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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    [DDN] L'ennemi invisible
    Fedora SanwardI'm a Barbie girl, in the Barbie world
    Fedora Sanward
    Informations
    [DDN] L'ennemi invisible
    Jeu 16 Sep 2021 - 0:07 #
    Spoiler:

    Demande de noble : Toile recherchée.
    Pourquoi? Une question malheureusement sans la moindre réponse qui tourmentait la jeune poupée... N'avait-elle pas assez été tourmentée par le passé? Pourquoi maintenant qu'elle goutait enfin un peu au bonheur, fallait-il que ces ignominies se fassent entendre? Ramassis de mensonges éhontés! Ce n'était que cela! On ne s'attaquait plus forcément à son apparence, même si son installation au grand port avait été compliquée, presque autant que vivre dans la capitale en réalité, l'éternelle bonne humeur, la douceur et la gentillesse de cette poupée - peut-être un peu effrayante - avait permis à la demoiselle de chasser les craintes des habitants de cette belle ville, voir même - par certains d'entre eux - se faire accepter. Heureuse dans sa nouvelle ville, elle avait retrouvé son père, entreprit un apprentissage dans le monde merveilleux de l'enchantement et avait même entamé une relation avec l'homme qui faisait battre son coeur depuis plusieurs lunes maintenant... Tout allait pour le mieux.

    Alors pourquoi? On ne pouvait plus la traité de monstre alors, on s'attaquait maintenant à son honneur! Murmure du vent dans une ruelle, colportant les accusations et les mensonges! Déjà elle entendait les badauds sur son passage, ceux qui lui souriaient la veille qui maintenant la jugeaient, affirmant que jamais ils n'auraient cru cela d'elle sans pour autant lui laisser l'occasion de se défendre elle et son honnêteté! Trafic, corruption de garde en se servant de l'autorité de son père, menace et même utilisation de son entreprise pour des affaire douteuses! Voici les accusation que l'on porte, indirectement, sur elle, voici les crimes abjects - ou du moins certains des crimes abjects - qu'on lui prête! Normalement, la jeune poupée aurait fait comme toujours : un grand, beau et effrayant sourire et elle aurait laissé ces ragots glisser sur sa peau de tissu sans y prêter plus l'oreille que cela, à force d'être montrée du doigt elle ne s'en soucie plus réellement. Oui, c'est ce qu'elle aurait aimé faire en réalité mais elle ne le peut! Non seulement elle doit défendre son nom, étant la dernière Sanward elle ne peut le laisser trainer dans la boue, mais plus que cela encore : Son amie et mentor est une enchanteresse reconnue, son père est capitaine de la garde et Faolan, le jeune cuisinier, a également des rêves, pouvoir servir dans de grandes réceptions lui plairait sans doute beaucoup! Si elle se contente d'ignore ces accusations, elle risque d'entraîner dans ces spirales ces trois personnes si importantes pour elle, elle ne peut s'y résoudre.

    Elle est donc passé par le bastion, s'adressant au soldat directement au soldat Meyer dans une tirade digne d'elle. "Bonjour soldat Meyer!" Commença-t-elle? "Comment allez vous aujourd'hui? Il fait un temps radieux vous ne trouvez pas? J'apprécie grandement le climat même si, je ne le sens pas réellement. D'ailleurs j'ai mis ma robe d'été! Est-ce que vous l'aimez? Je l'ai façonné moi-même vous savez? C'est l'avantage d'être une poupée je suppose, on apprend forcément à coudre..." Continua-t-elle, ayant potentiellement oublier la raison de sa visite avant que cela ne la frappe de plein fouet. "Oh c'est vrai! J'étais venue pour vous demander un service, suis-je bête... Pourriez-vous envoyer un garde chez moi plus tard dans la journée? Et s'il vous plait, ne dites rien à mon père! Je ne désire pas l'inquiéter inutilement... Promis?" Insista-t-elle durant plusieurs minutes jusqu'à ce qu'il promette finalement de ne rien dire.

    C'est quelques minutes - à moins que ce ne soit des heures? - plus tard qu'on frappa à la porte de sa demeure. Wilfred, son majordome, ouvrit la porte alors que Twintania, son laïum, tenta d'aller voir qui venait chez eux. C'est après avoir réussi à repousser le jeune dragon que l'ancien aventurier laissa passer les deux gardes, les menant jusqu'au salon où les attendait la demoiselle, lisant un livre sur l'enchantement des pierres précieuse... Relevant la tête, elle se leva d'un bond, ce qui fit trembler la chaine reliant son visage à son corps, manquant de les séparer mais qu'importe? Elle s'approcha des deux jeunes hommes et fit une révérence, tenant sa robe délicatement.

    "Bonjour messieurs et merci d'être venu si vite!" Commença-t-elle avant de regarder l'un des deux jeunes homme fixement. "Nous nous sommes déjà rencontré?" Demanda-t-elle à l'attention de Calixte, certaine de l'avoir déjà vu avant de secouer la tête, laissant passer un petit rire étrangement cristallin vu son apparence. "Mais oui! Sans doute lorsque je passais à la caserne, vous travaillez là après tout n'est-ce pas? D'ailleurs c'est comment? Est-ce que..." "Hum hum..." Le toussotement volontaire de Wilfred la ramène à la réalité, elle était encore en train de s'éparpiller. "Pardonnez moi... Je vous ai mandé car depuis peu, des rumeurs circulent sur mon sujet, quelqu'un s'amuse à m'accuser d'actes illicites et à faire courir le bruit que j'utiliserai mon entreprise ou ma fortune pour corrompre la garde afin qu'elle ferme les yeux sur mes exactions... J'aimerai que vous retrouviez la personne derrière ces accusations afin de comprendre la raison le poussant à agir de la sorte... Je n'ai malheureusement que peu de renseignement pour le retrouver si ce n'est que, la première fois que j'ai entendu des murmures sur mon passage, c'était au marché lorsque j'achetais des poissons... Je sais que c'est mince mais, je prie pour que vous puissiez retrouver le coupable grâce à ce menu indice..."
    Codage par Libella sur Graphiorum
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Sam 18 Sep 2021 - 9:05 #
    C’était sa première assignation, pour de vrai, et Gwain était bien content de la faire avec Calixte, un collègue aux grands talents de déguisement. Il n’avait jamais atteint un tel niveau de comédie, mais s’en était inspiré.

    Gwain était de séjour au Grand-port pour quelque temps, au gré de ses livraisons qui n’étaient pas spécialement compliquée en ce moment. Comme lors de chacun de ses stationnements, il se met toujours à disposition pour aider la Garde. Il passait à la caserne et croisa son ami Calixte. Cela faisait un moment qu’ils ne s’étaient pas croisés, et cela embêtait le jeune homme. Bien qu’il en comprît les raisons, il aurait préféré que les choses ne changent pas aussi facilement. Gwain évitait un peu le sujet, malgré sa curiosité importante. C’était une forme de respect qu’il avait envers les autres espions. Chacun avait ses secrets.

    Mais quoi de mieux pour faire comme avant qu’une petite mission en duo. Surtout que ce qui venait d’arriver tout juste sur le menu était plus qu’intéressant :  Un noble dans le besoin.

    Lorsqu’ils arrivèrent devant la commanditaire, Gwain ne sut trop que penser. Il savait bien entendu que des personnes pouvaient être fortement impacté par des capacités, mais ça le surprenait toujours. Il se demandait même si la personne était belle et bien devant eux, et que ce n’était pas une capacité de télékinésie. Il répondit à sa salutation avec la politesse que l’on doit à une personne de son rang. Puis il regarda Calixte avant de regarder à nouveau Fedora. La noble était bavarde, c’était sûr.

    Le problème n’allait pas être des plus simple à résoudre. En effet, avoir juste comme information le lieu d’une rumeur, c’était maigre, mais rien d’impossible. Une vilaine petite idée ne put s’empêcher de se former dans la tête du jeune homme : peut-être y avait-il une part de vraie dans ces rumeurs. Après tout, ce n’était pas totalement impossible qu’une puissante utilise de son influence pour cacher des problèmes gênants. Gwain se reprit mentalement, il ne devait pas tomber dans le piège de la facilité. Si elle les embauchait pour trouver le responsable, c'était car elle était probablement innocente. Il était tout autant possible que des personnes jalouses cherchent à dynamiter son influence. Ou peut-être simplement que quelqu’un en avait après elle à cause de son apparence particulière… Ils le découvriraient bien assez tôt.

    « Madame, c’est effectivement affreux ce qu’il vous arrive. On va trouver ce ou ces coupables pour stopper ce harcèlement » expliqua-t-il poliment avant de laisser Calixste s’exprimer.

    Après un échange rapide, le duo se retrouva dehors prêt pour leur mission. S’éloignant un peu des regards, Gwain regarda Calixste.

    « T’en penses quoi ? A mon avis, le plus simple serait une approche classique : On se met au marché et on écoute pour savoir si on entend parler de Fédora. Si on n’entends rien, on peut ‘parler entre nous’ un peu fort de Fédora. Les gens aiment les ragots, ils vont surement réagir » expliqua-t-il, confiant mais cherchant une certaine validation.

    Bien qu’il était désormais un espion à part entière, il aimait savoir ce que des personnes anciennes savaient. Et peut-être ça lui permettait aussi de se déresponsabiliser, au cas où …
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
    Informations
    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Lun 20 Sep 2021 - 0:16 #
    Le regard ambré de Calixte caressa les contours encore juvéniles du visage de Gwain, tentant d’y lire la palette d’émotions habilement dissimulée sous les années d’entrainement d’espionnage qu’il ne connaissait que trop bien. Dans le bleu intense des prunelles faisant face aux siennes, il lui sembla deviner un enthousiasme modéré pour leur assignation débutante, ainsi qu’une légère appréhension. Bien qu’ayant supervisé et participé à un certain nombre des étapes d’apprentissage de son jeune collègue espion, comme ayant eu l’occasion de le croiser plus ou moins fortuitement aux bureaux de poste des différentes Casernes en raison de leurs statuts officiels respectifs, Calixte devait avouer moins bien connaitre le Chapardeur que l’Anguille, qui était pourtant arrivée plus récemment dans leur unité particulière. Dans l’unité qu’il venait de quitter, suite à sa démission quelques lunes plus tôt. Fronçant les sourcils au souvenir douloureux de cet épisode singulier, le coursier détourna le regard pour le river sur les rues de plus en plus animées du Grand Port où ils déambulaient après avoir quitté le domaine Sanward.

    Depuis qu’il ne passait plus ses journées – et ses nuits – à courir entre ses emplois formel et moins formel, Calixte se retrouvait avec étonnamment beaucoup de temps libre sur les bras. Ce qui, sans doute, n’était pas un mal, car son suivi obstétrical lui demandait régulièrement d’audacieuses contorsions de planning et son plan de carrière en révision commandait une grande partie de son attention. Evoluant dans un présent rempli de doutes et de remise en question, chaque minute de tranquillité lui permettant de se concentrer égoïstement sur lui-même était un cadeau. Et un calvaire. Nécessaire ; mais pas moins épuisant, physiquement et psychologiquement. Aussi s’était-il peut-être un peu rapidement jeté sur l’assignation en préparation dont il avait entendu l’un de ses collègues – le soldat Mayer – parler, la fuite en avant ayant toujours été l’un de ses moyens de défense face à l’adversité. Et peut-être n’était-il pas tout à fait prêt à ranger de côté son passé d’espion, car il ne lui avait pas fallu plus qu’apercevoir la silhouette familière de Gwain entre les murs du Bastion pour lui proposer d’être son binôme sur cette affaire. Peut-être, aussi, avait-il besoin de s’assurer une énième fois du plumage de son jeune camarade, avant d’oser l’imaginer voler de ses propres ailes dans le décor enténébré de leur travail de l’ombre.

    Leurs pas les dirigèrent instinctivement au détour d’une ruelle moins passante, et Calixte se reconcentra sur les propos de son collègue, calant une hanche contre une petite pile de caisses.

    - Le marché est effectivement une bonne piste, acquiesça-t-il, sans s’appesantir sur le fait que c’était probablement aussi la seule. Et tes idées d’action sont bonnes, ajouta-t-il avec un léger sourire. Je ne suis pas sûr que nous ayons besoin d’aller jusqu’à lancer des appâts pour ferrer nos suspects, mais il est toujours bon d’avoir un plan B.

    Levant ses bras parsemés de divers objets ensorcelés – un jour il lui faudrait vraiment trouver le moyen de tout regrouper ou bien de pouvoir les dissimuler car leur quantité devenait ridicule – le coursier indiqua certains de ses items.

    - Ces bagues vont nous permettre de mettre à contribution les fourmis et araignées du coin, en espérant que les affaires humaines les intéressent un tant soit peu, expliqua-t-il en tendant celle de communication avec les arachnides à son camarade. Ça nous permettra de ratisser un peu plus finement, et largement.

    Poursuivant son mouvement pour cueillir la petite shupon qui observait timidement la scène depuis son épaule, il présenta celle-ci à Gwain.

    - A nouveau pour couvrir d’emblée plus de terrain, je pense qu’il vaut mieux qu’on se sépare, au moins pour le début. Je te laisse Ashae. Elle semble réservée comme ça, mais d’ici quelques minutes lorsqu’elle se sera acclimatée à toi, elle cherchera probablement à te détourner de ton objectif principal pour te quémander de l’eau et des caresses, prévint-il tout en rivant de gros yeux sur la shupon qui lui renvoya un regard – presque – parfaitement innocent. Elle m’est liée par empathie, est dotée d’un talisman de localisation qui m’informera de votre position, et d’un grelot de familier qui peut m’appeler si besoin. Va avec Gwain, s’il-te-plait, Ashae.

    La petite créature rose évalua d’un œil rapide le jeune espion, et après avoir jugé qu’il ne semblait pas très dangereux tout en étant une source potentielle d’attention, quitta les mains de Calixte pour voler jusqu’au blond sommet de ses cheveux où elle entreprit d’arranger quelques mèches pour se faire un nid.

    - Elle peut être un peu têtue, mais devrait se plaire sur ton épaule, ou à voleter autour de toi, si tu veux la déloger de ta tête, grimaça Calixte.

    Sa première impulsion avait été d’aviser Mélyne, qui était bien plus discrète pour ce type de mission. Mais depuis l’expédition au désert volant, il était presqu’impossible de déloger la petite glooby de la jardinière magique qu’il avait installée dans sa chambre partagée au Bastion et dans laquelle la plupart de ses familiers aimaient se reposer. Profitant de son corps gluant de quelques centimètres de haut, Mélyne se cachait sous les diverses plantations dès qu’il la cherchait, et s’accrochait désespérément au premier végétal passant sous ses pattes s’il tentait de l’attraper. Après une poignée d’échecs, Calixte, qui ne savait que trop bien ce que tous avaient perdu dans les profondeurs de la cité entre les dunes, n’avait pas eu le cœur à forcer son familier hors de l’enceinte rassurante du jardinaland et s’était résigné à l’y laisser en paix pour le moment. Décidant d’emporter pour l’assignation du jour Ashae et Vreneli, son teisheba.

    - J’évoluerai d’ailleurs probablement sous une autre forme, pour la phase d’approche, précisa-t-il en sous-entendant à Gwain qu’il se livrerait à son exercice préféré de se couler dans une bille pour appréhender son entourage avec plus de discrétion. As-tu de quoi changer de visage au cas où ? Je peux te prêter mon déguisement et mon peigne magique si tu en as besoin.

    Certaines habitudes avaient la vie dure et, distraitement, le coursier se demanda ce qu’il ferait de tout son matériel d’espionnage. Le lèguerait-il à ses collègues de l’ombre ? En profiterait-il pour faire davantage de missions officielles d’infiltration ? Ou bien quitterait-il finalement la Garde pour se lancer dans un travail similaire mais loin des instances publiques ? Secouant doucement la tête pour chasser ces pensées distrayantes, il attrapa un dernier objet dans son sac-à-dos et le passa autour du cou du Chapardeur, laissant trainer ses mains sur les épaules de celui-ci dans un élan d’inquiétude et de tendresse toutes fraternelles.

    - C’est un collier jumeau. Je porte celui qui lui est lié, ainsi si l’un de nous deux devait être en danger, il peut insuffler un peu de magie dedans pour prévenir l’autre. C’est peut-être un peu trop, toute cette artillerie pour cette mission-là, avoua-t-il avec un sourire contrit. Mais… fais-moi le plaisir d’être prudent, malgré tout.

    Leur insouciance leur avait coûté Ruth. Leur inattention avait pris Vaelin. Leur fol optimisme avait niché d’immuables fantômes dans les yeux de Xylia. Leur inconscience avait précipité Zahria dans la gueule du loup, où elle évoluait encore en funambule au-dessus des crocs acérés de la bête. Et lui, l’ancien Damoiseau, éclaté de doutes et d’une culpabilité prenant racine sur les reliefs tranchants de son âme ravinée, ne manquerait pas de s’étioler tout à fait s’il devait perdre encore l’un de ses collègues par négligence. L’un de ses amis. L’un des membres de sa famille officieuse.

    - Remonte cette rue-là, je vais passer par l’artère côté quartier touristique pour aller au marché. Si l’on ne s’y recroise pas directement, rendez-vous à la planque dans deux heures. Prêt ?

    Récap objets prêtés:
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Ven 24 Sep 2021 - 9:20 #
    Gwain écoutait son ancien mentor, toujours avec un grand plaisir. Il avait beau avoir fini ses armes et être officiellement un espion, il sentait une inquiétude de la part de Calixste. Peut-être était-ce aggravé par son départ malheureux, mais cela amusait le jeune espion. Ca avait beau l’infantiliser un peu, il avait l’habitude et n’était pas dérangé.

    Gwain accepta la bague, l’observant un instant. Il n’avait pas l’habitude des objets magiques même si il en avait déjà utilisé durant sa formation. Il fallait définitivement qu’il en prenne, pour complèter ses propres compétences. Peut-être demanderait-t-il conseil sur que prendre en premier. Mais est-ce que des fourmis pouvaient vraiment être au courant des rumeurs… Et puis, parler à des araignées n’était pas vraiment un rêve pour Gwain. Il préférait pouvoir les écraser sans se sentir coupable de tuer une mère de famille…

    Merci, ça sera effectivement utile!

    Mais le Chapardeur ne s’attendait pas à la suite. La petite bête de Calixte allait l’accompagner, plus pour le protéger et lui permettre d’appeler à l’aide si besoin. Gwain sourit, attendri tant par la créature que par les réactions de son ami. Ce n’était qu’une petite mission de mauvaise rumeurs, ce n’était pas une opération d’infiltration d’un syndicat du crime… Normalement.

    Je ferais attention à pas être trop distrait, mais je promets rien” plaisanta Gwain en caressant du bout du goits Ashae, la laissant sur sa tête pour le moment “Elle sera plus qu’utile pour qu’on couvre plus de terrain”

    Mais ce n’était pas encore fini. La question du déguisement arriva, et Gwain fut un peu surpris et décontenancé. Il n’avait pas le talent de Calixste et il préférait donc rester dans son attirail de coursier civil, bien plus simple pour jouer la comédie. Le domaine de prédilection du Chapardeur était plus dans l’effraction et autre techniques qui ne nécessitait pas, ou moins, un rôle. Et un livreur, ça pouvait passer partout… Du moins, c’est ce qu’il lui semblait. Mais plus Calixste continuait, plus de l’inquiétude se formait dans le ventre de Gwain. S’était-il mal préparé…?

    Je pense que ça sera tout bon. Je suis livreur et c’est pas la première fois que je fais des livraisons dans le coin. Mais merci beaucoup!” dit-il touché.

    Mais même avec cela, les choses n’étaient pas finies. Et Gwain comprit, ou ressenti plutôt l’origine de cette avalanche d’objets magiques: une inquiétude. Le Chapardeur n’était pas dupe. Il savait que les espions avaient vécus certains événements tragiques, même si il avait été relativement protégé durant sa formation.

    Il hocha la tête, laissant son ami finir. Le plan semblait bon. Tout pouvait que se passer bien. Gwain s’approcha de Calixste et lui mit une main tendre sur l’épaule. Il n’était pas le meulleur à cela, surtout pas fasse à quelqu’un comme Calixste qui savait tant de chose.

    Ne t’en fais pas Cal’, tout va bien se passer. On va trouver l’origine de tout ça. Je serai prudent, je te le jure” dit Gwain, se voulant rassurant. Il osa le serrer dans les bras rapidement. Il n’avait pas l’habitude de faire ça durant une mission, mais il sentait que c’était la chose à faire “En échange, toi aussi soit prudent. On se retrouve dans 2 heures max, au pire

    Le danger pour Calixste contre lequel Gwain voulait l’avertir n’était pas un danger dans la mission en tant que tel. Probablement rien de ce qui pouvait arriver n’atteindrait l’espion accompli. Mais c’était plutôt d’être prudent avec lui-même, de ne pas se laisser manger par l’inquiétude. Si il se retrouvait paralysé à cause d’une peur pour Gwain, là la mission pouvait mal tourner… Peut-être Gwain n’aurait pas du l’inviter à cette mission. Il avait quitté les espions avec ses raisons, et il y avait probablement d’autres raisons derrière, des traumatismes de la vie de l’ombre.

    Alors qu’il salua une dernière fois le Damoiseau et partit vers la rue, Gwain se demandait si ce n’était pas là le destin de tout espion. Ils ne pouvaient partager leur fardeau qu’entre eux, et voyaient ou faisaient des choses terribles. Et ce n’était pas une profession dans laquelle on pouvait imaginer une famille, une vie normale. Peut-être était il naïf ou trop jeune, mais Gwain sentait que pour lui, ça serait différent.

    Désormais seul, si ce n’est par la magnifique shupon qui semblait profiter de la masse de cheveux de Gwain, il se remit dans l’esprit de la mission. Laisser les pensées et émotions de côté, pour n’être plus qu’un outil efficace, c’était aussi une des choses qu’il aimait dans son travail particulier.

    L’odeur singulière du marché lui indiqua qu’il était là arrivé à bon port. Mimant un attrait pour les divers étales, Gwain tendit les oreilles avec attention. Cela le surprendrait que des gens parlent constamment de Fedora. Les murmures étaient mentionné quand elle passait dans le marché. D’ailleurs, c’était courageux de la part de la noble de faire ses achats seule… Ou elle savait bien se défendre.

    Gwain passa principalement vers les poissons, expliquant la même chose à chaque fois. Qu’il était en ville temporairement pour livrer un paquet, et qu’il cherchait de quoi faire un petit repas et aussi si quelqu’un était intéressé pour qu’il fasse une livraison en retour. Il profitait d’observer divers acheteurs. Il remarqua une femme d’un certain âge, à l’air sévère. La tenue et la gestuelle de la dame montrait qu’elle savait où elle allait et ce qu’elle voulait. N’hésitant pas à négocier hardamment avec chacun des vendeurs, elle semblait être connue ou avoir des connections.

    L’espion lui suivit discrêtement, profitant du flux de personne pour se fondre dans la masse. Il profitait d’Ashae pour paraitre innocent, s’occupant de sa petite bête avec eau et caresse. La dame s’était arrêtée après avoir rencontré une amie ou du moins une connaissance. Elle était avide de ragôt, et parlait de sa belle-fille qui était vraiment pas faite pour son fils, qui était de basse morale. Son interlocutrice, une femme plus jeune accompagnée d’un enfant, semblait tout aussi avide. Avec un peu de chance, Gwain découvrirait un début de piste. Quitte à devoir écouter deux mégères.

    Tout en caressant Ashae, Gwain se demandait comment les choses se passaient pour le Damoiseau...
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Ven 1 Oct 2021 - 21:15 #
    - J’crois que t’as oublié de lui demander s’il avait bien prévu un petit foulard pour les coups de vent, et s’il n’avait pas zappé de prendre un encas pour prévenir les petites faims, le taquina Apolline qui observait la foule du marché depuis son épaule.
    - Ah, ça va, grommela Calixte, dont le regard plissé sous les rayons matinaux glissait des passants aux marchands derrière leurs étals.

    Et si ses yeux faisaient des ricochés dans la direction où il sentait le talisman de localisation d’Ashae tirer son attention, il se garda bien de le mentionner à la trousse de cuir. Les reflets clairs de toute chevelure blonde avivant dans son cœur la flamme bienveillante, mais aussi soucieuse, d’une dévotion fraternelle. Un peu perturbée par les évènements cumulés de ces dernières années, certes.

    - Okay, frère, comment tu veux le jouer maintenant ? demanda dans son dos la voix trainante d’Abdallah. A moins qu’t’aies juste décidé d’vous séparer pour évaluer le p’tit bonhomme à l’œuvre ? Dans le Garde Actuelle d’y a deux lunes, y a tout un chapitre sur comment couper l’cordon avec les cadets ; j’te l’mettrai d’côté. Même si l’amour filial comme ça, c’grave beau, t’vois.

    Levant les yeux au ciel dégagé, le coursier se dit que, déjà, il pouvait enterrer l’idée d’emprunter les traits d’un vendeur quelconque, ou d’un journaliste en quête de croustillantes rumeurs, car visiblement ses âmes artificielles avaient décidé de se mêler à sa mission du jour. Rendant celle-ci, de fait, peu propice à toute notion de discrétion ou de simulacre.

    - On va faire un tour global des lieux, en tendant l’oreille, avant de se rapprocher des allées orientées poissonnerie. Apparemment c’est plutôt dans ce coin-ci que dame Sanward aurait entendu les diffamations.
    - Un plan digne des plus grands détectives, commenta Apolline.
    - Et Eli va nous chercher des fourmis, ajouta dans un soupir le soldat.
    Attaquer fourmis ? s’anima aussitôt le teisheba en se glissant hors de la manche dans laquelle il avait pris l’habitude de se glisser.
    Non. J’ai besoin que tu m’en trouves pour qu’on les interroge.
    Hmpf,
    se renfrogna le familier avant de se mettre tout de même en chasse.

    Pour toute sa pugnacité, Vreneli était d’une obéissance presque absolue envers Calixte. Et depuis qu’il était enceinte sous ses formes féminines, la petite créature d’orage contenu ne l’électrisait qu’exceptionnellement sur le coup de la colère. Ce qui, vraiment, était une amélioration de leur relation.

    Se faufilant à travers la foule de chalands toujours plus dense à mesure que le soleil s’élevait vers le zénith, le regard ambré chercha instinctivement la couronne de mèches blondes d’un certain collègue avant de se rabattre sur son entourage plus immédiat. A l’angle d’un étroit comptoir croulant sous de larges paniers remplis d’épices aux parfums chatouillant les narines, le teisheba attira son attention et le coursier longea les étalages avant d’aviser la petite colonne de fourmis slalomant adroitement entre les pavés du marché. Le gros de la formation serpentait depuis la petite crevasse d’un muret défraichi jusqu’à un amas temporaire de déchets entre deux stands, mais certaines aventureuses – ou inconscientes – s’essayaient à la traversée de la place dans une audacieuse avancée sous la pression saccadée des chaussures toujours plus nombreuses. S’accroupissant en dehors du gros du passage, Calixte avisa les petites ouvrières.

    - Bonjour, commença-t-il car il y avait des politesses que son éducation avait profondément et bêtement inscrites dans sa chair. Est-ce que « Fedora Sanward », ça vous dit quelque chose ?

    Apparemment, « Fedora Sanward », ça n’était pas vraiment une locution qui devait tellement parler à ses interlocutrices du moment. Par contre, elles se révélèrent particulièrement loquaces, et l’ancien espion en apprit certainement plus que ce qu’il aurait souhaité sur les conditions d’hygiène appliquées par le marchand de viande séchée à quelques pas de là – et peut-être devrait-il le relever à ses collègues pour une petite inspection en bonne et due forme – les dernières tendances florales suivies par les préparateurs de mariage, les soucis d’incontinence du groupe d’octogénaires faisant immanquablement ses courses le mardi matin, et les revendications salariales de la nouvelle génération de fourmis – là-dessus il n’était vraiment pas certain d’avoir tout suivi ni que sa bague de communication fonctionnât correctement. Néanmoins, elles lui indiquèrent le terrain d’évolution de leurs voisines côté « mer » du marché, et leur appétit soupçonné pour les ragots humains.

    - Peut-être devrais-je me pencher sur un scénario animalier, commenta pensivement Apolline comme ils se faisaient chasser par le gérant du stand à proximité, trouvant leur attitude quelque peu douteuse. T’es allé voir cette boutique recommandée par Ain ?
    - Non. Et non, grimaça Calixte en chassant les indésirables pensées suggérées par la lubrique trousse de cuir.

    Ils traversèrent la foule pour suivre les consignes des fourmis, et Vreneli repéra rapidement les congénères indiquées par ces dernières. S’éloignant un peu du cœur de l’animation, prenant garde à ne pas adopter une attitude trop suspecte malgré le fait qu’il dût à nouveau s’approcher des pavés pour s’entretenir avec les petites bêtes, le coursier renouvela l’opération de plus tôt.

    Cette fois-ci les réponses furent bien plus éparses – apparemment ce groupe-ci aimait peut-être écouter les humains, mais assez peu converser avec eux – mais le soldat réussi à obtenir la piste d’un groupe de femmes se retrouvant régulièrement entre les étals du marché pour éventer les dernières rumeurs, et notamment celles plus croustillantes concernant la noblesse. Et, peut-être, que le nom de « Fedora Sanward » avait plusieurs fois répété par ces dames en mal de potins. Certainement n’étaient-elles pas les seules, mais pour appréhender l’enquête qui leur avait été confiée, Calixte trouvait qu’il y avait déjà là matière à travailler. Avec un peu – beaucoup – d’insistance, il récupéra le descriptif global de certaines femmes – ou, surtout, de leurs chaussures et du type de pantalon ou jupe qu’elles affectionnaient – et décida de se remettre en mouvement. L’onde de fourmis s’éloignait de plus en plus de lui, et il ne fallait pas être Ministre pour comprendre que la patience de ses interlocutrices s’était amenuisée jusqu’à ne plus être que peau de chagrin.

    Tu seras plus discret que moi, indiqua-t-il à Vreneli en se fondant dans une bille de bois que le familier, maintenant habitué à l’exercice, attrapa sans difficulté entre ses crocs.

    Presqu’invisible dans la clarté du jour, restant à hauteur des jambes humaines afin que Calixte pût utiliser les rares informations qu’il avait soutirées aux fourmis, le teisheba se glissa entre les passants comme l’eau entre les pierres d’un ruisseau. Il leur fallut encore quelques minutes, une floppée de négociations pour éviter que le hargneux familier n’électrisât une poignée de gambettes, et l’examen approfondi d’arts vestimentaires divers, avant que le duo trouvât le groupe d’intérêt autour duquel il se mit à graviter. Et, apparemment, c’était aussi là que Gwain était parti à la pêche.

    - C’est moi, fit Calixte depuis le refuge de sa bille comme son familier rejoignait l’épaule de l’espion, soulevant par électricité statique quelques mèches blondes. Bonne pioche, ajouta-t-il en observant l’ensemble des quatre femmes et deux enfants, sans se douter que son collègue eût suivi les prémices du regroupement. Elles évoquent de se diriger vers leur point de chute usuel pour discuter tranquillement ; d’après les fourmis il s’agit du stand là-bas, derrière celui des potions magiques. Un salon de thé ouvert sur le marché. Je te laisse les filer et me rejoindre là-bas ?

    Prenant l’interrogation pour un ordre, Vreneli changea immédiatement de cap et fusa vers le comptoir à boissons et douceurs tandis que Calixte poussait une exclamation étouffée de résignation. Pour le travail en groupe avec le teisheba, il y avait des choses à revoir.

    Réapparaissant dans la discrétion du voilage d’un stand à proximité, le coursier avisa le salon de thé d’un œil circonspect, avant de choisir une place offrant la possibilité d’espionner largement la plupart des tables et bancs alentours, et notamment ceux pouvant accepter six personnes d’un coup. Posant son séant, il commanda auprès de l’un des serveurs une boisson pour lui, et une autre pour Gwain.

    - C’est court, Gwain, pour un surnom, décréta Apolline qui en avait profité pour rouler sur la table où elle décrivait de joyeuses arabesques.
    - Ca t’a jamais arrêtée… grommela Calixte en observant du coin de l’œil le groupe de commères s’installer juste en face de sa table, soit directement dans le dos du tabouret où son jeune collègue pourrait le rejoindre.
    - Vrai. J’ai envie de l’appeler Poussin. Ou Pou-Gwain. Oh ! Pin-Gwain ! Pingouin.
    - … Chapardeur ça ne t’allait pas, évidemment. Et ça ne se prononce pas comme…
    - Hé il est là !

    Levant le regard puis la main pour inviter l’espion à venir s’installer avec lui, il laissa ensuite ses doigts retomber sur le plateau de bois entre eux deux, afin de laisser ceux-ci danser librement le langage codé que leur travail officieux leur avait appris.

    Plus informations hameçon, interrogea-t-il tout en saluant verbalement Gwain comme si c’était la première fois de la journée qu’ils se croisaient.

    Résultats dé:
    Langage codé espions:
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Dim 3 Oct 2021 - 19:47 #
    Gwain construisait une carte mentale de ce que racontait les deux femmes, éliminant le superflu nombreux pour se concentrer sur ce qui était le plus important. Elles étaient deux amies. La plus âgée des deux, nommée Aira, avait un fils marié récemment à une simple ouvrière. Bien que n’étant pas noble elle-même, la dame se toisait d’un métier prestigieux dans les textiles ou du moins avait des liens importants avec l’habillement. Ce qui était un potentiel point de contact avec d’éventuelles rumeurs. Mais elle paraissait plus bête que vraiment méchante, à répéter ce qu’elle entendait et se gargariser de ce sentiment de supériorité morale.

    Son interlocutrice, nommée Emmë, avait deux garçons mais seul son dernier était présent avec elle. Elle connaissait Aira par le monde de l’école visiblement, mais Gwain ne réussit pas à découvrir les raisons. Plus roturière, aux vues de la qualité de ses vêtements, elle ne devait pas avoir autant de contact mais adorait les ragots d’un monde qu’elle ne découvrirait peut-être jamais.

    Le duo avait visiblement fini leurs achats et attendait impatiemment quelque chose. Aira tapotait du pied, alors qu’elle regardait autour d’elle avec attention. Gwain en profita pour avancer un peu plus loin, pour ne pas avoir l’air de les filer de manière trop explicite. Peu après, un duo de femme avec un enfant âgé d’une dizaine d’année arriva, pressée. Le garçon était tiré par sa mère et paraissait d’humeur boudeuse. Elles se retrouvèrent, à 4, et alors qu’elles venaient d’échanger les salutations d’usages, Gwain sentit quelque chose lui monter dessus. Il entendit son ami s’annoncer, ce qui détendit le chapardeur.

    Faisant mine de chercher son chemin, il écouta avec attention Calixste. L’espion avait récupéré des informations également, et ils allaient en profiter pour échanger sur leurs découvertes respectives. Gwain hocha la tête et allait répondre quand qu’il sentit la créature partir rapidement. Le damoiseau devait être très concentré sur sa mission pour être aussi pressé. Avait-il découvert quelque chose ?

    Gwain accéléra gentiment, s’assurant qu’Ashae le suivait et après s’être recoiffé. Il se mit à distance raisonnable pour entendre une partie de ce que racontait le groupe de femmes. Parmi les nouvelles venues, la mère paraissait la moins avide et cherchait probablement plus de la compagnie que vraiment des ragôts. La quatrième, d’un âge moyen, mentionnait une histoire de voleur se concentrant principalement sur les riches, et qu’il sévissait sur les marchés, surtout à midi. En entendant cela, Aira ne put s’empêcher de vérifier que sa bourse était toujours au bon endroit, erreur de débutante.

    Gwain dépassa gentiment le groupe pour aller au salon de thé avant elle. Plutôt serré, le brouhaha général couvrait malgré toutes les conversations éloignées. Le Chapardeur remarqua son ami placé stratégiquement. Il eut un grand sourire et le salua avant de s’approcher de lui. Gwain s’assit et tendit l’oreille pour s’assurer qu’il entendait bien le groupe derrière. Normalement, tout deux ne devraient pas avoir de problème à bien entendre.

    Vieille bonne source contact stop expliqua-t-il de quelques tapements alors qu'il récupérait sa boisson riche stop connait probablement noble mais bête stop probablement pas coupable stop toi hameçon.

    En même temps de cet échange d’information secret, Gwain expliquait à son ami qu’il avait trouvé de très bon poisson, et qu’il lui conseillait un marchand particulier.

    Derrière eux, après les commandes pour tout le monde et surtout pour le môme de mauvaise humeur, Aira sourit à sa tablée avant d’annoncer, impatiente.

    « Vous ne savez pas ce que j’ai entendu lors de ma discussion avec Madame Lisseo, lorsque je suis passé chez elle pour lui apporter sa nouvelle robe personnelle ? »

    Gwain ignorait qui était cette dame Lisseo, mais aux vues de la manière dont la vieille dame l’avait presentée, ce n’était pas n’importe qui. Peut-être la prochaine piste
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Sam 9 Oct 2021 - 23:17 #
    Comme ils s’extasiaient par-dessus leurs boissons de la qualité illusoire d’un poisson inventé vendu par un excellent marchant imaginaire, Ashae avait cessé de graviter autour de Gwain pour tenter de chaparder quelques gouttes de leurs breuvages. Assurément y avait-il là une certaine ironie. Amusée, Apolline la regardait faire en commentant ses essais jusqu’à présent avortés par les mains de Calixte qui, dans une gestuelle parasitée de cet effort de chasse, s’évertuait à communiquer avec son collègue de ce langage secret qu’ils avaient en commun. Entre deux mouvements, un vertige le saisit sur la réalisation qu’il n’était en réalité certainement plus légitime dans l’utilisation de celui-ci, ayant quitté le groupe restreint des espions, mais la réalité de leur mission chassa automatiquement ces doutes-ci. Il aurait largement le temps de méditer – et de déprimer – sur cette notion plus tard.

    Rien stop avis fourmis groupe là intéressant stop, signa-t-il.

    - Je croyais qu’elle ne s’habillait qu’avec des étioles Devern, s’exclama la voix d’une des femmes du groupe, comme pour les rappeler à elles.

    Il y avait une excitation à peine voilée dans son timbre, et son interlocutrice principale, une femme à l’air sévère, darda sur elle un regard hautain. Elle était sensiblement plus âgée que les autres, et Calixte déduisit qu’il devait s’agir de la cible indiquée par Gwain quelques secondes plus tôt.

    - Pas depuis l’incendie des entrepôts il y a un an, Emmë, suivez un peu l’actualité ! Nombre de leurs clients ont dû changer d’enseigne pour se fournir… et ceux de l’entreprise où je travaille sont assurément moins chers.
    - Je pensais que c’était rentré dans l’ordre depuis le temps.
    - Le parrain de Raùl lui a offert une écharpe de facture Devern, au Solstice dernier. Une splendeur ! Avec Julian on n’aurait jamais pu l’acheter, c’est sûr, intervint distraitement une troisième femme en luttant avec son fils pour lui essuyer la bouche.
    - Qu’importe, grommela la doyenne d’un mouvement agacé de la main. On s’en fiche. L’important c’est que madame Lisseo m’ait glissé une information complètement exclusive.
    - Dis-nous, Aira, la pressa Emmë, suspendue aux lèvres de son aînée.

    L’interpellée fit mine de jeter un coup d’œil alentours pour s’assurer qu’aucune oreille ne trainait – Gwain et Calixte en étaient à discuter de leurs plats préférés à partir de poisson – puis se pencha légèrement vers ses trois amies maintenant tout ouïe. Sa gestuelle indiquait le secret, mais aussi le ravissement mal contenu d’être détentrice de ce savoir.

    - Elle va ouvrir les portes du bal d’automne, qu’elle donne toujours à la fin de la première lune de la saison fraiche, et m’y invite avec le, ou la, partenaire de mon choix.

    Des exclamations de surprise accueillirent l’annonce, et la fine silhouette de la femme s’étira de satisfaction derrière celle de Gwain, qui lui décrivait la recette de brandade récupérée à la cantine de l’Académie Militaire – assurément pas la meilleure, mais qui jugeait ?

    - Oh je pourrais venir avec Khalid ! Il est très bon danseur. Il faudra qu’on aille prendre des leçons pour celles de ce type de festivités, mais…
    - Je pourrais trouver une nounou pour les enfants…
    - J’ai toujours rêvé d’assister à ce genre d’évènement.
    - Mesdames, un peu de retenue ! Madame Lisseo les ouvre… mais uniquement à des individus de situation… acceptable, déclara Aira d’un ton suffisant. Bien entendu, elle a tout de suite pensé à moi pour cette occasion, mais il va sans dire que vos propres statuts sont pour le moment insuffisants. J’espère surtout pouvoir arracher mon fils à cette lamentable femme qu’il a épousée, et que ce bal lui ouvrira les yeux sur toutes les possibilités auxquelles il est en train de tourner le dos, poursuivit-elle avec renfrognement.
    - … tu m’inviteras si jamais il refuse de t’y accompagner ?
    - J’ai entendu dire que cette année le Capitaine Al Rakija devrait y assister. Finis ton bol, Kaïs. Il parait qu’il est friand de ce genre d’évènement. L’an dernier il aurait invité la royauté au Bastion pour un barbecue, et la rumeur court qu’il fricoterait avec une ministre !
    - Avec la comptable, non ?
    - Cet Al Rakija est une vraie fripouille, si vous voulez mon avis, fit la doyenne en baissant encore d’un ton, si bien que Calixte dû se résoudre à jeter de temps à autres quelques coups d’œil par-dessus l’épaule de Gwain afin de s’aider d’un peu de lecture labiale. Un véritable coureur de jupons, et regardez nos rues depuis qu’il a pris la relève dans le sud : c’est l’insécurité ! Il parait même que ses sous-fifres tiennent le marché noir !
    - Enfin, Aira. C’est un peu gros, non ?
    - Et vous avez entendu parler de sa fille cachée ? Kaïs, finis ton bol j’ai dit. Sinon tant pis pour toi, tu n’auras pas de dessert ce midi et ce soir.
    - Sa fille ? Son fils, non ? Celui hybride ?
    - J’ai entendu parler de triplés… informes, en raison de la grossesse à risque.
    - Encore une fois vous racontez des inepties, mesdames, fit Aira d’un air très distingué en portant sa tasse de thé à ses lèvres, d’une voix à nouveau franche. J’en parlais avec madame Lisseo, et c’est bien une fille qu’il aurait. Enfin une fille… monstrueuse de par un maléfice quelconque. Une raison supplémentaire pour cette admirable femme d’être restée chez mon employeur comme fournisseur de sa garde-robe ; apparemment cette… Fedora serait dans les petits papiers des Devern.
    - Tu as de la chance, d’être aussi proche de madame Lisseo, soupira Emmë en se laissant aller contre le dossier de sa chaise. J’imagine qu’en tant qu’actionnaire de l’une des gazettes les plus populaires dans le coin elle doit être au courant de beaucoup de choses !
    - C’est une femme inspirante. Et cultivée, acquiesça hautainement son vis-à-vis.

    Prenant garde à ne pas envoyer de message par inadvertance, Calixte laissa ses doigts se dégourdir en tapotant contre les parois de son verre. Le diabolo qu’il avait commandé avait embué celui-ci d’une fine pellicule humide, et Ashae virevoltait autour de ses mains pour tenter de lécher celle-ci. Gwain avait eu raison quant à leur source principale d’information dans le groupe de commères, mais à présent le coursier se demandait s’il ne serait pas intéressant de rendre visite à cette fameuse « madame Lisseo ». En dépit de son propre lien à la Noblesse, ce nom ne lui évoquait rien. Cependant, cela faisait de nombreuses années qu’il n’avait pas participé aux mondanités du gratin méridional, et certainement les cartes y avaient-elles été rebattues depuis son enfance.

    Attendre un peu encore hameçon chercher information l i s s e o après hameçon, signa-t-il à son jeune collègue en usant finalement l’agitation de ses doigts à des fins productives.

    Approcher d’emblée « madame Lisseo » ne serait peut-être pas une bonne idée, mais s’ils profitaient des ressources du Bastion et de la planque des espions pour enquêter sur celle-ci… Puis Calixte se souvint brusquement qu’il n’appartenait plus à ce monde ci, et qu’il était peut-être temps qu’il apprît à se passer de ces sources, facilitantes mais officieuses, amassées derrières les portes gardées du pôle espionnage. Dépité, il noya les sentiments mélancoliques émergeants dans le fond de son diabolo.
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Dim 10 Oct 2021 - 19:09 #
    Gwain était pleinement concentré. Même si leur conversation codée avait été entrainée de nombreuses fois, avoir une conversation qui faisait du sens à l’oral était une compétence singulière. La technique la plus sûre : parler de quelque chose que l’on connaissait. Quoi de mieux au final que de parler de repas !

    Malheureusement, Calixte n’avait pas obtenu quelque chose de très probant de la part des fourmis. Ils n’avaient donc pour le moment qu’une source, mais au moins elle semblait intarissable. Alors qu’un certain ballet s’effectuait à leur table, entre leurs gestes et les familiers, une autre représentation avait lieu juste derrière Gwain. La vieille dame se mettait en scène, se mettant plus haut que ce qu’elle n’était réellement.  Elle possédait des informations, mais surtout elle risquait de les déformer pour se propulser encore plus.

    Elles mentionnèrent cette histoire d’incendie, que le jeune espion n’avait que vaguement entendu. Mais ce n’était probablement pas de leur ressort. Un incendie, ce n’est pas la chose qui nécessite une grande discrétion pour enquêter. Des gardes plus classiques feraient l’affaire. Mais Aira semblait agacée. Elle n’aimait pas Devern, peut-être par simple jalousie ou car on la déviait de sa propre histoire qu’elle avait probablement dû préparer depuis un long moment.

    Le ‘secret’ révélé n’en était pas un au final, pas quelque chose qui pourrait vraiment les intéresser. Certes, ça restait de l’information, et un bal était toujours une bonne occasion pour nouer des contacts, s’infiltrer ou soutirer des informations aux participants. Mais ça n’allait probablement pas les aider dans leur mission actuelle. Gwain cacha sa frustration tant bien que mal. Si les choses continuaient de la sorte, ils risquaient d’avoir besoin d’un certain temps pour trouver le coupable pour Fedora. Aira lui était assez désagréable à l’oreille, mais il se força d’écouter sa voix suffisante et pleine de mépris.

    Mais le quatuor de femme n’y alla pas de main morte sur le Bastion, surtout envers leur capitaine. Gwain ne put jeter un regard interrogateur à son ami, qui devait bien connaître la vérité de tout ça. Un coureur de jupon utilisant le marché noir et avec une fille monstrueuse ? C’était une sacrée histoire que le Chapardeur aurait adoré approfondir plus si ça n’impliquait pas des problèmes hiérarchiques, et surtout si le nom de la victime n’avait pas été mentionné. Toute son attention se concentra sur les dires du groupe.

    Aux vues du dédain d’Aira, elle connaissait les rumeurs sur Fedora voire y participait à sa propagation. Mais elle n’avait aucune raison de les avoir créées elle. Après tout, elle n’était pas noble et travaillait pour une entreprise de textile. Elle avait de l’argent, mais pourquoi en vouloir à leur commanditaire. Mais Madame Lisseo elle, elle avait un pouvoir de frappe bien plus puissant : le journal. Fedora n’avait pas mentionné la gazette, donc peut-être rien d’aussi explicite. Mais avoir une telle influence permettait de souffler aux oreilles de beaucoup de monde. Était-elle la responsable, ou simplement un autre maillon de la chaine ?

    Mais Gwain remarqua aussi quelque chose chez Calixste, il était agité. Était-ce lié à sa propre situation ? Avait-il découvert quelque chose ? Il ne communiqua rien si ce n’est des informations sur la suite des opérations. Le Chapardeur ne pouvait pas le laisser de la sorte. Il se promit de l’interroger, ou du moins le soutenir, un peu plus tard.

    Vieille utile stop attendons finir boisson puis partons stop l i s s e o coupable ou bonne source stop tapota-t-il alors qu’il arrivait gentiment à la fin de sa boisson fraiche.

    Il hésita un peu à continuer avec ce qu’il voulait demander… Peut-être devaient-ils attendre d’être à l’écart pour pouvoir discuter. Le code n’était pas le plus idéal pour transmettre des nuances.

    Derrière eux, le quatuor parlait de Madame Lisseo. C’était une dilettante, impliquée dans beaucoup d’œuvre et de projets locaux. Peut-être qu’Aira exagérait les faits, mais selon elle, Madame Lisseo était en passe de devenir la personne à connaître. Et qu’à l’avenir, elle saurait remonter le niveau de cette ville ingrate. La dame continua, expliquant que si elle, elle avait le rang de Lisseo, elle aussi s’appliquerait à corrigé les tords, à commencer par le Capitaine.

    De son côté, Kaïs en avait visiblement marre et avait envie de son dessert. Malgré les nombreuses insistances de sa mère et les menaces de punition, le petit s’agitait de plus en plus. Une vilaine idée lui passa par la tête. Si sa maman voulait qu’il finisse son bol, il allait lui montrer la manière la plus rapide de le faire. D’un geste rapide, il tapa dedans et l’envoya valser, projetant son contenu sur Aira et l’autre femme avec son enfant.

    L’on aurait pu croire à un meurtre de part le cri de la doyenne. Un cri de surprise mixé à de la colère, alors que le coupable se mit à pleurer, de peur. Sa mère s’excusa et devint rouge de honte. Aira se leva alors qu’un serveur s’approcha pour apporter son aide. La tenue de la vieille dame était tachée, et elle répétait suffisamment de fois qu’il était « totalement FOU-TU », et qu’il coutait la peau des fesses.

    Gwain, qui s’était assuré qu’aucun projectile ne l’avait atteint, regarda Calixte. Il allait être difficile de récupérer encore des informations auprès du groupe après ce faux-pas. Il était temps de partir.
    Partons stop Parlons après du plan dit-il avant de finir sa boisson d’un coup.
    Gwain se leva et sortit une fois que son compagnon le suivit avec toute son animalerie. Une fois le duo d’espion éloigné, ils purent commencer à avancer.

    « On devrait trouver cette dame. Quant à l’approche, je me vois mal l’interroger directement. Tu me connais je préfère infiltrer et fouiller. On va à l’endroit habituel, pour planifier un peu ? Y aurait peut-être aussi des infos sur elle »

    Pour le Chapardeur, le Damoiseau faisait encore partie des espions. Ce n’était pas une démission même pour bonne raison qui rompait des liens de confiances qu’ils avaient tous entre eux. Alors il n’y avait aucun problème à aller à l’appartement pour s’organiser maintenant qu’ils avaient des infos plus claires.

    « Mais, avant toute chose, j’aimerais te demander… Ca va ? » demanda Gwain, scrutant le visage de son ancien mentor « J’ai l’impression que tu es tendu »
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Mer 27 Oct 2021 - 17:31 #
    Bien placé pour observer les signes avant-coureurs de la crise à venir, Calixte esquiva presque sans surprise – bien que d’une adresse relativement étonnante pour lui – les quelques condiments qui volèrent dans sa direction. Profitant de la seconde d’inattention des deux hommes, Ashae subtilisa une lampée de chaque breuvage, avant d’effectuer une virevolte ravie et retrouver le nid de mèches blondes de Gwain. Fronçant les sourcils aux acrobaties faussement innocentes du shupon avant d’acquiescer à la proposition gestuelle de son collègue, le coursier termina d’une traite son verre et suivit celui-ci.

    Laissant derrière eux le chaos de l’outrage de la doyenne répondant aux cris d’effroi de l’enfant sur fond d’exclamations diverses, ils regagnèrent l’agitation affairée des ruelles du Grand Port et l’écho du groupe qu’ils avaient espionné jusque-là se perdit progressivement sous le tumulte de la foule alentours. Instinctivement, leurs pas empruntèrent l’un des passages menant vers les quais.

    - Je suis aussi d’avis d’éviter l’approche frontale, acquiesça Calixte avant de se renfrogner à l’idée de passer par la planque des espions.

    Plus rapidement qu’il ne l’aurait pensé, Gwain venait de mettre les pieds dans le plat. Si sa relation avec Zahria n’avait pas été aussi complexe, et le doute persistant quant à sa propre intégrité – à lui-même – si grand, découper sa nouvelle vie selon des créneaux imparfaits entre ses facettes officielles et les anciennes officieuses n’aurait certainement pas été aussi péniblement compliqué. Peut-être. Son visage s’assombrit quelque peu, gommant l’affabilité peignant usuellement ses traits, et le regard du coursier étudia un instant celui de son jeune collègue avant de se perdre dans la contemplation distraite des arrêtes des bâtiments bordant leur chemin.

    - Peut-être que je peux te retrouver après, ailleurs, marmonna-t-il d’un ton engoncé de doutes.

    Ce qui, certainement, ne fit qu’entériner la remarque suivante de son ami. Clignant des yeux à l’interrogation de celui-ci comme pour sortir d’un rêve particulièrement tenace, Calixte les dirigea à nouveau vers Gwain. Dans le bleu céruléen marqué de ruse et de curiosité, nageait une attention sincère qui n’était pas étrangère à l’ancien espion mais qu’il avait rarement vue aussi incisive. Les mésaventures faisaient partie du lot récurrent de toute âme foulant le sol d’Aryon, mais sur les quelques années qu’ils avaient jusque-là passées en commun, à s’appréhender, s’apprivoiser et se familiariser l’un l’autre, peu fréquents avaient été les instants véritablement moroses. Ou de crise. Mais ça, songea amèrement le coursier par facilité d’association, c’était avant l’ouverture du dossier de la Cabale par Zahria, et le meurtre de Ruth.

    - Pardon, j’ai encore du mal à trouver la place qui est mienne, maintenant, soupira-t-il avec un sourire contrit, mimique réflexe d’années de comédie quotidienne. Je… Ce n’est pas qu’en raison de la grossesse et des enfants, que j’ai quitté le pôle, finit-il par lâcher, convaincu que son jeune collègue – ami et peut-être frère – méritait bien d’avoir le tableau global de sa démission, d’autant plus s’ils devaient tout de même continuer à partager certaines missions.  

    Se rendant compte que ses pas s’étaient machinalement arrêtés sous le soufflet des souvenirs avivés par le questionnement attentionné de Gwain, il se remit en route, malgré tout vers les quais et donc la planque, tout en se rapprochant instinctivement davantage de son camarade.

    - J’ai… violé ce qui me semblait jusque-là, intimement, inaliénable. J’ai trahi l’Ombre. Et très certainement sciemment ; mais j’ai oublié comment et pourquoi, poursuivit-il dans un murmure lugubre à peine audible par-dessus le brouhaha alentours. Je ne suis pas fiable, Gwain. Je ne le suis plus depuis probablement une dizaine de lunes, ajouta-t-il d’un ton amer.

    Et l’idée d’avoir pu desservir aussi facilement cette hiérarchie mentale dont il s’était jusque-là enorgueilli d’être d’une loyauté sans faille était une plaie béante qui, à chaque remémoration, n’en finissait pas de saigner. Les paroles de Zahria, la présence de Jin et le soutien indéfectible de Xylia, avaient bien commencé à panser ce ravin creusé d’incertitudes acérées, mais touché au cœur de ce qui lui avait semblé le définir, il faudrait encore bien des lunes au coursier pour recoller son âme fragmentée. Ainsi qu’une bonne louche de tendresse de sa famille recomposée dysfonctionnelle. Et l’embrasse inébranlable de Solveig.

    Comme si la chaleur de ces dernières suffisait à travers ses songes pour chasser doucement la morosité qui ne cessait de s’inviter en vagues tenaces contre son esprit, l’ambre de son regard s’éclaira à nouveau peu à peu, et le sourire qu’il offrit à Gwain, bien que plus ténu, fut plus sincère.

    - Probablement que sa vision de l’affaire n’est pas aussi sombre que la mienne, si elle n’a pas mentionné cette partie à mon départ…

    Et que le Sbire n’était pas venu le trouver pour effacer définitivement les souvenirs de son passé au pôle espionnage.

    - Mais je préfère ne pas prendre le risque d’avoir raison. Dans tous les cas, je ne veux pas te mettre en porte à faux avec l’Ombre, ni risquer de nous compromettre davantage. Et je comprendrais que tu ne souhaites pas que l’on fasse davantage équipe pour… tout, précisa-t-il en dardant à nouveau son regard vers le visage du Chapardeur, à l’affût de ses réactions.

    Sans doute aurait-il été moins cavalier de lui faire part de ses défaillances avant qu’ils ne commençassent l’assignation présente, afin qu’il choisît d’y participer en toute connaissance de cause. Mais Calixte avait toujours été expert en la fuite en avant, et en la maladresse de ses timings ; cet épisode ne devait pas y faire exception. Ce qui ne l’empêchait guère de développer présentement quelques remords en la matière, et guetter les réponses de son vis-à-vis.

    - Donc, hum… A toi de voir si tu préfères tout de même qu’on aille tous les deux à l’appartement, ou si l’on se retrouve après ailleurs – ou heu, jamais ? Dans le premier cas, je ne toucherai à rien d’autre que ce que tu me mettras entre les mains, ajouta-t-il bien décidé à ne prendre aucune initiative sur le versant espionnage, auquel il n’appartenait plus et ne souhaitait pas embarrasser d’une quelconque manière son ami.

    Ou peut-être ancien ami.
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Lun 1 Nov 2021 - 12:55 #
    Aux vues des réactions de Calixte, la tête de Gwain n’était plus à réfléchir à la mission pour le moment. Il se concentrait autant que faire se peut, lisant les réactions de son ami. C’était toujours plus simple quand il faisait cela sur un inconnu. Il n’était pas biaisé par ce qu’il pensait et ressentait. Mais là, son esprit tournait à pleine vitesse. Le refus empli de doute de Calixte poussa Gwain à poser sa question sur l’état de l’ancien espion.

    Il sentit son cœur s’accélérer et ses mains devenir moites, alors qu’il apprenait que la grossesse n’était qu’une partie des raisons du départ de Calixte. Un stress prit Gwain, inquiet de ce qu’il risquait d’apprendre. Il savait que les espions étaient en situation précaire, mais il faisait de son mieux pour l’ignorer et se concentrer sur les liens qu’il avait forgé.

    Mais la révélation de Calixte le perturba fortement. Il ne sut que trop répondre, alors que ses propres pensées se bousculaient. Comment était-ce possible de trahir de la sorte… Il ignorait beaucoup de chose sur l’Ombre et sur la situation complexe au cœur des Espions. Mais si Calixte avait trahi leur maitre, il y aurait eu une communication plus importante à l’interne… probablement. Peut-être une chasse à l’homme ? Ou peut-être voulaient-ils éviter une fracture plus grande encore de l’équipe, de créer des camps et de perdre la puissance de l’outil des Espions dans les affaires du Royaume. Qu’avait-il pu se passer… Le Damoiseau n’avait aucun souvenir des raisons… Peut-être avait-il était manipulé mentalement… Il devait probablement y avoir des capacités qui pouvait pousser à ça, ou des plantes…

    Gwain, perturbé, ne savait trop que dire et il ne maintenait plus du tout le professionnalisme qu’il se forçait toujours d’avoir en tant qu’espion. Il était aussi rapproché de Calixte, pour l’entendre, et il ne faisait plus attention aux gens autour de lui. Pendant quelques temps, seule la voix du Damoiseau et le bourdonnement aux oreilles du Chapardeur existait. Il gardait malgré tout son allure, se dirigeant instinctivement vers le port.

    Le discours lui paraissait tellement impossible. Jamais Calixte n’avait été pas fiable. La preuve en début de cette mission, où il fut mille fois plus préparé que ne l’était Gwain, venu avec simplement son envie de réussir et de découvrir la vérité. Il fut même brièvement rassuré par le sourire de Calixte, qui concédait une vision très négative de la situation. Gwain sourit un peu et allait répondre, voulant le rassurer et lui dire que ce n’était probablement pas quelque chose de grave, et qu’ils pouvaient faire comme si de rien n’étaient. Mais l’ancien espion souleva un point important : le risque que leurs missions mettent Gwain dans une situation difficile.

    Son sourire disparu et il entra en profonde réflexion. Il ne pouvait quand même pas être mit en situation problématique avec l’Ombre parce qu’ils parlaient ensemble… Calixte était encore un espion, il en connaissait tous les secrets, ou du moins bien plus que Gwain. Alors on ne pouvait pas lui reprocher de partager des choses avec le Damoiseau… Ou du moins il l’espérait. Le chapardeur se cherchait des excuses qu’il prononcerait, pour se dédouaner. Il n’y était pour rien, car on ne l’avait pas prévenu, et puis il ignorait tout avant de faire cette mission… On n’oserait quand même pas lui faire porter le chapeau si tout à coup des secrets étaient dans le monde publique.

    Gwain sentait qu’il stressait de plus en plus, à s’imaginer à être mit coupable… Surtout pour une affaire dans laquelle il était, pour de vrai cette fois, blanc comme neige. Pourquoi est-ce qu’il se retrouvait dans une telle situation… Il voulait juste faire une mission avec un ami. Il remarqua le regard perçant de Calixte ce qui lui permit d’entamer un retour à la réalité. Il ne devait pas se laisser emporter dans sa peur de la culpabilité.

    "Je… J’ignorais tout ça. Ça me parait tellement impossible… Tu es quelqu’un sur qui j’ai toujours pu me reposer… " commença Gwain, essayant de remettre de l’ordre dans ses pensées. Il s’arrêta et se mit en face de Calixte "Merci de m’avoir dit tout ça… C’est une preuve de plus que tu es quelqu’un de fiable... Je n’aurais jamais osé parler de ça à quiconque si j’étais à ta place."

    Gwain sourit gentiment, même s’il n’était pas difficile de voir qu’il restait bien confus. Jamais il n’aurait avoué quelque chose de si grave, encore moins à un proche. Si Calixte avait voulu le manipuler, l’utiliser pour prendre des informations sur les espions ou les piéger, il aurait pu très facilement. Le Chapardeur se calmait gentiment, alors que sa résolution se formait dans son esprit. Absolument rien ne prouvait que cette trahison fût si horrible que ça. Il allait suivre ce que son instinct disait : Le damoiseau restait un espion.

    "A mes yeux, tu restes un des nôtres. On ne m’a pas dit que je devais te tenir à l’écart de quoique ce soit. Alors je t’emmène avec moi, et on prépare ce qui faut pour rendre visite à Dame Lisseo. Et après tout ça, on fêtera notre réussite ensemble. Et si jamais on me reproche de te traiter comme un des nôtres et bah…" dit-il, avant de déglutir d’inquiétude face à la perspective d’être au centre d’une accusation. "Et bah je dirais que je ne regretterai pas mes choix et que je n’ai rien fait de mal."

    Gwain serra Calixte dans ses bras, pour lui montrer que rien n’avait changer, et aussi pour se rassurer un peu lui-même. Il n’allait pas regretter tout cela, probablement.

    "On ne restera pas trop longtemps à l’appartement", rassura Gwain, ne voulant pas mettre Calixte en position difficile. "Juste de quoi prendre nos outils et quelques notes sur la Dame. Après quoi, on partira en observation jusqu’à ce qu’une opportunité se forme. Comme avant"

    Peut-être même que Calixte se rendrait compte qu’il pouvait revenir parmi les espions quand il voulait…
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Mer 10 Nov 2021 - 19:06 #
    Si Calixte s’était attendu au voile de doutes assombrissant les prunelles lui faisant face, il n’était pas moins pénible de constater sa présence. Mais pour toute sa vie de mensonges et d’omissions, s’il y avait bien un groupe de personnes auquel il tenait être loyal en toutes circonstances, et honnête, c’était bien celui de sa famille de cœur. Et les espions, dans leur quasi globalité, y étaient inclus. Ironique que sa fidélité en berne fît précisément le lit de ses aveux présents. Il y avait aussi une note de culpabilité, résonnant dans sa chair au malaise évident de Gwain, qui apportait un écho circonspect à la teneur, et au timing, de ses propos. Aurait-il dû attendre moment plus favorable ? Existait-il seulement ? Peut-être. Mais il avait toute confiance en son collègue, et ami, pour assimiler ces données disgracieuses et les traiter de manière adéquate. Ou stresser un bon coup.

    Une grimace tordit légèrement les lèvres du coursier comme les pupilles de son jeune camarade miroitaient les divers émois le traversant. Parfois, comme pour Xylia, il avait tendance à oublier l’innocence latente de ses cadets en dépit de leur évolution dans le monde enténébré des espions. N’avait-il pas été similaire à eux avant Ruth ? Avant que ses affects pour l’Ombre ne lui eussent été effacés ? Mais Gwain répondit enfin, verbalement, à ses propos, et Calixte soupira de soulagement. Peut-être y avait-il une certaine dose de déni optimiste dans les réassurances de son collègue, mais la confirmation de sa confiance intacte passait un baume salutaire sur les plaies encore à vif de l’âme morcelée du coursier. Peut-être le temps aurait-il raison de l’enthousiasme de Gwain, et que celui-ci reviendrait sur ses assertions présentes, mais pour l’heure le soldat se satisfaisait pleinement de ce sursis.

    Ses bras se serrèrent automatiquement autour du buste du jeune homme comme celui-ci l’attirait contre lui, et il inspira longuement le parfum familier qui se déversa en vagues sereines à chaque respiration un peu plus loin à travers son corps, et acheva de le réconforter. Hochant distraitement la tête pour acquiescer aux directives de Gwain, il finit par se décrocher de lui et reprendre le chemin de l’appartement sur les quais d’un pas bien plus léger. Son regard croisa au passage celui d’Ashae toujours affalée sur le sommet du crâne de son ami, et il lui sembla que celle-ci, heureuse du dénouement de la situation, tricotait affectueusement les mèches blondes à portée de ses petites pattes.

    - Merci, fit-il tout de même chaleureusement à l’égard de son collègue. Mais assez parlé de moi, et de mes déboires. Comment se passe ton travail de coursier hors du système rudimentaire de la Garde ?

    En dépit de leurs activités similaires, les organismes pour lesquels ils l’effectuaient étaient bien différents, et leur quotidien loin d’être identiques.

    - Je dois avouer avoir rencontré un peu par… hasard ; enfin disons par hasard provoqué par Apolline, Warren Richter, l’autre jour.

    Warren Richter, le gérant des compagnies Lagoon et Althair sur la Capitale. L’âme artificielle, plus intéressée par le système d’investissement de la première, avait pris rendez-vous avec l’homme pour discuter du financement des produits dérivés de ses livres érotiques. La conscience de Calixte n’osait réfléchir à quels types d’objets cela sous-entendait, mais apparemment la petite trousse était très satisfaite de son entretien – bien que légèrement perturbé de diverses péripéties – avec le Requin.

    - Arrives-tu à jongler comme tu veux entre ce travail-là et tes diverses obligations autres ? Et ta vie personnelle ? demanda-t-il avec l’inquiétude usuelle des aînés pour leurs cadets.

    Bientôt, assurément, lui demanderait-il s’il se nourrissait correctement, si ses armoires étaient bien remplies pour la saison froide à venir, et s’il fréquentait quelques âmes dont son cœur se serait épris.

    Leurs pas bifurquèrent au niveau de l’une des ruelles parallèles aux quais, et ils avisèrent l’étroit bâtiment bardé de carreaux de faïence, protégeant celui-ci des embruns salés venant de la mer. Profitant du pouvoir de fusion de Calixte pour passer les différents murs sur leur chemin, ils empruntèrent un étroit passage couvert d’arcades à proximité, et se faufilèrent par un petit entrepôt jusqu’au placard dissimulé jouxtant la cage d’escalier de leur immeuble. Là, ils gravirent l’échelle menant directement à l’appartement du pôle d’espionnage, et y pénétrèrent après avoir désactivé les diverses protections en place. A l’intérieur un léger parfum irritant de poussière les accueillit, attestant d’une dernière utilisation peu récente de la planque. Usuellement, même s’ils n’étaient pas fréquemment employés, ces lieux de repli étaient régulièrement entretenus par les espions – ou leurs apprentis. Il aurait été malvenu de manquer de produits de première nécessité ou de ressources de travail au cœur d’une mission sensible. Mais peut-être que Lichael, assurant l’intérim de Maître-Espion en l’absence de Zahria, n’avait-il pas eu l’occasion de s’y intéresser.

    Ils ouvrirent en grand la lucarne et entrebâillèrent discrètement la fenêtre donnant sur les docks afin de profiter du courant d’air pour rafraîchir l’intérieur de l’appartement. Depuis la rue, la rumeur des voix, des mouettes et de l’activité portuaire leur parvenait en bruit de fond plus agréable que son pendant odorant de relents maritimes. Passant un coup de chiffon sur la table pendant que Gwain récupérait dans leurs archives les documents potentiellement d’intérêt, Calixte laissa glisser son regard sur les reliefs familiers de la planque, songeur. Si rester parmi les espions était hors de question, non seulement en raison de sa trahison mais aussi du développement familial personnel qui l’attendait, intégrer la compagnie Lagoon ou Althair était-elle une reconversion véritablement intéressante ? Il en avait discuté avec Warren Richter, quand leurs pas s’étaient croisés, mais le coursier n’avait pas encore réussi à trancher. Etait-il plus facile de se consacrer aux siens tout en étant dans la Garde, avec les avantages et inconvénients qu’elle comportait, ou en quittant celle-ci ? Et pour faire quoi ? Peut-être pourrait-il profiter du point de vue de Gwain pour se modeler le sien.

    Le jeune homme déposa sur la table un couple de dossiers, et Calixte chassa dans un coin de son cerveau ces questions d’ordre personnel. Il avait déjà suffisamment parasité leur mission avec ses états d’âme, sans doute était-il temps d’adopter une attitude moins égocentrée. S’installant en face de Gwain, il attrapa les documents tendus par celui-ci.

    - Mmm Merem Lissao, née Kovatch, indiqua-t-il distraitement à voix haute en parcourant des yeux les pages noircies de la copie officieuse de l’un des registres de l’administration locale. A noter que son nom actuel est celui de son second mari ; elle n’a jamais pris celui de son premier, décédé il y a déjà quelques couples d’années. Elle-même a actuellement cinquante-neuf ans, est issue d’une famille marchande établie au Grand Port et à l’Archipel, et semble avoir toujours vécu en tenant l’intendance du travail de son époux. Son précédent était propriétaire de quelques entrepôts dans le coin, qui sont passés à son fils avant d’être saisis par la ville lorsque celui-ci a été mis à pied, poursuivit-il en fronçant les sourcils.

    L’histoire lui disait quelque chose, mais les pièces importantes de celle-ci restaient désespérément hors de sa portée.

    - Edward Kovatch, son fils unique, ayant visiblement gardé le nom de sa mère et non de son père, ancien soldat du Grand Port, a été arrêté et écroué l’an dernier. Pas plus d’information ici.

    Penchant la tête sur le côté pour tenter d’attraper ces bribes de reconnaissance qui ne cessaient de s’évaporer comme il mettait le doigt dessus, il se résigna finalement à laisser de côté cette intuition pour se concentrer sur le reste du registre.

    - Elle est recensée auprès d’un certain nombre d’associations et de clubs, mais aucun de ceux-ci ne me paraissent particulièrement suspects, reprit Calixte en notant tout de même dans son calepin les divers noms. Son mari actuel, Jeremiah Lisseo, est dessinateur pour le journal du Phobou Enchaîné. Il parait cohérent qu’ils en soient aussi, effectivement, actionnaires, commenta-t-il en tournant les pages pour arriver à celles concernant l’homme. Pas d’autres informations concernant directement madame Lisseo. Toi ?
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Mar 16 Nov 2021 - 17:23 #
    Gwain apprécia l’étreinte, qui leur permettait de mettre tout ces problèmes au loin pour le moment. Il aurait tout le temps de s’inquiéter de ce qu’il venait de dire ou des conflits interne à leur Famille plus tard, lorsqu’il sera seul sur un énième trajet pour livrer une babiole ou lors de sa prochaine visite dans une taverne. Pour le moment, tout ce qui comptait, c’était que Calixte paraissait déjà mieux et qu’ils pourraient faire une mission comme avant. Ils repartirent ensemble vers la planque, alors que le Chapardeur sentait que la petite bête dans ses cheveux s’amusait bien. Il devrait probablement vérifier la coupe qu’il avait avant de partir voir l’établissement de Dame lisseo. Il sourit avant d’être surpris de la question de Calixte.

    Gwain n’était pas habitué à parlé de lui, préférant être discret, mais il se remit de la surprise rapidement, avant de regarder son ami. Il avait rencontré son boss indirect, Warren, plutôt facilement alors que le Chapardeur ne le connaissait pas du tout. Pour une bonne couverture, il ne fouillait pas plus son employeur. Après tout, il n’était pas un infiltré, pour le moment.

    Et bien, je dois avouer qu’il se passe plutôt bien. J’ai une grande liberté, et ça me donne la couverture idéale! Je suis de loin pas aussi doué que toi pour jouer un rôle, donc avoir quelque chose de simple, qui ressemble en surface à notre vraie mission, ça me facilite la tâche” dit-il en souriant “Ah? Tu as rencontré Warren Richter? Je ne l'ai jamais approché pour être honnête. Pour le moment, je me contente de rester un maximum un coursier lambda. Ca me permet de plus facilement regarder le contenu des livraisons et de vous informer de ce que je trouve. Mais tu l’as trouvé comment?

    Gwain n’était pas totalement sûr de tout ça, mais il avait l’impression qu’il y avait une mauvaise odeur dans l’histoire d’Althair, surtout depuis presque une année. Mais il n’allait pas s’en préoccuper pour le moment. Après tout, il vient tout juste de finir sa formation, il n’allait quand même pas griller son unique couverture pour une impression.

    Honnêtement, oui. Comme j’ai dis, le monde de la livraison et le notre, c’est pas si différent: on a un travail solitaire, avec des livraisons qui sont secrêtes, au travers du monde entier, et on reste dans l’ombre. Et la compagnie est vraiment flexible, comparé à la Garde je dois avouer. Donc je suis plutôt bien loti de ce côté! Mais, c’est vrai que pour la vie personelle, c’est le désert… Je ne fais pas grand chose d’autre que travailler. Résultat, ça fait longtemps que j’ai pas revu ma soeur, ou même fait de nouvelle rencontre… Mais ainsi va la vie” finit-il en hochant les épaules

    L’attitude détachée de Gwain cachait une petite frustration comparé aux vies plus normales d’avanturier, de garde ou même de simple citoyen. Rentrer seul, dans une habitation qui n’est pas nécessairement la sienne, ne rien pouvoir partager, rester prudent… Mais pour le moment, il laissait ça bien au fond de son esprit, profitant de la liberté de son statut et de la proxmité avec sa Famille.

    Gwain allait prendre les voies plus classiques, pour arriver à leur cachette, mais se rappellant la puissance du pouvoir de Calixte, il se laissa guider. Ce n’était pas la première fois qu’il fondait dans des objets, mais ça restait quelque chose d’indescriptible. Il ne saurait dire si il trouvait cela agréable. Mais c’était une capacité indéniablement pratique.

    Une fois arrivés à leur planque, l’état était acceptable malgré la poussière qui s’accumulait. Etait-ce un signe de l’état actuel des espions également? Chassant cette idée de la tête, Gwain partit vers les archives. Il nettoya brièvement les étagères, histoire de ne pas s’etouffer en feuilletant les documents. La plupart était de bonne qualité et bien entretenu, offrant une vue plutôt complête de la ville. L’ordre des documents était même plutôt bien respecté. Mais au vue de la poussière, les informations n’étaient probablement pas les plus à jour. Ca devrait malgré tout suffire pour leur mission. Il trouva en premier lieu le document sur la famille Lisseo qu’il alla rapidement donner à Calixte avant de prendre de quoi noter, pour se préparer à retourner dans les archives, histoire de trouver encore plus d’information.

    Gwain s’appuya contra une paroi, regardant Calixte avant de partir dans les archives en entendant parler d’Edward. Il y avait peut-être un lien, si Fedora y était liée de quelconque manière ou peut-être que non, après tout les rumeurs ne se sont propagées que récemment. Il revint avec le dossier et le lut rapidement pour en sortir les quelques informations sur Edward, espérant en avoir plus sur l’arrestation. Dossier assez complexe, il y avait un résumé du rapport de l’enquête : une vaste affaire de traffic, impliquant beaucoup de monde avec un relent d’insubordination.

    Le Phobou Enchainé, ils avaient enfin le nom de la gazette. Bien qu’elle ne fut jamais mentionnée comme source des rumeurs par Fedora, peut-être n’était-ce pas dans son habitude de la lire. Surtout si la rumeur n’était qu’une ou deux lignes, laissée dans les faits divers. Une phrase discrète avec des  “on aurait entendu que” pourrait suffire à planter les graines du doute parmis les lecteurs.

    J’ai vite regardé pour Edward, sale histoire. Un ancien de la Marine, trempant dans les traffics illégaux. Plusieurs autres membre de la garde étaient impliqués également. Ca remonte malgré tout à longtemps, et j’imagine mal Fedora avoir quelque chose à voir avec son incarceration." commença Gwain, lisant ses notes pour être sûr d'avoir bien compris " Par contre, ça indique que le trio familial Lisseo/Kovatch n’a pas la plus grande morale. Et avec la gazette, ils ont là un moyen de faire propager des rumeurs ainsi qu’une forte influence. Je ne pense pas qu’ils aient fait une grande première page critquant Fedora par contre. Ils sont probablement malin

    Gwain, tout en parlant, était allé examiné la carte de Grand-Port, pour tenter de se faire un plan de ‘visite de travail’. Fouiller parmis les planches du Phobou Enchainé n’était pas passionnant, mais ça leur permettrait de trouver potentiellement une pièce du puzzle supplémentaire. Quant à la maison des Lisseos, il pourrait contenir des agendas, des journeaux ou d’autre preuves. Mais la visite de nuit était à proscrire.

    On a un duo de suspects, le couple Lisseo, et ils auraient les possibilités de propager des rumeurs. Mais rien ne dit qu’ils sont les commanditaires. Peut-être qu’un autre adversaire à Fedora a simplement payer le couple” expliqua-t-il, pensant à voix haute “Je te proposerai d’aller d’abord au Manoir Lisseo. Il y a plus de chance que les deux soient loin du domicile en ce moment. On fouille à la recherche d’un agenda, qui pourrait nous aiguiller. Une fois tout ça fait, on attend la nuit tombée pour aller rendre visite au Phobou Enchainé. On aura de la lecture à faire, pour voir si ils mentionnent Fedora d’une quelque manière qu’il soit

    Basé sur ce qu’ils découvriraient chez les Lisseos, les espions pouvaient toujours revenir en attendant la nuit. Gwain le sentait plutôt bien et était impatient de s’infiltrer chez des riches, aux secrets les plus juteux. Il regarda Calixte, lui laissant le temps d’exposer ses idées pour qu’ensemble ils s’organisent.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Jeu 2 Déc 2021 - 11:12 #
    Comment décrire Warren Richter ? Comme une singularité, assurément, mais aussi, à la réflexion, comme un personnage bien plus commun que ce que la rumeur affirmait. Comme une pièce de théâtre audacieuse, vibrante, mais dont les coulisses drapées de ténèbres ressemblaient à toutes les autres. Un homme qu’il avait d’abord abordé avec méfiance, puis crainte, et enfin curiosité. Un homme qui, s’il avait été moins fébrile dans son approche, aurait assurément pu prêter l’un de ses masques au pôle d’espionnage sans rougir de ses capacités. Mais peut-être fallait-il faussaire pour en reconnaitre un autre, ou tout du moins pour soupçonner que les cadavres du placard ne fussent pas ceux traditionnellement conjecturés.

    - C’est un personnage intéressant, avait choisi de répondre Calixte à son jeune collègue, replongeant dans les souvenirs de cette étrange rencontre. Haut en couleurs, fort d’une moralité bien personnelle, et rempli de contradictions ; humain, en somme. Mais pour plus de détails, il faudrait que l’on taquine Luz, avait-il ajouté avec un sourire espiègle.

    Luz, membre implicite du pôle espionnage, gardienne de leurs secrets et témoin de leurs circonvolutions plus ou moins fructueuses. Amie souvent, amante parfois, quelque part entre la mère et la sœur pour certains. Pour Calixte. Un pied dans l’obscurité et un dans la lumière, dont les propres ténèbres échappaient parfois aux investigateurs de l’ombre qui gravitaient si aisément autour d’elle et de sa colocataire la Maître-Espion. Luz, qui s’était laissée aller aux filets du squale, à moins que ce ne fût elle qui l’eût pêché.

    - Il m’a néanmoins dit sans équivoque que la Garde n’était pas bienvenue auprès de ses affaires, avait-il laissé en suspension avant qu’ils n’abordassent un autre sujet.

    Présentement, dans l’antre de l’appartement des espions, Calixte évaluait le plan proposé par Gwain, et se trouvait acquiescer à celui-ci. Même si leur infiltration de la journée devait se montrer peu fructueuse en raison d’une préparation succincte, au moins aurait-elle le mérite de préparer le terrain pour les suivantes. Restait cependant à savoir comment ils s’y prendraient concrètement ; en se divisant pour jouer d’une diversion pour le personnel probablement présent, ou en s’y glissant de concert pour profiter de leur expertise conjointe. Un premier aperçu du manoir les aiderait certainement à trancher.

    - Vendu, allons-y, répondit le coursier en tapotant sur le dossier la ligne mentionnant l’adresse de la famille Lisseo.

    Ils effectuèrent les gestes inverses de ceux qui les avaient amenés à s’installer au cœur de la planque, rangèrent les dossiers, fermèrent les ouvertures, replacèrent les pièges, et s’éclipsèrent du bâtiment presque par le même passage que celui qu’ils avaient emprunté pour y pénétrer, et se mirent en route vers les quartiers un peu plus huppés. L’architecture du Grand Port était assurément plus modeste que celle de ses cités sœurs, car elle s’était développée au gré d’une croissance effrénée quasi exclusivement marchande, où le fonctionnel primait sur le faste. Mais, tout comme le domaine des Alkhaia de Eliëir avait poussé encastré entre des échoppes fourmillant d’activité, il existait à travers la ville portuaire un certain nombre de résidences majestueuses, et quelques lotissements très visiblement fortunés, et fiers de l’afficher. C’était l’un d’eux, situé à l’une des extrémités de la ceinture marchande, que les deux hommes allaient appréhender.

    - Je crois avoir vu ta sœur aux festivités estivales de l’an dernier, déclara d’un ton badin Calixte comme ils s’enfonçaient dans les ruelles animées du Grand Port pour mieux ressortir secondairement vers les quartiers cossus et calmes. Astrid ? D’un enthousiasme débordant, terriblement rapide, un humour douteux et une descente défiant… en réalité, j’avouerai ne pas me souvenir de sa descente. J’étais moi-même un peu préoccupé par mon adversaire de boisson, ajouta-t-il pensivement, souriant instinctivement au souvenir de ce moment passé avec Solveig, hors du temps, dans une bulle de sérénité enivrée dans le giron festif du Bastion.

    S’il avait entendu Gwain mentionner sa sœur à quelques occasions – et notamment évoquer une étrange ressemblance avec le Damoiseau lorsque celui-ci revêtait des atours féminins – il ne l’avait jusqu’alors jamais rencontrée. Solveig, elle, semblait la connaitre depuis déjà quelques temps. Ou pas. La mi-chiraki avait cette aisance – qu’il admirait et appréciait – pour se lier de sympathie aussi prestement qu’il était prompt à se manger un mur par maladresse.

    - … si c’était bien elle, je crois me souvenir qu’elle a ajouté le Capitaine Al Rakija à son palmarès de personnalités embrassées, poursuivit-il en arquant un sourcil amusé aux reviviscences décousues de la soirée.

    Ils dépassèrent une rue escarpée qui serpentait entre un aggloméra de boutiques et enseignes de restauration pour mener, à terme, au seuil du Bastion, et le regard du coursier s’attarda sur la devanture d’un salon de thé à l’étage d’un magasin pour adultes consentants. Il était venu là – au salon de thé, pas dans la boutique – contre toute attente avec Emeor Calyx, au début de son affectation à la Caserne méridionale. Assurément l’homme, alors son supérieur hiérarchique, connaissait-il, lui aussi, quelques soucis d’adaptation. Ce qui, à nouveau, tira impossiblement égoïstement ses songes vers sa situation actuelle.

    - J’avouerai que mes remarques de plus tôt concernant ton travail officiel n’étaient pas dénuées d’intérêt égocentrique, reprit Calixte en taisant temporairement la voix qui s’inquiétait de ces occupations qui brûlaient si bien l’emploi du temps de son ami pour le laisser, au final, dans une certaine solitude. Avec la grossesse, les jumeaux qui arrivent, mon départ dû à ma faillibilité… je m’interroge sur l’intelligence de ma position, et celle d’en changer. Avec sieur Richter, nous avons notamment évoqué mon retrait de la Garde pour rejoindre les compagnies Lagoon ou Althair – ou peut-être finalement Althair, sur sa branche du Grand Port, vu sa propre réticence à accueillir des membres de la Garde, même ceux pour qui ce statut relève du passé. Il y a apparemment plusieurs postes disponibles au sein de ces entreprises, soit de coursier, comme toi, ce qui serait une reconversion aisée mais avec toujours cette contrainte de mobilité, soit d’autres plus sédentaires… Qu’en penses-tu ?

    Le résumé du quotidien de son jeune collègue n’avait pas particulièrement enthousiasmé le soldat, qui escomptait profiter un minimum de sa vie de famille à venir tout en la gardant au maximum du danger, mais certainement une grande partie du temps de Gwain était-il dévoué à son travail d’espion. Et puis, comme les interrogations possiblement personnelles s’ajoutaient à celles de son instinct de grand frère, il poursuivit :

    - Tu as perdu un peu de poids, non ? C’est si prenant ? Ou alors c’est tes affaires qui se sont détendues à force de lavages. Tes courses t’emmènent dans des endroits particuliers ? Reculés ? Salissants ? Est-ce que tu utilises une net’noix pour faire ta lessive ? Je te prêterai la mienne. Est-ce que tu as un sèche-vite ? Pour les missions humides où les points de chute sont dépourvus de source de chaleur digne de ce nom, c’est appréciable. Ca rentre plutôt pas mal dans un grand-sac-sans-fond. Par Lucy, tu sais combien de couches lavables par jour il faut pour un nourrisson ? Pour deux nourrissons ? Un nombre indécent.

    Par association d’idées, il plissa les yeux et coula un regard suspicieux vers son ami.

    - … tu as une bague contre-moufflet pour les périodes moins désertiques ? Ou une pochette de préservatifs en boyaux traités ? ajouta-t-il en se souvenant des préférences usuelles de Gwain concernant le type de partenaire.

    Parce qu’il voulait bien croire que l’espion n’eût personne de stable, mais les aventures en tout genre le long des routes d’Aryon ne manquaient pas, comme il l’avait lui-même appris une bonne quinzaine de lunes plus tôt en tombant de manière impromptue sur les fameuses « chambres roses » montagnardes et une colocataire fort intéressée. Et intéressante.

    La silhouette d’un groupement d’augustes demeures se dressait à quelques mètres de la rue dans laquelle ils évoluaient, et s’ils prêtaient attention aux plaques de signalisation leur objectif d’infiltration se profilait à moins d’une minute de marche. Calixte, cependant, en bon grand frère un peu trop soucieux voire paranoïaque, avait présentement un centre d’intérêt autrement focalisé, et il fallut la décharge agacée de Vreneli, qui avait pointé le bout de son museau de l’une des poches d’Abdallah, pour qu’il réalisât qu’il lui faudrait bientôt réviser ses priorités.

    - On y reviendra, indiqua-t-il après quelques réponses de Gwain qui ne le convainquirent pas complètement. Qu’est-ce que tu préfères pour la suite : je te fais une diversion, tu me fais une diversion, ou on y va prudemment ensemble ? Je peux nous fondre dans une bille et Vreneli nous trimballera discrètement ; à cette heure-ci de la journée, sous les rayons du soleil ou ceux des cristaux de lumière, sa nébuleuse est presqu’imperceptible.

    Son regard accrocha celui d’Ashae toujours posée sur le sommet de la tête de son jeune ami où elle s’était mise à suçoter de manière possessive les mèches blondes qu’elle avait savamment entremêlées :

    - Tu nous attends là ?

    La shupon attrapa fermement un épi entre ses mâchoires.

    - … tu suis bien Vreneli, et pas de caprice à l’intérieur.

    Les cheveux baveux retrouvèrent leur liberté, et le familier hocha la tête d’un air satisfait.

    - Alors, quelle approche ? se refocalisa Calixte en explorant des yeux les alentours.

    Sous couvert de feindre la contemplation d’une bijouterie, ils avaient un visuel presqu’impeccable sur le manoir Lisseo s’étirant derrière de chiches jardins qui auraient mérité un peu plus d’entretien.
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Ven 17 Déc 2021 - 21:49 #
    Gwain écoutait Calixte parler de Warren. L’inverse l’aurait surpris. Aucune entreprise n’aurait aimé avoir la garde dans les pattes, encore moins une entreprise aussi importante. Il y avait probablement plusieurs ‘arrangements’ ça et là. Et Gwain n’allait pas se révéler en fouillant plus en détail, pas temps qu’on ne lui ordonnait pas. Garder un petit profile était bien plus judicieux.

    Le chapardeur fut content que son ancien mentor avait accepter son plan. Ils avaient à faire, et rangèrent succintement leur planque, presque machinalement tant ils avaient du le faire durant leur vie. Ainsi, en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire, ils se retrouvèrent à nouveau dans les rues de la ville, se dirigeant cette fois-ci vers les zones plus riches et plus calme. Marchant ainsi, tranquillement, le duo était indistinguable de deux amis se baladant, parlant de la sœur d’un des deux innoçamment, plutôt que deux amis espions se baladant et parlant de la sœur d’un des deux, en préparant une effraction.

    « Oh ? C’est elle tout craché » dit Gwain en souriant. Il ne voyait pas aussi souvent sa sœur que ce qu’il aurait voulu. Ses nombreux voyages mais aussi le secret qu’il avait à garder le gênait. Il n’était jamais très à l’aise de mentir à sa famille. « Ca avait l’air d’être une sacrée réjouissance. Et je sais pas pourquoi je ne suis pas surpris de son palmares. C’est une très belle femme, qui sait ce qu’elle veut. Et puis, avec tout ce qu’on entends sur le capitaine, il ne dirait pas probablement pas non »

    Gwain sourit, amusé. Lui avait une bien faible descente, finissant bien vite à regarder son verre et se demander si la prochaine n’allait pas l’envoyer au sol. Il n’aurait jamais même imaginer tenir la distance avec Astrid. Il serait plutôt le spectateur, ou l’arbitre tout au plus, spectateur du duel perdu d’avance.

    Le regard du jeune espion était plus sur Calixte, l’écoutant parler de sa potentielle reconversion que sur le salon de thé, surpris et un brin enthousiaste de voir le Damoiseau potentiellement le rejoindre. C’était une réaction égoiste, bien entendu, mais si ça leur permettait de se voir comme avant quand ils étaient les deux collègues.

    « Et bien, c’est clair que quand tu seras parent, le voyage c’est pas du tout l’idéal » dit-il, en marquant une pause sur parent, pas sûr de quel terme utiliser pour son ami « Surtout que les enfants, ça occupe beaucoup à ce que j’entends ça et là. Mais y a surement quelque chose d’intermédiaire de possible. Vu ton expérience, tu pourrais être probablement chef des coursiers ? Un travail plus sédentaire où tu gérerai des équipes ou de la logistique, tout en ayant la possiblité de partir avec des coursiers quand les pleurs de bambins de fatigueront trop »

    Peut-être que Gwain était trop biaisé par sa vision, très positive, de son ami, mais il n’avait aucun doute quand aux capacités de Calixste. Mais ça n’allait pas être facille d’être parent. Les enfants, le chapardeur n’était pas sûr d’en vouloir, outre les challenges de compatibilité qu’il aurait si il cherchait une mère, mais en plus un enfant clouait. Il était nécessaire d’être responsable, et de prendre sur soit les erreurs de son enfants…

    Le chapardeur fut prit d’un rire de bon coeur en entendant Calixte retomber dans son rôle inquiet. Il allait être un père, ou mère, parfait si il s’inquiétait comme ça. Il n’avait pas autant de petits objet utilitaire que d’autre, aimant le travail manuel des tâches ménagères. Ca lui permettait de se vider l’esprit, de retourner mentalement à sa vie de village. Il allait répondre quand il fut coupé dans son rire par les questions plus personnelles de Calixte. Les oreilles de Gwain devinrent rouges, tout comme ses pommettes. Il était très maladroit en amour, et de loin pas aussi libéré que ceux de son entourage, ou que sa sœur si il se basait sur ce qu’il entendait.

    « Euh, c’est que… Hm » tenta Gwain, cherchant un moyen de se dépatouiller de la question. Il pouvait mentir, mais ça serait perçu immédiatement. Le chapardeur n’avait pas encore eu l’occasion  d’expérimenter pleinement ce monde où qu’il n’avait gouté que du bout des lèvres. « Oui… Oui… Je fais attention. Merci, Maman ! »

    Gwain avait mit une façade sur sa dernière phrase, se montrant plaisantant et ironique, pour ne pas montrer qu’il ne disait de loin pas tout… Et visiblement Calixte avait vu au travers.

    Mais heureusement, sauvé par le gong, ou par le manoir plutôt, et ils repartirent sur des discussions plus pragmatique : comment infiltrer le manoir sans danger.

    « Je pense que ta troisième idée est la meilleure. On s’infiltre à l’intérieur. Vreneli fait un premier tour discretement, pour que l’on ait une bonne idée de l’intérieur, du nombre de domestique, de si on voit quelque chose vite fait » dit-il, alors que la couleur de ses oreilles passait au rosée puis au blanc. Il sourit alors que sa chevelure était désormais un nid « Une fois que l’on a fait ce premier tour, on essaie de se répartir les salles. Peut-être ont-ils un bureau et une chambre de maitre, on devrait y trouver notre bonhneur. On pourrai aussi voir si ils n’ont pas du courrier en attente, prêt à envoyer ou à être lu»

    Gwain profitait de la vue de la bijouterie pour bien examiner. L’état du manoir était faste mais, pour quiconque regardait avec intérêt, trahissait d’un certain laisser pour compte. Les haies du jardin pas parfaitement taillées, un chemin de pierre méritant un coup de poliche et des volets vieillissant. Pour peu que le duo s’approchait du manoir, ils pourraient également voir que de la rouille s’installait sur les quelques charnières métallique.

    « Je me demande si ils n’ont pas des problèmes d’argents » commenta Gwain, montrant ses observations. « Tout n’est pas parfaitement maintenu ».

    Gwain mettait peut être un brin trop haut le niveau d’exigence pour des riches propriétaires. En regardant bien, ils pouvaient voir du mouvement aux deux étages de la batisse, mais ils étaient trop loin pour se rendre compte de ce que c’était, vraisemblablement des domestiques. Le chapardeur tendit la main à Calixste, pour qu’ils puissent rentrer dans la bille. Il redoutait un peu cette approche, avec laquelle il était pleinement dépendant du damoiseau.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Jeu 30 Déc 2021 - 10:33 #
    Hochant la tête pour acquiescer aux propositions de Gwain, le regard glissant sur le jardin en douce décrépitude embrassant d’une végétation presque sauvage les reliefs austères de l’auguste demeure, Calixte attrapa à sa ceinture une nouvelle bille de bois qu’il tendit à Vreneli. Ce dernier, à présent coutumier de ce type d’exercice, l’attrapa entre ses crocs sans broncher, vrombissant même davantage d’anticipation fébrile.

    - De temps, d’argent, ou de discrétion, approuva l’ancien espion notant le lierre vorace occultant certains vitrages. Allez ; en piste, mon fils, ajouta-t-il d’un ton taquin en tapotant le bras de son jeune collègue avant de saisir la main qu’il lui tendait.

    Ils se coulèrent dans la sphère tenue par le teisheba, et Ashae chuta de la blonde chevelure avant de se rétablir d’un battement d’ailes courroucé. Son sentiment de vexation ne dura cependant guère longtemps, la curiosité prenant le pas sur le reste, alors que son camarade familier s’élançait vers le manoir. Moins visible en pleine lumière qu’à l’abri de l’ombre, Vreneli traversa au grand jour la ruelle jouxtant la bâtisse, puis se faufila contre la pierre du muret d’enceinte, slalomant entre la ferraillerie ouvragée du grillage le surplombant. Avisant un chemin sans obscurité ou peu, il leur fit d’abord faire un tour approximatif de l’extérieur, afin de leur offrir l’observation des diverses issues et un premier aperçu de l’activité intérieure.

    Depuis le refuge feutré de la bille, Calixte appréhenda les herbes folles s’immisçant entre les parterres de fleurs brûlées par le soleil encore ardent de cette fin de saison chaude, les bosquets débordants des sages moules dans lesquels ils avaient initialement été taillés, l’érosion de la roche mal entretenue depuis quelques lunes déjà. Un petit chemin de dalles plus soignées, partant de l’allée centrale et versant sur l’une des latéralités de la demeure, semblait cependant mener sur une façade plus joliment apprêtée où, derrière des rideaux de tissu élégamment relevés contre les colonnades encadrant une entrée secondaire pas tellement plus modeste que la principale, paraissait s’engager un court vestibule donnant sur une large pièce de réception esseulée pour l’heure. Probablement les hôtes de l’endroit accueillaient-ils là les mondanités dont Aira avait parlé plus tôt, sauvegardant quelque peu les apparences derrière un cache-misère actuellement peu subtile. Mais en avait-ce toujours été ainsi ?

    Prenant de la hauteur pour évaluer les lieux d’un autre point de vue encore, Vreneli finit par trouver une brèche pour s’introduire dans le manoir et, à la faveur d’une bouche d’aération, s’immisça au niveau de ce qui devait être la salle d’eau principale. Profitant ensuite de l’entrebâillement plus ou moins serré des portes, il se glissa – suivi d’une Ashae étrangement discrète – de pièce en pièce. Ils traversèrent ainsi une impressionnante chambre qui avait dû, originellement, être particulièrement charmante avec sa décoration élégante et son mobilier délicat, mais croulait actuellement sous une panoplie de dunes de vêtements, de papiers, et d’affaires diverses. Les draps étaient négligemment défaits, l’empreinte des corps encore visible sur le matelas. Le reste de l’exploration rapide du teisheba leur apprit que le bâtiment était relativement désert, mais pas tout à fait. Aux cuisines, un homme d’âge relativement avancé, drapé d’un costume de majordome seyant peu à l’activité avec laquelle il se débattait présentement, s’escrimait à maintenir la cadence de préparations douteuses. Peut-être était-il simplement le reflet d’un manque de personnel, ou bien y aurait-il encore là une piste à creuser.

    Revenant à distance de la seule présence évidente détectée, Vreneli lâcha la bille de bois au niveau de ce qu’ils avaient repéré plus tôt comme étant le bureau, et Calixte les fit défusionner.

    - Je te laisse cette partie-là, indiqua-t-il dans un chuchotement, même si entre le bruit des ustensiles et l’audition s’émoussant certainement du majordome, celui-ci n’entendrait probablement pas une quelconque agitation à l’étage. Je vais fouiller la chambre.

    Son regard parcourut quelques secondes, avec hésitation, les reliefs nettement plus ordonnés du secrétaire. A nouveau, il tendit la main vers Abdallah qui, avec la pratique, comprenait toujours mieux ses demandes implicites.

    - Appuie-là pour enregistrer la disposition actuelle, indiqua-t-il à Gwain en lui donnant son aspicass. Et lorsque tu auras fini, réappuie dessus ; ça remettra chaque objet précisément à sa place, si jamais tout ne devait pas être parfaitement réarrangé.

    Et puis, comme l’horreur du désert volant n’était encore jamais très loin de la surface de sa conscience, il ajouta dans la paume de l’espion une pastille synébrale.

    - Si besoin. Tu restes avec Gwain ? demanda-t-il ensuite au shupon qui acquiesça d’un mouvement de tête bien déterminé.

    Donnant l’un des grelots magiques pour familier à Ashae, Calixte s’éclipsa ensuite de la pièce pour retrouver la salle à coucher quelques pas plus loin. Dans un vrombissement contenu, Vreneli le suivit, tournoyant sur lui-même avec préoccupation.

    Eli ?
    … Sentir quelque chose,
    grommela le teisheba, froissé de ne pas trouver la source de son agitation.

    Fronçant les sourcils, le coursier pénétra dans la chambre et observa d’un œil prudent les montagnes d’affaires éparpillées.

    On fera attention. Fais le guet, s’il-te-plait ? indiqua-t-il finalement au familier, avant de se lancer dans l’exploration minutieuse du chantier lui faisant face.
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Dim 30 Jan 2022 - 14:34 #
    Gwain sourit à la tape amicale de son ancien mentor, avant de fermement lui tenir la main, pour être sûr de ne pas être laissé pour compte lors de la fusion avec la bille. Comme à chaque fois, la transformation se passe si vite qu’il n’eut pas le temps de dire ouf qu’il se trouvait déjà dans la sphère en bois, portée par le familier quasi invisible. Le Chapardeur eut de la peine pour avoir disparu de la sorte, sans prévenir la bête qui avait fait des ses cheveux un nid. Il se ferait pardonner, une fois tout ça terminé.

    Le vol était toujours déconcertant, mais l’espion n’avait pas le temps de s’y attarder. Il devait récupérer autant d’informations que possible. Il se faisait mentalement un plan de route de fuite, en cas d’urgence. Depuis le rez, aucune difficulté. A l’étage, il y avait une des fenêtres qui donnait sur une série d’arbustre et buisson, pouvant amortir la chute de quiconque sauterait. Le mouvement faire le haut fit descendre l’estomac dans les talons de Gwain. Bien que n’ayant pas nécessairement le vertige, être dans une si petite boule, il avait l’impression que tout était plus grand.

    La pièce où ils arrivèrent était chaotique, mais les choses qui intriguait le plus le Chapardeur était les tonnes de papiers et documents. Il espérait ne pas devoir fouiller tout cela, pour trouver l’aiguille dans une botte de foin qui relierait les propriétaires à la campagne contre Fedora. Le batiment vide était une aubaine, et le vieil homme ne poserait aucun problème à être maitriser si besoin est. Mais c’était une infraction paisible, il n’y avait nullement besoin de violence.

    Une fois sortie de la bille, Gwain mit quelques temps pour se remettre des mouvements aériens. Il s’étira un peu, avant de regarder Calixte. Le bureau lui irait bien, ça lui éviterait de fouiller plein de document inutile. Il prit les objets magiques de Calixte en hochant la tête.

    « Tout ira bien » rassura-t’-il avec un petit sourire « Ce n’est pas ma première fouille. Toi, fais attention ! »

    Le chapardeur caressa tendrement le Chupon, alors que Calixte partait. Il espérait que le petit animal ne lui en voulait pas.

    « A nous deux » dit-il en regardant la pièce, avant d’activer l’aspicass, le mettant bien au centre du bureau et fermant la porte, pour qu’on ne l’entende pas

    Une rapide examination lui révéla que cette pièce était fréquemment utilisée. La chaise avait laissé des marques au sol, et plusieurs tâches d’encre étaient parsemée sur le secretaire, parfaitement rangé comparé au reste de la pièce. Il y avait des petits cabinets aux abords du meuble, probablement plein de documents ou archive. Le secrétaire n’avait pas grand-chose directement visible : le pot d’encre, quelques plumes, ainsi que du matériel de poste. Deux tiroirs fermés à clé n’attendaient que d’être forcée. Le Chapardeur ne se fit pas prier et, prenant un petit outil en métal, commença à l’introduire dans les fentes qu’il trouvait, forçant doucement le tiroir. Une fois une bonne prise trouvée, il força d’un coup sec, cassant le tiroir qui sortit, révélant son contenu.

    Le tiroir contenait quelques broutilles ayant peut-être un brin de valeur : une chevalière, de la cire, du papier fin et un coupe-papier finement ouvragé. Il examina un peu les objets, se demandant pourquoi les mettre sous clé. Peut-être craignait-il des petits vols de la part de leur personnel ? Remettant les objets en place, Gwain s’attaqua à l’autre tiroirs de la même manière. Celui-ci contenait plusieurs feuillets manuscrits, que le chapardeur entreprit de lire rapidement. C’était une écriture masculine, pour la plupart des cahiers. Les feuilles étaient des phrases courtes et écrites rapidement, obfusquant presque le contenu. Jeremiah, l’auteur le probable, n’écrivait pas les mots entiers, semblait parfois avoir un dialogue avec lui-même dans les pages, où une phrase répondait à la question d’une autre ligne. Le tout, était bardé de flèche et symbole. La seule chose dont Gwain était sûr, c’étaient les dates écrites sur les pages. En fouillant les cahiers, il comprit qu’il avait là les archives des recherches de Jeremiah pour ses dessins. Mais le plus récent remontait à plusieurs mois. Aux vues de l’écriture hâtive et de la taille des cahiers, le cahier actuel était dans les mains de Jeremiah, qui l’utilisait pour noter ses idées.

    Par acquis de conscience, Gwain tenta de voir si une mention de Fedora était dans les documents, mais il ne trouva rien à première vue. Il jeta un bref coup d’œil aux autres cahiers, qui contenait surtout des modèles de lettre, écrites vraisemblablement des mains de Merem : invitation à des faites, rappel de factures impayées, lettre de renvoi ou d’embauche, c’était visiblement le cahier que la Dame utilisait pour ses divers envois.

    Le Chapardeur rangea le tout, ne réparant pas encore le secrétaire. Il regarda rapidement les cabinets d’archives. Il y avait trop de documents pour qu’il puisse tout examiner de manière exhaustive, mais un regard bref sur les derniers mois indiqua plusieurs lettres provenant de la garde qui répondaient négativement aux demandes de peines allégées pour son fils. Mis à part cela, rien ne semblait très excitant. Il rangea tout et retourna pour réparer le mobilier, quand il remarqua quelque chose. Le tiroir qui contenait la diverse valeur semblait moins profond que l’extérieur pouvait suggérer. Sortant pleinement tiroir avant de le retourner, Gwain put voir que le dessous était creux.

    Il y avait probablement un mécanisme secret d’ouverture, mais le Chapardeur n’avait pas envie de perdre du temps là-dessus. Il reprit son objet métallique et frappa dans les coins, cassant petit à petit le dessous du tiroir. Le bruit devait être audible depuis le couloir si quelqu’un était proche de la porte. Une fois le tiroir dépiauté, le Chapardeur sortit un livre de compte, remontant à plusieurs années et visiblement toujours actif au vue des dates. Gwain lu avec attention les valeurs. Visiblement, depuis environ une année, les rentrées d’argents se faisaient plus rare pour le couple Lisseo, un effet de l’opprobre que l’arrestation d’Edward a eu sur leur entourage ? Mais depuis un peu moins de deux mois, une rentrée d’argent apparaissait de temps à autre, portant la mention « Aide d’un ami ». Aux vues des sommes, ce devait être un très bon ami… ou un échange de bon procédé.  Finissant de noter mentalement les transactions récentes, le Chapardeur remarqua l’embauchée plutôt récente d’un garde, pour protéger la maison suite à des vols.

    Gwain se dépêcha de tout ranger, réparant avec son pouvoir les deux tiroirs, avant d’appuyer sur l’aspicass, qui rangea les divers papiers et autres objets qu’il avait déplacé. Si ils n’avaient pas vu de gardes durant leur voyage en bille, c’était embêtant. Pourquoi n’était-il pas à son poste. En ouvrant la porte, délicatement, Gwain se rendit compte qu’il n’y avait plus de bruit de cuisines, en bas. Depuis quand, il l’ignorait, mais il se cacha derrière la porte, prenant Ashae vers lui et lui faisant chut des mains. Il tendit les oreilles, alors que son cœur battait rapidement.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Sam 19 Fév 2022 - 23:06 #
    C’était le cachet de sa famille, les armoiries représentant le « A » des Alkhaia de Eliëir surplombant le parapluie de la Prévoyance, qui avaient attiré le regard de Calixte dans le fouillis de la chambre à coucher. Sans hésiter davantage – parce qu’il fallait bien commencer par quelque part et que ça paraissait être une piste comme une autre – l’ancien espion s’était dirigé vers les courriers drapant négligemment le sol au milieu de feuillets divers tout aussi malmenés. S’accroupissant pour étudier les lignes au tracé rond et régulier, tout à fait lisibles et claires à l’image des affaires de sa famille, il parcourut en silence leurs déclarations ampoulées mais sans équivoque. Apparemment, comme une grande partie des riches lignées et commerces méridionaux, les Lisseo avaient souscrit à une assurance qui leur reversait, présentement, des indemnités en raison d’un état de santé le nécessitant pour sieur Lisseo. S’il n’avait que peu touché au fonctionnement de la Prévoyance car ses parents avaient rapidement jugé que sa médiocrité serait moins délétère dans le giron de la Garde, Calixte reconnaissait suffisamment de termes techniques dans le relevé pour comprendre que Jeremiah, s’il devait encore dessiner pour le Phobou Enchaîné, n’était plus en capacité d’abattre sa cadence de travail usuelle et, de fait, toucher pleinement son salaire habituel. Difficulté s’ajoutant à des frais de soins apparemment nombreux. Les comptes des Alkh’eir renvoyaient à des indemnités versées depuis quelques années déjà, mais visiblement celles-ci n’avaient pas suffi à combler le déficit des Lisseo, en attestait l’état global en décrépitude de leur demeure.

    Un rapide coup d’œil vers le lit conjugal conforta le coursier dans ses hypothèses : verres encore à moitié remplis, potions, poudres et comprimés gisant sur la table de nuit et le tapis à ses pieds. Se relevant pour se diriger vers ce point d’intérêt, il se déplaça doucement pour fouiller du regard, de manière concomitante, les piles d’affaires jouxtant son chemin. Et, entre un tas de foulards en soie et les cadavres de robes de soirée négligemment jetées sur des valises éventrées, un paquet de lettres dépliées mentionnant « maman » attira son attention. Changeant quelque peu de trajectoire, hésitant une fraction de seconde avant de se saisir du courrier, Calixte parcourut avec curiosité les lignes s’étalant sur le vélin. Contrairement aux belles courbures de la Prévoyance, l’écriture était là hâtive, malaisée et grossière. Et, sur le verso des enveloppes conservées, le cachet brisé de la prison le toisait. Le contenu des lettres, de prime abord particulièrement insipide et rébarbatif, aurait rapidement détourné l’attention du coursier si ses yeux fourbus à l’art de la dissimulation n’avaient butté, au terme de sa lecture, sur des redondances troublantes pouvant évoquer l’utilisation d’un code, quoi que relativement sommaire, assez discret. Reprenant les missives dans un effort accru de concentration, s’aidant de son calepin pour tenter diverses possibilités, il finit par révéler ce que son intuition longuement entrainée avait touché du doigt. Momentanément satisfait de l’exercice, Calixte ne put s’empêcher de sourire de ravissement avant que la réalité de sa condition passée d’espion ne le rattrapât et qu’une vague de mélancholie ne le saisît à nouveau. Résigné, chassant d’un mouvement de tête ces sombres pensées pour se refocaliser sur sa tâche en cours, il se repencha sur le contenu décodé des lettres.

    Toutes mentionnaient un certain « Amigo » qui aurait versé depuis quelques temps – peut-être depuis l’incarcération d’Edward Kovatch, ou peut-être même déjà avant – des sommes a priori rondelettes pour aider le couple Lisseo à vivre, entretenir, dans une certaine mesure, leur demeure et payer le salaire de leur garde privé. Au sujet de ce dernier, il manquait visiblement une partie du courrier entre les mains du coursier qui ne saisissait pas très bien si l’homme était un ancien employé dévoué aux Lisseo, ou au contraire un homme de main de cet « Amigo », présent surtout pour surveiller Merem et Jeremiah et s’assurer de l’utilisation à bon escient des fortunes versées. Voire, de leur coopération sur divers points. Edward mentionnait notamment, dans l’une de ses missives, l’implication de l’homme pour faire passer via sa mère quelques objets dans la prison où il était retenu. Fronçant les sourcils à mesure de sa lecture, Calixte se demanda s’ils n’étaient pas, en réalité, tombés sur les malheureux pantins d’une organisation bien plus vaste, et obscure, que prévu. A en croire les mots du prisonnier – s’il ne s’était guère trompé dans son décodage – le couple Lisseo paraissait occuper à la fois la difficile place de famille endettée, par la santé défaillante de Jeremiah et les déboires précédents d’Edward, et celle inconfortable d’intermédiaire entre « Amigo » et le fils de Merem – voire d’autres prisonniers. Probablement l’une et l’autre étaient-elles, dans une certaine mesure, reliées. Mais les Lisseo étaient-ils tout à fait complices ? Ou parfaitement victimes ? Ou bien, encore, quelque part à mi-chemin entre ces deux rôles ? Et où – comment ? – Fedora Sanward intervenait-elle dans cette relation ?

    Mouvement ! grésilla Vreneli contre son esprit, rappelant ses pensées tourbillonnantes à de plus pressantes préoccupations.

    Instinctivement, Calixte se coula dans l’objet le plus proche à portée de main, et le courrier qu’il tenait jusque-là glissa de ses doigts, libre de leur emprise mais alourdi d’un nouvel occupant, pour s’éparpiller sur le sol. Un couple de secondes après, la porte de la pièce s’ouvrit sur le majordome qu’ils avaient aperçu précédemment aux cuisines. Sans l’appel du teisheba, le coursier était certain qu’il ne l’aurait pas entendu jusqu’à être pris la main dans le sac. Retenant machinalement sa respiration, profitant de son refuge pour observer l’homme d’âge mûr, le soldat nota que l’employé avait quitté son poste précédant toujours muni d’un couteau visiblement bien aiguisé. Avait-il perçu l’agitation du duo d’enquêteurs, pourtant relativement discrets, à l’étage ? Ou bien avait-il oublié quelque chose dans la chambre à coucher ? L’incongruité de cette notion n’échappa guère au coursier dont la fréquence cardiaque accéléra légèrement.

    Ne tenaient-ils finalement pas là une des pièces de leur puzzle ?

    Avant qu’il n’eût le temps de réfléchir pleinement à la suite de ses actions selon celles du majordome, ce dernier, alors qu’il s’apprêtait à repartir, satisfait de ce qu’il avait vu dans la pièce, tourna vivement la tête vers la nébuleuse de Vreneli mal dissimulée dans le clair-obscur. Le couteau vola d’une inquiétante précision vers le familier, qui l’esquiva à peine dans un vrombissement furieux, pour aller se ficher dans une tapisserie. La rétribution électrique ne se fit pas attendre, mais la foudre s’écrasa sans effet notable contre un trio de pavois surgi de nulle part. Avant qu’à nouveau quelques lames ne fusèrent vers le teisheba.

    Défusionnant de son abri, Calixte grimaça à l’idée qu’il rencontrait bien trop souvent de vindicatifs opposants un peu trop versés dans l’art de lui opposer d’avantageux objets tirés du néant. Les sens aiguisés du majordome ne manquèrent guère son intervention, et un nouveau jeu de couteaux s’élança vers lui. Déployant devant lui son porte-clef variable, le coursier entendit le métal grincer à l’impact des armes, mais ne s’en formalisa pas avant de se glisser dans la sphère agrandie d’un mètre de diamètre. Et, s’élançant depuis sa forme arrondie vers l’habile majordome, il se mit à follement tournoyer pour se servir de la boucle du porte-clef comme massue. Distraitement, il espéra que la Prévoyance couvrait aussi les dégâts matériels des Lisseo.

    L’anneau envoyé à toute vitesse manqua la paire de jambes qu’il cherchait à faucher, s’écrasant contre une armoire matérialisée devant lui et, lorsque les fragments boisés eurent fini de valser autour de lui, Calixte se rendit compte que son adversaire avait finalement jugé plus intéressant de mettre les voiles, s’élançant à corps perdu dans le couloir jouxtant la chambre.

    - Chap’ ! s’exclama-t-il instinctivement, appelant son jeune ami à l’aide alors qu’il sortait de son porte-clef pour poursuivre en courant.

    Et, s’il n’avait jamais douté des capacités de Gwain, Calixte n’aurait probablement jamais parié sur son sens bienvenu du timing à ce moment précis. La porte du bureau s’ouvrit alors que le majordome allait dépasser celui-ci, lui opposant soudainement la robustesse de son bois, et l’homme s’aplatit dans un bruit mat et une exclamation déconfite étouffée contre celle-ci. Sans perdre de temps, le coursier activa sa télékinésie minimaliste pour extirper une série de liens de son sac-à-dos, et d’un commandement preste ligota prudemment l’homme partiellement assommé.

    - Amenons-le… dans la chambre ? proposa-t-il à son ami en grimaçant à la vue du nez quelque peu désaxé du fuyard. Ou en tout cas à un endroit où on peut l’attacher à autre chose. J’ai peur qu’il ne soit encore plein de ressources…

    Un éclair fusa pour griller les poils de la jambe du prisonnier, et Calixte sursauta.

    - Vren !

    Le teisheba tourbillonna dans un grésillement de mauvais augure à proximité des têtes blondes, avant d’aviser l’épaule de l’aîné d’une arabesque maladroite. Blessée. Vexée.

    Il t’a touché ? Montre-moi.
    Mpf,
    bouda Vreneli en se tassant sur lui-même, refusant de présenter son flanc fourbu.
    - Je vais rapidement examiner Eli, indiqua le coursier à son collègue, tournant de gros yeux vers son familier. Je te laisse le questionner dès qu’il aura un peu recouvré ses esprits, ajouta-t-il en désignant du chef le gisant. D’ailleurs…

    Attrapant son peigne magique, il modifia son aspect capillaire et, d’une impulsion, changea l’illusion de son déguisement magique pour quelque chose de moins seyant, de plus informe. De plus commun. Certainement le majordome l’avait-il entre-aperçu avant qu’il ne se fût coulé dans son porte-clef mais, dans la fièvre du combat, Calixte pouvait décemment espérer que ses traits ne se fussent pas bien ancrés dans l’esprit de l’homme.

    A nous deux, Eli, reprit-il en tendant son peigne à Gwain, si celui-ci voulait changer un peu d’apparence.

    Après tout, ils n’évoluaient présentement pas vraiment dans la légalité.

    ---------------

    Il n’en garderait jamais qu’un vague souvenir, une idée fugace à l’orée de sa conscience. Un rêve aux contours difformes et aux couleurs ternes, effaçant toute notion de logique et de certitude. Et puis, l’arrangeant déroulement des évènements affirmerait cette réalité artificielle, construite par quelques mains manichéennes adeptes des secrets et des subterfuges, et il retrouverait le giron faussement protecteur de son employeur inconnu des autorités, convaincu de la bêtise comme de la traitrise d’autrui. Sans se douter de ramener dans l’antre du loup, les yeux et les oreilles de l’Ombre.

    Il y avait eu un peu de morphiniques, un peu de poudre d’asclius, une pointe d’ascléria, un zest de citirus toxique, quelques objets magiques pour vérifier certains éléments obtenus par la ruse, et quelques techniques pour manipuler l’esprit fragilisé, artificiellement offert. Pour implanter les racines d’une confiance ourlée d’insouciance, de souvenirs remaniés. Et puis, laissant l’homme, à la fois inconscient et disposé à la facilité de mensonges intégrés, les deux espions – l’espion et son ancien collègue – avaient effacé toute trace de leur passage, et s’étaient évanouis dans les ruelles chargées du Grand Port avant que la demeure ne retrouvât ses propriétaires.

    Le jour suivant voyait le couple Lisseo interrogé par l’administration fiscale, alertée quant à ses revenus douteux et son utilisation encore plus équivoque par quelques invités présents à la soirée mondaine organisée par Merem la veille. Puis reçu par les administrations encore moins charitables de la Garde devant la présentation d’une certaine violence acoustique des deux suspects. La peur et le désarroi, semblait-il, développant un peu trop le vocabulaire injurieux de ceux-ci. Pour mieux s’écouler en torrents d’effroi larmoyant, et d’aveux affolés, devant l’implacable – voire bêtement menaçant – entêtement martial.

    L’histoire, la postérité comme les archives se souviendraient, était donc la suivante : la fortune de Jeremiah Lisseo avait brûlé comme fétu du paille à la flamme des dettes que Merem avait malheureusement récupérées de son défunt premier mari, la pension que réclamait Edward – le fils de celle-ci – pour améliorer ses jours en prison, et ses propres soucis de santé arrachant toujours plus de cristaux à ses poches, et l’empêchant d’en récupérer auprès de son travail qu’il ne pouvait plus fournir qu’épisodiquement. Si le cercle vicieux de la maladie ne l’avait pas encore éjecté de son poste de dessinateur au Phobou Enchaîné, il lui en avait tout de même limité l’accès et, de fait, assaini les revenus. S’était alors présenté à eux, quelques lunes plus tôt, via un intermédiaire, providentiel parrain financier, ami d’Edward, qui ne demandait rien d’autre en échange que de passer quelques messages au fils emprisonné, lors des visites réglementaires.

    Et d’utiliser leur influence, ou ce qu’il en restait, pour discréditer progressivement l’actuel régiment occupant le giron du Bastion méridional. Pourquoi ? Le couple ne l’avait pas demandé à leur généreux bienfaiteur. Après tout, l’amour de la femme pour son fils primait sur celui que lui inspiraient les gardes qui avaient séquestré ce dernier, et le crayon acerbe de l’homme ne craignait guère la satire qui forgeait le fer de lance de son travail. Et puis, la perspective peu réjouissante de la mort, et des lunes de souffrance la précédant en l’absence de soins adaptés, posait de formidables œillères.

    Il est possible que, un coursier un peu curieux amenant de pressants courriers à son collègue chargé de l’interrogatoire, ait alors appris que le tissu de calomnies doucement tressé par le couple ait tiré dans ses mailles l’étrange fille du Capitaine Al Rakija. Un peu maladroitement, un peu brusquement. Car le fusain maladif avait eu le malheur de se faire dernièrement trop discret, trop parcimonieux, agaçant son empressé sponsor. Qui était-il ? Ni Merem, ni Jeremiah, ni Edward – interrogé plus tard – n'aurait su dire. Les consignes comme les cristaux ne leur arrivant jamais directement, mais par un vaste réseau de divers moyens de communication. Le cuisinier, entretenu ensuite, attesterait les aveux de ses employeurs.

    Mais sous le couvert ombrageux de ses méthodes officieuses, le pôle d’espionnage soumettrait à sa tête pensante l’implication coupable de celui-ci. Le rôle double et perfide de ce serviteur bien plus loyal au parrain providentiel, qu’à cette famille n’osant pas même évoquer sa participation à certains pans de cette affaire. A son emprise sur eux. A son lien indéniable avec leur bienfaiteur. Au fait que son emploi eût été imposé par ce dernier chez les Lisseo, et qu’il eût été à la fois leur domestique, leur gardien, leur instigateur, et leur geôlier.

    Mais Calixte n’était plus espion et, s’il marqua par habitude dans un coin de ses méninges cette enquête supplémentaire qui n’échapperait guère aux crocs de la Maitre-Espion, il se contenta de la version officielle pour dérouler à la jeune Fedora Sanward, le résultat de leurs recherches. Et l’interrogation persistant sur une possible récidive des méfaits car, après tout, le principal coupable demeurait inconnu.

    Jeremiah Lisseo, cependant, en repentance, offrait sa plume du Phobou Enchainé à la jeune Noble pour redorer son image, en eût-elle envie.
    Fedora SanwardI'm a Barbie girl, in the Barbie world
    Fedora Sanward
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
    Lun 25 Avr 2022 - 16:12 #
    Demande de noble : l'ennemi invisible.
    Avec attention, la jeune noble écoutait les informations qu'on lui rapportait : une histoire abracadabrante selon elle, une famille aisée qui vivaient sous les dettes et qui, de ce fait, avait accepté de trainer dans la boue le nom de la garde mais également le sien, sans l'ombre d'une raison réelle? C'était déplorable et en même temps affreusement triste lorsqu'elle y pense... Comment pouvait-on justifier cet acte de diffamation, cette manière de vouloir attirer des problèmes aux autres pour se tenir loin d'une situation difficile? Ils auraient pu demander de l'aide, sans doute cette famille avait-elle des amis, des proches sur qui compter? Quoi que, s'il y a bien une chose que Fedora a comprit depuis longtemps, c'est que dans la noblesse Aryonnaise, l'avoir est souvent bien plus important que l'être... Sa mère était après tout souvent invité aux soirées mondaines de son vivant. Au final, l'apparence quelque peu particulière de la poupée est sans doute une chance plus qu'autre chose, cela l'a préservée de ce milieu haïssable dans lequel les amitiés se calcule plus qu'elle ne se donne, se font et se défont au rythme des fortunes et des moyens financiers... Une tristesse que la noblesse!

    Au moins cette histoire est terminée, du moins en partie! Le jeune garde qui est venu lui rendre le compte rendu de l'enquête a été honnête : si cette famille, colporteur de ces mensonges éhontés, est bien mise hors d'était de nuire, cela ne signifie pas que l'affaire soit réglée pour autant. Le véritable responsable, le commanditaire et usurier responsable de cette situation dans un premier temps court encore librement dans les rues de la ville... Est-il seulement réellement au grand port ou bien sa calomnie provient-elle d'ailleurs dans les terres vastes et inhospitalières - surtout pour une poupée de tissu - du royaume? Malheureusement, cette affaire est loin d'être terminée pour la jeune noble. Certes, ces rumeurs vont s'arrêter, il suffit de laisser faire le temps. La réalité étant maintenant connue de tous concernant cet ancien dessinateur et sa conjointe, cela devrait s'apaiser. Certain prétendront peut-être que la jeune héritière Sanward a fait joué ses connaissances pour faire arrêter cette noble famille, même devant des preuves et des aveux, certains reste friands de rumeurs après tout mais... Même si avec le temps, cette histoire ne deviendra rien de plus qu'un mauvais souvenir, la poupée n'aura pas le repos temps que le véritable responsable ne sera pas hors d'état de nuire! Après tout, quelqu'un en veut visiblement au bastion du Sud, à son père, et peut-être même à elle! Combien de temps avant que le responsable ne recommence, apportant un nouveau lot de calomnie et de soucis à la demoiselle? Elle ne peut rester sans rien faire face à cette menace invisible...

    Remerciant les gardes pour leur service et leur enquête parfaitement réalisée, elle les laisse prendre congé et quitte ensuite sa demeure sous la chaleur du soleil illuminant le grand port. Il lui faut trouver un moyen de faire sortir de sa cachette le serpent qui semble la prendre pour cible et pour cela, il va lui falloir de l'aide mais vers qui se tourner? La garde a déjà fait ce qu'elle pouvait avec cette enquête, Lin ne pourra rien pour elle non plus... Peut-être la guilde aurait-elle des hommes capables de l'aider? C'est donc sans conviction qu'elle se dirige vers ce lieu.
    Codage par Libella sur Graphiorum
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    Re: [DDN] L'ennemi invisible
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