’a pas de bateau, le vieux Pavo se fait approvisionner régulièrement et sa soupe de champignon, aussi bonne soit-elle, est juste là pour le côté terroir. Décidemment, il cache bien des choses.

Spoiler:

Un petit coup d'œil à sa soupe de champignons. Elle avait l’air bonne, et elle sentait plutôt bon aussi. D’un autre côté, si le vieux ne savait pas reconnaître les bons champignons des mauvais, il n’aurait certainement pas été là pour leur en parler. Mais si les champignons avaient l’air bon, l’assaisonnement aussi, à première vue. Pas de trucs louches à première vue, même si une fois qu’elle avait reçu son bol, les croutons avaient l’air un peu étranges. Croutons que le vieux n’avait pas, mais, en même temps, avec ses dents inexistantes c’était un peu compliqué. Ils semblaient vraiment bien trop assaisonnés d’un tas de trucs, et bien trop forts.

Violette mangea simplement la soupe, même si elle laissa les croutons dedans. Elle avait un peu de mal à faire confiance au viel homme, à vrai dire. D’habitude, elle les respectait parce-que même s’ils n’avaient plus toujours toute leur tête, ils avaient toujours des histoires intéressantes à raconter ou des anecdotes étonnantes ou amusantes. Là, il déblatérait encore sur une sirène - encore une. A se demander si tout ce que ces vieux fous étaient capables de produire était des sous-entendus douteux…

L’aventurière avait, à vrai dire, complètement la flemme d’essayer d’extraire des informations d’un type qui n’avait plus toute sa tête, alors elle mangea sa soupe assez silencieusement, laissant les croûtons de côté sans vraiment se justifier. Le conseiller parti d’ailleurs pour une petite pause toilettes. Lumi, elle, n’y avait pas eu droit au final, parce-que le mélange n’était peut-être pas adapté à une laïum. Même s’il avait fallu un peu d’argumentation télépathique pour lui faire accepter la chose, et aussi le fait de lui promettre un repas une fois qu’elles seraient ressorties. Au moins, il y avait aussi le dessert de Xylia.

« Oh! Ils sont vraiment trop bons! »

Peut-être un peu rude, vu qu’elle n’avait pas particulièrement complimenté la soupe, mais l’aventurière n’y avait pas vraiment pensé dans un premier temps. Violette s’étira légèrement, avant de se lever. Elle n’était pas vraiment à l’aise, ce vieillard suscitait chez elle un inconfort difficile à décrire, quelque chose qui ne lui donnait pas envie de s’exprimer sous peine de se retrouver avec une autre demi-réponse. Ou bien il y avait toujours la possibilité que ce vieux fou soit vraiment un ancien criminel qui entendait des voix. Mais en soi, elle avait vraiment l’impression que cette énigme serait résolue depuis des mois si les gens du coin étaient sains d’esprit.

« Je vais un peu prendre l’air! Pas comme si je pouvais aller bien loin de tout de façon. »

Surtout histoire de remettre ses pensées en place, parce-que chaque phrase du vieux avait l’air d’être une attaque envers sa santé mentale. Un peu de calme avec Lumi en bord de mer ne lui ferait pas de mal.

Spoiler:

Ah, l’air marin, échouée sur une île quasi-déserte et hostile, si ce n’était pour les champignons qui y poussaient. Lumi était assez déçue de devoir se séparer de Freesia, Violette avait presque hésité à laisser son familier avec son amie, mais elle avait pensé à Xylia qui aurait eu à gérer les deux dragonnes… Et c’était ça qui avait fait pencher la balance. Lumi, néanmoins, boudait un peu. Violette fouilla dans son sac, et en sortit des petits biscuits aux fruits. Elle en donna deux à Lumi, et en mangea un elle-même. Histoire de se faire pardonner auprès de la petite dragonne.

Elle venait de finir son petit biscuit sucré lorsqu’elle aperçut une voile, toute proche, en train d’accoster de l’autre côté de l’île, pas bien grande. Fronçant les sourcils, surprise de voir un navire avec une voile différente de celle de Haddock - du moins de ce qui lui semblait de loin - elle se dirigea vers le phare. Juste à temps pour voir la porte se fermer. Fronçant les sourcils, elle fit signe à Lumi de rester derrière les rochers depuis lesquels elle observait, et commença à avancer d’un pas rapide le plus discret possible. Elle arriva sans encombres près de la porte, derrière laquelle résonnait quelques voix masculines… Pas de bruit de bataille, juste des choses que l’on trainait, lourdes, et des voix.

« - … c’mort pour la pêche, surtout celle au gros là. On chopera jamais sa fichue prime.
- Ouais, fais chier…
- Tiens d’ailleurs, Marcel, t’as remarqué qu’depuis qu’on essaye y a pleins de p’tits qui remontent des profondeurs là? T’pense pas qu’on risque de se faire emmerder? Comme, je sais pas, par des écolos ou des hippies?
- Des écolos ou des hippies? Pourquoi pas des grands-mères tant que t’y es…?
- Haha, t’es con. Bon, allez, aides-moi. »

Et encore un bruit sourd de retentir. Violette ne s’attarda pas, il ne manquait plus qu’ils ouvrent la porte et trouvent l’aventurière derrière celle-ci. Elle alla donc se placer à bonne distance dans un affleurement rocheux, hors de vue du phare, mais pouvant toujours garder un point de vue rapide sur la porte d’entrée en se penchant sur le côté. Lumi avec elle, elle se baissa devant sa petite dragonne qui ne comprenait pas encore tout ce qu’il se passait.

* … Pas rentrer au phare? Freesia où ça? *
* Il y a peut-être des méchants dans le phare. On doit être prudents. *
* Lumi aller la sauver! *
* Non! Tu restes ici. Tu attends. *

Un ton sec, précis, impérieux. Le ton des missions, des quêtes, du travail. Lumi comprenait, c’était important, parce-que c’était ce qui payait ses repas.

* J’ai besoin de toi, pour trouver Freesia, Xylia, et Jack. Pas de les sauver, on ira les sauver à deux. Regarde par les fenêtres, et dis-moi où ils sont! Pas les sauver, me dire où! *
* Lumi y aller! *
* Lumi, doucement! Fais attention. Les méchants ne doivent pas te voir! Tu utilises ton ombre comme je t’ai apprise? *

Un hochement de tête, elle avait l’air d’avoir compris. Trouver Freesia, dire à Violette où, ne pas se faire remarquer. Lumi resta avec l’aventurière, mais son ombre décolla. Parfois, un échange se faisait alors que la laïum réapparaissait rapidement devant une fenêtre, avant de passer à la suivante. Elle était arrivée quasiment en haut, quand Violette reçu un nouveau message.

* Amis en prison! Avec corde! En haut! *

Violette pouvait apercevoir sa laïum, et la fenêtre devant laquelle elle venait de passer. Une commande mentale, et la dragonne était de retour avec sa maîtresse d’une nouvelle transposition d’ombre. Un nouveau petit biscuit pour la féliciter, ainsi qu’un grand câlin.

* On va les libérer, mais je vais essayer de faire ça discrètement. Reste sur le toit du phare sagement sans faire de bruit, et tu auras encore un petit biscuit après. Tu pourras venir quand je te le dirai. *

Violette, elle, de son côté, réfléchissait rapidement à comment gérer la chose le mieux possible. Venant d’un bâteau pareil, ils n’étaient peut-être pas que deux, et le vieux était même peut-être un de leur allié, ou une victime collatérale. Lumi n’en avait pas parlé, mais il se pouvait qu’elle l’avait oublié. Dans tous les cas, s’il était libre, c’est un ennemi. Et assez retord. Violette voyait mal un conseiller et une garde se rendre sagement, à moins d’être vraiment dans une position désavantageuse. Ca, ou il y avait un subterfuge, un truc qui avait permis de les neutraliser. La soupe? Non, elle en avait mangé aussi et se sentait bien. Son talisman d’indépendance n’avait pas bronché… Ça devait être autre chose alors. Mais quoi?

L’aventurière utilisa son ombre pour se retrouver au niveau d’une des fenêtres de la salle à manger. Elle l’avait remarqué pendant le repas, la fenêtre avait subi les affres des éléments. Le bois vermoulu par les assauts du sel marin et des embruns saurait se montrer une bonne porte d’entrée, assez discrète. Un petit coup d'œil, personne, des voix distantes… Ça se tentait. Et au pire, ce sera le plan B.

Violette s’empara d’une de ses dagues, et commença à travailler le bois, gratter, écarter en faisant levier le plus discrètement possible. Les secondes passaient, et l’aventurière progressait lentement dans la fenêtre abimée, jusqu’à réussir à glisser sa lame entre deux planches de bois, et de relever le loquet. On ne pouvait pas vraiment appeler ça un crochetage, mais, à première vue, ça n’avait pas l’air d’avoir levé l’alerte. Lentement, son ombre se glissa dans la salle à manger, et commença son ascension vers ses compagnons. Violette, referma ensuite la fenêtre derrière son ombre tant bien que mal, même si le résultat fut… approximatif.

L’aventurière se coula ensuite une nouvelle fois entre les rochers de l’île, cherchant une cachette discrète. Maintenant, il fallait attendre, laisser à son ombre le temps de monter le plus prudemment possible, profiter des opportunités… A priori, si ses compagnons étaient attachés, ils ne risquaient rien de trop grave dans l’immédiat. Peut-être un interrogatoire…

Du côté de l’ombre de Violette…

Du bruit en bas, elle était sûre d’avoir entendu le vieux parler, même si elle ne pourrait pas remonter l’information. Se coulant dans les zones d’ombres pour être le moins visible possible, l’ombre projetée de Violette commença son ascension sans mal. Jusqu’à tomber devant son pire ennemi : une porte.

Évidemment, elle n’avait pas pensé à ça. Alors son ombre resta sagement dans un coin, à l’ombre, attendant une opportunité, les oreilles tendues. Après quelques longues minutes, des bruits retentirent dans l’escalier, et, alors que deux badauds montaient les marches, l’ombre se coula derrière eux, les collant au maximum - même si elle trouvait ça vraiment dégoutant vu qu’ils sentaient le poisson plus très frais - c’était nécessaire, pour se fondre dans leur ombre, et passer inaperçue à la lumière. Ou du moins, le plus possible.

Profitant de cet ascenseur improvisé, elle finit par arriver jusqu’à la pièce visée, où s’arrêtèrent aussi les deux badauds. Se faufilant à nouveau dans une zone d’ombre, adossée contre un mur sous l’unique fenêtre de l’endroit, restait plus qu’à attendre confortablement le signal de “l’originale”. D’ailleurs, voilà que les endormis se réveillaient alors qu’on entrait dans leur pièce…

Du côté de l’originale…

Attendre était difficile. Allait-il la chercher? Pourrait-elle être couverte? Tiendrait-elle longtemps face à une recherche sur cette petite île? Certainement pas. Elle pourrait voler le bâteau, mais d’un autre côté, c’était aussi un taxi plutôt plaisant vers la terre ferme. Bien plus sûr que de laisser son ombre nager pour aller rechercher de l’aide au village…

En attendant, elle pourrait toujours attendre le dernier moment avant d’être vue avant de passer à l’action. Elle avait légèrement réorganisé ses affaires. Deux dagues dans son tatouage de rangement, une à la ceinture, prête à être dégainée. Un Teizeur dans la main gauche - tenu dans le bon sens. Son arbalète de poing et un carreau de foudre dans la main droite. Sur le côté de son sac, une corde magique. Elle espérait qu’ils n’étaient pas plus de trois à garder ses amis, ou bien ça risquait d’être difficile.

Le temps passait, même si elle avait un peu perdu le compte des secondes sous l’inquiétude. Cela faisait combien de temps qu’elle attendait? Dix minutes? Peut-être quinze… Son ombre avait dû réussir à aller le plus loin possible. Un petit message mental, une explication de ce qu’elle avait en main, et son ombre se mit en place.

Sa vision se brouilla.

Se remit en focus. La pierre du phare autour d’elle, un crâne à gauche juste sous son Teizeur, son bras droit tendu vers une seconde silhouette.

« Bonne nuit! »

Un murmure de l’aventurière, pas de cri d’exclamation, juste un teizeur s’abattant directement sur le crâne d’un des hommes, et le mécanisme de son arbalète s’enclenchant pour décocher une flèche de foudre droit sur l’autre malheureux. Les deux corps paralysés tombèrent lourdement au sol, l’aventurière regarda rapidement autour d’elle, se réorientant. En bas, visiblement, l’opération avait levé l’alerte.

* Lumi, viens. *


Personne d’autre, si ce n’était les petits saucissons accrochés à la poutre la plus proche.

« J’espère que je n’interromps pas un jeu douteux par erreur. Y en a qui aiment ça, apparemment. »

Violette, elle, détestait être attachée, c’était même une de ses plus grandes hantises. Rien que d’y penser, et un frisson désagréable parcourut sa colonne vertébrale.

L’aventurière ne perdit pas de temps, et, tout en parlant, plaça son teizeur à sa ceinture, dégaina sa dague, et alla le plus rapidement possible couper les liens de Xylia, du conseiller, puis de Freesia. Alors que, en bas de l’agitation se faisait entendre, il semblerait que le bruit de deux corps chutant sur le parquet grinçant avaient mis un terme à sa petite escapade discrète. Elle laissa tomber ses deux dagues supplémentaires de son tatouage de rangement, une pour chacun de ses compagnons sûrement désarmés.

« Tenez, prenez ma corde aussi, et saucissonnez-moi ces deux clowns là vite avant qu'ils s'en remettent! Lumi est en haut et… »

Un grattement à la porte plus haut, ainsi qu’un petit cri de laïum impatiente de revoir Freesia se fit entendre.

* Lumi bloquée! *
« … Et faudrait peut-être aller lui ouvrir. Je les retiens pendant ce temps. »

Rechargeant un carreau classique dans son arbalète, dague à la ceinture aussi, elle comptait les retarder le plus possible dans l’escalier. A vrai dire, elle ne savait pas si ces types étaient réellement méchants ou non. Mais pour avoir ligoté une garde et un conseiller de la guilde, certainement que oui. En soit, si elle en blessait un gravement, c’était pas vraiment une bavure policière - vu qu’elle n’était pas de la police…

D’un côté, il y en avait déjà un qui s’était pris un carreau électrique dans le buste… Pas dit qu’il en survive. En espérant que Jack accepte de remplir la paperasse nécessaire en remerciement de ce sauvetage.

Résumé:

Inventaire:

Ils n’étaient pas très cordiaux, mais je pourrais presque regretter l’intervention de Violette sur ce coup. C’est que c’est une sensation pas si désagréable que ça que de se réveiller après avoir été droguer. La drogue, c’est mal. Mais parait que ça fait du bien. A mon réveil, j’étais un peu dans les vapes. Ça tanguait doucement et les formes dansaient devant mes yeux. Puis j’ai constaté la présence proche de Xylia à mes côtés et je peux vous dire que dans ma semi-conscience, j’ai été quelques peu surpris, agréablement, pas ces courbes athlétiques mises en évidences par des liens aussi serrés que nombreux qui me rappellent le bref passage dans une demeure d’adeptes du masochisme avec la garde en compagnie du séduisant Jin, bourreau des cœurs et flamme la plus ardente du royaume. Peut-être que d’être moi-même aussi saucissonner m’a quelque peu émoustiller, mais force est de constater que le discours des deux gaillards a eu le don de me sortir de ma rêverie qui n’a pas sa place en quête. Un peu honteux, je me fous une claque ou deux pour me réveiller définitivement, une fois les mains libérées par l’intervention salvatrice de Violette qui n’était pas saucissonner aussi.

Malheureusement.

-Merci Violette. Je n’oublierais pas de le noter dans mon rapport. Efficace et rapide. Peut-être même trop, ah ah.

Bref.
Je constate que je me suis un peu dégueulassé mes fringues lorsque j’ai dû m’effondrer par la drogue, car s’en était une, hein, on ne trompe personne. Je ne m’endors pas comme ça. Ça me fout en rogne. J’ai pas pris de tenue de rechange. De quoi je vais avoir l’air si je dois sauver le monde avec une grosse tache d’huile sur mes fringues ? Fort heureusement, la rumeur de gens montant les marches m’informe que ce n’est pas mon principal souci en ce moment. Je regarde les fenêtres. Il n’y en a qu’une et elle est bien trop petite pour y passer, même pour les modèles tous en finesse à côté de moi. Alors je vous parle pas de mes biscotos. Va falloir se battre alors. Ça tombe bien, je vais pouvoir me défouler. Juste le temps d’enlever mes vêtements pour pas les dégueulasser davantage ; vous savez que c’est dur à ravoir les taches de sang ; que je plie rapidement avant de les poser sur les tables et suis fin prêt pour n’offrir aucune prise à mon torse musclée. J’aurais bien eu besoin d’huile maintenant. On est prêt. Je suis chaud pour m’en farcir hein. La porte s’ouvre.

-POUR LA GUILDE !

Et je fonce la tête la première sans attendre la réaction des autres. On est là pour se regarder dans le blanc des yeux, hein. Il s’agit d’impressionné l’adversaire d’entrée. Et d’impressionner les alliés, aussi, hein, accessoirement. Devant nous, il y a trois gars qui s’attendent à tout sauf à un conseiller chargeant à pleine vitesse. Les deux aux extrémités s’écartent à temps et je prends celui du milieu qui ne pouvait pas fuir en plein dans le mile. C’est un beau bestiau, aussi, mais avec un Jack lancé à la réception, c’est compliqué de tenir la position. Je me saisis de lui et je l’emporte dans l’escalier. On perd l’équilibre. On roule en boule de marches en marches et je peux vous dire que ça fait un mal de chien avant de chuter du dernier mètre de l’escalier en colimaçon parce qu’il n’y a pas de garde-corps plein à cet endroit-là. C’est mal foutu. On fait péter une table sous notre poids cumulé et on s’arrête à un mètre l’un de l’autre, en comptant les blessures. Je me sentais plus fort quand j’ai chargé, beaucoup moins maintenant. Ça doit être l’incroyable pouvoir de l’amitié qui vous donne des ailes, ça. Etre regarder par des gens qu’on apprécie et se battre pour les sauver, ça vous donne un coup de boost. Là, je les vois plus, donc je suis moins serein, mais je leur fais confiance. Elles ont de la ressource.

Je me relève sur mes deux jambes et j’arme mes poings prêt à le bastonner dans les règles de l’art, ça me rappellera quand je me suis foutu sur la gueule avec Jin. Ça a été beau combat. J’espère qu’il sera à la hauteur. Je lui parlerais peut-être du club de la bagarre dans ce cas.

Spoiler:

Efficace et rapide.

Elle avait eu l’occasion d’être plutôt lente, de son côté elle aurait dû réagir plus tôt lors du débarquement de ce bâteau, ou être plus méfiante. Empêcher cette situation d’arriver tout court, en fait. Ce qui prouvait bien qu’elle avait encore du chemin à faire. Sans qu’elle ne le sache vraiment, elle avait eu de la chance de faire ce petit tour et d’éviter ces croûtons bien trop bourrés d’épices pour être bons de son point de vue. Les choses ne tenaient parfois vraiment qu’à un fil. Heureusement, ils allaient tous les trois bien.

Néanmoins, ils n’avaient pas vraiment le temps de faire venir Lumi, une fois les deux zigotos saucissonnés, la visite ne tarda pas à arriver, prenant un peu Violette au dépourvu dans un premier temps. Mais moins que ce fantastique cri de guerre d’un conseiller tout en muscles qui alla percuter l’un des types comme un train percuterait une biche. Avant de se casser la gueule dans les escaliers avec lui. Ce qui laissa l’aventurière légèrement pantoise. Quel homme, quelle puissance, quel dévouement.

L’aventurière ne laissa pas non plus son admiration prendre le dessus. Il restait encore deux ennemis, visiblement tout aussi surpris qu’elle l’avait été, dont un qui alla directement porter assistance à son ami tombé en bas avec le moustachu. Même si après ce qu’elle venait de voir, elle n’était pas trop inquiète, il allait tout de même se retrouver seul contre deux. L’aventurière envoya directement son ombre vers l’escalier après l’avoir rappelé à elle maintenant que l’opération libération était une réussite. Mais le contrebandier restant, de son côté, sortit et activa un objet magique, une sorte de sabre d’eau. Plissant les yeux, elle le vit armer un coup horizontal, largement hors de portée d’elle. Sur ses appuis, elle vit alors une sorte d’onde arriver rapidement vers elle.

L’attaque ne fit que légèrement dévier quelques volutes sombres qui se dissipèrent très rapidement, alors que Violette s’était retrouvée un peu désorientée sur le côté du contrebandier se mettant à courir. Sans pouvoir armer de coup de dague ou d’arbalète bien efficacement, elle profita de sa course pour le faucher au niveau des jambes, le laissant chuter au sol et protéger Xylia de sa charge. Violette, à l’escalier, jeta un coup d'œil à la pièce. Deux types sécurisés, une garde et une laïum contre une personne armée magiquement. Mais peut-être que les autres avaient aussi de l’équipement magique qui pourrait poser problème à Jack! De mémoire, elle n’avait jamais vraiment vu le pouvoir du conseiller.

« Ça va aller vous deux? Vous le gérez? Je vais voir si Jack va bien. »

Pendant ce temps, son ombre dévalait les marches quatre à quatre à la poursuite de tout le monde qui était redescendu. Son arbalète était toujours chargée, mais elle en aurait peut-être besoin en bas, surtout s’il y avait encore plus d’ennemis!

* Lumi encore bloquée! *

Oui, en effet, personne n’avait vraiment eu le temps de s’en occuper, et elle pouvait comprendre pourquoi.

* Lumi! Va voler dehors et dis-moi si des méchants essayent de partir! Ou s’il y en a sur le bateau! *

Et ainsi, la laïum pourra toujours essayer d’empêcher un potentiel fuyard de quitter les lieux avec le navire. Elle n’allait pas laisser filer un si beau moyen de quitter cette île déserte avec un tas de prisonniers. Enfin, pour peu qu’ils sachent réellement naviguer… Tant qu’ils s’écrasaient sur la côte et ne se perdaient pas en haute-mer, c’était bon.

Xylia avait l’air de dire qu’elle gérait, alors, un pouce en l’air de la part de Violette, un sourire, et un dernier conseil avant qu’elle ne disparaisse encore dans un petit voile d’ombres.

« Sois prudente. »

Spoiler:

Il ne se relève pas tout de suite, gémissant de douleur. Visiblement, je lui ai fait quelques dommages, ce que je peux comprendre. Je me suis senti particulièrement en forme durant cette charge. Un peu moins maintenant, mais j’ai pris l’ascendant psychologique sur mon adversaire. J’en profite pour lui refaire un peu ces valeurs morales qui semblent s’être fait la malle au cours de sa vie.

-Tu sais, séquestrer les gens, c’est mal. C’est même puni par la loi. Si tu coopères, je suis sûr que tu auras une peine allégée. Tu m’as même l’air sympathique, je suis sûr qu’on peut mettre en place un programme avec la garde pour la réinsertion des criminels dans la société via la guilde. Ou vous devriez faire des quêtes pour le bien commun et au bout d’un certain nombre, bim, vous êtes libres. ça pourrait être pas ma…

J’arrive pas à finir mon analyse qui, au demeurant, n’est pas déconnante. Je sens un bras me serrer fortement la gorge. On cherche à m’étrangler ! Je me débats, posant les mains sur son coude pour essayer de desserrer son étreinte, mais il tient bien le bougre. Je me projette en arrière pour lui faire frapper le mur qui se produit, mais avec la force que j’espérais. Il tient bon et je commence à sentir mes forces diminuer à force que sa technique d’étranglement dure et fasse effet. Il faut faire quelque chose, car j’ai pas envie de clamser. Je suis pas immortel à ce que je sache. Alors, j’use de mon pouvoir et je me transforme en glooby. Devenant aussi petit et profitant de la surprise, je bondis derrière un tonneau pour disparaître du champ de vision de mon adversaire qui manque de se casser la figure puisqu’il se reposait un peu sur moi et que soudainement, il se retrouve privé de son appui. Entre deux bouts de bois mal agencés, je le vois se relever brusquement et regarder de tout côté, cherchant à identifier ma position, mais je suis bien caché, bien aidé par ma petite taille momentané. Il finit par retourner son attention vers son camarade.

-Collin, ça va ?
-Putain… il m’a pas loupé…
-Attends, je vais m’occuper de toi. Bouge pas.

Je le vois alors poser ses mains sur son ami et celles-ci rougeoient à son contact. Mon avis est que ce type est un soigneur et qu’il va relever son pote en moins de deux ! Je n’attends pas que ça se produise et je me transforme en humain et je me saisis d’une chaise. Le dénommé Collin, penchant la tête de mon côté, me voit, donc.

-Attention Macrae !

C’est suffisamment tard pour que je puisse tout de même agir. Je frappe le dénommé Macrae dans le dos qui s’effondre sous le choc, mais Collin a roulé sur le côté, visiblement ragaillardi et se relève.

-Macrae !
-Putain… non… pas ça…

Collin frappe sa bouche d’une main tandis que de l’autre, il fait jaillir une forme depuis le sol qui prend soudainement chair humaine, ressemblant comme deux gouttes d’eau à Macrae. Sauf qu’il n’a pas d’équipement. Il est donc complètement nu. Je le détaille un instant du regard. L’original, les genoux au sol, ne semble pas ravi.

-Nan mais regardez ailleurs !
-Vous devez avoir du succès.
-C’est toi qui va avoir du succès.

Le double s’arme d’un couteau que l’original lui envoie avant de se relever difficilement. J’engage le combat avec la doublure, contrant son couteau avec ma chaise et lui livrant une droite bien sentie après avoir lâché mon arme de fortune. Je suis à nouveau saisi par le véritable Macrae, dans le dos, mais sa clé de bras échoue à venir m’étrangler et je m’en échappe. Désormais à deux contre un, la situation est critique. Surtout que Collin derrière semble réitérer son manège pour faire apparaître une deuxième version de Macrae nu. Ce qui promet un avenir encore plus déséquilibré.